Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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TRADUCTION/TRANSLATION

 

 

AFFAIRE INTÉRESSANT L’OPPOSITION de 

Primus Telecommunications Management Inc. / Gestion de Télécommunications Primus Inc.

à la demande n877,492

produite au nom de Primus Knowledge Solutions, Inc.

en vue de l’enregistrement de la marque de commerce PRIMUS                                                          

 

Le 7 mai 1998, la requérante Primus Communications Corporation, dont le nom est subséquemment devenu Primus Knowledge Solutions, Inc. a demandé l’enregistrement de la marque de commerce PRIMUS. 

 

La demande est fondée sur l’emploi de la marque au Canada, depuis le 24 avril 1996 au moins, en liaison avec les services (2) ainsi que sur l’emploi et l’enregistrement de la marque aux États‑Unis en liaison avec les marchandises et services (1).

MARCHANDISES :

(1) Logiciels de solution de problèmes utilisés pour créer, stocker, récupérer, distribuer, gérer et conserver une base de connaissances et de solutions à des problèmes se produisant dans des produits de haute technologie.

 

SERVICES :

(1) Services d’informatique, nommément stockage et récupération d’information dans le domaine de l’information de solution de problèmes; fourniture d’information de résolution de problèmes à des utilisateurs multiples au moyen d’un réseau mondial d’informatique.
(2) Services d’informatique pour modification, mise en oeuvre, intégration, installation et soutien de logiciels de gestion des connaissances, et services ayant trait à la gestion de la performance, à la planification et à la mise en oeuvre des processus, et à la conversion des données, relativement à l’utilisation des logiciels de gestion des connaissances, et à la formation relativement à l’utilisation de ces logiciels; services consultatifs en affaires pour la gestion et la diffusion des connaissances au sein des organismes, nommément gestion globale des données, gestion des processus, gestion de la qualité et compte‑rendu sur l’utilisation des connaissances, et services de soutien à l’entreprise ayant trait à la gestion de la performance, à la planification et à la mise en oeuvre des processus, et à la conversion des données, relativement à l’utilisation des logiciels de gestion des connaissances, et à la formation relativement à l’utilisation de ces logiciels. 

 

La demande a été annoncée pour fin d’opposition dans l’édition du Journal des marques de commerce du 1er décembre 1999.  Primus Telecommunications Management Inc. / Gestion de Télécommunications Primus Inc. (l’opposante), a produit une déclaration d’opposition le 1er février 2000.   Voici un résumé des motifs d’opposition qu’elle invoque :

1.            la demande d’enregistrement n’est pas conforme à l’alinéa 30b) de la Loi sur les marques de commerce (la Loi) parce que la requérante n’a pas employé la marque à compter de la date de premier emploi déclarée;

 

2.            la demande d’enregistrement n’est pas conforme à l’alinéa 30d) de la Loi parce que la requérante n’a pas employé la marque comme marque de commerce aux États‑Unis;

 

3.            la demande d’enregistrement n’est pas conforme à l’alinéa 30i) de la Loi parce que la requérante savait ou aurait dû savoir que l’opposante employait déjà la marque de commerce PRIMUS et le nom commercial PRIMUS TELECOMMUNICATIONS MANAGEMENT INC. / GESTION DE TÉLÉCOMMUNICATIONS PRIMUS INC. en liaison avec des services de consultation en gestion;

 

4.            la requérante n’a pas droit à l’enregistrement de la marque, en raison des alinéas 16(1)a) et c) de la Loi, parce que la marque crée de la confusion avec la marque de commerce et le nom commercial antérieurement employés et révélés par l’opposante;

 

5.            la requérante n’a pas droit à l’enregistrement de sa marque, en raison des alinéas 16(2)a) et c) de la Loi, parce que la marque crée de la confusion avec la marque de commerce et le nom commercial antérieurement employés et révélés par l’opposante;

 

6.            la marque de commerce de la requérante n’est pas distinctive car elle ne distingue pas les marchandises et services de la requérante des marchandises et services de l’opposante et n’est pas adaptée à les distinguer du fait qu’elle crée de la confusion avec la marque de commerce et le nom commercial de l’opposante.

 

La requérante a produit et signifié une contre‑déclaration dans laquelle elle nie les allégations de l’opposante.

 

L’opposante a déposé l’affidavit de M. Alan Eugeni et, la requérante, celui de M. Michael A. Brochu.

 

Seule la requérante a déposé un plaidoyer écrit.  Je n’ai pas tenu compte des enregistrements de marques de commerce de tiers joints à ce plaidoyer car ils n’ont pas été régulièrement soumis en preuve.

 

La preuve

L’affidavit de M. Eugeni

M. Eugeni, président de l’opposante, déclare que son entreprise a offert et fourni des services  de consultation en gestion à l’industrie des télécommunications au Canada depuis le 16 mai 1996 au moins.  Il a déposé la copie d’une facture datée du 3 juin 1996 au haut de laquelle apparaît la marque de commerce PRIMUS, ainsi que des copies de factures similaires pour chacune des années 1997  à 2000.  Il a également déposé une carte d’affaires et du papier à en‑tête représentatifs portant la marque de commerce PRIMUS.  Les clients de l’opposante sont des [traduction] « participants du secteur des télécommunications, comme AlphaNet Telecom Inc., Alliances ArtQuest International Inc., Bell Canada … » et des organismes gouvernementaux oeuvrant dans les domaines des télécommunications et du commerce et des relations internationales.  Selon M. Eugeni, la clientèle de son entreprise [traduction] «  s’est principalement constituée par suite de contacts personnels et par le bouche à oreille ».

 

L’affidavit de M. Brochu

M. Brochu, président et directeur général de la requérante, déclare que son entreprise fournit des [traduction] « “ solutions de savoir ” conçues pour permettre aux entreprises et autres entités d’avoir accès à leur information et de l’analyser, la partager et l’améliorer plus efficacement ».  Plus particulièrement, l’entreprise vend des logiciels de [traduction] « résolution de problèmes » ou de [traduction] « solution service‑client » et fournit des services informatiques de consultation, de formation et d’appui technique.  Le témoin déclare aussi que la requérante a adopté la marque de commerce PRIMUS en 1995 et qu’en général ses client sont des grosses sociétés comme Nortel, IBM, Nokia, 3M et Boeing.  Le coût moyen d’un produit ou service PRIMUS est d’environ 100 000 $ et [traduction] « compte tenu de la complexité des systèmes d’information, des réseaux informatiques et des structures de rapport des entreprises [...] la décision d’acheter des produits ou services logiciels importants [...] n’est pas prise précipitamment ou à la légère ».  Il ajoute que les personnes qui prennent les décisions d’achat chez ses clients sont habituellement des gens très instruits et très avertis qui ont de l’expérience dans les achats de produits informatiques.

 

M. Brochu a déposé des pièces pour démontrer comment son entreprise a employé la marque de commerce PRIMUS.  La marque apparaît sur les logiciels et sur les manuels d’utilisation.  Depuis mai 1997 environ, la requérante annonce ses produits et services sur son site web et, en novembre 2001 et janvier 2002, elle a effectué une campagne de marketing direct auprès de clients potentiels au Canada.  M. Brochu a fourni les chiffres des dépenses de publicité annuelles globales de son entreprise, mais il a indiqué qu’elle ne tenait pas de comptabilité séparé des dépenses se rapportant uniquement au Canada.

 

M. Brochu a également déposé des pièces se rapportant aux négociations entreprises avant le mois d’octobre 1995, qui ont mené à la vente de produits et services PRIMUS à une société canadienne au mois d’avril 1996.  Il a aussi fourni des pièces se rapportant à des ventes subséquentes faites à des sociétés canadiennes en 1999, 2000 et 2001.  Les ventes annuelles des produits et services PRIMUS de la requérante au Canada ont généré les chiffres d’affaires approximatifs suivants : 1996 – 300 000 $; 1997 – 375 000 $; 1998 – 650 000 $; 1999 – 95 000 $; 2000 - 100 000 $; 2001 – 450 000 $.

 

M. Brochu termine en affirmant qu’il n’est au courant d’aucun cas de confusion entre la marque PRIMUS de la requérante et la marque de l’opposante et que personne n’a demandé s’il existait un lien entre les deux sociétés.

 

Les motifs d’opposition

Bien que le fardeau de la preuve en matière d'opposition repose en définitive sur la requérante, l'opposante assume le fardeau initial d'établir par une preuve suffisante la véracité de ses allégations

 

Je rejette les deux premiers motifs d’opposition parce que l’opposante ne s’est pas acquittée du fardeau de preuve initial qui lui incombait de démontrer que la requérante n’avait pas employé la marque PRIMUS au Canada ou aux États‑Unis.  La requérante n’avait donc pas à prouver cet emploi, mais sa preuve établit quand même que la marque a été employée au Canada à la date de premier emploi déclarée.

 

Le troisième motif d’opposition est également écarté parce que l’opposante n’a pas fait la preuve initiale, comme il le lui incombait, que la requérante était au courant, à la date de la demande d’enregistrement, de l’existence des droits que l’opposante prétend avoir.  Quoi qu’il en soit, puisque la preuve de la requérante établit qu’elle a employé la marque PRIMUS au Canada avant l’opposante, cette dernière pouvait être convaincue qu’elle avait le droit d’employer la marque PRIMUS.

 

Les quatrième et cinquième motifs d’opposition sont fondés sur les paragraphes 16(1) et (2) de la Loi, dont voici le texte :

16. (1) Tout requérant qui a produit une demande selon l'article 30 en vue de l'enregistrement d'une marque de commerce qui est enregistrable et que le requérant ou son prédécesseur en titre a employée ou fait connaître au Canada en liaison avec des marchandises ou services, a droit, sous réserve de l'article 38, d'en obtenir l'enregistrement à l'égard de ces marchandises ou services, à moins que, à la date où le requérant ou son prédécesseur en titre l'a en premier lieu ainsi employée ou révélée, elle n'ait créé de la confusion :

a) soit avec une marque de commerce antérieurement employée ou révélée au Canada par une autre personne;

b) soit avec une marque de commerce à l'égard de laquelle une demande d'enregistrement avait été antérieurement produite au Canada par une autre personne;

c) soit avec un nom commercial qui avait été antérieurement employé au Canada par une autre personne.

 

(2) Tout requérant qui a produit une demande selon l'article 30 en vue de l'enregistrement d'une marque de commerce qui est enregistrable et que le requérant ou son prédécesseur en titre a dûment déposée dans son pays d'origine, ou pour son pays d'origine, et qu'il a employée en liaison avec des marchandises ou services, a droit, sous réserve de l'article 38, d'en obtenir l'enregistrement à l'égard des marchandises ou services en liaison avec lesquels elle est déposée dans ce pays et a été employée, à moins que, à la date de la production de la demande, en conformité avec l'article 30, elle n'ait créé de la confusion :

a) soit avec une marque de commerce antérieurement employée ou révélée au Canada par une autre personne;

b) soit avec une marque de commerce à l'égard de laquelle une demande d'enregistrement a été antérieurement produite au Canada par une autre personne;

c) soit avec un nom commercial antérieurement employé au Canada par une autre personne.

 

Le quatrième motif d’opposition ne peut être accueilli parce que l’opposante n’a pas démontré qu’elle avait employé sa marque de commerce ou son nom commercial PRIMUS avant la date de premier emploi prouvée par la requérante.

 

Relativement au cinquième motif d’opposition, l’opposante doit prouver qu’elle a employé sa marque de commerce ou son nom commercial avant la production de la demande d’enregistrement de la requérante.  L’opposante ayant fait cette preuve, il me faut donc déterminer s’il existait une probabilité raisonnable de confusion entre les marques des deux parties à la date pertinente du 7 mai 1998.  De la même façon, l’opposante s’étant acquittée de son fardeau de preuve initial relativement au sixième motif d’opposition, je dois examiner s’il existait une probabilité raisonnable de confusion entre les marques des deux parties à la date pertinente du 1er février 2000.  Si l’existence d’un risque de confusion entre les deux marques PRIMUS est peu probable, il en ira de même de celle d’un risque de confusion entre le nom commercial de l’opposante et la marque de commerce de la requérante.

 

Le critère qu'il convient d'appliquer en matière de confusion est celui de la première impression et du souvenir imparfait.  Pour déterminer s'il y a confusion suivant le critère énoncé au paragraphe 6(2) de la Loi, le registraire doit tenir compte de toutes les circonstances de l'espèce, et notamment de celles qui sont expressément énoncées au paragraphe 6(5) de la Loi, à savoir : le caractère distinctif inhérent des marques de commerce et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues; la période pendant laquelle les marques de commerce ont été en usage; le genre de marchandises, services ou entreprises; la nature du commerce; le degré de ressemblance entre les marques de commerce dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu'elles suggèrent.  Le poids à accorder à chacun de ces facteurs peut varier en fonction des circonstances (voir Clorox Co. c. Sears Canada Inc., 41 C.P.R. (3d) 483 (CF 1re inst.); Gainers Inc. c. Tammy L. Marchildon et le Registraire des marques de commerce (1996), 66 C.P.R. (3d) 308 (C.F. 1re inst.)).

 

Les marques de commerce des parties sont identiques, elles possèdent donc le même caractère distinctif inhérent.  Le mot PRIMUS peut avoir une connotation louangeuse.

 

L’addition des honoraires pour services rendus inscrits sur les factures antérieures à 2000 qui ont été déposées en preuve par M. Eugeni m’amènent à conclure que le chiffre des ventes de l’opposante était alors d’environ 200 000 $.  Le chiffre des ventes de la requérante était quant à lui de 1,4 millions de dollars approximativement.  Avant le 7 ai 1998, l’opposante avait réalisé à peu près 110 000 $ de ventes, tandis que les ventes de la requérante se chiffraient à 675 000 $.  Ces données semblent indiquer que la marque de commerce PRIMUS de la requérante était peut‑être mieux connue que celle de l’opposante à chacune des dates pertinentes.

 

Le facteur de la période pendant laquelle les marques de commerce ont été en usage favorise légèrement la requérante.  Peu de renseignements ont été donnés sur le genre d’entreprise des parties et la nature de leur commerce, mais il appert qu’elles cherchent toutes deux à recruter de grosses sociétés comme clientes.  L’opposante fournit des services de consultation en gestion aux participants de l’industrie des télécommunications, tandis que la requérante fournit des logiciels et des services informatiques connexes à des entreprises diverses.  Les marchandises et services de la requérante sont beaucoup plus chers que les services de l’opposante, et la requérante affirme que ses clients sont avertis et bien informés.  L’opposante procède par contacts personnels et se fie sur le bouche à oreille pour recruter ses clients, alors que la requérante a recours à la publicité imprimée, la promotion dans les points de vente, la participation à des expositions commerciales et à un site web.

 

Les marques de commerce sont bien sûr identiques.

 

La déclaration de M. Brochu selon laquelle il n’est au courant d’aucun cas de confusion entre les marques de commerces ou les entreprises des parties en dépit d’au moins cinq ans de coexistence constitue une autre circonstance à prendre en considération.

 

Relativement au motif d’opposition fondé sur le caractère distinctif, l’opposante doit démontrer que la marque de commerce qu’elle invoque avait une notoriété suffisante pour empêcher la marque de la requérante d'acquérir un caractère distinctif [voir Motel 6, Inc. c. No. 6 Motel Ltd. (1981), 56 C.P.R. (2d) 44, p. 58 (C.F. 1re inst.), E. & J. Gallo Winery c. Andres Wines Ltd (1975), 25 C.P.R. (2d) 126, p. 130; [1976] 2 C.F. 3 (C.A.F.) et Park Avenue Furniture Corporation c. Wickes/Simmons Bedding Ltd. (1991), 37 C.P.R. (3d) 412, p. 424 (C.A.F.)].  Selon moi, ça n’est pas le cas parce que la requérante est la première à avoir employé la marque PRIMUS et qu’elle en a fait un emploi plus substantiel que l’opposante.  Je signale également que je ne puis conclure que la marque de l’opposante avait acquis une grande notoriété puisque cette dernière a recruté ses clients au moyen de contacts personnels et du bouche à oreille et qu’elle n’a pas réalisé d’importantes ventes.  Dans les circonstances, je suis d’avis que la probabilité que la marque visée par la demande d’enregistrement ait permis de distinguer les marchandises et services de la requérantes des services de l’opposante dans tout le Canada au 1er février 2000 est prépondérante. 

 

Je conclus également que la requérante a prouvé comme il le lui incombait que la probabilité que sa marque de commerce ne créait pas de confusion avec celle de l’opposante au 7 mars 1998 est prépondérante.  Cette conclusion repose principalement sur l’antériorité de l’emploi de la marque de la requérante et sur l’emploi plus intensif de la marque de la requérante.

 

Décision

En vertu de la délégation de pouvoirs faite par le registraire des marques de commerce sous le régime du paragraphe 63(3) de la Loi sur les marques de commerce, je rejette l’opposition en application du paragraphe 38(8) de la Loi.

 

 

FAIT À TORONTO (ONTARIO), CE 15 SEPTEMBRE 2004

 

 

Jill W. Bradbury                              

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

 

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