Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

THE REGISTRAR OF TRADE-MARKS

Référence : 2012 COMC 151

Date de la décision : 2012-08-01

TRADUCTION

DANS L’AFFAIRE DE L’OPPOSITION produite par Northland Products Company à l’encontre de la demande d’enregistrement no 1130482 pour la marque de commerce NORTHLAND SALES & Dessin au nom de 1324555 Ontario Inc.

 

[1]               Le 8 février 2002, Craig Holdings Inc. a produit une demande d’enregistrement pour la marque NORTHLAND SALES et Dessin (la Marque), reproduite ci-dessous :

NORTHLAND SALES & Design

[2]               La demande couvre les marchandises et services suivants :

Marchandises

1) Mastics époxydes; mastics époxydes pour la réparation du bois; ruban de caoutchouc non adhésif pour les réparations en plomberie, d’automobiles, en électricité, domestiques et d’équipement sportif; produits nettoyants pour vitres; scellants et composés métalliques à température élevée; composés de réparation en plastique et en fibre de verre, lubrifiants, agents pénétrants, antirouilles et agents dégraissants/nettoyants, tous pour utilisation dans l’industrie automobile.

2) Produits antifuites pour pneus, balais d’essuie-glaces, scellants pour moteurs et radiateurs, polis et cires automobiles.

Services

1) Exploitation d’une entreprise spécialisée dans la vente de produits automobiles et domestiques de tiers, y compris composés nettoyants, scellants et de réparation, lubrifiants, agents pénétrants, antirouilles, produits de traitement pour moteurs et carburant, nettoyants d’injecteurs, produits de polissage et cires et laine d’acier.

[3]               Dans la demande, l’emploi de la Marque au Canada est revendiqué depuis au moins 1989 en liaison avec les marchandises énumérées au paragraphe (1) et les services. Par ailleurs, l’emploi projeté de la Marque au Canada y est revendiqué en liaison avec les marchandises énumérées au paragraphe (2).

[4]               Le 30 mai 2002, la demande a été cédée à 1 324 555 Ontario Inc. (la Requérante).

[5]               La demande a été publiée aux fins d’opposition dans le Journal des marques de commerce du 25 avril 2007.

[6]               Le 25 septembre 2007, Northland Products Company (l’Opposante) a produit, à l’encontre de la demande, une déclaration d’opposition dans laquelle elle invoque des motifs d’opposition fondés sur les alinéas 38(2)a), b), c) et d) de la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, ch T-13 (la Loi). La Requérante a produit et signifié une contre-déclaration dans laquelle elle nie les motifs d’opposition.

[7]               À l’appui de son opposition, l’Opposante a produit les affidavits d’Eric Peterson (souscrit le 19 mars 2009) et de James Szumski (souscrit le 23 mars 2009). Dans une lettre datée du 4 juin 2010, son agent a demandé que certains courriels privilégiés concernant des questions sans rapport avec la présente affaire, inclus par inadvertance dans la pièce E‑1 de l’affidavit de M. Szumski, soient supprimés, avec le consentement des agents de la Requérante. La lettre du 16 juin 2010 du registraire répondait favorablement à cette demande.

[8]               La Requérante a contre-interrogé MM. Peterson et Szumski au sujet de leur affidavit respectif et les transcriptions ont été produites.

[9]               La Requérante a choisi de ne produire aucune preuve.

[10]           Les deux parties ont produit un plaidoyer écrit et ont pris part à une audience.

Le fardeau de preuve

[11]           Le fardeau d’établir, selon la prépondérance des probabilités, que sa demande satisfait aux exigences de la Loi incombe à la Requérante. Toutefois, l’Opposante a le fardeau initial de produire une preuve suffisante pour établir la véracité des faits sur lesquels elle appuie chacun de ses motifs d’opposition [voir John Labatt Limited c The Molson Companies Limited (1990), 30 C.P.R. (3d) 293 (CF 1re inst), à la page 298].

La preuve

[12]           Le résumé qui suit porte sur les éléments de la preuve des parties qui me paraissent les plus pertinents pour les questions examinées ci-après.

Affidavit et contre-interrogatoire de M. Petersen

[13]           Monsieur Petersen est le premier vice-président et directeur de l’exploitation de l’Opposante depuis plus de vingt-cinq ans. L’Opposante est établie aux États-Unis d’Amérique, où réside M. Petersen. Ce dernier se rend toutefois au Canada pour affaires environ une fois par mois et possède une maison de campagne ici.

[14]           Au paragraphe 4 de son affidavit, M. Petersen se dit qualifié pour donner son avis et ses opinions sur la probabilité de confusion entre les produits de l’Opposante, notamment ceux de la marque NORTHLAND, et ceux des concurrents. Cependant, je suis tenue d’examiner la question de la probabilité de confusion, laquelle n’exige pas le témoignage d’un expert. Quoi qu’il en soit, il est bien établi que l’avis d’un représentant de l’une des parties sur un tel sujet n’est pas considéré comme pertinent ou impartial. Par conséquent, j’écarte les parties de son témoignage où sont exprimés son avis et ses conclusions quant à la probabilité de confusion.

[15]           Une grande partie du témoignage de M. Petersen constitue son opinion en ce qui a trait à la probabilité de confusion et comporte des conclusions sur la réputation, etc., de l’Opposante au Canada. Les faits principaux, par opposition aux opinions ou conclusions, figurent aux paragraphes 6 à 9 de son affidavit, que je reproduis ci-après :

[traduction
6. Depuis 1908, les secteurs des voies ferrées industrielles, des flottes de navires de charge, du remplissage en usine et des services de remplissage des FEO, de même que les domaines industriels, automobiles et agricoles, n’ont pas cessé de bénéficier des produits supérieurs de [l’Opposante] et de son service axé sur la clientèle. Northland Technical Laboratories, une division de [l’Opposante], offre des services complets d’analyse des huiles et d’évaluation de la performance des lubrifiants dans ses laboratoires ultramodernes.

7. Depuis au moins 1990, [l’Opposante] n’a pas cessé de vendre et de commercialiser au Canada ses produits dans les secteurs des antigels et liquides de refroidissement pour moteurs, des huiles lubrifiantes, des huiles pour moteur, des huiles hydrauliques, des lubrificateurs de transmission, des graisses lubrifiantes et des services d’analyse des huiles et des liquides de refroidissement. Les produits de [l’Opposante], notamment ceux de la marque NORTHLAND, sont vendus dans tout le Canada dans les secteurs industriel, ferroviaire, automobile, agricole, du remplissage en usine et des services de remplissage des FEO.

8. Depuis au moins 1990, [l’Opposante] vend plusieurs de ses produits de la marque NORTHLAND ou des produits de la marque maison à de gros clients et détaillants au Canada. Pour chacune des cinq dernières années au moins, le volume annuel de ces ventes dépassait 1 000 000 $US. Ces clients sont John Deere, Case New Holland, Hitachi, Canadian National Railroad, Canadian Pacific Railroad, RailAmerica et Recochem. Pour chacune des années antérieures, et depuis au moins 1990, ces ventes se chiffraient annuellement entre 100 000 $ et 500 000 $.

9. En mars 2005, Northland Technical Laboratories a ouvert un laboratoire à Toronto (Ontario) qui offre des services d’analyse et d’essais sur les lubrifiants à ses clients canadiens, parmi lesquels figurent John Deere, Canadian National Railroad, RailAmerica et Canadian Pacific Railroad.

[16]           Le contre-interrogatoire de M. Petersen a permis d’obtenir plus de renseignements sur les activités de l’Opposante au Canada; par exemple :

         [traduction] « [En] 1989 environ, [l’Opposante] a commencé à établir des liens directs au Canada avec des clients fabricants d’équipements d’origine (FEO) ainsi qu’avec la Canadian National Railroad et certains des FEO dont les opérations commerciales s’effectuent directement au Canada. » [Q29]

         L’Opposante vend des lubrifiants dans différents contenants allant de pintes à des récipients de 2,5 gallons, en passant par des seaux de 5 gallons, jusqu’au transport de masse [un camion-citerne de 6 500 à 7 000 gallons]; la pinte [traduction] « arbore la marque Northland » et c’est aussi le cas des contenants servant au transport de masse. [Q82-92]

         En plus des FEO et des voies ferrées, les produits de l’Opposante sont aussi vendus à des distributeurs [de lubrifiants et de fournitures industrielles] aux États-Unis qui font affaire au Canada ou qui ont une filiale dans ce pays, mais l’Opposante n’est pas en mesure de préciser quel pourcentage de ces ventes s’effectue au Canada, car elle n’a pas de contrôle direct sur les points de distribution de ses produits, et que ses distributeurs ne lui fournissent pas de renseignements sur leurs ventes [Q128-136]; cependant, l’un des plus grands clients distributeurs de l’Opposante est Recochem, une entreprise canadienne – quoiqu’elle ait [traduction] « distribué certains produits Northland pour nous au Canada sous le nom Northland », l’Opposante [traduction] « lui a [aussi] fourni des produits Northland sous le nom Reco ou encore par l’entremise d’une entreprise tierce ou d’une marque maison appartenant à un de leurs clients aux États-Unis : le produit de l’Opposante pouvait être emballé sous la marque Recochem ou celle de la chaîne de véhicules automobiles, du grand magasin ou du commerce de gros où cette entreprise commercialise ses produits, c’est-à-dire sous une marque maison » [Q137-144].

         Les consommateurs (les particuliers) peuvent se rendre chez un détaillant Case New Holland ou John Deere pour se procurer les lubrifiants de l’Opposante destinés aux équipements tels que les tracteurs, les automobiles, les camions et la machinerie lourde [Q162-171]; cependant, l’étiquette de certains produits vendus par l’Opposante ne porte pas le nom Northland; par exemple, certains produits vendus à John Deere arborent la marque John Deere, et non la marque Northland, et M. Petersen n’a même pas pu donner une idée de la répartition des activités liées aux marques maison et aux produits de marque Northland [Q179-186]; Case New Holland achète également à l’Opposante des produits commercialisés sous la marque maison [Q238-243].

         Lorsque l’Opposante vend son produit dans des wagons de 20 000 gallons à des entreprises ferroviaires, le nom Northland n’apparaît pas dessus; M. Petersen affirme cependant que ce produit portait la marque Northland puisque l’acheteur le choisit en fonction de la marque et que les documents d’autorisation, les contrats d’approvisionnement et autres pièces de ce genre mentionnent la marque [Q197-204].

[17]           Monsieur Petersen a décrit ce qui lui semblait être deux cas de confusion entre les marchandises/services des parties. Il a également fourni des détails sur ce qu’il avait pu apprendre au sujet des activités de la Requérante.

Affidavit et contre-interrogatoire de M. Szumski

[18]           Les paragraphes 1 et 2 de l’affidavit de M. Szumski sont les suivants :

[traduction

1.      Je suis stagiaire en droit chez Borden Ladner Gervais s.r.l. (BLG), le cabinet qui représente l’Opposante, et à ce titre, je suis au fait des points abordés ci-après dans ma déposition. Si je n’en ai pas une connaissance personnelle, j’ai précisé la source de mes renseignements que je crois véridiques.

2.      Dans les bureaux de BLG, j’ai accès aux dossiers se rapportant à la présente affaire et à l’Opposante visée en l’espèce, et les ai examinés pour les besoins du présent affidavit.

[19]           Monsieur Szumski a fourni des pièces concernant des marques de tierces parties (dont la pertinence n’a pas été expliquée), les activités de la Requérante, l’emploi de la marque par l’Opposante et ses ventes.

[20]           Voici ce qu’il fournit concernant la Requérante :

         [traduction] « une copie du dossier no 898553 se rapportant à la demande d’enregistrement pour la marque de commerce NORTHLAND, produite le 4 décembre 1998 par l’Opposante », constitue la pièce A; la Requérante s’était opposée à cette demande : elle verse à titre de pièce B une copie de l’affidavit d’Eric T. Chong qu’elle avait produit, l’accompagnant seulement de certaines des pièces qui y étaient jointes;

         [traduction] la pièce E‑1 consiste en « des versions imprimées de pages du site Web de la Requérante, accessible à l’adresse URL suivante : http://www.northlandsales.ca », (datées du 11 mars 2009);

         [traduction] la pièce F‑1 consiste en « des versions imprimées de pages du site Web de la Requérante, accessible à l’adresse URL suivante : http://www.nlsproducts.ca », (datées du 12 mars 2009).

[21]           Après s’être reporté à l’affidavit de M. Petersen, M. Szumski atteste ce qui suit aux paragraphes 13 et 14 :

[traduction

13.    L’Opposante a produit, à l’appui de l’affidavit de M. Petersen, (i) des chiffres de ventes au Canada pour ses produits de la marque maison et ceux de la marque NORTHLAND, à titre d’exemple; (ii) des échantillons de dépliants et d’étiquettes pour illustrer l’emploi des marques maison et de sa marque Northland en liaison avec ses produits. Toutefois, ces chiffres de ventes et échantillons de dépliants et d’étiquettes n’ont pas été inclus dans l’affidavit de M. Petersen en raison de problèmes inévitables de calendrier et d’itinéraire, mentionnés dans la lettre du 16 mars 2009 que BLG a adressée au Bureau des marques de commerce. La pièce H jointe à mon affidavit consiste en une copie de cette lettre. Ces chiffres de ventes et échantillons de dépliants ont plutôt été transmis directement à BLG pour être intégrés à mon affidavit.

14.    J’ai examiné ces chiffres de ventes et échantillons de dépliants et d’étiquettes; je crois en vérité, comme m’en a informé M. Petersen, que :

a)      la pièce I jointe à mon affidavit consiste en des copies de factures de vente de produits de la marque maison et de la marque NORTHLAND fabriqués par l’Opposante au Canada, comme l’indique l’affidavit de M. Petersen;

b)      la pièce J jointe à mon affidavit consiste en des copies d’étiquettes de la marque maison et de la marque NORTHLAND employées en liaison avec les produits de l’Opposante au Canada, comme l’indique l’affidavit de M. Petersen.

[22]           Je tiens à préciser que même si M. Szumski affirme que M. Petersen ne fournit pas dans son affidavit de chiffres de ventes, il faisait sans doute référence à des factures puisque l’affidavit de M. Petersen fait bel et bien état de chiffres de ventes. Par ailleurs, d’après le contre-interrogatoire de M. Szumski, la pièce J était en fait constituée des factures de vente, et la pièce I consistait en les étiquettes, et non l’inverse.

[23]           Dans le cadre de son contre-interrogatoire, M. Szumski a déclaré que c’est M. Katul, alors associé chez BLG, qui lui avait demandé de souscrire un affidavit [Q16-17]. À la question de savoir où il avait obtenu les documents qu’il avait joints à titre de pièce A, M. Szumski a répondu que M. Katul les lui avait montrés et qu’il ignorait où il se les était procurés [Q23-24]. L’avocat de l’Opposante est intervenu en disant qu’il s’agissait d’une copie certifiée, mais l’avocat de la Requérante a souligné à raison que c’était en fait la photocopie d’une copie certifiée. Après avoir débattu sur ce point, les avocats ont convenu que la pièce A ne contenait pas tous les documents se rapportant au dossier de demande no 898553, par exemple, les transcriptions des contre-interrogatoires. Monsieur Szumski n’a pas eu son mot à dire sur les pièces qui seraient incluses ou exclues [Q37]. De même, M. Katul lui a présenté les documents fournis à titre de pièce B, sans lui expliquer pourquoi certaines pièces avaient été supprimées [Q41]. Concernant les pièces E‑1 et F‑1, M. Szumski avait préparé des captures d’écran des pages Web et les avait envoyées à M. Katul, qui les a imprimées [Q44].

[24]           Durant son contre-interrogatoire, M. Szumski a indiqué qu’il ignorait les détails concernant les [traduction] « problèmes inévitables de calendrier et d’itinéraire » qu’il avait évoqués, ces termes ayant été repris de la lettre qu’il a jointe à titre de pièce H [Q-50-51].

[25]           Lors de leurs communications, MM. Szumski et Petersen ont eu l’échange suivant :

[traduction

Q52  Avez-vous eu des conversations avec M. Petersen? Lui avez-vous parlé au téléphone ou par d’autres moyens?

[Avocat de l’Opposante] : Sur cette question?

Q53  À n’importe quel sujet?

R      Je lui ai parlé et j’ai examiné certains courriels, mais je ne pense pas lui avoir parlé à ce moment-là en personne.

Q54  Donc, vous lui avez parlé au téléphone?

R      Non, pas au téléphone.

Q55  Je parle de la période antérieure à l’affidavit que vous avez souscrit.

R      Non, pas au téléphone.

Q56  Vous ne lui avez pas parlé au téléphone…

R      Non.

Q57  … en mars 2009?

R      Non.

Q58  Avez-vous communiqué avec lui par courriel?

R      Oui.

Q59  Et quel était l’objet de cette communication?

R      Un courriel que j’avais examiné et qui décrivait les chiffres de vente et les étiquettes mentionnées au paragraphe 14 de l’affidavit.

Q60  Et lorsque vous parlez d’un courriel que vous avez examiné, vous l’avait-il envoyé?

R      Il l’avait envoyé à M. Katul, et je l’ai examiné.

Q61  D’accord. Donc, vous ne lui avez ni parlé ni envoyé de courriel directement?

R      Non.

[26]           Lors du réinterrogatoire de M. Szumski, son avocat lui a dit : [traduction] « Mon collègue vous a questionné au sujet des conversations que vous avez eues avec M. Petersen, et vous avez indiqué que vous vous étiez bien entretenu avec lui. Quel était l’objet de ces discussions? » Monsieur Szumski a répondu : [traduction] « J’ai parlé aujourd’hui à M. Petersen, qui a confirmé que les pièces I et J de mon affidavit correspondaient aux chiffres de vente et aux étiquettes qui y sont mentionnées. »

[27]           La preuve qui repose sur des renseignements et des croyances constitue à première vue une preuve par ouï-dire irrecevable, à moins qu’elle ne satisfasse aux critères de la nécessité et de la fiabilité [voir Labatt Brewing Company Limited c Molson Breweries, a Partnership (1996), 68 CPR (3d) 216 (CF 1re inst.)]. La Requérante a fait valoir que la plus grande partie, si ce n’est la totalité, de la preuve de M. Szumski, constituait une preuve par ouï-dire irrecevable.

[28]           Les principales observations de l’Opposante en réponse à cette objection concernaient les pièces I et J jointes à l’affidavit de M. Szumski. L’Opposante semble convenir que ces pièces constituent du ouï-dire, mais avance qu’elles devraient néanmoins être prises en compte. Elle soutient notamment que l’exigence de nécessité a été remplie au moyen de la déclaration de M. Szumski selon laquelle ces documents n’ont pas été inclus dans l’affidavit de M. Petersen [traduction] « en raison de problèmes inévitables de calendrier et d’itinéraire mentionnés dans la lettre du 16 mars 2009 que BLG a adressée au Bureau des marques de commerce ». Cependant, je ne crois pas qu’il était nécessaire qu’un stagiaire en droit produise ces documents, plutôt qu’un employé averti de l’Opposante.

[29]           La mention de [traduction] « problèmes inévitables de calendrier et d’itinéraire » me semble vague. Je remarque d’ailleurs que la lettre d’où cette phrase est tirée n’invoque pas ces problèmes inévitables pour justifier l’absence des factures et des étiquettes en annexe à l’affidavit de M. Petersen. Cette lettre (pièce H) invoque les problèmes en question pour demander que délai de production de la preuve soir prorogé de sept jours. Voici, plus précisément, le texte de la lettre : [traduction] « la prorogation de sept jours est nécessaire pour permettre à l’Opposante, qui est établie dans un autre pays, de signer son affidavit devant un commissaire à l’assermentation, d’en retourner la version originale à ses agents pour qu’ils la produisent devant la Commission des oppositions – l’impossibilité pour l’Opposante de souscrire son affidavit et de le retourner à temps à son agent découlait de conflits de calendrier et d’itinéraires imprévisibles et inévitables ». De plus, cette lettre constituait une version préliminaire de l’affidavit de M. Petersen au soutien de la demande de prorogation, et elle ne renvoyait à aucune pièce jointe. Nous ignorons donc pourquoi les factures et les étiquettes n’ont pas été introduites par M. Petersen (ou un autre employé averti de l’Opposante). Le « critère de la nécessité » signifie que la preuve par ouï-dire est nécessaire pour prouver un fait contesté. Je ne vois pas en quoi il était nécessaire de produire ces documents de l’Opposante par le biais d’une tierce partie, et j’estime qu’entre les mains de M. Szumski, ceux-ci (pièces I et J jointes à l’affidavit de M. Szumski) constituent une preuve par ouï-dire irrecevable.

[30]           L’Opposante fait valoir que la plupart des autres pièces produites par M. Szumski relèvent du domaine public. Son agent a également fait observer que l’opposition précédente était pertinente en raison de la probabilité de confusion entre les marques/noms des parties invoquée par la Requérante. Dans l’ensemble, les arguments de fond de l’Opposante en l’espèce ne reposent sur aucune autre partie du témoignage de M. Szumski que les pièces I et J. Comme l’opposante ne se fonde sur aucune autre partie du témoignage, je ne crois pas nécessaire de me prononcer de façon détaillée sur son admissibilité. Qu’il suffise de dire qu’en règle générale, les pièces préparées par des tiers ne satisfont pas au critère de « la fiabilité et la nécessité » en vertu duquel une preuve par ouï-dire devient recevable.

Le motif d’opposition fondé sur les alinéas 38(2)a)/30a)

[31]           L’Opposante fait valoir que la demande n’est pas conforme à l’alinéa 30a) de la Loi en ce qu’elle ne contient pas d’état, dressé dans les termes ordinaires du commerce, des marchandises et services spécifiques visés par la demande.

[32]           Au paragraphe 33 de son plaidoyer écrit, l’Opposante explique davantage sa prétention :

[traduction]

La portée de l’expression « l’industrie automobile », dans le segment « composés de réparation en plastique et en fibre de verre, lubrifiants, agents pénétrants, antirouilles et agents dégraissants/nettoyants, tous pour utilisation dans l’industrie automobile », n’est pas claire. Il n’est pas certain que lorsqu’ils achètent et emploient ces marchandises pour l’entretien mineur de leurs propres voitures, les acheteurs au détail se livrent à une « utilisation dans l’industrie automobile ». La phrase n’est pas claire et n’est pas énoncée dans les termes ordinaires du commerce.

[33]           Je déduis de l’observation qui précède que le motif d’opposition fondé sur l’alinéa 30a) que l’Opposante invoque ne porte pas sur les marchandises et de services qu’elle n’a pas précisées.

[34]           À l’audience, la Requérante a fait remarquer que l’Opposante n’avait pas allégué dans sa déclaration que l’expression « dans l’industrie automobile » était vague. Bien que ce soit le cas, je fais remarquer que la Requérante n’a pas indiqué dans sa contre-déclaration que ce moyen n’était pas valablement invoqué.

[35]           L’expression « tous pour utilisation dans l’industrie automobile » a été ajoutée par la Requérante après que l’examinateur lui eut indiqué qu’elle désignait correctement le domaine auquel les marchandises susmentionnées se rapportaient. Rien ne prouve qu’il ne s’agit pas d’un terme ordinaire du commerce, et l’expression paraît clairement signifier que les marchandises associées peuvent servir à la fabrication, à la réparation ou à l’entretien de véhicules automobiles.

[36]           Par conséquent, je rejette le motif d’opposition fondé sur l’alinéa 30a).

[37]           Dans son plaidoyer écrit, l’Opposante s’interroge sur l’identité des consommateurs cibles des marchandises censées être destinées à « l’utilisation dans l’industrie automobile », mais cela ne semble pas pertinent pour un motif d’opposition fondé sur l’alinéa 30a). À l’audience, l’agent de l’Opposante a fait valoir que si ce motif n’était pas retenu, l’expression « dans l’industrie automobile » devrait recouvrir de manière générale les utilisateurs finaux ou les voies commerciales qui se rattachent à ces marchandises lorsqu’il s’agira d’évaluer la probabilité de confusion relativement à d’autres motifs. Je suis d’accord.

Le motif d’opposition fondé sur les alinéas 38(2)a)/30b)

[38]           L’Opposante soutient que la demande n’est pas conforme à l’alinéa 30b) de la Loi [traduction] « parce que la Requérante n’a pas employé la Marque comme une marque de commerce en liaison avec les marchandises énumérées au paragraphe 1) et 2) visées par la demande au Canada, et qu’aucune date précise de premier emploi n’est revendiquée dans la demande. »

[39]           Je constate que l’Opposante ne conteste pas dans le cadre de ce motif l’emploi de la marque par la Requérante à l’égard des services. De plus, comme les marchandises énumérées au paragraphe 2) relevaient d’une demande fondée sur un emploi projeté de la Marque, et non sur l’emploi de la Marque, un motif d’opposition fondé sur l’alinéa 30b) ne peut les concerner. Par conséquent, je n’examinerai ce motif qu’à l’égard des marchandises énumérées au paragraphe 1).

[40]           La date pertinente pour le motif fondé sur l’alinéa 30b) est la date de production de la demande [voir Georgia-Pacific Corp c Scott Paper Ltd (1984), 3 CPR (3d) 469 (COMC), à la page 475]. L’opposante qui allègue que la requérante ne respecte pas l’alinéa 30b) ne doit s’acquitter que d’un léger fardeau de preuve [voir Tune Masters c Mr P’s Mastertune Ignition Services Ltd (1986), 10 CPR (3d) 84 (COMC), à la page 89].

[41]           La Requérante n’ayant produit aucune preuve, l’Opposante doit s’acquitter de son léger fardeau initial en présentant la sienne. Elle prétend que c’est ce qu’elle a fait en présentant les éléments de preuve suivants : premièrement, la déclaration de M. Petersen selon laquelle il ne connaissait pas de produits commercialisés au Canada sous la Marque, malgré le fait qu’il disait bien connaître le marché pertinent; deuxièmement, son autre déclaration voulant que la Requérante ne soit qu’un simple distributeur de produits fabriqués par des tiers.

[42]           Dans le premier cas, la déclaration de M. Petersen reposait sur le fait qu’il disait connaître le marché pertinent et sur l’enquête qu’il a effectuée lorsqu’il a entendu parler de la Requérante pour la première fois. Monsieur Petersen a affirmé durant le contre-interrogatoire qu’assez tôt dans la relation entre l’Opposante et John Deere au Canada, [traduction] « quelqu’un avait communiqué avec nous au sujet de Northland Sales, tenant pour acquis que Northland Products Company et Northland Sales étaient la même entité ». [Q260] Il est entré dans les détails à la Q269 :

[traduction]

Voilà – nous préparions – d’après mes souvenirs, nous préparions le produit en vue de sa distribution au Canada, et ils mettaient au point les renseignements pour le fournisseur au Canada, d’après eux – ils ont tenu pour acquis que Northland Products Company et Northland Sales étaient la même entité, nous avons dû clarifier les choses et démontrer qu’effectivement ce n’était pas le cas. À ce moment-là, je ne connaissais pas Northland Sales et je pense qu’ils étaient à cette époque – j’ignore quelles étaient leurs activités ou pourquoi Deere les connaissait.

[43]           Monsieur Petersen s’est alors [traduction] « rendu dans certaines régions où [la Requérante aurait pu] distribuer son produit, pour savoir si elle s’était assurée que sa marque était bien présente sur le marché… [mais] en a appris très peu » [Q271-272]. Il précise qu’il a commencé [traduction] « à mieux connaître Rizlone, parce que [il savait] qu’ils faisaient la redistribution… C’était le seul produit que j’ai réussi à trouver et qui a effectivement fait l’objet d’une vaste distribution » [Q275-276] (je ne suis pas certaine de savoir à quoi exactement M. Petersen fait ici référence). Lorsqu’on lui a demandé comment il avait appris que la Requérante était [traduction] « un simple distributeur de produits fabriqués par des tiers », M. Petersen a répondu : [traduction] « D’après mes propres recherches et celles qui sont mentionnées dans notre affidavit, rien n’indique qu’ils vendaient un produit de marque NORTHLAND sur le marché. » [Q279] Monsieur Petersen a également déclaré qu’il avait essayé de trouver des produits de la Requérante chez Canadian Tire, Home Hardware et peut-être Beaver Lumber, mais que Canadian Tire vendait surtout sa marque maison et que ses recherches personnelles avaient été limitées [Q281 et 285-287]. (Je fais remarquer que, dans la mesure où les marchandises de la Requérante se rapportent à l’industrie automobile, Home Hardware et Beaver Lumber pourraient ne pas forcément être des endroits privilégiés pour trouver ses produits.)

[44]           Pour étayer sa prétention selon laquelle l’Opposante ne s’est pas acquittée de son fardeau initial à l’égard de ce motif, la Requérante invoque la décision Weetabix Ltd c Alpina Productos Alimenticios SA (2011), 93 CPR (4th) 54 (COMC). Dans cette affaire, la preuve qui aurait permis à l’opposante de s’acquitter de son fardeau initial au titre de l’alinéa 30b) émanait d’un cadre qui se disait bien connaître le marché pertinent et qui, ayant cherché à savoir si les marchandises arborant la marque en cause étaient offertes au Canada, n’avait rien trouvé. Madame Robitaille, membre de la COMC, a estimé que cela ne suffisait pas à décharger l’opposante de son fardeau initial et que la requérante n’était pas tenue d’établir l’emploi de sa marque. L’Opposante fait valoir qu’il fallait établir une distinction entre l’affaire Weetabix et la présente espèce parce que M. Petersen a consacré d’importants efforts à son enquête. Or, ce dernier ayant déclaré que ses recherches personnelles avaient été limitées, je ne crois pas que cet élément de preuve soit beaucoup plus convaincant que celui qui a été présenté à la Commission dans Weetabix.

[45]           Monsieur Petersen affirme également au paragraphe 10 de son affidavit que [traduction] « rien n’indiquait que la Requérante offrait sur son site Web (à l’adresse www.northlandsales.ca) des produits de marque NORTHLAND SALES ou NORTHLAND SALES et Dessin ». Cependant M. Petersen a souscrit son affidavit en 2009 et n’a pas précisé à quelle date il a consulté le site Web (la période pertinente au titre de l’alinéa 30b) va du 31 décembre 1989 au 8 février 2002). Cet élément de preuve ne permet donc pas à l’Opposante de s’acquitter de son fardeau initial.

[46]           Comme nous l’avons déjà mentionné, l’Opposante s’appuie également sur la déclaration de M. Petersen selon laquelle la Requérante est [traduction] « un simple distributeur de produits fabriqués par des tiers ». Cependant, comme l’indique la décision Yamamoto & Co (America) Inc et al c Mccabe (1985), 4 CPR (3d) 9 (COMC), à la page 16, [traduction] « [un] distributeur peut, bien entendu, employer une marque de commerce et acquérir des droits à son égard dans certaines circonstances ». Je n’accorderai donc aucune importance à l’allégation de M. Petersen voulant que la Requérante soit un distributeur.

[47]           Le motif d’opposition fondé sur l’alinéa 30b) est rejeté, l’Opposante ne s’étant pas acquittée de son fardeau de preuve initial.

Le motif d’opposition fondé sur les alinéas 38(2)a)/30e)

[48]           L’Opposante soumet que la demande n’est pas conforme à l’alinéa 30e) de la Loi [traduction] « en ce que la Requérante n’avait pas et n’a toujours pas l’intention d’employer la [M]arque comme marque de commerce en liaison avec les marchandises énumérées aux paragraphes 1) et 2), que ce soit elle-même ou par l’entremise d’un licencié ». Comme les marchandises énumérées au paragraphe 1) ne sont visées par la demande que sur le fondement de leur emploi, un motif fondé sur l’alinéa 30e) ne peut les concerner. Je n’examinerai donc ce motif d’opposition qu’à l’égard des marchandises énumérées au paragraphe 2).

[49]           L’Opposante fait valoir que la Requérante n’avait aucune intention d’employer la Marque puisqu’elle est un distributeur de marchandises fabriquées par des tiers. Pour étayer sa prétention, elle se rapporte aux mêmes éléments de preuve que ceux qu’elle avait invoqués à l’égard du motif d’opposition fondé sur l’alinéa 30b).

[50]           Comme il est difficile pour l’opposante de prouver l’intention qu’avait la requérante lorsqu’elle a produit sa demande, son fardeau initial à l’égard d’un motif d’opposition fondé sur l’alinéa 30e) sera forcément léger. Cependant, j’estime que l’Opposante ne s’est pas acquittée de son fardeau initial en l’espèce, car même si la Requérante n’est qu’un distributeur, cela ne l’empêcherait pas d’avoir l’intention d’employer sa Marque en liaison avec des marchandises.

[51]           Par conséquent, le motif d’opposition fondé sur l’alinéa 30e) est rejeté.

Le motif d’opposition fondé sur les alinéas 38(2)a)/30i)

[52]           L’Opposante fait valoir que la demande n’est pas conforme à l’alinéa 30i) de la Loi [traduction] « en ce que la Requérante ne pouvait et ne peut être convaincue qu’elle avait le droit d’employer la [M]arque au Canada en liaison avec les marchandises et services décrits dans la demande, pour les motifs énoncés aux alinéas 2c), d), f) et g) à m) [de la déclaration d’opposition]. » Cependant, lorsque la requérante fournit la déclaration exigée par l’alinéa 30i), le motif d’opposition fondé sur cette disposition ne devrait être retenu que dans des cas exceptionnels, notamment lorsqu’il y a une preuve de mauvaise foi de la part de la requérante, ce qui n’est pas le cas en l’espèce [voir Sapodilla Co Ltd c Bristol-Myers Co (1974), 15 CPR. (2d) 152 (COMC), à la page 155]. Par conséquent, le motif d’opposition fondé sur l’alinéa 30i) est rejeté.

Les motifs d’opposition fondés sur l’alinéa 38(2)c) et sur l’article 16

[53]           L’Opposante a avancé plusieurs motifs d’opposition fondés sur l’article 16, à savoir :

1.      suivant l’alinéa 16(1)a), la Requérante n’a pas le droit de faire enregistrer la Marque en liaison avec les marchandises énumérées au paragraphe 1) et les services décrits dans la demande puisqu’à la date de premier emploi qu’A revendiquée la Requérante ou son prédécesseur en titre, la Marque créait de la confusion avec la marque de commerce NORTHLAND de l’Opposante, déjà employée et révélée au Canada par cette dernière en liaison avec la vente et la distribution d’« antigels et liquides de refroidissement pour moteurs à combustion, [d’]huiles de graissage, [d’]huiles à moteur, [d’]huiles hydrauliques, [de] lubrifiants de transmission et [de] graisses de lubrification, [traduction]  de services d’analyse des huiles et de liquides de refroidissement [les Marchandises et Services de l’Opposante];

2.      suivant l’alinéa 16(1)a), la Requérante n’a pas le droit de faire enregistrer la Marque en liaison avec les marchandises énumérées au paragraphe 1) et les services décrits dans la demande puisqu’à la date de premier emploi revendiquée par la Requérante ou son prédécesseur en titre, la Marque créait de la confusion avec la marque de commerce NORTHLAND TECHNICAL LABORATORIES de l’Opposante, déjà révélée au Canada par cette dernière en liaison avec les services [traduction] « d’analyse d’huiles neuves et usagées et d’évaluation de la performance des lubrifiants »;

3.      suivant l’alinéa 16(1)c), la Requérante n’a pas le droit de faire enregistrer la Marque en liaison avec les marchandises énumérées au paragraphe 1) et les services décrits dans la demande puisqu’à la date de premier emploi revendiquée par la Requérante ou son prédécesseur en titre, la Marque créait de la confusion avec (i) les noms commerciaux NORTHLAND PRODUCTS COMPANY, NORTHLAND PRODUCTS et NORTHLAND de l’Opposante, déjà employés au Canada par celle-ci; (ii) différents noms commerciaux NORTHLAND ou comprenant ce mot, qui ont été et qui sont employés au Canada en liaison avec divers marchandises et services;

4.      suivant l’alinéa 16(3)a), la Requérante n’a pas le droit de faire enregistrer la Marque en liaison avec les marchandises énumérées au paragraphe 2) décrites dans la demande puisqu’à la date de production de la demande, la Marque créait de la confusion avec la marque de commerce NORTHLAND de l’Opposante, déjà employée et révélée au Canada par cette dernière en liaison avec ses Marchandises et Services;

5.      suivant l’alinéa 16(3)c), la Requérante n’a pas le droit de faire enregistrer la Marque en liaison avec les marchandises énumérées au paragraphe 2) décrites dans la demande puisqu’à la date de la demande, la Marque créait de la confusion avec (i) les noms commerciaux NORTHLAND PRODUCTS COMPANY, NORTHLAND PRODUCTS et NORTHLAND de l’Opposante, déjà employés au Canada par celle-ci dans le cours de ses affaires, et (ii) différents noms commerciaux NORTHLAND ou comprenant ce mot, qui ont été et qui sont employés au Canada en liaison avec divers marchandises et services;

[54]           Comme l’a fait remarquer la Requérante, l’opposante ne se fonder sur l’emploi antérieur d’une marque ou d’un nom commercial ou sur le fait qu’elle les a révélés conformément à l’article 16 (voir le paragraphe 17(1)). Par conséquent, les motifs d’opposition 3(ii) et 5(ii) ne sont pas valides.

[55]           Pour s’acquitter de son fardeau initial relativement aux motifs d’opposition fondés sur l’alinéa 16(1)a), l’Opposante doit prouver que les marques invoquées avaient été employées ou révélées au Canada avant le 31 décembre 1989. Une marque de commerce est révélée si elle remplit le critère énoncé à l’article 5 de la Loi, c’est-à-dire s’il est établi qu’elle est devenue bien connue au Canada du fait de la distribution ou de l’annonce des marchandises ou services de l’Opposante en liaison avec la marque dans une région importante du Canada [Marineland Inc c Marine Wonderland and Animal Park Ltd (1974), 16 CPR (2d) 97 (CF 1re inst)].

[56]           Pour s’acquitter de son fardeau initial relativement au motif d’opposition fondé sur l’alinéa 16(1)c), l’Opposante doit prouver que les noms commerciaux invoqués avaient été employés au Canada avant le 31 décembre 1989.

[57]           Pour s’acquitter de son fardeau initial relativement au motif d’opposition fondé sur l’alinéa 16(3)a), l’Opposante doit prouver que les marques invoquées ont été employées ou révélées au Canada avant le 8 février 2002.

[58]           Pour s’acquitter de son fardeau initial relativement au motif d’opposition fondé sur l’alinéa 16(3)c), l’Opposante doit prouver que les noms commerciaux invoqués ont été employés au Canada avant le 8 février 2002.

[59]           Monsieur Petersen n’a fourni aucune pièce pour montrer comment les marques ou les noms de son entreprise ont été employés. De plus, il a indiqué que les activités de celle-ci au Canada remontaient à [traduction] « au moins 1990 » et à [traduction] « 1989 environ ». À l’évidence, son témoignage ne permet pas à l’Opposante de s’acquitter de son fardeau initial à l’égard des alinéas 16(1)a) ou c). Je fais également remarquer que l’affidavit de M. Szumski ne renvoie à aucun élément de preuve (recevable ou non) qui airait permis à l’Opposante de s’acquitter de son fardeau initial relativement à ces motifs. Par conséquent, les motifs d’opposition fondés sur les alinéas 16(1)a) et c) sont tous rejetés.

[60]           J’examinerai maintenant la preuve à compter du 8 février 2002.

[61]           Rien n’indique que la marque NORTHLAND de l’Opposante ait jamais été révélée conformément à l’article 5 : les arguments fondés sur l’alinéa 16(3)a) se rapportant à la révélation de la marque ne peuvent donc être retenus.

[62]           Comme nous l’avons déjà mentionné, M. Petersen n’a joint aucune pièce pour établir comment les marques ou les noms de son entreprise ont été employés. Durant son contre-interrogatoire, il a déclaré que les marchandises étaient de marque NORTHLAND, mais comme je n’ai pu voir de quelle manière les marchandises [traduction] « portaient la marque », je ne peux conclure que l’emploi de la marque de commerce NORTHLAND était fidèle à l’article 4 de la Loi. Le mot « emploi » est un terme juridique défini dans cette disposition, et il faut examiner les éléments de preuve produits pour établir s’il y a bien eu un emploi d’une marque de commerce en liaison avec des marchandises et services au sens de l’article 4.

[63]           Monsieur Szumski a tenté d’introduire [traduction] « des copies d’étiquettes de la marque maison et de la marque NORTHLAND employées en liaison avec les produits de l’Opposante au Canada, telles qu’elles sont mentionnées dans l’affidavit de M. Petersen » mais, comme il n’a pas été possible de contre-interroger M. Szumski sur ces pièces, je les ai jugées irrecevables. Je ne dispose donc d’aucune preuve indiquant que l’Opposante n’ait jamais employé la marque NORTHLAND comme marque de commerce au Canada, encore moins avant le 8 février 2002.

[64]           De même, aucun élément de preuve recevable n’établit que l’Opposante a employé l’un de ses noms commerciaux au Canada avant cette date.

[65]           Tous les motifs d’opposition fondés sur l’article 16 sont donc rejetés, car l’Opposante ne s’est pas acquittée de son fardeau initial.

Le motif d’opposition fondé sur le caractère distinctif

[66]           L’Opposante fait valoir que la Marque n’est pas distinctive en ce qu’elle ne permet pas de distinguer les marchandises et services de la Requérante de ceux d’autres propriétaires, ni n’est-elle adaptée à le faire, plus particulièrement :

(i)                 la famille des marques de commerce, noms commerciaux et noms de domaine NORTHLAND de l’Opposante, qui sont et ont été employés et révélés au Canada;

(ii)               les noms commerciaux NORTHLAND TECHNICAL LABORATORIES et NORTHLAND TECHNICAL LABORATORIES CORP. de l’Opposante, qui sont et ont été employés et révélés au Canada en liaison avec les [traduction] « services d’analyse d’huiles neuves et usagées et d’évaluation de la performance des lubrifiants »;

(iii)             l’emploi de la Marque a été indûment autorisé sous licence en liaison avec les marchandises énumérées aux paragraphes 1) et 2), et s’effectue d’une manière impropre à distinguer la source de ces marchandises;

(iv)             on dénombre trois demandes de tierces parties et huit enregistrements de tierces parties de marques de commerce comprenant le terme NORTHLAND;

(v)               différentes marques de commerce sans nom, dont les noms commerciaux sont NORTHLAND ou incluent ce terme, sont ou ont été employés au Canada en liaison avec divers marchandises et services;

(vi)             [traduction] « l’emploi répandu au Canada du mot NORTHLAND dans des noms commerciaux et noms d’entreprise »;

(vii)           [traduction] « l’emploi répandu du mot NORTHLAND dans les noms de domaine au Canada »;

(viii)         [traduction] « la connotation du mot NORTHLAND »;

(ix)             « l’état du registre ».

[67]           La date pertinente pour ce qui est de ce motif est la date de production de l’opposition, soit le 25 septembre 2007 [Metro-Goldwyn-Mayer Inc c Stargate Connections Inc (2004), 34 CPR (4th) 317 (CF)]. Cependant, l’Opposante ne s’est acquittée de son fardeau initial à l’égard d’aucun volet de l’argument sur le caractère distinctif. Quant à ses propres marques et noms, sur lesquels elle s’appuie, je ne peux conclure qu’ils ont acquis une réputation suffisante au Canada à la date pertinente en l’absence d’éléments de preuve recevables établissant la manière dont ces marques ou ces noms ont été révélés dans ce pays. L’Opposante a choisi de ne soumettre aucune observation à l’appui de son allégué dans la mesure où elle invoque d’autres motifs, et la preuve ne lui permet pas de s’acquitter de son fardeau initial à cet égard.

[68]           Par conséquent, le motif d’opposition fondé sur le caractère distinctif est entièrement rejeté.

Les motifs d’opposition fondés sur les alinéas 38(2)b)/12(1)d)

[69]           L’Opposante fait valoir que la Marque n’est pas enregistrable suivant l’alinéa 12(1)d) de la Loi parce qu’elle crée de la confusion avec les marques de commerce déposées de tiers que voici :

1.                  NORTHLAND – enregistrement no LMC493456

2.                  NORTHLAND – enregistrement no LMC441572

3.                  NORTHLANDER – enregistrement no LMC148143

4.                  NORTHLAND – enregistrement no LMC221770

5.                  NORTHUMBERLAND PAINTS – enregistrement no LMC297556

6.                  NORTHLAND STONE – enregistrement no LMC696423

7.                  NORTHLAND POWER CHIPS – enregistrement no LMC659 26

8.                  NORTHLAND POWER – enregistrement no LMC575544.

 

[70]           La date pertinente pour évaluer un motif d’opposition fondé sur l’alinéa 12(1)d) est la date de ma décision [voir Park Avenue Furniture Corporation c Wickes/Simmons Bedding Ltd et le Registraire des marques de commerce (1991), 37 CPR (3d) 413 (CAF)].

[71]           Exerçant le pouvoir discrétionnaire du registraire, j’ai consulté le registre pour vérifier l’existence de l’enregistrement invoqué par l’Opposante [voir Quaker Oats of Canada Ltd./La Compagnie Quaker Oats du Canada Ltée c. Menu Foods Ltd. (1986), 11 C.P.R. (3d) 410 (COMC)]. L’enregistrement no LMC441 72 a été radié en 2010, mais les autres enregistrements invoqués existent encore : l’Opposante ne s’est donc pas acquittée de son fardeau initial à l’égard de ces sept enregistrements au titre de l’alinéa 12(1)d).

[72]           Le paragraphe 6(2) de la Loi prévoit que l’emploi d’une marque de commerce crée de la confusion avec une autre marque de commerce lorsque l’emploi des deux marques de commerce dans la même région serait susceptible de faire conclure que les marchandises liées à ces marques de commerce sont fabriquées, vendues, données à bail ou louées, ou que les services liés à ces marques sont loués ou exécutés, par la même personne, que ces marchandises ou ces services soient ou non de la même catégorie générale.

[73]           Le test en matière de confusion est une affaire de première impression et de vagues souvenirs. Lorsqu’il l’applique, le registraire doit tenir compte de toutes les circonstances de l’espèce, notamment celles qui sont expressément mentionnées au paragraphe 6(5) de la Loi : a) le caractère distinctif inhérent des marques de commerce et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues; b) la période pendant laquelle les marques de commerce ont été en usage; c) le genre de marchandises, services ou entreprises; d) la nature du commerce; e) le degré de ressemblance entre les marques de commerce dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’elles suggèrent. Chacun de ces critères ne se verra pas nécessairement accorder le même poids. [Voir, de façon générale, Mattel, Inc. c. 3 894 207 Canada Inc. (2006), 49 C.P.R. (4th) 321 (CSC), Veuve Cliquot Ponsardin c Boutiques Cliquot Ltée (2006), 49 CPR (4th) 401 (CSC), et Masterpiece Inc c Alavida Lifestyles Inc (2011), 92 CPR (4th) 361 (CSC).]

[74]           Je constate que chacun des enregistrements invoqués appartient à un tiers différent, et qu’ils visent divers marchandises et services, dont pas un seul ne recoupe ceux de la Requérante ou n’est employé dans l’industrie automobile.

[75]           Bien qu’elle n’ait présenté aucune observation à l’égard des motifs d’opposition fondés sur l’alinéa 12(1)d), l’Opposante a bien fait savoir qu’elle n’entendait pas abandonner les motifs.

[76]           La Requérante a présenté des observations succinctes selon lesquelles les motifs d’opposition fondés sur l’alinéa 12(1)d) sont sans fondement compte tenu des différences entre les marques, les marchandises et les services de chacun des enregistrements invoqués et les siens.

[77]           En l’espèce, il n’y a pas lieu d’analyser de façon approfondie la probabilité de confusion. Bien que la Marque ait en commun le mot NORTHLAND avec certaines des marques déposées, il ne s’agit pas d’un terme intrinsèquement fort et rien n’indique que les marques enregistrées sont devenues connues. Les marchandises, les services, les entreprises ou les voies commerciales des parties ne se chevauchent pas et rien n’indique qu’ils soient reliés.

[78]           Après avoir examiné toutes les circonstances de l’espèce, je conclus qu’il n’existe aucune probabilité raisonnable de confusion entre les marques en cause. Je ne peux conclure que les marques déposées ont droit à une protection assez large pour empêcher l’enregistrement de la Marque, compte tenu des différences distinctes entre les marchandises et services qui leur sont associés.

[79]           Par conséquent, les motifs fondés sur l’alinéa 12(1)d) sont rejetés.

Les motifs d’opposition fondés sur les alinéas 38(2)b)/12(1)e)

[80]           L’Opposante fait valoir que la Marque n’était et n’est toujours pas enregistrable suivant l’alinéa 12(1)e) de la Loi en ce sens qu’il s’agit d’une marque dont l’adoption est interdite en vertu de l’article 9, étant composée des marques officielles suivantes de tiers, ou leur ressemblant au point qu’on pourrait vraisemblablement les confondre : ONTARIO NORTHLAND et Dessin, ONTARIO’S NORTHLAND et Dessin, THE GREAT ONTARIO NORTHLAND et Dessin, NORTHLAND PARK et Dessin, NORTHLANDS PARK, EDMONTON NORTHLANDS et Dessin et EDMONTON NORTHLANDS.

[81]           Bien qu’elle n’ait présenté aucune observation relativement aux motifs d’opposition fondés sur l’alinéa 12(1)e), l’Opposante a clairement fait savoir qu’elle n’entendait pas les abandonner. La Requérante prétend que la Marque n’est composée d’aucune des marques officielles invoquées, et qu’elle ne leur ressemble pas au point d’être confondue avec elles; je suis d’accord, car les différences sont suffisantes entre la Marque et chacune d’entre elles.

[82]           Les motifs d’opposition fondés sur l’alinéa 12(1)e) sont donc rejetés.

Décision

[83]           En vertu du pouvoir qui m’est conféré en vertu du paragraphe 63(3) de la Loi, je rejette l’opposition conformément au paragraphe 38(8) de la Loi.

______________________________

Jill W. Bradbury

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

 

Traduction certifiée conforme

Linda Brisebois, LL.B.

 

 

 

 

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