Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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TRADUCTION/TRANSLATION

LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

THE REGISTRAR OF TRADE-MARKS

                                                                                        Référence : 2011 COMC 62

Date de la décision : 2011-04-19

DANS L’AFFAIRE DE L’OPPOSITION produite par Kost Klip Manufacturing Ltd. à l’encontre de la demande d’enregistrement no 1305933 pour la marque de commerce CLEARVISION au nom de BGI Holdings Inc.

Le dossier

[1]        Le 19 juin 2006, BGI Holdings Inc. a produit une demande d’enregistrement pour la marque de commerce CLEARVISION fondée sur l’emploi projeté au Canada en liaison avec des reliures.

[2]        La demande a été annoncée aux fins d’opposition dans le Journal des marques de commerce du 17 janvier 2007 et a fait l’objet d’une opposition par Kost Klip Manufacturing Ltd. le 30 mars 2007.

[3]        Le registraire a fait parvenir une copie de la déclaration d’opposition à la requérante le 12 avril 2007, conformément au par. 38(5) de la Loi sur les marques de commerce, L.R.C. 1985, ch. T-13. La requérante a répondu en produisant et en signifiant une contre-déclaration, dans laquelle elle nie en général les allégations contenues dans la déclaration d’opposition.

[4]        La preuve de l’opposante comporte les affidavits de Mel N. Mercier et de Melissa Lyn Heywood. La preuve de la requérante comporte l’affidavit de J.L. Bolokoski. Chacune des parties a produit un plaidoyer écrit, mais seule l’opposante était représentée à l’audience du 15 mars 2011.

 

La déclaration d’opposition

[5]        Le premier motif d’opposition, fondé sur l’al. 12(1)d) de la Loi sur les marques de commerce, indique que la marque CLEARVISION visée par la demande n’est pas enregistrable parce qu’elle crée de la confusion avec la marque de commerce déposée CLEARVISION de l’opposante, visant les marchandises suivantes : « assistance promotionnelle pour points de vente, nommément porte‑étiquettes et porte‑affiches. »

[6]        Le deuxième motif, fondé sur l’al. 16(3)a) de la Loi, indique que la requérante n’a pas le droit d’enregistrer la marque visée par la demande parce qu’à la date de production de la demande, elle créait de la confusion avec la marque de l’opposante, laquelle est employée et révélée au Canada depuis au moins l’année 2000.

[7]        Le troisième motif, fondé sur l’al. 30a), indique que le terme « reliures » précisant les marchandises de la requérante n’est pas un terme ordinaire du commerce et est par conséquent inacceptable. À cet égard, l’opposante cite le Manuel des marchandises et des services, daté du 18 janvier 2006, qui indique que le terme « reliures » doit être défini plus précisément.

[8]        Le quatrième motif, fondé sur l’al. 30i), indique que la requérante ne pouvait être convaincue qu’elle avait le droit d’employer la marque visée par la demande parce qu’elle connaissait ou aurait dû connaître la marque CLEARVISION de l’opposante.

[9]        Le cinquième motif, fondé sur l’article 2, indique que la marque visée par la demande n’est pas adaptée à distinguer les marchandises de la requérante de celles de l’opposante.

 

La preuve de l’opposante

Mel Mercier

[10]      Monsieur Mercier atteste qu’il est le vice‑président des opérations de l’opposante. L’opposante a été constituée en personne morale en 1969 et se situe à Port Coquitlam, en Colombie‑Britannique. L’opposante est l’un des principaux fournisseurs d’assistance promotionnelle pour points de vente aux détaillants au Canada et aux États‑Unis. Ses produits sont utilisés par des épiceries, des magasins à rayons, des pharmacies et des quincailleries bien connus. Les produits de l’opposante sont constitués de porte‑étiquettes en PVC et de porte‑affiches en métal et en plastique, qui sont joints aux éléments de rayonnage afin d’annoncer le prix des produits, les spéciaux en magasin, les coupons et les concours.

[11]      Le revenu brut annuel moyen des produits CLEARVISION s’élève à environ quatre à six millions de dollars. De 2000 à 2007, l’opposante a dépensé environ 150 000 $ à 220 000 $ par année pour la publicité, notamment pour son site Web. Sont joints, à titre de pièces à l’affidavit de M. Mercier, des extraits de ses catalogues de produits montrant les produits CLEARVISION de l’opposante et des exemples de l’emploi de sa marque en liaison avec ses marchandises.

[12]      Monsieur Mercier affirme que l’entité Bolder Graphics est une filiale de BGI Holdings Inc. (la requérante en l’espèce) et fait directement concurrence à l’opposante dans la promotion de produits de présentation. De plus, l’opposante a vendu un « présentoir à pains » CLEARVISION à Bolder Graphics.

 

Melissa Heywood

[13]      Madame Heywood atteste qu’elle est agente de marques de commerce ayant de l’expérience dans la recherche de marques de commerce. Elle a reçu le mandat d’effectuer diverses recherches informatisées, dont [traduction] « une recherche dans le registre canadien des marques de commerce afin de repérer toutes les marques de commerce actives comportant les mots CLEAR et VISION (ou leur équivalent phonétique) ». Les résultats de la recherche sont joints à son affidavit à titre de pièce A. Je souligne que plusieurs marques de tiers ont été repérées, notamment CLEARVISION en liaison avec des enceintes de sécurité et autres produits connexes; CLEARVISION en liaison avec une solution saline pour verres de contact; CLEAR VISION en liaison avec des préparations pour soins des ongles; AUTOCLEAR VISION en liaison avec de la peinture pour automobile et autres produits connexes; et EXTREME CLEAR VISION en liaison avec un produit hydrophobe pour pare‑brise.

[14]      Madame Heywood a également effectué des recherches sur Internet relativement à l’entité Bolder Graphics. Les résultats de ses recherches sont joints à son affidavit. Son témoignage étaye celui de M. Mercier selon lequel Bolder Graphics est une filiale de la requérante BGI Holdings Inc., ou qu’elle est du moins étroitement affiliée à la requérante. Dans la pièce F jointe à l’affidavit de Mme Heywood, Bolder Graphics atteste qu’elle est :

[traduction]

Une société à exploitation diversifiée de droit privé qui a vu le jour à partir d’une société de fabrication de feuilles mobiles à la fin des années 80 et qui offre maintenant de la publicité pour les points de vente et des produits d’impression commerciaux.

 

[15]      De plus, la requérante BGI Holdings Inc. est propriétaire de la marque déposée BOLDERGRAPHICS employée en liaison avec les marchandises suivantes :

(1) produits de point d’achat, nommément […] des enseignes de kiosque en chrome, affichettes de comptoir, papillons publicitaires, étalages publicitaires […] enseignes, affiches […] cartes-tentes…

(2) feuilles mobiles personnalisées, nommément reliures, pochettes et petits sacs, intercalaires à onglet, chemises de classement, étiquettes d’identification… (3) produits d’impression commerciaux, nommément catalogues, rapports annuels, magazines, chemises de présentation, calendriers, brochures, documents d’identité de marque…

 

[16]      La pièce L jointe à l’affidavit de Mme Heywood montre les dispositions du Manuel des marchandises et des services invoquées à l’appui du troisième motif dans la déclaration d’opposition. Dans sa version anglaise, le manuel indique qu’il existe différents types de « binders » [liants ou reliures], par exemple des « chemical binders » [liants chimiques], des « machines that reap and tie grains » [machines qui récoltent et qui lient les grains] et divers types de « stationery binders » [classeurs pour articles de papeterie]. Les requérants sont tenus d’indiquer un type particulier de reliures (ou liants).

[17]      La pièce M jointe à l’affidavit de Mme Heywood comprend des demandes d’enregistrement de marque de commerce et des enregistrements de marque de commerce dans lesquels plusieurs tiers ont décrit leurs marchandises de différentes manières, comme des reliures à catalogues; des reliures de listes; des reliures à anneaux; des reliures à feuilles mobiles; des reliures à anneaux pour feuilles mobiles; des classeurs à anneaux pour le bureau; des reliures à trois anneaux; des reliures à anneaux métalliques; et des articles de papeterie, nommément reliures.

 

 

La preuve de la requérante

J. L. Bolokoski

[18]      Monsieur Bolokoski atteste qu’il est le président de la requérante. La requérante exerce ses activités depuis plus de 40 ans et se situe à Calgary, en Alberta. La requérante emploie sa marque CLEARVISION en liaison avec des reliures depuis juillet 2006, c’est‑à‑dire depuis peu de temps après la production de la présente demande. La requérante vend ses produits par l’entremise de représentants de commerce qui entretiennent une relation personnalisée avec le client. Les produits sont personnalisés selon les précisions du client. Monsieur Bolokoski explique que [traduction] « la relation avec le client est très détaillée afin de lui fournir les nombreuses options qui viennent avec les produits ».

[19]      La marque de commerce CLEARVISION est employée en liaison avec des reliures en vinyle. Les reliures sont conçues selon les précisions du client, et une fois qu’elles sont terminées, elles sont enveloppées d’un revêtement en plastique transparent pour protéger les dessins afin que les particularités du dessin puissent être vues. La marque CLEARVISION n’apparaît pas sur la reliure même [traduction] « pour des raisons évidentes ».

[20]      La requérante vend également des reliures CLEARVISION non personnalisées. Dans ce cas, le client choisit une reliure CLEARVISION parmi celles qui se trouvent en stock. La marque de commerce CLEARVISION apparaît sur la facture du client et sur un bordereau de livraison ou de marchandises à l’intérieur de la boîte d’expédition. Le bordereau indique ce qui se trouve dans la boîte. Les pièces jointes à l’affidavit de M. Bolokoski illustrent les produits de la requérante et l’emploi de la marque CLEARVISION. Il ressort des pièces que le produit le plus populaire est une reliure à trois anneaux de un à trois pouces.

[21]      Les reliures CLEARVISION de la requérante ne sont pas vendues en magasin et ne sont disponibles qu’en faisant directement affaires avec la requérante. Parmi les clients de la requérante, on retrouve notamment des grandes entreprises, des sociétés pétrolières et gazières, des cabinets d’avocats et des firmes d’ingénierie qui emploient les reliures à l’interne. Aucun des clients de la requérante n’est une société de vente au détail. Les produits de la requérante sont vendus surtout en Alberta et en Colombie‑Britannique et occasionnellement en Ontario et en Saskatchewan. Les revenus produits par la marque CLEARVISION se sont élevés en moyenne à 500 000 $ par année pour la période de 2006 à 2008. La requérante dépense environ 80 000 $ à 100 000 $ par année pour la publicité, principalement sur la commandite des fonctions et des événements liés au Stampede, de courses sur route de 10 kilomètres et de tournois de golf. Des renseignements concernant les produits de la requérante sont également disponibles sur son site Web. 

[22]      Au paragraphe 17 de son affidavit, M. Bolokoski précise d’autres produits fabriqués par la requérante, dont des mégaphones, des plaques d’immatriculation, des plaques d’identité, des porte-boîtiers et des couvertures de menu. Monsieur Bolokoski affirme également ce qui suit :

[traduction]

La Requérante soutient qu’elle n’est pas directement en concurrence avec l’Opposante, comme elle l’indique. Si la Requérante doit commander des produits pour aider ses clients, elle commandera les produits d’autres sources qui lui livrent les marchandises directement. C’est ce qui s’est produit lorsque l’Opposante a expédié un « présentoir à pains » à la Requérante, puisque cette dernière n’en vend pas.

 

[23]      Enfin, M. Bolokoski affirme qu’il n’y a pas eu de confusion sur le marché entre les reliures CLEARVISION de la requérante et les produits CLEARVISION de l’opposante depuis que la requérante a commencé à employer sa marque en juillet 2006.

 

Le fardeau de preuve

[24]      Il incombe à la requérante d’établir que sa demande ne contrevient pas aux dispositions de la Loi sur les marques de commerce, contrairement à ce qu’allègue l’opposante dans sa déclaration d’opposition. Le fardeau imposé à la requérante signifie qu’en l’absence d’une conclusion décisive au terme de la production de l’ensemble des éléments de preuve, la question doit être tranchée à l’encontre de la requérante.  Cependant, conformément aux règles de preuve habituelles, l’opposante a également le fardeau de prouver la véracité des faits sur lesquels elle appuie chacun des motifs invoqués dans sa déclaration d’opposition : voir John Labatt Limited c. The Molson Companies Limited, 30 C.P.R. (3d) 293, p. 298. L’existence d’un fardeau incombant à l’opposante au sujet d’une question en particulier signifie que cette question ne pourra être prise en considération que s’il existe des éléments de preuve suffisants à partir desquels on pourrait raisonnablement conclure à l’existence des faits allégués à l’appui de cette question.

 

Les troisième et quatrième motifs d’opposition

[25]      Le troisième motif d’opposition porte sur le non‑respect de l’al. 30a) de la Loi sur les marques de commerce. L’alinéa 30a) a été analysé ainsi dans Style-Kraft Sportswear Ltd. c. One Step Beyond Ltd. (1993), 51 C.P.R. (3d) 271 (C.O.M.C.) :

[traduction]

…l’al. 30a) de la Loi prévoit ce qui suit :

    30.     Quiconque sollicite l’enregistrement d’une marque de commerce produit au bureau du registraire une demande renfermant :

    a)     un état, dressé dans les termes ordinaires du commerce, des marchandises ou services spécifiques en liaison avec lesquels la marque a été employée ou sera employée;

Il incombe à la requérante de démontrer qu’elle respecte les dispositions de l’al. 30a) de la Loi : voir la décision relative à l’opposition dans Joseph E. Seagram & Sons Ltd. c. Seagram Real Estate Ltd. (1984), 3 C.P.R. (3d) 325, p. 329-330, ainsi que la décision John Labatt Ltd. c. Molson Companies Ltd. (1990), 30 C.P.R. (3d) 293, 36 F.T.R. 70 (C.F. 1re inst.). L’opposante a toutefois le fardeau de prouver ses allégations de faits à l’appui de ce motif. En l’espèce, ce fardeau est moins lourd concernant la question du non‑respect de l’al. 30a) de la Loi puisque la requérante avait connaissance des faits : voir les décisions Molson Breweries c. Pernod Ricard S.A. (1991), 40 C.P.R. (3d) 102, p. 106, 50 F.T.R. 215, 30 A.C.W.S. (3d) 409 (1re inst.), et Tune Masters c. Mr. P’s Mastertune (1986), 10 C.P.R. (3d) 84 (C.O.M.C.), p. 89. Le fardeau allégé ressort du fait que les marchandises visées par la demande étaient fondées sur l’emploi projeté, et il est donc très difficile pour l’opposante de prouver l’intention de la requérante puisqu’elle n’a pas encore commencé à employer sa marque : voir la décision relative à l’opposition dans Procter & Gamble Inc. c. Morlee Corp. (1993), 48 C.P.R. (3d) 377, p. 382. La date pertinente pour l’appréciation des circonstances entourant le non‑respect de l’al. 30a) de la Loi est la date de la production de la demande

 

[26]      Je soulignerais d’abord qu’en ce qui concerne le troisième motif d’opposition, qui s’appuie au moins en partie sur le Manuel des marchandises et des services (voir le paragraphe 7, ci‑dessus), la Commission n’est pas liée par les procédures administratives appliquées par d’autres sections de l’Office de la propriété intellectuelle du Canada. Quoi qu’il en soit, j’estime que l’opposante s’est du moins acquittée de son fardeau de preuve, au moyen des pièces L et M de l’affidavit de Mme Heywood (voir les paragraphes 16 et 17, ci‑dessus), de remettre en cause la question de savoir si le terme « reliures » en soi identifie les marchandises de la requérante dans des termes ordinaires du commerce. De plus, la requérante n’a pas répliqué à l’allégation de l’opposante. Par conséquent, le troisième motif est accueilli parce que le respect de l’al. 30a) a été remis en cause et la requérante ne s’est pas acquittée du fardeau de preuve qui lui incombait de démontrer, selon la prépondérance des probabilités habituelle, que sa demande est conforme à l’al. 30a). La demande pourrait donc être refusée à l’égard du troisième motif d’opposition.

[27]      S’agissant du quatrième motif, l’al. 30i) s’applique lorsque la fraude est alléguée par un requérant ou lorsqu’une disposition réglementaire fédérale particulière empêche l’enregistrement de la marque visée par la demande [voir Sapodilla Co. Ltd. c. Bristol‑Myers Co. (1974), 15 C.P.R. (2d) 152 (C.O.M.C.), p. 155, et Société canadienne des postes c. le Registraire des marques de commerce (1991), 40 C.P.R. (3d) 221]. En l’espèce, les allégations n’étayent pas le motif d’opposition fondé sur l’al. 30i), qui est par conséquent rejeté.

 

Les autres motifs et les dates pertinentes

[28]      La question déterminante en l’espèce à l’égard des autres motifs d’opposition est celle de savoir si la marque CLEARVISION visée par la demande employée en liaison avec des classeurs pour articles de papeterie crée de la confusion avec la marque CLEARVISION de l’opposante employée en liaison avec des porte‑étiquettes et des porte‑affiches. Il incombe à la requérante de prouver qu’il n’y aurait aucune probabilité raisonnable de confusion au sens du par. 6(2) de la Loi, reproduit ci‑dessous : 

L’emploi d’une marque de commerce crée de la confusion avec une autre marque de commerce lorsque l’emploi des deux marques de commerce dans la même région serait susceptible de faire conclure que les marchandises liées à ces marques de commerce sont fabriquées […]  par la même personne, que ces marchandises […] soient ou non de la même catégorie générale.

 

[29]      Par conséquent, le par. 6(2) ne porte pas sur la confusion des marques elles‑mêmes, mais sur la confusion menant à conclure que les biens d’une source proviennent d’une autre source. En l’espèce, la question soulevée par le par. 6(2) est celle de savoir si l’emploi des deux marques de commerce serait susceptible de faire conclure que les reliures fabriquées par la requérante sont fournies, licenciées ou approuvées par l’opposante.

[30]      Les dates pertinentes pour examiner la question de la confusion sont : (i) la date de la décision à l’égard du premier motif d’opposition fondé sur le caractère non enregistrable : voir Andres Wines Ltd. c. E & J Gallo Winery (1975), 25 C.P.R. (2d) 126 (C.A.F.), p. 130, et Park Avenue Furniture Corporation c. Wickes/Simmons Bedding Ltd. (1991), 37 C.P.R. (3d) 413 (C.A.F.), p. 424; (ii) la date de production de la demande, en l’occurrence le 19 juin 2006, en ce qui a trait au deuxième motif d’opposition fondé sur l’absence de droit à l’enregistrement : voir l’al. 16(3)a) de la Loi sur les marques de commerce; et (iii) la date de l’opposition, en l’occurrence le 30 mars 2007, en ce qui a trait au cinquième motif d’opposition fondé sur l’absence de caractère distinctif : voir Andres Wines Ltd. c. E. & J Gallo Winery (1975), 25 C.P.R. (2d) 126 (C.A.F.), p. 130, et Clarco Communications Ltd. c. Sassy Publishers Inc. (1994), 54 C.P.R. (3d) 418 (C.F. 1re inst.). Dans les circonstances de l’espèce, rien ne repose sur la question de savoir si la confusion est évaluée à une date pertinente en particulier.

 

Le test en matière de confusion

[31]     Le test applicable en matière de confusion est celui de la première impression et du souvenir imparfait. Les facteurs à prendre en considération pour établir si deux marques créent de la confusion sont énumérés au par. 6(5) de la Loi : le caractère distinctif inhérent des marques et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues; la période pendant laquelle chacune d’elles a été en usage; le genre de marchandises, de services ou d’entreprises; la nature du commerce; et le degré de ressemblance entre les marques dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’elles suggèrent. Cette liste n’est pas exhaustive; tous les facteurs pertinents doivent être pris en considération. Tous les facteurs n’ont pas nécessairement le même poids. Le poids à accorder à chacun d’entre eux dépend des circonstances : voir Gainers Inc. c. Tammy L. Marchildon et le Registraire des marques de commerce (1996), 66 C.P.R. (3d) 308 (C.F. 1re inst.).

 

Examen des facteurs prévus au paragraphe 6(5)

[32]      La marque CLEARVISION visée par la demande possède un caractère distinctif inhérent relativement faible parce qu’elle est composée de deux mots communs utilisés quotidiennement et parce qu’elle laisse supposer que les reliures de la requérante présentent des renseignements facilement visibles. De même, la marque de l’opposante possède un caractère distinctif inhérent relativement faible et laisse supposer que les porte‑étiquettes et les porte‑affiches présenteront des étiquettes et des affiches facilement visibles. La marque visée par la demande n’a pas acquis de caractère distinctif aux dates pertinentes les plus anciennes puisque la demande est fondée sur l’emploi projeté. Toutefois, je déduis de la preuve de la requérante que sa marque a acquis un certain caractère distinctif aux dates pertinentes les plus récentes au moyen de ventes et d’annonces publicitaires ayant commencé en juillet 2006. La preuve de M. Mercier n’indique pas clairement la partie des chiffres de vente et de publicité de l’opposante qui est liée aux États-Unis et celle qui est liée au Canada. Comme il incombe à l’opposante de prouver tous les aspects de ses arguments, je ne suis pas prêt à conclure qu’il existe plus qu’une réputation minimale pour sa marque au Canada à toutes les dates pertinentes.

[33]      La période pendant laquelle les marques en cause ont été en usage favorise l’opposante puisqu’elle a commencé à employer sa marque CLEARVISION en 2000, c’est‑à‑dire environ six ans avant que la requérante commence à employer sa marque CLEARVISION. Cependant, puisque l’opposante n’a pas établi la portée de l’emploi de sa marque au Canada, la période pendant laquelle les marques ont été en usage est un facteur secondaire.

[34]      Selon la preuve versée au dossier, j’accepte les observations de la requérante à la page 15 de son plaidoyer écrit selon lesquelles la nature des marchandises des parties sont fondamentalement différentes à l’égard des marchandises vendues sous sa marque CLEARVISION :

[traduction]

Les marchandises de la Requérante sont des reliures, et cette dernière offre des services complets à ses clients relativement à des solutions en matière d’emballage et d’affichage, de la conception à la distribution de produits. La Requérante fournit également des services personnalisés et spécialisés aux entreprises clientes pour la production et la présentation de documents administratifs. Les marchandises de l’Opposante visent des produits de points d’achat, à savoir des porte‑étiquettes et des porte‑affiches. De plus, l’Opposante offre de l’assistance promotionnelle pour points de vente aux détaillants.

 

[35]      Je n’accepte pas le point de vue de l’opposante selon lequel les parties se font directement concurrence à l’égard des marchandises vendues sous leurs marques CLEARVISION. Il me semble qu’il peut y avoir un certain chevauchement dans les activités et les voies de commercialisation des parties en ce qui a trait aux marchandises et services fournis par la requérante sous sa marque BOLDERGRAPHICS, mais ces activités n’ont pas d’importance majeure quant à la question de la confusion concernant les marques CLEARVISION des parties. Bien entendu, s’agissant du dernier facteur prévu au par. 6(5), les marques en cause sont identiques.

[36]      Compte tenu de ce qui précède, et compte tenu en particulier du caractère distinctif inhérent faible des marques en cause, du défaut de l’opposante d’établir que sa marque a acquis une solide réputation au Canada et des différences entre les marchandises des parties vendues sous leurs marques CLEARVISION, j’estime qu’à toutes les dates pertinentes, la requérante a démontré selon la prépondérance des probabilités qu’il n’y a aucune probabilité de confusion.

 

Décision

[37]      Compte tenu de ma conclusion au paragraphe 25, ci‑dessus, à l’égard du troisième motif d’opposition, la demande doit être repoussée. La présente décision a été rendue en vertu des pouvoirs qui m’ont été délégués conformément au par. 63(3) de la Loi sur les marques de commerce.

 

 

 

[38]      J’ajouterais que si la requérante avait modifié sa demande pour préciser plus clairement ses marchandises, l’issue de la présente procédure l’aurait probablement favorisé. 

 

 

 

___________________

Myer Herzig                            

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

 

 

Traduction certifiée conforme

Mylène Boudreau, B.A. en trad.

 

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