Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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THE REGISTRAR OF TRADE-MARKS

LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

Référence : 2013 COMC 159

Date de la décision : 2013-09-27

 

TRADUCTION

DANS L’AFFAIRE DE LA PROCÉDURE DE RADIATION EN VERTU DE L’ARTICLE 45 engagée à la demande de Hudson’s Bay Co., visant l’enregistrement no LMC597,698 de la marque de commerce BOMBAY KIDS & Dessin au nom de Bombay & Co. Inc.

[1]               Le 25 janvier 2011, à la demande de Hudson’s Bay Co. (la Partie requérante), le Registraire a donné l'avis prévu à l'article 45 de la Loi sur les marques de commerce, L.R.C. 1985, ch. T-13 (la Loi) à Bombay & Co. Inc. (l'Inscrivante), propriétaire inscrit de l'enregistrement noLMC597,698 pour la marque de commerce BOMBAY KIDS & Dessin (la Marque), illustrée ci-dessous :

BOMBAY KIDS & Design

[2]               La Marque est enregistrée aux fins d'emploi en liaison avec les marchandises suivantes :

Ameublement, nommément chaises, causeuses, canapés, berceuses, lits, ottomanes, têtes de lits, armoires, tables, tables de nuit, bureaux, tabourets, chiffonniers, chaises berçantes, baldaquins, piédestaux, piédestaux de rangement, bibliothèques, coffres, bureaux, bureaux pour ordinateurs, huches et coffres à tiroirs; accessoires pour la maison, nommément mobiles, casiers, plaques d’identité, boîtes à bijoux, miroirs, cubes-sièges, cadres, unités murales de rangement et consoles murales, arrêts de chatières, piédestaux, porte-pièces, porte-magazines et bibelots; literie, couvertures, courtepointes, couvre-lits, jetés, juponnages de lit, volants de lit, taies d’oreiller à volant, oreillers, oreillers de plancher, oreillers à motifs appliqués, taies d’oreiller, draps, ensemble de draps de lit, articles pour fenêtres, nommément rideaux, tentures, tringles à rideaux, supports, faîteaux et embrasses; housses de couette, couettes et couvertures de lits, baldaquins et rouleaux pour la nuque (les Marchandises).

[3]               La Marque est enregistrée aux fins d'emploi en liaison avec les services suivants : Services de commande par correspondance et de catalogue électronique spécialisés dans les meubles, accessoires pour la maison et cadeaux; services de détail en ligne spécialisés dans le domaine des meubles, accessoires pour la maison et cadeaux (les Services).

[4]               Selon l'article 45 de la Loi, le propriétaire inscrit de la marque de commerce doit, à l'égard de chacune des marchandises et de chacun des services que spécifie l'enregistrement, indiquer si la marque a été employée au Canada à un moment quelconque au cours des trois ans précédant la date de l'avis, et, dans la négative, la date où elle a été ainsi employée en dernier lieu et la raison de son défaut d'emploi depuis cette date. En l'espèce, la période pertinente au cours de laquelle l'emploi doit être établi s'étend du 25 janvier 2008 au 25 janvier 2011.

[5]               Les définitions applicables d'« emploi » sont énoncées aux paragraphes 4(1) et 4(2)de la Loi :

4(1)      Une marque de commerce est réputée employée en liaison avec des marchandises si, lors du transfert de la propriété ou de la possession de ces marchandises, dans la pratique normale du commerce, elle est apposée sur les marchandises mêmes ou sur les colis dans lesquels ces marchandises sont distribuées, ou si elle est, de toute autre manière, liée aux marchandises à tel point qu’un avis de liaison est alors donné à la personne à qui la propriété ou possession est transférée.

(2) Une marque de commerce est réputée employée en liaison avec des services si elle est employée ou montrée dans l'exécution ou l'annonce de ces services.

[6]               En réponse à l'avis prévu à l'article 45 de la Loi, l'Inscrivante a produit l'affidavit de Margaret Morrison, présidente de l'Inscrivante, assermentée le 25 août 2011. Seule l'Inscrivante a produit des observations écrites; aucune audience n'a été tenue. 

[7]               Dans son affidavit, Mme Morrison affirme que son entreprise « [traduction]exploite 48 magasins au Canada et offre des meubles de petite et de grande taille, des meubles usagés, des décors muraux et des accessoires pour la maison par l'entremise d'un réseau de détaillants ». Mme Morrison explique que la Marque appartenait à BBA Holdings, LLC (BBA), qui a conçu et mis en marché une gamme de meubles et d'accessoires de décoration pour la maison vendus par l'entremise de détaillants, par la vente directe et par le biais d'ententes de licences internationales. Mme Morrison affirme que la Marque fait partie d'une acquisition d'actifs conclue par l'Inscrivante le 5 février 2005, à la suite de la faillite de BBA. Je remarque que cette date tombe moins d'un mois après le début de la période pertinente.

Preuve d'emploi pendant la période pertinente

[8]               Mme Morrison soutient que, au moment où l'inventaire de BBA a été acquis dans le cadre des procédures de faillite, il comprenait certaines marques enregistrées figurant dans le catalogue de produits de BBA, dont une page est présentée en pièce B de son affidavit. Elle atteste que ces autres articles en stock ont été vendus pendant la période pertinente et elle fournit en pièce C de son affidavit des copies de tous les reçus de vente relativement à ces produits.

[9]               Il est bien établi que des simples allégations d’emploi ne suffisent pas à établir l’emploi dans le contexte de la procédure prévue à l'article 45 [Plough (Canada) Ltd c. Aerosol Fillers Inc (1980), 53 C.P.R. (2d) 62 (CAF)]. Bien que le critère relatif à la preuve d’emploi soit peu exigeant dans le cadre de cette procédure [Woods Canada Ltd. c. Lang Michener (1996), 71 C.P.R. (3d) 477 (C.F. 1re inst.)] et qu’il ne soit pas nécessaire de présenter une surabondance de preuves [Union Electric Supply Co c. Registrar of Trade Marks (1982), 63 C.P.R. (2d) 56 (C.F. 1re inst.)], il faut néanmoins produire des faits suffisants pour permettre au registraire de conclure à un emploi de la marque de commerce en liaison avec les marchandises ou services spécifiés dans l’enregistrement au cours de la période pertinente. 

[10]           En l'espèce, étant donné l'absence de preuves démontrant la façon dont la Marque a été affichée sur les produits en stock susmentionnés ou associée à ceux-ci, je considère que les déclarations de Mme Morrison ne constituent que de simples allégations d'emploi et donc, qu'elles ne satisfont pas au critère relatif à la preuve d'emploi de la Marque. À cet égard, même si l'Inscrivante indique dans ses observations écrites que la Marque « [traduction] aurait été affichée » sur les produits en stock, l'affidavit de Mme Morrison ne comporte aucune preuve pour le démontrer, par exemple des photos des produits en question. 

[11]           Comme il en sera question plus en détail ci-dessous, Mme Morrison a fourni des photos illustrant la Marque après la période pertinente; toutefois, ces photos montrent la Marque sur des étiquettes attachées aux meubles – la Marque n'est pas directement apposée sur les articles. Bien que Mme Morrison ait fourni des preuves de vente de ces articles, elle ne confirme pas qu'au moment où ces articles ont été vendus en février 2008, des étiquettes semblables y étaient attachées.

[12]           Ainsi, je ne peux conclure que l'Inscrivante a démontré un emploi de la Marque en liaison avec l'une ou l'autre des Marchandises pendant la période pertinente. 

[13]           En ce qui concerne les Services, je remarque que la page de catalogue qui figure en pièce jointe ne montre que la portion de la Marque qui contient les mots « BOMBAY KIDS ». Quoi qu'il en soit, Mme Morrison n'a produit aucune déclaration au sujet de la date de publication du catalogue, ni aucun détail relativement à sa distribution au Canada pendant la période pertinente ou à tout autre moment. Par conséquent, je ne peux pas conclure que le catalogue constitue une preuve d'emploi de la Marque pendant la période pertinente en liaison avec les Services.

[14]           La question en l'espèce consiste donc à déterminer, en vertu du paragraphe 45(3) de la Loi, s'il existait des circonstances spéciales qui justifieraient le défaut d'emploi de la Marque pendant la période pertinente.

Circonstances spéciales justifiant le défaut d'emploi

[15]           De façon générale, la décision reconnaissant l'existence de circonstances spéciales justifiant le défaut d'emploi suppose que l'on prenne en considération trois critères, tels qu'ils sont énoncés dans Registrar of Trade Marks c. Harris Knitting Mills Ltd (1985), 4 C.P.R. (3d) 488 (C.A.F.). Le premier critère est la durée du défaut d'emploi de la marque; le second est le degré de contrôle exercé par le propriétaire inscrit sur les raisons du défaut d'emploi; le troisième est la preuve d'une intention sérieuse de reprendre dans un bref délai l'emploi de la marque. La décision rendue dans Smart & Biggar c. Scott Paper Ltd (2008), 65 C.P.R. (4th) 303 (C.A.F.) offre d'autres précisions à propos de l'interprétation du deuxième critère, par la détermination que cet aspect du test doit être satisfait pour que l'on puisse conclure à l'existence de circonstances spéciales justifiant le défaut d'emploi d'une marque de commerce. Les deux autres critères s'appliqueront au moment d'étudier la question dans son ensemble, mais sans une ou plusieurs raisons indépendantes de la volonté du propriétaire inscrit, on ne peut pas trouver de circonstance spéciale.

Durée de la période au cours de laquelle la marque de commerce n'a pas été employée

[16]           En ce qui concerne le premier critère, un propriétaire inscrit doit généralement indiquer ou autrement prouver à quel moment la marque de commerce a été employée pour la dernière fois. Toutefois, dans le cas d'une cession issue d'une faillite, comme en l'espèce, la date de cession peut être considérée comme la date pertinente [voir GPS (UK) Ltd c. Rainbow Jean Co (1994), 58 C.P.R. (3d) 535 (COMC) et Baker & McKenzie c. Garfield’s Fashions Ltd (1993), 52 C.P.R. (3d) 274 (COMC)]. Ainsi, aux fins de la présente analyse, la date de dernier emploi est le 5 février 2008 et la période de non emploi précédant l'avis prévu à l'article 45 est de moins de trois ans.

Raisons du défaut d'emploi indépendantes de la volonté de l'Inscrivante

[17]           Comme il est mentionné ci-dessus, l'Inscrivante a acquis la Marque dans le cadre de procédures de faillite en février 2008, moins d'un mois après le début de la période pertinente. Mme Morrison affirme que l'acquisition de la plupart des actifs, magasins, employés et engagements de BBA constituait une démarche majeure qui a exigé de l'Inscrivante qu'elle établisse une planification exhaustive, qu'elle consacre beaucoup de son temps et qu'elle engage des dépenses considérables. Mme Morrison déclare également que, même si l'entreprise avait élaboré un plan d'activités en 2009 relativement à l'emploi de la Marque, la « [traduction] capacité d'obtenir l'investissement en capital requis a eu une incidence négative sur la capacité [de l'Inscrivante] à mettre en œuvre ledit plan d'activités », du moins en partie. Elle affirme que ce problème a perduré jusqu'en 2010, alors que l'Inscrivante a décidé de mettre en œuvre son plan d'activités en liaison avec la Marque et a commencé à communiquer avec des fournisseurs. Il est important de noter que l'Inscrivante a passé une commande auprès de l'un de ses fournisseurs, une semaine avant l'envoi de l'avis prévu à l'article 45.

[18]           Il est raisonnable de penser qu'un nouveau propriétaire peut avoir besoin de temps pour prendre des arrangements en ce qui concerne l'emploi d'une marque de commerce nouvellement acquise [voir Garfield’s Fashions, supra et Scott Paper Co c. Lander Co Canada Ltd (1996), 67 C.P.R. (3d) 274 (COMC)]. Cela rejoint l'intention apparente du législateur, à savoir que, généralement, il existe un délai de démarrage maximal dont la partie inscrivante dispose pour commencer à faire un usage commercial sérieux de la marque au Canada [voir 2001237 Ontario Ltd c. Footstar Corp, 2003 CarswellNat 6253 (COMC)].

[19]           Étant donné la récente acquisition par l'Inscrivante des actifs de BBA (y compris la Marque), le travail nécessaire pour relancer une gamme de produit suivant une cession, et la difficulté à trouver le financement nécessaire pour relancer la gamme de produit, je conviens avec l'Inscrivante que, globalement, il s'agit de raisons justifiant le défaut d'emploi de la Marque qui étaient indépendantes de la volonté de l'Inscrivante pendant la période pertinente.

Intention sérieuse de reprendre l'emploi dans un bref délai

[20]           Quant au troisième critère, Mme Morrison fournit ce qui suit pour corroborer que l'Inscrivante a bien l'intention de reprendre l'emploi de la Marque :

  • La Pièce D consiste en une confirmation de bon de commande (daté du 25 avril 2011) pour un nouvel inventaire. Comme indiqué précédemment, la confirmation montre que la commande a été passée le 18 janvier 2011 (une semaine avant l'envoi de l'avis prévu à l'article 45) et on y indique que les produits expédiés devraient arriver au plus tard le 11 août 2011.

 

  • La Pièce E contient des pages du site Web de l'Inscrivante, datées du 25 août 2011, qui montrent, selon ce que confirme Mme Morrison, que la Marque est employée en liaison avec certaines des Marchandises vendues par l'Inscrivante. La Marque telle qu'elle est enregistré n'apparaît que sur la première page et chacune des images du produit est accompagnée d'une déclaration qui va comme suit « This product is currently sold through our Bombay stores only » (ce produit est actuellement vendu exclusivement dans nos magasins Bombay). Cependant, Mme Morrison confirme que l'Inscrivante « [traduction] travaille actuellement à la création d'un site Web commercial à partir duquel elle pourra offrir aux clients [les Services] en liaison avec la Marque enregistrée ».

 

  • La Pièce F contient quelques photos illustrant deux agencements de meubles présentés en magasin. Sur chaque produit, ou à proximité, se trouve la publicité décrite en Pièce G. L'une des images montre un gros plan d'une « étiquette de prix volante » attachée à l'un des meubles et affichant la Marque. Mme Morrison confirme que ces photos ont été prises en magasin au mois d'août 2012.

 

  • La Pièce G est une copie d'une publicité en magasin utilisée conjointement avec les agencements de meubles présentés figurant en Pièce F. L'annonce montre une image de trois articles d'ameublement (un lit, une commode à 7 tiroirs et une table de nuit) portant le nom « Morgan Collection » et affichant la Marque.

 

  • La Pièce H est une copie du « matériel publicitaire électronique » qui, selon ce que confirme Mme Morrison, a été envoyé par courriel le 19 août 2011 aux clients abonnés. La Marque figure dans la publicité, de pair avec les trois mêmes produits figurant dans les agencements de meubles présentés que contiennent les Pièces F et G.

 

  • La Pièce I consiste en trois images d'« étiquettes de prix volantes » en magasin pour une table de nuit, une commode et un lit simple, respectivement. Chaque étiquette affiche la Marque et le nom du produit en particulier. Les étiquettes portent la date « 08/11 ».

[21]           Afin de satisfaire au troisième critère du test relative aux circonstances spéciales, l'intention de reprendre l'emploi doit être corroborée d'une preuve [voir Arrowhead Spring Water Ltd c. Arrowhead Water Corp (1993), 47 C.P.R. (3d) 217 (C.F. 1re inst.); NTD Apparel Inc c. Ryan (2003), 27 C.P.R. (4th) 73 (C.F. 1re inst.)]. En l'espèce, Mme Morrison fournit quelques preuves qui démontrent l'intention qu'a l'Inscrivante de reprendre l'emploi de la Marque. Plus particulièrement, je remarque que le bon de commande qui figure en Pièce D indique que l'Inscrivante a bel et bien commencé à commander certaines des Marchandises auprès d'un fournisseur avant l'envoi de l'avis prévu à l'article 45 et que, de plus, Mme Morrison confirme l'intention de vendre ces produits en liaison avec la Marque.

[22]           En ce qui concerne les Services de vente électroniques et en ligne, il semble que l'Inscrivante ait pris des mesures concrètes pour reprendre l'emploi, comme l'indique la création du site Web de l'Inscrivante.

[23]           Même si la preuve concerne principalement des articles d'ameublement, je remarque que Mme Morrison présente des déclarations claires relativement à l'intention qu'a l'Inscrivante de reprendre l'emploi de la Marque en liaison avec l'ensemble des marchandises et des services tels qu'ils ont été enregistré « [traduction] entre l'automne 2011 et l'été 2012 ». Étant donné la nature des marchandises et des services, et en l'absence d'observations présentées par la Partie requérante, et à la lumière de tout ce qui précède, je suis convaincu que l'Inscrivant a démontré une intention sérieuse de reprendre l'emploi de la Marque en liaison avec les Marchandises de même que les Services, tels qu'ils ont été enregistrés.

Décision

[24]           Par conséquent, je suis convaincu que l'Inscrivante a démontré l'existence de circonstances spéciales justifiant le défaut d'emploi de la Marque pendant la période pertinente, au sens du paragraphe 45(3) de la Loi, en ce qui concerne les Marchandises et les Services tels qu'ils ont été enregistrés.

[25]           En vertu des pouvoirs qui me sont délégués sous le régime du paragraphe 63(3) et conformément aux dispositions de l'article 45 de la Loi, l'enregistrement sera maintenu.

 

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Andrew Bene

Agent d'audience

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Sophie Ouellet, trad.a.

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