Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

THE REGISTRAR OF TRADE-MARKS

Référence : 2014 COMC 154

Date de la décision : 2014-05-20

TRADUCTION

DANS L’AFFAIRE DE L’OPPOSITION produite par Canadian Direct Insurance Incorporated à l’encontre de la demande d’enregistrement no 1,530,170 pour la marque de commerce AllWest Insurance Direct au nom de AllWest Insurance Services Ltd.

[1]               Le 27 mai 2011, AllWest Insurance Services Ltd. (la Requérante) a produit une demande d'enregistrement pour la marque de commerce AllWest Insurance Direct (la Marque) sur la base d'un emploi projeté en liaison avec :

[traduction]
Services de courtage d'assurance associés aux véhicules, bateaux, résidences, commerces, assurance maladie complémentaire et produits d'assurance dentaire et d'assurance vie (les Services).

[2]               La demande a été annoncée aux fins d’opposition dans le Journal des marques de commerce du 25 janvier 2012.

[3]               Le 20 juin 2012, Canadian Direct Insurance Incorporated (l'Opposante) a produit une déclaration d'opposition invoquant les motifs résumés ci-dessous :

(a)    la demande n'est pas conforme aux exigences de l'article 30i) de la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, ch T-13 (la Loi) en vertu de l'article 31 de la Financial Institutions Act, RSBC 1996, ch 141. L'emploi de la Marque contreviendrait à l'article 31 puisque le terme INSURANCE DIRECT implique que la Requérante est une compagnie d'assurances, ce qu'elle n'est pas, en contravention à cet article;

(b)   la Marque n'est pas enregistrable, en vertu de l'article 12(1)d) de la Loi, car elle crée de la confusion avec les enregistrements suivants de l'Opposante :

Numéro d'enregistrement

Marque de commerce

LMC499,802

CANADIAN DIRECT INSURANCE

LMC493,462

CANADIAN DIRECT INSURANCE & Dessin de clavier

LMC554,966

CANADIAN DIRECT INSURANCEONLINE

LMC542,020

CANADIAN DIRECT LIFE INSURANCE

 

(c)    la Requérante n'est pas la personne ayant droit à l'enregistrement de la Marque, en vertu des articles 16(3)a) et 16(3)c) de la Loi, car à la date de production de la demande, la Marque créait de la confusion avec les marques de commerce et le nom commercial CANADIAN DIRECT INSURANCE déjà employés de l'Opposante;

(d)   la Marque ne possède pas de caractère distinctif, en vertu de l'article 2 de la Loi, en ce qui a trait aux marques de commerce et au nom commercial de l'Opposante.

[4]               La Requérante a produit et signifié une contre-déclaration dans laquelle elle nie les allégations de l'Opposante.

[5]               L'Opposante n’a produit aucune preuve. La Requérante a produit comme preuve les affidavits de Kellie Dale et Kirsten Lynn Severson.

[6]               Seule la Requérante a produit un plaidoyer écrit. Il n'y a pas eu d'audience.

Les dates pertinentes et le fardeau de preuve

[7]               Même si divers motifs d'opposition sont invoqués, la question décisive à trancher est celle de savoir si la marque de commerce AllWest Insurance Direct crée de la confusion avec la marque de commerce CANADIAN DIRECT INSURANCE de l'Opposante. La plus ancienne date pertinente pour examiner la question de la confusion est la date à laquelle la demande a été produite, soit le 27 mai 2011, alors que la plus récente date pertinente est la date de ma décision : pour un examen des dates pertinentes dans les procédures d'opposition, voir American Assn of Retired Persons c. Canadian Assn of Retired Persons (1998), 84 CPR (3d) 198 (CF 1re inst) à 206-208.

[8]               Avant de me pencher sur la question de la confusion entre les marques des parties, j'estime nécessaire d'énoncer certaines exigences techniques relativement (i) à l'obligation qu'a l'Opposante de corroborer les allégations qui figurent dans la déclaration d'opposition et (ii) à l'obligation qu'a la Requérante de démontrer le bien-fondé de sa cause.

[9]               En ce qui concerne le point (i) ci-dessus, il incombe à l'Opposante de démontrer les faits contenus dans les allégations qu'elle a invoquées dans la déclaration d’opposition : John Labatt Limited c. The Molson Companies Limited (1990), 30 CPR (3d) 293 (CF 1re inst.) à 298. La présence d'un fardeau de preuve pour l'Opposante à l’égard d’une question donnée signifie que la preuve doit être suffisante pour qu’il soit possible de conclure raisonnablement à l’existence des faits allégués à l’appui de ladite question. Quant à l'élément (ii) susmentionné, c'est à la Requérante qu'incombe le fardeau de démontrer que la demande d'enregistrement ne contrevient pas aux dispositions de la Loi invoquées par l'Opposante (concernant les allégations pour lesquelles l'Opposante s'est acquittée du fardeau de preuve qui lui incombait). Le fardeau imposé à la Requérante signifie que si une conclusion déterminante ne peut être tirée une fois que toute la preuve a été présentée, la question doit être tranchée en sa défaveur.

Les motifs d'opposition qui peuvent être rejetés sommairement

[10]           Le motif d'opposition fondé sur l'article 30i) allègue que la déclaration de la Requérante concernant son droit à l'enregistrement de la Marque est fausse en vertu de la Financial Institutions Act, RSBC 1996, ch 141. Même si le non-respect d'une mesure législative fédérale peut constituer un motif d'opposition suffisant en vertu de l'article 30i) de la Loi, des allégations de non-respect de lois provinciales ou territoriales ne sont pas un fondement approprié à un motif d'opposition en vertu de l'article 30i) [Producteurs Laitiers du Canada c. Lander, [2013] COMC 178]. Donc, la Financial Institutions Act ne peut pas servir de fondement à un motif d'opposition fondé sur l'article 30i). Par conséquent, ce motif d'opposition est rejeté.

[11]           Les motifs fondés sur les articles 16(3)a) et 16(3)c) et 2 sont également rejetés, parce que l'Opposante ne s'est pas acquittée de son fardeau de preuve initial. L'Opposante n'a produit aucune preuve d'emploi, de révélation ou de réputation de ses marques de commerce ou de son nom commercial au Canada aux dates pertinentes applicables. Bien que les enregistrements des marques de commerce de l'Opposante comportent des revendications d'emploi, ces dernières ne sont pas suffisantes pour permettre à l'Opposante de s'acquitter de son fardeau de preuve à l'égard de ces motifs d'opposition [voir Rooxs Inc c. Edit-SRL (2002), 23 CPR (4th) 265 (COMC), p. 268].

Le motif d'opposition fondé sur l'article 12(1)d)

[12]           L'Opposante a fait valoir que la Marque n'est pas enregistrable en vertu de l'article 12(1)d) de la Loi, car elle crée de la confusion avec les marques de commerce déposées de l'Opposante énumérées au paragraphe 3b) de cette décision. J'estime que la plus pertinente de ces marques de commerce est la marque CANADIAN DIRECT INSURANCE de l'Opposante présentée ci-dessous. Un examen de la question de la confusion entre cette marque et la Marque permettra de statuer sur ce motif d’opposition, et j'y concentrerai donc mon examen.


 

Numéro d'enregistrement

Marque de commerce


Marchandises et Services

LMC499,802

CANADIAN DIRECT INSURANCE

[traduction]
Souscription à des assurances, souscriptions de garantie et administration et règlements en matière d’assurance.

[13]           J'ai exercé mon pouvoir discrétionnaire, et j'ai consulté le registre des marques de commerce pour confirmer que cet enregistrement est en vigueur. L'Opposante s'est donc acquittée de son fardeau de preuve initial à l'égard de ce motif d'opposition.

[14]           Le test applicable pour trancher la question de la confusion est énoncé à l’article 6(2) de la Loi et prévoit que l’emploi d’une marque de commerce crée de la confusion avec une autre marque de commerce lorsque l’emploi des deux marques de commerce dans la même région serait susceptible de faire conclure que les marchandises liées à ces marques de commerce sont fabriquées, vendues, données à bail ou louées, ou que les services liés à ces marques sont loués ou exécutés, par la même personne, que ces marchandises ou ces services soient ou non de la même catégorie générale. Aux fins de cet examen, je dois tenir compte de toutes les circonstances pertinentes, y compris celles énumérées à l'article 6(5) de la Loi : le caractère distinctif inhérent des marques de commerce et la mesure dans laquelle elles ont été révélées; la période pendant laquelle les marques de commerce ont été en usage; le genre de marchandises, services ou entreprises; la nature du commerce; et le degré de ressemblance entre les marques de commerce dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu'elles suggèrent. Dans Veuve Clicquot Ponsardin c. Boutiques Cliquot Ltée, [2006] 1 SCR 824 au para 20, la Cour suprême du Canada a établi la manière d'appliquer le test :

[traduction]
Le critère applicable est celui de la première impression que laisse dans l’esprit du consommateur ordinaire plutôt pressé la vue [de la marque] alors qu’il n’a qu’un vague souvenir des marques de commerce [précédentes] et qu’il ne s’arrête pas pour réfléchir à la question en profondeur, pas plus que pour examiner de près les ressemblances et les différences entre les marques.

Les critères énoncés à l'article 6(5) ne sont pas exhaustifs, et le poids qu’il convient d’accorder à chacun varie selon les circonstances de l’espèce [Mattel, Inc c. 3894207 Canada Inc, [2006] 1 RSC 772 (CSC) au para 54]. Je me fie également à l’affirmation de la Cour suprême du Canada dans l'arrêt Masterpiece Inc. c. Alavida Lifestyles Inc. (2011), 92 CPR (4th) 361 (CSC), au para 49, que le critère énoncé à l’article 6(5)e), la ressemblance entre les marques, est souvent celui qui revêt le plus d’importance dans l’examen de la probabilité de confusion.

 

Le caractère distinctif inhérent

[15]           La Requérante a produit comme preuve un affidavit de Mme Severson, une agente de marques de commerce. Mme Severson a été approchée par l'agent de la Requérante pour mener une recherche sur la fréquence en ce qui concerne le terme « direct » en liaison avec des services d'assurance. En pièce F de son affidavit, elle joint des copies papier du site Web de The Canadian Association of Direct Response Insurers (www.cadri.com). Sur son site Web, The Canadian Association of Direct Response Insurers (CADRI) déclare ce qui suit :

 

[traduction]
[La CADRI] est une association professionnelle qui représente les compagnies d’assurance offrant directement aux consommateurs canadiens des produits d’assurance automobile, habitation et commerciale.

 

... les membres de la CADRI fournissent une gamme complète de services et maintiennent des relations directes avec leurs clients à toutes les étapes du processus de vente et de service.

 

Les assureurs qui travaillent selon le modèle de relation directe commercialisent et distribuent leurs produits et services à leurs clients directement et offrent des conseils grâce à leur propre équipe spécialisée d'assureurs professionnels autorisés.

[16]           L'affidavit de Mme Severson comprend également en pièces jointes des copies papier de divers sites Web qui font référence au Canada et où le terme DIRECT est employé de façon descriptive : www.certas.ca (« Advantage of Shopping Direct » [l'avantage du magasinage direct]); www.ibc.ca (« How to Find a Broker, Agent or Direct Writer » [comment trouver un courtier, un agent ou un rédacteur direct]) et www.tdinsurance.com (« We’ve earned our place as the largest direct-response home and auto insurance group » [nous avons conquis la première place dans le domaine de l’assurance automobile et habitation par marketing direct) (pièce E). Compte tenu de la preuve de Mme Severson, j'estime que la marque de commerce de l'Opposante ne possède pas un caractère distinctif inhérent très important, car elle est composée d'éléments qui évoquent grandement les services d'assurance offerts directement aux consommateurs au Canada.

[17]           Par comparaison, la Marque possède un caractère distinctif inhérent plus élevé en raison du terme inventé AllWest.

Le degré de ressemblance entre les marques de commerce

[18]           Examinant le degré de ressemblance, la Cour suprême du Canada écrit, dans l’arrêt Masterpiece, précité que la ressemblance est définie en tant que rapport entre des objets de même espèce présentant des éléments identiques (para 62) et que, pour mesurer le degré de ressemblance, il est préférable de se demander d’abord si l’un des aspects d’une marque de commerce est particulièrement frappant ou unique (para 64). En l’espèce, il n’y a rien de frappant ou d’unique dans les termes DIRECT et INSURANCE considérant que les deux parties offrent des services d'assurance. Par conséquent, j'estime qu'il y a tout au plus un léger degré de ressemblance entre les marques dans la présentation ou dans le son.

[19]           De plus, j'estime que les marques de commerce suggèrent des idées légèrement différentes. La marque de commerce CANADIAN DIRECT INSURANCE suggère des services d'assurance offerts directement aux Canadiens ou au Canada. La marque de commerce AllWest Insurance Direct suggère des services d'assurance offerts exclusivement dans l'Ouest.

[20]           Compte tenu des différences dans la présentation, le son et les idées suggérées entre AllWest Insurance Direct et CANADIAN DIRECT INSURANCE lorsque considérées de façon générale, sur le principe de la première impression, les marques ne peuvent être considérées comme étant similaires. Dans Masterpiece, le juge Rothstein a déclaré au para 49 que :

[traduction]
... si les marques ou les noms ne se ressemblent pas, il est peu probable que l’analyse amène à conclure à la probabilité de confusion même si les autres facteurs tendent fortement à indiquer le contraire. Les autres facteurs ne deviennent importants que si les marques sont jugées identiques ou très similaires.

La mesure dans laquelle elles ont été révélées et la période pendant laquelle les marques de commerce ont été en usage

[21]           Même si les enregistrements de l'Opposante sont fondés sur l'emploi, cela ne me permet que de supposer un emploi de minimis [Entre Computer Centers Inc c. Global Upholstery Co (1991), 40 CPR (3d) 427 (COMC) à 430]. Une conclusion selon laquelle les marques sont devenues connues dans une mesure appréciable ou ont nécessairement été employées de manière continue ne peut pas être fondée sur un emploi de minimis.

[22]           La déposante de la Requérante, Mme Dale, est la vice-présidente et directrice générale de la Requérante. Elle déclare que la Requérante a l'intention d'offrir des services de courtage d'assurance particuliers en liaison avec la Marque.

[23]           Par conséquent, ce facteur favorise légèrement l'Opposante.

Le genre de services

[24]           Ce facteur favorise l'Opposante, car les services décrits dans la demande d'enregistrement de la Marque et dans l'enregistrement de l'Opposante se chevauchent.

La preuve d’emploi par des tiers de Direct

[25]           La pièce C de l'affidavit de Mme Severson énonce les éléments de divers enregistrements de marque de commerce, y compris DIRECT, qui est la propriété d'un certain nombre de parties différentes. Bien au-delà de vingt enregistrements de marques de commerce comprennent le terme DIRECT comme élément dominant et sont fondés sur un emploi en liaison avec des services d'assurance comme BROKER DIRECT (LMC547,597), COMMERCIAL DIRECT (LMC542,842), DIRECT LINE (LMC547,664), BARON DIRECT (LMC529,189), HSBC DIRECT (LMC652,447), ING DIRECT & LION Dessin (LMC514,583), INSURANCE DIRECT (LMC486,446), BELAIR DIRECT (LMC497,967), SENIORS DIRECT (LMC436,648) et RV DIRECT (LMC798,114). Mme Severson joint également à son affidavit des copies papier de divers sites Web qui font référence au Canada et où le terme DIRECT apparaît comme partie d'une marque de commerce ou d'un nom commercial ou qui est employé de façon descriptive : www.belairdirect.com; www.rvdirectinsurance.com et www.plandirect.com (pièce E).

[26]           Compte tenu de l’état du registre et de la preuve d'emploi produite dans l'affidavit de Mme Severson, je suis prête à inférer que le terme DIRECT est couramment employé comme un élément de marque de commerce dans le domaine des parties et que les consommateurs ont l'habitude de voir cet élément. Le fait que le terme DIRECT soit un élément courant signifie que le consommateur porte davantage attention à l'autre élément des marques de commerce des parties, ce qui réduit la probabilité de confusion [Kellogg Salada Canada Inc. c. Maximum Nutrition Ltd. (1992), 43 CPR (3d) 349 (CF 1re inst.) à 359-361; RPM, A Partnership c. American Biltrite Intellectual Properties; (2011), 92 CPR (4th) 329 (COMC) au para 45].

Conclusion

[34]      Je conclus que, selon la prépondérance des probabilités, compte tenu de toutes les autres circonstances, il n'existe pas de probabilité raisonnable de confusion. Les différences entre les marques sont suffisantes pour rendre la confusion improbable. Par conséquent, ce motif d'opposition est rejeté.

Décision

[27]           Dans l'exercice des pouvoirs qui m'ont été délégués en vertu des dispositions de l'article 63(3) de la Loi, je rejette l'opposition conformément aux dispositions de l'article 38(8) de la Loi.

____________________________
Natalie de Paulsen
Membre
Commission des oppositions des marques de commerce
Office de la propriété intellectuelle du Canada

 

 


Traduction certifiée conforme
Nathalie Tremblay

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