Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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TRADUCTION/TRANSLATION

 

 

AFFAIRE INTÉRESSANT L’OPPOSITION

de Mark’s Work Wearhouse Ltd. à la demande n° 819,823

visant la marque de commerce MOUNTAIN GEAR et dessin y afférent

produite par Mountain Gear, Inc.


        

                                                                                                 

 

Le 6 août 1996, la requérante, Mountain Gear, Inc., a produit une demande d’enregistrement de la marque de commerce MOUNTAIN GEAR et dessin y afférent. La demande est fondée sur l’emploi projeté de la marque de commerce au Canada en liaison avec des articles chaussants, nommément chaussures de randonnée, bottes de randonnée, chaussures de travail et bottes de travail. La demande est également fondée sur l’emploi et l’enregistrement de la marque en liaison avec les mêmes marchandises aux États-Unis et revendique une date de priorité conventionnelle fondée sur la demande correspondante aux États-Unis, le 25 mars 1996. La requérante s’est désistée du droit à l’usage exclusif des mots MOUNTAIN GEAR en dehors de la marque de commerce. La marque est reproduite ci-dessous :

                                               

 

La demande a été annoncée en vue de la procédure d’opposition dans le Journal des marques de commerce du 21 octobre 1998. L’opposante, Mark’s Work Wearhouse Ltd., a produit une déclaration d’opposition le 21 décembre 1998. Dans sa déclaration d’opposition, l’opposante dit qu’elle est la titulaire des enregistrements canadiens de marques de commerce suivants :

n° 326,921, visant la marque MOUNTAIN GEAR et dessin y afférent, enregistrée le 1er mai 1987 en liaison avec les vêtements, nommément les blousons, sur le fondement de l’emploi depuis octobre 1984 au moins

 

                                                     

 

 

n° 418,697, visant la marque MOUNTAIN GEAR et dessin y afférent, enregistrée le 22 octobre 1993 en liaison avec les marchandises suivantes : blousons, bottes, bottes de randonnée, gants, mitaines, coiffures, nommément chapeaux, bonnets et tuques; sacs de sport, sacs à dos, sacs bananes, polochons et vêtements, nommément manteaux, pantalons et chemises sur le fondement d’une déclaration d’emploi produite le 19 juillet 1993

 

                                                     

 

L’opposante s’est désistée du droit à l’usage exclusif du mot GEAR en dehors de la marque de commerce dans chacun de ses enregistrements.

 

La requérante a produit et signifié une contre-déclaration dans laquelle elle a dénié les motifs d’opposition.

 

L’opposante a produit en preuve des copies certifiées conformes de ses deux enregistrements de marque de commerce et l’affidavit de Richard G. Harrison.

 

La requérante a produit en preuve l’affidavit de Jong S. Woo et trois affidavits de Gladys Tibbo Witt. Par lettre datée du 18 octobre 2000, la requérante a obtenu l’autorisation de produire un quatrième affidavit de Gladys Tibbo Witt.

 

Aucune contre-preuve n’a été produite et aucun des auteurs d’affidavit n’a été contre‑interrogé. Seule l’opposante a produit un plaidoyer écrit. Ni l’une ni l’autre des parties n’a demandé d’audience.

 

La preuve

Monsieur Harrison, premier vice-président de l’opposante, Techniques marchandes, nous dit que l’opposante fabrique tous les types de vêtements et d’articles chaussants de loisir et de travail et exploite des magasins de détail de vêtements. Au 1er septembre 1999, l’opposante exploitait de nombreux magasins de détail de vêtements dans tout le Canada. L’opposante vend dans ses magasins certains produits qui portent les marques de commerce d’autres personnes, mais la majorité des marchandises qu’elle vend sont des produits portant ses propres marques de commerce. Selon M. Harrison, l’une des marques de commerce de l’opposante est MOUNTAIN GEAR. Il fournit un certain nombre de pièces au sujet de cette marque de commerce, notamment 

 

Catalogues distribués aux consommateurs par publipostage et dans les magasins (p. ex. le catalogue annuel de 1990 annonce des blousons et des bottes en liaison avec la marque MOUNTAIN GEAR et dessin y afférent, enregistrée sous le n° 326,921 et le catalogue Automne-hiver 1994 annonce des blousons en liaison avec la marque MOUNTAIN GEAR et dessin y afférent, enregistrée sous le n° 418,697)

 

[traduction] « des échantillons d’étiquettes de la marque de commerce de ma société MOUNTAIN GEAR (dessin) qui est employée en liaison avec les divers articles de vêtements et d’articles chaussants par application sur les produits eux-mêmes, sur l’emballage, ou sous forme d’étiquettes volantes attachées aux produits » - les articles fournis montrent la marque de commerce qui fait l’objet de l’enregistrement n° 418,697, ce qui donne à penser qu’il se peut que l’opposante n’utilise maintenant que sa marque qui a fait l’objet de l’enregistrement le plus récent

 

une annonce de journal de 1987 portant sur un vêtement qui présente la marque de commerce enregistrée n° 326,921

 

le Guide d’achat d’automne de 1988 qui fait la promotion d’articles chaussants en liaison avec la marque de commerce enregistrée n° 326,921

 

un encart de 1995 annonçant des articles chaussants portant la marque de commerce enregistrée n° 418,697

 

un encart de 1995 annonçant des vêtements portant la marque de commerce enregistrée n° 418,697

 

un Guide des chaussures d’extérieur 1997 annonçant des articles chaussants en liaison avec la marque de commerce enregistrée n° 418,697

 

les ventes annuelles pour les années 1994 à 1998 relatives à la marque de commerce MOUNTAIN GEAR (et dessin y afférent) (c’est-à-dire la marque de commerce enregistrée sous le n° 418,697), ventilées entre les ventes de vêtements et d’articles chaussants – les articles chaussants vont de 246 116 $ (ou 4 690 paires) en 1994 à 810 297 $ (ou 16 468 paires) en 1998 tandis que les molletons solaires avaient de grosses ventes en 1994 et en 1995 (environ 2 millions de dollars et 5 millions de dollars, respectivement), mais sont tombées à zéro en 1998

 

Monsieur Woo, vice-président de la requérante, explique que les produits fabriqués sous le contrôle de la requérante sont vendus par l’entremise de détaillants d’articles chaussants et de marchandises de sports comme FOOT LOCKER et VIM. Il fournit les chiffres et le volume des ventes des articles chaussants vendus en liaison avec la marque de commerce faisant l’objet de la demande de 1996 à 1999, mais comme il indique que ces chiffres se rapportent aux ventes aux États-Unis et au Canada et ne fait pas de distinction entre les deux pays, ces chiffres ne peuvent être retenus dans la présente procédure.

 

Monsieur Woo déclare 

[traduction] « au moment où la requérante a adopté le dessin stylisé pour la marque de la demande canadienne 819,823, elle était au courant que d’autres sociétés employaient la combinaison de mots « mountain gear », soit seule soit en combinaison avec divers graphismes, pour identifier divers articles de vêtements et/ou articles chaussants et/ou articles d’équipement fabriqués et/ou vendus dans des pays comme les États-Unis, le Canada et des pays d’Amérique centrale, d’Amérique du Sud et d’Europe. La requérante n’était pas au courant d’un tel emploi des mots « mountain gear » par Mark’s Work Wearhouse, Ltd. avant l’adoption par la requérante de sa marque distinctive. Au cours de la procédure intéressant la demande canadienne 819,823, pour reconnaître l’usage commun de la combinaison de mots « mountain gear », et sur mes instructions, la requérante s’est désistée du droit à l’usage exclusif des mots MOUNTAIN GEAR en dehors de la marque de commerce comme un tout. »

 

Monsieur Woo donne certains exemples d’annonces de magazine relatives aux articles chaussants de sa société, mais il n’existe pas de preuve admissible établissant qu’ils ont été distribués au Canada. On ne peut accorder aucun poids à sa déclaration que la marque de la requérante est également affichée sur des panneaux-réclame dans les grandes régions urbaines des États-Unis visitées par des résidents canadiens, à la fois parce qu’il n’indique pas le degré et le moment d’utilisation de ces panneaux-réclame, et en raison du vague au sujet de l’exposition des Canadiens à ceux-ci.

 

Les parties les plus pertinentes de la preuve de Mme Tibbo Witt sont les suivantes :

il existe trois enregistrements canadiens de marques de commerce incorporant les mots « mountain gear », en plus des marques des parties en cause, à savoir :

l’enregistrement n° 474,246, délivré le 7 avril 1997 au nom de Mountain View Bag Inc. pour la marque BLACK BEAR MOUNTAIN GEAR pour des sacs de sport, des chemises, des gants, des casques, de l’équipement de protection nommément des protège-coude et des épaulières

l’enregistrement n° 427,231, délivré le 13 mai 1994 au nom de Whistler Mountain Resort Limited Partnership pour la marque WHISTLER MOUNTAIN GEAR et dessin y afférent pour les marchandises suivantes : vêtements d’hommes, de femmes et d’enfants, outils portatifs, outils et accessoires, bijoux, instruments pour écrire, étuis de voyage, lunetterie, articles de fantaisie et certaines marchandises de sport comme des lacets de chaussure

                                         

l’enregistrement no 516,672 délivré le 21 septembre 1999 au nom de Whistler Mountain Resort Limited Partnership pour la marque WHISTLER MOUNTAIN GEAR et dessin y afférent pour les vêtements d’hommes, de femmes et d’enfants, lacets de chaussures, couvre-chaussure, chaussures, chaussures de course, sandales, bottes, etc.

                                         

inscriptions dans l’annuaire de téléphone de deux sociétés canadiennes qui incorporent les mots « Mountain Gear » dans leur dénomination : Altus Mountain Gear et Extreme Mountain Gear

 

des pages de site Web où l’on trouve les éléments suivants : Balsam Mountain Gear, Brule Mountain Gear (au Canada, mais il ne semble pas s’agir de vente d’articles chaussants), Mountain Gear Inc., Mountain Gear Corp., Solstice Technical Mountain Gear, Jagged Edge Mountain Gear, Appalachian Mountain Gear, Mountain Sports Gear, Any Mountain gear, Ski Mountaineering Gear

 

Mme Tibbo Witt fournit également la preuve de dénominations ou de marques qui incluent le mot MOUNTAIN, le mot GEAR ou un dessin de montagne, mais je ne trouve pas que ces éléments sont particulièrement pertinents.

 

Le risque de confusion

L’un des motifs d’opposition consiste en ce que la marque de commerce de la requérante n’est pas enregistrable en vertu de l’alinéa 12(1)d) de la Loi sur les marques de commerce parce qu’elle crée de la confusion avec chacune des marques de commerce déposées de l’opposante susmentionnées. Je vais commencer par examiner le risque de confusion entre la marque de la requérante et la marque de l’opposante qui est enregistrée sous le no 418,697.

 

La date pertinente à l’égard du motif d’opposition fondé sur l’alinéa 12(1)d) est la date de ma décision [voir l’arrêt Park Avenue Furniture Corporation c. Wickes/Simmons Bedding Ltd. et Le registraire des marques de commerce, 37 C.P.R. (3d) 413 (C.A.F.)].

 

Le fardeau de persuasion incombe à la requérante, qui doit établir qu’il n’y pas de risque raisonnable de confusion entre les marques en cause. Il en résulte que, si une conclusion décisive ne peut être obtenue, la décision doit être défavorable à la requérante [voir la décision John Labatt Ltd. c. Molson Companies Ltd. (1990), 30 C.P.R. (3d) 293 (C.F. 1re inst.)]. Toutefois, l’opposante a le fardeau initial de prouver les allégations de fait à l’appui de ses motifs d’opposition. L’opposante s’est acquittée de son fardeau initial en fournissant une copie certifiée conforme de l’enregistrement de sa marque de commerce.

 

Le critère de la confusion est celui de la première impression et du souvenir imparfait. En appliquant le critère de la confusion défini au paragraphe 6(2) de la Loi sur les marques de commerce, le registraire doit tenir compte de toutes les circonstances de l’espèce, notamment de celles qui sont expressément énumérées au paragraphe 6(5) de la Loi. Les facteurs expressément énumérés au paragraphe 6(5) sont les suivants : le caractère distinctif inhérent des marques et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues; la période pendant laquelle chacune a été en usage; le genre de marchandises, services ou entreprises; la nature du commerce; et le degré de ressemblance entre les marques dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’elles suggèrent. Le poids à attribuer à chacun peut varier selon les circonstances [voir les décisions Clorox Co. c. Sears Canada Inc. 41 C.P.R. (3d) 483 (C.F. 1re inst.); Gainers Inc. c. Tammy L. Marchildon et Le registraire des marques de commerce (1996), 66 C.P.R. (3d) 308 (C.F. 1re inst.)].

 

Chacune des marques de commerce combine les mots « mountain gear » avec des dessins représentant le grand air, en particulier des montagnes. Bien que les deux marques possèdent un certain caractère distinctif, aucune ne l’emporte sur l’autre à cet égard.

 

La mesure dans laquelle chaque marque est devenue connue favorise l’opposante, tout comme la période pendant laquelle les marques ont été en usage.

 

Il existe un chevauchement des marchandises des parties.

 

Les marchandises des deux parties sont vendues aux membres du grand public par l’entremise de magasins de détail.

 

Les marques des parties sont identiques sur le plan du son. Quant à l’idée qu’elles suggèrent, elles sont très similaires. En outre, elles sont similaires dans la présentation.

 

Parmi les circonstances de l’espèce, j’ai également considéré la déclaration de M. Woo, disant qu’il n’y a pas eu de confusion. Toutefois, la preuve que les marques ont été présentes dans la même région géographique pendant une période assez longue est insuffisante pour que l’on puisse attacher de l’importance à l’absence de confusion.

 

L’état du marché constitue une autre des circonstances de l’espèce. J’examine d’abord la preuve sur l’état du registre. On peut se servir de cette preuve pour tirer des déductions au sujet de l’état du marché, mais on ne peut tirer de déductions que lorsqu’on trouve un grand nombre d’enregistrements pertinents [voir les décisions Ports International Ltd. c. Dunlop Ltd. (1992), 41 C.P.R. (3d) 432; Del Monte Corporation c. Welch Foods Inc. (1992), 44 C.P.R. (3d) 205 (C.F. 1re inst.); Kellogg Salada Canada Inc. c. Maximum Nutrition Ltd. (1992), 43 C.P.R. (3d) 349 (C.A.F.)]. L’existence de trois enregistrements de marques de commerce incorporant les mots MOUNTAIN GEAR est insuffisante pour me permettre de tirer des conclusions valables au sujet du marché. De plus, il n’y a pas de preuve d’usage de ces trois marques, deux de ces enregistrements ne comprennent pas les chaussures dans la liste des marchandises et chacune d’elles comprend un premier mot distinctif (Black Bear ou Whistler), qui servirait à la distinguer de la marque de l’opposante.

 

La preuve que la requérante a tirée des annuaires téléphoniques, des sites Web et autres sources semblables établit que l’expression « mountain gear » n’est pas unique et je reconnais qu’aucune des marques en cause n’est forte par son caractère inhérent. Toutefois, je pense que seulement trois des entreprises dont on connaît le lieu d’établissement sont établies au Canada et chacune de celles-ci fait précéder les mots « mountain gear » d’un autre mot (Altus, Brule et Extreme), qui servirait à distinguer leurs dénominations de la marque de l’opposante. De plus, il n’existe pas de preuve que l’une quelconque de ces entreprises vende des articles chaussants en liaison avec la dénomination « mountain gear ».

 

Après avoir considéré l’ensemble des circonstances de l’espèce, je conclus que la requérante ne s’est pas acquittée du fardeau de persuasion qui lui imposait d’établir, suivant la prépondérance de la preuve, qu’il n’y a pas de risque raisonnable de confusion entre sa marque de commerce et la marque de commerce qui fait l’objet de l’enregistrement n° 418,697. 

 

Je n’ai pas l’intention de traiter des autres motifs d’opposition de façon détaillée. Il suffira de dire que si l’opposante avait plaidé correctement un motif d’opposition fondé sur l’article 16, elle aurait eu gain de cause sur ce motif. Toutefois, il est douteux que l’opposante ait allégué l’usage de sa ou ses marques avant la date de priorité conventionnelle de la demande. Je note néanmoins que le motif fondé sur l’article 16 aurait été plus fort que le motif fondé sur l’alinéa 12(1)d), parce qu’il n’y a pas de preuve de l’usage par des tiers des mots « mountain gear » à la date pertinente à l’égard de l’article 16. De même, si le motif d’opposition touchant le caractère distinctif avait été plaidé correctement, l’opposante aurait eu gain de cause sur ce motif. Toutefois, le motif d’opposition fondé sur l’alinéa 30i) aurait été rejeté. 

 

Pour les motifs qui précèdent, en vertu des pouvoirs qui m’ont été délégués par le registraire des marques de commerce en application du paragraphe 63(3) de la Loi sur les marques de commerce, je repousse la demande selon le paragraphe 38(8) de la Loi.

 

 

 

 

FAIT À TORONTO (ONTARIO), LE 8 AVRIL 2004.

 

 

 

Jill W. Bradbury

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

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