Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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TRADUCTION

 

LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

THE REGISTRAR OF TRADE-MARKS

Référence : 2012 COMC 196

Date de la décision : 31-10-2012

DANS L’AFFAIRE DE L’OPPOSITION de La Céleste Levure Inc. à la demande no 1 291 316 produite par Seleccion De Torres, S.L. en vue de l’enregistrement de la marque de commerce CELESTE

Dossier

[1]               Le 23 février 2006, Seleccion De Torres, S.L. (la Requérante) a produit une demande en vue de l’enregistrement de la marque de commerce CELESTE (la Marque) en liaison avec des vins (les Marchandises). La demande est fondée sur un emploi au Canada depuis au moins le 25 novembre 2005.

[2]               La demande a été annoncée aux fins d’opposition dans le Journal des marques de commerce du 11 octobre 2006.

[3]               Le 11 décembre 2006, La Céleste Levure Inc. (l’Opposante) a produit une déclaration d’opposition, laquelle a été transmise à la Requérante par le registraire le 4 janvier 2007. Elle a été modifiée une fois, de sorte que les motifs d’opposition invoqués sont maintenant les suivants :

  1. la demande ne satisfait pas aux exigences de l’article 30 de la Loi sur les marques de commerce L.R.C. 1985, ch. T-13 (la Loi), en ce sens que la Requérante ne pouvait pas et ne peut pas être convaincue d’avoir le droit d’employer la Marque au Canada en liaison avec les Marchandises, car la Requérante sait que l’Opposante emploie la marque de commerce LA CÉLESTE LEVURE (enregistrée au nom de l’Opposante) et les noms commerciaux LA CÉLESTE LEVURE et CÉLESTE LEVURE en liaison avec des services de courtage et de représentation dans le domaine des vins et bières ainsi qu’avec des services de vente au détail de vins.
  2. La Marque n’est pas enregistrable suivant l’alinéa 12(1)d) de la Loi, car elle crée de la confusion avec la marque déposée LA CÉLESTE LEVURE de l’Opposante, certificat d’enregistrement TMA508 909, visant des services de courtage et de représentation dans les domaines des vins et bières, ainsi que des services de vente au détail de vins.
  3. La Requérante n’est pas la personne ayant droit à l’enregistrement de la Marque suivant l’alinéa 16(1)a) de la Loi, car à la date de la production de la demande, la Marque créait de la confusion avec la marque de commerce LA CÉLESTE LEVURE de l’Opposante et les noms commerciaux y étant associés CÉLESTE, LE CÉLESTE, CÉLESTEMENT VÔTRE, CELESTIALLY YOURS antérieurement employés au Canada par l’Opposante en liaison avec des services de courtage et de représentation dans le domaine des vins et bières, ainsi qu’avec des services de vente au détail de vins.
  4. La Requérante n’est pas la personne ayant droit à l’enregistrement de la Marque suivant l’alinéa 16(1)c) de la Loi, car à la date de production de la demande, la Marque créait de la confusion avec les noms commerciaux LA CÉLESTE LEVURE et CÉLESTE LEVURE de l’Opposante antérieurement employés au Canada par l’Opposante en liaison avec des services de courtage et de représentation dans le domaine des vins et bières, ainsi qu’avec des services de vente au détail de vins.
  5. Suivant l’alinéa 38(2)d) de la Loi, la Marque n’est pas distinctive au sens de l’article 2 de la Loi, car elle ne distingue pas ni n’est adaptée ou apte à distinguer les marchandises de la Requérante des services de l’Opposante compte tenu de la confusion qu’elle crée avec les marques de commerce et noms commerciaux de l’Opposante précités.
  6. Suivant l’alinéa 38(2)d) de la Loi, la Marque n’est pas distinctive, car la Requérante ne contrôle pas la qualité des marchandises vendues sous licence en liaison avec la Marque comme l’exige l’article 50 de la Loi.

[4]               Le 5 février 2007, la Requérante a produit une contre-déclaration dans laquelle elle conteste tous les motifs d’opposition. Le 10 août 2007, elle a modifié sa contre-déclaration afin de contester les motifs d’opposition modifiés.

[5]               À titre de preuve, l’Opposante a produit l’affidavit de Charles Goyer, et la Requérante l’affidavit de Luis de Javier. M. Goyer a été contre-interrogé et la transcription a été versée au dossier.

[6]               Seule la Requérante a présenté des observations écrites; les parties étaient toutes deux représentées à l’audience.

Fardeau de preuve

[7]               La partie requérante a le fardeau ultime de démontrer que sa demande d’enregistrement est conforme aux dispositions de la Loi. Il incombe toutefois à la partie opposante de s’acquitter du fardeau initial consistant à présenter une preuve admissible suffisante pour permettre de conclure raisonnablement à l’existence des faits allégués à l’appui de chacun des motifs d’opposition soulevés. Une fois que la partie opposante s’est acquittée de ce fardeau initial, la partie requérante doit établir, selon la prépondérance des probabilités, que les motifs d’opposition soulevés ne sauraient faire obstacle à l’enregistrement de la Marque [voir Joseph E Seagram & Sons Ltd et al c. Seagram Real Estate Ltd (1984), 3 C.P.R. (3d) 325 (C.O.M.C.); John Labatt Ltd c. Molson Companies Ltd (1990), 30 C.P.R. (3d) 293 (C.F. 1re inst.) et Wrangler Apparel Corp c. The Timberland Company [2005] C.F. 722].

Motifs d’opposition rejetés sommairement

[8]               À l’audience, l’agent de l’Opposante a concédé que le dossier ne contenait aucun élément de preuve au soutien des motifs d’opposition fondés sur l’alinéa 30i) de la Loi et l’absence de caractère distinctif de la Marque découlant de l’absence de contrôle sur l’emploi de la Marque.

[9]               En conséquence, les premier et sixième motifs d’opposition sont rejetés, car l’Opposante ne s’est pas acquittée de son fardeau de preuve initial.

Enregistrabilité de la Marque aux termes de l’alinéa 12(1)d) de la Loi

[10]           La date pertinente est la date de la décision du registraire [voir Park Avenue Furniture Corporation c. Wickes/Simmons Bedding Ltd (1991), 37 C.P.R. (3d) 413, p. 424 (C.A.F.)].

[11]           M. Goyer, le président de l’entreprise de l’Opposante, a produit une copie d’un extrait du registre concernant l’enregistrement TMA508 909 de la marque de commerce LA CELESTE LEVURE. L’enregistrement vise des services de courtage et de représentation dans le domaine des vins et bières, ainsi que des services de vente au détail de vins (les services de l’Opposante). Dans sa déclaration d’opposition, l’Opposante fait référence à CÉLESTE, CÉLESTE LEVURE et LA CÉLESTE LEVURE. Je ne considère pas que l’emploi de « céleste » par opposition à « celeste » constitue une modification suffisamment importante de la marque de commerce déposée LA CELESTE LEVURE pour équivaloir à l’emploi d’une marque de commerce différente [voir Canada (le Registraire des marques de commerce) c. Cie Internationale pour l’informatique CII Honeywell Bull, SA (1985), C.P.R. (3d) 523]. Je dois néanmoins reproduire dans ma décision la graphie exacte employée dans les documents auxquels il est fait renvoi.

[12]           Il semblerait donc que l’Opposante se soit acquittée de son fardeau de preuve initial. La Requérante allègue cependant que le certificat d’enregistrement TMA508 909 est nul ab initio et que ce motif d’opposition devrait, par conséquent, être rejeté pour défaut de l’Opposante de s’être acquittée de son fardeau initial.

[13]           Les faits invoqués par la Requérante à l’appui de cette allégation sont résumés ci-dessous. La demande d’enregistrement pour la marque de commerce LA CELESTE LEVURE a été produite au nom de Charles Goyer sur la base d’un emploi projeté [voir l’annexe 1 des réponses aux engagements pris lors du contre-interrogatoire de M. Goyer]. La déclaration d’emploi qui a mené à l’enregistrement de cette marque a été formulée le 11 février 1999 par l’agent de marques de commerce de M. Goyer au nom de M. Goyer [voir l’annexe 6 des réponses aux engagements pris lors du contre-interrogatoire de M. Goyer]. Or, à cette date, la marque de commerce LA CELESTE LEVURE n’appartenait plus à M. Goyer mais à l’Opposante, car elle avait été cédée à l’Opposante en vertu d’un acte de cession nunc pro tunc intervenu entre M. Goyer et l’Opposante et ayant pris effet le 23 décembre 1998 [voir l’annexe 9 des réponses aux engagements pris lors du contre-interrogatoire de M. Goyer].

[14]           La Requérante fait valoir que la déclaration d’emploi a été signée par M. Goyer en sa qualité personnelle et non à titre de représentant ou de directeur de l’entreprise de l’Opposante. Il n’était pas fondé à signer la déclaration puisqu’à ce moment la marque était la propriété de l’Opposante. Je constate que la déclaration d’emploi a été signée par un agent de marques de commerce. Elle a toutefois été formulée au nom de M. Goyer, le requérant initial.

[15]           La Requérante tente d’établir une distinction entre un enregistrement de marque de commerce susceptible d’annulation, c’est-à-dire qui serait valide jusqu’à ce qu’il soit déclaré nul, et un enregistrement nul ab initio. La Requérante soutient que dans le cas d’un enregistrement nul ab initio, les droits et présomptions énoncés à l’article 19 ne devraient pas s’appliquer. Ainsi, il ne pourrait y avoir de confusion avec une marque de commerce enregistrée puisque l’enregistrement n’aurait jamais existé dans le registre.

[16]           La Requérante a cité des décisions de la jurisprudence pour étayer sa prétention selon laquelle l’enregistrement serait nul ab initio du fait qu’il a été obtenu sur la base d’une déclaration d’emploi formulée par ou au nom de M. Goyer en sa qualité personnelle alors que ce dernier n’était plus propriétaire de la marque visée par la demande. Or, aucune des décisions invoquées n’est pertinente en l’espèce. La majeure partie de la jurisprudence citée par la Requérante concerne soit des procédures portées devant la Cour fédérale intentées en vertu de l’article 57 de la Loi et s’étant soldées par la radiation d’un enregistrement du registre, soit des procédures intentées sous le régime de la Loi sur la concurrence déloyale, laquelle a précédé la Loi [voir WJ Hughes & Sons “Cornflower” Ltd c. Morawiec (1970), 62 C.P.R. 21; Standard Brands Ltd c. Staley (1946), 6 C.P.R. 27, Marchands Ro-Na Inc c. Tefal SA (1981), 55 C.P.R. (2d) 27; Rainsoft Water Conditioning Co c. Rainsoft (Regina) Ltd (1987), 14 C.P.R. (3d) 267(C.F. 1re inst.), et Unitel Communications Inc c. Bell Canada (1995) 61 C.P.R. (3d) 12].

[17]           Dans les affaires où la Cour fédérale a ordonné de radier un enregistrement du registre, il ressortait clairement de la preuve que la déclaration formulée à l’étape de la production de la demande relativement à l’intention d’employer la marque visée par la demande était fausse, et qu’une fausse déclaration d’emploi avait été produite dans le but d’obtenir l’enregistrement de la marque [voir Ro-Na et Unitel, précitées].

[18]           Dans les affaires où une déclaration inexacte avait été faite de manière non intentionnelle, la Cour fédérale a simplement ordonné que l’enregistrement soit modifié [voir WCC Containers Sales Limited and WCC Refurb Limited c. Haul-All Equipment Ltd 2003 C.F. 962; Parfums de Coeur, Ltd c. Asta (2009) A.C.F. no 17; et Miranda Aluminium Inc c. Miranda Windows & Doors Inc 2009 C.F. 669].

[19]           La Requérante ne demande pas au registraire de déclarer l’enregistrement de l’Opposante nul ab initio, elle souhaite que le registraire le déclare sans effet au moment présent. Dans tous les cas, je ne suis pas convaincu que le registraire a le pouvoir de déclarer un enregistrement nul ab initio ou qu’il peut faire abstraction de la présomption prévue à l’article 19 de la Loi, à savoir que l’enregistrement dont l’Opposante est propriétaire est présumé valide. Il a été dit à maintes reprises que les procédures d’opposition n’étaient pas un forum approprié pour contester la validité d’une marque déposée invoquée par une partie opposante à l’appui d’un motif d’opposition fondé sur l’alinéa 12(1)d) de la Loi [voir Magill c. Taco Bell Corp. (1990), 31 C.P.R. (3d) 221 (C.O.M.C.)]. Ne pas tenir compte de l’enregistrement de l’Opposante équivaudrait à conclure que l’enregistrement est sans effet. Seule la Cour fédérale du Canada a le pouvoir d’ordonner qu’une inscription dans le registre soit biffée [voir l’article 57 de la Loi]. En l’absence d’un jugement de la Cour fédérale ordonnant de radier l’enregistrement TMA508 909 du registre, l’enregistrement est réputé conserver sa validité et son caractère exécutoire.

[20]           Je conclus, par conséquent, que l’Opposante s’est acquittée de son fardeau de preuve initial.

[21]           Le critère à appliquer pour déterminer s’il existe une probabilité de confusion entre deux marques de commerce est énoncé au paragraphe 6(2) de la Loi. Le paragraphe 6(5) de la Loi énumère quelques-unes des circonstances de l’espèce dont il convient de tenir compte, à savoir le caractère distinctif inhérent des marques de commerce ou des noms commerciaux et la mesure dans laquelle ils sont devenus connus; la période pendant laquelle les marques de commerce ou les noms commerciaux ont été en usage; le genre de marchandises, services ou entreprises; la nature du commerce; et le degré de ressemblance entre les marques de commerce ou les noms commerciaux dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’ils suggèrent. Cette liste de critères n’est pas exhaustive et le poids qu’il convient d’accorder à chacun de ces critères n’est pas nécessairement le même [voir Clorox Co c. Sears Canada Inc (1992), 41 C.P.R. (3d) 483 (C.F. 1re inst.) et Gainers Inc c. Marchildon (1996), 66 C.P.R. (3d) 308 C.F. 1re inst.)]. Je me fonde également sur les observations formulées par le juge Binnie dans les arrêts de la Cour suprême du Canada Veuve Clicquot Ponsardin c. Boutiques Cliquot Ltée et al (2006), 49 C.P.R. (4th) 401 et Mattel Inc c. 3894207 Canada Inc (2006), 49 C.P.R. (4th) 321 relativement à l’appréciation des critères énoncés au paragraphe 6(5) de la Loi.

Le caractère distinctif inhérent des marques de commerce et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues

[22]           La Marque est formée d’un adjectif de langue française qui se traduit par « celestial ». Ce terme n’a aucun rapport avec la qualité ou la nature des Marchandises. Le mot français « levure » compris dans la marque de commerce LA CELESTE LEVURE de l’Opposante se traduit par « yeast », un ingrédient qui entre dans la fabrication du vin [voir les pages 22 et 23 de la transcription du contre-interrogatoire de M. Goyer]. Dans son ensemble, cependant, la marque de commerce de l’Opposante ne décrit pas ni n’évoque la nature des services de l’Opposante. Les marques de commerce des parties possèdent donc toutes deux un certain caractère distinctif inhérent.

[23]           Le caractère distinctif d’une marque de commerce peut être renforcé par l’emploi ou la promotion de la marque. Les parties ont toutes deux fourni des éléments de preuve attestant l’emploi de leur marque de commerce respective au Canada. Cette partie de la preuve est résumée dans les paragraphes qui suivent.

[24]           M. Goyer est président de l’entreprise de l’Opposante depuis la constitution en personne morale de cette dernière le 23 décembre 1998. De février 1996 jusqu’à cette date, il a exercé des activités commerciales sous le nom commercial LA CÉLESTE LEVURE à titre de courtier et de représentant en vins.

[25]           M. Goyer a produit une demande en vue de faire enregistrer la marque de commerce LA CELESTE LEVURE en liaison avec les services de l’Opposante le 13 février 1996. Le 7 octobre 1996, il a adopté le nom commercial LA CÉLESTE LEVURE. Ainsi, de 1996 jusqu’au 23 décembre 1998 (la date de constitution en personne morale de l’Opposante), il a personnellement employé la marque de commerce et le nom commercial LA CÉLESTE LEVURE en liaison avec les services de l’Opposante. Il allègue avoir également employé, pendant cette même période, les noms commerciaux CÉLESTE, LE CÉLESTE, CÉLESTEMENT VÔTRE et CELESTIALLY YOURS en liaison avec les services de l’Opposante et a fourni des exemples de correspondance dans lesquels ces termes sont employés. Pour les besoins du présent motif d’opposition, je ne tiendrai compte cependant que de l’emploi de la marque de commerce déposée de l’Opposante LA CELESTE LEVURE.

[26]           M. Goyer affirme avoir cédé à l’Opposante, le 23 décembre 1998, tous ses droits à l’égard de la marque de commerce et du nom commercial LA CELESTE LEVURE, ainsi que les droits qu’il détenait à l’égard d’autres marques de commerce et noms commerciaux, et avoir produit au bureau du registraire une confirmation de cession, selon laquelle la cession avait pris effet le 2 novembre 2000, signée le 21 février 2001. Le 2 avril 2002, l’Opposante a informé le registraire qu’une erreur d’écriture s’était produite et que la date à laquelle la cession a pris effet était le 23 décembre 1998, soit la date de constitution en personne morale de l’Opposante, et non le 2 novembre 2000, soit la date à laquelle l’Opposante a délaissé sa dénomination d’alors, 9072-1705 Quebec Inc., pour adopter sa dénomination sociale actuelle [voir l’annexe 9 des réponses aux engagements pris lors du contre-interrogatoire de M. Goyer].

[27]           M. Goyer explique qu’à titre de courtier et de représentant en vins, l’Opposante joue un rôle d’intermédiaire entre les producteurs de vins et la Société des Alcools du Québec (SAQ), et s’emploie, à ce titre, à promouvoir et à importer au Québec les vins qu’elle a choisis. Ces vins sont ensuite vendus par la SAQ ou directement par l’Opposante à des restaurateurs et à des particuliers à titre de vins d’importation privée. Il existe donc un lien étroit entre l’Opposante et les producteurs de vins, la SAQ et les clients de l’Opposante (particuliers, restaurateurs ou entreprises), lesquels sont en fait des importateurs privés.

[28]           Pour illustrer l’emploi de la marque de commerce LA CELESTE LEVURE de l’Opposante en liaison avec les services de l’Opposante, M. Goyer a produit les éléments de preuve suivants :

exemples de cartes d’affaires portant la marque de commerce LA CÉLESTE LEVURE utilisées par l’Opposante et son prédécesseur en titre, à savoir M. Goyer personnellement, depuis 1996 (pièce P-5);

 

exemples de factures portant la marque de commerce ou le nom commercial LA CELESTE LEVURE ou LA CÉLESTE LEVURE concernant des services rendus à des particuliers, des restaurateurs et des hommes d’affaires du Québec (depuis 1997), et des services rendus à des producteurs de vins (depuis 1996) [voir les pièces P-7 à P-10 jointes à l’affidavit de M. Goyer];

 

exemples de lettres échangées entre l’Opposante (ou son prédécesseur en titre) et des particuliers, des restaurateurs et des producteurs de vins;

copies de factures reçues de producteurs de vins attestant que l’Opposante ou son prédécesseur en titre ont importé des vins dans le but de les revendre au Québec [voir la pièce P-11 jointe à l’affidavit de M. Goyer];

 

exemples d’étiquettes apposées sur les bouteilles de vin désignant l’Opposante comme le distributeur de ces vins au Québec [voir la pièce P-12 jointe à l’affidavit de M. Goyer];

 

copies de listes de produits offerts par l’Opposante depuis 2001 [voir la pièce P-13 jointe à l’affidavit de M. Goyer];

 

copies de listes de vins offerts en dégustation à l’occasion du Salon des vins de 2002, 2004 et 2006 [voir la pièce P-14 jointe à l’affidavit de M. Goyer];

 

copies d’articles parus dans des journaux depuis 2001 portant sur les vins distribués par l’Opposante et faisant mention de l’Opposante [voir la pièce P-16 jointe à l’affidavit de M. Goyer];

 

copie d’un article paru dans le Montreal Gazette du 10 février 2002 dans lequel l’Opposante est décrite comme l’un des plus prestigieux importateurs de vins de spécialité au Québec [voir la pièce P-17 jointe à l’affidavit de M. Goyer].

[29]           M. Goyer a fourni des renseignements détaillés sur les revenus bruts de l’Opposante ou de son prédécesseur en titre provenant des services rendus par l’Opposante sur une base annuelle de 1996 à 2006 et des ventes totales au détail à la SAQ des vins importés par l’Opposante.

[30]           Au vu de cette preuve, je conclus que la marque de commerce LA CELESTE LEVURE de l’Opposante est connue dans une certaine mesure, principalement dans la province de Québec.

[31]           M. de Javier est l’unique administrateur de l’entreprise de la Requérante depuis le 1er juin 2004. Il est également l’un des directeurs de Miguel Torres, S.A. (Torres SA), détenue à 99,9 % par la Requérante. Torres SA se spécialise dans la viticulture, la production de vins et de brandys, et l’exportation et la vente de vins partout dans le monde, y compris dans plusieurs provinces du Canada par l’intermédiaire de distributeurs canadiens. Il affirme que l’entreprise de la Requérante est située à Ribera del Duero, en Espagne, où les vins portant la Marque sont produits et embouteillés avant d’être expédiés au Canada. Les vins portant la Marque produits par la Requérante sont commercialisés et vendus au Canada par l’intermédiaire de Torres SA.

[32]           M. de Javier allègue que la Requérante dicte et contrôle la nature et la qualité des vins vendus par Torres SA en liaison avec la Marque.

[33]           M. de Javier allègue également que les Marchandises ont été vendues au Canada pour la première fois le 26 novembre 2005. Il a fourni les chiffres des ventes annuelles, en nombre de bouteilles et en argent, des Marchandises portant la Marque au Canada. Il a produit des exemples représentatifs de factures datées de 2005 à 2009 ayant trait à la vente et à l’expédition au Canada de Marchandises portant la Marque. Ces factures émises par Torres SA étaient adressées à des distributeurs de la Requérante au Canada, dans la plupart des cas la SAQ.

[34]           M. de Javier a fourni des renseignements détaillés sur les dépenses annuelles engagées par la Requérante, de 2005 à 2008 inclusivement, pour faire la publicité et la promotion des produits portant la Marque au Canada. Ces dépenses ont trait à des publicités parues dans des magazines, des journaux et à des brochures distribués dans l’ensemble du Canada. Il a produit des photographies en couleur de bouteilles de vin portant la Marque ainsi qu’un exemple d’étiquette.

[35]           M. de Javier a également produit des copies d’articles dans lesquels les vins portant la Marque sont mentionnés ou illustrés. Je ne dispose d’aucune information sur la distribution des magazines dans lesquels sont parus ces articles, mais je peux admettre d’office que le Vancouver Sun et le Calgary Herald bénéficient d’un certain rayonnement dans les régions de Vancouver et de Calgary, respectivement.

[36]           En conséquence, je conclus que la Marque de la Requérante est connue dans une certaine mesure au Canada.

La période pendant laquelle les marques de commerce ou les noms commerciaux ont été en usage

[37]           D’après la preuve décrite à la section précédente, la marque de commerce LA CELESTE LEVURE de l’Opposante a été employée par le prédécesseur en titre de l’Opposante, c’est-à-dire M. Goyer, de février 1996 à décembre 1998, et par l’Opposante elle-même par la suite. La Requérante emploie la Marque depuis 2005.

[38]           La Requérante soutient que l’emploi de la marque de commerce LA CELESTE LEVURE de l’Opposante, si tant est qu’elle ait été employée, ne distinguait pas l’Opposante, car cette marque de commerce était employée de manière concurrente par différentes entités. Il importe, ici, de faire la distinction entre le nom d’un particulier, un nom commercial, une raison sociale et une dénomination sociale. Il ressort clairement de l’affidavit de M. Goyer, ainsi que des déclarations faites pendant son contre-interrogatoire et des réponses aux engagements, que les événements en cause dans la présente procédure se sont déroulés selon la séquence suivante :

avant le 23 décembre 1998, M. Goyer exerçait des activités commerciales à titre personnel sous différents noms commerciaux, dont L’Académie des Fins, La Divine Levure et La Celeste Levure;

 

M. Goyer a employé La Divine Levure à titre de nom commercial jusqu’au 25 décembre 1995 au moins, époque où il a découvert que ce nom commercial ressemblait peut-être trop à un autre;

Le 13 février 1996, M. Goyer a produit une demande d’enregistrement à l’égard de la marque de commerce LA CELESTE LEVURE fondée sur un emploi projeté;

 

peu après, au moyen d’une lettre datée du 23 février 1996, M. Goyer a informé un client que sa compagnie exerçait des activités commerciales sous la dénomination La Céleste Levure. (L’emploi du mot « compagnie » pourrait ne pas être approprié, car il n’y a au dossier aucune preuve que M. Goyer ait contrôlé et exploité une compagnie sous cette dénomination sociale à cette époque);

 

lors de son témoignage, M. Goyer a indiqué clairement que jusqu’à la constitution en personne morale de 9072-1705 Quebec Inc. le 23. décembre 1998, tout emploi du nom commercial et de la marque de commerce LA CELESTE LEVURE en liaison avec les services de l’Opposante a été fait uniquement par lui à titre personnel;

 

tout emploi de la marque de commerce LA CELESTE LEVURE après la constitution en personne morale de 9072-1705 Quebec Inc. a été fait par cette personne morale et non par M. Goyer à titre personnel;

 

le 2 novembre 2000, 9072-1705 Quebec Inc. a changé sa dénomination sociale pour La Céleste Levure Inc.

[39]           J’estime que ces faits ne prouvent en rien que la marque de commerce LA CELESTE LEVURE ait été employée de façon concurrente par plus d’une entité légale. M. Goyer a employé la marque de commerce LA CELESTE LEVURE en liaison avec les services de l’Opposante, à titre personnel, jusqu’au 23 décembre 1998; après quoi la marque de commerce a été employée par l’Opposante.

[40]           J’examinerai maintenant la prétention de la Requérante selon laquelle aucun emploi, au sens de l’article 4 de la Loi, ne serait fait de la marque de commerce LA CELESTE LEVURE de l’Opposante au Canada. La Requérante prétend que la preuve au dossier n’indique pas que des paiements ont été effectués relativement aux services de l’Opposante ou que des particuliers (importateurs privés), des restaurateurs ou la SAQ ont tiré quelque avantage que ce soit de ces services. La Requérante soutient que les services offerts par l’Opposante consistent uniquement à promouvoir la vente des vins à l’égard desquels elle agit comme courtier et qu’en ce sens, il n’y a eu aucun emploi de la marque de commerce au sens de l’article 4 de la Loi.

[41]           Les services de l’Opposante permettent à des producteurs de vins de l’Australie, de la France, de l’Allemagne et des États-Unis de vendre leurs vins dans différentes succursales de la SAQ. Les services de l’Opposante permettent, en outre, aux particuliers (importateurs privés) et aux restaurateurs d’avoir accès à des vins ou de se procurer des vins qui autrement ne seraient pas offerts dans les succursales de la SAQ. En sa qualité de courtier, l’Opposante agit comme intermédiaire entre des producteurs de vins de virtuellement toutes les régions du monde et des acheteurs potentiels, tels que la SAQ, des restaurateurs et des particuliers, étant pour la plupart établis dans la province de Québec. Les services de courtage comprennent également l’examen des étiquettes des vins, leur traduction au besoin et la vérification de la conformité des étiquettes avec les normes de la SAQ. L’Opposante participe également à des salons commerciaux afin de faire la promotion des vins qu’elle importe et représente.

[42]           Je ne vois pas comment de tels services pourraient profiter uniquement à l’Opposante et/ou ne seraient pas rendus au Canada. En ce qui a trait au paiement des services de l’Opposante, M. Goyer a fourni, à la pièce P-8 de son affidavit, des copies de factures adressées à différents producteurs de vins. Il est clairement indiqué dans ces factures que la méthode de paiement des services rendus par l’Opposante prend la forme d’une commission calculée sur le total des vins provenant d’un producteur de vins donné vendus à la SAQ.

[43]           Ce facteur joue en faveur de l’Opposante.

Le genre de marchandises, services ou entreprises, et la nature du commerce

[44]           La Requérante allègue que les Marchandises sont complètement différentes des services de l’Opposante. La Requérante insiste sur le fait que l’enregistrement de l’Opposante n’inclut pas les vins. Il inclut, cependant, la vente au détail de vins.

[45]           L’Opposante soutient que, puisqu’elle agit à titre d’intermédiaire entre les producteurs de vins et les acheteurs de la SAQ, les restaurateurs et les importateurs privés, il existe un lien étroit entre les vins vendus en liaison avec la Marque et les services de l’Opposante offerts en liaison avec la marque de commerce LA CELESTE LEVURE.

[46]           Lors du contre-interrogatoire de M. Goyer, les faits suivants ont été établis :

l’Opposante n’a jamais été réputée offrir des vins qu’elle avait elle-même fabriqués (page 126);

 

les représentants de la SAQ qui travaillent à la section des achats ont une grande connaissance du domaine des vins (page 129);

 

les restaurateurs et les particuliers qui achètent des vins d’importation privée sont de fins connaisseurs (page 130);

 

les vins distribués à la SAQ par l’Opposante sont placés sur différentes étagères identifiées par région et non par distributeur (page 38);

certains distributeurs concluent des ententes avec les restaurateurs afin que seuls les vins qu’ils distribuent figurent sur la carte des vins. Autrement, les vins sont classés par région et non par distributeur (page 40).

[47]           La Requérante insiste sur ces faits dans le but de minimiser l’importance de la probabilité de confusion entre les Marchandises de la Requérante et les services de l’Opposante. La Requérante fait valoir que les acheteurs de la SAQ et les restaurateurs sont de fins connaisseurs et qu’à ce titre, ils sont en mesure de distinguer un producteur de vins d’un courtier en vins. La Requérante estime que, par conséquent, il n’y aurait pas de probabilité raisonnable de confusion. Or, M. Goyer a affirmé lors de son contre-interrogatoire que certains établissements vinicoles produisant des vins agissent également comme courtiers (page 88).

[48]           Le consommateur final est la personne qui se rendra dans une succursale de la SAQ et qui achètera une bouteille de vin portant la Marque. Est-ce que ce consommateur, qui n’a qu’un vague souvenir de la marque de commerce de l’Opposante qui figure sur les bouteilles de vin distribuées par l’Opposante, croira, à la vue d’une bouteille de vin portant la Marque, que cette bouteille de vin provient de l’Opposante?

[49]           M. de Javier a bien mentionné dans son affidavit que, pour vendre les Marchandises au Canada en liaison avec la Marque, la Requérante doit faire appel aux services de différents courtiers au Canada.

[50]           Je comprends qu’un vin produit à l’étranger doit franchir différentes étapes avant d’être offert aux consommateurs canadiens. Les services de l’Opposante sont toutefois intimement liés aux vins qui sont offerts en vente dans les succursales de la SAQ partout au Québec et dans les succursales des régies des alcools des autres provinces (par. ex. la Régie des alcools de l’Ontario [LCBO]). Les services de l’Opposante font partie de la séquence d’étapes au terme de laquelle les vins sont offerts en vente et mis en étalage dans les succursales de la SAQ et des autres régies des alcools.

[51]           En tout état de cause, il est clairement énoncé au paragraphe 6(2) de la Loi que l’emploi d’une marque de commerce crée de la confusion avec une autre marque de commerce lorsque l’emploi des deux marques de commerce dans la même région serait susceptible de faire conclure que les marchandises liées à ces marques de commerce sont fabriquées, vendues, données à bail ou louées, ou que les services liés à ces marques sont loués ou exécutés, par la même personne, que ces marchandises ou ces services soient ou non de la même catégorie générale.

[52]           Malgré le fait qu’une distinction puisse être faite entre les Marchandises en soi et les services de l’Opposante, il existe entre eux un lien étroit. En conséquence, je conclus que ces facteurs jouent en faveur de l’Opposante.

Le degré de ressemblance

[53]           Dans l’arrêt Masterpiece Inc c. Alavida Lifestyles Inc et al 2011 C.S.C. 27, la Cour suprême du Canada a clairement indiqué que le facteur le plus important parmi ceux énumérés au paragraphe 6(5) de la Loi est souvent le degré de ressemblance entre les marques. Comme l’a déclaré le juge Denault de la Cour fédérale dans Pernod Ricard c. Molson Breweries (1992), 44 C.P.R. (3d) 359, la première partie d’une marque de commerce est celle qui revêt le plus d’importance au chapitre de la distinction.

[54]           Je comprends que pour une personne francophone les marques en cause évoquent des idées différentes : la Marque est un terme élogieux qui évoque la nature céleste [divine] des vins vendus en liaison avec la Marque, alors que la marque de commerce de l’Opposante signifie « la levure céleste [divine] ».

[55]           En revanche, pour une personne anglophone qui n’a aucune connaissance de la langue française, le premier élément significatif de la marque de commerce est celui qui revêt le plus d’importance. En l’espèce, le mot « celeste », qui constitue la Marque, est le premier élément distinctif de la marque de commerce de l’Opposante. Je pense qu’il est juste de dire qu’il est plus facile pour une personne anglophone de retenir le mot « celeste », car il s’apparente au mot anglais « celestial ». En outre, les marques en cause se ressemblent dans la présentation et dans le son, car toutes deux comportent le mot « céleste ».

Autres circonstances de l’espèce

[56]           Dans son affidavit, M. de Javier allègue n’avoir jamais eu connaissance de quelque cas de confusion que ce soit malgré que les marques en cause coexistent depuis 2005. À l’audience, l’Opposante a fait valoir que l’absence d’éléments de preuve quant à la mesure dans laquelle la Requérante emploie la Marque dans la province de Québec, où les services de l’Opposante sont principalement offerts, rendait impossible une appréciation juste de ce fait. L’Opposante fait, ici, abstraction des factures fournies par M. de Javier concernant les ventes à la SAQ, au Québec donc, de Marchandises portant la Marque. Les ventes totales dont font état ces factures, datées de 2005 à 2009 inclusivement, s’élèvent à 300 000 dollars, ce qui représente environ 35 000 bouteilles de vin portant la Marque. En revanche, en 2005 et 2006, la SAQ a vendu pour 32 millions de dollars de bouteilles de vin importées par suite des services offerts par l’Opposante, alors que pendant la même période, la Requérante a vendu à la SAQ pour moins de 45 000 dollars de bouteilles de vin portant la Marque. Le volume relativement faible des ventes de bouteilles de vin portant la Marque dans la province de Québec peut expliquer l’absence de cas de confusion réelle sur le marché.

Conclusion

[57]           Je conclus de cette analyse des facteurs pertinents que la Requérante ne s’est pas acquittée de son obligation d’établir, selon la prépondérance des probabilités, qu’il n’existe pas de probabilité raisonnable de confusion entre la marque, employée en liaison avec les Marchandises, et la marque de commerce LA CELESTE LEVURE de l’Opposante. Il existe un lien entre les Marchandises et les services de l’Opposante, et les marques en cause présentent une ressemblance assez marquée.

[58]           En conséquence, le deuxième motif d’opposition est accueilli.

Droit à l’enregistrement aux termes du paragraphe 16(1) de la Loi

[59]           Je bornerai mon analyse de ce motif d’opposition à la marque de commerce de l’Opposante LA CELESTE LEVURE. J’estime que l’Opposante n’a pas établi l’emploi des marques de commerce CELESTE, LE CELESTE, CELESTEMENT VÔTRE et CELESTIALLY YOURS. En ce qui concerne les marques de commerce CELESTEMENT VÔTRE et CELESTIALLY YOURS, il s’agit d’expressions que M. Goyer employait à la fin des lettres qu’il signait, en remplacement des expressions plus usuelles « Cordialement vôtre » ou « Truly yours ». Rien n’indique que ces expressions aient été employées comme marques de commerce au sens de l’article 4 de la Loi. Pour ce qui est de CELESTE ou LE CELESTE, M. Goyer a affirmé sous serment lors de son contre-interrogatoire être connu sous ces noms. Il s’agit de simple ouï-dire. Le dossier ne contient aucun élément de preuve établissant que les termes CELESTE ou LE CELESTE ont été employés à titre de marques de commerce, au sens de l’article 4 de la Loi, en liaison avec les services de l’Opposante.

[60]           L’Opposante avait le fardeau initial de démontrer qu’elle a employé ou fait connaître la marque de commerce LA CELESTE LEVURE au Canada avant la date de premier emploi revendiquée dans la demande de la Requérante, soit le 25 novembre 2005, et qu’elle n’avait pas abandonné l’emploi de cette marque à la date d’annonce de la demande [voir le paragraphe 16(1) et l’article (5) de la Loi]. Au vu de la preuve produite par l’Opposante relativement aux motifs d’opposition examinés aux paragraphes précédents, je conclus que l’Opposante s’est acquittée de son fardeau de preuve initial en ce qui concerne la marque de commerce LA CELESTE LEVURE.

[61]           Je dois donc déterminer si, à la date pertinente (la date alléguée du premier emploi de la Marque), la Marque était susceptible de causer de la confusion avec la marque de commerce LA CELESTE LEVURE de l’Opposante. Le fait que les dates pertinentes liées respectivement à l’enregistrabilité aux termes de l’alinéa 12(1)d) et au droit à l’enregistrement aux termes du paragraphe 16(1) diffèrent n’aurait pas d’incidence sur l’issue de la présente procédure. L’analyse des critères pertinents à une date antérieure se traduirait par un résultat identique, voire meilleur, pour l’Opposante, car tout emploi de la Marque par l’Opposante effectué après le 25 novembre 2005 ne serait pas pris en considération. L’argument fondé sur l’absence de cas de confusion serait également écarté puisque cette absence de confusion s’explique par le fait que la Marque n’a pas été employée avant la date pertinente. En outre, s’agissant de la mesure dans laquelle les marques de commerce étaient devenues connues à cette date, la présente analyse joue en faveur de l’Opposante, car la marque de commerce LA CELESTE LEVURE a commencé à être employée dès février 1996, si ce n’est avant, par le prédécesseur en titre de l’Opposante et a été employée par l’Opposante par la suite.

[62]           En conséquence, le troisième motif d’opposition est accueilli pour des raisons similaires à celles énoncées dans la section ayant trait au motif d’opposition fondé sur l’enregistrabilité.

Autres motifs d’opposition

[63]           L’Opposante ayant obtenu gain de cause relativement à deux motifs d’opposition distincts, il n’est pas nécessaire que j’examine les motifs d’opposition restants.

Décision

[64]           Dans l’exercice des pouvoirs qui me sont délégués en vertu du paragraphe 63(3) de la Loi, je rejette la demande no 1 291 316 en application du paragraphe 38(8) de la Loi.

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Jean Carrière

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

 

 

Traduction certifiée conforme

Judith Lemire

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