Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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TRADUCTION/TRANSLATION

 

 

AFFAIRE INTÉRESSANT L’OPPOSITION de

Novartis Crop Protection Canada Inc. à la demande no 811,236 concernant la marque de commerce DUO

SHOT produite par Rohm and Haas Company                                                    

                                                        

 

Le 30 avril 1996, la requérante Rohm and Haas Company a produit une demande en vue d’enregistrer la marque de commerce DUO SHOT, fondée sur son emploi projeté au Canada en liaison avec des fongicides, des herbicides, des insecticides et des pesticides.

 

Cette demande a été annoncée pour fins d’opposition le 30 octobre 1996, dans le Journal des marques de commerce. Le 27 mars 1997, l’opposante Ciba-Geigy Canada Ltd. a produit une déclaration d’opposition. La requérante a produit et signifié une contre-déclaration dans laquelle elle conteste les moyens d’opposition et indique que l’un des enregistrements invoqués par l’opposante (no 275,743) a été radié.

 

En 1998, l’opposante a donné avis que la marque invoquée avait été cédée à Novartis Crop Protection Inc. et qu’en conséquence, cette dernière société remplaçait Ciba-Geigy Canada Ltd. comme opposante.

 

L’opposante a déposé en preuve l’affidavit de Gregory Jack Dunlop. La requérante a déposé en preuve l’affidavit de Carol Luciani. Il n’y a pas eu de contre-interrogatoire.  Chacune des parties a produit une argumentation écrite et les deux parties étaient représentées à l’audience.

 

M. Dunlop est vice-président du Service des ventes et du marketing pour l’Est du Canada de Novartis Crop Protection Canada Inc. Il a fourni une copie certifiée de l’enregistrement no 358,115 de la marque de commerce DUAL.  L’opposante emploie la marque DUAL en liaison avec des herbicides utilisés pour l’agriculture. Elle vend son produit DUAL par l’entremise d’un réseau de franchises de points de vente au détail, lesquelles vendent le produit aux producteurs de maïs et de fèves soya.

 


M. Dunlop soutient que le prédécesseur de l’opposante a commencé à employer la marque DUAL en 1978. En 1982, le prédécesseur en question a également commencé à employer la marque de commerce DUAL-CIBA-GEIGY; l’emploi de cette seconde marque a toutefois été abandonné et son enregistrement s’est éteint.

 

M. Dunlop a déposé plusieurs affidavits montrant comment DUAL et DUAL-CIBA-GEIGY ont été affichées sur des marchandises promotionnelles et du matériel publicitaire. La majorité de ces marchandises et de ce matériel ont été distribués avant 1996.  Quelques-uns d’entre eux (telle la brochure produite sous la cote L, distribuée en 1992, et la brochure produite sous la cote M, distribuée en 1994) montrent de quelle façon DUAL apparaît sur les emballages d’herbicides.

 

La requérante a soulevé le fait que la pièce S annexée à l’affidavit de Dunlop renvoie au moment de la mise sur le marché d’un produit appelé DUAL II. Cependant, j’estime que cela ne contredit pas l’allégation de l’opposante selon laquelle elle a employé la marque de commerce DUAL en 1997, de même qu’il n’existe aucun élément établissant que le produit original DUAL a été retiré du marché. En outre, je remarque que sur l’emballage du nouveau produit, le mot DUAL est présenté dans une coloration différente de celle utilisée pour le II, et que le symbole 7 apparaît immédiatement après le mot DUAL. On peut donc conclure que malgré l’ajout de « II », la marque DUAL est employée avec le nouveau produit.

 

M. Dunlop a déposé les chiffres d’affaires annuels des herbicides DUAL pour chacune des années comprises entre 1987 et 1997. Le total des ventes varie entre 12 et 27 millions de dollars annuellement. Entre 1987 et 1994, une somme supérieure à 3% du chiffre d’affaires a été dépensée pour la publicité du produit DUAL.  Pour chacune des années 1995, 1996 et 1997, une somme supérieure à un demi-million de dollars a été dépensée pour la publicité du produit DUAL. Le produit a été annoncé à la radio et à la télévision de m“me que dans la presse, comme en font foi des scénarios-maquettes ainsi qu’une bande de cassette produits en preuve.

 

Mme Luciani, recherchiste en marques de commerce, a déposé ce qu’elle appelle des « imprimés d’ordinateur » de l’enregistrement no TMA 233,813 de la marque de commerce VITAVAX DUAL, ainsi que des renseignements sur la demande no 838,131 pour la marque de commerce DUOGUARD.

 

 


Motifs d’opposition

Au moment de l’audience, l’opposante a retiré son premier motif d’opposition.

 

Dans son deuxième moyen d’opposition, l’opposante allègue que la demande en cause n’est pas conforme aux exigences de l’alinéa 30i) de la  Loi sur les marques de commerce parce qu’au moment de sa production, la requérante connaissait certaines marques déposées de l’opposante et ne pouvait, par conséquent, être convaincue d’avoir le droit d’employer la marque projetée. Comme l’opposante n’a produit aucun élément de preuve établissant que la requérante connaissait les marques de l’opposante, celle-ci ne s’est pas acquittée de son fardeau de présentation initiale et par conséquent, ce motif d’opposition est rejeté.

 

Le troisième motif d’opposition est fondé sur l’alinéa 12(1)d) de la Loi, l’opposante alléguant que DUO SHOT n’est pas enregistrable parce qu’elle crée de la confusion avec les marques déposées DUAL, enregistrement no 358,115, DUAL-CUSTOM enregistrement no 391,154 et DUAL-CIBA-GEIGY, enregistrement no 275,743. Le registraire a le pouvoir discrétionnaire de vérifier dans le registre l’existence des enregistrements invoqués par l’opposante [voir Quaker Oats of Canada Ltd./La Compagnie Quaker Oats du Canada Ltée c. Menu Foods Ltd., 11 C.P.R. (3d) 410], ce que j’ai fait.  L’enregistrement no 391,154 a été radié le 5 novembre 1999. L’enregistrement no 275,743 a été annulé le 7 janvier 1997. En conséquence, ce motif d’opposition peut être pris en considération mais seulement en ce qui concerne l’enregistrement n358,115.

 

Le quatrième motif d’opposition est fondé sur les alinéas 16(3)a) et b) de la Loi, l’opposante alléguant que la requérante n’est pas la personne admise à l’enregistrement parce que la marque crée de la confusion avec les marques de commerce de l’opposante DUAL, DUAL-CUSTOM et DUAL-CIBA-GEIGY, lesquelles ont été employées par l’opposante avant le dépôt de la demande de la requérante, et pour lesquelles les demandes ont été déposées au Canada par l’opposante avant celle de la requérante.

 

Selon l’alinéa 16(3)a) sur lequel se fonde en partie ce motif d’opposition, l’opposante a la charge de présentation de faire la preuve de l’emploi de ses marques antérieurement à la date du dépôt de la demande de la requérante, et d’établir qu’elle ne les avait pas abandonnées à la date de l’annonce de cette demande. L’opposante s’est acquittée du fardeau initial qui lui incombait mais seulement en ce qui concerne sa marque DUAL.


 

La deuxième partie du motif d’opposition fondé sur le paragraphe 16(3), à savoir la confusion entre les marques pour lesquelles des demandes avaient été antérieurement produites, ne sera pas prise en considération puisqu’aucune des trois demandes n’était pendante au moment de l’annonce de la demande de la requérante, l’enregistrement des trois marques ayant été accordé cette date. [voir Governor and Co. of Adventurers of England trading into Hudson's Bay, commonly called Hudson’s Bay Co. c. Kmart Canada Ltd., 76 C.P.R. (3d) 526, à la p. 528].

 

Dans son cinquième motif d’opposition, l’opposante fait valoir que la marque de commerce de la requérante n’est et ne peut pas être distinctive parce que DUO SHOT crée de la confusion avec les marques susmentionnées de l’opposante.

 

La date pertinente pour l’étude du motif d’opposition prévu à l’alinéa 12(1)d) est celle de ma décision [voir Park Avenue Furniture Corporation c. Wickes/Simmons Bedding Ltd. et le Registraire des marques de commerce, 37 C.P.R. (3d) 413 (C.A.F.)]. La date pertinente pour l’étude du motif d’opposition prévu à l’alinéa 16(3)a) est celle de la date du dépôt de la demande et la date pertinente pour l’étude du motif du caractère non distinctif est celle du dépôt de la déclaration d’opposition [voir Re Andres Wines Ltd.et E. & J. Gallo Winery (1975), 25 C.P.R. (2d) 126, à la p. 130 (C.A.F.) et Park Avenue Furniture Corporation c. Wickes/Simmons Bedding Ltd. (1991), 37 C.P.R.(3d) 412, à la p. 424 (C.A.F.)].

 

Risque de confusion

 

C’est à la requérante qu’incombe le fardeau ultime de démontrer qu’il n’existe pas de risque raisonnable de confusion entre les marques en cause. Cela signifie que s’il est impossible d’en arriver à une conclusion précise, la question doit tre tranchée contre la requérante [voir John Labatt Ltd. c. Molson Companies Ltd. (1990), 30 C.P.R. (3d) 293].  

 


Le critère à appliquer pour déterminer s’il y a confusion est un critère fondé sur la première impression et sur le souvenir imparfait. Le registraire doit, lorsqu’il applique le critère pour déterminer s’il y a confusion conformément au paragraphe 6(2) de la Loi sur les marques de commerce, tenir compte de toutes les circonstances de l’espèce, y compris celles expressément énoncées au paragraphe 6(5) de la Loi.  Ces facteurs sont : le caractère distinctif inhérent des marques de commerce et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues; la période pendant laquelle chacune d’elles a été en usage; le genre de marchandises, services ou entreprises; la nature du commerce; et le degré de ressemblance entre les marques de commerce dans la présentation ou le son ou dans les idées qu’elles suggèrent. L’importance à donner à chacun de ces critères pertinents peut varier selon les circonstances [voir Clorox Co. c. Sears Canada Inc. 41 C.P.R. (3d) 483 (C.F.1re inst.); Gainers Inc. c. Tammy L. Marchildon et le Registraire des marques de commerce (1996), 66 C.P.R. (3d) 308 (C.F.1re inst.)].

 

Comme aucune d’elles n’a de signification en liaison avec leurs marchandises, les marques des deux parties possèdent un caractère distinctif inhérent. La marque de commerce de la requérante n’est pas devenue connue dans une quelconque mesure, alors que la marque DUAL de l’opposante était connue dans une large mesure ŕ chacune des dates pertinentes.

 

La période pendant laquelle les marques ont été en usage favorise l’opposante en ce que sa marque DUAL est en usage depuis 1978, alors qu’il n’existe aucun élément de preuve de l’emploi de la marque de la requérante.

 

Le facteur relatif au genre de marchandises favorise également l’opposante en ce que les marchandises des parties sont étroitement reliées entre elles, et même se chevauchent en ce qui a trait aux herbicides.

 

Étant donné la similitude qui existe entre les marchandises des parties et l’absence de tout élément de preuve contraire, on peut raisonnablement supposer que les voies commerciales utilisées par les parties sont les mêmes ou qu’elles pourraient se chevaucher.

 

Le degré de ressemblance général entre les marques est significatif. Même si la marque de la requérante ne comprend que deux mots, le premier est remarquablement semblable à la marque DUAL de l’opposante dans la présentation, le son et l’idée qu’il suggère. Ainsi qu’il est dit dans Conde Nast Publications Inc. c. Union des Editions Modernes (1979), 46 C.P.R. (2d) 183 (C.F.1re inst.), à la p. 188, «  [i]l est évident que le premier mot ou la première syllabe d’une marque de commerce est celui ou celle qui sert le plus à établir son caractère distinctif ».

 

L’état du registre, tel qu’il appert de l’affidavit de Mme Luciani, constitue une autre circonstance de l’espèce. Cependant, cette preuve n’est pertinente que dans la mesure où l’on peut en tirer des conclusions sur l’état du marché, et cela est possible seulement lorsqu’on peut trouver au registre un grand nombre d’enregistrements pertinents [voir Ports International Ltd. c. Dunlop Ltd. (1992), 41 C.P.R. (3d) 432; Del Monte Corporation c. Welch Foods Inc. (1992), 44 C.P.R. (3d) 205 (C.F.1re inst.); Kellogg Salada Canada Inc. c. Maximum Nutrition Ltd. (1992), 43 C.P.R. (3d) 349 (C.A.F.)].  Or, les deux enregistrements déposés en preuve par Madame Luciani, dont l’un ne concerne même pas des marchandises s’apparentant à celles en cause, ne permettent à l’évidence pas de tirer quelque conclusion que ce soit quant à l’état du marché.


 

Ayant pris en considération toutes les circonstances de l’espèce, je conclus que la requérante ne s’est pas acquittée de son fardeau d’établir qu’il n’existe pas de risque raisonnable de confusion entre sa marque DUO SHOT et la marque de l’opposante DUAL, quelle que soit la date pertinente. En conséquence, les troisième, quatrième et cinquième motifs d’opposition sont accueillis dans la mesure où ils concernent la marque de commerce DUAL.

 

Par le pouvoir que m’a délégué le registraire des marques de commerce en vertu du paragraphe 63(3) de la Loi sur les marques de commerce, je rejette la demande de la requérante en application du paragraphe 38(8) de la Loi.

 

FAIT Ê TORONTO (ONTARIO) LE                  17e                    JANVIER 2001.

 

 

 

 

 

Jill W. Bradbury

Agente d’audience

Commission des oppositions

des marques de commerce

 

 

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