Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

Informations sur la décision

Contenu de la décision

BW v2 Logo

LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

THE REGISTRAR OF TRADE-MARKS

Référence : 2017 COMC 2

Date de la décision : 2017-01-16

[TRADUCTION CERTIFIÉE,

NON RÉVISÉE]

 

DANS L’AFFAIRE DE L’OPPOSITION

 

 

AIL International Inc.

Opposante

et

 

Canadian Energy Services L.P.

Requérante

 

 

 



 

1,624,178 pour la marque de commerce SUPERCORR

 

Demande

 

Dossier

[1]  Le 25 avril 2013, Canadian Energy Services L.P. a produit une demande d'enregistrement pour la marque de commerce SUPERCORR, fondée sur l'emploi et l'enregistrement de la marque par la requérante et une prédecesseure en titre (Jacam Chemicals, LLC) aux États-Unis d'Amérique. La demande vise les produits suivants [Traduction] :

 

inhibiteur de corrosion, à savoir un revêtement protecteur pour utilisation dans les domaines suivants : extraction du pétrole, injection d'eau ainsi que transformation et transport de pétrole et de produits chimiques.

 

La requérante a fourni au registraire une copie certifiée de son enregistrement aux États-Unis. L'enregistrement indique que i) la marque est enregistrée pour une période de 10 ans à compter du 29 mai 2012 et ii) la marque a été employée pour la première fois en 1998.

 

[2]  La demande en cause a été annoncée aux fins d'opposition dans le Journal des marques de commerce du 12 novembre 2014, et AIL International Inc. s'y est opposée le 23 mars 2015. Le 27 mars 2015, le registraire a transmis à la requérante une copie de la déclaration d'opposition, ainsi que l'exige l'art. 38(5) de la Loi sur les marques de commerce, L.R.C. 1985, ch. T-13. En réponse, la requérante a produit et signifié une contre-déclaration dans laquelle elle nie l'ensemble des allégations contenues dans la déclaration d'opposition. L'opposante a subséquemment demandé (avant la production de toute preuve) et a obtenu l'autorisation de modifier la déclaration d'opposition : voir la décision de la Commission datée du 25 août 2015. Toute mention subséquente de la déclaration d'opposition désignera la déclaration d'opposition modifiée.

 

[3]  La preuve de l'opposante est constituée de l'affidavit de Wayne Ford. La preuve de la requérante est constituée de l'affidavit de Craig Nieboer. L'opposante n’a produit aucune preuve en réponse. Ni l'une ni l'autre des parties n'a procédé à un contre-interrogatoire. Seule la requérante a produit un plaidoyer écrit, mais les parties étaient toutes deux présentes à l'audience qui a été tenue.

 

Déclaration d’opposition

[4]   L'opposante allègue qu'elle est la propriétaire de la marque déposée SUPER-COR employée en liaison avec un tuyau de drainage ondulé. Les motifs d'opposition peuvent être résumés comme suit :

 

Non-conformité à l'art. 30

[5]  La demande n'est pas conforme à

i) l'art. 30a) de la Loi sur les marques de commerce, parce que [Traduction] « l'état déclaratif des Produits n'est pas formulé de façon suffisamment détaillée et n'est donc pas dressé dans les termes ordinaires du commerce »;

ii) l'art. 30d) de la Loi, parce que la requérante n'a pas employé la marque visée par la demande aux États-Unis avant la date de production du 25 avril 2013;

iii) l'art. 30i) parce que la requérante [Traduction] « était au courant ou aurait dû être au courant » de l'emploi et de l'enregistrement par l'opposante de sa marque SUPER-COR.

 

Enregistrabilité - art. 12(1)d)

[6]  La marque SUPERCORR visée par la demande n'est pas enregistrable, parce qu'elle crée de la confusion avec la marque déposée SUPER-COR de l'opposante.

 

Droit à l'enregistrement - art. 16(2)

[7]  La requérante n'a pas droit à l'enregistrement de la marque SUPERCORR visée par la demande parce que

i) à la date de production de la demande, la requérante n'avait pas employé la marque aux États-Unis ainsi qu'il est revendiqué dans la demande;

ii) la marque SUPERCORR visée par la demande crée de la confusion avec la marque SUPER-COR de l'opposante employée antérieurement au Canada;

iii) [Traduction] « les États-Unis ne sont pas le pays d’origine de la Requérante . . . l'article 16(2) . . . exige que l'enregistrement sous-jacent soit issu du pays d’origine du requérant ».

 

Caractère distinctif

[8]  La marque SUPERCORR visée par la demande n'est pas distinctive des produits de la requérante compte tenu [Traduction] « des Produits et Services de l'Opposante liés à la Marque de commerce de l'Opposante ».

 

[9]  Avant d'évaluer les allégations formulées dans la déclaration d'opposition, j'examinerai d'abord la preuve des parties et je préciserai en quoi consistent le fardeau de preuve de l'opposante et le fardeau ultime de la requérante.

 

 

Preuve de l’opposante

Wayne Ford

[10]  M. Ford atteste qu'il est le vice-président des services d'ingénierie d'une société (« Atlantic ») affiliée à l'opposante. Il a accès aux registres d'entreprise et aux dossiers financiers de l'opposante et a une connaissance détaillée des activités de l'opposante. La preuve qu'il a produite peut être résumée comme suit.

 

[11]  L'opposante, AIL International Inc., ainsi qu'Atlantic et les sociétés qui leur sont affiliées sont actives dans les secteurs de l'exploitation minière, des transports, des travaux publics, des chemins de fer et de l'exploitation forestière. L'opposante emploie sa marque SUPER-COR en liaison avec la conception technique, la construction, la gestion de projet et les services d'experts-conseils dans les domaines de la construction de ponts, de l'exploitation minière et forestière, des travaux publics et des chemins de fer depuis au moins aussi tôt qu'avril 2008. L'opposante a octroyé à ses sociétés affiliées et à des tiers des licences d'emploi de sa marque SUPER-COR en liaison avec les produits et services de l'opposante. L'opposante exerce un contrôle direct sur les caractéristiques et la qualité des produits et services offerts par ses licenciés.

 

[12]  M. Ford décrit le genre des produits de l'opposante au para. 13 de son affidavit [Traduction] :

 

13. Les Marchandises de l'Opposante sont des plaques d'acier de construction ondulées de façon très marquée pour des applications dans de grandes infrastructures comme des ponts, tunnels, ponceaux à dalot, tunnels pour piles de stockage, entrées de tunnel, passages inférieurs et arches pour routes de transport lourd, entre autres choses. Les grandes ondulations annulaires des Marchandises de l'Opposante offrent neuf fois la rigidité de la plaque de construction conventionnelle, leur permettant de supporter les charges les plus lourdes. Les Marchandises de l'Opposante peuvent s'étendre sur 82 pieds et contiennent un revêtement galvanisé ou un revêtement en copolymère épais à la surface des Marchandises de l'Opposante pour, notamment, prévenir la corrosion et la rouille de cette surface, prolongeant ainsi la durée de vie des Marchandises de l'Opposante. (je souligne)

 

[13]  Je souligne que la marque déposée SUPER-COR de l'opposante vise seulement les produits [Traduction] « tuyau de drainage ondulé », ce qui correspond à un produit différent (et qui est destiné à un autre usage) que les [Traduction] « plaques d'acier de construction ondulées » mentionnées par M. Ford au para. 13 cité ci-dessus. Je le mentionne seulement par souci de précision. Le fait que l'opposante s'appuie sur l'emploi de sa marque en liaison avec des produits en plus de ceux qui sont spécifiés dans son enregistrement ne porte pas, dans les circonstances de l’espèce, préjudice à l'opposante.

 

 

[14]  M. Ford décrit le genre d'entreprise de l'opposante aux para. 14 à 17 de son affidavit [Traduction] :

 

14. La licenciée de l'Opposante . . . conçoit . . . les Marchandises de l'Opposante par l'entremise de son équipe de conception . . . Bien que les Marchandises de l'Opposante soient vendues dans des formats standards, elles sont aussi souvent conçues sur mesure en raison de l'ampleur et du caractère unique de chaque projet requérant les Marchandises de l'Opposante.

 

15. Dans une transaction caractéristique, l'Opposante ou ses licenciés rencontrent les clients et fournissent de la documentation normalisée arborant la marque de commerce SUPER-COR liée aux Marchandises de l'Opposante. La documentation permet aux clients de prendre connaissance des caractéristiques, des formats standards et des spécifications, y compris les revêtements, qui sont disponibles pour les Marchandises de l'Opposante. En raison de la complexité des solutions recherchées par les clients en matière d'infrastructure et du genre des Marchandises de l'Opposante, l'Opposante offre les Services de l'Opposante avec les Marchandises de l'Opposante comme éléments d'un ensemble. (je souligne)

 

16. Une fois que les clients ont choisi les spécifications des Marchandises de l'Opposante, standards ou sur mesure, et selon l'ampleur du projet, une structure de paiements est établie pour l'ensemble de Marchandises et de Services de l'Opposante arborant la marque de commerce SUPER-COR . . .

 

17. Atlantic [une société affiliée] prépare les dessins techniques arborant la marque de commerce SUPER-COR à l'intention des clients montrant comment les Marchandises de l'Opposante doivent être construites sur les chantiers. Après approbation des dessins, les Marchandises de l'Opposante sont fabriquées et expédiées sur le chantier . . .

 

 

[15]  De 2008 à 2015 inclusivement, les ventes faites par l'opposante de plaques d'acier ondulées sous la marque SUPER-COR de l'opposante ont varié de 3 millions de dollars à 11 millions de dollars par année, avec une moyenne de 6 millions de dollars par année. Au cours de la même période, l'opposante a dépensé environ 800 000 $ par année [Traduction] « pour promouvoir la marque de commerce SUPER-COR au Canada en liaison avec les Marchandises et les Services de l'Opposante ». Cette promotion comprenait de la publicité sur des sites Web, à l'occasion de salons commerciaux et dans des publications spécialisées.

 

[16]  D'après mon examen de l'affidavit de M. Ford et des documents volumineux produits en pièces, il m'apparaît que la marque SUPER-COR est employée en liaison avec des produits mais non des services. Les services d'ingénierie de l'opposante sont plutôt offerts sous la marque AIL. Une variété de produits sont offerts sous diverses marques, y compris, par exemple, SUPER-COR, ULTRA-COR et BOLT-A-PLATE. Les différents produits ont différentes caractéristiques structurelles, sont destinés à différents usages et sont par conséquent adaptés à différents projets d'ingénierie. Les clients de l'opposante comprennent que, lorsqu'ils achètent un produit SUPER-COR (généralement dans le cadre d'un projet d'ingénierie de grande envergure), celui-ci aura une résistance exceptionnelle et un revêtement résistant à la corrosion.

 

 

Preuve de la requérante

Craig Nieboer

[17]  M. Nieboer atteste qu'il est le directeur financier de la société de la requérante. Il explique que la requérante fournit des [Traduction] « solutions chimiques consommables évoluées au plan technique . . . ». Si je comprends bien, les produits de la requérante se composent de i) fluides de forage pour emploi dans les champs pétrolifères et de ii) produits chimiques de production et de spécialité employés dans l'industrie pétrolière et gazière nord-américaine.

 

[18]  M. Nieboer décrit les activités de la requérante liées aux fluides de forage au para. 6 de son affidavit [Traduction] :

 

6. La requérante exerce ses activités liées aux fluides de forage dans toute l'Amérique du Nord et celles-ci génèrent des revenus grâce à la vente d'un circuit de fluide de forage à un client, généralement l'exploitant d'un puits, d'une plateforme ou d'un pipeline pétrolier ou gazier. Avant la vente du circuit de fluide de forage, la Requérante travaille en collaboration avec l'exploitant pour concevoir un circuit de fluide de forage . . . La Requérante a une vaste gamme de produits dont plusieurs solutions exclusives de fluide de forage adaptées à toutes les activités de forage de pétrole et de gaz naturel terrestre et en mer en eau peu profonde actuellement réalisées en Amérique du Nord.

 

Si je comprends bien, la requérante n'allègue pas qu'elle emploie la marque SUPERCORR en liaison avec ses produits de fluide de forage ou des services de forage.

 

[19]  Cependant, la requérante allègue l'emploi de la marque SUPERCORR en liaison avec des produits chimiques de production et de spécialité dans le cadre de ses activités. À cet égard, M. Nieboer explique que, le 1er mars 2013, la requérante a acheté les actifs de Jacam (voir le para. 1 ci-dessus), y compris [Traduction] « la marque de commerce SUPERCORR et les brevets s'y rattachant ». La requérante a ensuite signé un accord de licence accordant à Jacam le droit de produire et de vendre les produits SUPERCORR sous [Traduction] « les marques de commerce applicables ».

 

[20]  À l'audience, l'avocat de l'opposante a fait valoir que la preuve de M. Nieboer quant à l'emploi sous licence de la marque SUPER-COR par Jacam n'était pas suffisante pour établir que l'emploi de la marque sous licence par Jacam s'applique au profit de la requérante. J'en conviens. À cet égard, il n'y a aucune preuve que l'accord de licence prévoyait que la requérante exerce un contrôle sur la qualité des produits de Jacam (ainsi que l'exige l'art. 50(1) de la Loi sur les marques de commerce). De plus, il n'y a aucune preuve qui démontre qu'un avis public de la licence de Jacam ou de la propriété qu'a la requérante de la marque SUPER-COR a été donné (ainsi que l'exige l'art. 50(2) de la Loi sur les marques de commerce). Cependant, compte tenu des allégations de l'opposante dans la déclaration d'opposition, ces lacunes dans la preuve de la requérante ne sont pas fatales à la cause de la requérante : voir le para. 49 ci-dessous.

 

[21]  M. Nieboer décrit les activités de la requérante liées aux produits chimiques de production et de spécialité aux para. 9 à 11 de son affidavit [Traduction] :

 

9. La marque SUPERCORR est employée par la Requérante, sa division PureChem et JACAM, ainsi que par leurs prédécesseurs, en liaison avec un produit inhibiteur de corrosion binaire, qui se présente sous la forme d'un revêtement protecteur destiné à être employé dans l'extraction pétrolière . . . SUPERCORR est un produit à deux composants qui est appliqué sur la surface du métal et qui se lie au métal pour devenir partie intégrante de sa matrice formant ainsi un écran microfilm tenace ressemblant à un filet pour prévenir la corrosion. Des exemples de l'emballage et des étiquettes du produit SUPERCORR établissant l'emploi de la marque de commerce sont joints à mon affidavit en pièce « B ».

 

10. Des spécimens de factures faisant état de ventes du produit SUPERCORR et de ventes et de renseignements sur la production de JACAM et de CES se rapportant au produit SUPERCORR datés de 2013, de 2014 et de 2015 sont joints à mon affidavit en pièce « C ».

 

11. Les produits SUPERCORR sont commercialisés de différentes manières, y compris par des représentants aux ventes directes, dans des salons commerciaux, dans des publications spécialisées, sur des panneaux d'affichage et dans Internet auprès des consommateurs sur les marchés pertinents. Le produit est vendu dans un ensemble de services qui comprend l'évaluation analytique et l'application du produit SUPERCORR. Dans certains cas, cet ensemble de services s'accompagne d'une formation sur la façon d'appliquer correctement le produit SUPERCORR.

 

 

[22]  Il ressort de la pièce B que les produits chimiques de la requérante sont vendus dans des barils de format standard (55 gallons américains) et que la marque SUPERCORR est présentée dans la partie supérieure droite d'une grande étiquette d'information collée au baril.

 

[23]  D'après mon examen de la pièce C, je souligne que i) les ventes de la requérante faites sous sa marque SUPERCORR se sont élevées à 276 000 $ en 2013, à 747 000 $ en 2014 et à 909 000 $ en 2015; que ii) les produits chimiques de la requérante varient généralement d'environ 6,70 $/gallon à 10,50 $/gallon; et que iii) les commandes caractéristiques des produits chimiques se rapportent à des centaines de gallons.

 

[24]  Cependant, la pièce C ne fait pas de distinction entre i) les ventes du produit au Canada par opposition aux États-Unis; et ii) les ventes faites par la requérante (et sa division PureChem) par opposition aux ventes faites par Jacam. En conséquence, la preuve de ventes de M. Nieboer ne me permet pas de déduire que la marque visée par la demande a acquis un caractère distinctif quelconque au Canada qui s'applique au profit de la requérante.

 

 

Fardeaux de preuve

[25]  Comme je l'ai mentionné précédemment, avant d'examiner les motifs d'opposition, j'estime nécessaire de rappeler en quoi consiste i) le fardeau initial qui incombe à l'opposante, soit celui d'étayer les allégations contenues dans la déclaration d'opposition, et ii) le fardeau ultime dont doit s'acquitter la requérante, soit celui de prouver sa cause.

 

 [26] En ce qui concerne le point i) ci-dessus, conformément aux règles de preuve habituelles, l'opposante a le fardeau de preuve d'établir les faits sur lesquels elle appuie les allégations qu'elle formule dans sa déclaration d'opposition : voir John Labatt Limited c. The Molson Companies Limited, 30 CPR (3d) 293, à la p 298 (CF 1re inst). Le fait qu'un fardeau de preuve soit imposé à l'opposante signifie que, pour qu'une question soulevée par l'opposante soit prise en considération, il doit exister une preuve suffisante pour permettre de conclure raisonnablement à l’existence des faits allégués à l’appui de cette question. En ce qui a trait au point ii) ci-dessus, la requérante doit, quant à elle, s'acquitter du fardeau ultime de démontrer que sa demande ne contrevient pas aux dispositions de la Loi sur les marques de commerce invoquées par l'opposante dans la déclaration d'opposition (concernant les allégations pour lesquelles l'opposante s'est acquittée du fardeau de preuve qui lui incombait). Le fait que le fardeau ultime incombe à la requérante signifie que, s’il est impossible d'arriver à une conclusion déterminante une fois que toute la preuve a été présentée, la question doit être tranchée à l’encontre de la requérante.

 

Examen des motifs d'opposition

Conformité à l'art. 30

[27]  L'opposante n'a pas produit la moindre preuve à l'appui des motifs d'opposition fondés sur la non-conformité à l'art. 30a) ou à l'art. 30d). Ces motifs sont donc rejetés du fait que l'opposante ne s'est pas acquittée de son fardeau de preuve d'établir le bien-fondé de ces motifs.

 

[28]  Le motif d'opposition fondé sur la non-conformité à l'art. 30i) est également rejeté. À cet égard, le fait qu'un requérant connaissait ou devait forcément connaître l'existence de la marque de commerce d'un opposant créant prétendument de la confusion ne constitue pas une circonstance exceptionnelle pouvant servir de fondement à un motif d'opposition fondé sur l'art. 30i) : voir Luxo Laboratories Limited c Magistral Fabrication Inc, 2004 CanLii 71818; Woot Inc. c. WootRestaurants Inc. / Les Restaurants Woot Inc, 2012 COMC 197 (CanLII), aux para 10 et 11. Un motif d'opposition fondé sur l'art. 30i) doit porter qu'il existe des circonstances exceptionnelles telles que la mauvaise foi ou la non-conformité à une loi fédérale : voir Les Abris Harnois Inc c Prima Innovations Inc, 2012 COMC 27 (CanLII).

 

Autres motifs d'opposition

[29]  Dans les circonstances de l’espèce, les autres motifs d'opposition reposent sur la question de la confusion entre la marque SUPERCORR visée par la demande et la marque SUPER-COR de l'opposante. Les dates pertinentes pour l'appréciation de la question de la confusion sont les suivantes : le 25 avril 2013 (la date de production de la demande relative à la marque SUPERCORR) eu égard à la question du droit à l'enregistrement; le 23 mars 2015 (la date de production de la déclaration d'opposition) eu égard à la question du caractère distinctif; et la date de ma décision eu égard à la question de l'enregistrabilité : pour un examen de la jurisprudence concernant les dates pertinentes dans les procédures d'opposition, voir American Retired Persons c. Canadian Retired Persons (1998), 84 CPR(3d) 198, aux p 206 à 209 (CF 1re inst).

 

Ce qu'il faut entendre par « confusion entre des marques de commerce »

[30]  Des marques de commerce créent de la confusion lorsqu’il existe une probabilité raisonnable de confusion au sens de l’art. 6(2) de la Loi sur les marques de commerce, lequel est reproduit ci-dessous :

L’emploi d’une marque de commerce crée de la confusion avec une autre marque de commerce lorsque l’emploi des deux marques de commerce dans la même région serait susceptible de faire conclure que les produits . . . liés à ces marques de commerce sont fabriqués . . . ou que les services liés à ces marques sont . . . exécutés par la même personne, que ces produits ou ces services soient ou non . . . de la même catégorie générale.

 

[31]  Ainsi, l'art. 6(2) ne porte pas sur la confusion entre les marques elles-mêmes, mais sur une confusion portant à croire que des produits ou des services provenant d'une source proviennent d'une autre source. En l'espèce, la question que soulève l'art. 6(2) est celle de savoir si des acheteurs des produits de la requérante (inhibiteurs de corrosion destinés à être employés dans l'extraction pétrolière) vendus sous la marque SUPERCORR croiraient que ces produits ont été fabriqués ou autorisés par l'opposante, ou font l'objet d'une licence concédée par cette dernière, qui vend un tuyau de drainage ondulé et une plaque d'acier ondulée sous la marque SUPER-COR. C'est à la requérante qu'incombe le fardeau ultime d'établir, selon la norme habituelle de la prépondérance des probabilités qui s'applique en matière civile, qu'il n'y aurait pas de probabilité raisonnable de confusion.

 

Le test en matière de confusion

[32] Le test en matière de confusion est celui de la première impression et du souvenir imparfait. Les facteurs à prendre en considération pour déterminer si deux marques créent de la confusion sont « toutes les circonstances de l'espèce, y compris » celles expressément énoncées aux art. 6(5)a) à 6(5)e) de la Loi, à savoir : le caractère distinctif inhérent des marques de commerce et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues; la période pendant laquelle chaque marque a été en usage; le genre de produits, services ou entreprises; la nature du commerce; le degré de ressemblance entre les marques dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu'elles suggèrent. Cette liste n'est pas exhaustive et il importe de prendre en considération tous les facteurs pertinents. En outre, ces facteurs n’ont pas nécessairement tous le même poids, car le poids qu’il convient d’accorder à chacun d’entre eux varie selon les circonstances : voir Gainers Inc. c. Tammy L. Marchildon et le Registraire des marques de commerce (1996), 66 CPR (3d) 308 (CF 1re inst). Toutefois, comme l’a souligné le juge Rothstein dans Masterpiece Inc c. Alavida Lifestyles Inc. (2011), 92 CPR (4th) 361 (CSC), le degré de ressemblance est souvent le facteur susceptible d’avoir le plus d’importance dans l’analyse relative à la confusion, et ce, même s’il est mentionné en dernier lieu à l’art. 6(5).

 

Premier facteur – le caractère distinctif inhérent et acquis

[33]  La marque SUPER-COR de l'opposante possède un faible caractère distinctif inhérent, étant donné qu'elle se compose d'un préfixe laudatif et d'un suffixe qui, en lien avec les produits de l'opposante, est suggestif d'un produit « corrugated » [ondulé]. De même, la marque SUPERCORR visée par la demande possède un faible caractère distinctif inhérent, étant donné qu'elle se compose d'un préfixe laudatif et d'un suffixe qui, en lien avec les produits de la requérante, est suggestif de produits liés à la « corrosion ». Les marques des parties sont par conséquent intrinsèquement faibles.

 

[34]  La marque de l'opposante avait acquis un certain caractère distinctif à la date pertinente la plus lointaine (25 avril 2013) et a continué d'acquérir un caractère distinctif jusqu'aux dernières dates pertinentes, en raison des ventes faites par l'opposante sous sa marque et de la promotion de sa marque à compter de 2008. Cependant, il est difficile de tirer quelque conclusion définitive que ce soit quant à la mesure dans laquelle la marque de l'opposante a acquis un caractère distinctif en raison de la nature générale de la preuve de l'opposante. Plus précisément, la preuve n'indique pas si les ventes de millions de dollars faites chaque année sous la marque SUPERCORR résultent de quelques projets d'ingénierie seulement ou de nombreux projets d'ingénierie. À cet égard, le caractère distinctif acquis de la marque augmenterait évidemment en fonction du nombre de ventes faites à différentes personnes.

 

[35]  Comme je l'ai indiqué précédemment (voir les para 19 et 20), je ne suis pas en mesure d'attribuer un caractère distinctif acquis quelconque à la marque SUPERCORR visée par la demande dont bénéficierait la requérante, à l'une quelconque des dates pertinentes.

 

[36]  Le premier facteur, qui concerne à la fois le caractère distinctif inhérent et le caractère distinctif acquis, favorise donc l'opposante. Cependant, comme il est difficile d'évaluer la mesure dans laquelle la marque de l'opposante a acquis un caractère distinctif, je ne suis pas en mesure de conclure que le premier facteur favorise de manière significative l'opposante.

 

Deuxième facteur – la période pendant laquelle les marques ont été en usage

[37]  L'opposante a établi l'emploi de sa marque depuis 2008, c'est-à-dire cinq ans avant la date pertinente la plus lointaine. La preuve de la requérante n'est pas suffisante pour établir qu'elle a employé sa marque au Canada à l'une quelconque des dates pertinentes. Par conséquent, le deuxième facteur favorise l'opposante.

 

Troisième et quatrième facteurs – le genre de produits et d’entreprises et la nature du commerce

[38]  Les observations de la requérante concernant les troisième et quatrième facteurs sont présentées à la page 7 de son plaidoyer écrit [Traduction] :

 

Le genre des Produits de la Requérante et celui des marchandises et des services de l'Opposante sont complètement différents. L'Opposante semble exercer ses activités exclusivement dans les domaines de l'exploitation minière, de la construction de ponts et de routes, de l'exploitation forestière et des chemins de fer. La preuve produite par l'Opposante indique clairement que celle-ci est une firme d'ingénierie ayant des clients avertis qui achètent des solutions sur mesure pour des tunnels et des ponts. Les factures indiquent que le coût des produits et des services de l'Opposante est considérable. Elle n'a fourni aucune preuve qu'elle exerce des activités ou qu'elle vend des produits et des services dans l'industrie pétrolière et gazière. En revanche, la Requérante exerce ses activités exclusivement dans l'industrie pétrolière et gazière, et plus précisément en lien avec le forage. Les clients de la Requérante sont également des acheteurs avertis qui sont des spécialistes du forage et de la complétion de puits. Les Produits de la Requérante sont des produits chimiques pour la production pétrolière et gazière et ne sont pas offerts dans des points de vente au détail ou en gros, mais sont plutôt vendus conjointement avec des services. Aucune preuve n'a été produite pour donner à penser que le genre des marchandises et des services ou la nature du commerce des deux parties se recouperaient de quelque façon que ce soit. (je souligne)

 

[39]  Je souscris aux observations de la requérante qui sont reproduites ci-dessus. Les troisième et quatrième facteurs favorisent donc la requérante de manière significative.

 

Cinquième facteur – le degré de ressemblance

[40]  Les marques des parties sont presque identiques, c'est-à-dire qu'elles se ressemblent dans une très large mesure. Le cinquième facteur favorise donc l'opposante de manière très significative.

 

Jurisprudence relative aux marques de commerce faibles

[41]  Dans l'affaire Handi-Foil Corporation c. Sunbeam Products Inc. 2014 COMC 35 (non publiée), cette Commission a examiné si la marque COOK & CARRY visée par la demande, fondée sur l'emploi projeté au Canada en liaison avec des [Traduction] « casseroles chauffantes portatives », créait de la confusion avec la marque cook-n-carry de l'opposante visant des [Traduction] « récipients de stockage en papier d’aluminium avec couvercles de plastique ».

 

[42]  La Commission a formulé les observations suivantes à l'égard du degré de ressemblance entre les marques [Traduction] :

 

[36]  Les marques COOK-N-CARRY et COOK & CARRY comportent un très haut degré de ressemblance sur le plan visuel, sont essentiellement identiques sur le plan du son et sont complètement identiques dans les idées qu’elles suggèrent. Le cinquième facteur favorise donc largement l’opposante. Cependant, il semble que dans les cas impliquant des marques intrinsèquement faibles, le cinquième facteur de l’article 6(5), c’est-à-dire la ressemblance, devient un facteur moins important et les autres facteurs – le caractère distinctif acquis, la période pendant laquelle les marques de commerce ont été en usage, le genre de marchandises/services et la nature du commerce – prennent une plus grande importance; en outre, la protection accordée aux marques descriptives est étroite . . .

 

[43]  La Commission a ensuite examiné la jurisprudence relative à l'influence du cinquième facteur dans le cas où la marque de l'opposant est intrinsèquement faible [Traduction] :

 

[37] J’ai tenu compte de la jurisprudence en ce qui concerne les marques « faibles » en général et plus particulièrement de l’approche de la Cour envers les marques qui sont faibles parce qu’elles sont descriptives, comme discuté ci-dessous.

 

[38]  Dans Coventry Inc. c. Abrahamian (1984), 1 CPR (3d) 238 (CF 1re inst.), l’opposante s’appuyait sur sa marque SARAH employée en liaison avec des bijoux de fantaisie pour s’opposer à la marque ZAREH employée en liaison avec de (vrais) bijoux faits sur mesure. La marque de l’opposante n’était pas intrinsèquement forte et n’avait pas acquis un caractère distinctif accru par l’emploi, la publicité ou d’autres moyens [Traduction] :

 

À la p. 240

La marque de commerce SARAH est un prénom féminin très répandu dans la chrétienté et, pour cette raison, son caractère distinctif inhérent est faible : Bestform Foundations Inc. c. Exquisite Form Brassiere (Canada) Ltd. (1972), 34 C.P.R. (2d) 163. De telles marques sont considérées comme intrinsèquement faibles et ne peuvent bénéficier d’une protection étendue : American Cyanamid Co. c. Record Chemical Co. Inc. (1972), 7 C.P.R. (2d) 1 [1972] C.F. 1271; et GSW Ltd. c. Great West Steel Industries Ltd. et al. (1975), 22 C.P.R. (2d) 154. . . . Le caractère distinctif d’une marque intrinsèquement faible peut toutefois être accru par un emploi à grande échelle : GSW Ltd. c. Great West Steel, précitée.

   (soulignement ajouté)

 

 

[39]  Dans Coventry, la Cour a maintenu la conclusion de la Commission que les marques ne créaient pas de confusion. Je suis conscient que la cause Coventry est différente de la présente affaire dans le sens où (i) la ressemblance entre les marques en question était moindre et (ii) les marchandises des parties étaient vendues par l’entremise de voies commerciales différentes.

 

[40]  Les principes énoncés dans Coventry ont été mis en application dans de nombreuses causes y compris, par exemple, dans Boston Pizza International Inc. c. Boston Chicken Inc. (2001), 15 CPR (4th) 345 (CF 1re inst.). Boston Pizza a cherché à faire radier l’enregistrement de la marque de commerce BOSTON CHICKEN, employée en liaison avec comptoir [sic] de commandes à emporter et restaurants et services annexes, alléguant la confusion avec sa marque BOSTON PIZZA employée avec des services de restauration et des marchandises comprenant de la pizza. La Cour a conclu que les marques ne créaient pas de confusion. La discussion de la Cour quant à la protection à accorder aux marques descriptives, au paragraphe 66, est reproduite ci-dessous [Traduction] :

 

[66] Je commence avec l’alinéa 6(5)a) - le caractère distinctif inhérent des marques de commerce ou noms commerciaux et la mesure dans laquelle ils sont devenus connus. Ni la marque de la requérante [BOSTON PIZZA] ni celle de l’opposante [BOSTON CHICKEN] n’ont un caractère distinctif inhérent. Je reprends, en ce sens, les mots du juge Rouleau dans Prince Edward Island Mutual Insurance c. Insurance Co. of Prince Edward Island (1999), 86 C.P.R. (3d) 342 (CF 1re inst.), où le savant juge déclare ce qui suit aux paragraphes 32, 33 et 34 :

 

[32] Quant au premier facteur mentionné au paragraphe 6(5) de la Loi, savoir [sic] le caractère distinctif inhérent des marques de commerce en cause, il est bien reconnu que les marques qui contiennent des termes descriptifs n’ont pas ce [sic] caractère distinctif inhérent et que la Cour ne leur offrira que très peu de protection. En particulier, les marques de commerce ou les noms commerciaux qui mentionnent un lieu géographique comme les noms en cause en l'espèce, sont descriptifs plutôt que distinctifs et ne doivent pas bénéficier d’une protection très étendue. Lorsque le tribunal est appelé à décider si un nom commercial ou une marque de commerce « cause vraisemblablement de la confusion », même de légères différences entre ces marques seront suffisantes pour atténuer toute « confusion » possible.

 

[33] En outre, lorsqu'une partie adopte une appellation descriptive, elle doit accepter une certaine confusion. Dans l’arrêt Walt Disney Productions c. Fantasyland Hotel Inc. (1994), 56 C.P.R. (3d) 129 (BR Alta.); conf. (1996) 67 C.P.R. (3d) 444 (CA Alb.); le tribunal a déclaré à cet égard à la page 183 [Traduction] :

 

Même lorsque les services sont identiques, si le nom commercial est descriptif plutôt que distinctif, il y aura inévitablement une certaine confusion acceptable . . . Office Cleaning Services Ltd. c. Westminster Window and Sign General Cleaners Ltd., précitée. Dans cette dernière affaire, lord Simonds a dit, à la page 41 :

 

Tant que deux commerçants utilisent des termes descriptifs dans leur nom commercial, il est possible que cela entraîne de la confusion chez certaines personnes, quels que soient les mots qui les distinguent . . . En fin de compte, je crois qu’il s’agit tout simplement de ceci : quand un commerçant décide que son nom commercial contiendra des mots courants, il y aura, inévitablement, une certaine confusion. Mais le risque est acceptable sauf si le premier utilisateur est autorisé injustement à s’approprier pour lui seul ces termes. Le tribunal acceptera des différences peu importantes comme étant suffisantes pour éviter toute confusion. Il faut s’attendre à une plus grande discrimination de la part du public lorsqu’un nom commercial est formé en tout ou en partie de termes qui décrivent les articles vendus ou les services offerts.

  (soulignement ajouté)

 

Évidemment, les principes qui s’appliquent aux noms commerciaux s’appliquent également aux marques de commerce.

 

 

[41]  L’ancien président Partington a appliqué les principes dans Coventry, ci-dessus, dans Drexel Heritage Furnishings Inc. c. Hoo Cheung Industries Limited, 1998 CanLII 18462 (CA COMC) à la page 4 :

 

[Traduction]
En ce qui concerne le caractère distinctif inhérent des marques de commerce en question, la marque de commerce HERITAGE CEILING FANS & Dessin de la requérante, qui s’applique à des « ventilateurs de plafond », et la marque de commerce déposée HERITAGE de l’opposante, qui couvre du « mobilier de salon, de chambre à coucher et de salle à manger, des tables d’angle et des chaises à usage de maison, de bureaux et public », possèdent toutes deux un caractère distinctif inhérent faible. Comme le fait remarquer le registraire des marques de commerce d’alors dans Drexel Enterprises Division, U.S. Plywood-Champion Papers Inc. c. National Homes Ltd., 21 C.P.R. (2d) 149, à 152, le mot « Heritage » [héritage] est généralement considéré comme faisant référence à quelque chose qui a de la valeur et qui provient du passé. De plus, quand il est utilisé en lien avec des marchandises telles que du mobilier, le mot indique que ce mobilier est une copie ou incorpore le design d’anciens styles reconnus. De même, la marque de la requérante suggère que ces [sic] ventilateurs de plafond sont conçus selon des formes anciennes. En conséquence, les marques de commerce en question sont des marques faibles et, en l’absence d'importantes preuves de caractère distinctif acquis, n’ont droit qu’à une protection étroite.

  (soulignement ajouté)

 

[42]  Conséquemment, l’opposition a été rejetée. Je suis conscient que, contrairement à la situation qui prévaut en l’espèce, le président Partington [Traduction] « ne s’attendait pas à un chevauchement dans les voies commerciales » entre les marchandises des parties.

 

[44]  Dans Handi-Foil, supra, comme en l'espèce, la Commission a conclu que les premier et deuxième facteurs ne favorisaient pas l'opposante dans une quelconque mesure significative. En ce qui concerne les troisième et quatrième facteurs, la Commission a conclu ce qui suit [Traduction] :

[35]  . . . de marchandises des parties est différent puisqu’un appareil électrique est intrinsèquement différent d’un récipient de stockage en aluminium . . . les marchandises des parties sont vendues à proximité dans les mêmes points de vente au détail, ce qui n’est pas étonnant puisque les marchandises des deux parties font partie de la même catégorie générale des marchandises de cuisine. Le troisième facteur favorise donc la requérante alors que le quatrième facteur favorise l’opposante.

 

La Commission a finalement rejeté l'opposition.

 

[45]  En l'espèce, la requérante s'appuie sur une autre décision témoignant de l'importance des troisième et quatrième facteurs, à la page 8 de son plaidoyer écrit [Traduction] :

I

 

I

Il existe une jurisprudence abondante établissant que même des marques de commerce identiques peuvent coexister lorsqu'elles sont employées en liaison avec des marchandises et des services différents et dans des commerces différents. Par exemple, dans Bridgestone Corp. c. Campagnolo S.R.L. 2014 CF 37, 117 C.P.R. (4th) l, la Cour fédérale a conclu que les marques identiques POTENZA et POTENZA ne créaient pas de confusion. Dans cette affaire, la Cour fédérale a refusé d'accueillir l'appel de la décision de la Commission des oppositions des marques de commerce (la « COMC ») rejetant le motif d'opposition fondé sur l'art. 12(l)d). La Cour a confirmé la décision de la COMC concluant que la marque POTENZA employée en liaison avec diverses pièces et accessoires de vélo, excluant spécifiquement les pneus, roues et jantes, ne créait PAS de confusion avec la marque POTENZA de l'Opposante enregistrée en liaison avec des pneus, chambres à air et roues. Bien que l'Opposante ait été un constructeur automobile et que le raisonnement de la Cour ait été en partie axé sur le fait que l'examen de l'état déclaratif des services respectif des parties doit être effectué dans l'optique de déterminer le type probable d'entreprise ou la nature probable du commerce dans lesquels les produits seraient vendus, la Cour a finalement conclu que la décision de la COMC était raisonnable. La Cour a conclu ce qui suit, malgré le fait que les marques étaient identiques (et que les facteurs énoncés aux articles 6(5)a), b) et e) favorisaient l'Opposante) : i) le genre des produits respectifs était fondamentalement différent; ii) les voies de commercialisation ne se recouperaient pas en raison du genre spécialisé des produits; et iii) compte tenu du niveau de raffinement des acheteurs des produits de la Requérante, ceux-ci connaîtraient vraisemblablement la différence entre des pneus de vélo Campagnolo et Bridgestone si Bridgestone devait éventuellement vendre des pneus de vélo au Canada. Les conclusions tirées dans cette affaire sont directement pertinentes en l'espèce et favorisent la Requérante. Dans cette décision, les marchandises en question étaient encore plus similaires que celles de la Requérante et de l'Opposante en l'espèce et, malgré tout, les voies de commercialisation et le raffinement des acheteurs étaient suffisants pour que la Cour conclut que les marques ne créaient pas de confusion.

 

[46]  Dans les circonstances de l'espèce, j'ai conclu que la marque SUPER-COR de l'opposante n'a pas droit à une protection étendue, c'est-à-dire à une protection qui s'étend bien au-delà des produits et des voies de commercialisation de l'opposante. Compte tenu des facteurs énoncés à l'art. 6(5) examinés ci-dessus et compte tenu des indications qu'offre la jurisprudence précitée, je conclus que, à toutes les dates pertinentes, la marque SUPERCORR visée par la demande ne créait pas de confusion avec la marque SUPER-COR de l'opposante malgré le fait qu'elles sont presque identiques.

 

Décision

[47]  Compte tenu de ce qui précède, l'opposition est rejetée.

 

[48]  Cette décision est rendue dans l'exercice des pouvoirs qui m'ont été délégués par le registraire des marques de commerce en vertu des dispositions de l'art. 63(3) de la Loi sur les marques de commerce.

 

[49]  J'ajouterais que le dernier motif d'opposition fondé sur l'absence de caractère distinctif de la marque visée par la demande repose uniquement sur les activités qu'exerce l'opposante en liaison avec sa marque. Cependant, l'opposante aurait pu demander l’autorisation de modifier de nouveau sa déclaration d’opposition (voir le para. 2 ci-dessus) pour élaborer plus en détail le dernier motif et inclure l'emploi par des tiers de la marque SUPERCORR. L'opposante aurait pu le faire après avoir examiné les lacunes que comportait la preuve de la requérante quant à son accord de licence avec Jacam. De telles demandes visant à autoriser la modification d'une déclaration d'opposition, après que la requérante a produit ses éléments de preuve, sont assez courantes dans les procédures d'opposition et sont régulièrement accordées. L'opposante aurait très bien pu obtenir gain de cause à l'égard du dernier motif si elle avait allégué que la marque visée par la demande n'était pas distinctive au Canada en raison des activités apparentes de la licenciée Jacam de la requérante.

______________________________

Myer Herzig, membre

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

Traduction certifiée conforme

Marie-Pierre Hétu, trad.

COMMISSION DES OPPOSITIONS DES MARQUES DE COMMERCE

OFFICE DE LA PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE DU CANADA

COMPARUTIONS ET AGENTS INSCRITS AU DOSSIER

___________________________________________________

 

 

DATE DE L'AUDIENCE : 2016-11-16

 

COMPARUTIONS

 

Nathan Fan  POUR L'OPPOSANTE

 

Brigitte Chan  POUR LA REQUÉRANTE

 

 

AGENTS AU DOSSIER

 

Sim & McBurney  POUR L'OPPOSANTE

 

Bereskin & Parr  POUR LA REQUÉRANTE

 

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.