Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

THE REGISTRAR OF TRADE-MARKS

Référence : 2017 COMC 95

Date de la décision : 2017-08-15

[TRADUCTION CERTIFIÉE,

NON RÉVISÉE]

DANS L’AFFAIRE DE LA PROCÉDURE DE RADIATION EN VERTU DE L’ARTICLE 45

 

Mentorum Solutions Inc.

Partie requérante

et

 

BFS ENTERTAINMENT & MULTIMEDIA LIMITED

Propriétaire inscrite

 

LMC453,194 pour la marque de commerce MENTOROM

LMC460,766 pour la marque de commerce MENTOROM MULTIMEDIA

Enregistrements

  • [1] La présente décision concerne des procédures de radiation sommaires engagées à l’égard des enregistrements nos LMC453,194 et LMC460,766 des marques de commerce MENTOROM et MENTOROM MULTIMEDIA (collectivement appelées les Marques ci-après) appartenant à BFS ENTERTAINMENT & MULTIMEDIA LIMITED.

[2]  Les Marques sont toutes deux actuellement enregistrées en liaison avec des [Traduction] « logiciels interactifs préenregistrés sur cédérom offrant un enseignement et de la formation, et des renseignements de référence ».

  • [3] Pour les raisons exposées ci-dessous, je conclus qu’il y a lieu de radier les deux enregistrements.

Les procédures

[4]  Le 14 septembre 2015, le registraire des marques de commerce a donné les avis prévus à l’article 45 de la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, ch T-13 (la Loi) à BFS ENTERTAINMENT & MULTIMEDIA LIMITED (la Propriétaire). Les avis ont été donnés à la demande de Mentorum Solutions Inc.

  • [5] Les avis enjoignaient à la Propriétaire de fournir une preuve établissant qu’elle avait employé les Marques au Canada à un moment quelconque entre le 14 septembre 2012 et le 14 septembre 2015 en liaison avec les produits spécifiés dans les enregistrements. Si les Marques n’avaient pas été ainsi employées, la Propriétaire devait fournir une preuve établissant la date à laquelle les Marques avaient été employées en dernier lieu et les raisons de leur défaut d’emploi depuis cette date.

  • [6] La définition pertinente d’« emploi » est énoncée à l’article 4(1) de la Loi, lequel est ainsi libellé :

4(1) Une marque de commerce est réputée employée en liaison avec des produits si, lors du transfert de la propriété ou de la possession de ces produits, dans la pratique normale du commerce, elle est apposée sur les produits mêmes ou sur les emballages dans lesquels ces produits sont distribués, ou si elle est, de toute autre manière, liée aux produits à tel point qu’avis de liaison est alors donné à la personne à qui la propriété ou possession est transférée.

  • [7] Il est bien établi que l’article 45 de la Loi a pour objet et portée d’offrir une procédure simple, sommaire et expéditive pour débarrasser le registre du « bois mort ». Les critères pour établir l’emploi ne sont pas exigeants et il n’est pas nécessaire de produire une surabondance d’éléments de preuve. Cependant, il n’en faut pas moins présenter une preuve suffisante pour permettre au registraire de conclure que la marque de commerce a été employée en liaison avec chacun des produits visés par l’enregistrement [voir Uvex Toko Canada Ltd c Performance Apparel Corp (2004) CF 448, 31 CPR (4th) 270]. En outre, de simples allégations d’emploi ne sont pas suffisantes pour établir l’emploi [voir Plough (Canada) Ltd c Aerosol Fillers Inc (1980), 53 CPR (2d) 62 (CAF)].

  • [8] En réponse aux avis du registraire, la Propriétaire a produit la déclaration solennelle de Denis B.E. Donnelly, produite le 25 novembre 2015, accompagnée de la pièce A, en ce qui concerne l’enregistrement no LMC453,194, et une autre déclaration solennelle de M. Donnelly, accompagnée de la pièce A, en ce qui concerne l’enregistrement no LMC460,766. Bien que la date indiquée dans le constat d’assermentation de la déclaration de M. Donnelly en ce qui concerne l’enregistrement no LMC460,766 soit le 20 mai 2015, la désignation inscrite sur la pièce jointe est datée du 20 mai 2016. Je souligne toutefois que cette preuve a été produite auprès du registraire le 31 mai 2016. Il semble que la différence entre les dates dans la preuve ne soit qu’une erreur d’écriture et que la bonne date du constat d’assermentation doive également correspondre à l’année 2016. Je suis disposée à admettre que cette lacune est simplement de nature technique. Il est bien établi que les lacunes techniques ne devraient pas empêcher une partie de répondre de façon satisfaisante à l’avis prévu à l’article 45 [voir Baume & Mercier SA c Brown (1985), 4 CPR (3d) 96 (CF 1re inst)].

[9]  Aucune des parties n’a produit de représentations écrites ni sollicité la tenue d’une audience.

La preuve

La déclaration Donnelly – enregistrement no LMC453,194

[10]  M. Donnelly est le président et directeur général de la Propriétaire.

[11]  M. Donnelly atteste que, le 15 octobre 1995 ou aux environs de cette date, la Propriétaire [Traduction] « concédait sous licence, fabriquait et distribuait en vue de sa vente partout en Amérique du Nord » une collection de cédéroms éducatifs appelés Mentorom Multimedia arborant une ou plusieurs des Marques.

[12]  M. Donnelly explique que, en raison de progrès technologiques, le recours aux cédéroms a diminué et que ce format a été remplacé par le format DVD, qui a une plus grande capacité de stockage. Il atteste que la Propriétaire a cessé en 2001 de fabriquer et de distribuer en vue de leur vente tous les cédéroms, y compris ceux arborant les Marques. M. Donnelly atteste que, entre 2002 et 2005, la Propriétaire a axé ses efforts sur la distribution de DVD comprenant des émissions de divertissement, réduisant la vente et la distribution d’émissions éducatives. Il atteste que, pendant cette période, la Propriétaire n’a distribué aucune émission présentant les Marques.

[13]  M. Donnelly explique que, encore une fois, l’évolution de la technologie a entraîné la diminution du recours au format DVD, au profit du téléchargement direct (DDL). Il atteste que, malgré cette évolution, la Propriétaire continue de distribuer à ses clients des émissions de divertissement et éducatives en format DVD et DDL.

[14]  M. Donnelly affirme que, en 2005, la Propriétaire a réédité une collection d’émissions éducatives arborant une ou plusieurs des Marques. À l’appui, il joint comme pièce A à sa déclaration, [Traduction] « comme preuve de l’emploi continu des Marques [par la Propriétaire] », une pochette intérieure d’un DVD lié à l’émission éducative intitulée The Meschino Weight Loss Program [le programme Meschino de perte de poids], [Traduction] « actuellement offert en vente partout en Amérique du Nord ». Il affirme que la Propriétaire est en voie de convertir ce DVD au format DDL qui, affirme-t-il, arborera également la marque de commerce MENTOROM MULTIMEDIA.

La déclaration Donnelly – enregistrement no LMC460,766

[15]  Cette déclaration est essentiellement identique à celle produite en ce qui concerne l’enregistrement no LMC453,194 ci-dessus, à l’exception du fait qu’elle ne mentionne pas les Marques collectivement, mais mentionne uniquement la marque de commerce no LMC460,766 comme étant la Marque. De plus, M. Donnelly présente trois paragraphes supplémentaires, que l’on peut décrire comme suit.

[16]  M. Donnelly atteste que, récemment, la Propriétaire est devenue insolvable, ce qui a mené son prêteur garanti à nommer un syndic autorisé en insolvabilité pour superviser la réduction progressive des activités de la Propriétaire. Il atteste que, au cours de cette réduction progressive, il a continué à exploiter l’entreprise de la Propriétaire dans le but de réaliser tous ses actifs et de payer toutes ses dettes. Il conclut sa déclaration en affirmant que la Marque est toujours un actif précieux de la Propriétaire et qu’il se doit de la protéger.

Analyse et motifs de décision

[17]  La preuve n’établit pas que la Propriétaire a employé l’une ou l’autre des Marques au Canada au cours de la période pertinente. De plus, il n’y a aucune preuve que la Propriétaire a déjà vendu les produits visés par l’enregistrement arborant l’une ou l’autre des Marques au Canada. M. Donnelly affirme plutôt simplement que les Marques ont été employées en liaison avec une collection de cédéroms appelés Mentorom Multimedia, que la Propriétaire a concédés sous licence, fabriqués et distribués en vue de leur vente partout en Amérique du Nord. Quoi qu’il en soit, il atteste que la Propriétaire a cessé de fabriquer et de distribuer des cédéroms en 2001.

[18]  Une marque de commerce qui n’a pas été employée est susceptible d’être radiée, sauf si le défaut d’emploi de la marque est attribuable à des circonstances spéciales. Pour déterminer s’il existe des circonstances spéciales justifiant le défaut d’emploi, il faut tenir compte des trois critères suivants : 1) la durée du défaut d’emploi de la marque de commerce; 2) la question de savoir si les raisons invoquées par le propriétaire inscrit pour justifier le défaut d’emploi de la marque de commerce découlent de circonstances indépendantes de sa volonté; et 3) la question de savoir s’il existe une intention sérieuse de reprendre l’emploi à court terme [Canada (Registraire des marques de commerce) c Harris Knitting Mills Ltd (1985), 4 CPR (3d) 488 (CAF)].

[19]  La décision rendue dans l’affaire Scott Paper Limited c Smart & Biggar et al, 2008 CAF 129, 65 CPR (4th) 303 (CAF) a apporté des précisions quant à l’interprétation du critère des circonstances spéciales énoncé dans Harris Knitting, supra. Plus précisément, la Cour a indiqué que le test qu’il convient d’appliquer pour déterminer s’il existe des circonstances spéciales, qui justifieraient le défaut d’emploi d’une marque, doit se limiter à la cause du défaut d’emploi et qu’aucune autre considération ne doit entrer en ligne de compte. Après examen de la jurisprudence relative à l’article 45(3) de la Loi, la Cour en est arrivée aux conclusions suivantes :

1-   La règle générale porte que le défaut d’emploi est sanctionné par la radiation.

2-   Il existe une exception à la règle générale lorsque le défaut d’emploi est attribuable à des circonstances spéciales.

3-   Les circonstances spéciales sont des circonstances qui ne se retrouvent pas dans la majorité des cas de défaut d’emploi de la marque.

4-   Les circonstances spéciales qui justifient le défaut d’emploi de la marque doivent être les circonstances auxquelles le défaut d’emploi est attribuable.

[20]  Il appert de cette analyse que le deuxième critère du test énoncé dans Harris Knitting doit être satisfait pour que l’on puisse conclure à l’existence de circonstances spéciales justifiant le défaut d’emploi d’une marque de commerce. En outre, les « circonstances indépendantes de la volonté du propriétaire » visées par le deuxième critère s’entendent de [Traduction] « circonstances qui sont rares, peu communes ou exceptionnelles » [John Labatt Ltd c Cotton Club Bottling Co (1976), 25 CPR (2d) 115 (CF 1re inst)]. Cela ne signifie pas que les deux autres critères ne sont pas des facteurs pertinents à considérer, mais simplement que ces critères ne peuvent, à eux seuls, constituer des circonstances spéciales. En effet, la pertinence du premier critère est manifeste, car les raisons pouvant justifier une brève période de défaut d’emploi pourraient ne pas justifier un défaut d’emploi prolongé [Harris Knitting, supra; Goldwell Ltd, Re (1974), 29 CPR (2d) 110 (COMC)]. Quoi qu’il en soit, l’intention de reprendre l’emploi doit être étayée par la preuve [Arrowhead Spring Water Ltd c Arrowhead Water Corp (1993), 47 CPR (3d) 217 (CF 1re inst); NTD Apparel Inc c Ryan (2003), 27 CPR (4th) 73 (CF 1re inst)].

[21]  En l’espèce, le défaut d’emploi des Marques semble résulter d’une décision d’affaires prise en 2001 de cesser la fabrication et la distribution en vue de la vente de cédéroms, au profit du format DVD en raison de sa plus grande capacité de stockage. Quoiqu’une circonstance atténuante en l’espèce puisse être l’insolvabilité de la Propriétaire, je souligne qu’il a été établi que la faillite justifie uniquement de courtes périodes de défaut d’emploi [voir, à titre d’exemple, Burke-Robertson c Swan Recreational Products Ltd (1990), 33 CPR (3d) 56 (COMC); Rogers & Scott c Naturade Products Inc (1988), 19 CPR (3d) 504 (COMC)]. Plus important encore, cependant, la décision de cesser la vente des produits visés par l’enregistrement arborant les Marques avait été prise bien avant.

[22]  De telles décisions d’affaires volontaires ne constituent pas des circonstances [Traduction] « rares, peu communes ou exceptionnelles » qui constituent des circonstances spéciales [selon Harris Knitting, supra]. En effet, je souligne que la déclaration de M. Donnelly mentionne un certain nombre de décisions d’affaires manifestes de la Propriétaire de concentrer finalement ses efforts sur des produits livrés sous le format DDL.

[23]  Quoi qu’il en soit, eu égard aux critères énumérés ci-dessus [selon Harris Knitting, supra; et Scott Paper, supra], j’estime également que la preuve de la Propriétaire n’établit pas que les raisons du défaut d’emploi étaient indépendantes de sa volonté. J’ajouterais que la période prolongée de défaut d’emploi en l’espèce joue davantage contre la Propriétaire.

[24]  De plus, comme je l’ai indiqué précédemment, un propriétaire doit fournir des renseignements démontrant une intention sérieuse de reprendre l’emploi de la marque dans un avenir rapproché [selon Arrowhead, supra; NTD Apparel, supra]. En l’espèce, de tels renseignements n’ont pas été fournis. M. Donnelly affirme simplement (et seulement en ce qui concerne l’enregistrement no LMC460,766), que [Traduction] « ...la Marque est toujours un actif précieux de la Propriétaire et qu’il se doit de la protéger ». Aux fins de l’article 45 de la Loi, cela ne suffit pas.

Décision

[25]  En conséquence, dans l’exercice des pouvoirs qui m’ont été délégués en vertu des dispositions de l’article 63(3) de la Loi, les enregistrements seront radiés selon les dispositions de l’article 45 de la Loi.

 

Kathryn Barnett

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

Traduction certifiée conforme

Nathalie Tremblay, trad.


COMMISSION DES OPPOSITIONS DES MARQUES DE COMMERCE

OFFICE DE LA PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE DU CANADA

COMPARUTIONS ET AGENTS INSCRITS AU DOSSIER

___________________________________________________

DATE DE L’AUDIENCE : Aucune audience tenue

AGENT(S) AU DOSSIER

Bresver Grossman Chapman & Habas LLP

POUR LA PROPRIÉTAIRE INSCRITE

JFBV LAW OFFICES, LLP

POUR LA PARTIE REQUÉRANTE

 

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