Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

THE REGISTRAR OF TRADE-MARKS

Référence : 2017 COMC 156

Date de la décision : 2017-11-22

[TRADUCTION CERTIFIÉE,

NON RÉVISÉE]

DANS L’AFFAIRE DE L’OPPOSITION

 

This and That Canine Company Inc.

Opposante

et

 

2347539 Ontario Inc.

Requérante

 

1652243 pour la marque de commerce CHEW-THAT & Dessin

Demande

Introduction

[1]  This and That Canine Company Inc. (l’Opposante) s’oppose à l’enregistrement de la marque de commerce CHEW-THAT & Dessin, reproduite ci-dessous (la Marque), qui fait l’objet d’une demande produite par 2347539 Ontario Inc. faisant affaire sous le nom Chew-That (la Requérante) :

CHEW-THAT & DESIGN

[2]  Pour les raisons exposées ci-dessous, je rejette l’opposition.

Le dossier

[3]  Le 15 novembre 2013, la Requérante a produit la demande portant le no 1,652,243.

[4]  La demande vise les produits et services suivants [Traduction] :

(1) Couvercles réutilisables de nourriture en conserve pour animaux de compagnie

(2) Dispositifs de dressage d’animaux de compagnie, nommément cliquets et laisses

(3) Laisses pour animaux de compagnie

(4) Articles promotionnels, nommément tee-shirts, pulls d’entraînement à capuchon, chandails ras du cou, stylos, grandes tasses à café, affiches, drapeaux, casquettes de baseball et vestes

(collectivement appelés les Produits);

(1) Magasins de vente au détail de nourriture pour animaux de compagnie et d’accessoires pour animaux de compagnie (les Services).

[5]  La demande est fondée sur l’emploi et sur l’emploi projeté, ainsi qu’il est indiqué ci-dessous :

Employée au Canada depuis au moins aussi tôt que le 25 avril 2013 en liaison avec les produits (1);

Employée au Canada depuis au moins aussi tôt que le 26 avril 2013 en liaison avec les produits (2);

Employée au Canada depuis au moins aussi tôt que le 10 mai 2013 en liaison avec les produits (3);

Employée au Canada depuis au moins aussi tôt qu’avril 2013 en liaison avec les Services;

Emploi projeté au Canada en liaison avec les produits (4).

[6]  La demande a été annoncée aux fins d’opposition dans le Journal des marques de commerce du 26 août 2015.

[7]  Le registraire a reçu la déclaration d’opposition de l’Opposante le 8 septembre 2015. Les motifs d’opposition invoqués sont fondés sur les articles 30b), d), h) et i) (exigences), 12(1)d) (enregistrabilité), 16(1) et (3) (droit à l’enregistrement) et 2 (caractère distinctif) de la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, ch T-13 (la Loi).

[8]  Le 10 novembre 2015, la Requérante a produit une contre-déclaration dans laquelle elle conteste chacun des motifs d’opposition invoqués par l’Opposante.

[9]  Comme preuve, l’Opposante a produit l’affidavit de Mitchell Benjamin Burko souscrit le 2 mars 2016, tandis que la Requérante a produit l’affidavit de Dominique Girard-Witts, souscrit le 5 avril 2016, et l’affidavit de Shannon Giust, souscrit le 7 juin 2016.

[10]  Comme preuve en réponse, l’Opposante a produit une copie certifiée de l’enregistrement no LMC898,468 de la marque de commerce THIS & THAT CANINE CO., inscrit au nom de l’Opposante.

[11]  Aucun des déposants n’a été contre-interrogé.

[12]  Les parties ont toutes deux produit un plaidoyer écrit; aucune audience n’a été tenue.

Fardeau de preuve

[13]  C’est au requérant qu’incombe le fardeau ultime de démontrer que la demande est conforme aux dispositions de la Loi. L’opposant a toutefois le fardeau de preuve initial de présenter une preuve admissible suffisante pour permettre de conclure raisonnablement à l’existence des faits allégués à l’appui de chacun des motifs d’opposition. Une fois que l’opposant s’est acquitté de ce fardeau initial, le requérant doit démontrer, selon la prépondérance des probabilités, que les motifs d’opposition en question ne devraient pas faire obstacle à l’enregistrement de la Marque [voir Joseph E. Seagram & Sons Ltd et al c Seagram Real Estate Ltd (1984), 3 CPR (3d) 325 (COMC), John Labatt Ltd c Molson Companies Ltd (1990), 30 CPR (3d) 293 (CF 1re inst) et Wrangler Apparel Corp c The Timberland Company [2005] ACF no 899, (CF)].

Dates pertinentes

[14]  Les dates pertinentes qui s’appliquent aux motifs d’opposition invoqués sont les suivantes :

  • articles 38(2)a)/30 – la date de production de la demande (15 novembre 2013) [Georgia-Pacific Corp c Scott Paper Ltd (1984), 3 CPR (3d) 469 (COMC), à la p 475];
  • articles 38(2)b)/12(1)d) – la date de la décision du registraire [Park Avenue Furniture Corporation c Wickes/Simmons Bedding Ltd (1991), 37 CPR (3d) 413, à la p 424 (CAF)];
  • articles 38(2)c)/16(1) – les diverses dates de premier emploi revendiquées;
  • articles 38(2)c)/16(3) – la date de production de la demande (15 novembre 2013); et
  • articles 38(2)d)/2 – la date de production de la déclaration d’opposition (8 septembre 2015) [Metro-Goldwyn-Mayer Inc c Stargate Connections Inc, 2004 CF 1185].

Remarques préliminaires

[15]  Aux fins de ma décision, j’ai tenu compte de l’ensemble de la preuve au dossier. Cependant, dans le corps de ma décision, je mentionnerai uniquement les parties de la preuve qui sont pertinentes du point de vue des questions examinées.

La preuve de l’Opposante

[16]  M. Burko est le directeur de l’exploitation de l’Opposante depuis la constitution en société de cette dernière, le 17 novembre 2009. Il affirme que, depuis cette date, les activités de l’Opposante consistent à fabriquer, à distribuer et à vendre des produits pour animaux de compagnie destinés à être utilisés par les propriétaires d’animaux de compagnie. Il affirme que [Traduction] « les produits sont vendus à des distributeurs canadiens de fournitures pour animaux de compagnie qui les vendent en gros à des détaillants canadiens de fournitures pour animaux de compagnie, à des magasins spécialisés pour animaux de compagnies détenus par des tiers indépendants et à des magasins spécialisés pour animaux de compagnies détenus par des tiers franchisés, ainsi que par l’intermédiaire du magasin de détail en ligne de l’Opposante ».

[17]  M. Burko affirme que l’Opposante est la propriétaire de la marque de commerce CHEW THIS, qui a été enregistrée au registre canadien des marques de commerce le 7 mai 2013 sous le no LMC850,371. L’enregistrement vise les produits suivants [Traduction] : os à mâcher pour chiens; gâteries pour chiens, nommément gâteries comestibles et jouets pour chiens (les produits de l’Opposante). Une copie certifiée de cet enregistrement est jointe à l’affidavit de M. Burko comme pièce 1.

[18]  M. Burko fournit les chiffres des ventes annuelles (en dollars et en unités vendues) des produits de l’Opposante arborant la marque de commerce CHEW THIS pour les années 2013 à 2015 inclusivement; lesquelles ont oscillé entre 1,35 million de dollars environ et plus de 1,6 million de dollars, ce qui, au total, représente plus de 550 000 unités vendues pendant cette période.

[19]  Pour démontrer que l’Opposante a offert en vente, annoncé et vendu les produits de l’Opposante, M. Burko fournit les documents suivants :

  • Pages d’entrée de sites Web de clients de l’Opposante montrant que ces clients ont en stock et offrent en vente les produits de l’Opposante en liaison avec la marque de commerce CHEW THIS (pièce 2);

  • Factures datant des années 2013, 2014 et 2015 adressées à des clients représentatifs relativement à la vente des produits de l’Opposante en liaison avec la marque de commerce CHEW THIS (pièce 3);

  • Photographies montrant les produits de l’Opposante offerts en vente dans des magasins de détail au Canada dans des emballages arborant la marque de commerce CHEW THIS (pièce 4);

  • Pages d’entrée du site Web de l’Opposante destiné à la vente au détail des produits de l’Opposante arborant la marque de commerce CHEW THIS (pièce 5).

 

[20]  M. Burko affirme que, dans un rayon d’environ 25 kilomètres du magasin de détail de la Requérante situé au 665, route Earl Armstrong dans la région d’Ottawa, on retrouve 45 magasins spécialisés pour animaux de compagnie qui vendent les produits de l’Opposante en liaison avec la marque de commerce CHEW THIS.

[21]  Comme pièce 7, M. Burko a produit un imprimé d’une carte Google montrant l’emplacement du magasin de détail de la Requérante et des 45 magasins spécialisés pour animaux de compagnie, accompagné d’une liste répertoriant chacun de ces magasins et leur adresse municipale dans la région d’Ottawa.

[22]  M. Burko affirme que l’Opposante a tenu un kiosque lors de divers salons commerciaux destinés à faciliter l’accès au marché des fournitures pour animaux de compagnie et, comme pièce 8, il fournit des pages tirées des sites Web de ces salons. Il allègue en outre que, lors du salon Ottawa Pet Expo, la Requérante et l’Opposante occupaient des kiosques se trouvant dans la même allée.

La preuve de la Requérante

Affidavit de Dominique Girard-Witts

[23]  Mme Witts exerce les fonctions de technicienne juridique au sein du cabinet de l’agent de la Requérante. Elle affirme que, le 29 mars 2016, elle a consulté les versions en ligne des dictionnaires Merriam-Webster et Cambridge afin d’en extraire les définitions du mot « CHEW ». Ces définitions sont jointes à son affidavit comme pièces A et B.

[24]  Le même jour, Mme Witts a effectué des recherches avancées sur le site Web de l’Office de la propriété intellectuelle du Canada (OPIC) afin de repérer les demandes et enregistrements actifs de marques de commerce comprenant le mot et le caractère de remplacement (Recherche de MC) « Chew » en liaison avec des chiens, des chats ou des animaux ou animaux de compagnie, et elle a joint les résultats de cette recherche à son affidavit comme pièce C.

[25]  Toujours le même jour, elle a consulté et fait imprimer des pages Web annonçant divers produits au Canada en liaison avec les marques de commerce suivantes :

  • CHEW TIME (pièce D)

  • CHEWMASTERS (pièce E)

  • CHEW-RIFIC (pièce F)

  • CHEW-EEZ (pièce G)

  • TRUE CHEWS (pièce H)

  • CHEW-LOTTA (pièce I)

  • CHEW’N CLEAN (pièce J)

  • CHEWS (pièce K)

  • BIG CHEW (pièce L)

  • SUPER CHEW (pièce M)

  • DENTAL CHEW (pièce N)

  • CABIN CHEWS (pièce O)

  • FLOSSY CHEWS (pièce P)

  • BRUSHING CHEWS (pièce Q)

  • TRIPLE CHEW (pièce R)

  • NATURE’S CHEWS (pièce S)

  • ORA-CHEW (pièce T)

 

[26]  Puis, le 30 mars 2016, Mme Witts s’est procuré les produits susmentionnés auprès de divers détaillants et, comme pièces correspondantes D1 à T1 respectivement, elle a produit une photographie de chaque produit acheté, accompagnée du reçu de caisse pour chacun d’eux.

Affidavit de Shannon Giust

[27]  Mme Guist [sic] atteste qu’elle est la propriétaire-exploitante de la Requérante, laquelle a été constituée en société le 26 octobre 2012 et a fait enregistrer le nom commercial CHEW-THAT en Ontario, le 13 février 2013.

[28]  Mme Guist [sic] affirme qu’elle exploite un magasin de vente au détail de nourriture et d’accessoires pour animaux de compagnie au 665, route Earl Armstrong, à Ottawa (le « magasin de détail ») de façon continue depuis le 25 avril 2013.

[29]  Mme Guist [sic] affirme que la Marque a été employée en liaison avec de la nourriture et des accessoires pour animaux de compagnie de façon continue depuis l’ouverture du magasin le 25 avril 2013 et, comme pièce B, elle a produit diverses images du magasin et de sa devanture.

[30]  Mme Guist [sic] affirme que, depuis 2013, la Requérante exploite un site Web à l’adresse www.chew-that.ca afin de promouvoir les Services et, comme pièce C, elle a produit une copie de la page d’accueil de ce site Web. Elle a également produit, comme pièce D, un échantillon de messages publiés sur la page Facebook de la Requérante entre 2013 et 2016, et comme pièce E, une copie de la page Twitter de la Requérante.

[31]  Mme Guist [sic] mentionne neuf événements, qui se sont tenus au Canada entre juin 2013 et juin 2016, à l’occasion desquels la Requérante a fait la promotion de ses Services et affirme qu’une bannière sur laquelle figurait la Marque était affichée bien en vue; comme pièce G, elle a produit diverses images de kiosques, des événements eux-mêmes, de badges portés par les participants et de matériel publicitaire arborant la Marque.

[32]  Mme Guist [sic] affirme que la Requérante a fait plusieurs apparitions en tant qu’experte à l’émission de télévision Morning Live à CTV qui, affirme-t-elle, se classe au premier rang des émissions matinales à Ottawa. Certaines de ces apparitions peuvent encore être visionnées par les Canadiens sur le site Web de CTV News Ottawa et, comme pièce H, elle a produit des captures d’écran de pages de ce site Web.

[33]  Mme Guist [sic] affirme que la Requérante a annoncé ses services dans des magazines et des journaux locaux, sur des panneaux d’affichage, dans des brochures distribuées dans des secteurs résidentiels et en commanditant des événements. Comme pièce I, elle a produit des spécimens de brochures, de publicités, de photographies de panneaux d’affichage et de documents qui illustrent les activités promotionnelles et les événements de commandite de la Requérante. Elle indique les sommes que la Requérante a dépensées en publicité au cours des périodes 2014-2015 (plus de 8 000 $) et 2015-2016 (environ 13 000 $).

[34]  Mme Guist [sic] affirme que la Requérante compte plus de 4 000 clients et elle fournit les chiffres des ventes liées à la Marque pour les périodes 2013-2014, 2014-2015 et 2015-2016, lesquelles ont oscillé entre plus de 300 000 $ et plus de 630 000 $. Comme pièce L, elle a produit la facture de la première vente de couvercles pour nourriture en conserve arborant la Marque et une image du produit vendu. Elle a produit d’autres factures faisant état de [Traduction] « ventes sous la Marque » pour chacune des années comprises dans la période allant de 2013 à mai 2016.

[35]  Comme pièce S1, Mme Guist [sic] a produit un rapport généré par son [Traduction] « logiciel de vente, Smart Vendor » détaillant tous les produits dont le nom contient le mot CHEW qui ont été vendus par la Requérante depuis le 25 avril 2013. Ce rapport compte 70 pages. Cette liste inclut les ventes des Produits arborant la Marque ainsi que les ventes de produits de tiers réalisées par la Requérante.

[36]  Mme Guist [sic] a fourni une liste de six fournisseurs vendant plus de 25 [Traduction] « produits CHEW » et a produit des factures ou des brochures de ces fournisseurs.

[37]  Mme Guist [sic] affirme que, le 29 avril 2016, elle a acheté chez Bulk Barn un produit vendu en liaison avec la marque de commerce ANTLER CHEWS et, comme pièce Z, elle a produit une photographie de ce produit ainsi qu’une copie du reçu de caisse.

[38]  Enfin, Mme Guist [sic] affirme qu’elle n’a connaissance d’aucun cas de confusion entre les produits de l’Opposante vendus en liaison avec sa marque de commerce CHEW THIS et la Marque et/ou l’entreprise, les services et les produits de la Requérante.

La preuve en réponse de l’Opposante

[39]  Comme preuve en réponse, l’Opposante a produit une copie certifiée de l’enregistrement no LMC898,468 de la marque de commerce THIS & THAT CANINE CO., inscrit au nom de l’Opposante.

[40]  Dans son plaidoyer écrit, la Requérante affirme que la preuve en réponse de l’Opposante n’est pas admissible, car cet enregistrement de marque de commerce n’a pas été cité en tant que fondement d’un motif d’opposition dans la déclaration d’opposition de l’Opposante. De plus, la Requérante affirme qu’elle ne constitue pas une preuve en réponse adéquate, car elle ne se limite pas strictement aux matières tenant lieu de réponse à la preuve contenue dans les affidavits de la Requérante.

[41]  Je conviens avec la Requérante qu’une preuve de l’existence de l’enregistrement no LMC898,468 ne constitue pas une preuve en réponse à l’une quelconque des allégations contenues dans la preuve de la Requérante. Qui plus est, l’Opposante n’a pas mentionné cet enregistrement dans sa déclaration d’opposition.

[42]  Par conséquent, je ne tiendrai pas compte de la preuve en réponse de l’Opposante. Quoi qu’il en soit, même si j’avais tenu compte de cette preuve, ma décision aurait été la même.

Motifs d’opposition rejetés sommairement

Motif d’opposition fondé sur l’article 30b)

[43]  L’Opposante allègue que la Marque n’était pas en usage aux diverses dates de premier emploi revendiquées. Elle n’a produit aucun élément de preuve à l’appui de ce motif d’opposition. Cependant, l’Opposante peut s’appuyer sur la preuve de la Requérante pour s’acquitter du léger fardeau de preuve qui lui incombe à l’égard de ce motif d’opposition [voir Tune Masters c Mr P’s Mastertune Ignition Services Ltd (1986), 10 CPR (3d) 8 (COMC) et Labatt Brewing Company c Molson Breweries, Partnership (1996), 68 CPR (3d) 216 (CF 1re inst)].

[44]  Il n’y a rien dans la preuve de la Requérante qui mettrait en doute les diverses dates de premier emploi de la Marque qui sont revendiquées.

[45]  L’Opposante a cependant allégué que tout emploi de la Marque en liaison avec les Services [Traduction] « ne concernait à cette date qu’un seul magasin de détail et non pas plusieurs magasins de détail comme l’indique l’état déclaratif des services compte tenu de l’emploi de la forme plurielle du mot ‘magasin’ dans l’état déclaratif des services ».

[46]  Par analogie, je peux me reporter à la Loi d’interprétation, L.R.C., 1985, ch. I-21 et, en particulier, à l’article 33(2), qui est libellé comme suit :

Le pluriel ou le singulier s’appliquent, le cas échéant, à l’unité et à la pluralité.

[47]  Ainsi, le fait que [Traduction] « magasins » soit écrit au pluriel n’a aucune incidence sur la date de premier emploi de la Marque qui est revendiquée en liaison avec les Services, car la preuve montre que la Requérante a exploité un magasin de détail en liaison avec la Marque depuis la date de premier emploi revendiquée qui est indiquée dans la demande.

[48]  Quoi qu’il en soit, dans son plaidoyer écrit, l’Opposante n’a présenté aucun argument pour établir le bien-fondé de cette théorie.

[49]  Par conséquent, ce motif d’opposition est rejeté.

Motifs d’opposition fondés sur les articles 30d) et h) de la Loi

[50]  L’Opposante allègue que [Traduction] :

La demande de la Requérante n’est pas conforme aux exigences des articles 30d) et h), car la marque de commerce dont l’emploi est allégué n’est pas la marque de commerce visée par la demande qui fait l’objet de la présente opposition.

[51]  Comme l’a indiqué la Requérante dans son plaidoyer écrit, l’article 30d) de la Loi ne s’applique pas en l’espèce, car il concerne les demandes produites sur la base de l’emploi et de l’enregistrement à l’étranger, ce qui n’est pas le cas dans la présente affaire.

[52]  Quant à l’article 30h), la seule exigence énoncée à cet article est que, dans le cas d’une marque figurative, la demande doit contenir un dessin, dans la forme prescrite, de la marque visée par la demande. Là encore, il n’y a au dossier aucune preuve que la Requérante n’a pas satisfait à cette exigence.

[53]  Enfin, la preuve produite par la Requérante montre que cette dernière a employé la Marque visée par la demande et, par conséquent, ces motifs d’opposition sont rejetés.

Motif d’opposition fondé sur l’article 30i) de la Loi

[54]  Un opposant peut invoquer l’article 30i) dans des cas précis, notamment en présence d’allégations portant que le requérant est de mauvaise foi [voir Sapodilla Co Ltd c Bristol Myers Co (1974), 15 CPR (2d) 152 (COMC)]. Il n’y a aucune allégation de cette nature dans la déclaration d’opposition ni preuve au dossier que la Requérante est de mauvaise foi. Enfin, l’Opposante n’a présenté aucun argument à l’appui de ce motif d’opposition.

[55]  Par conséquent, ce motif d’opposition est également rejeté.

Motif d’opposition fondé sur les articles 50 et 2 de la Loi (caractère distinctif)

[56]  Dans sa déclaration d’opposition, l’Opposante allègue que la Marque n’est pas distinctive, car elle a été employée en dehors du cadre de l’article 50 de la Loi.

[57]  Là encore, il n’y a au dossier aucun élément de preuve à l’appui d’une telle allégation. Qui plus est, l’Opposante n’a pas abordé cette question dans son plaidoyer écrit.

[58]  Ce motif d’opposition est donc également rejeté.

Analyse des autres motifs d’opposition

Enregistrabilité de la Marque suivant l’article 12(1)d) de la Loi

[59]  Comme je l’ai mentionné précédemment, comme pièce 1, M. Burko a produit une copie certifiée de l’enregistrement LMC850,371 de la marque de commerce CHEW THIS.

[60]  J’ai consulté le registre et cet enregistrement existe bel et bien. Il vise les produits suivants [Traduction] : os à mâcher pour chiens; gâteries pour chiens, nommément gâteries comestibles et jouets pour chiens (les produits de l’Opposante).

[61]  Par conséquent, l’Opposante s’est acquittée de son fardeau de preuve initial à l’égard de ce motif d’opposition.

[62]  Le test en matière de confusion est énoncé à l’article 6(2) de la Loi. Certaines des circonstances de l’espèce à prendre en considération pour évaluer la probabilité de confusion entre deux marques de commerce sont décrites à l’article 6(5) de la Loi : le caractère distinctif inhérent des marques de commerce et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues; la période pendant laquelle les marques de commerce ou les noms commerciaux ont été en usage; le genre de produits, services ou entreprises; la nature du commerce; et le degré de ressemblance entre les marques de commerce dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’elles suggèrent. Ces facteurs ne forment pas une liste exhaustive et le poids qu’il convient d’accorder à chacun d’eux n’est pas nécessairement le même [voir Veuve Clicquot Ponsardin c Boutiques Cliquot Ltée et al (2006), 49 CPR (4th) 401 (CSC), Mattel, Inc c 3894207 Canada Inc (2006), 49 CPR (4th) 321 (CSC), et Masterpiece Inc c Alavida Lifestyles Inc et al (2011), 96 CPR (4th) 361 (CSC)].

[63]  Le test énoncé à l’article 6(2) de la Loi ne concerne pas la confusion entre les marques elles-mêmes, mais la confusion portant à croire que des produits ou des services provenant d’une source proviennent d’une autre source. En l’espèce, la question que soulève l’article 6(2) est celle de savoir si un consommateur ayant un souvenir imparfait de la marque de commerce CHEW THIS de l’Opposante croirait, à la vue des Produits et Services de la Requérante offerts en liaison avec la Marque, que ces derniers proviennent de l’Opposante, ou sont parrainés ou approuvés par l’Opposante.

Le caractère distinctif inhérent des marques de commerce et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues

[64]  La marque de commerce de l’Opposante est formée de deux mots anglais d’usage courant. Comme l’a fait observer la Requérante, le mot CHEW [mâcher; produit à mâcher] est couramment employé en liaison avec des os à mâcher et des friandises pour chiens. J’examinerai ce point plus en détail dans mon analyse de la preuve de l’état du registre et de l’état du marché.

[65]  Le Merriam-Webster Dictionary définit le mot « chew » comme signifiant [Traduction] « broyer, gruger ou ronger (de la nourriture, par exemple) avec les dents ou comme on le ferait avec les dents » et donne l’exemple suivant [Traduction] : « Le chien a grugé un trou dans le tapis ». Le Cambridge English Dictionary définit le mot « chew » comme signifiant [Traduction] « broyer de la nourriture avec les dents pour la réduire en morceaux plus fins et plus tendres afin de pouvoir l’avaler » et donne les exemples suivants [Traduction] : « Le chien mâchait son os avec entrain » et « Son chien a mâché mes pantoufles » [voir les pièces A et B de l’affidavit de Mme Witts].

[66]  J’ai usé de mon pouvoir discrétionnaire de consulter des dictionnaires et j’ai consulté le Canadian Oxford English Dictionary [voir National Laser Products Ltd c Canada (Registraire des marques de commerce) (1976), 28 CPR (2d) 59 (CF 1re inst)] qui indique que ce mot est également employé comme nom pour désigner une chose destinée à être mâchée (comme des bonbons ou du tabac).

[67]  Par conséquent, la marque de commerce de l’Opposante possède un caractère distinctif inhérent faible dans le contexte d’un emploi en liaison avec les produits de l’Opposante, car elle est fortement suggestive de leur nature ou de leur qualité, c’est-à-dire du fait qu’ils sont destinés à être mâchés.

[68]  Quant à la Marque, il s’agit d’une marque mixte constituée de plusieurs mots/expressions, à savoir « PET FOOD » [nourriture pour animaux de compagnie], « CHEW-THAT » [mâche ça] et « TOYS GALORE » [profusion de jouets], et d’un élément graphique, à savoir une tête de chat noire pourvue de moustaches et un os recouvrant en partie la tête de chat; les moustaches dépassant de chaque côté de l’os.

[69]  Les éléments « PET FOOD » [nourriture pour animaux de compagnie] et « TOYS GALORE » [profusion de jouets] sont descriptifs, et la partie graphique est suggestive. Cependant, la partie graphique de la Marque confère à la Marque dans son ensemble un caractère distinctif inhérent plus marqué que celui de la marque nominale CHEW THIS de l’Opposante.

[70]  Le caractère distinctif d’une marque de commerce peut être accru par l’emploi ou la promotion au Canada. Bien que l’Opposante ait été constituée en société en 2009, la preuve d’emploi de la marque de commerce CHEW THIS fournie par M. Burko concerne uniquement les années 2013, 2014 et 2015. Il n’y a aucune indication dans l’affidavit de M. Burko selon laquelle l’Opposante a employé sa marque de commerce avant 2013. Les ventes de produits en liaison avec la marque de commerce CHEW THIS réalisées par l’Opposante se sont élevées à plus de 1,3 million de dollars annuellement de 2013 à 2015 inclusivement.

[71]  M. Burko n’a pas fourni beaucoup de renseignements sur l’étendue de la promotion et du marketing dont ont fait l’objet les produits vendus en liaison avec la marque CHEW THIS. Il est fait mention du site Web de l’Opposante, mais aucun renseignement n’est fourni quant au nombre de visiteurs qu’a reçus ce site Web. Il est également fait mention d’un bulletin d’information électronique envoyé à des clients et amis, mais l’ampleur de la distribution dont ce bulletin a fait l’objet est inconnue. Enfin, M. Burko a mentionné que l’Opposante a participé à des salons commerciaux à Ottawa, Toronto et Calgary, ainsi qu’en Colombie-Britannique.

[72]  En conséquence, je conclus que la marque de commerce CHEW THIS de l’Opposante a acquis un certain caractère distinctif de par son emploi et sa promotion lors de salons commerciaux au Canada.

[73]  Quant à la Marque, Mme Giust a fourni les revenus annuels tirés de la vente des services de la Requérante en liaison avec la Marque, lesquels ont oscillé entre plus de 300 000 $ en 2013-2014 et plus de 630 000 $ en 2015-2016. Ces revenus sont inférieurs à ceux qu’a enregistrés l’Opposante pendant environ la même période. Mme Guist [sic] a également fourni des renseignements sur les moyens pris par la Requérante pour annoncer la Marque, lesquels comprennent des apparitions lors d’émissions de télévision, la distribution de brochures dans des secteurs résidentiels, le placement d’annonces dans des journaux locaux et sur des panneaux d’affichage et la commandite d’événements. Elle a indiqué les sommes dépensées par la Requérante pour promouvoir la Marque, lesquelles se sont élevées à plus de 20 000 $ de 2014 à 2016. Cependant, aucun renseignement n’a été fourni en ce qui concerne le nombre de téléspectateurs potentiels de ces émissions de télévision; la participation à des salons commerciaux et à des événements semble être limitée à la région d’Ottawa; nous ne connaissons pas l’ampleur de la distribution de brochures lors de ces divers événements; et, enfin, nous ne disposons d’aucun renseignement sur l’emplacement de ces panneaux d’affichage.

[74]  En somme, je conclus que la Marque est également connue au Canada, mais seulement dans la région d’Ottawa.

[75]  Dans l’ensemble, ce premier facteur favorise légèrement la Requérante, car la Marque possède un caractère distinctif inhérent plus marqué que celui de la marque de commerce CHEW THIS de l’Opposante et, bien que cette marque ait acquis un certain caractère distinctif comme l’indiquent les ventes des produits de l’Opposante, ce léger avantage en ce qui concerne les chiffres de ventes n’est pas suffisant pour l’emporter sur la combinaison du caractère distinctif inhérent de la Marque et le caractère distinctif qu’elle a acquis de par son emploi et sa promotion pendant la même période.

La période pendant laquelle les marques de commerce ont été en usage

[76]  L’Opposante fait valoir qu’elle emploie sa marque de commerce CHEW THIS depuis 2009. L’enregistrement LMC850,371 a été accordé sur la base de l’emploi de cette marque depuis 2009. Il n’y a aucune preuve de l’emploi de la marque de commerce CHEW THIS de 2009 à 2012 inclusivement. Il a été déterminé que la simple existence d’un enregistrement me permet uniquement de supposer un emploi minimal [Entre Computer Centers Inc c Global Upholstery Co (1991), 40 CPR (3d) 427 (COMC), à la p 430]. Cet emploi minimal n’est pas suffisant pour conférer un avantage manifeste à l’Opposante.

[77]  Étant donné qu’il existe une preuve de l’emploi par chacune des parties de leur marque respective depuis 2013, ce facteur ne favorise aucune des parties.

Le genre des produits et services

[78]  Pour évaluer le genre des produits et de l’entreprise des parties, je dois comparer les produits et les services décrits dans la demande avec les produits visés par l’enregistrement de l’Opposante [voir Mr Submarine Ltd c Amandista Investments Ltd (1987), 19 CPR (3d) 3, aux p 10 et 11 (CAF); Henkel Kommadnitgellschaft c Super Dragon (1986), 12 CPR (3d) 110, à la p 112 (CAF); Miss Universe Inc c Dale Bohna (1994), 58 CPR (3d) 381, aux p 390 à 392 (CAF)]. L’examen de ces états déclaratifs doit cependant être effectué dans l’optique de déterminer le type probable d’entreprise ou de commerce envisagé par les parties, et non l’ensemble des commerces que le libellé est susceptible d’englober. Une preuve de la nature véritable des commerces exercés par les parties est utile à cet égard [voir McDonald’s Corp c Coffee Hut Stores Ltd (1996), 68 CPR (3d) 168 (CAF); Procter & Gamble Inc c Hunter Packaging Ltd (1999), 2 CPR (4th) 266 (COMC); et American Optical Corp c Alcon Pharmaceuticals Ltd (2000), 5 CPR (4th) 110 (COMC)].

[79]  La Requérante fait valoir que l’enregistrement de l’Opposante ne vise aucun service. De plus, elle fait valoir que l’Opposante ne vend pas ses produits directement à des clients à partir d’un magasin de détail physique. Elle vend ses produits à des distributeurs de fournitures pour animaux de compagnie qui vendent en gros leurs produits à des détaillants canadiens de fournitures pour animaux de compagnie, ainsi que par l’intermédiaire de son site Web.

[80]  La Requérante prétend en outre que les produits des parties sont différents. Elle adopte la position selon laquelle ses produits sont des articles promotionnels accessoires aux Services de la Requérante, à savoir des couvercles réutilisables de nourriture en conserve pour animaux de compagnie (produits (1)), des dispositifs de dressage d’animaux de compagnie, nommément des cliquets et des laisses (produits (2)), des laisses pour animaux de compagnie (produit (3)), ainsi que des produits qui ont été décrits comme des articles promotionnels, nommément des tee-shirts, des pulls d’entraînement à capuchon, des chandails ras du cou, des stylos, des grandes tasses à café, des affiches, des drapeaux, des casquettes de baseball et des vestes (produits (4)).

[81]  Exception faite des produits (4), je ne considère pas que les autres produits décrits ci-dessus sont des articles promotionnels. La Requérante a expressément énuméré ce qu’elle considère comme des articles promotionnels et a exclu les produits (1), (2) et (3) de cette catégorie.

[82]  À l’exception des produits (4), je conviens avec l’Opposante que les Produits recoupent les produits de l’Opposante, car ils appartiennent à la même catégorie générale de produits pour animaux de compagnie destinés à être utilisés par les propriétaires d’animaux de compagnie et que, au final, ils seront vendus dans des magasins pour animaux de compagnie.

[83]  En ce qui concerne les produits (4), même si, d’après leur description, ils semblent différents de tous les produits de l’Opposante, ils sont accessoires aux Services de la Requérante.

[84]  Quant aux Services, leur description parle d’elle-même : il s’agit de magasins de vente au détail de nourriture pour animaux de compagnie et d’accessoires pour animaux de compagnie. Il existe un lien étroit entre eux et les produits de l’Opposante. En fait, la preuve montre que les produits de l’Opposante sont vendus dans des magasins de détail vendant de la nourriture pour animaux de compagnie.

[85]  Malgré les différences entre les Services de la Requérante et les produits de l’Opposante, je suis d’avis qu’il existe un certain lien entre eux compte tenu de leur genre respectif.

[86]  Par conséquent, le facteur énoncé à l’article 6(5)c) de la Loi favorise l’Opposante.

Le genre d’entreprises et la nature du commerce

[87]  L’entreprise de la Requérante consiste à exploiter des magasins de détail pour animaux de compagnie et à vendre des produits pour animaux de compagnie, tandis que celle de l’Opposante consiste à vendre de la nourriture et des jouets pour animaux de compagnie destinés à être offerts en vente dans des magasins pour animaux de compagnie. L’Opposante vend ses produits pour animaux de compagnie à des distributeurs de fournitures pour animaux de compagnie, à des magasins spécialisés pour animaux de compagnie détenus par des tiers indépendants, à des magasins spécialisés pour animaux de compagnie détenus par des tiers franchisés et directement aux consommateurs par l’intermédiaire de son site Web, tandis que la Requérante fait affaire directement avec les consommateurs à partir d’un établissement physique. Il n’y a aucune indication selon laquelle la Requérante vend les Produits par Internet. Il y a donc une différence dans la nature du commerce des parties.

[88]  Même si, à terme, les produits des parties parviendront au consommateur final, les entreprises des parties sont d’un genre différent. Ce facteur favorise la Requérante.

Le degré de ressemblance

[89]  Comme l’a indiqué la Cour suprême du Canada dans Masterpiece, dans la plupart des cas, le degré de ressemblance entre les marques en cause est le facteur pertinent le plus important. Il faut envisager le degré de ressemblance entre les marques en cause du point de vue de leur présentation, de leur son et des idées qu’elles suggèrent. De plus, la Cour suprême a déclaré qu’il est préférable, lorsqu’il s’agit de comparer des marques de commerce, de se demander d’abord si les marques présentent un aspect particulièrement frappant ou unique. Il faut éviter de placer les marques côte à côte dans le but d’en faire une analyse critique et de relever les similitudes et les différences entre elles.

[90]  Tel qu’il est indiqué dans les observations écrites de l’Opposante, la Marque est formée des mots « CHEW-THAT » [mâche ça], d’un élément graphique fantaisiste constituée d’une tête de chat et d’un os pourvu de moustaches, et des mots additionnels « pet food » [nourriture pour animaux] et « toys galore » [profusion de jouets] écrits dans une plus petite police de caractères au-dessus et en dessous de la partie graphique de la Marque.

[91]  La thèse de l’Opposante est que, bien que les marques comprennent toutes deux le mot CHEW [mâcher; produit à mâcher], la marque de l’Opposante comprend également l’élément nominal THIS [ceci; ci] alors que la Marque de la Requérante comprend le mot THAT [cela; ça]. L’Opposante fait valoir que l’expression « this and that » [ceci et cela] est définie dans le dictionnaire comme signifiant « choses diverses ». Elle ajoute qu’il s’agit d’une expression dans laquelle ces deux mots vont de pair, comme dans [Traduction] « mange ci, mange ça », « bois ci, bois ça » ou « prends ci, prends ça ». Par conséquent, l’Opposante soutient que, indépendamment de la partie graphique de la Marque, il existe une similarité cohésive entre la marque de commerce CHEW THIS de l’Opposante et la marque de commerce CHEW-THAT & Dessin de la Requérante.

[92]  Je tiens à souligner qu’il n’y a au dossier aucune preuve d’une définition du dictionnaire pour l’expression « this and that » [ceci et cela]. J’ai toutefois usé de mon pouvoir discrétionnaire et j’ai consulté le Canadian Oxford Dictionary, dans lequel l’expression « this and that » [ceci et cela] est définie comme signifiant [Traduction] « choses diverses non spécifiées ».

[93]  La caractéristique dominante de la Marque est la partie nominale CHEW THAT qui figure à l’intérieur d’un dessin d’os et d’une silhouette de chat. D’autres expressions descriptives sont également présentes : « pet food » [nourriture pour animaux] et « toys galore » [profusion de jouets].

[94]  Quant aux idées suggérées par les marques des parties, la Marque dans son ensemble suggère que de la nourriture pour animaux de compagnie est offerte en vente dans les magasins de détail pour animaux de compagnie de la Requérante, tandis que l’expression « toys galore » [profusion de jouets] suggère que les consommateurs trouveront également une abondance de jouets dans les magasins de détail pour animaux de compagnie de la Requérante.

[95]  Malgré la présence de l’élément commun CHEW [mâcher; produit à mâcher] et peut-être également de la similarité cohésive des mots THIS [ceci] et THAT [cela], dans l’ensemble, les marques des parties diffèrent dans le son, dans la présentation et dans les idées qu’elles suggèrent.

[96]  La Requérante fait valoir que, lorsque des marques de commerce contiennent un élément commun qui est également présent dans un certain nombre d’autres marques de commerce, les consommateurs prêtent davantage attention aux autres caractéristiques des marques et distinguent les marques grâce à ces caractéristiques. J’examinerai cet argument dans le contexte de la preuve de l’état du registre et de l’état du marché.

[97]  Dans l’ensemble, ce facteur favorise la Requérante.

Preuve de l’état du registre et de l’état du marché

[98]  La preuve de l’état du registre n’est pertinente que dans la mesure où l’on peut en tirer des inférences quant à l’état du marché [voir Ports International Ltd c Dunlop Ltd (1992), 41 CPR (3d) 432 (COMC); Welch Foods Inc c Del Monte Corp (1992), 44 CPR (3d) 205 (CF 1re inst)]. Des inférences quant à l’état du marché ne peuvent être tirées de la preuve de l’état du registre que si un nombre important d’enregistrements pertinents est relevé [voir Maximum Nutrition Ltd c Kellogg Salada Canada Inc (1992), 43 CPR (3d) 349 (CAF)].

[99]  Mme Witts a relevé la présence au registre d’au moins 15 marques de commerce qui comprennent le mot CHEW [mâcher; produit à mâcher] ou des dérivés de ce mot et qui sont enregistrées en liaison avec des produits à mâcher pour chiens, des jouets pour chiens, des friandises pour chiens et la vente au détail de produits pour animaux de compagnie, dont : CHEW TIME, PET CHEWZ, TRUE CHEWS, TOP CHEWS, POWER CHEW, CHEW-EEZ, CHEWY BITS, CHEW-RIFIC, SMART CHEW, CABIN CHEWS, CHEWMASTERS, ULTIMATE CHEW, STEAKCHEW, CHEW-A-TREAT et CHEW-LOTTA [voir l’affidavit Witts, pièce C].

[100]  De plus, la preuve de la Requérante comprend des achats effectués au Canada auprès de tiers vendant des jouets pour animaux de compagnie, des produits à mâcher pour chiens et des friandises pour chiens et employant le terme CHEW [mâcher; produit à mâcher] ou des dérivés de ce terme, dont chew time, chewmasters, chew-rific, chew-eez, true chews, chew-lotta, CHEW’N CLEAN, CHEWS, BIG CHEW, SUPER CHEW, DURA CHEW, DENTAL CHEW, CABIN CHEWS, FLOSSY CHEWS, BRUSHING CHEWS, TRIPLE CHEW, NATURE’S CHEWS, ORA-CHEW et ANTLER CHEWS [voir l’affidavit Witts, paragraphes 4 et 5, pièces D à T1, et l’affidavit Guist [sic], pièce Z].

[101]  Enfin, la Requérante elle-même vend dans son magasin des produits qui proviennent de divers fournisseurs et sont commercialisés en liaison avec des noms de produits qui comprennent le mot CHEW [mâcher; produit à mâcher], dont :

  • Pet Science Ltd. : ANTLERCHEWZ
  • Freedom Pet Supplies : CHEWMASTER, DUCK CHEWS, CHEWZZIES CHEWY TREATS, DEER CHEWS, RABBIT CHEWS, CHICKEN CHEWS, CHEW N CLEAN, CRISPY CHEWS, CHILLY CHEWS, PERFECT CHEW, KAYTEE CHEWS, PRO ACTION DENTAL CHEW, DURA CHEW, DURA CHEW PLUS, FLEXIBLE CHEWS, CHEW GUARD, Z-BONE® DENTAL CHEWS, SUPER CHEW, CHEWBIES et CHEWY’S
  • Kane Pet Supplies : JONES NATURAL CHEWS, HIMALAYAN CHEWS, MARROWCHEWS
  • MJM Unique Pet Supplies Ltd : TIBETAN DOG CHEW

[102]  À la lumière de la preuve de l’état du registre et de l’état du marché, je conclus que les consommateurs canadiens ont l’habitude de voir des marques comprenant l’élément CHEW [mâcher; produit à mâcher] être employées en liaison avec des produits pour animaux de compagnie. Par conséquent, ils prêtent davantage attention aux autres caractéristiques des marques et distinguent les marques grâce à ces caractéristiques [voir Maximum Nutrition Ltd, supra]. En l’espèce, les caractéristiques additionnelles de la Marque décrites ci-dessus permettent aux consommateurs de distinguer entre elles les marques des parties.

[103]  Par conséquent, la preuve de l’état du registre et de l’état du marché est un facteur pertinent qui favorise la Requérante.

Aucun cas de confusion

[104]  Comme pièce 7, M. Burko a produit un imprimé d’une carte Google montrant l’emplacement du magasin de détail de la Requérante ainsi que l’emplacement de 45 magasins spécialisés pour animaux de compagnie qui vendent les produits de l’Opposante susmentionnés et sont situés dans un rayon d’environ 25 kilomètres du magasin de détail de la Requérante.

[105]  Malgré la proximité de magasins vendant les produits de l’Opposante, Mme Guist affirme n’avoir personnellement connaissance d’aucun cas de confusion entre les produits de l’Opposante vendus en liaison avec la marque de commerce CHEW THIS et l’entreprise de Requérante et/ou ses produits et services vendus en liaison avec la Marque.

[106]  Dans Mattel, supra, la Cour suprême du Canada a indiqué que l’absence de confusion véritable sur le marché pouvait constituer une circonstance pertinente, voire importante, de l’espèce qu’il convient de prendre en considération au moment de déterminer s’il existe une probabilité de confusion entre les marques.

[107]  En l’espèce, l’absence d’une preuve de confusion véritable, malgré le fait que le magasin de détail de la Requérante se trouve à proximité d’autres magasins pour animaux de compagnie qui vendent les produits CHEW THIS de l’Opposante et que les marques des parties ont été employées de façon concomitante pendant une période de plus de trois ans, confirme ma conclusion selon laquelle il n’existe pas de probabilité de confusion entre les marques en cause.

Conclusion

[108]  Cette analyse de tous les facteurs pertinents m’amène à conclure que la Requérante s’est acquittée du fardeau qu’il lui incombait de démontrer, selon la prépondérance des probabilités, qu’il n’existe pas de probabilité de confusion entre la Marque et la marque de commerce déposée CHEW THIS de l’Opposante.

[109]  J’arrive à cette conclusion malgré le fait que les produits et services des parties se recoupent ou sont liés et que les marques en cause ont un élément commun, à savoir le mot CHEW [mâcher; produit à mâcher], et en dépit de la similarité cohésive des mots THIS [ceci] et THAT [cela], car dans l’ensemble, il existe des différences entre les marques dans le son, dans la présentation et dans les idées qu’elles suggèrent. Qui plus est, l’élément commun CHEW [mâcher; produit à mâcher] est également présent dans de nombreuses marques de commerce figurant au registre et est un élément de nombreux noms de produits apparentés vendus au Canada.

[110]  Enfin, l’absence d’une preuve de confusion véritable entre les marques, malgré leur emploi concomitant à proximité relativement immédiate l’une de l’autre dans la région d’Ottawa, corrobore ma conclusion que, selon la prépondérance des probabilités, il n’existe pas de probabilité de confusion entre les marques des parties.

[111]  En conséquence, je rejette ce motif d’opposition.

Motifs d’opposition fondés sur l’absence de droit à l’enregistrement (articles 16(1) et (3) de la Loi)

[112]  Comme je l’ai mentionné ci-dessus, ces motifs d’opposition doivent être évalués en fonction des diverses dates de premier emploi revendiquées (article 16(1)) ou de la date de production de la demande (article 16(3)). Ces dates vont du 25 avril 2013 au 13 novembre 2013. La différence entre ces diverses dates n’aura pas d’incidence sur l’analyse qui suit. J’examinerai la preuve en fonction de la date du 25 avril 2013, c’est-à-dire la date pertinente la plus ancienne.

[113]  Pour que ces motifs d’opposition soient accueillis, l’Opposante devait établir qu’elle employait déjà sa marque de commerce CHEW THIS à la date du 25 avril 2013 et qu’elle n’avait pas abandonné cet emploi à la date d’annonce de la présente demande (25 août 2015) [voir l’article 16(5) de la Loi].

[114]  La simple production d’un certificat d’enregistrement n’établit pas l’emploi de la marque de commerce d’un opposant [voir Rooxs Inc c Edit-SRL (2002, 23 CPR (4th) 265 (COMC)]. Cependant, comme pièce 3, M. Burko a produit des factures à l’appui de son allégation portant que l’Opposante a vendu des produits en liaison avec sa marque de commerce CHEW THIS. La facture la plus ancienne est datée du 6 mars 2013. Une facture datée du 11 décembre 2015 a également été fournie.

[115]  L’Opposante s’est donc acquittée de son fardeau initial. Par conséquent, c’est à la Requérante que revient le fardeau de démontrer, selon la prépondérance des probabilités, qu’il n’existait pas de probabilité raisonnable de confusion entre la Marque et la marque de commerce CHEW THIS de l’Opposante à la date du 25 avril 2013.

[116]  La différence entre les dates pertinentes par rapport au motif d’opposition précédent (date de ma décision) aurait une incidence sur mon analyse des critères pertinents suivants : la mesure dans laquelle la Marque était connue à ces dates, la preuve de l’état du registre et de l’état du marché, et l’absence d’une preuve de cas de confusion véritable. J’examinerai donc uniquement ces critères puisque, dans le cas des autres critères, mon analyse précédente s’applique avec les adaptations nécessaires.

La mesure dans laquelle les marques étaient connues à la date pertinente

[117]  M. Burko ne fournit pas les chiffres des ventes des produits de l’Opposante arborant la marque de commerce CHEW THIS qui ont été réalisées avant le 25 avril 2013. Les chiffres fournis concernent l’ensemble de l’année 2013. Cependant, trois des factures comprises dans la pièce 3 portent une date antérieure à la date pertinente. Elles totalisent près de 40 000 $ et concernent des ventes réalisées en Alberta et en Ontario.

[118]  Il n’y a aucune preuve de l’emploi de la Marque par la Requérante avant le 25 avril 2013.

[119]  Ainsi, la marque de commerce CHEW THIS de l’Opposante était connue dans une mesure limitée à la date pertinente. Cependant, quel que soit l’avantage que cela confère à l’Opposante, ce dernier ne serait pas suffisant, compte tenu de la révélation limitée de sa marque à cette date, pour constituer un facteur déterminant dans mon analyse des facteurs pertinents énoncés à l’article 6(5) de la Loi.

Preuve de l’état du registre et de l’état du marché

[120]  Quant à la preuve de l’état du registre, elle a été rassemblée après la date pertinente. Cependant, certains des enregistrements cités figuraient au registre à la date du 25 avril 2013 et peuvent, par conséquent, être pris en considération. Ils visent les marques suivantes : PET CHEWZ, TRUE CHEWS, POWER CHEW, CHEW-EEZ, CHEWY BITS, CHEW-RIFIC, SMART CHEW, CHEWMASTERS, ULTIMATE CHEW, STEAKCHEW, CHEW-A-TREAT et CHEW-LOTTA [voir l’affidavit Witts, pièce C]. Douze enregistrements sont suffisants pour tirer des inférences quant à l’état du marché [voir Maximum Nutrition Ltd, supra].

[121]  Bien que je ne puisse pas tenir compte de la preuve de l’état du marché décrite ci-dessus, car cette dernière est postérieure à la date pertinente, la preuve de l’état du registre demeure suffisante pour tirer une inférence quant à l’état du marché.

Aucun cas de confusion

[122]  Quant à l’absence d’une preuve de cas de confusion véritable, ce facteur ne s’applique pas à cette date pertinente plus ancienne.

Conclusion

[123]  Indépendamment de l’absence d’une preuve de l’état du marché et de l’absence d’une preuve de cas de confusion véritable à une quelconque des dates pertinentes, je conclus là encore que la Requérante s’est acquittée de son fardeau de démontrer, selon la prépondérance des probabilités, que la Marque ne risquait pas de créer de la confusion avec la marque de commerce CHEW THIS de l’Opposante à l’une quelconque des dates pertinentes, pour des raisons semblables à celles énoncées relativement au motif d’opposition précédent, à savoir que les différences entre les marques des parties sont plus importantes que leurs similitudes et que la preuve de l’état du registre établit que CHEW [mâcher; produit à mâcher] est un élément commun à de nombreuses marques de commerce enregistrées en liaison avec des produits et/ou des services semblables, de telle sorte que de petites différences sont suffisantes pour permettre aux consommateurs de distinguer les marques entre elles.

[124]  Par conséquent, les motifs d’opposition fondés sur les articles 16(1) et de (3) de la Loi sont également rejetés.

Motif d’opposition fondé sur l’absence de caractère distinctif

[125]  Pour s’acquitter de son fardeau à l’égard de ce motif d’opposition, l’Opposante doit démontrer que, à la date du 26 août 2015, c’est-à-dire la date de production de la déclaration d’opposition, sa marque de commerce CHEW THIS était devenue suffisamment connue pour faire perdre à la Marque de la Requérante son caractère distinctif. En d’autres termes, sa marque de commerce devait être soit bien connue dans au moins une partie du Canada, soit généralement connue au Canada [Bojangles’ International, LLC c Bojangles Café Ltd (2004), 40 CPR (4th) 553, conf (2006), 48 CPR (4th) 427 (CF 1re inst)].

[126]  Je suis convaincu, à la lumière du contenu de l’affidavit de M. Burko, que l’Opposante s’est acquittée de ce fardeau. C’est donc à la Requérante que revenait le fardeau de démontrer que, malgré le fait que la marque de commerce CHEW THIS de l’Opposante était connue au Canada, la Marque pouvait tout de même servir à distinguer les Produits et Services des produits de l’Opposante. Ce sont également les facteurs énoncés à l’article 6(5) de la Loi qui sont utilisés pour trancher cette question.

[127]  La différence entre les dates pertinentes applicables aux motifs d’opposition fondés sur l’article 16 de la Loi et la date qui s’applique au présent motif d’opposition (26 août 2015) n’a pas d’incidence substantielle sur l’analyse que j’ai réalisée relativement aux motifs d’opposition fondés sur l’absence de droit à l’enregistrement.

[128]  À l’avantage de la Requérante, il me faudrait tenir compte de la preuve d’emploi de la Marque entre avril 2013 et la date pertinente, et du fait qu’il n’y a eu aucun cas de confusion véritable entre les marques en cause sur une période d’emploi concomitant de plus de deux ans dans la même région.

[129]  Le résultat final est le même, à savoir que la Requérante s’est acquittée de son fardeau de démontrer que la Marque était distinctive à la date pertinente et qu’elle était adaptée à distinguer les Produits et Services de la Requérante des produits de l’Opposante vendus en liaison avec la marque de commerce CHEW THIS.

[130]   En conséquence, ce motif d’opposition est également rejeté.

Décision

[131]  Dans l’exercice des pouvoirs qui m’ont été délégués en vertu des dispositions de l’article 63(3) de la Loi, je rejette l’opposition selon les dispositions de l’article 38(8) de la Loi.

 

Jean Carrière

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

Traduction certifiée conforme

Judith Lemire, trad.


COMMISSION DES OPPOSITIONS DES MARQUES DE COMMERCE

OFFICE DE LA PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE DU CANADA

COMPARUTIONS ET AGENTS INSCRITS AU DOSSIER

___________________________________________________

Aucune audience tenue

AGENT(S) AU DOSSIER

Riches, McKenzie & Herbert LLP

POUR L’OPPOSANTE

MBM Intellectual Property Law LLP

POUR LA REQUÉRANTE

 

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