Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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OPIC

CIPO

LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

THE REGISTRAR OF TRADE-MARKS

Référence : 2018 COMC 73

Date de la décision : 2018-07-17

[TRADUCTION CERTIFIÉE,

NON RÉVISÉE]

DANS L’AFFAIRE DE LA PROCÉDURE DE RADIATION EN VERTU DE L’ARTICLE 45

 

Low Murchison Radnoff LLP

Partie requérante

et

 

M. Henry Yap Eng Beo

Propriétaire inscrit

 

LMC755,323 pour la marque de commerce D DYNACO & Dessin

Enregistrement

 

[1]  La présente décision concerne une procédure de radiation sommaire engagée à l’égard de l’enregistrement no LMC755,323 de la marque de commerce D DYNACO & Dessin, reproduite ci-dessous (la Marque), détenu par M. Henry Yap Eng Beo.

[2]  La Marque est actuellement enregistrée en liaison avec les produits et les services suivants [Traduction] :

Produits :

Haut-parleurs, radios, amplificateurs, nommément amplificateurs de son, amplificateurs et haut-parleurs stéréo, magnétophones, platines tourne-disques.

Haut-parleurs, radios, amplificateurs, nommément amplificateurs de son, amplificateurs et haut-parleurs stéréo; magnétophones, platines tourne-disques, appareils photographiques, cinématographiques, optiques pour l’enregistrement, la transmission ou la reproduction de sons ou d’images, nommément appareils photo, lecteurs et enregistreurs de disques audio et vidéo, objectifs, lecteurs MP3, lecteurs MP4; supports de données magnétiques vierges, nommément disques audio et vidéo, cassettes audio et vidéo; disques vierges, nommément disques vierges audio et vidéo. 

 

Services :

Conception et développement de matériel informatique et de logiciels.

[3]  Pour les raisons exposées ci-dessous, je conclus qu’il y a lieu de radier l’enregistrement.

La procédure

[4]  Le 8 avril 2016, le registraire des marques de commerce a donné l’avis prévu à l’article 45 de la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, ch T-13 (la Loi) à M. Henry Yap Eng Beo (le Propriétaire). Cet avis a été donné à la demande de Low Murchison Radnoff LLP (la Partie requérante).

[5]  L’avis enjoignait au Propriétaire de fournir une preuve établissant qu’il a employé la Marque au Canada à un moment quelconque entre le 8 avril 2013 et le 8 avril 2016 en liaison avec chacun des produits et des services spécifiés dans l’enregistrement. Dans le cas où la Marque n’avait pas été ainsi employée, le Propriétaire devait fournir une preuve établissant la date à laquelle la Marque a été employée en dernier lieu et les raisons du défaut d’emploi depuis cette date.

[6]  La définition d’« emploi » est énoncée à l’article 4 de la Loi, lequel est libellé comme suit :

4(1)  Une marque de commerce est réputée employée en liaison avec des produits si, lors du transfert de la propriété ou de la possession de ces produits, dans la pratique normale du commerce, elle est apposée sur les produits mêmes ou sur les emballages dans lesquels ces produits sont distribués, ou si elle est, de toute autre manière, liée aux produits à tel point qu’avis de liaison est alors donné à la personne à qui la propriété ou possession est transférée.

(2) Une marque de commerce est réputée employée en liaison avec des services si elle est employée ou montrée dans l’exécution ou l’annonce de ces services.

(3) Une marque de commerce mise au Canada sur des produits ou sur les emballages qui les contiennent est réputée, quand ces produits sont exportés du Canada, être employée dans ce pays en liaison avec ces produits.

[7]  Il est bien établi que l’article 45 de la Loi a pour objet et portée d’offrir une procédure simple, sommaire et expéditive pour débarrasser le registre du « bois mort » et qu’à ce titre, le niveau de preuve auquel le propriétaire inscrit doit satisfaire est peu élevé [Uvex Toko Canada Ltd c Performance Apparel Corp, 2004 CF 448, 31 CPR (4th) 270].

[8]  En réponse à l’avis du registraire, le Propriétaire a produit son propre affidavit, souscrit le 7 novembre 2016, accompagné des pièces HY-1 à HY-7.

[9]  Seule la Partie requérante a produit des observations écrites. Aucune des parties n’a sollicité la tenue d’une audience.

La preuve

[10]  M. Beo est le Propriétaire de la Marque.

[11]  M. Beo explique qu’il a enregistré la Marque dans l’intention de fabriquer les produits visés par l’enregistrement au Canada pour exportation à Singapour. Il atteste que les produits arborant la Marque ont été fabriqués au Canada sous licence par Audiosphere Research Corp. Ltd. (Audiosphere) et ont été vendus à Hoon Cheong Electronics, une entreprise enregistrée à Singapour dont il était l’unique propriétaire. Il fournit comme pièces HY-1 à HY-5 divers documents à l’appui, dont du matériel promotionnel et des cartes d’enregistrement de garantie se rapportant aux produits, des factures, des documents d’enregistrement d’entreprise et des accords de licence.

[12]  Toutes les activités commerciales susmentionnées, cependant, semblent se rapporter uniquement à des haut-parleurs et sont largement antérieures à la date d’enregistrement de la Marque. En effet, M. Beo reconnaît le défaut d’emploi de la Marque jusqu’à la période pertinente et pendant cette période, car il atteste qu’Audiosphere a cessé ses activités et donc la fabrication des produits visés par l’enregistrement à une date inconnue avant que la Marque soit enregistrée le 15 décembre 2009.

[13]  Dans le reste de son affidavit, M. Beo tente d’établir qu’il existait des circonstances spéciales justifiant le défaut d’emploi de la Marque. À cet égard, M. Beo atteste que, en raison de la récession qui a débuté en 2008 et des conditions difficiles du marché indépendantes de sa volonté, il n’a pas été en mesure, à ce jour, de trouver un nouveau fabricant pour les produits visés par l’enregistrement au Canada.

[14]  Enfin, M. Beo atteste qu’il a l’intention de reprendre l’emploi de la Marque et qu’il a communiqué avec des fabricants canadiens potentiels. À l’appui, il joint comme pièce HY-6 une copie d’échanges de courriels à cet égard. Les échanges de courriels indiquent qu’il exerce des activités pour Dynaco Electronics. Il joint en outre comme pièce HY-7 une copie des renseignements se rapportant à l’enregistrement de l’entreprise Dynaco Electronics pour établir qu’il est l’unique propriétaire de Dynaco Electronics, une entreprise individuelle enregistrée à Singapour.

Analyse et motifs de décision

[15]  En premier lieu, étant donné que l’affidavit et la preuve ne disent absolument rien en ce qui concerne les services visés par l’enregistrement, ceux-ci seront supprimés de l’enregistrement.

[16]  En ce qui concerne les produits visés par l’enregistrement, il ressort clairement de la preuve qu’aucun emploi de la Marque n’a été établi au Canada pendant la période pertinente et que M. Beo tente d’établir l’existence de circonstances spéciales. Par conséquent, la question à trancher est celle de savoir s’il existait des circonstances spéciales qui justifieraient le défaut d’emploi de la Marque en liaison avec les produits visés par l’enregistrement pendant cette période.

[17]  La question de savoir s’il existe des circonstances spéciales justifiant le défaut d’emploi repose sur l’examen de trois critères, énoncés dans Registraire des marques de commerce c Harris Knitting Mills Ltd (1985), 4 CPR (3d) 488 (CAF). Le premier critère est la durée de la période pendant laquelle la marque n’a pas été employée; le deuxième consiste à déterminer si les raisons du défaut d’emploi étaient indépendantes de la volonté du propriétaire inscrit; et le troisième, à déterminer s’il existe une intention sérieuse de reprendre l’emploi à court terme.

[18]  La décision rendue dans l’affaire Smart & Biggar c Scott Paper Ltd (2008) CAF 129, 65 CPR (4th) 303 a apporté des précisions quant à l’interprétation des critères relatifs aux circonstances spéciales énoncés dans Harris Knitting. En particulier, la Cour a déterminé que le deuxième critère doit être rempli pour permettre de conclure à l’existence de circonstances spéciales justifiant le défaut d’emploi d’une marque. Autrement dit, les deux autres facteurs sont pertinents, mais ils ne sauraient à eux seuls constituer des circonstances spéciales.

[19]  La pertinence du premier critère est évidente, car les raisons pouvant justifier une brève période de défaut d’emploi pourraient ne pas justifier un défaut d’emploi prolongé; autrement dit, les raisons du défaut d’emploi seront examinées à la lumière de la durée du défaut d’emploi [Harris Knitting, supra; concernant Goldwell (1974), 29 CPR (2d) 110 (RMC)]. En outre, en ce qui concerne le deuxième critère, les circonstances du défaut d’emploi doivent être des circonstances qui n’existent pas dans la majorité des affaires concernant le défaut d’emploi ou, encore, elles doivent être des [Traduction] « circonstances qui sont inhabituelles, peu communes ou exceptionnelles » [voir John Labatt Ltd c The Cotton Club Bottling Co (1976), 25 CPR (2d) 115 (CF 1re inst)]. Quoi qu’il en soit, l’intention de reprendre l’emploi doit être étayée par la preuve [Arrowhead Spring Water Ltd c Arrowhead Water Corp (1993), 47 CPR (3d) 217 (CF 1re inst); NTD Apparel Inc c Ryan, 2003 CFPI 780, 27 CPR (4th) 73].

[20]  En règle générale, lorsqu’une date de dernier emploi n’est pas fournie, la date de l’enregistrement ou la date de cession de la marque de commerce au propriétaire actuel sera employée, selon le cas [Cassels Brock & Blackwell LLP c Montorsi Francesco e Figli-SpA, 2004 CF 753, 35 CPR (4th) 35; Sim & McBurney c Hugo Boss AG (1996), 67 CPR (3d) 269 (COMC); GPS (UK) c Rainbow Jean Co (1994), 58 CPR (3d) 535 (COMC)]. En l’espèce, M. Beo atteste que la fabrication des produits arborant la Marque au Canada a cessé à un moment donné avant la date d’enregistrement de la Marque. Par conséquent, la date de dernier emploi sera considérée être, aux fins de la présente procédure, la date d’enregistrement de la Marque, à savoir le 15 décembre 2009. La période de défaut d’emploi est donc d’environ six ans et demi.

[21]  En ce qui concerne les raisons du défaut d’emploi, la Partie requérante soutient, et j’en conviens, que les conditions du marché décrites par M. Beo ne constituent pas des circonstances spéciales. En effet, des conditions de marché difficiles ou défavorables ne sont généralement pas considérées comme des circonstances spéciales justifiant le défaut d’emploi [voir Harris Knitting, supra; Rogers, Bereskin & Parr c Registrar of Trade-marks (1987), 17 CPR (3d) 197 (CF 1re inst); Lander Co Canada Ltd c Alex E Macrae & Co (1993), 46 CPR (3d) 417 (CF 1re inst); et Smart & Biggar c Adhoc Ventures Canada Inc, 2014 COMC 26]. En réalité, le Propriétaire ne fournit aucun détail quant à savoir pourquoi une période de plus de six ans constitue une période raisonnable dans les circonstances, pas plus qu’il ne fournit de renseignements concernant les efforts déployés dans le but de trouver un nouveau fabricant ou les difficultés qu’il a éprouvées à trouver un nouveau fabricant pendant cette période. En outre, bien que des difficultés financières puissent, dans certaines circonstances bien précises, justifier un bref défaut d’emploi [voir, à titre d’exemple, Rogers & Scott c Naturade Products Inc (1988), 19 CPR (3d) 504 (COMC); et Lapointe Ronsenstein c Maxwell Taylor’s Grill Inc (2001), 19 CPR (4th) 263 (COMC)], je ne suis pas convaincue qu’elles constituent en l’espèce des circonstances spéciales qui justifient le défaut d’emploi pendant une aussi longue période [voir également Math c Mainse, 2015 COMC 32].

[22]   Quoi qu’il en soit, même si le deuxième critère du test permettant de déterminer s’il existait des circonstances spéciales avait été rempli, j’estime que l’intention de reprendre l’emploi de la Marque n’a pas été démontrée. Selon Lander, supra, l’intention de reprendre l’emploi à court terme doit être [Traduction] « corroborée par des faits comme des bons de commande ou, à tout le moins, une date de reprise précise ». En l’espèce, les échanges de courriels de la pièce HY-6 à propos des efforts déployés par M. Beo dans le but de trouver un nouveau fabricant pour les produits portent une date ultérieure à l’envoi de l’avis prévu à l’article 45 et ne font pas la lumière sur le moment auquel l’emploi de la Marque sera repris.

[23]  Je souligne l’observation suivante formulée par la Cour fédérale dans Plough, supra, au paragraphe 10 [Traduction] :

Il n’est pas permis à un propriétaire inscrit de garder sa marque s’il ne l’emploie pas, c’est-à-dire s’il ne l’emploie pas du tout ou s’il ne l’emploie pas à l’égard de certaines des marchandises pour lesquelles cette marque a été enregistrée.

[24]  Étant donné qu’il n’y a aucune preuve se rapportant aux efforts déployés par le Propriétaire dans le but de trouver un nouveau fabricant pour ses produits et de reprendre l’emploi de la Marque avant l’envoi de l’avis prévu à l’article 45, les communications de M. Beo avec des fabricants canadiens potentiels (courriels de la pièce HY-6) semblent constituer une réaction à l’avis. Par conséquent, il m’est impossible de conclure que, avant l’envoi de l’avis prévu à l’article 45, le Propriétaire avait l’intention sérieuse de reprendre l’emploi de la Marque.

 

Décision

[25]  Compte tenu de ce qui précède, dans l’exercice des pouvoirs qui m’ont été délégués en vertu des dispositions de l’article 63(3) de la Loi, l’enregistrement sera radié selon les dispositions de l’article 45 de la Loi.

 

 

Kathryn Barnett

Agente d’audience

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

Traduction certifiée conforme

Marie-Pierre Hétu, trad.


 

COMMISSION DES OPPOSITIONS DES MARQUES DE COMMERCE

OFFICE DE LA PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE DU CANADA

COMPARUTIONS ET AGENTS INSCRITS AU DOSSIER

___________________________________________________

DATE DE L’AUDIENCE : Aucune audience tenue.

AGENT(S) AU DOSSIER

Gowling WLG (Canada) LLP

POUR LE PROPRIÉTAIRE INSCRIT

Borden Ladner Gervais LLP

POUR LA PARTIE REQUÉRANTE

 

 

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