Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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OPIC

CIPO

LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

THE REGISTRAR OF TRADE-MARKS

Référence : 2019 COMC 29

Date de la décision : 2019-03-29

[TRADUCTION CERTIFIÉE,

NON RÉVISÉE]

DANS L’AFFAIRE DE LA PROCÉDURE DE RADIATION EN VERTU DE L’ARTICLE 45

 

Smart & Biggar

Partie requérante

et

 

Lotuspc.com Corporation

Propriétaire inscrite

 

LMC861,031 pour la marque de commerce dahua

Enregistrement

Introduction

[1]  Le 11 janvier 2017, à la demande de Smart & Biggar (la Partie requérante), le registraire des marques de commerce a donné l’avis prévu à l’article 45 de la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, ch T-13 (la Loi) à Lotuspc.com Corporation (la Propriétaire), la propriétaire inscrite de l’enregistrement no LMC861,031 de la marque de commerce « dahua » (la Marque).

[2]  La Marque est enregistrée pour emploi en liaison avec les produits suivants [Traduction] :

(1) Logiciels, nommément logiciels de sécurité pour utilisateurs et exploitants permettant le contrôle et la surveillance d’images en direct captées par des caméras de surveillance sur un réseau local et à distance par Internet, ainsi que logiciels d’enregistrement, de stockage, de récupération et d’amélioration automatisés d’images captées par des caméras de surveillance.

(2) Appareils électroniques d’enregistrement vidéo, nommément ordinateurs, enregistreurs vidéo numériques et cartes d’acquisition vidéo utilisés pour la surveillance d’images captées par des caméras de surveillance, ainsi que l’enregistrement et la transmission de celles-ci.

(3) Caméras de sécurité et de surveillance.

[3]  L’article 45 de la Loi exige que le propriétaire inscrit de la marque de commerce indique, à l’égard de chacun des produits spécifiés dans l’enregistrement, si la marque de commerce a été employée au Canada à un moment quelconque au cours des trois années précédant immédiatement la date de l’avis et, dans la négative, qu’il précise la date à laquelle la marque a ainsi été employée en dernier lieu et la raison de son défaut d’emploi depuis cette date. En l’espèce, la période pertinente pour établir l’emploi s’étend du 11 janvier 2014 au 11 janvier 2017.

[4]  La définition pertinente d’« emploi » en liaison avec des produits est énoncée à l’article 4 de la Loi, lequel est libellé comme suit :

4(1) Une marque de commerce est réputée employée en liaison avec des produits si, lors du transfert de la propriété ou de la possession de ces produits, dans la pratique normale du commerce, elle est apposée sur les produits mêmes ou sur les emballages dans lesquels ces produits sont distribués, ou si elle est, de toute autre manière, liée aux produits à tel point qu’avis de liaison est alors donné à la personne à qui la propriété ou possession est transférée.

[5]  Il est bien établi que de simples allégations d’emploi ne sont pas suffisantes pour établir l’emploi dans le contexte de la procédure prévue à l’article 45 [Plough (Canada) Ltd c Aerosol Fillers Inc (1980), 53 CPR (2d) 62 (CAF)]. Bien que le niveau de preuve requis pour établir l’emploi dans le cadre de cette procédure soit peu élevé [Woods Canada Ltd c Lang Michener (1996), 71 CPR (3d) 477 (CF 1re inst)] et qu’il ne soit pas nécessaire de produire une surabondance d’éléments de preuve [Union Electric Supply Co Ltd c le Registraire des marques de commerce (1982), 63 CPR (2d) 56 (CF 1re inst)], il n’en faut pas moins présenter des faits suffisants pour permettre au registraire de conclure que la marque de commerce a été employée en liaison avec chacun des produits spécifiés dans l’enregistrement pendant la période pertinente [John Labatt Ltd c Rainer Brewing Co (1984), 80 CPR (2d) 228 (CAF)].

[6]   En réponse à l’avis du registraire, la Propriétaire a produit l’affidavit de Xiaohui (Alex) Xue, président de la Propriétaire, souscrit le 10 avril 2017 à London, en Ontario. Les parties ont toutes deux produit des représentations écrites et étaient toutes deux représentées à l’audience qui a été tenue.

La preuve de la Propriétaire

[7]  Dans son affidavit, M. Xue explique qu’il a été le propriétaire de la Marque jusqu’au 10 août 2016, date à laquelle il a transféré la Marque à la Propriétaire, dont il est le principal actionnaire. M. Xue affirme que les activités de la Propriétaire consistent à mettre au point des logiciels liés à des systèmes de sécurité à domicile et en entreprise, ainsi qu’à vendre et à installer ces systèmes de sécurité (para 2).

[8]  M. Xue affirme que la Propriétaire a employé la Marque en liaison avec les produits visés par l’enregistrement au moyen d’étiquettes apposées sur les produits, sur des écrans d’ordinateur affichés lorsque les logiciels de la Propriétaire sont exécutés et dans le coin supérieur gauche de la page Web de la Propriétaire (para 8). Il affirme également qu’il emploie verbalement la Marque pour identifier les produits dans ses interactions avec les clients (para 10). M. Xue atteste que, à toutes les dates pertinentes, la Propriétaire a exercé un contrôle direct sur la Marque (para 5).

[9]  Comme preuve de transferts dans la pratique normale du commerce, M. Xue joint cinq factures comme pièce B à son affidavit. Chaque facture porte une date comprise dans la période pertinente et fait état d’une vente d’un produit décrit au moyen de l’expression « Dahua Video Security Matrix » [matrice de sécurité vidéo Dahua]. M. Xue établit une correspondance entre les factures et des produits spécifiques visés par l’enregistrement et affirme que les factures font état de ventes réalisées au Canada et qu’elles sont représentatives de ventes des produits et de l’emploi de la Marque dans la pratique normale du commerce (para 12). De plus, comme pièce A, M. Xue joint un certain nombre de photographies des produits et de matériel connexe, dont des instantanés d’écran tirés de logiciels en usage, de pages Web de la Propriétaire et de caméras de sécurité, des brochures distribuées dans les points de vente, des CD-ROM et des étiquettes apposées sur du matériel informatique. Sur chaque élément, l’expression « Dahua Video Security Matrix » [matrice de sécurité vidéo Dahua] figure soit seule soit en tant qu’élément constitutif d’un logo, comme le montre l’image ci-dessous :

[10]  Enfin, M. Xue affirme que la Marque est importante et précieuse pour la Propriétaire, et que son conseiller juridique lui recommandé de placer le symbole d’enregistrement ® à côté de la Marque sur tous les produits vendus par la Propriétaire (para 13 et 14).

Analyse

[11]  En premier lieu, comme l’a souligné la Partie requérante dans le cadre de ses observations verbales, la preuve de M. Xue se rapportant à l’emploi verbal de « dahua », à l’importance de la Marque pour la société de la Propriétaire et à l’intention d’employer le symbole d’enregistrement à l’avenir n’est pas pertinente du point de vue de la question de savoir si la Propriétaire a employé la Marque au sens des articles 4 et 45 de la Loi pendant la période pertinente.

[12]  Dans ses représentations verbales et écrites, la Partie requérante soutient que la Propriétaire n’a pas établi l’emploi de la Marque telle qu’elle est enregistrée, soulignant que l’enregistrement concerne uniquement le mot « dahua », lequel ne figure jamais seul dans la preuve de la Propriétaire. Le mot « Dahua » figure plutôt toujours accompagné de mots supplémentaires comme « Video Security Matrix » [matrice de sécurité vidéo], dans une police et une taille de caractères identiques, ou dans le logo reproduit ci-dessus. En conséquence, la Partie requérante soutient que les caractéristiques dominantes de la Marque n’ont pas été préservées. Elle fait valoir que cette présentation équivaut à une variation substantielle qui fait en sorte que la Marque telle qu’elle est enregistrée n’est pas reconnaissable parmi les marques de commerce présentées [citant à l’appui Canada (Registraire des marques de commerce) c Cie internationale pour l’informatique CII Honeywell Bull SA (1985), 4 CPR (3d) 523 (CAF); Promafil Canada Ltée c Munsingwear Inc (1992), 44 CPR (3d) 59 (CF 1re inst); et Convenience Food Industries (Private) Ltd c Clic International Inc, 2011 CF 1338].

[13]  À titre subsidiaire, la Partie requérante soutient que l’élément dominant des marques de commerce présentées est « Matrix » [matrice], un terme qui, fait valoir la Partie requérante, ne peut être considéré comme descriptif.

[14]  De plus, la Partie requérante soutient que la Propriétaire n’a pas établi l’emploi de la Marque en liaison avec chacun des produits visés par l’enregistrement. En premier lieu, la Partie requérante fait valoir que rien n’indique que les factures présentées en pièce B ont accompagné les produits lors du transfert, citant Riches, McKenzie & Herbert c Pepper King Ltd (2000), 8 CPR (4th) 471 (CF 1re inst) à l’appui de la thèse selon laquelle on ne peut présumer que des factures ont accompagné des produits lors du transfert en l’absence d’une indication expresse du propriétaire en ce sens. En conséquence, la Partie requérante soutient que la Propriétaire n’a fourni aucun élément de preuve pour démontrer que des acheteurs auraient vu la Marque au moment où les logiciels leur ont été transférés.

[15]  De plus, en ce qui concerne les produits (2), la Partie requérante soutient qu’il n’y a aucune preuve faisant état de ventes des produits [Traduction] « appareils électroniques d’enregistrement vidéo » en particulier. En outre, la Partie requérante souligne qu’il n’y a aucune preuve d’un [Traduction] « ordinateur » arborant la Marque; la preuve montre plutôt un ordinateur sur lequel est apposé un autocollant présentant les mots « Dahua Video Security Matrix » [matrice de sécurité vidéo Dahua], ce qui n’indique aucunement que le matériel lui-même a été vendu en liaison avec la Marque.

[16]  Je conviens que la preuve n’établit pas de transferts des produits [Traduction] « ordinateurs » et « enregistreurs vidéo numériques » faisant partie des produits (2).

[17]  Cependant, en réponse à la prétention de la Partie requérante selon laquelle on ne peut présumer que des factures ont accompagné les produits lors du transfert, la Propriétaire souligne que les factures portent les mentions « Terms: COD » [Modalités : CR], qui signifie « cash on delivery » [contre remboursement], et « Shipping & Handling (Retail Pickup) » [Expédition et manutention [ramassage au point de vente au détail], ce qui indique que les factures ont accompagné les produits achetés au magasin de détail de la Propriétaire. En outre, la Propriétaire souligne qu’une des factures identifie le client comme étant un « STORE CUSTOMER » [client du magasin] à l’adresse de la Propriétaire et elle fait valoir que la seule conclusion raisonnable possible est que cette facture a accompagné une transaction en magasin.

[18]  Je conviens avec la Propriétaire que la présente espèce se distingue de l’affaire Pepper King, supra, car chaque facture fait état d’un « retail pickup » [ramassage au point de vente au détail]. Je suis disposé à inférer que, au moment de la réception des produits, les clients auraient reçu une facture [pour une conclusion semblable, voir Riches, McKenzie & Herbert c Rematech Div Bremo Inc, 2002 CarswellNat 4653, au para 13].

[19]  Quant à savoir si les factures ont présenté la Marque telle qu’elle est enregistrée, les produits sont décrits au moyen de l’expression « Dahua Video Security Matrix » [matrice de sécurité vidéo Dahua] sur chaque facture. Il est bien établi que l’ajout de mots descriptifs à une marque nominale n’est pas nécessairement fatal à un enregistrement, même lorsque ces mots descriptifs figurent dans la même police et la même taille de caractères que la marque nominale [voir, à titre d’exemple, Riches, McKenzie & Herbert c Pillsbury Co, 1995 CarswellNat 2962, au para 14 (COMC); Borden & Elliott c Olin Corp, 1999 CarswellNat 3488, au para 8 (COMC); LE PEPE’ SRL c PJ Hungary Kft, 2017 COMC 82, 2017 CarswellNat 4362, aux para 18 à 20; McInnes Cooper c Banque Nationale du Canada, 2013 COMC 86, 2013 CarswellNat 2642, au para 13; Nelligan O’Brien Payne LLP c Beacon Law Corporation, 2018 COMC 4, 154 CPR (4th) 305, au para 19].

[20]  À l’audience, la Partie requérante a mentionné la décision Riches, McKenzie & Herbert c Pepper King Ltd, 1999 CarswellNat 2914 (COMC) [infirmée pour d’autres motifs dans (2000), 8 CPR (4th) 471 (CF 1re inst), supra], dans laquelle il a été conclu que la marque de commerce présentée était VOLCANO HOT plutôt que la marque déposée VOLCANO. Cependant, l’analyse réalisée dans cette affaire portait sur du texte figurant dans une police de caractères décorative sur une étiquette de produit; en l’espèce, la question qui se pose est celle de savoir si la Marque conserve son identité malgré la présence de texte supplémentaire dans la même police de caractères sur les factures. Si j’applique les principes énoncés dans Honeywell, supra, et Promafil, supra, j’admets que l’élément dominant de la Marque, soit le mot « dahua », est préservé dans la marque de commerce telle qu’elle est présentée sur les factures [pour des conclusions semblables en ce qui concerne la preuve constituée de factures, voir Robinson Sheppard Shapiro SENCRL/LLP c Exo Inc, 2017 COMC 132, 153 CPR (4th) 105, au para 41; et Global Distillers SRL c Angostura Canada Inc, 2014 COMC 38, 119 CPR (4th) 452, au para 9].

[21]  À cet égard, je souligne que « Dahua » est le premier élément de l’expression « Dahua Video Security Matrix » [matrice de sécurité vidéo Dahua] qui figure sur les factures. J’estime que les mots qui suivent, « Video Security Matrix » [matrice de sécurité vidéo], sont descriptifs, de sorte que la Marque n’a pas perdu son identité et qu’elle demeure reconnaissable. Concernant l’argument de la Partie requérante selon lequel le terme « Matrix » [matrice] ne peut être considéré comme descriptif, bien que le terme ne semble pas avoir un sens déterminé en lien avec la technologie de la vidéosurveillance, j’admets l’observation de la Propriétaire selon laquelle le mot indique [Traduction] « la complexité et l’utilité » et ne serait pas perçu comme étant l’élément dominant de « Dahua Video Security Matrix » [matrice de sécurité vidéo Dahua] dans le contexte des factures liées aux produits en cause.

[22]  Étant donné que j’ai conclu que, en plus d’établir des transferts des produits visés par l’enregistrement vendus par la Propriétaire, les factures présentent également la Marque, il n’est pas nécessaire que je détermine si la présentation du logo reproduit ci-dessus constitue également un emploi de la Marque telle qu’elle est enregistrée.

[23]  Compte tenu de ce qui précède, je suis convaincu que la Propriétaire a établi l’emploi de la Marque en liaison avec chacun des produits visés par l’enregistrement au sens des articles 4 et 45 de la Loi, à l’exception des [Traduction] « ordinateurs » et des « enregistreurs vidéo numériques » faisant partie des produits (2).

[24]  Comme je l’ai souligné ci-dessus, je ne dispose d’aucune preuve établissant des transferts de ces produits en liaison avec la Marque ou autrement.

[25]  Étant donné que je ne dispose d’aucune preuve de circonstances spéciales justifiant le défaut d’emploi de la Marque en liaison avec des [Traduction] « ordinateurs » et des « enregistreurs vidéo numériques », l’enregistrement sera modifié en conséquence.

Décision

[26]  Compte tenu de tout ce qui précède, dans l’exercice des pouvoirs qui m’ont été délégués en vertu des dispositions de l’article 63(3) de la Loi, et selon les dispositions de l’article 45 de la Loi, l’enregistrement sera modifié afin de supprimer [Traduction] « ordinateurs, enregistreurs vidéo numériques et… » des produits (2).

[27]  L’état déclaratif des produits modifié sera libellé comme suit [Traduction] :

(1) Logiciels, nommément logiciels de sécurité pour utilisateurs et exploitants permettant le contrôle et la surveillance d’images en direct captées par des caméras de surveillance sur un réseau local et à distance par Internet, ainsi que logiciels d’enregistrement, de stockage, de récupération et d’amélioration automatisés d’images captées par des caméras de surveillance.

(2) Appareils électroniques d’enregistrement vidéo, nommément cartes d’acquisition vidéo utilisées pour la surveillance d’images captées par des caméras de surveillance, ainsi que l’enregistrement et la transmission de celles-ci.

(3) Caméras de sécurité et de surveillance.

 

Andrew Bene

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

Traduction certifiée conforme

Marie-Pierre Hétu, trad.


COMMISSION DES OPPOSITIONS DES MARQUES DE COMMERCE

OFFICE DE LA PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE DU CANADA

COMPARUTIONS ET AGENTS INSCRITS AU DOSSIER

___________________________________________________

DATE DE L’AUDIENCE : 2019-02-27

COMPARUTIONS

Serge Anissimoff

POUR LA PROPRIÉTAIRE INSCRITE

Daniel Anthony

POUR LA PARTIE REQUÉRANTE

AGENT(S) AU DOSSIER

Serge Anissimoff

POUR LA PROPRIÉTAIRE INSCRITE

Smart & Biggar

POUR LA PARTIE REQUÉRANTE

 

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