Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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OPIC

CIPO

LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

THE REGISTRAR OF TRADE-MARKS

Référence : 2019 COMC 24

Date de la décision : 2019-03-27

[TRADUCTION CERTIFIÉE,

NON RÉVISÉE]

DANS L’AFFAIRE DES OPPOSITIONS

 

Rothmans, Benson & Hedges Inc. et Phillip Morris Brands Sarl

Opposantes

et

 

John Player & Sons Ltd.

Requérante

 

1,605,729 et 1,605,733 toutes deux intitulées PAQUET BRUN DESSIN

Demandes

introduction

[1]  Rothmans, Benson & Hedges Inc. (RBH) et Phillip Morris Brands Sarl (PM Brands) (ci-après appelées collectivement l’Opposante, sauf indication contraire) s’opposent à l’enregistrement des marques de commerce toutes deux appelées PAQUET BRUN DESSIN (reproduites ci-dessous) qui font respectivement l’objet des demandes d’enregistrement nos 1,605,729 et 1,605,733 fondées sur l’emploi au Canada depuis au moins aussi tôt que le 5 novembre 2012 en liaison avec des [Traduction] « produits de tabac manufacturés, nommément cigarettes » (les Produits) produites par John Player & Sons Ltd. (la Requérante) :

Demande no 1,605,729

(parfois appelée ci-après la Demande 729)

Demande no 1,605,733

(parfois appelée ci-après la Demande 733)

 

 

 

 

Description [Traduction] : « La marque de commerce est constituée de la couleur brune ayant l’apparence de carton écru appliquée à la surface visible de l’emballage particulier, comme l’illustre le dessin ci-joint. Le dessin est hachuré pour représenter la couleur. »

Description [Traduction] : « La marque de commerce est constituée de la couleur brune ayant l’apparence de carton écru appliquée à la surface visible de l’emballage particulier, comme l’illustre le dessin ci-joint. Le dessin est hachuré pour représenter la couleur. »

[2]  La seule différence entre les deux demandes est que la Demande 729 représente un dessin à trois dimensions alors que la Demande 733 représente un dessin à deux dimensions. Sauf indication contraire, j’appellerai collectivement ces deux marques figuratives la Marque.

[3]  Les oppositions ont été engagées en vertu de l’article 38 de la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, ch T-13 (la Loi), et les motifs d’opposition invoqués sont fondés sur les articles 2 (absence de caractère distinctif); 12 (non-enregistrabilité); 16 (absence de droit à l’enregistrement); et 30 (non-conformité) de la Loi.

[4]  Pour les raisons exposées ci-dessous, j’estime qu’il y a lieu de repousser les demandes.

le dossier

[5]  Les demandes relatives à la Marque ont toutes deux été produites le 7 décembre 2012 et ont été annoncées aux fins d’opposition dans le Journal des marques de commerce du 25 septembre 2013 (Demande 729) et du 26 février 2014 (Demande 733).

[6]  Les demandes ont fait l’objet d’une opposition de la part de l’Opposante par la voie de déclarations d’opposition produites auprès du registraire le 25 février 2014 relativement à la Demande 729 et le 24 juillet 2014 relativement à la Demande 733. La déclaration d’opposition relativement à la Demande 729 a été modifiée volontairement par l’Opposante le 9 juillet 2014 avec la permission du registraire. Sauf indication contraire, j’utiliserai le singulier pour faire référence à la fois à la déclaration d’opposition modifiée produite relativement à la Demande 729 et à la déclaration d’opposition produite relativement à la Demande 733 puisqu’elles sont identiques (à l’exception de l’identification de la marque de commerce visée par les demandes). Par souci de commodité, je reproduis à l’annexe A de ma décision les motifs d’opposition tels qu’ils ont été invoqués relativement à la Demande 729.

[7]  Dans chaque affaire, la Requérante a produit et signifié une contre-déclaration dans laquelle elle conteste les motifs d’opposition formulés dans la déclaration d’opposition.

[8]  À l’appui de chacune de ses oppositions, l’Opposante a produit les documents suivants :

  • L’affidavit de Mary P. Noonan, une recherchiste en marques de commerce à l’emploi de l’agent de marques de commerce de l’Opposante, souscrit le 3 novembre 2014 (l’affidavit Noonan);
  • L’affidavit de Charlotte McDonald, une associée à l’emploi de l’agent de marques de commerce de l’Opposante, souscrit le 7 novembre 2014 (l’affidavit McDonald);
  • L’affidavit de Kenneth Morrison, le directeur du déploiement commercial de RBH, souscrit le 10 novembre 2014 (l’affidavit Morrison);
  • Une copie certifiée de l’historique du dossier de la Demande 729; et
  • Une copie certifiée de l’historique du dossier de la Demande 733.

[9]  J’utiliserai le singulier pour faire référence aux deux affidavits de chacun de ces déposants puisqu’ils sont pratiquement identiques. Une ordonnance de contre-interrogatoire de tous les déposants a été émise, mais aucun contre-interrogatoire n’a été mené.

[10]  À l’appui de chacune de ses demandes, la Requérante a produit les documents suivants :

  • L’affidavit de Jason B. Dinelle, un technicien judiciaire à l’emploi de l’agent de marques de commerce de la Requérante, souscrit le 11 novembre 2015 (l’affidavit Dinelle);
  • L’affidavit de Gay Owens, une recherchiste en marques de commerce à l’emploi de l’agent de marques de commerce de la Requérante, souscrit le 11 novembre 2015 (l’affidavit Owens); et
  • L’affidavit de Paul Furfaro, le gestionnaire du portefeuille de marques d’Imperial Tobacco Canada Limited (ITCan), une société affiliée de la Requérante, souscrit le 27 novembre 2015 (l’affidavit Furfaro).

[11]  J’utiliserai le singulier pour faire référence aux deux affidavits de chacun de ces déposants puisqu’ils sont pratiquement identiques. M. Furfaro a été contre-interrogé relativement à son affidavit. La transcription de son contre-interrogatoire et de ses réponses aux engagements pris au moment de son contre-interrogatoire ont été versées au dossier. Je souligne que M. Furfaro n’est plus le gestionnaire du portefeuille de marques d’ITCan, mais qu’il est maintenant [Traduction] « chef d’équipe de la gestion des marques de la maison Player’s » [transcription du contre-interrogatoire de Paul Furfaro, p 5, Q 5].

[12]  Les parties ont toutes deux produit un plaidoyer écrit dans chaque affaire et étaient toutes deux présentes à l’audience qui a été tenue.

[13]  Le 26 juillet 2018, plus de deux semaines après l’audience, l’Opposante a demandé à l’égard des deux affaires la permission de produire une déclaration d’opposition modifiée. Dans une lettre datée du 31 juillet 2018, la Requérante s’est opposée à la demande de l’Opposante dans les deux affaires. La Requérante a ensuite indiqué qu’elle ne s’opposait pas à ce que le registraire traite la demande de permission de l’Opposante dans le cadre de la décision du registraire à l’égard de la procédure d’opposition sur le fond. En conséquence, je me pencherai d’abord ci-dessous sur la demande de permission de l’Opposante.

remarques préliminaires

Demande de permission de produire une déclaration d’opposition modifiée

[14]  Comme il est indiqué dans l’Énoncé de pratique concernant la procédure d’opposition en matière de marques de commerce, la permission de modifier une déclaration d’opposition ne sera accordée que si le registraire est convaincu qu’il est dans l’intérêt de la justice de le faire, compte tenu de toutes les circonstances de l’espèce, y compris : l’étape où en est rendue la procédure d’opposition; la raison pour laquelle la modification n’a pas été faite plus tôt; l’importance de la modification; et le tort qui sera causé à l’autre partie.

[15]  Dans sa demande de permission, l’Opposante soutient que [Traduction] « faisant preuve d’un excès de prudence », elle demande une permission de modifier chacune de ses déclarations d’opposition dans le but de [Traduction] :

clarifier les motifs d’opposition précédemment invoqués au titre de l’absence de caractère distinctif, fondés sur [les articles] 30b) et 2, en précisant que ces motifs d’opposition englobent l’allégation portant que l’emploi présumé de la marque en question sous licence ne s’applique pas au profit de la Requérante. Ces modifications visent à rendre compte de la position de l’Opposante à l’égard de cette question et à faire preuve de cohérence tout au long de la procédure, comme le précisent les observations écrites de l’Opposante.

[16]  Comme l’a toutefois souligné la Requérante dans sa lettre datée du 31 juillet 2018, dans laquelle elle s’oppose à la demande de permission de l’Opposante, les motifs d’opposition de l’Opposante fondés sur les articles 30b) et 2 de la Loi dans chacune des présentes affaires établissent clairement des motifs d’opposition portant sur la nature de la marque de commerce elle-même et sur la capacité de la marque de commerce reproduite dans la demande de servir de marque de commerce (à titre d’exemple, l’Opposante allègue que la marque de commerce n’est pas représentée de la façon revendiquée dans la demande, qu’elle est simplement décorative, qu’il s’agit simplement d’une couleur de fond, etc.) [voir para 5, 6 et 18 de la déclaration d’opposition reproduite à l’annexe A].

[17]  Je conviens avec la Requérante qu’il est impossible d’interpréter raisonnablement les paragraphes susmentionnés de la déclaration d’opposition comme invoquant un motif d’opposition fondé sur un emploi sans licence d’une marque de commerce ne s’appliquant pas au profit de la Requérante au titre de l’article 50 de la Loi. Les modifications demandées par l’Opposante modifient fondamentalement la nature des motifs d’opposition invoqués par l’ajout de motifs d’opposition complètement nouveaux et différents.

[18]  Comme l’a rappelé la Requérante à l’audience et dans sa lettre, il existe une jurisprudence importante où des opposants, comme en l’espèce, ont tenté de soulever une question de licence à un stade avancé de la procédure, une fois l’étape de la preuve terminée, sans mentionner ce motif dans leur déclaration d’opposition [voir, à titre d’exemple, Apotex Inc c Smithkline Beecham Corporation (2005), 54 CPR (4th) 104 (COMC); et Mattel U.S.A. Inc c 3894207 Canada Inc (2002), 23 CPR (4th) 395 (COMC)]. Dans chaque affaire, le registraire a refusé d’examiner la question de licence puisqu’elle n’avait pas été plaidée correctement dans la déclaration d’opposition.

[19]  Comme l’a souligné la Requérante, le préjudice occasionné à la Requérante est évident d’emblée et une telle demande de permission ne peut être présentée à un stade si avancé de la procédure. Comme indiqué précédemment, la demande a été présentée plus de deux semaines après l’audience tenue dans ces affaires. Comme l’a souligné la Requérante, l’Opposante aurait pu demander une permission de modifier sa déclaration d’opposition après avoir mené le contre-interrogatoire du déposant de la Requérante, ou après avoir reçu les réponses écrites de la Requérante aux engagements pris au moment du contre-interrogatoire. Si l’Opposante avait allégué à ce moment que l’emploi sous licence de la Marque présenté en preuve par le déposant même de la Requérante ne s’appliquait pas au profit de la Requérante, la Requérante aurait peut-être présenté une preuve pour étayer sa position contraire. Je conviens avec la Requérante que les décisions du registraire rendues dans Spin Master Ltd c George & Company, LLC, 2015 COMC 157 et dans Karma Candy Inc c Cadbury UK Limited, 2013 COMC 119 s’avèrent particulièrement instructives, puisque dans ces affaires, l’opposant demandait une permission de modification pour inclure des motifs d’opposition supplémentaires lors de l’audience et après l’audience, respectivement, et dans les deux affaires, la demande de permission de modification a été refusée.

[20]  Dans les présentes affaires, il n’est pas dans l’intérêt de la justice de permettre à l’Opposante de modifier sa déclaration d’opposition comme demandé puisque le délai et le préjudice l’emportent sur l’importance de la modification. Compte tenu de tout ce qui précède, la demande de l’Opposante de permettre la modification de sa déclaration d’opposition est refusée dans chaque affaire.

Procédures d’opposition antérieures engagées entre les parties

[21]  Les parties aux présentes procédures se connaissent. Elles sont des concurrentes directes sur le marché canadien des cigarettes et ont été parties à des procédures d’opposition antérieures qui concernaient les demandes d’enregistrement des marques de commerce nos 1,317,127 (maintenant LMC908,657) et 1,317,128 (maintenant LMC908,626) de la Requérante, toutes deux appelées PAQUET ORANGE DESSIN. Lesdites demandes étaient pratiquement les mêmes que celles visées aux présentes procédures quant à la représentation et la description de la marque de commerce visée par les demandes, outre la couleur revendiquée, et elles faisaient l’objet d’une opposition engagée par l’Opposante des présentes affaires ainsi que par JTI MacDonald TM Corp., pour des motifs d’opposition semblables. Les décisions du registraire rejetant chacune des deux oppositions de l’Opposante et rejetant les oppositions de JTI MacDonald TM Corp. [voir Rothmans, Benson & Hedges c Imperial Tobacco Products, 2012 COMC 226 (la Décision 226); JTI-Macdonald TM Corp c Imperial Tobacco Products Limited, 2012 COMC 116 (la Décision 116); et JTI-Macdonald TM Corp c Imperial Tobacco Products Limited, 2012 COMC 117 (la Décision 117)] ont été maintenues par la Cour fédérale dans Rothmans, Benson & Hedges, Inc c Imperial Tobacco Products Limited, 2014 CF 300 (la Décision CF 300) et JTI-Macdonald TM Corp c Imperial Tobacco Products Limited, 2013 CF 608 (la Décision CF 608), ainsi que par la Cour d’appel fédérale dans Rothmans, Benson & Hedges, Inc c Imperial Tobacco Products Limited, 2015 CAF 111 (la Décision CAF 111) (parfois ci-après appelées collectivement les Décisions ORANGE).

[22]  Comme on pouvait s’y attendre, la Requérante s’appuie largement sur les Décisions ORANGE dans les présentes affaires. Ces décisions antérieures ne sont toutefois pas nécessairement déterminantes quant aux questions soulevées. Il suffit de mentionner que chaque affaire repose sur des faits qui lui sont propres. Cela dit, j’adopterai certains des raisonnements exposés dans les Décisions ORANGE lorsque j’estime qu’il convient de le faire.

le fardeau de preuve incombant à chacune des parties

[23]  C’est à la Requérante qu’incombe le fardeau ultime de démontrer, selon la prépondérance des probabilités, que sa demande est conforme aux exigences de la Loi. L’Opposante a toutefois le fardeau de preuve initial de présenter une preuve admissible suffisante pour permettre de conclure raisonnablement à l’existence des faits allégués à l’appui de chacun des motifs d’opposition [John Labatt Ltd c Molson Companies Ltd(1990), 30 CPR (3d) 293 (CF 1re inst),à la p 298].

Aperçu de la preuve

La preuve de l’Opposante

L’affidavit Noonan

[24]  L’affidavit Noonan contient des imprimés des résultats de la recherche effectuée par Mme Noonan dans le registre canadien des marques de commerce pour trouver [Traduction] « toute demande ou tout enregistrement de marque de commerce relativement à une seule couleur, sans portion nominale, en liaison avec du tabac et des marchandises liées au tabac ». Les détails de 10 de ces demandes et enregistrements sont fournis à la pièce MN-1. L’affidavit Noonan contient également des imprimés des résultats des recherches de Mme Noonan relativement aux enregistrements de marques de commerce suivants mentionnés dans les arguments de l’Opposante fondée sur l’article 12(1)d) de la Loi [pièces MN-2 à MN-6].

L’affidavit McDonald

[25]  L’affidavit McDonald contient des photographies de 29 produits liés au tabac et des copies de reçus d’achats de ces produits faits par la déposante dans des magasins de Toronto, en Ontario, entre le 18 février 2014 et le 24 juillet 2014 [pièces CM-1 à CM-34], dont les détails sont fournis à l’annexe B jointe à ma décision. Je souligne que seulement deux de ces produits sont des paquets de cigarettes [pièce CM-19]. Les autres produits liés au tabac sont des cigares, du tabac à pipe, des cigarillos et du papier à rouler.

[26]  Mme McDonald joint également comme pièces CM-35 à CM-39 à son affidavit des imprimés du site Web de Santé Canada faisant référence aux documents suivants : Étiquettes relatives à la santé pour les cigarettes et les petits cigares et Règlement sur l’étiquetage des produits du tabac, un exemplaire du Règlement sur l’étiquetage des produits du tabac (cigarettes et petits cigares), un exemplaire du Règlement sur l’information relative aux produits du tabac, dans sa version la plus récente, et un exemplaire du Règlement sur l’information relative aux produits du tabac qui était en vigueur du 26 juin 2000 au 21 septembre 2011.

[27]  Finalement, Mme McDonald explique qu’elle a effectué des recherches sur Internet [Traduction] « pour accéder à une gamme de sites Web, d’articles et de publications liés à la production, à la composition et aux caractéristiques, y compris à la couleur, du carton, et plus précisément du carton écru ». Elle joint comme pièces CM-40 à CM-52 à son affidavit divers articles et documents relevés lors d’une recherche effectuée à l’aide du moteur de recherche Google à l’égard des mots clés suivants : « unbleached » [écru], « paperboard » [carton], « pulp » [pâte], « colour » [couleur] et de diverses combinaisons de ces termes. La Requérante s’est opposée aux pièces CM-40 à CM-52 qui constitueraient une preuve par ouï-dire inadmissible. Comme nous le verrons plus tard dans ma décision, je suis disposée à accorder du poids à la majorité de ces pièces.

L’affidavit Morrison

[28]  Dans les paragraphes d’introduction de son affidavit, M. Morrison fournit des renseignements généraux au sujet de l’Opposante. M. Morrison affirme que RBH est la deuxième plus grande entreprise au Canada qui fabrique et vend des produits de tabac, en particulier des cigarettes. Il explique que RBH est une [Traduction] « filiale en propriété exclusive » de Philip Morris International (PMI), laquelle est également propriétaire de PM Brands et que PM Brands est propriétaire de marques de commerce employées aux termes d’une licence octroyée par RBH, [Traduction] « y compris en lien avec la vente de produits de tabac manufacturés comme des cigarettes » [para 3].

[29]  M. Morrison affirme que RBH vend ses produits de tabac en liaison avec de nombreuses marques nominales y compris PHILIP MORRIS, CANADIAN CLASSICS, BELMONT, MARK TEN et ROTHMANS, [Traduction] « dont beaucoup sont vendues aux termes d’une licence octroyée par la propriétaire [de la marque de commerce], PM Brands ». M. Morrison explique que RBH vend généralement des produits de tabac à des grossistes dans l’ensemble du Canada qui, à leur tour, les vendent à des détaillants qui, à leur tour, les vendent aux consommateurs dans leurs magasins de détail au Canada. Des produits de tabac sont, dans certains cas, vendus directement par RBH à des détaillants au Canada qui, à leur tour, les vendent aux consommateurs [para 4].

[30]  M. Morrison se penche ensuite sur l’utilisation de la couleur brune dans l’industrie du tabac. Il affirme que la [Traduction] « couleur brune est depuis longtemps utilisée dans l’industrie de la cigarette pour les emballages de produits de tabac manufacturés de RBH et de tiers » en lien avec des cigarettes et des produits de tabac manufacturés autres que des cigarettes comme des cigares, des cigarillos et du tabac à pipe ou à cigarettes. Ces produits de tabac manufacturés autres que des cigarettes sont [Traduction] « généralement vendus à côté des produits de tabac traditionnels comme les cigarettes » et sont « généralement commercialisés au Canada à l’intention des mêmes consommateurs qui achètent des produits de cigarettes » [para 7].

[31]  En ce qui concerne plus particulièrement les emballages bruns de RBH, M. Morrison affirme d’abord que [Traduction] « RBH distribue et vend pratiquement tous ces produits de tabac manufacturés, y compris des cigarettes, dans des emballages en carton brun qui arborent la marque nominale correspondant au produit distribué ». M. Morrison affirme également que [Traduction] « [t]out envoi de produits de tabac manufacturés de [RBH] dans un tel emballage en carton brun est accompagné d’une facture de vente au moment où les clients de gros [de RBH] prennent possession de ces produits; un exemple d’une telle facture est joint comme pièce 1 » à son affidavit. Il joint également comme pièce 2 à son affidavit des photographies d’exemples représentatifs de ces emballages en carton brun des marques de cigarettes BENSON & HEDGES Superslims Noir, MARK TEN et ROTHMANS Special de RBH [para 12 à 14].

[32]  M. Morrison affirme que [Traduction] « RBH vend approximativement dix milliards de cigarettes par année dans ces emballages en carton brun, ce qui représente approximativement un million de paquets de cigarettes individuels en carton brun ». D’après sa connaissance de l’industrie, M. Morrison affirme que les produits de RBH ont été distribués et vendus dans ces emballages en carton brun pendant [Traduction] « de nombreuses années, voire des décennies » avant qu’il commence à travailler pour RBH en 1985 [para 15].

[33]  M. Morrison affirme ensuite que [Traduction] « RBH vend plusieurs produits de tabac manufacturés au Canada qui présentent la couleur brune sur des emballages individuels de produits (comme un emballage individuel de cartouche ou de paquet de cigarettes ou un paquet individuel de cigares ou de cigarillos » [para 16]. Plus précisément, il explique que ces produits comprennent :

·  un produit de cigarettes PHILIP MORRIS de RBH. M. Morrison résume l’historique d’emploi de la marque PHILIP MORRIS, laquelle a été cédée par Imperial Tobacco Canada Limited (ITL) à PM Brands le 1er mars 2012. Il joint comme pièces 3 à 6 à son affidavit, des copies de ce genre d’emballages représentatifs utilisés au fil des ans par RBH/ITL, ainsi qu’une copie du contrat de cession de la marque de commerce correspondante [para 16 à 20]. Il affirme également que [Traduction] « des produits de cigarettes ont été vendus au Canada en liaison avec la marque PHILIP MORRIS et dans les emballages bruns montrés aux [pièces 3, 5 et 6 susmentionnées] pendant de nombreuses années […] en quantités commerciales, quoique RBH n’ait pas accès aux chiffres exacts de ces ventes par ITL » [para 21].

·  un produit de cigarettes NEXT « smooth » [léger] de RBH. M. Morrison joint comme pièce 7 à son affidavit des photographies de l’emballage actuel de ce produit, accompagnées des renseignements sur les ventes mensuelles de ce produit. Il confirme que RBH fabrique et vend aux termes d’une licence octroyée par PM Brands ce produit dans des emballages identiques ou très semblables depuis au moins aussi tôt que 2009. Il fournit également les volumes des ventes annuelles de ce produit pour les années allant de 2009 (données partielles) à 2014 (données partielles) [para 22 et 23].

·  un produit de cigarettes BENSON & HEDGES de Luxe de RBH. M. Morrison joint comme pièce 8 à son affidavit une copie de l’emballage actuel de ce produit, accompagnée des renseignements sur les ventes mensuelles de ce produit. Il confirme que RBH fabrique et vend aux termes d’une licence octroyée par PM Brands ce produit dans des emballages identiques ou très semblables depuis au moins aussi tôt que 2006. Il fournit également les volumes des ventes annuelles de ce produit pour les années allant de 2006 (données partielles) à 2014 (données partielles) [para 24 et 25].

·  des cigares de tabac à pipe CAPTAIN BLACK et du tabac à pipe CAPTAIN BLACK. M. Morrison joint comme pièces 9 et 10 à son affidavit des photographies de l’emballage actuel de ces produits, accompagnées des renseignements sur les ventes mensuelles de ces produits. Il confirme que RBH fabrique et vend aux termes d’une licence octroyée par le propriétaire de la marque de commerce ces produits dans des emballages identiques ou très semblables depuis au moins aussi tôt que 2006. Il fournit également les volumes des ventes annuelles de ce produit pour les années allant de 2006 (données partielles) à 2014 (données partielles) [para 26 et 27].

[34]  M. Morrison affirme que, en plus des produits susmentionnés, [Traduction] « RBH (y compris sa prédécesseure en titre) a également vendu plusieurs autres produits au fil des ans dans des emballages individuels bruns » [para 28]. À titre d’exemple, il joint les produits suivants et affirme qu’ils étaient vendus au Canada en [Traduction] « quantités commerciales » et « dans des emballages bruns identiques ou semblables à ceux illustrés » dans les pièces jointes :

  • BENSON & HEDGES 100s dans des paquets individuels bruns vendus depuis [Traduction] « approximativement le milieu des années 1980 jusqu’au début des années 2000 » par RBH [pièce 11, para 29].

  • Des cigarettes MAVERICK Wide Cut dans des paquets individuels bruns vendus [Traduction] « au début des années 1990 » par RBH [pièce 12, para 30].

[35]  M. Morrison ajoute que plusieurs autres produits de tabac manufacturés ont été vendus par RBH [Traduction] « en quantités commerciales et dans des emballages bruns » au cours du mandat de M. Morrison au sein de RBH, y compris les marques suivantes [para 31] :

  • Craven

  • Dunhill

  • Peter Stuyvesant

  • Merit

  • Virginia Slims

  • Davidoff

[36]  Dans la dernière partie de son affidavit, M. Morrison se penche sur l’utilisation par des tiers de produits de tabac vendus dans divers emballages de couleur brune. M. Morrison affirme que [Traduction] « plusieurs fabricants tiers de produits de tabac ont historiquement distribué et vendu, et distribuent et vendent encore aujourd’hui, des produits de tabac manufacturés en liaison avec des emballages bruns au Canada » [para 32]. Évoquant plus précisément les produits de tabac de tiers énumérés dans l’affidavit McDonald, M. Morrison joint comme pièces 13 à 27 à son affidavit, des renseignements sur l’historique des ventes des produits énumérés ci-dessous, accompagnés d’illustrations d’emballages actuels de ces produits, si elles sont disponibles. Il confirme que ces emballages [Traduction] « sont représentatifs des emballages utilisés pour ces produits aux dates indiquées dans les tableaux de chiffres d’affaires joints » :

  • Export « A » – cigarettes légères [pièce 13].

  • Backwoods – cigares Wild ‘n Natural [pièce 14].

  • Backwoofs – cigares au rhum sauvage [pièce 15].

  • Phillies Blunts – cigares à la noix de coco [pièce 16].

  • Amphora Mellow Blend – tabac à pipe [pièce 17].

  • Amphora Original Blend – tabac à pipe [pièce 18].

  • Clubmaster – cigares [pièce 19].

  • Bullseye Extra – cigares à la vanille [pièce 20].

  • Dutch Masters – Masters Collection – cigarillos au cognac [pièce 21].

  • Honey T – cigares à la vanille [pièce 22].

  • Guantanamera – cigares 3 Minutos [pièce 23].

  • Original Choice – tabac à pipe [pièce 24].

  • Panter Mignon – cigares [pièce 25].

  • Toscano – Toscanello – cigares [pièce 26].

  • Yuma – cigarettes biologiques [pièce 27].

[37]  Aux paragraphes 35 à 40 de son affidavit, M. Morrison explique en détail comment ces renseignements sur les ventes ont été obtenus. Je souligne que ces renseignements ont été obtenus auprès d’entreprises tierces de gestion de l’information. Comme ces renseignements n’ont pas été contestés comme constituant une preuve par ouï-dire, je confirme que j’en tiendrai compte.

La preuve de la Requérante

L’affidavit Furfaro

[38]  Dans les paragraphes d’introduction de son affidavit, M. Furfaro fournit des renseignements généraux au sujet de la propriété de la gamme de cigarettes PLAYER’S TRUE et de l’octroi d’une licence à cet égard. Il explique qu’à la suite de la fusion des filiales d’ITCan, Player’s Company Inc. (Player’s Co.) et John Player & Sons Ltd. (John Player), le 1er janvier 2015, la propriété des présentes demandes a été transférée de Player’s Co. à l’entreprise issue de la fusion, également appelée John Player & Sons Ltd. [para 2].

[39]  M. Furfaro affirme que jusqu’au 1er janvier 2015, John Player détenait une licence octroyée par Player’s Co. relativement à l’emploi de toutes les marques de commerce de Player’s Co. en liaison avec la fabrication et la vente de produits de tabac. Il explique que, aux termes de l’accord de licence, Player’s Co. exerçait [Traduction] « un contrôle direct et indirect sur les caractéristiques et la qualité des produits de tabac fabriqués et vendus sous licence par John Player ». Plus précisément, la licence [Traduction] « comportait des conditions qui obligeaient John Player » à fabriquer et à emballer les produits vendus sous les marques de commerce de Player’s Co. en conformité stricte avec les spécifications et les normes établies par Player’s Co., à soumettre les matières employées dans la fabrication des produits pertinents aux fins d’approbation, à soumettre des échantillons du produit final à Player’s Co. aux fins d’approbation et à rendre ses installations en tout temps disponibles aux fins d’inspection par Player’s Co. M. Furfaro affirme que la licence autorisait John Player à sous-licencier ses droits à des tiers et que, de ce fait, John Player a sous-licencié ses droits à ITCan aux mêmes conditions que celles de l’accord de licence entre Player’s Co. et John Player. Il affirme également que depuis le 1er janvier 2015, John Player & Son Ltd. continue de licencier ses droits aux marques de commerce à ITCan aux mêmes conditions [para 3].

[40]  M. Furfaro affirme que, aux termes des licences susmentionnées, ITCan fabrique, commercialise et vend les produits de la gamme de cigarettes PLAYER’S TRUE au Canada depuis au moins aussi tôt que le 5 novembre 2012, par l’entremise de son distributeur Imperial Tobacco Company Limited (ITCo), à des détaillants de cigarettes qui vendent les cigarettes à des adultes fumeurs [para 4]. M. Furfaro appelle Player’s Co., John Player, John Player & Sons Ltd., ITCan et ITCo collectivement Player’s; je ferai de même dans l’examen de son affidavit.

[41]  M. Furfaro affirme qu’en novembre 2012 Player’s a lancé la gamme de cigarettes PLAYER’S TRUE au Canada avec une campagne de mise en marché. Il explique que [Traduction] « les produits de la gamme de cigarettes PLAYER’S TRUE sont vendus dans un paquet de couleur brune ayant l’apparence de carton écru (le PAQUET BRUN) » [para 5]. Comme M. Furfaro fait par la suite référence dans son affidavit au « PAQUET BRUN », je ferai de même dans l’examen de son affidavit.

[42]  M. Furfaro explique que la gamme de cigarettes PLAYER’S TRUE (PLAYER’S AUTHENTIQUE en français) comprend trois « variantes », à savoir, les cigarettes PLAYER’S TRUE « Canadian Blend » [mélange canadien], les cigarettes PLAYER’S TRUE « Special Blend » [mélange spécial], et les cigarettes PLAYER’S TRUE « Plain » [nature] (ci-après collectivement appelées la gamme de cigarettes PLAYER’S TRUE, sauf indication contraire). Il joint comme pièces A.1 à A.3 à son affidavit des photographies d’exemples représentatifs de ces variantes commercialisées dans le PAQUET BRUN [para 6].

[43]  M. Furfaro affirme que [Traduction] « Player’s a choisi [l]a couleur brune ayant l’apparence de carton écru […] parce que la couleur était considérée comme très distinctive, inoubliable et attrayante, et parce que la couleur n’était pas été utilisée pour des paquets de cigarettes vendus par un autre fabricant, importateur ou distributeur de cigarettes au Canada » au moment où les cigarettes PLAYER’S TRUE ont été lancées en novembre 2012 » [para 7].

[44]  M. Furfaro se penche ensuite sur les ventes de la gamme de cigarettes PLAYER’S TRUE dans le PAQUET BRUN. Il affirme que du 4 novembre 2012 aux dates de production des présentes déclarations d’opposition (c’est-à-dire le 25 février 2014 et le 24 juillet 2014, respectivement), Player’s [Traduction] « a vendu plus de [1 900 000/2 200 000] paquets (comprenant chacun 20 cigarettes) de cigarettes PLAYER’S TRUE dans le PAQUET BRUN à des détaillants de cigarettes au Canada, ce qui représente des ventes de plus de [14 800 000 $/17 900 000 $ CAN] » [para 8]. Le tableau ci-dessous établit la répartition annuelle du nombre de paquets et du total des ventes de cigarettes PLAYER’S TRUE vendues dans le PAQUET BRUN au Canada du 4 novembre 2012 au 30 juin 2015 [para 9].

Année

Paquets de cigarettes (plus de)

Montant des ventes (plus de)

2012 (du 4 nov. au 31 déc.)

450 000

3 350 000 $

2013

1 275 000

10 275 000 $

2014

875 000

7 825 000 $

2015 (du 1er jan. au 30 juin)

375 000

3 475 000 $

TOTAL :

2 975 000

24 925 000 $

[45]  M. Furfaro affirme que bien que le lancement à l’échelle nationale des cigarettes PLAYER’S TRUE ait eu lieu le 19 novembre 2012, ou vers cette date, Player’s a commencé à vendre les cigarettes PLAYER’S TRUE dans le PAQUET BRUN au Canada à des détaillants de cigarettes au cours des semaines qui ont précédé le lancement à l’échelle nationale, et ce, depuis au moins aussi tôt que le 5 novembre 2012. Il explique qu’il s’agit d’une [Traduction] « pratique très courante dans l’industrie » et que c’est « la meilleure façon de coordonner, déclencher et gérer adéquatement un lancement de produit d’une telle envergure à l’échelle nationale » [para 10]. À l’appui, M. Furfaro joint les pièces suivantes à son affidavit :

  • Pièce B : Une copie d’un rapport généré à partir de la base de données sur les ventes d’ITCan faisant état des ventes des cigarettes PLAYER’S TRUE dans le PAQUET BRUN en Ontario les 4 et 5 novembre 2012 [para 11].

  • Pièce C : Des copies de factures représentatives de ventes des cigarettes PLAYER’S TRUE dans le PAQUET BRUN à divers détaillants de cigarettes au Canada [para 12].

[46]  En ce qui concerne la promotion autorisée de la gamme de cigarettes PLAYER’S TRUE au Canada, M. Furfaro affirme que de novembre 2012 au milieu de l’année 2013, Player’s a dépensé [Traduction] « approximativement 900 000 $ » pour diffuser des renseignements au sujet de la gamme de cigarettes PLAYER’S TRUE dans le PAQUET BRUN à l’intention de détaillants de cigarettes et d’adultes fumeurs au Canada en [Traduction] « utilisant des documents mettant l’accent sur la couleur brune ayant l’apparence de carton écru », comme la couleur utilisée sur le PAQUET BRUN [para 13 et 14]. À l’appui, M. Furfaro joint les pièces suivantes à son affidavit :

  • Pièce D : Des images d’un coffret de présentation utilisé par les représentants de commerce de Player’s pour informer les détaillants au sujet des produits PLAYER’S TRUE partout au Canada. M. Furfaro affirme qu’approximativement 75 coffrets de présentation ont été distribués [para 14a].

  • Pièce E : Des images d’affiches d’arrière-boutique représentatives à l’intention des détaillants. M. Furfaro affirme que ces affiches auraient présenté les produits PLAYER’S TRUE dans le PAQUET BRUN et qu’elles ont été distribuées dans [Traduction] « plus de 20 000 points de vente dans l’ensemble du Canada » [para 14b].

  • Pièce F : Des images d’une brochure représentative distribuée aux détaillants et décrivant les cigarettes PLAYER’S TRUE dans le PAQUET BRUN. M. Furfaro affirme que [Traduction] « ces brochures ont été distribuées à plus de 20 000 points de vente dans l’ensemble du Canada » [para 14c].

  • Pièce G : Des images d’un tableau de présentation pédagogique utilisé par les représentants de commerce de Player’s pour informer les détaillants au sujet des produits PLAYER’S TRUE. M. Furfaro affirme que [Traduction] « Player’s a distribué approximativement 450 de ces tableaux de présentation à des représentants de commerce pour qu’ils les présentent à des détaillants partout au Canada » [para 14d].

  • Pièce H : Des copies de photographies représentatives de l’intérieur d’une fourgonnette utilisée par des représentants de commerce. L’intérieur de la fourgonnette [Traduction] « était de la même couleur brune ayant l’apparence de carton écru, pour éduquer les détaillants au sujet de la gamme de cigarettes PLAYER’S TRUE ». M. Furfaro affirme qu’au moment du lancement des cigarettes PLAYER’S TRUE dans le PAQUET BRUN, la fourgonnette s’était rendue dans [Traduction] « plus de 500 points de vente de Calgary, Toronto et Vancouver » [para 15].

  • Pièce I : Des photographies de boîtes à allumettes distribuées par Player’s aux détaillants [Traduction] « pour la vente aux adultes fumeurs, lesquelles étaient de la même couleur brune ayant l’apparence de carton écru, comme la couleur utilisée sur le PAQUET BRUN ». M. Furfaro affirme que [Traduction] « plus d’un million de ces boîtes à allumettes ont été distribuées dans plus de 20 000 points de vente partout au Canada » au moment du lancement à l’échelle nationale des cigarettes PLAYER’S TRUE dans le PAQUET BRUN [para 16].

  • Pièce J : Des échantillons représentatifs d’affiches présentant les produits PLAYER’S TRUE dans le PAQUET BRUN [Traduction] « pour diffuser des renseignements au sujet des produits PLAYER’S TRUE aux adultes fumeurs canadiens ». M. Furfaro affirme que ces affiches étaient apposées dans plus de 250 [Traduction] « établissements pour adultes » au Canada de novembre 2012 au milieu de l’année 2013 [para 17].

L’affidavit Dinelle

[47]  M. Dinelle joint comme pièce A à son affidavit un exemplaire de l’énoncé de pratique datant du 6 décembre 2000 intitulé « Marques à trois dimensions » (Énoncé de pratique sur les marques à trois dimensions) qu’il a trouvé sur le site Web de l’Office de la propriété intellectuelle du Canada (OPIC). Il joint également comme pièces B à D à son affidavit des imprimés des définitions des termes « paperboard » [carton] et « bleached » [blanchi] tirées du dictionnaire en ligne Merriam-Webster.

L’affidavit Owens

[48]  Mme Owens joint comme pièce A à son affidavit des renseignements sur 12 enregistrements de marques de commerce concernant des marques de couleur visant différents produits appartenant à des tiers qu’elle a imprimés depuis le système CDName Search Corp le 11 novembre 2015.

analyse

Motif d’opposition fondé sur l’article 30 invoqué au paragraphe 5d) de la déclaration d’opposition

[49]  L’Opposante a fait valoir que [Traduction] :

5.  Les Opposantes appuient leur opposition sur le motif fondé sur l’alinéa 38(2)a) de la Loi, en ce sens que la Demande n’est pas conforme aux exigences de l’article 30 de la Loi. Plus précisément, l’article 30 prévoit que la Requérante doit produire une demande pour enregistrer une « marque de commerce ». La marque de commerce alléguée, reproduite et décrite dans la Demande, n’est pas une « marque de commerce » au sens de l’article 2 de la Loi pour les raisons suivantes :

[…]

d)  La marque de commerce alléguée telle qu’elle est décrite dans la demande est vague et imprécise, ne comportant aucune référence spécifique à la nuance ou à l’intensité de la couleur brune revendiquée outre la mention [Traduction] « ayant l’apparence de carton écru », une expression vide de sens. La couleur [Traduction] « brune ayant l’apparence de carton écru » n’est pas une couleur et cela ne suffit pas à décrire adéquatement la marque de commerce alléguée puisque « carton écru » pourrait décrire une gamme de couleurs.

[50]  En réponse, la Requérante a soutenu ce qui suit dans son plaidoyer écrit [Traduction] :

Premièrement, il est bien établi qu’il n’est pas nécessaire de mentionner une intensité particulière dans une demande relative à une marque de commerce concernant une couleur unique [voir JTI Macdonald TM Corp c Imperial Tobacco Products Ltd, 2013 CF 608 au para 49 (CF)]. Deuxièmement, la description dans la présente demande décrit très précisément la couleur (à savoir, le brun) de même que le fini particulier (à savoir, ayant l’apparence de carton écru) d’une façon qui soit compréhensible d’emblée pour un profane comme pour un commerçant de l’industrie du tabac. Il est assez fréquent que le requérant d’une marque de commerce utilise une telle expression pour décrire le fini particulier d’une couleur. En effet, certains enregistrements de marques de commerce de tiers sur lesquels l’Opposante cherche à s’appuyer dans la présente procédure d’opposition utilisent le même genre d’expressions pour décrire le fini particulier d’une couleur, à titre d’exemple, LMC591146, qui comprend la revendication de couleur suivante [Traduction] :

La couleur est revendiquée comme caractéristique de la marque de commerce. Les bordures supérieures et inférieures sont dorées. Le mot AMPHORA est blanc et l’arrière-plan est en orange fuligineux à brun, représenté sous forme marbrée. L’écusson au centre supérieur est doré, à l’exception de l’urne du centre, qui est blanche accentuée d’un relief doré.

[51]  À cet égard, les observations de la Requérante ne réussissent pas à me convaincre.

[52]  J’estime que la description [Traduction] « ...la couleur brune ayant l’apparence de carton écru... » est ambiguë en ce sens qu’elle ne définit pas clairement en quoi consiste la Marque visée par les demandes pour les raisons suivantes :

[53]  Premièrement, bien que la Requérante soutient que l’expression [Traduction] « ...brune ayant l’apparence de carton écru » serve à décrire [Traduction] « le fini particulier de la couleur brune », la description de la Marque dans chacune des demandes ne mentionne pas explicitement le terme « finish » [fini] en soi.

[54]  Deuxièmement, contrairement à la position de la Requérante, il n’apparaît pas clairement que l’expression [Traduction] « ... ayant l’apparence de carton écru » serait nécessairement comprise comme décrivant [Traduction] « un type de fini particulier », plutôt que de décrire autre chose, comme une nuance ou une intensité particulière de la couleur brune, comme je l’indique ci-dessous.

[55]  Troisièmement, la Requérante n’indique pas clairement ce qu’elle entend, ou pourrait entendre par [Traduction] « un type de fini ayant l’apparence de carton écru ». L’expression [Traduction] « carton écru » ne décrit pas un [Traduction] « fini » en soi. En fait, il est impossible d’associer un type de fini unique particulier à l’expression [Traduction] « carton écru » puisque que le carton écru peut être de type, de qualité et de fini variés, comme l’indiquent les différents résultats de recherche joints comme pièces CM-40 à CM-52 à l’affidavit McDonald [voir, entre autres, les pièces CM-41, CM-48, CM-49 et CM-52].

[56]  À cet égard, examinant la contestation de la Requérante relativement à l’admissibilité des pièces CM-40 à CM-52, et à l’exception de l’article de Wikipédia joint comme pièce CM-42 et des résultats de la recherche d’images dans Google joints comme pièce CM-46, je n’ai aucune raison de croire que les différents extraits et/ou imprimés des ouvrages de référence, des manuels, des glossaires, des thèses et des autres documents de référence scientifiques et publications spécialisées liés à la production, à la composition et aux caractéristiques du carton, et plus précisément du carton écru, joints à l’affidavit de Mme McDonald ne sont pas objectifs et fiables [voir, par analogie, Roots Corporation c YM Inc. (Sales), 2019 FC 16, aux para 14 et 23]. Les critères de recherche de Mme McDonald sont clairs et transparents. La Requérante avait la possibilité de contre-interroger Mme McDonald au sujet de son affidavit et/ou de présenter une preuve à ce même sujet. À cet égard, je souligne que les définitions du dictionnaire des mots « paperboard » [carton] et « bleached » [blanchi] jointes à l’affidavit Dinelle n’aident pas à déterminer ce qu’est, ou ce que pourrait être, une [Traduction] « apparence de carton écru ».

[57]  Pour revenir au soi-disant [Traduction] « type de fini ayant l’apparence de carton écru » mentionné par la Requérante, je souligne que, dans ses observations portant sur le motif d’opposition fondé sur l’absence de caractère distinctif invoqué par l’Opposante et sur le fait que les produits de tabac de l’Opposante sont livrés dans des emballages en carton brun, la Requérante a soutenu à l’audience que ce qui rend la Marque visée par les demandes [Traduction] « si unique est le fini de type carton brut des Produits mêmes de la Requérante » [italique ajouté]. Ce n’est toutefois pas ce qu’indique la description de la Marque.

[58]  Quatrièmement, si l’expression [Traduction] « ... brune ayant l’apparence de carton écru » est interprétée comme cherchant à décrire une nuance ou une intensité particulière de la couleur brune, cette nuance ou cette intensité demeure vague puisque [Traduction] « carton écru » n’est pas une couleur en soi et pourrait, dans les faits, correspondre à différentes couleurs (allant non seulement de brun très pâle à brun foncé, mais aussi à gris, voire havane ou jaunâtre) selon la nature de la matière première utilisée dans le procédé de fabrication et la méthode utilisée pour l’extraction des fibres de leur source dans le procédé de fabrication (c’est-à-dire la méthode de réduction en pâte), comme l’illustrent, ici encore, les différents résultats de recherche joints comme pièces CM-40 à CM-52 à l’affidavit McDonald [voir, entre autres, les pièces CM-41, CM-48, CM-49 et CM-52].

[59]  À cet égard, ce n’est pas parce que la Loi ou le Règlement sur les marques de commerce, DORS 96/195 (le Règlement) n’exige pas qu’un requérant mentionne précisément la nuance ou l’intensité de la couleur revendiquée [Novopharm Ltd c Pfizer Products Inc, 2009 CarswellNat 4119 (COMC) au para 23; Décision 226, supra, au para 46], qu’un requérant ne peut pas choisir de revendiquer une nuance ou une intensité particulière, comme faire référence au nuancier PANTONE, un langage standard pour l’identification des couleurs. De même, ce n’est pas parce que la Loi ou le Règlement n’exige pas que la Requérante mentionne spécifiquement la nuance ou l’intensité de la couleur brune que cela rend nécessairement l’expression [Traduction] « ...brune ayant l’apparence de carton écru » claire et acceptable dans les présentes affaires.

[60]  En effet, la Requérante aurait pu choisir de simplement revendiquer [Traduction] « la couleur brune appliquée à la surface visible de l’emballage particulier, comme l’illustre le dessin ci-joint... » comme elle l’a fait dans ses autres demandes relatives à des marques de commerce produites à l’égard des couleurs « orange » et [traduction] « violette », comme en fait foi la pièce MN-1 jointe à l’affidavit Noonan. La Requérante a toutefois choisi de décrire davantage la couleur brune en ajoutant l’expression vague et ambiguë [Traduction] « ...ayant l’apparence de carton écru... ».

[61]  En conséquence, pour toutes les raisons susmentionnées, j’estime que la description de la Marque n’indique pas clairement en quoi consiste la marque de commerce. En effet, j’estime que la Requérante n’a pas fourni suffisamment de renseignements permettant de décrire la marque de commerce telle qu’elle est revendiquée et employée [voir Novopharm Ltd c Burroughs Wellcome Inc (1994), 58 CPR (3d) 513 (CF 1re inst); conf 52 CPR (3d) 263, à la p 268 (COMC)]. Comme il a été expliqué dans Novopharm Ltd c Astra Aktiebolag (2000), 6 CPR (4th) 16 (CF 1re inst), la description écrite doit permettre de définir les limites de l’enregistrement de la marque de commerce et de préciser la portée du monopole. J’estime que tel n’est pas le cas en l’espèce.

[62]  Par conséquent, le motif d’opposition invoqué au paragraphe 5d) de la déclaration d’opposition est accueilli dans les deux affaires.

Motif d’opposition fondé sur l’article 2 invoqué au paragraphe 18d) de la déclaration d’opposition

[63]  L’Opposante allègue que la Marque n’est pas distinctive au sens de l’article 2 de la Loi parce qu’elle ne distingue pas et n’est pas adaptée à distinguer les Produits de la Requérante des produits de tabac d’autres commerçants dont les produits de tabac sont vendus dans des emballages dont la couleur est semblable à celle de la Marque alléguée.

[64]  La date pertinente pour l’examen des circonstances entourant ce motif d’opposition est celle de la date de production des déclarations d’opposition respectives (c’est-à-dire le 25 février 2014 relativement à la Demande 729 et le 24 juillet 2014 relativement à la Demande 733) [Andres Wines Ltd c E & J Gallo Winery (1975), 25 CPR (2d) 126 (CAF), à la p 130; et Park Avenue Furniture Corp c Wickes/Simmons Bedding Ltd (1991), 37 CPR (3d) 413 (CAF), à la p 424]. L’Opposante a le fardeau de preuve initial d’établir les faits allégués à l’appui de son motif d’opposition fondé sur l’absence de caractère distinctif. Après s’être acquittée de ce fardeau de preuve, la Requérante a le fardeau ultime de démontrer que la Marque est adaptée à distinguer ou distingue véritablement ses Produits de ceux de tiers dans l’ensemble du Canada [Muffin Houses Inc c The Muffin House Bakery Ltd (1985), 4 CPR (3d) 272 (COMC)].

[65]  Pour s’acquitter de son fardeau de preuve à l’égard de ce motif, l’Opposante doit établir qu’il y a eu emploi par des tiers d’emballages de couleur semblable dans une mesure suffisante pour faire perdre à la Marque son caractère distinctif [Motel 6, Inc c No 6 Motel Ltd (1981), 56 CPR (2d) 44 (CF 1re inst), à la p 58].

[66]  Comme je l’ai souligné dans l’aperçu de la preuve ci-dessus, l’Opposante a présenté, par la voie des affidavits McDonald et Morrison, une preuve concernant de nombreux produits de tabac de tiers vendus au Canada. Plus précisément, l’affidavit McDonald fait état de 29 de ces produits, dont 17, à mon avis, présentent vraisemblablement différentes nuances de la couleur brune sur leur emballage (huit sont des cigares et des cigarillos aromatisés alors que les neuf autres produits de tabac, dont une marque de cigarettes, sont sans arôme). Pour sa part, l’affidavit Morrison fournit, entre autres, des volumes des ventes pour approximativement la moitié de ces produits de tiers, en plus des volumes des ventes pour les produits de tabac des propres marques de l’Opposante, également vendus dans divers emballages bruns.

a.  Emploi d’emballages bruns en liaison avec des cigarettes

[67]  En ce qui concerne les cigarettes Philip Morris de l’Opposante, je souligne qu’aucune preuve de chiffres de ventes ou de dépenses en publicité n’est comprise dans les dates pertinentes. Bien que M. Morrison affirme au paragraphe 21 de son affidavit que [Traduction] « des produits de cigarettes ont été vendus au Canada en liaison avec la marque PHILIP MORRIS et dans les emballages bruns […] pendant de nombreuses années […] en quantités commerciales », il affirme également que l’Opposante [Traduction] « […] n’a pas accès aux chiffres exacts de ces ventes […] ». En l’absence de chiffres exacts de ventes ou de dépenses en publicité liés aux cigarettes PHILIP MORRIS de l’Opposante, il n’est pas possible de déterminer la mesure dans laquelle les consommateurs sont devenus habitués à voir l’emballage brun allégué de l’Opposante utilisé en liaison avec ces cigarettes au Canada avant les dates pertinentes. Par conséquent, je ne tiendrai pas compte de ce produit en ce qui a trait à la question du caractère distinctif.

[68]  L’Opposante a fait la preuve de ventes au Canada de deux de ses autres produits de cigarettes ainsi que d’un produit de cigarettes d’un tiers, dont les emballages présentent vraisemblablement tous une nuance de brun, à savoir : Les cigarettes Next « smooth » [légères] [pièce 7 de l’affidavit Morrison], BENSON & HEDGES de Luxe [pièce 8 de l’affidavit Morrison] et Export « A » Smooth Taste [goût léger] [pièce 13 de l’affidavit Morrison et pièce CM-19 de l’affidavit McDonald].

[69]  Comme indiqué précédemment, M. Morrison affirme que les produits de cigarettes NEXT « smooth » [légères] et BENSON & HEDGES de Luxe ont tous les deux été fabriqués et vendus dans des emballages bruns individuels depuis au moins aussi tôt que 2009 et depuis au moins aussi tôt que 2006, respectivement. Après un examen minutieux des renseignements sur les ventes connexes fournis par M. Morrison, je souligne que plus de 13 millions de cartouches de cigarettes NEXT « smooth » [légères] ont été vendues avant la date pertinente relativement à la Demande 729 et que bien au-delà de 14 millions de cartouches de cigarettes NEXT « smooth » [légères] ont été vendues avant la date pertinente relativement à la Demande 733. Je souligne également que plus de 3 millions de cartouches de cigarettes BENSON & HEDGES de Luxe ont été vendues avant les dates pertinentes, tant relativement à la Demande 729 qu’à la Demande 733. Bien que M. Morrison fournisse peu de renseignements sur les ventes de cigarettes Export « A » Smooth Taste [goût léger], je constate que l’historique de vente joint comme pièce 13 à son affidavit remonte à 2007 et que depuis, plus de 12 millions de cartouches de ce produit ont été vendues avant les dates pertinentes.

[70]  À cet égard, au paragraphe 8 de son affidavit, M. Morrison explique que chaque cartouche de cigarettes contient 10 paquets de cigarettes individuels et présentait également un emballage brun semblable. Il affirme également que des renseignements sur les ventes font état de ventes de cigarettes individuelles. Il fournit également, dans certains cas, le nombre approximatif équivalent de paquets de cigarettes en divisant le nombre de cigarettes individuelles par 20 (ce qui correspond à un nombre approximatif de paquets de 20 cigarettes). Dans mon examen des renseignements, j’ai tenu compte, lorsqu’ils étaient disponibles, uniquement des renseignements plus précis, à savoir ceux qui présentent les volumes des ventes de cigarettes individuelles équivalents, en tenant compte à la fois de la vente de paquets de 20 et de 25 cigarettes, et j’ai exclu les ventes qui s’inscrivent à l’extérieur des dates pertinentes.

[71]  Pour sa part, la Requérante soutient que l’emballage de ces produits [Traduction] « est clairement de couleur dorée et non brune, ayant l’apparence de carton écru ». Respectueusement, je ne souscris pas à la prétention de la Requérante.

[72]  Après examen des pièces 7, 8 et 13 jointes à l’affidavit Morrison ainsi que de la pièce CM-19 de l’affidavit McDonald, je suis convaincue qu’elles présentent toutes des paquets de cigarettes de différentes nuances de la couleur brune.

[73]  En l’absence d’autres représentations à cet égard, je souligne que le Canadian Oxford Dictionaries définit les mots « brown » [brun] et « gold » [doré] comme suit [Traduction] :

brown [brun]

« ayant la couleur produite par un mélange de rouge, de jaune et de noir, comme du bois foncé ou de la terre fertile »;

« une couleur brune ou un pigment brun ».

 

golden [doré]

« un métal précieux jaune, l’élément chimique portant le numéro atomique 79, utilisé particulièrement en bijouterie et en décoration et pour garantir la valeur des devises »;

« la couleur de l’or »;

« de la couleur de l’or »; ou comme

« quelque chose de précieux, de beau ou de brillant ».

[74]  Bien que je convienne que l’or et le brun sont des couleurs qui peuvent venir dans différentes nuances et intensités pouvant éventuellement s’apparenter (la couleur jaune étant une composante de la couleur brune), je ne considère pas que les paquets de cigarettes ci-dessus présentent des tons principalement jaunes métalliques ou miroitant caractéristiques de la couleur dorée et je ne suis pas convaincue que les consommateurs les percevraient ainsi non plus. Incidemment, je souligne que lorsqu’un fini brillant (une luminosité ou des reflets) semble ressortir des photographies produites comme preuve, ce brillant semble dû à la pellicule plastique transparente (cellophane) utilisée pour emballer les paquets de cigarettes individuels. Je souligne également qu’il n’y a rien sur les emballages qui puisse suggérer une autre couleur que le brun. À cet égard, contrairement à l’allégation de la Requérante, j’estime que le fait que l’Opposante puisse avoir qualifié une variante de ses cigarettes NEXT « smooth » [légères] de « NEXT Gold » [doré] dans certaines de ses factures, cela ne suffit pas en soi à étayer la conclusion que cela a nécessairement été fait pour exprimer la couleur de ses paquets de cigarettes plutôt qu’une autre idée, à savoir la catégorie/qualité ou la valeur de ses cigarettes, par exemple. Quoi qu’il en soit, même si c’était le cas, je ne suis pas convaincue que cela suppose inévitablement que les consommateurs percevraient la couleur présentée sur ces emballages comme étant dorée plutôt qu’une nuance de brun.

[75]  De plus, ayant conclu que la description que fait la Requérante de la couleur est ambiguë et ne définit pas clairement en quoi consiste la Marque, il est difficile d’accorder un quelconque poids à l’argument de la Requérante portant que [Traduction] « aucun des emballages de produit compris dans les affidavits Morrison et McDonald ne représente la couleur brune ayant l’apparence de carton écru » puisqu’on ne sait trop de quelle couleur il s’agit ou pourrait s’agir. À cet égard, l’Opposante soutient que si, après examen des motifs d’opposition ci-dessus fondés sur la non-conformité, on arrive à la conclusion qu’il n’est pas nécessaire que la Requérante mentionne la nuance ou l’intensité particulière de la couleur revendiquée dans sa demande relative à la Marque, il s’ensuit alors que toutes les nuances et les intensités de la couleur en question, faisant partie de la revendication de couleur de la Requérante, devraient être réputées pertinentes à l’examen de tout emploi par des tiers au sens du présent motif. Sous réserve de mes commentaires qui suivent à l’égard des arômes et dans le contexte d’un examen permettant de savoir si les consommateurs seraient habitués à voir des produits de tabac vendus dans des emballages de couleur brune sur le marché du tabac, je ne peux qu’être d’accord.

[76]  Pour conclure, la quantité de ventes de cigarettes démontrée par l’Opposante semble être suffisante pour étayer la conclusion portant que les consommateurs étaient habitués à voir des cigarettes vendues dans des paquets présentant différentes nuances de brun aux dates pertinentes. Je reviendrai donc sur ce point un peu plus loin.

b.  Emploi d’emballages bruns en liaison avec d’autres produits de tabac

[77]  L’Opposante produit également une preuve se rapportant à ses propres produits de tabac et à ceux de tiers, autres que des cigarettes, vendus dans des emballages arborant différentes nuances de brun, c’est-à-dire principalement des cigares, des cigarillos, du tabac et du papier à rouler. Comme il est indiqué dans les Décisions ORANGE, supra, les cigarettes, les cigares, les cigarillos, le tabac et le papier à rouler sont tous des produits connexes, qui font tous partie de l’industrie du tabac et, même si je présumais qu’ils visent un segment démographique, de client ou de marché différent de ladite industrie, cela ne change en rien le fait qu’ils sont généralement vendus côte à côte par les mêmes voies de commercialisation. J’estime donc que la preuve relative aux produits autres que des cigarettes est pertinente en ce qui a trait à ce motif.

[78]  Considérant d’abord ce produit de l’Opposante, M. Morrison explique que l’Opposante détient une licence à l’égard des produits de tabac de marque CAPTAIN BLACK, lesquels comprennent les cigares de tabac à pipe CAPTAIN BLACK [pièce 9 de l’affidavit Morrison et pièce CM-3 de l’affidavit McDonald], au Canada depuis au moins aussi tôt que 2006 et que ce produit est fabriqué et vendu par l’Opposante aux termes d’une licence octroyée par le propriétaire de cette marque de commerce. Après un examen minutieux des renseignements sur les ventes connexes fournis par M. Morrison, je souligne que plus de 69 millions d’emballages de cigares de tabac à pipe CAPTAIN BLACK ont été vendus avant la date pertinente relativement à la Demande 729 et que plus de 72 millions d’emballages de cigares de tabac à pipe CAPTAIN BLACK ont été vendus avant la date pertinente relativement à la Demande 733. Ici encore, la Requérante soutient que l’emballage de ce produit est [Traduction] « de couleur dorée et non brune, et [est] clairement indiquée sur l’emballage comme CAPTAIN BLACK “GOLD” [doré] ». Pour des raisons semblables à celles indiquées ci-dessus dans la discussion portant sur le même sujet à l’égard des paquets de cigarettes, j’ai tendance à ne pas être d’accord.

[79]  À mon avis, cet emballage présente une carte du monde à l’allure rétro rappelant une couleur de papier décoloré ou taché qui pourrait certainement être considérée comme une nuance pâle de brun (ou un brun jaunâtre pâle). Il comprend également la mention « GOLD • OR », qui semble toutefois avoir une connotation élogieuse, c’est-à-dire évoquant la catégorie/qualité du produit qu’il contient plutôt que la couleur de l’emballage qui le contient. Autrement dit, j’estime que les consommateurs percevraient la présence de la mention « GOLD • OR » sur cet emballage comme une indication portant qu’il contient des cigares de qualité supérieure, plutôt que comme une indication portant que l’emballage est de couleur dorée au lieu de brun pâle.

[80]  En ce qui concerne les produits de tiers autres que des cigarettes, les emballages de certains de ceux que j’ai retenus aux fins de mon analyse présentent des indications d’arômes, plus précisément : « wild rum » [rhum sauvage], « molasses/coconut » [mélasse/noix de coco], « vanilla » [vanille], « chocolate » [chocolat], « dutch chocolate » [chocolat hollandais] et café moka. À cet égard, je n’estime pas qu’il convienne de considérer la mention « wild ‘n natural » [sauvage et naturel] figurant sur l’un des emballages de cigares comme étant un arôme au même titre que ceux présentés par la Requérante. Je préfère considérer cette mention comme suggestive du profil de mélange/goût du produit (au même titre que des indications comme « smooth taste » [goût léger]).

[81]  Bien que j’estime qu’ils présentent certainement des emballages de couleur brune, je souligne également qu’il n’y a pas de preuve de chiffres de vente ou de dépenses en publicité aux dates pertinentes pour les produits de tabac suivants : les cigares sans arôme Toscano – Extra Vecchio [pièce CM-21 de l’affidavit McDonald], le papier à rouler Raw [pièce CM-33 de l’affidavit McDonald], le tabac aromatisé à la mélasse et à la noix de coco El Nakhla [pièce CM‑9 de l’affidavit McDonald], les cigares aromatisés au chocolat hollandais Honey T [pièce CM-17 de l’affidavit McDonald], les cigares aromatisés à la vanille Prime Time [pièce CM-18 de l’affidavit McDonald], les cigarillos aromatisés au café moka M by Colts [pièce CM-20 de l’affidavit McDonald], les cigares de tabac à pipe à embout aromatisés à la vanille Blackstone [pièce CM-28 de l’affidavit McDonald] et les cigares aromatisés au chocolat Hav-a-Tampa – Jewels [pièce CM-29 de l’affidavit McDonald]. Je ne tiendrai donc pas compte de ce produit en ce qui a trait à la question du caractère distinctif.

[82]  En ce qui concerne les produits aromatisés de fantaisie, il ne reste que les cigares aromatisés au rhum sauvage Backwoods – Authentic [pièce CM-6 de l’affidavit McDonald et pièce 15 de l’affidavit Morrison] et les cigares aromatisés à la vanille Honey T [pièce CM-16 de l’affidavit McDonald et pièce 22 de l’affidavit Morrison].

[83]  S’appuyant sur les Décisions ORANGE, supra, la Requérante soutient que tous les produits aromatisés représentent une preuve [Traduction] « non pertinente en ce qui a trait à la question du caractère distinctif […] parce que les consommateurs comprendraient que la couleur de l’emballage est évocatrice de l’arôme plutôt que d’être utilisée comme marque de commerce » [soulignement ajouté]. À l’appui de cette allégation, la Requérante renvoie plus précisément au paragraphe 58 de la Décision CF 608, reproduit ci-dessous [Traduction] :

Deuxièmement, une bonne partie de la preuve de JTI a trait à des produits affichant le mot « peach » (pêche) sur l’emballage. À mon avis, il était loisible à la Commission de conclure que ces produits seront associés à la couleur pêche, plutôt qu’à la couleur orange. Il s’agit là d’une question d’appréciation de la preuve concernant un enjeu relevant du cœur même de l’expertise de la Commission. JTI n’évoque pas la non‑pertinence des produits de couleur pêche. La déférence est donc de mise à l’égard de cette conclusion de fait. [soulignement ajouté]

[84]  Je souligne que cet extrait tiré de la Décision CF 608 renvoie aux commentaires formulés par la membre de la Commission Folz au paragraphe 48 de la Décision 116 et au paragraphe 42 de la Décision 117 [Traduction] :

Parmi les cinq produits du tabac de tiers à l’égard desquels M. Sue a fourni des données de ventes antérieures à la date pertinente, trois d’entre eux mentionnent le mot « peach » [pêche] sur leur emballage. Cela m’indique qu’il s’agit de la saveur associée à la marchandise. À mon avis, il s’ensuit que les consommateurs considéreraient que la couleur utilisée sur l’emballage était la couleur pêche par opposition à la couleur orange.

[85]  Respectueusement, je ne comprends pas en quoi la citation du paragraphe 58 de la Décision CF 608 appuie la position de la Requérante portant que tous les produits de tabac aromatisé sont non pertinents en ce qui a trait à la question du caractère distinctif parce que les consommateurs comprendraient que la couleur de l’emballage est évocatrice de l’arôme plutôt que d’être utilisée comme marque de commerce.

[86]  Premièrement, je souligne qu’il est bien établi qu’un emploi par un tiers au sens du présent motif ne doit pas nécessairement représenter un emploi à titre de marque de commerce au sens de l’article 4 de la Loi [3M Co. c Tape Specialities Ltd (2008), 70 CPR (4th) 138 (COMC); et Décision 117, supra, au para 38].

[87]  Deuxièmement, je n’interprète pas les Décisions ORANGE, supra, comme écartant nécessairement tous les produits de tabac aromatisés de l’analyse au titre du présent motif d’opposition. Un tel produit ne peut être écarté que si la description d’un arôme qui figure sur un produit influence la perception du public et l’indication de la couleur qui est présente sur un produit donné (à titre d’exemple, la couleur « pêche » plutôt que la couleur orange).

[88]  Dans les présentes affaires, bien que les définitions tirées du Canadian Oxford Dictionaries du mot « vanilla » [vanille] indiquent qu’il peut servir de désignation de couleur, je ne peux m’empêcher de voir une différence entre les termes « rum » [rhum] et « wild rum » [rhum sauvage]. Contrairement à la couleur [Traduction] « pêche » (définie comme [Traduction] « une couleur jaune rosâtre comme celle d’une pêche » et « la couleur rose orangée d’une pêche ») ou la couleur [Traduction] « vanille » (définie comme [Traduction] « la couleur crémeuse de la glace à la vanille »), les termes « rum » [rhum] et « wild rum » [rhum sauvage] ne sont pas des couleurs en soi. Ainsi, bien que je conçoive que les consommateurs associeraient l’arôme de rhum aux cigares achetés dans des emballages bruns portant la mention « wild rum » [rhum sauvage], j’estime qu’on ne peut conclure que les consommateurs considéreraient également ces emballages de produits comme étant de couleur « rum » [rhum] ou « wild rum » [rhum sauvage] (si cela existe) plutôt que de couleur brune. Autrement dit, le fait que les consommateurs puissent associer l’arôme de rhum aux cigares aromatisés au rhum sauvage Backwoods – Authentic, produits en preuve comme pièce 15 jointe à l’affidavit Morrison, ne change en rien le fait que les emballages de ces mêmes produits présentent des nuances de la couleur brune et qu’ils sont ainsi pertinents dans le contexte d’un examen consistant à savoir si les consommateurs seraient habitués à voir des produits de tabac vendus dans des emballages de couleur brune sur le marché du tabac.

[89]  En conséquence, j’écarte uniquement le produit de tabac aromatisé à la vanille d’un tiers, plus précisément les cigares aromatisés à la vanille Honey T [pièce CM-16 de l’affidavit McDonald et pièce 22 de l’affidavit Morrison] puisque l’emballage de ce produit peut être associé par les consommateurs à la couleur vanille plutôt qu’à la couleur brune.

[90]  Les renseignements sur les ventes des sept autres produits de tabac de tiers produits en preuve et présentant différentes nuances de la couleur brune sur leur emballage indiquent que plus de 1,5 million d’emballages ont été vendus au Canada avant les dates pertinentes à l’égard de ce motif d’opposition. Plus précisément, cela comprend : plus de 1 million d’emballages de tabac à pipe Amphora Original Blend [pièce CM-1 de l’affidavit McDonald et pièce 18 de l’affidavit Morrison]; 140 emballages de cigares Toscano – Toscanello [pièce CM-5 de l’affidavit McDonald et pièce 26 de l’affidavit Morrison]; plus de 4 000 emballages de tabac à pipe Original Choice [pièce CM-13 de l’affidavit McDonald et pièce 24 de l’affidavit Morrison]; plus de 175 000 emballages de tabac à pipe Amphora Mellow Blend [pièce CM-14 de l’affidavit McDonald et pièce 17 de l’affidavit Morrison]; 294 488 emballages de cigares Backwoods Wild ‘n Natural [pièce CM-26 de l’affidavit McDonald et pièce 14 de l’affidavit Morrison]; plus de 10 000 emballages de 3 cigares Guantanamera Minutos [pièce CM-30 de l’affidavit McDonald et pièce 23 de l’affidavit Morrison]; et plus de 111 000 emballages de cigares aromatisés au rhum sauvage Backwoods – Authentic [pièce CM-6 de l’affidavit McDonald et pièce 15 de l’affidavit Morrison].

[91]  Comme indiqué précédemment, le reste de la preuve de l’Opposante se rapporte à des produits de tabac dans des emballages qui ne sont pas de couleur brune en soi ou pour lesquels il n’y a aucune preuve de vente ou de dépenses en publicité au Canada avant les dates pertinentes.

[92]  Cela dit, j’estime que l’Opposante a présenté une preuve plus que suffisante démontrant que les emballages de couleur brune étaient courants dans l’industrie du tabac aux dates pertinentes pour s’acquitter de son fardeau de preuve.

[93]  Bien que la jurisprudence n’établisse pas clairement la portée des ventes que l’Opposante doit démontrer, j’estime que la preuve ci-dessus de ventes de plus de 28 millions de cartouches de cigarettes, ainsi que de plus de 1,5 million d’emballages de produits de tiers liés au tabac et de plus de 69 millions d’emballages de cigares de tabac à pipe CAPTAIN BLACK de l’Opposante, dont les emballages présentent certainement tous la couleur brune, n’est en rien minimale et est plus que suffisante, plus particulièrement comparativement aux 1,9 à 2,2 millions de paquets de cigarettes de la Requérante vendus avant les dates pertinentes. Considérant que le reste de la preuve de la Requérante (y compris ses dépenses en publicité et la distribution déclarée de matériel publicitaire) ne permet pas à la Requérante de s’acquitter de son fardeau ultime de démontrer que la Marque visée par les demandes était distinctive de la source des produits aux dates pertinentes, j’estime que le motif d’opposition fondé sur le caractère distinctif invoqué au paragraphe 18d) de la déclaration d’opposition est accueilli dans chaque affaire.

c.  Boîtes d’expédition en carton brun

[94]  L’Opposante soutient que les emballages en carton brun qu’elle utilise pour expédier les différents produits de tabac qu’elle fabrique sont également pertinents en ce qui a trait à la question du caractère distinctif. À l’audience, la Requérante a à son tour suggéré que, bien que lesdits emballages en carton sont utilisés pour expédier de la marchandise de marque, il ne s’agit pas de l’emballage principal des produits de tabac et cette utilisation ne constitue pas un emploi de marque de commerce au sens de la Loi.

[95]  Comme indiqué précédemment, l’emploi par un tiers n’a pas besoin de constituer un emploi de marque de commerce à proprement parler pour être pris en considération à l’examen de la question du caractère distinctif. Cela dit, bien que la pertinence des boîtes d’expédition en carton soit à mon avis discutable, ayant déjà déterminé que le présent motif d’opposition de l’Opposante est accueilli, il n’est pas nécessaire de régler cette question.

Autres motifs d’opposition

[96]  Comme j’ai déjà tranché en faveur de l’Opposante relativement à deux motifs d’opposition, j’estime qu’il n’est pas nécessaire d’examiner les autres motifs d’opposition.

Décision

[97]  Dans l’exercice des pouvoirs qui m’ont été délégués en vertu des dispositions de l’article 63(3) de la Loi, je repousse chacune des demandes selon les dispositions de l’article 38(8) de la Loi.

 

Annie Robitaille

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

Traduction certifiée conforme

Nathalie Tremblay, trad.


Annexe A

Extraits de la déclaration d’opposition modifiée produite relativement à la Demande 729 [motifs d’oppositions identiques à ceux invoqués relativement à la Demande 733].

[Traduction]
« 4.   Les Opposantes fondent cette opposition sur les motifs d’opposition énumérés ci-dessous.

Article 38(2)a) et article 30

5.  Les Opposantes fondent cette opposition sur le motif énoncé à l’alinéa 38(2)a) de la Loi, à savoir que la Demande n’est pas conforme aux exigences de l’article 30 de la Loi. Plus précisément, l’article 30 prévoit que la Requérante doit produire une demande pour enregistrer une « marque de commerce ». La marque de commerce alléguée reproduite et décrite dans la Demande n’est pas une « marque de commerce » au sens de l’article 2 de la Loi pour les raisons suivantes :

a.   Au sens de l’article 2 de la Loi, une marque de commerce est définie comme une marque employée pour distinguer ou de façon à distinguer les marchandises d’un requérant de celles de tiers;

b.   La marque de commerce alléguée, à savoir la couleur brune telle qu’appliquée sur l’emballage revendiqué, est simplement décorative, n’est pas une marque de commerce et ne peut pas servir de marque de commerce au sens de la Loi;

c.   La marque de commerce alléguée est simplement une couleur décorative qui ne définit pas de façon précise la dimension ou la forme de la marque de commerce liée ou, à titre subsidiaire, la marque de commerce alléguée est simplement une couleur décorative en liaison avec une forme courante. Dans un cas comme dans l’autre, la marque de commerce alléguée n’est pas une marque de commerce, et ne peut pas servir de marque de commerce au sens de la Loi;

d.  La marque de commerce alléguée telle qu’elle est décrite et reproduite dans la Demande est vague et imprécise, ne comportant aucune référence spécifique à la nuance ou à l’intensité de la couleur brune revendiquée outre la mention « ayant l’apparence de carton écru », une expression vide de sens. La description de « la couleur brune ayant l’apparence de carton écru » n’est pas une couleur et cela ne suffit pas à décrire adéquatement la marque de commerce alléguée puisque « carton écru » pourrait décrire une gamme de couleurs; et

e.  Au moment du transfert de la propriété des marchandises, la marque de commerce alléguée n’est pas présente sur les marchandises ni autrement liée aux marchandises à tel point qu’avis de liaison est donné à la personne à qui la propriété est transférée, puisque la marque de commerce alléguée est simplement une couleur de fond présente sur une petite partie d’un paquet de cigarettes de forme courante sur lequel figurent d’autres inscriptions et indications quant à la source.

6.   Les Opposantes fondent cette opposition sur le motif énoncé à l’alinéa 38(2)a) de la Loi, à savoir que la Demande n’est pas conforme aux exigences de l’article 30)b) de la Loi. La marque de commerce alléguée n’a pas été employée au Canada à la date revendiquée dans la Demande en liaison avec les marchandises mentionnées dans la Demande, y compris parce que :

a.   Au sens des articles 2 et 4 de la Loi, la Requérante n’emploie pas et n’a pas employé la marque de commerce alléguée telle qu’elle est décrite et reproduite dans la Demande. Au moment du transfert de la propriété ou de la possession des marchandises dans la pratique normale du commerce, la marque de commerce alléguée n’est pas reproduite telle qu’elle est revendiquée dans la Demande à l’intention des personnes auxquelles la propriété ou la possession des marchandises est transférée; et

b.  À titre subsidiaire, si la marque de commerce alléguée est reproduite au moment du transfert de la propriété des marchandises, la marque de commerce alléguée n’est pas présente sur les marchandises ou n’est pas autrement liée aux marchandises à tel point qu’avis de liaison est donné à la personne à qui la propriété est transférée, puisque la marque de commerce alléguée est simplement une couleur de fond présente sur une petite partie d’un paquet de cigarettes de forme courante sur lequel figurent d’autres inscriptions et indications quant à la source. La couleur brune telle qu’elle est revendiquée dans la Demande n’indique aucune source.

7.   Les Opposantes fondent cette opposition sur le motif énoncé à l’alinéa 38(2)a) de la Loi, à savoir que la Demande n’est pas conforme aux exigences de l’article 30h) de la Loi. La Demande ne contient pas de représentation ou de dessin précis de la marque de commerce alléguée. La Demande a été produite sur le fondement de l’emploi au Canada depuis le 5 novembre 2012. La marque de commerce alléguée telle qu’elle est employée, n’est pas la marque de commerce telle qu’elle est reproduite dans la Demande. Le dessin produit avec la Demande ne représente pas adéquatement la marque de commerce alléguée ou ne permet pas de définir les limites du monopole de la marque de commerce. La Demande ne comporte pas non plus un nombre suffisant de représentations précises permettant de faire ressortir toutes les caractéristiques de la marque de commerce alléguée. Par conséquent, la Demande contrevient à l’article 30h) de la Loi.

8.   De plus, le dessin ne représente pas précisément la marque de commerce alléguée, car il n’y a aucune définition quant à la taille ou aux dimensions du « paquet » et, par conséquent, la Demande est simplement une demande d’enregistrement d’une couleur sans liaison avec une forme ou une dimension de paquet définie.

9.   Finalement, le dessin et la description de la marque de commerce alléguée démontrent clairement que l’objet de la demande d’enregistrement est un signe distinctif (au sens de l’article 2 de la Loi) et la Demande aurait dû être présentée ainsi. Les exigences de l’article 13 de la Loi n’ont pas été satisfaites.

10.   Les Opposantes fondent cette opposition sur le motif énoncé à l’alinéa 38(2)a) de la Loi, à savoir que la Demande n’est pas conforme aux exigences de l’article 30i) de la Loi. À la date de production, ou à toute autre date pertinente, la Requérante ne pouvait être convaincue d’avoir droit d’employer la marque de commerce alléguée au Canada en liaison avec les marchandises spécifiées dans la Demande. La Requérante savait que la marque de commerce alléguée n’était pas une marque de commerce pour les raisons soulignées ci-dessous.

11.   De plus, en contravention de l’article 30i) de la Loi, la Requérante savait également que toute attribution à la Requérante d’une exclusivité dans l’emploi de la couleur « brune » telle qu’elle est alléguée est contraire à la politique publique comme menant à un épuisement de disponibilité de la couleur pour des tiers. La Requérante et sa société affiliée, Imperial Tobacco Products Limited, ont produit plusieurs demandes cherchant à obtenir des droits exclusifs concernant l’emploi de couleurs en soi, lesquelles, individuellement et collectivement, ne respectent pas la portée de la loi et des politiques en matière de marque de commerce. En plus de la Demande, les demandes suivantes ont été produites : Paquet brun Dessin (1605733), Paquet violet Dessin (1580250), Paquet violet Dessin (1580255), Paquet orange Dessin (1317127), et Paquet orange Dessin (1317128).

Articles 38(2)b), 12 et 13

12.   Les Opposantes fondent cette opposition sur le motif énoncé à l’alinéa 38(2)b) de la Loi, à savoir que la marque de commerce alléguée n’est pas enregistrable. Si la marque de commerce alléguée est une marque de commerce, ce qui est réfuté, il s’agit d’un signe distinctif tel que défini à l’article 2 de la Loi. Ainsi, elle n’est pas enregistrable au sens de l’article 12, car les exigences de l’article 13 de la Loi n’ont pas été satisfaites. La marque de commerce alléguée vise le mode d’empaquetage ou d’emballage des marchandises.

Articles 38(2)b) et 12(1)d)

13.   Les Opposantes fondent cette opposition sur le motif énoncé à l’alinéa 38(2)b) de la Loi, à savoir que la marque de commerce alléguée n’est pas enregistrable puisqu’elle contrevient aux dispositions de l’article 12(1)d) de la Loi. La marque de commerce alléguée en liaison avec les marchandises visées par les Demandes crée de la confusion avec les marques de commerce enregistrées antérieurement : AMPHORA MELLOW BLEND & Dessin (LMC591146), AMPHORA ORIGINAL BLEND & Dessin (LMC591224), DJARUM SPICE ISLANDS & Dessin (LMC686970), et TOSCANI (LMC527719).

Articles 38(2)b), 12(1)e) et 10

14.   Les Opposantes fondent cette opposition sur le motif énoncé à l’alinéa 38(2)b) de la Loi, à savoir que la marque de commerce alléguée n’est pas enregistrable, car elle contrevient aux dispositions de l’Article 12(1)e) de la Loi, à savoir qu’il s’agit d’une marque dont l’adoption est interdite en vertu de l’Article 10 de la Loi. La marque de commerce alléguée est devenue reconnue au Canada, en raison d’une pratique commerciale ordinaire et authentique, comme désignant le genre et/ou la qualité des marchandises, à savoir que le carton écru de couleur brune est devenu reconnu comme désignant des emballages ou des produits recyclés et/ou écologiques ou naturels.

Articles 38(2)c) et 16

15.   Les Opposantes fondent cette opposition sur le motif énoncé à l’alinéa 38(2)c) de la Loi, à savoir que la Requérante n’est pas la personne ayant droit à l’enregistrement de la marque de commerce alléguée au sens de l’article 16(1)a). La Requérante n’est pas la personne ayant droit à l’enregistrement de la marque de commerce alléguée, car à la date de premier emploi revendiquée et à la date de production de la Demande, la marque de commerce alléguée créait et crée de la confusion avec la marque de commerce Dessin de paquet Philip Morris de PM Brands en liaison avec des produits de tabac, antérieurement employée et révélée au Canada par sa prédécesseure en titre, Imperial Tobacco Products Limited et ses prédécesseurs, depuis au moins aussi tôt que 1934.

16.   Les Opposantes fondent cette opposition sur le motif énoncé à l’alinéa 38(2)c) de la Loi, à savoir que la Requérante n’est pas la personne ayant droit à l’enregistrement de la marque de commerce alléguée au sens de l’article 16(1)a). La Requérante n’est pas la personne ayant droit à l’enregistrement de la marque de commerce alléguée, car depuis la date de premier emploi revendiquée et la date de production de la Demande, la marque de commerce alléguée créait et crée de la confusion avec les marchandises de tiers, y compris des produits de tabac vendus au Canada en liaison avec les marques de commerce […] Captain Black, antérieurement employées et révélées au Canada.

17.   Les Opposantes fondent cette opposition sur le motif énoncé à l’alinéa 38(2)c) de la Loi, à savoir que la Requérante n’est pas la personne ayant droit à l’enregistrement de la marque de commerce alléguée au sens de l’article 16(1)b). La Requérante n’est pas la personne ayant droit à l’enregistrement de la marque de commerce alléguée, car depuis la date de premier emploi revendiquée et la date de production de la Demande, la marque de commerce alléguée créait et crée de la confusion avec la marque de commerce NEXT & Dessin portant le numéro 1484251 à l’égard de laquelle une demande d’enregistrement avait antérieurement été produite le 8 juin 2010.

Articles 38(2)d) et 2

18.   Les Opposantes fondent cette opposition sur le motif énoncé à l’alinéa 38(2)d) de la Loi, à savoir que la marque de commerce alléguée n’est pas distinctive au sens de l’article 2 de la Loi. Autrement dit, la marque de commerce alléguée ne peut distinguer ni n’est adaptée à distinguer les marchandises en liaison avec lesquelles elle aurait été employée au Canada, des marchandises de tiers, y compris celles des Opposantes. Plus précisément, la marque de commerce alléguée ne peut être distinctive des produits de la Requérante, car :

a.   La marque de commerce alléguée est simplement décorative et ne peut, par sa nature, servir de marque de commerce;

b.   La marque de commerce alléguée n’est pas adaptée à servir de marque de commerce, car elle n’est pas présente sur les marchandises ou autrement liée aux marchandises à tel point qu’avis de liaison est donné à la personne à qui la propriété est transférée, puisque la marque de commerce alléguée est simplement une couleur de fond présente sur une petite partie d’un paquet de cigarettes de forme courante sur lequel figurent d’autres inscriptions et indications quant à la source, et elle ne distingue donc pas véritablement les marchandises en liaison avec lesquelles elle est employée par la Requérante des marchandises de tiers, ni n’est est adaptée à les distinguer;

c.   La marque de commerce alléguée n’est pas adaptée à servir de marque de commerce, car la représentation et la description de la marque de commerce alléguée sont vagues et imprécises, ne se limitant pas à une référence à une nuance ou à une intensité précise de la couleur brune autre que « ayant l’apparence de carton écru », et en conséquence, ne distingue pas véritablement les marchandises en liaison avec lesquelles elle est employée par la Requérante des marchandises de tiers, ni n’est adaptée à les distinguer; et

d.   À titre subsidiaire, si la marque de commerce alléguée est, par sa nature, adaptée à servir de marque de commerce (ce qui est réfuté), elle n’est pas distinctive des produits de la Requérante et elle ne distingue pas véritablement les marchandises en liaison avec lesquelles elle est employée par la Requérante des marchandises de tiers, y compris des produits de tabac vendus au Canada en liaison avec les marques de commerce Dessin de paquet Philip Morris, Backwoods, Organic Yuma, Guantanamera, Bullseye, Phillies Blunt, Djarum Natural Leaf, Original Choice, Toscane Classico, OCB, Raw, Amphora, Toscane Toscanello, El Nakhla, Dutch Masters, Panter, Mehari’s, Clubmaster et Captain Black, ni n’est adaptée à les distinguer. »

 


 

Annexe B
[Traduction]

Pièces

Descriptifs

CM-1

Photographie de tabac à pipe Amphora Original Blend

CM-2

Copie d’un reçu d’achat de Super Smoke, du 685 rue Yonge à Toronto, daté du 15 février 2014 pour le produit « Amphora Original Blend »

CM-3

Photographie de cigares de tabac à pipe Captain Black Gold

CM-4

Photographie de cigarillos au cognac Dutch Masters

CM-5

Photographie de cigares Toscano – Toscanello

CM-6

Photographie de cigares Backwoods – Authentic (rhum sauvage)

CM-7

Photographie de cigarillos Mehari’s

CM-8

Photographie de Clubmaster – 10 Elegantes Sumatra

CM-9

Photographie de El Nakhla – (noix de coco)

CM-10

Photographie de Panter Mignon

CM-11

Copie d’un reçu d’achat de Casablanca Tobacconist (Casablanca Tobacconist), du 4 rue King à Toronto, daté du 18 février 2014, pour les produits reproduits aux pièces CM-3 à CM-10.

CM-12

Photographie de cigares Phillies Blunt (noix de coco)

CM-13

Photographie de tabac à pipe Original Choice

CM-14

Photographie de tabac à pipe Amphora Mellow Blend

CM-15

Copie d’un reçu d’achat de Casablanca Tobacconist, daté du 25 février 2014, pour « Amphora Mellow Blend » reproduit à la pièce CM-14

CM-16

Photographie de cigares Honey T (vanille)

CM-17

Photographie de cigares Honey T (chocolat hollandais)

CM-18

Photographie de cigares Prime Time (vanille)

CM-19

Photographie de cigarettes Export A

CM-20

Photographie de cigares M by Colts

CM-21

Photographie de cigares Toscano – Extra Vecchio

CM-22

Copie d’un reçu d’achat de Casablanca Tobacconist, daté du 23 juillet 2014, pour les produits reproduits aux pièces CM-16 à CM-21

CM-23

Photographie de cigares Toscano – Classico

CM-24

Photographie de cigares Djarum (vanille)

CM-25

Photographie de cigares Bullseye (vanille)

CM-26

Photographie de cigares Backwoods Wild ‘n Natural

CM-27

Photographie de tabac à pipe Captain Black – Gold

CM-28

Photographie de cigares de tabac à pipe Blackstone (vanille)

CM-29

Photographie de Hav-a-Tampa – Jewels (chocolat)

CM-30

Photographie de Guantanamera 3 Minutos

CM-31

Copie d’un reçu d’achat de Casablanca Tobacconist, daté du 24 juillet 2014, pour les produits reproduits aux pièces CM-27 à CM-30

CM-32

Photographie de cigarettes biologiques Yuma

CM-33

Photographie de papier à rouler Raw

CM-34

Photographie de papier à rouler OCB


COMMISSION DES OPPOSITIONS DES MARQUES DE COMMERCE

OFFICE DE LA PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE DU CANADA

COMPARUTIONS ET AGENTS INSCRITS AU DOSSIER

___________________________________________________

DATE DE L’AUDIENCE : 2018-07-11

COMPARUTIONS

James Green

POUR L’OPPOSANTE

Timothy Stevenson

POUR LA REQUÉRANTE

AGENT(S) AU DOSSIER

GOWLING WLG (CANADA) LLP

POUR L’OPPOSANTE

SMART & BIGGAR

POUR LA REQUÉRANTE

 

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