Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

Référence : 2019 COMC 59

Date de la décision : 2019-06-21

[TRADUCTION CERTIFIÉE

NON RÉVISÉE]

DANS L’AFFAIRE DE L’OPPOSITION

 

Hunter Boot Limited

Opposante

et

 

DK Company A/S

Requérante

 

1,747,882 pour la marque de commerce

DENIM HUNTER & DESSIN

Demande

introduction

[1]  DK Company A/S (la Requérante) a produit une demande pour faire enregistrer la marque de commerce DENIM HUNTER & DESSIN (la Marque), reproduite ci-dessous :

DENIM HUNTER & DESIGN

[2]  L’enregistrement de la Marque est demandé en liaison avec les produits et les services suivants, sur la base de l’emploi projeté au Canada [Traduction] :

Produits

Cuir et similicuir ainsi que produits faits de ces matières, nommément peaux d’animaux, cuirs bruts; coffres, nommément coffres de rangement et sacs de voyage en cuir; parapluies, parasols et cannes; cravaches; ceintures, bretelles, chapeaux, chaussures, chaussures habillées, chaussures sport, chaussures tout-aller, sandales, chaussures d’entraînement; vêtements, nommément chemises, chemises habillées, chemises sport, chemises tissées ou tricotées, cravates, nœuds papillon, articles pour le cou, nommément cravates, chandails, vestes, vestes sport, vestes habillées, parkas, pantalons sport, pantalons, jeans, costumes, vestons sport, pardessus, paletots, bonneterie, vêtements de bain, shorts, robes, jupes, hauts, nommément hauts courts, hauts en molleton, hauts en tricot et bustiers tubulaires.

Services

Gestion des affaires pour des tiers; administration des affaires relativement à la conception, à la production, à la vente et au marketing de vêtements et de produits connexes pour des tiers.

[3]  Hunter Boot Limited (l’Opposante) s’oppose à la demande pour divers motifs, y compris que cette dernière crée de la confusion avec sa marque de commerce déposée HUNTER.

[4]  Pour les raisons exposées ci-dessous, la demande d’enregistrement est repoussée.

Le dossier

[5]  La demande pour la Marque a été produite le 28 septembre 2015.

[6]  De nombreuses modifications à la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, ch T-13 (la Loi) sont entrées en vigueur le 17 juin 2019. Dans le contexte d’une procédure d’opposition, la date utilisée pour déterminer quelle version de la Loi s’applique est la date à laquelle la demande visée par l’opposition a été annoncée. En l’espèce, la demande a été annoncée aux fins d’opposition dans le Journal des marques de commerce du 11 mai 2016. La demande ayant été annoncée avant le 17 juin 2019, conformément à l’article 70 de la Loi, les motifs d’opposition seront évalués au regard de la Loi dans sa version immédiatement antérieure au 17 juin 2019, à l’exception de la question de la confusion qui, elle, sera évaluée au regard des articles 6(2) à (4) de la Loi dans sa version actuelle.

[7]  L’Opposante s’est opposée à la demande le 11 octobre 2016, en produisant une déclaration d’opposition sur le fondement de l’article 38 de la Loi, dans sa version alors en vigueur. Les motifs d’opposition, qui sont fondés sur les articles 30e), 30i), 12(1)b), 12(1)d), 16(3) et 2 de la Loi dans sa version alors en vigueur, seront examinés successivement ci-dessous.

[8]  La Requérante a produit une contre-déclaration dans laquelle elle nie chacune des allégations formulées dans la déclaration d’opposition.

[9]  À l’appui de son opposition, l’Opposante a produit la preuve suivante :

·  des copies certifiées des enregistrements des marques de commerce HUNTER (LMC818,090), HUNTER Logo (LMC820,401) et H CREST Dessin (LMC894,920) de l’Opposante;

·  une copie certifiée de la demande d’enregistrement produite par l’Opposante à l’égard de la marque de commerce HUNTER Dessin (no 1,669,127); et

·  l’affidavit de Kirsten Hardigg, souscrit le 11 avril 2017.

[10]  À l’appui de sa demande, la Requérante a produit la preuve suivante :

·  l’affidavit de Jens Poulsen, souscrit le 11 septembre 2017;

·  l’affidavit de Christoph Heinemann, souscrit le 12 septembre 2017; et

·  l’affidavit de Jane Buckingham, souscrit le 16 août 2017.

[11]  Aucun des déposants n’a été contre-interrogé relativement à son affidavit. Les parties ont toutes deux produit un plaidoyer écrit. La tenue d’une audience n’a pas été sollicitée.

Aperçu de la preuve de l’Opposante

Copies certifiées des enregistrements des marques de l’Opposante

[12]  L’Opposante a produit des copies certifiées des enregistrements de ses marques de commerce HUNTER (LMC818,090), HUNTER Logo (LMC820,401) et H CREST Dessin (LMC894,920) ainsi qu’une copie certifiée de la demande d’enregistrement produite par l’Opposante à l’égard de la marque de commerce HUNTER Dessin (no 1,669,127) (collectivement, les Marques de l’Opposante).

[13]  Je souligne que, subséquemment à la production de la preuve de l’Opposante, un enregistrement a été accordé relativement à la demande no 1,699,127, le 27 septembre 2017. Cependant, l’Opposante n’a pas modifié sa déclaration d’opposition pour y mentionner cet enregistrement.

[14]  Les détails des Marques de l’Opposante sont présentés à l’annexe A de la présente décision.

Affidavit de Kirsten Hardigg

[15]  Dans son affidavit, Mme Hardigg fournit un aperçu de l’entreprise de l’Opposante ainsi que des renseignements sur les ventes d’articles chaussants et de vêtements HUNTER par l’Opposante. Son affidavit peut être résumé comme suit :

·  Mme Hardigg est la directrice mondiale du service des ventes de Hunter Boot USA, une filiale en propriété exclusive de l’Opposante (para 1);

·  L’Opposante est une société écossaise qui a été créée en 2007 (para 8);

·  Jusqu’en 2011, l’Opposante a vendu ses produits HUNTER au Canada par l’entremise de son ancienne distributrice, Man Made Sales Inc.; depuis 2012, l’Opposante vend ses produits HUNTER par l’entremise de sa distributrice actuelle, Steven Slavin Agencies Inc. (para 10);

·  Les ventes annuelles des produits HUNTER de l’Opposante au Canada ont oscillé entre 1,4 million £ (livres sterling) en 2010 et 12,5 millions $ CA en 2016 (para 11);

·  Les détaillants canadiens des produits HUNTER comprennent La Baie d’Hudson, Nordstrom et Saks Off Fifth, et comprenaient antérieurement Urban Outfitters, Club Monaco et Intermix (para 12);

·  L’Opposante exploite un site Web canadien, ca.hunterboots.com, aux fins de la promotion et de la vente des produits HUNTER au Canada; les ventes réalisées par l’intermédiaire du site Web ont oscillé entre 2,6 millions £ en 2014 et 1 million $ CA au premier trimestre de 2017 (para 13);

·  Les dépenses publicitaires/promotionnelles annuelles engagées par l’Opposante au Canada en lien avec les produits HUNTER ont oscillé entre 69 000 $ CA en 2012 et 210 000 $ CA en 2016 (para 14);

·  L’Opposante a employé les marques HUNTER, le nom commercial HUNTER et le nom commercial « Hunter Boot Canada Inc » en liaison avec la vente d’articles chaussants et de vêtements au Canada, comme en témoignent des dizaines de factures représentatives datant de 2009 à 2016 (para 15 et pièce D);

·  Les produits HUNTER ont été annoncés au moyen de publicités au Canada, y compris des publicités imprimées et des publicités sur les sites Web de divers détaillants canadiens (para 16 et pièce E);

·  Depuis 2014, l’Opposante tient des [Traduction] « journées de presse » deux fois l’an au Canada afin de promouvoir ses produits HUNTER; lors de ces journées, les produits HUNTER sont exposés et mis en valeur dans des endroits, tels que des galeries, où sont conviés les membres de la presse mode (para 17);

·  Les marques HUNTER sont présentées sur les produits eux-mêmes ainsi que sur les factures lorsque les produits sont vendus au Canada (para 18 et pièce F, qui comprend des extraits du catalogue Automne 2010 de l’Opposante, de son guide commercial Printemps/été 2011 et de son site Web canadien);

·  Les articles chaussants HUNTER de l’Opposante ont capté l’attention des médias et du public grâce au patronage de la famille royale britannique et de plusieurs célébrités internationales bien connues (para 19 et 20; pièces G et H);

Aperçu de la preuve de la Requérante

Affidavit de Jens Poulsen

[16]  Dans son affidavit, M. Poulsen fournit un aperçu de l’entreprise de la Requérante ainsi que des renseignements sur l’emploi des marques DENIM HUNTER de la Requérante au Canada. Son affidavit peut être résumé comme suit :

·  M. Poulsen est le président-directeur général de la Requérante (para 1);

·  La Requérante [Traduction] « fait partie d’un groupe de mode multimarque et offre une gamme de produits constituée de vêtements pour hommes et femmes, y compris des couvre-chefs, des sacs, des ceintures et des accessoires »; DENIM HUNTER est l’une des marques de la Requérante (para 2);

·  La Requérante exploite un site Web en lien avec sa marque DENIM HUNTER au www.denim-hunter.com, lequel est accessible au Canada (para 6 et pièce B);

·  La marque DENIM HUNTER est axée sur les jeans pour femmes, mais comprend également d’autres catégories de vêtements pour femmes (para 8);

·  Une marque DENIM HUNTER, reproduite ci-dessous, est présente sur les étiquettes et étiquettes volantes des vêtements vendus par la Requérante (para 8 et pièce 8) :

·  Les vêtements de marque DENIM HUNTER sont vendus dans de nombreux pays, y compris le Canada (para 10);

·  La marque nominale DENIM HUNTER est présente dans l’ensemble du site Web de la Requérante (para 11 et pièce B);

·  À la date du 28 septembre 2015 (la date de production de la demande), la Requérante n’avait pas encore employé la Marque en liaison avec l’un quelconque des produits ou services offerts au Canada, mais en avait l’intention (para 13);

·  En 2017, la Requérante a commencé à employer une marque de commerce DENIM HUNTER au Canada en liaison avec des jeans, des chemisiers et des blouses pour femmes par l’intermédiaire de sa licenciée canadienne, DK Company Canada Inc. (para 14);

·  En date de 2017, un certain nombre de détaillants canadiens, dont La Baie d’Hudson, vendait des jeans de marque DENIM HUNTER (para 15 et pièce D);

·  Depuis 2017, les ventes en gros de vêtements de marque DENIM HUNTER au Canada se sont élevées à plus de 20 000 $ CA.

·  La Requérante fait la promotion de la marque DENIM HUNTER en ligne et dans les médias sociaux (para 19 et pièce E);

·  La Requérante fait également la promotion de la marque DENIM HUNTER dans des catalogues de mode et des bulletins d’information liés à la mode qui sont distribués aux détaillants et aux consommateurs finaux au Canada (para 20 et pièce F);

·  La marque DENIM HUNTER a été présentée à l’occasion de salons de la mode internationaux, y compris lors de l’événement décrit de la manière suivante [Traduction] : « 10 au 13 septembre – The Profile Show, Canada ».

Affidavit de Christoph Heinemann

[17]  M. Heinemann est un parajuriste à l’emploi de l’agent de marques de commerce de la Requérante. En août et en septembre 2017, M. Heinemann a effectué diverses recherches sur Internet en lien avec la présente procédure. Les résultats de ses recherches sont joints à son affidavit et comprennent ce qui suit :

·  Pièce A : des imprimés tirés du site Web de la Requérante, au www.dkcompany.dk;

·  Pièce C : des imprimés tirés du site Web DENIM HUNTER de la Requérante, au www.denim-hunter.com;

·  Pièce E : des imprimés des définitions de « denim » et de « hunter » [chasseur] tirés du site Web du dictionnaire Merriam-Webster, au www.merriam-webster.com;

·  Pièce F : des imprimés des résultats de la recherche de « Denim Hunter » effectuée sur le site Web de la Compagnie de la Baie d’Hudson, au www.thebay.com.

Affidavit de Jane Buckingham

[18]  Mme Buckingham est une recherchiste en marques de commerce à l’emploi de l’agent de marques de commerce de la Requérante (para 1). Le 14 août 2017, Mme Buckingham a effectué une recherche dans le registre canadien des marques de commerce via une base de données de tiers en utilisant les critères de recherche suivants :

Tous les enregistrements et demandes de marque de commerce canadiens actifs contenant l’élément *HUNTER*, employé seul ou en conjugaison avec d’autres mots ou éléments graphiques, en liaison avec des marchandises et services comprenant, et se rapportant à, des vêtements, des couvre-chefs et des articles chaussants. (para 3)

[19]  Les résultats de cette recherche ainsi qu’un tableau récapitulatif sont joints à son affidavit comme pièce A.

Fardeau de preuve

[20]  C’est à la Requérante qu’incombe le fardeau ultime de démontrer, selon la prépondérance des probabilités, que sa demande est conforme aux exigences de la Loi. L’Opposante doit cependant d’abord présenter une preuve admissible suffisante pour permettre de conclure raisonnablement à l’existence des faits allégués à l’appui de chacun des motifs d’opposition [John Labatt Ltd c Molson Cos, 1990 CarswellNat 1053, 30 CPR (3d) 293 (CF 1re inst, au para 11].

Dates pertinentes

[21]  Les dates pertinentes qui s’appliquent aux motifs d’opposition sont les suivantes :

·  articles 38(2)a)/30 en ce qui concerne la non-conformité à l’article 30 – la date de production de la demande, à savoir le 28 septembre 2015 [Georgia-Pacific Corp c Scott Paper Ltd 1984 CarswellNat 1107, 3 CPR (3d) 469 (COMC), au para 16];

·  articles 38(2)b)/12(1)b) en ce qui concerne le fait de donner une description claire ou une description fausse et trompeuse — la date de production de la demande [General Housewares Corp c Fiesta Barbeques Ltd, 2003 CF 1021, 28 CPR (4th) 60, au para 26];

·  articles 38(2)b)/12(1)d) en ce qui concerne la confusion avec une marque de commerce déposée — la date de la présente décision [Park Avenue Furniture Corporation c Wickes/Bedding Ltd et le Registraire des marques de commerce, 1991 CarswellNat 1119, 37 CPR (3d) 413 (CAF), au para 18];

·  articles 38(2)c)/16(3) en ce qui concerne le droit à l’enregistrement — la date de production de la demande [article 16(3) de la Loi];

·  articles 38(2)d)/2 en ce qui concerne l’absence de caractère distinctif – la date de production de la déclaration d’opposition, à savoir le 11 octobre 2016 [Metro-Goldwyn-Mayer Inc c Stargate Connections Inc, 2004 CF 1185, 34 CPR (4th) 317, au para 25].

Analyse

Article 30e) – Déclaration quant à l’intention d’employer la Marque

[22]  L’Opposante allègue que la demande n’est pas conforme aux exigences de l’articles 30e) de la Loi parce que, à la date de production de la demande, la Requérante n’avait pas l’intention d’employer la Marque au Canada en liaison avec les produits et services visés par la demande.

[23]  En l’espèce, la demande comprend une déclaration portant que la Requérante a l’intention d’employer la Marque au Canada, elle‑même et/ou par l’entremise d’un licencié; elle est donc conforme quant à la forme à l’article 30e) de la Loi dans sa version alors en vigueur. Par conséquent, la question est de savoir si la demande de la Requérante est conforme à l’article 30e) quant au fond, c.-à-d. si la déclaration de la Requérante portant qu’elle avait l’intention d’employer la Marque est véridique [Home Quarters Warehouse, Inc c Home Depot, USA, Inc, 1997 CarswellNat 2870, 76 CPR (3d) 219 (COMC), au para 7; Jacobs Suchard Ltd c Trebor Bassett Ltd, 1996 CarswellNat 3039, 69 CPR (3d) 569 (COMC), au para 7].

[24]  À cet égard, l’Opposante allègue en outre que la Requérante ne peut pas avoir eu l’intention d’employer la Marque au Canada parce que :

·  la Requérante devait forcément avoir connaissance de l’adoption et de l’emploi antérieurs par l’Opposante au Canada et ailleurs des Marques de l’Opposante et, par conséquent, ne peut pas avoir eu, de bonne foi, l’intention d’employer la Marque, laquelle crée de la confusion avec la famille de marques de commerce HUNTER de l’Opposante;

·  la Requérante n’avait pas l’intention d’employer la Marque en liaison avec l’ensemble des produits et services visés par la demande, mais plutôt en liaison avec seulement un ou quelques-uns des produits et/ou services visés par la demande;

·  la Requérante ne peut pas avoir eu, de bonne foi, l’intention d’employer la Marque en liaison avec un ou quelques-uns des produits et services visés par la demande à la date de production, car elle avait déjà employé la Marque en liaison avec ces produits et services.

[25]  L’Opposante n’a présenté aucun élément de preuve à l’appui de ce motif. Un opposant peut toutefois s’appuyer sur la preuve du requérant pour s’acquitter de son fardeau initial si l’opposant démontre que la preuve du requérant met en doute les revendications formulées dans la demande du requérant [voir Bacardi & Co c Corporativo de Marcas GJB, SA de CV, 2014 CF 323, aux para 30 à 38].

[26]  Dans son plaidoyer écrit, l’Opposante souligne que la preuve de la Requérante démontre que, en 2017, la Requérante a commencé a employé les marques de commerce DENIM HUNTER en liaison avec certains des produits visés par la demande au Canada; l’Opposante fait toutefois valoir que, puisque les marques DENIM HUNTER n’étaient pas la Marque visée par la demande, cela indique que la Requérante n’a jamais eu l’intention d’employer la Marque qui est visée par la demande (plaidoyer écrit de l’Opposante, paragraphe 117, renvoyant à l’affidavit Poulsen, paragraphe 14, pièces A à F).

[27]  Or, comme je l’ai souligné ci-dessus, la date pertinente pour l’examen des circonstances relatives à ce motif d’opposition est la date de la production de la demande, en l’espèce le 28 septembre 2015. De plus, dans son affidavit, M. Poulsen confirme que, à la date pertinente, la Propriétaire avait l’intention d’employer la Marque au Canada et qu’elle n’avait pas encore employé la Marque en liaison avec les produits et services visés par la demande (affidavit Poulsen, paragraphe 13). M. Poulsen n’a pas été contre-interrogé relativement à ces déclarations. En l’absence d’autres éléments de preuve ou d’aveux faits en contre-interrogatoire, je ne suis pas disposé à inférer, en me fondant simplement sur la preuve d’un certain emploi par la Requérante de marques de commerce apparentées après la date pertinente, que la déclaration de la Requérante faite au titre de l’article 30e) de la Loi n’était pas véridique.

[28]  À cet égard, j’ajouterai que la simple connaissance des droits antérieurs allégués par un opposant n’empêche pas un requérant de faire en toute honnêteté la déclaration exigée par l’article 30e) de la Loi.

[29]  En conséquence, le motif d’opposition fondé sur l’article 30e) est rejeté, car l’Opposante ne s’est pas acquittée de son fardeau de preuve.

Article 30i) — Déclaration quant au droit à l’emploi

[30]  L’Opposante allègue que la Requérante ne pouvait pas être convaincue d’avoir droit d’employer la Marque au Canada compte tenu, entre autres choses, de l’existence de la famille de marques de commerce HUNTER de l’Opposante et de son emploi antérieur au Canada.

[31]  L’article 30i) de la Loi, dans sa version alors en vigueur, exigeait simplement que le requérant inclue dans sa demande une déclaration portant qu’il est convaincu d’avoir droit d’employer sa marque de commerce au Canada en liaison avec les produits ou services décrits dans la demande. Lorsque le requérant a fourni cette déclaration, un motif d’opposition fondé sur l’article 30i) ne devrait être accueilli que dans des cas exceptionnels, comme lorsqu’il existe une preuve que le requérant est de mauvaise foi [Sapodilla Co Ltd c Bristol Myers Co 1974 CarswellNat 476, 15 CPR (2d) 152 (COMC), aux para 8 à 10]. La simple connaissance de l’existence de la marque de commerce d’un opposant ne peut pas en soi servir de fondement à une allégation portant que le requérant ne pouvait pas être convaincu d’avoir droit d’employer sa marque de commerce [Woot, Inc c WootRestaruants Inc 2012 COMC 197, au para 10].

[32]  La demande pour la Marque contient la déclaration exigée par l’article 30i) de la Loi, dans sa version alors en vigueur, et il n’y a aucune preuve que la présente espèce est un cas exceptionnel. En conséquence, ce motif d’opposition est rejeté.

Article 12(1)b) — Description claire ou description fausse et trompeuse

[33]  L’Opposante allègue que la Marque n’est pas enregistrable parce qu’elle donne une description claire ou une description fausse et trompeuse de l’ensemble des produits et services visés par la demande. À cet égard, elle allègue que le denim est un type de tissu et que, par conséquent, la marque de commerce donne une description claire ou une description fausse et trompeuse de la nature ou de la qualité des produits et services visés par la demande.

[34]  Comme je l’ai souligné ci-dessus, la date pertinente qui s’applique à ce motif d’opposition est la date de production de la demande. Bien que ce soit au requérant qu’incombe le fardeau ultime de démontrer que sa marque de commerce est enregistrable, l’opposant a, à l’égard de ce motif, le fardeau de preuve initial de présenter une preuve admissible suffisante qui, si on y ajoute foi, corroborerait la véracité de ses allégations portant que la marque de commerce visée par la demande donne une description claire ou une description fausse et trompeuse de la nature ou de la qualité des produits et services du requérant [article 12(1)b) de la Loi].

[35]  L’interdiction prévue à l’article 12(1)b) de la Loi a pour but d’empêcher un commerçant unique de monopoliser un terme qui donne une description claire ou qui est usuel dans le commerce et de placer ainsi des commerçants légitimes dans une position désavantageuse [Canadian Parking Equipment c Canada (Registraire des marques de commerce), 1990 CarswellNat 834, 34 CPR (3d) 154 (CF 1re inst), au para 14; e-Funds Ltd c Toronto Dominion Bank, 2007 CarswellNat 2283, 61 CPR (4th) 475 (COMC), au para 15].

[36]  La question de savoir si une marque de commerce donne une description claire ou une description fausse et trompeuse doit être envisagée du point de vue de l’acheteur moyen des produits et services liés à la marque de commerce. Le mot « nature » s’entend d’une particularité, d’un trait ou d’une caractéristique des produits et le mot « claire » signifie [Traduction] « facile à comprendre, évident ou simple » [Drackett Co of Canada Ltd c American Home Products Corp 1968 CarswellNat 9, 55 CPR 29 (C de l’Éch du Can), au para 22]. La marque ne doit pas être analysée avec un soin méticuleux; elle doit plutôt être considérée dans son ensemble sous l’angle de la première impression [Wool Bureau of Canada Ltd c Canada (Registraire des marques de commerce), 1978 CarswellNat 699, 40 CPR (2d) 25 (CF 1re inst), au para 7]. En d’autres termes, la marque de commerce ne doit pas être considérée isolément, mais plutôt dans son contexte complet et en lien avec les produits et services en cause [Conseil du régime de retraite des enseignantes et des enseignants de l’Ontario c Canada (Procureur général) 2012 CAF 60, au para 29]. Enfin, il faut user de bon sens lorsqu’il s’agit de juger du caractère descriptif [Neptune SA c Canada (Procureur général), 2003 CFPI, 29 CPR (4th) 497 (CF 1re inst), au para 11].

[37]  Pour qu’une marque de commerce soit considérée comme donnant une description fausse et trompeuse, elle doit tromper le public quant à la nature ou à la qualité des produits et services. Il doit être déterminé que la marque de commerce donne une description portant à croire que les produits ou services ont une nature donnée ou un contenu donné alors que ce n’est pas le cas. L’interdiction concernant les marques de commerce donnant une description fausse et trompeuse a pour but d’empêcher que le public soit trompé [Atlantic Promotions Inc c Canada (Registraire des marques de commerce), 1984 CarswellNat 831, 2 CPR (3d) 183 (CF 1re inst), au para 18; et Provenzano c Canada (Registraire des marques de commerce), 1977 CarswellNat 676, 37 CPR (2d) 189 (CF 1re inst), aux para 2 à 4].

[38]  La preuve de l’Opposante en ce qui concerne ce motif se limite au paragraphe 22 de l’affidavit de Mme Hardigg [Traduction] :

Mon expérience professionnelle dans l’industrie de la mode m’a amenée à m’attendre que les produits commercialisés comme étant du DENIM soient principalement composés de ce tissu. J’aurais tendance à penser cependant que bon nombre des produits visés par la demande pour [DENIM HUNTER & Dessin] ne sont pas principalement constitués de denim.

[39]  Cette allégation n’est pas, par ailleurs, étayée par la preuve de l’Opposante.

[40]  L’Opposante soutient en outre ce qui suit aux paragraphes 113 et 114 de son plaidoyer écrit [Traduction] :

113. La Marque de la Requérante, [DENIM HUNTER & Dessin], doit être considérée comme suggérant que les produits en liaison avec lesquels la Requérante souhaite obtenir un enregistrement sont faits de denim ou en contiennent. Le denim étant un type précis de tissu courant dans l’industrie du vêtement, le terme DENIM se rapporte à la composition des produits et donne une description fausse et erronée de la composition matérielle des produits.

114. Bon nombre des produits de la Requérante ne contiennent pas de denim et sont plutôt faits d’un autre type de tissu. Par conséquent, [la Marque] doit être considérée comme donnant une description fausse et trompeuse de la majorité des produits en liaison avec lesquels la Requérante allègue avoir l’intention de l’employer.

[41]  Compte tenu des observations de l’Opposante, la question en l’espèce est de savoir si la Marque visée par la demande donne une description fausse et trompeuse.

[42]  Dans son plaidoyer écrit, la Requérante soutient que l’Opposante n’a fourni aucune preuve que la Marque visée par la demande donne une description claire ou une description fausse et trompeuse des produits et services visés par la demande, et que l’Opposante ne s’est donc pas acquittée de son fardeau de preuve initial (para 55).

[43]  En tout état de cause, la Requérante soutient que la Marque n’est pas opposable au titre de l’article 12(1)b) de la Loi. À cet égard, elle soutient ce qui suit :

·  la Marque est une marque de commerce inventée et unique;

·  elle n’indique rien de précis quant à la nature ou à la composition intrinsèque des produits et services visés par la demande;

·  elle n’a aucune signification qui soit compréhensible d’emblée;

·  la combinaison des mots DENIM et HUNTER ne fait pas partie du vocabulaire courant et constitue, de ce fait, une construction linguistique nouvelle. (para 57)

[44]  En effet, j’estime que, lorsqu’on considère la marque de commerce dans son ensemble et qu’on tient compte des définitions de « denim » et de « hunter » [chasseur] fournies par la Requérante (affidavit Heinemann, pièce E), le terme DENIM HUNTER suggère [Traduction] « une personne qui chasse vêtue de denim » ou « une personne qui est à la recherche de denim ». Par conséquent, la marque ne donne pas une description claire des produits et services visés par la demande; en outre, je ne considère pas que le consommateur moyen serait trompé si les produits vendus en liaison avec la Marque n’étaient pas faits de denim. Il s’ensuit que la Marque ne donne pas non plus une description fausse et trompeuse des services visés par la demande, c’est-à-dire la [Traduction] « gestion des affaires pour des tiers » et « l’administration des affaires relativement à la conception, à la production, à la vente et au marketing de vêtements et de produits connexes pour des tiers », même si ces produits sont offerts en lien avec des produits qui ne sont pas faits de denim.

[45]  En conséquence, le motif d’opposition fondé sur l’article 12(1)b) est rejeté.

Article 12(1)d) — Confusion avec une marque de commerce déposée

[46]  L’Opposante allègue que la Marque n’est pas enregistrable parce qu’elle crée de la confusion avec les marques de commerce faisant l’objet des enregistrements nos LMC818,090 (HUNTER), LMC820,401 (HUNTER Logo) et LMC894,920 (H CREST DESSIN) (dont les détails sont présentés à l’annexe A de la présente décision). J’ai exercé mon pouvoir discrétionnaire de consulter le registre et je confirme que ces enregistrements existent bel et bien [Quaker Oats Co of Canada c Menu Foods Ltd (1986), 11 CPR (3d) 410 (COMC)]. Comme je l’ai souligné ci-dessus, la date pertinente qui s’applique en ce qui concerne la question de la confusion avec une marque de commerce déposée est la date de la présente décision [Park Avenue Furniture Corporation c Wickes/Bedding Ltd et le Registraire des marques de commerce, 1991 CarswellNat 1119, 37 CPR (3d) 413 (CAF), au para 18];

Test en matière de confusion

[47]  Le test à appliquer pour trancher la question de la confusion est énoncé à l’article 6(2) de la Loi, qui prévoit que l’emploi d’une marque de commerce crée de la confusion avec une autre marque de commerce lorsque l’emploi des deux marques de commerce dans la même région serait susceptible de faire conclure que les produits liés à ces marques de commerce sont fabriqués, vendus, donnés à bail ou loués, ou que les services liés à ces marques sont loués ou exécutés, par la même personne, que ces produits ou services soient ou non de la même catégorie générale ou figurent ou non dans la même classe de la classification de Nice.

[48]  Aux fins de cette évaluation, je dois tenir compte de toutes les circonstances pertinentes de l’espèce, y compris celles énoncées à l’article 6(5) : le caractère distinctif inhérent des marques de commerce et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues; la période pendant laquelle les marques de commerce ont été en usage; le genre de produits, services ou entreprises; la nature du commerce; et le degré de ressemblance entre les marques de commerce dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’elles suggèrent.

[49]  Les critères énoncés à l’article 6(5) de la Loi ne forment pas une liste exhaustive et le poids qu’il convient d’accorder à chacun d’eux varie en fonction du contexte propre à chaque affaire [Mattel, Inc c 3894207 Canada Inc, 2006 CSC 22, 1 RCS 772, au para 54]. Je m’appuie également sur l’arrêt Masterpiece Inc c Alavida Lifestyles Inc, 2011 CSC 27, 92 CPR (4th) 361 (CSC), dans lequel la Cour suprême du Canada a indiqué, au para 49, que le critère énoncé à l’article 6(5)e), la ressemblance entre les marques, est souvent celui qui revêt le plus d’importance dans l’analyse relative à la confusion.

[50]  En l’espèce, j’axerai mon analyse sur les marques de commerce déposées HUNTER et HUNTER Logo de l’Opposante (les Marques HUNTER), car ces deux marques présentent une plus grande ressemblance avec la Marque visée par la demande que la marque H CREST DESSIN; en dehors de la lettre « H », je ne vois aucune ressemblance entre la Marque et la marque H CREST DESSIN, y compris en ce qui concerne leurs éléments graphiques.

[51]  La marque de commerce HUNTER Logo est reproduite ci-dessous :

HUNTER Logo

Caractère distinctif inhérent et mesure dans laquelle les marques sont devenues connues

[52]  En ce qui concerne leur caractère distinctif inhérent, la Marque et les Marques HUNTER de la Requérante comprennent toutes l’élément HUNTER [chasseur], lequel pourrait être perçu comme le mot ordinaire du dictionnaire ou comme un nom de famille. Comme le soutient la Requérante, le mot HUNTER [chasseur] est passablement suggestif des utilisations prévues de certains des produits de l’Opposante (tels que les articles chaussants imperméables et les bottes de caoutchouc) qui sont utilisés lors de la chasse et lors [Traduction] « d’activités de plein air » [plaidoyer écrit de la Requérante, para 66].

[53]  En ce qui concerne la Marque, même si j’ai conclu ci-dessus que la Marque dans son ensemble ne donne pas une description claire, je considère que l’élément DENIM possède un faible degré de caractère distinctif inhérent en liaison avec les produits et services liés aux vêtements qui sont visés par la demande. En outre, l’élément graphique est relativement petit par rapport aux mots DENIM et HUNTER [chasseur].

[54]  En ce qui concerne la mesure dans laquelle les marques sont devenues connues au Canada, l’Opposante a établi l’emploi de ses Marques HUNTER au Canada depuis 2006 ainsi que des ventes s’élevant à plus de 77 millions $ CA. Même si la Requérante soutient que cet emploi est [Traduction] « essentiellement limité à un emploi en liaison avec des “bottes de caoutchouc pour l’extérieur de style Wellington” » (plaidoyer écrit de la Requérante, para 69), l’affidavit de Mme Hardigg contient des éléments de preuve indiquant que les Marques HUNTER sont employées au Canada en liaison avec des vestes, des chaussettes, des sacs et des parapluies depuis au moins 2010 (pièce F).

[55]  La preuve de la Requérante montre qu’elle emploie sa marque DENIM HUNTER au Canada depuis 2017 seulement. Ses ventes ne sont pas aussi considérables et il semblerait même qu’elles aient été réalisées en liaison uniquement avec la marque nominale et une variante de la Marque, reproduite ci-dessus, et non en liaison avec la Marque visée par la demande elle-même.

[56]  En somme, même si la Marque peut posséder un caractère distinctif inhérent passablement plus important que celui des Marques HUNTER de l’Opposante, la preuve appuie la conclusion que les Marques HUNTER sont devenues connues dans une bien plus grande mesure que la Marque au Canada. Par conséquent, ce facteur favorise l’Opposante.

Période pendant laquelle les marques de commerce ont été en usage

[57]  Ce facteur favorise l’Opposante, car ses Marques HUNTER sont employées au Canada depuis au moins 2006, alors que la Requérante n’a produit aucune preuve de l’emploi de la Marque au Canada. Là encore, la preuve minime d’un emploi par la Requérante concerne la marque nominale DENIM HUNTER ou une variante figurative, et non la Marque visée par la demande.

Genre des produits, services ou entreprises

[58]  Dans son plaidoyer écrit, la Requérante tente d’établir une distinction entre ses produits et services et ceux de l’Opposante, en insistant sur le fait que les produits et services de l’Opposante se rapportent principalement à des [Traduction] « articles chaussants imperméables et des bottes de caoutchouc ainsi que d’autres articles apparentés destinés à être portés lorsqu’il pleut ou dans des conditions [météorologiques] similaires ». Elle soutient, en revanche, que les produits et services de la Requérante [Traduction] « se rapportent à des vêtements et des accessoires de mode, tels que des jeans, des chemisiers, des tee-shirts, des jupes, des robes, des tricots et des cardigans ».

[59]  Cependant, lorsqu’il s’agit de déterminer le genre des produits et des services des parties au regard de la question de la confusion, ce sont les états déclaratifs des produits et services figurant dans la demande et dans les enregistrements en cause qui prévalent [Mr Submarine Ltd c Amandista Investments Ltd, 1987 CarswellNat 749, 19 CPR (3d) 3 (CAF); Miss Universe Inc c Bohna (1994), 58 CPR (3d) 381 (CAF), aux para 24 et 25].

[60]  En l’espèce, les produits des parties se recoupent directement (p. ex. articles chaussants et manteaux/vestes) ou sont des produits étroitement apparentés (p. ex. accessoires de mode tels que sacs, ceintures et parapluies) qui seraient susceptibles d’être vendus dans les mêmes types de magasins et d’être destinés aux mêmes types de consommateurs.

[61]  En ce qui concerne les services visés par la demande, les parties exercent, de façon générale, leurs activités commerciales dans le même secteur, et le flou qui entoure la portée des services de [Traduction] « gestion des affaires » de la Requérante — p. ex. à savoir s’ils sont ou non apparentés à ses activités commerciales établies dans l’industrie du vêtement — nuit à la capacité de la Requérante de s’acquitter de son fardeau de preuve.

[62]  Par conséquent, ce facteur favorise l’Opposante.

Nature du commerce

[63]  Aucune restriction quant aux voies de commercialisation n’est spécifiée dans les états déclaratifs des produits et services respectifs et, en tout état de cause, la preuve démontre que les produits de l’Opposante et les produits de la Requérante sont vendus par des voies de commercialisation identiques, c’est-à-dire par l’intermédiaire de La Baie d’Hudson au Canada [voir, par exemple, l’affidavit Hardigg, aux para 12 et 16; et l’affidavit Poulsen, au para 15].

[64]  Par conséquent, ce facteur favorise l’Opposante.

Degré de ressemblance

[65]  Comme je l’ai mentionné ci-dessus, le degré de ressemblance entre les marques des parties est souvent le facteur prévu par la Loi susceptible d’avoir le plus d’importance lorsqu’il s’agit de trancher la question de la confusion. Cela est d’autant plus vrai lorsque les produits ou services des parties et les voies de commercialisation des parties sont les mêmes ou se recoupent comme en l’espèce [voir Reynolds Consumer Products Inc c PRS Mediterranean Ltd. 2013 CAF 119, 111 CPR (4th) 155, aux para 26 à 30].

[66]  Même si la première partie de la Marque est DENIM, j’estime qu’il existe une ressemblance significative entre la Marque et les marques de commerce HUNTER et HUNTER logo de l’Opposante dans la présentation et dans le son. À cet égard, la Marque incorpore la totalité de la marque HUNTER de l’Opposante.

[67]  Habituellement, la première partie d’une marque est celle qui revêt le plus d’importance lorsqu’il s’agit de distinguer des marques entre elles [Conde Nast Publications Inc c Union Des Éditions Modernes, 1979 CarswellNat 785, 46 CPR (2d) 183, au para 34 (CF 1re inst)]. Cependant, lorsque la première partie d’une marque est un mot descriptif courant, son importance s’en trouve diminuée [Vancouver Sushiman Ltd c Sushiboy Foods Co, 2002 CarswellNat 4233, 22 CPR (4th) 107 (COMC), au para 26]. En l’espèce, l’ajout de DENIM ne réduit pas de manière significative la ressemblance entre la Marque et les Marques HUNTER de l’Opposante, car DENIM est suggestif des produits en cause. En effet, la Requérante soutient que [Traduction] « il est fréquent que le propriétaire d’une marque emploie des marques liées pour commercialiser les mêmes produits ou des produits apparentés ». En conséquence, la Requérante fait valoir que [Traduction] « il existe une forte probabilité qu’un acheteur potentiel croit que des vêtements vendus sous [la Marque] appartiennent simplement à une autre gamme de vêtements offerte par l’Opposante, par exemple une gamme faite de denim » (para 91).

[68]  Par conséquent, ce facteur favorise l’Opposante.

Circonstances de l’espèce : état du registre

[69]  La preuve de l’état du registre n’est pertinente que dans la mesure où l’on peut en tirer des inférences quant à l’état du marché [voir Ports International Ltd c Dunlop Ltd, 1992 CarswellNat 1431, 41 CPR (3d) 432 (COMC), au para 10; et Welch Foods Inc c Del Monte Corp, 1992 CarswellNat 178, 44 CPR (3d) 205 (CF 1re inst), aux para 7 à 10]. Des inférences quant à l’état du marché peuvent seulement être tirées de la preuve de l’état du registre lorsqu’un grand nombre d’enregistrements pertinents est repéré [voir Maximum Nutrition Ltd c Kellogg Salada Canada Inc, 1992 CarswellNat 124, 43 CPR (3d) 349 (CAF)].

[70]  La Requérante soutient que [Traduction] « le registre regorge d’exemples de tiers qui emploient le mot HUNTER [chasseur] » (para 96), citant l’affidavit Buckingham qui répertorie 50 demandes et enregistrements de marque de commerce canadiens contenant l’élément HUNTER [chasseur] en liaison avec des vêtements, des couvre-chefs et des articles chaussants. Bien que bon nombre de ces marques ne soient pas enregistrées et puissent, de ce fait, être écartées, la Requérante attire l’attention en particulier sur les enregistrements des marques de commerce HUNTER’S BAY, THE CROCODILE HUNTER, GHOST HUNTERS, MOUNTAIN HUNTER et BARGAIN HUNTER (plaidoyer écrit de la Requérante, para 103).

[71]  Or, je conviens avec l’Opposante que, en l’absence d’une preuve d’emploi par des tiers, les marques déposées pertinentes sont trop peu nombreuses pour qu’on puisse en tirer quelque inférence que ce soit quant à l’état du marché canadien. En tout état de cause, compte tenu du faible caractère distinctif inhérent de l’élément DENIM, j’estime que la ressemblance entre la Marque et les Marques HUNTER est plus grande que la ressemblance entre l’une quelconque des marques visées par les enregistrements de tiers mentionnés ci-dessus et les Marques HUNTER.

Conclusion

[72]  Après examen de l’ensemble des circonstances de l’espèce, j’estime que la Requérante ne s’est pas acquittée de son fardeau ultime à l’égard des produits et services visés par la demande. J’arrive à cette conclusion en raison de la ressemblance entre les marques de commerce et compte tenu, en particulier, du recoupement dans le genre des produits, services et entreprises des parties et dans la nature du commerce des parties.

[73]  En conséquence, le motif d’opposition fondé sur l’article 12(1)d) est accueilli à l’égard de l’ensemble des produits et services visés par la demande.

Article 16 — Droit à l’enregistrement

[74]  L’Opposante allègue, entre autres choses, que la Marque n’est pas enregistrable parce qu’elle crée de la confusion avec la marque de commerce HUNTER Dessin visée par la demande d’enregistrement no 1,669,127 antérieurement produite au Canada par l’Opposante (et dont les détails sont présentés à l’annexe A de la présente décision). Comme je l’ai souligné ci-dessus, la date pertinente qui s’applique à ce motif d’opposition est la date de production de la demande de la Requérante.

[75]  L’Opposante s’acquitte de son fardeau de preuve, car sa demande pour la marque de commerce HUNTER Dessin a été produite le 20 mars 2014 (avant la demande pour la Marque, qui a été produite le 28 septembre 2015) et était en instance à la date d’annonce de la demande pour la Marque.

[76]  Pour l’essentiel, les considérations qui s’appliquent au regard de la question de la confusion sont les mêmes que celles mentionnées ci-dessus — en particulier la ressemblance entre les marques des parties — et le résultat est le même. En fait, je souligne que la demande de l’Opposante vise un plus large éventail de produits et services, de sorte que le recoupement entre les produits et services de la Requérante et ceux de l’Opposante est plus important encore.

[77]  En conséquence, le motif d’opposition fondé sur l’article 16(3)b) est accueilli.

Autres motifs d’opposition

[78]  Compte tenu de ce qui précède et considérant que l’Opposante a obtenu gain de cause sur le fondement de deux motifs d’opposition, il n’est pas nécessaire que j’examine les motifs d’opposition restants, qui comprennent d’autres motifs fondés sur l’article 16 de la Loi (droit à l’enregistrement) ainsi que sur l’article 2 de la Loi (absence de caractère distinctif).

Décision

[79]  Compte tenu de ce qui précède, dans l’exercice des pouvoirs qui m’ont été délégués en vertu des dispositions de l’article 63(3) de la Loi, je repousse la demande d’enregistrement conformément aux dispositions de l’article 38(12) de la Loi.

 

Andrew Bene

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

Traduction certifiée conforme

Judith Lemire, trad.

 


Annexe A

Annexe A : Marques de l’Opposante

Marque de commerce

No et date d’enregistrement

Produits et Services
[Traduction]

HUNTER

LMC818,090

2012-02-22

Produits : (1) Bottes imperméables et bottes en caoutchouc.

(2) Vêtements et vêtements imperméables, nommément chapeaux, manteaux, doublures de botte, sabots imperméables, couvre-chefs, nommément chapeaux; articles chaussants, nommément bottes et chaussures; pièces de bottes et de chaussures, accessoires pour bottes et chaussures, couvre-chefs imperméables, nommément chapeaux.

 

H CREST DESIGN

LMC894,920

2015-01-23

Produits : (1) Bottes et chaussures.

(2) Chaussettes, bottes.

HUNTER Logo

LMC820, 401

2012-03-21

Produits : (1) Articles chaussants imperméables.

(2) Articles chaussants imperméables; cirages à chaussures, à bottes et à articles chaussants; crème à bottes, cire à bottes; crème à chaussures, cire à chaussures; parapluies; sacs de voyage; bagages; sacs pour bottes et articles chaussants; produits de nettoyage pour chaussures, bottes et articles chaussants; étaux-supports pour bottes et chaussures; chiffons pour le nettoyage des bottes et des chaussures; articles pour le nettoyage, nommément chiffons de nettoyage pour chaussures et bottes; sacs et pochettes pour le transport des bottes et des chaussures; bottes; doublures pour bottes; couvre-chefs, nommément chapeaux et petits bonnets; accessoires vestimentaires, nommément gants et gants d’extérieur, foulards; couvre-chaussures; jarretelles; manteaux, vestes, imperméables, pardessus, trench-coats et chaussettes.

 

Services : Services de vente au détail, nommément vente des articles suivants : cirages à chaussures, à bottes et à articles chaussants, crème à bottes, cire à bottes, crème à chaussures, cire à chaussures, produits de nettoyage pour chaussures, bottes et articles chaussants, parapluies, sacs de voyage, bagages, sacs pour bottes et articles chaussants, sacs et pochettes pour le transport des bottes et des chaussures, étaux-supports pour bottes et chaussures, chiffons pour le nettoyage des bottes et des chaussures, bottes, doublures pour bottes, couvre-chefs, nommément chapeaux et petits bonnets, accessoires vestimentaires, nommément gants et gants d’extérieur, foulards, couvre-chaussures, jarretelles, articles chaussants imperméables, manteaux, vestes, imperméables, pardessus, trench-coats et chaussettes.

HUNTER Design

LMC981,604 (demande no 1,669,127)

2017-09-27

 

Produits :

(1) Bottes Wellington; bottes imperméables; chaussures imperméables et sandales imperméables.

(2) Bottes.

(3) Sabots imperméables; doublures pour bottes et chaussures; chaussettes pour utilisation avec des bottes Wellington et des bottes imperméables; couvre-chaussures.

(4) Parapluies; sacs et pochettes pour le transport des bottes et des chaussures; tongs; gants; foulards; jarretelles; imperméables, anoraks imperméables, ponchos imperméables, cagoules imperméables, capes imperméables, pantalons imperméables et chapeaux imperméables; chaussettes; chapeaux.

(5) Cirages à chaussures, à bottes et à articles chaussants; crème à bottes, cire à bottes; crème à chaussures, cire à chaussures; produits de nettoyage pour chaussures, bottes et articles chaussants.

(6) Chaussures; chaussures faites de caoutchouc, de cuir et d’autres matériaux, nommément plastique, vinyle, toile et tissu.

(7) Sandales; vestes imperméables; vestes.

(8) Sacs à dos; havresacs; sacs pour bottes et articles chaussants; sacs et pochettes; semelles intérieures pour bottes et chaussures; semelles intérieures; mitaines.

(9) Produits de nettoyage, de polissage, de récurage et produits abrasifs.

(10) Parapluies; sacs et pochettes pour le transport des bottes et des chaussures; sacs à dos; havresacs; sacs pour bottes et articles chaussants; sacs et pochettes; sacs de voyage; valises; sacs pour le voyage; sacs fourre-tout; sacs à main; bretelles de tir et sacs à cartouches; bottes Wellington; bottes imperméables; chaussures imperméables et sandales imperméables; bottes; chaussures; chaussures faites de caoutchouc, de cuir et d’autres matières, nommément plastique, vinyle, toile et de tissu; sandales; tongs; sabots imperméables; semelles intérieures pour bottes et chaussures; semelles intérieures; doublures pour bottes et chaussures; chaussettes pour utilisation avec des bottes Wellington et des bottes imperméables; gants; mitaines; foulards; jarretelles; imperméables, anoraks imperméables, ponchos imperméables, cagoules imperméables, capes imperméables, pantalons imperméables et chapeaux imperméables; vestes imperméables; vestes; chaussettes; chapeaux; couvre-chaussures; vêtements d’extérieur; vêtements de plein air; manteaux; pardessus; imperméables.

(11) Cuir et similicuir; portefeuilles; bourses; gilets; étuis protecteurs pour téléphones mobiles.

 

Services :

(1) Services de vente au détail en ligne liés à la vente de ce qui suit : cirages à chaussures, à bottes et à articles chaussants, crème à bottes, cire à bottes, crème à chaussures, cire à chaussures, produits de nettoyage pour chaussures, bottes et articles chaussants; services de vente au détail en ligne liés à la vente de ce qui suit : bottes imperméables, bottes, chaussures, doublures pour bottes et chaussures, chaussettes pour utilisation avec des bottes Wellington et des bottes imperméables, parapluies, sacs.

(2) Services de vente en gros liés à la vente de bottes Wellington, de bottes imperméables et d’articles chaussants imperméables.

(3) Services de vente en gros liés à la vente de bottes.

(4) Services de vente en gros liés à la vente de ce qui suit : sabots imperméables, doublures pour bottes et chaussures, chaussettes pour utilisation avec des bottes Wellington et des bottes imperméables, couvre-chaussures.

(5) Services de vente en gros liés à la vente de ce qui suit : parapluies, sacs et pochettes pour le transport des bottes et des chaussures, tongs, gants, foulards, jarretelles, vêtements imperméables, chaussettes, chapeaux.

(6) Services de vente en gros liés à la vente de ce qui suit : cirages à chaussures, à bottes et à articles chaussants, crème à bottes, cire à bottes, crème à chaussures, cire à chaussures, produits de nettoyage pour chaussures, bottes et articles chaussants; services de vente en gros liés à la vente de ce qui suit : sacs à dos, havresacs, sacs pour bottes et articles chaussants, sacs et pochettes, semelles intérieures pour bottes et chaussures, semelles intérieures, mitaines.

(7) Services de vente en gros liés à la vente de chaussures et de chaussures faites de caoutchouc, de cuir et d’autres matières.

(8) Services de vente en gros liés à la vente de sandales, de vestes imperméables et de vestes.

(9) Services de vente au détail, de vente en gros, de vente au détail en ligne et de vente en gros en ligne liés à la vente de ce qui suit : étuis pour téléphones mobiles, cuir et similicuir, portefeuilles, bourses, gilets.

(10) Services de vente au détail, de vente en gros, de vente au détail en ligne et de vente en gros en ligne liés à la vente de ce qui suit : cirages à chaussures, à bottes et à articles chaussants, crème à bottes, cire à bottes, crème à chaussures, cire à chaussures, produits de nettoyage pour chaussures, bottes et articles chaussants; services de vente au détail, de vente en gros, de vente au détail en ligne et de vente en gros en ligne liés à la vente de ce qui suit : sacs de voyage, parapluies, valises, sacs pour le voyage, sacs fourre-tout, sacs à main, sacs à dos, havresacs, bretelles de tir et sacs à cartouches, sacs pour bottes et articles chaussants, sacs et pochettes, sacs et pochettes pour le transport des bottes et des chaussures, flacons de poche, flacons, flacons isothermes, étaux-supports pour bottes et chaussures, chiffons pour le nettoyage des bottes et des chaussures, bottes, bottes Wellington, bottes imperméables, articles chaussants imperméables, couvre-chaussures, sabots imperméables, chaussures, chaussures faites de caoutchouc, de cuir et d’autres matériaux, sandales, tongs, semelles intérieures, semelles intérieures pour bottes et chaussures, doublures pour bottes et chaussures, chaussettes pour utilisation avec des bottes Wellington et des bottes imperméables, chaussettes, chapeaux, gants, mitaines, foulards, jarretelles, vêtements imperméables, vêtements d’extérieur, vêtements de plein air, vestes, manteaux, pardessus, imperméables.

 

 

COMMISSION DES OPPOSITIONS DES MARQUES DE COMMERCE

OFFICE DE LA PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE DU CANADA

COMPARUTIONS ET AGENTS INSCRITS AU DOSSIER

___________________________________________________

Aucune audience tenue

AGENT(S) AU DOSSIER

Grant W. Lynds (Marks & Clerk)

POUR L’OPPOSANTE

Gowling WLG (Canada) LLP

POUR LA REQUÉRANTE

 

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