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LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

Référence : 2019 COMC 61

Date de la décision : 2019-06-28

[TRADUCTION CERTIFIÉE

NON RÉVISÉE]

DANS L’AFFAIRE DE LA PROCÉDURE DE RADIATION EN VERTU DE L’ARTICLE 45

 

Osler, Hoskin & Harcourt LLP

Partie requérante

et

 

Toronto Standard Condominium Corporation No. 1864

Propriétaire inscrite

 

LMC591,399 pour la marque de commerce SPIRE

Enregistrement

Introduction

[1]  Le 21 juillet 2017, à la demande d’Osler, Hoskin & Harcourt (la Partie requérante), le registraire des marques de commerce a donné l’avis prévu à l’article 45 de la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, ch T-13 (la Loi) à Toronto Standard Condominium Corporation No. 1864 (la Propriétaire), la propriétaire inscrite de l’enregistrement no LMC591,399 de la marque de commerce SPIRE (la Marque).

[2]  La Marque est enregistrée pour emploi en liaison avec les services suivants [Traduction] :

Construction et exploitation d’un immeuble de condominiums et ventes de condominiums.

[3]  L’avis enjoignait à la Propriétaire d’indiquer, à l’égard de chacun des services spécifiés dans l’enregistrement, si la marque de commerce a été employée au Canada à un moment quelconque au cours des trois années précédant immédiatement la date de l’avis et, dans la négative, qu’elle précise la date à laquelle la marque a ainsi été employée en dernier lieu et la raison de son défaut d’emploi depuis cette date. En l’espèce, la période pertinente pour établir l’emploi s’étend du 21 juillet 2014 au 21 juillet 2017.

[4]  La définition pertinente d’« emploi » en liaison avec des services est énoncée à l’article 4 de la Loi, lequel est libellé comme suit :

4(2) Une marque de commerce est réputée employée en liaison avec des services si elle est employée ou montrée dans l’exécution ou l’annonce de ces services.

[5]  Il est bien établi que l’article 45 de la Loi a pour objet et portée d’offrir une procédure simple, sommaire et expéditive pour débarrasser le registre du « bois mort ». À ce titre, le niveau de preuve auquel le propriétaire inscrit doit satisfaire est peu élevé [Performance Apparel Corp c Uvex Toko Canada Ltd, 2004 CF 448]. Un propriétaire inscrit doit seulement présenter une preuve prima facie d’emploi au sens des articles 4 et 45 de la Loi [voir Diamant Elinor Inc c 88766 Canada Inc, 2010 CF 1184, au para 2]. Lorsqu’il s’agit de services, la présentation de la marque de commerce dans l’annonce des services est suffisante pour satisfaire aux exigences de l’article 4(2) de la Loi, du moment que le propriétaire de la marque de commerce offre et est prêt à exécuter les services au Canada [Wenward (Canada) Ltd c Dynaturf Co (1976), 28 CPR (2d) 20 (COMC)].

[6]  Le 18 octobre 2017, la Propriétaire a produit l’affidavit de Susan Watts, une administratrice de la Propriétaire, souscrit le 16 octobre 2017, ainsi que l’affidavit de Yehudi L. Hendler, le président et l’un des administrateurs de Y.L. Hendler Ltd, également souscrit le 16 octobre 2017. Seule la Propriétaire a produit des représentations écrites. Aucune des parties n’a sollicité la tenue d’une audience.

La preuve de la Propriétaire

Affidavit Watts

[7]  Mme Watts atteste que la Propriétaire est la propriétaire inscrite des [Traduction] « éléments communs » de la propriété condominiale située au 33, Lombard Street, à Toronto, qu’elle désigne comme [Traduction] « la Propriété ». Elle précise que les éléments communs comprennent des éléments tels que les couloirs, les voies d’accès à la propriété et les ascenseurs.

[8]  Mme Watts allègue que la Propriétaire [Traduction] « emploie la Marque en liaison avec la construction et l’exploitation d’un immeuble de condominiums et la vente de condominiums au Canada » et a acquis, ce faisant, une notoriété significative.

[9]  Mme Watts explique la Propriété est gérée au bénéfice de la Propriétaire et des propriétaires de condominiums individuels par YL Hendler Ltd., qu’elle désigne comme [Traduction] « la Gestionnaire ». Comme pièce C, elle joint à son affidavit une convention de gestion de condominiums intervenue entre la Propriétaire et la Gestionnaire, datée du 1er juillet 2008. Cette convention, qui est toujours en vigueur, établit que le mandat de la Gestionnaire consiste à [Traduction] « assister [la Propriétaire] dans l’exploitation et l’administration » de la Propriété et que la Gestionnaire doit s’acquitter de ses fonctions [Traduction] « sous réserve des directives » du conseil d’administration de la Propriétaire. Je souligne qu’il est fait mention à la section IV de cette convention [Traduction] d’« Entretien et réparation » et d’« Entretien préventif ». Mme Watts explique que la Gestionnaire a [Traduction] « reçu pour directive d’employer la Marque dans le cadre de l’exploitation et de la gestion de la Propriété ». Elle explique en outre que tous les travaux entrepris par la Gestionnaire dans le cadre de la convention, de même que son emploi de la Marque, sont effectués sous la supervision de la Propriétaire, laquelle est exercée par l’entremise de son conseil d’administration. Comme pièce D, elle joint des lettres de la Gestionnaire adressées à la Propriétaire datées du 26 juin 2015 et du 26 juin 2016, établissant les frais que la Gestionnaire facture à la Propriétaire pour gérer la Propriété en son nom pour 2015-2016 et 2016-2017, respectivement.

[10]  Comme pièces E, F, G, H, I et M, Mme Watts joint un certain nombre de lettres de la Propriétaire et de la Gestionnaire adressées à diverses entités, dont le Conseil de ville de Toronto, les Services de police de Toronto et des propriétaires de condominiums. Ces lettres portent sur diverses affaires liées à l’entretien et à la gestion de la Propriété; à titre d’exemple, la pièce I décrit la mise à l’essai obligatoire des détecteurs d’incendie présents dans les condominiums, et la pièce M concerne le budget d’exploitation de la Propriété. Chacune de ces lettres date de la période pertinente et arbore le logo suivant dans son en-tête :

[11]  Comme pièce J, Mme Watts joint diverses pages tirées de numéros d’un bulletin d’information intitulé inSPIRE, datant de décembre 2014, de décembre 2015, d’octobre 2016 et de mai 2017. Elle affirme que ce bulletin d’information est publié par la Gestionnaire au bénéfice des propriétaires de condominiums. La Marque est présente à de nombreux endroits dans le bulletin d’information, lequel traite de divers sujets liés à la Propriété, dont des travaux effectués pour réparer des dommages aux ascenseurs causés par une inondation survenue le 17 septembre 2014, ainsi que des rénovations des voies d’accès et de l’espace extérieur aménagé devant débuter en mai 2017 et se terminer le 30 juin 2017.

[12]  Mme Watts joint également, comme pièce K, des captures d’écran du site Web www.thespire.ca, qui présente de l’information destinée aux propriétaires et locataires de condominiums existants et potentiels. Le logo SPIRE qui est reproduit ci-dessus est présent dans ces captures d’écran. Les pages représentées dans les captures d’écran fournissent les coordonnées de la Propriétaire ainsi que des renseignements sur l’emplacement de la Propriété et les commodités offertes. Comme pièce L, elle joint un imprimé tiré du service Web WHOIS, daté du 14 septembre 2017, indiquant que la Propriétaire est l’inscrivante du nom de domaine www.thespire.ca et que ce nom de domaine a été créé le 12 octobre 2007, puis actualisé le 18 février 2016.

[13]  Mme Watts atteste que la Propriété est fréquemment désignée au moyen du terme « SPIRE » par un certain nombre de tiers, y compris des commentateurs en ligne, des blogueurs et des intervenants du milieu de l’immobilier. Comme pièces N et O, elle joint un certain nombre de captures d’écran de divers sites Web dans lesquelles la Propriété est désignée au moyen du terme « Spire ». Je souligne que ces captures d’écran ne semblent pas dater de la période pertinente.

[14]  En outre, comme pièces P, Q et R, Mme Watts joint des factures datant de la période pertinente reçues de l’Institut canadien des condominiums et de deux autres tiers. Chacune de ces factures est adressée à la Propriétaire et désigne la Propriété au moyen des termes « Spire », « The Spire » ou « Spire Condo ».

Affidavit Hendler

[15]  L’affidavit de M. Hendler est très semblable à celui de Mme Watts. Il reprend, pour l’essentiel, les mêmes formulations et la plupart des pièces qui y sont jointes sont les mêmes. M. Hendler ajoute que la Gestionnaire rend compte à un délégué du conseil d’administration de la Propriétaire toutes les semaines et assiste aux réunions du conseil d’administration au moins une fois par trimestre.

Analyse

[16]  Tout d’abord, la Propriétaire reconnaît que certains des éléments de sa preuve comprennent la formulation « The Spire » par opposition à simplement « SPIRE », mais soutient que le public que ne serait pas induit en erreur par cette variante. Je suis du même avis. L’emploi d’une marque nominale en conjugaison avec d’autres mots ou éléments graphiques constitue un emploi de la marque nominale si le public, sous le coup de la première impression, y voit un emploi de la marque nominale en soi [Nightingale Interloc Ltd c Prodesign Ltd (1984), 2 CPR (3d) 535 (COMC); voir également 88766 Canada Inc c National Cheese Co (2002), 24 CPR (4th) 410 (COMC)]. En l’espèce, la présence de l’article défini « the » [le] est une variante suffisamment mineure pour que l’on puisse raisonnablement conclure que le public considérerait, sous le coup de la première impression, que la marque nominale qui est employée est « SPIRE ».

[17]  En outre, dans certaines occurrences du mot « SPIRE » comprises dans la preuve, la lettre « I » est stylisée et prend la forme d’un immeuble de grande hauteur. Il est bien établi cependant que l’emploi d’une marque nominale déposée peut être corroboré par l’emploi de cette marque sous une quelconque forme stylisée [voir Stikeman, Elliott c Wm Wrigley Jr Co (2001), 14 CPR (4th) 393 (COMC)]. La question qui se pose est celle de savoir si la marque de commerce a été employée d’une manière telle qu’elle a conservé son identité et est demeurée reconnaissable malgré les différences entre la forme sous laquelle elle a été enregistrée et celle sous laquelle elle a été employée [Canada (Registraire des marques de commerce) c Cie international pour l’informatique CII Honeywell Bull SA (1985), 4 CPR (3d) 523 (CAF)]. En l’espèce, j’estime que la marque nominale conserve son identité et demeure reconnaissable.

[18]  Je suis également convaincu que la Propriétaire a exercé un contrôle sur les caractéristiques et la qualité des services exécutés sous licence par la Gestionnaire en liaison avec la Marque, de telle sorte que l’emploi de la Marque par la Gestionnaire s’applique au profit de la Propriétaire en vertu de l’article 50(1) de la Loi. Comme l’a indiqué la Cour fédérale, le propriétaire d’une marque de commerce dispose essentiellement de trois méthodes pour démontrer qu’il exerce le contrôle exigé par l’article 50(1) de la Loi : premièrement, attester clairement qu’il exerce le contrôle exigé; deuxièmement, produire une preuve démontrant qu’il exerce le contrôle exigé; ou troisièmement, produire une copie du contrat de licence qui prévoit le contrôle exigé [Empresa Cubana Del Tabaco Trading c Shapiro Cohen, 2011 CF 102, au para 84]. En l’espèce, Mme Watts et M. Hendler ont clairement attesté du fait que tous les travaux effectués par la Gestionnaire dans le cadre de la convention de gestion immobilière, de même que l’emploi que cette dernière fait de la Marque, sont placés sous la supervision de la Propriétaire, laquelle est exercée par l’entremise de son conseil d’administration, et que la Gestionnaire rend compte de façon régulière aux représentants de la Propriétaire. De plus, les déposants ont tous deux joint des copies de la convention de gestion immobilière à leur affidavit, et cette convention précise que la Gestionnaire doit s’acquitter de ses fonctions sous réserve des directives du conseil d’administration de la Propriétaire. Cette preuve est suffisante, aux fins de la présente procédure, pour établir l’exercice du contrôle exigé.

[19]  Dans ses observations écrites, la Propriétaire reconnaît que, pendant la période pertinente, la Marque n’a pas été employée en liaison avec la construction initiale d’un immeuble de condominiums, mais soutient que la Propriété fait constamment l’objet de réparations et de rénovations, qui incluent des travaux de construction. À cet égard, la Propriétaire attire l’attention sur la section IV de la convention de gestion de condominiums qui est jointe comme pièce C à l’affidavit Watts et comme pièce B à l’affidavit Hendler, dans laquelle il est question [Traduction] d’« Entretien et réparation » et d’« Entretien préventif ».

[20]  Je conviens que le terme « construction » peut englober les réparations et rénovations, étant entendu que, lorsqu’il s’agit d’interpréter un état déclaratif des produits et services dans le cadre d’une procédure en vertu de l’article 45, [Traduction] « il faut se garder d’examiner avec un soin méticuleux le langage utilisé » [voir Aird & Berlis LLP c Levi Strauss & Co, 2006 CF 654, au para 17]. En l’espèce, la preuve indique clairement que la Gestionnaire est tenue aux termes de la convention de gestion immobilière de prendre en charge l’entretien et la réparation de la Propriété. En outre, le bulletin d’information joint comme pièce J à l’affidavit Watts et comme pièce H à l’affidavit Hendler indique que des réparations et des rénovations des éléments communs de la Propriété ont eu lieu à la fin de 2014 ainsi qu’en mai et juin 2017. Étant donné que les propriétaires de condominiums étaient informés de ces services au moyen de bulletins d’information publiés par la Gestionnaire et sur lesquels la Marque figure bien en vue, je considère que la Marque a été présentée dans l’annonce de services que la Propriétaire, par l’entremise de sa licenciée, était prête à exécuter. En conséquence, je suis convaincu que la Propriétaire a établi l’emploi de la Marque en liaison avec les services [Traduction] « construction... d’un immeuble de condominiums » au Canada pendant la période pertinente.

[21]  De façon similaire, je suis convaincu que la preuve, considérée dans son ensemble, établit l’emploi de la Marque en liaison avec les services [Traduction] « exploitation d’un immeuble de condominiums ». À titre d’exemple, la Marque figure bien en vue sur toutes les lettres adressées au Conseil de ville de Toronto, aux Services de police de Toronto et aux propriétaires de condominiums. Ces lettres portent sur diverses affaires liées à l’exploitation de la Propriété, y compris des questions budgétaires et la mise à l’essai des détecteurs d’incendie présents dans les condominiums. Toutes ces affaires relèvent de [Traduction] l’« exploitation d’un immeuble de condominiums » et se sont présentées pendant la période pertinente. Je suis par conséquent convaincu que la Propriétaire a établi l’emploi de la Marque dans l’exécution de ce service.

[22]  Enfin, je suis convaincu que la Propriétaire a établi l’emploi de la Marque en liaison avec les services [Traduction] « ventes de condominiums ». Même si, dans sa preuve, la Propriétaire n’a fourni aucun exemple d’une vente véritable d’un condominium, les captures d’écran du site Web www.thespire.ca jointes comme pièce K à l’affidavit Watts montrent que la Propriétaire a annoncé son immeuble de condominiums en liaison avec la Marque auprès de propriétaires potentiels de condominiums. Bien que les captures d’écran elles-mêmes ne soient pas datées, la pièce L jointe à l’affidavit Watts établit que le site Web a été créé le 12 octobre 2007 et mis à jour le 18 février 2016. Il est vrai qu’il n’est pas explicitement indiqué que cette mise à jour a eu pour effet de conférer au site Web l’apparence qu’il a dans la pièce jointe à l’affidavit, mais je suis disposée à inférer que la Propriétaire a également utilisé son site Web pour annoncer des ventes de condominiums en liaison avec la Marque pendant la période pertinente et qu’elle offrait les services [Traduction] « ventes de condominiums » et était prête à les exécuter.

[23]  Ainsi, je suis convaincu que la Propriétaire a établi l’emploi de la Marque en liaison avec les services visés par l’enregistrement au sens des articles 4 et 45 de la Loi.

Décision

[24]  En conséquence, dans l’exercice des pouvoirs qui m’ont été délégués en vertu des dispositions de l’article 63(3) de la Loi, l’enregistrement sera maintenu selon les dispositions de l’article 45 de la Loi.

 

G.M. Melchin

Agent d’audience

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

Traduction certifiée conforme

Judith Lemire, trad.


COMMISSION DES OPPOSITIONS DES MARQUES DE COMMERCE

OFFICE DE LA PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE DU CANADA

COMPARUTIONS ET AGENTS INSCRITS AU DOSSIER

___________________________________________________

AGENT(S) AU DOSSIER

R. Grant Cansfield

POUR LA PROPRIÉTAIRE INSCRITE

Osler, Hoskin & Harcourt LLP

POUR LA PARTIE REQUÉRANTE

 

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