Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

THE REGISTRAR OF TRADEMARKS

Référence : 2019 COMC 97

Date de la décision : 2019-09-16

[TRADUCTION CERTIFIÉE,

NON RÉVISÉE]

DANS L’AFFAIRE DE LA PROCÉDURE DE RADIATION EN VERTU DE L’ARTICLE 45

 

Haldex AB

Partie requérante

et

 

Hardex Brakes Corp.

Propriétaire inscrite

 

LMC805,218 pour la marque de commerce HARDEX

Enregistrement

[1]  La présente décision concerne une procédure de radiation sommaire engagée en vertu de l’article 45 de la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, ch T-13 (la Loi) à l’égard de l’enregistrement no LMC805,218 de la marque de commerce HARDEX (la Marque), détenu par Hardex Brakes Corp.

[2]  La Marque est enregistrée pour emploi en liaison avec les produits suivants [Traduction] :

Accessoires d’automobile, nommément freins et pièces de frein, nommément plaquettes de frein, segments de frein, garnitures de frein.

[3]  Pour les raisons exposées ci-dessous, je conclus qu’il y a lieu de maintenir l’enregistrement.

Introduction

[4]  Le 21 février 2017, à la demande d’Haldex AB (la Partie requérante), le registraire des marques de commerce a donné l’avis prévu à l’article 45 de la Loi à Hardex Brakes Corp. (la Propriétaire), la propriétaire inscrite de la Marque.

[5]  L’avis enjoignait à la Propriétaire d’indiquer, à l’égard de chacun des produits spécifiés dans l’enregistrement, si la marque de commerce a été employée au Canada à un moment quelconque au cours des trois années précédant immédiatement la date de l’avis et, dans la négative, de préciser la date à laquelle la marque a ainsi été employée en dernier lieu et la raison de son défaut d’emploi depuis cette date. En l’espèce, la période pertinente pour établir l’emploi s’étend du 21 février 2014 au 21 février 2017.

[6]  La définition pertinente d’« emploi » en liaison avec des produits qui s’applique en l’espèce est énoncée à l’article 4 de la Loi, lequel est libellé comme suit :

4(1) Une marque de commerce est réputée employée en liaison avec des produits si, lors du transfert de la propriété ou de la possession de ces produits, dans la pratique normale du commerce, elle est apposée sur les produits mêmes ou sur les emballages dans lesquels ces produits sont distribués, ou si elle est, de toute autre manière, liée aux produits à tel point qu’avis de liaison est alors donné à la personne à qui la propriété ou possession est transférée.

[7]  Il est bien établi que de simples allégations d’emploi d’une marque de commerce ne sont pas suffisantes pour établir l’emploi dans le contexte de la procédure prévue à l’article 45 [Plough (Canada) Ltd c Aerosol Fillers Inc (1980), 53 CPR (2d) 62 (CAF)]. Bien que le niveau de preuve requis pour établir l’emploi dans le cadre de cette procédure soit peu élevé [Woods Canada Ltd c Lang Michener (1996), 71 CPR (3d) 477 (CF 1re inst)] et qu’il ne soit pas nécessaire de produire une surabondance d’éléments de preuve [Union Electric Supply Co Ltd c le Registraire des marques de commerce (1982), 63 CPR (2d) 56 (CF 1re inst)], il n’en faut pas moins présenter des faits suffisants pour permettre au registraire de conclure que la marque de commerce a été employée en liaison avec chacun des produits spécifiés dans l’enregistrement pendant la période pertinente [John Labatt Ltd c Rainer Brewing Co (1984), 80 CPR (2d) 228 (CAF)].

[8]  Le 21 novembre 2017, en réponse à l’avis du registraire, la Propriétaire a produit l’affidavit d’Alireza Rasekh, souscrit le 16 novembre 2017. Les parties ont toutes deux produit des observations écrites. La tenue d’une audience n’a pas été sollicitée.

La preuve de la Propriétaire

[9]  M. Rasekh affirme qu’il est le directeur général (Bureau des exportations) de la Propriétaire, et ce, depuis 2010. Il explique que la Propriétaire est une société qui a été constituée en Colombie-Britannique en 2009. Il affirme que la Propriétaire emploie la Marque en liaison avec des freins, des plaquettes de frein, des segments de frein et des garnitures de frein, et qu’elle l’a ainsi employée pendant la période pertinente. Il explique que les plaquettes de frein, les segments de frein et les garnitures de frein sont également appelés simplement freins dans l’industrie des pièces d’automobiles. M. Rasekh joint les pièces suivantes à son affidavit :

  • Pièce A : des photographies d’emballages de plaquettes de frein. M. Rasekh affirme que ces emballages ont été employés pour expédier des plaquettes de frein à des clients au Canada et à l’étranger dans la pratique normale du commerce pendant la période pertinente. Dans chaque cas, l’emballage présente le mot « HARDEX » à côté d’une représentation graphique. Dans un cas, le mot HARDEX figure au-dessus des mots « MADE FOR ALL DRIVING HABITS » [fait pour toutes les habitudes de conduite]; dans tous les autres cas, « HARDEX » figure au-dessus des mots « PREMIUM BRAKES » [freins de qualité supérieure] selon la configuration suivante :

  • Pièce B : une photographie d’emballage de segments de frein arborant la Marque selon la configuration reproduite ci-dessus. M. Rasekh affirme que cet emballage a été employé pour expédier des segments de frein à des clients au Canada et à l’étranger dans la pratique normale du commerce pendant la période pertinente.

  • Pièce C : une photographie d’une garniture de frein dans un emballage par rétraction. L’emballage par rétraction et l’article lui-même arborent tous deux la Marque selon la configuration reproduite ci-dessus. M. Rasekh affirme que des garnitures de frein ont été expédiées de cette manière à des clients au Canada et à l’étranger dans la pratique normale du commerce pendant la période pertinente.

  • Pièce D : des copies de factures datées du 1er août 2014, du 23 juillet 2015 et du 6 juin 2016, arborant la Marque selon la configuration reproduite ci-dessus dans le coin supérieur droit. Les destinataires des factures sont caviardés; cependant, la page finale de chaque facture indique « FOB VANCOUVER – CANADA » [FAB VANCOUVER – CANADA]. Bien que la nature des produits vendus ne ressorte pas clairement des factures, M. Rasekh affirme que les factures se rapportent à des freins, à des plaquettes de frein, à des segments de frein et à des garnitures de frein vendus et expédiés par la Propriétaire à des clients au Canada et à l’étranger dans la pratique normale du commerce pendant la période pertinente.

 

Analyse

[10]  La Partie requérante soulève un certain nombre de questions en lien avec la preuve de la Propriétaire, à savoir que la Propriétaire n’a pas établi la pratique normale de son commerce, que la marque de commerce présentée dans sa preuve est différente de la Marque telle qu’elle est enregistrée et que la Propriétaire n’a pas établi l’emploi de la Marque en liaison avec chacun des produits visés par l’enregistrement. J’examinerai successivement chacun de ces arguments.

Pratique normale du commerce

[11]  La Partie requérante fait valoir que, bien que l’affidavit de M. Rasekh mentionne à plusieurs reprises des activités se déroulant [Traduction] « dans la pratique normale du commerce », il ne fournit aucune description de la pratique normale du commerce de la Propriétaire, malgré que M. Rasekh exerce les fonctions de directeur général de la Propriétaire. Par conséquent, la Partie requérante soutient que le registraire en est réduit à des conjectures quant à la pratique normale du commerce de la Propriétaire et elle cite la décision de la Cour fédérale dans SC Johnson & Son, Inc c Registrar of Trade Marks (1981), 55 CPR (2d) 34, à la p 37, à l’appui de la thèse selon laquelle il ne suffit pas à un propriétaire de simplement affirmer qu’il a employé sa marque de commerce dans la pratique normale du commerce.

[12]  La Propriétaire fait valoir que l’affaire SC Johnson n’est pas pertinente en l’espèce parce que, dans cette affaire, la propriétaire n’a fourni aucune facture et a seulement fait une déclaration d’emploi dans la pratique normale du commerce qui reprenait le libellé de la Loi. En revanche, en l’espèce, la Propriétaire souligne que M. Rasekh a fourni des factures à l’appui de sa déclaration selon laquelle des ventes ont été réalisées dans la pratique normale du commerce. La Propriétaire cite la décision Eveready Battery Company, Inc c Les Outillages King Canada Inc, 2016 COMC 178 à l’appui de la thèse selon laquelle il suffit à un propriétaire de simplement affirmer qu’il a employé sa marque dans la pratique normale du commerce, sans autre explication, lorsque le propriétaire fournit à l’appui une preuve constituée de factures.

[13]  En général, un propriétaire inscrit ne doit pas simplement alléguer, mais véritablement établir l’emploi de sa marque de commerce en liaison avec les produits visés par l’enregistrement, [Traduction] « en décrivant les faits qui permettront au registraire ou à la Cour de se faire une opinion ou de déduire logiquement qu’il y a eu emploi au sens de l’article 4 » [voir Guido Berlucchi & C Srl c Brouilette Kosie Prince, 2007 CF 245, au para 18]. En conséquence, la preuve doit renfermer des faits démontrant que des ventes ou des transferts des produits ont eu lieu dans la pratique normale du commerce.

[14]  Cependant, dans le contexte de la procédure prévue à l’article 45, ce fardeau de preuve est très léger. Un propriétaire inscrit doit seulement fournir une preuve prima facie d’emploi. La preuve n’a pas à être parfaite et le registraire peut tirer des inférences raisonnables des faits présentés [Diamant Elinor Inc c 88766 Canada Inc, 2010 CF 1184, aux para 8 et 9; BCF SENCRL c Spirits International BV, 2012 CAF 131; voir également Eclipse International Fashions Canada Inc c Shapiro Cohen, 2005 CAF 64]. En effet, la preuve d’une seule vente peut être suffisante pour établir l’emploi dans le cadre de la procédure de radiation prévue à l’article 45, dans la mesure où il s’agit d’une véritable transaction commerciale et qu’elle n’est pas perçue comme ayant été fabriquée ou conçue délibérément pour protéger l’enregistrement [voir Philip Morris Inc c Imperial Tobacco Ltd (1987), 13 CPR (3d) 289 (CF 1re inst), au para 12]. En l’espèce, rien dans la preuve ne me porte à croire que les ventes présentées en preuve n’ont pas été réalisées de bonne foi. La preuve fait état d’un certain nombre de ventes et s’accompagne d’une déclaration claire faite sous serment par M. Rasekh selon laquelle ces transactions ont eu lieu dans la pratique normale du commerce de la Propriétaire. Aux fins de la présente procédure, cela est suffisant pour démontrer que les ventes présentées en preuve ont eu lieu dans la pratique normale du commerce.

Variante

[15]  La Partie requérante fait valoir que la preuve photographique de la Propriétaire n’établit pas l’emploi de la Marque, mais plutôt d’une marque de commerce composée, étant donné qu’elle est toujours accompagnée d’autres éléments. La Partie requérante reconnaît que des facteurs comme la police de caractères, la taille, la couleur et la présence d’un symbole de marque de commerce peuvent être pertinents pour déterminer si une marque de commerce conserve son caractère distinctif, mais elle fait valoir que, en l’espèce, le fait que le mot « Hardex » figure toujours sous la forme reproduite ci-dessus signifie que les consommateurs percevraient la marque de commerce présentée sur les emballages et les factures comme étant Hardex Premium Brakes et dessin, indépendamment du fait que le mot Hardex figure dans une police de caractères, une taille et une couleur légèrement différentes et est accompagné du symbole de marque de commerce.

[16]  La Propriétaire fait valoir que la Marque n’a pas perdu son identité et qu’elle demeure reconnaissable malgré la présence de l’élément graphique et des mots descriptifs « PREMIUM BRAKES » [freins de qualité supérieure], soulignant que la Marque est plus grande et plus colorée que les autres éléments. La Propriétaire mentionne la décision Crash Test Dummy Movie, LLC c Mattel, Inc (2007), 60 CPR (4th) 47 (COMC), dans laquelle le registraire a conclu que les caractéristiques dominantes de la marque de commerce CRASH DUMMIES avaient été préservées malgré l’ajout de l’élément descriptif « incredible » [incroyable], et la décision Aesus Systems c Sleever International (2007), 76 CPR (4th) 401 (COMC), dans laquelle le registraire a conclu que l’élément dominant était la marque déposée SLEEVER, malgré l’ajout du mot INTERNATIONAL et d’un élément graphique. De façon similaire, la Propriétaire fait valoir que HARDEX demeure l’élément dominant en l’espèce.

[17]  Lorsque la marque de commerce telle qu’elle est employée diffère de la marque telle qu’elle est enregistrée, la question à se poser est celle de savoir si la marque a été employée d’une manière telle qu’elle a conservé son identité et qu’elle est demeurée reconnaissable malgré les différences entre la forme sous laquelle elle a été enregistrée et celle sous laquelle elle a été employée [Canada (Registraire des marques de commerce) c Cie International pour l’informatique CII Honeywell Bull, SA (1985), 4 CPR (3d) 523 (CAF), à la p 525]. Pour trancher cette question, il faut se demander si les [Traduction] « caractéristiques dominantes » ont été préservées [Promafil Canada Ltée c Munsingwear Inc (1992), 44 CPR (3d) 59 (CAF), à la p 59]. La question de savoir si les différences entre les marques sont [Traduction] « à ce point minimes qu’un consommateur non averti conclurait, selon toute probabilité, qu’elles identifient toutes deux, malgré leurs différences, des produits ayant la même origine » [CII Honey Bull, à la p 525] est une question de fait. Enfin, l’emploi d’une marque de commerce en conjugaison avec des mots ou des éléments supplémentaires constitue un emploi de la marque déposée si, sous le coup de la première impression, le public y verrait un emploi de la marque de commerce en soi. Il s’agit là d’une question de fait qui dépend de celles de savoir si la marque de commerce se démarque des éléments supplémentaires, par exemple par l’emploi d’une police ou d’une taille de caractères différentes, et si les autres éléments seraient perçus comme étant clairement descriptifs ou comme constituant une marque de commerce ou un nom commercial distincts [Nightingale Interloc Ltd c Prodesign Ltd (1984), 2 CPR (3d) 535 (COMC); 88766 Canada Inc c National Cheese Co (2002), 24 CPR (4th) 410 (COMC)].

[18]  En l’espèce, même si la Marque est toujours accompagnée de mots et d’éléments graphiques supplémentaires, le mot HARDEX est présenté dans une police de caractères tellement plus grande et dans une couleur tellement différente des éléments supplémentaires que le message transmis au public est que le mot HARDEX est employé en tant que marque de commerce en soi. Ce point de vue est compatible avec la décision Nightingale mentionnée ci-dessus. En outre, malgré l’ajout de l’élément graphique et des mots descriptifs, la Marque est employée d’une manière telle qu’elle n’a pas perdu son identité et qu’elle demeure reconnaissable, car la caractéristique dominante de la Marque, soit le mot HARDEX, a été préservée [selon CII Honeywell Bull et Promafil]. En conséquence, j’admets que l’emploi de la Marque déposée a été établi.

Emploi en liaison avec chacun des produits visés par l’enregistrement

[19]  La Partie requérante fait valoir que les factures produites en preuve par la Propriétaire n’établissent pas que des freins, des plaquettes de frein, des segments de frein et des garnitures de frein ont été vendus ou expédiés, car les factures ne mentionnent aucun de ces produits. En outre, la Partie requérante fait valoir que M. Rasekh n’indique pas si les articles décrits dans les factures correspondent à l’un quelconque des produits visés par l’enregistrement. De plus, la Partie requérante fait valoir que le caviardage des factures signifie que ces dernières ne peuvent corroborer ni des ventes réalisées au Canada ni des exportations du Canada.

[20]  La Propriétaire fait valoir que les pièces A à C jointes à l’affidavit de M. Rasekh démontrent que la Propriétaire a vendu des plaquettes de frein, des segments de frein et des garnitures de frein, respectivement, en liaison avec la Marque, soulignant que M. Rasekh, qui est au courant des ventes dont font état les factures, a déclaré sous serment que les factures se rapportent à la vente de freins, de plaquettes de frein, de segments de frein et de garnitures de frein. Je suis du même avis. En l’absence d’une preuve contraire, il convient d’admettre sans réserve une déclaration sous serment faite par un déposant et d’accorder une crédibilité substantielle aux déclarations contenues dans un affidavit produit dans le cadre de la procédure prévue à l’article 45 [Oyen Wiggs Green & Mutala LLP c Atari Interactive, Inc, 2018 COMC 79, au para 25]. Il faut considérer la preuve dans son ensemble; le fait de décortiquer un affidavit en adoptant une approche trop technique n’est pas compatible avec l’objet de la procédure prévue à l’article 45. Ainsi, compte tenu des factures produites en preuve, de l’affidavit de M. Rasekh et des autres pièces montrant comment la Marque a été présentée sur l’emballage de chacun des produits visés par l’enregistrement, j’admets que la Propriétaire a vendu chacun des produits pertinents en liaison avec la Marque au Canada dans la pratique normale du commerce pendant la période pertinente.

[21]  Par conséquent, je conclus que la preuve de la Propriétaire établit l’emploi de la Marque en liaison avec les produits visés par l’enregistrement au sens des articles 4 et 45 de la Loi.

 

Décision

[22]  En conséquence, dans l’exercice des pouvoirs qui m’ont été délégués en vertu des dispositions de l’article 63(3) de la Loi, l’enregistrement sera maintenu selon les dispositions de l’article 45 de la Loi.

 

G.M. Melchin

Agent d’audience

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

Traduction certifiée conforme

Marie-Pierre Hétu, trad.


COMMISSION DES OPPOSITIONS DES MARQUES DE COMMERCE

OFFICE DE LA PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE DU CANADA

COMPARUTIONS ET AGENTS INSCRITS AU DOSSIER

___________________________________________________

Aucune audience tenue

AGENT(S) AU DOSSIER

Cameron IP

POUR LA PROPRIÉTAIRE INSCRITE

Hicks Intellectual Property Law

POUR LA PARTIE REQUÉRANTE

 

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