Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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OPIC

CIPO

LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

THE REGISTRAR OF TRADEMARKS

Référence : 2019 COMC 99

Date de la décision : 2019-09-19
[TRADUCTION CERTIFIÉE,
NON RÉVISÉE]

DANS L’AFFAIRE DE L’OPPOSITION

 

Groupe Première Moisson Inc.

Opposante

et

 

Pumpernickel’s Franchise Corporation

Requérante

 

1,735,131 pour la marque de commerce P Dessin

Demande

[1]  Groupe Première Moisson Inc. (l’Opposante) s’oppose à la demande d’enregistrement no 1,735,131 (la Demande) relative à la marque de commerce P Dessin (la Marque) produite par Pumpernickel’s Franchise Corporation (la Requérante). La Marque est constituée de la lettre P de laquelle émerge une pousse recourbée, le tout dans un cercle plein bordé d’un anneau de points, comme le montre la reproduction ci-dessous :

[2]  Pour les raisons exposées ci-dessous, l’opposition est accueillie.

Remarques préliminaires

[3]  De nombreuses modifications à la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, ch T-13 (la Loi) sont entrées en vigueur le 17 juin 2019. Dans le contexte d’une procédure d’opposition, la date utilisée pour déterminer quelle version de la Loi s’applique est la date à laquelle la demande d’enregistrement visée par l’opposition a été annoncée aux fins d’opposition dans le Journal des marques de commerce. En l’espèce, la Demande a été annoncée avant le 17 juin 2019. En conséquence, conformément aux dispositions transitoires de l’article 70 de la Loi dans sa version modifiée, les motifs d’opposition seront évalués au titre de la Loi dans sa version immédiatement antérieure au 17 juin 2019, à l’exception de la question de la confusion qui, elle, sera évaluée au titre des articles 6(2) à (4) de la Loi dans sa version actuelle.

[4]  Sauf indication contraire, toutes les autres dispositions de la Loi mentionnées dans les présents motifs renvoient à la Loi dans sa version modifiée le 17 juin 2019.

Le dossier

[5]  La Demande a été produite le 30 juin 2015. Elle est fondée sur l’emploi de la Marque au Canada depuis au moins aussi tôt que novembre 2014 en liaison avec les services suivants [Traduction] :

Services de restaurant, comptoirs de restauration rapide, services de traiteur, services de mets à emporter et de livraison; services de franchisage de restaurants et de comptoirs de restauration rapide; services de commande d’aliments en ligne; offre d’un site Web présentant de l’information, des blogues et des vidéos dans les domaines des aliments, de la préparation des aliments et des recettes (les Services).

[6]  La Demande a été annoncée aux fins d’opposition dans le Journal des marques de commerce du 18 mai 2016.

[7]  Le 17 octobre 2016, l’Opposante a produit une déclaration d’opposition. Les motifs d’opposition invoqués sont fondés sur les articles 30b) (conformité), 12(1)d) (enregistrabilité), 16(1)a) (droit à l’enregistrement) et 2 (caractère distinctif) de la Loi dans sa version immédiatement antérieure au 17 juin 2019. Dans le reste de la présente décision, toutes les mentions de ces articles précis de la Loi renverront à la Loi dans sa version immédiatement antérieure au 17 juin 2019.

[8]  Le 24 février 2017, la Requérante a produit une contre-déclaration dans laquelle elle conteste chacun des motifs d’opposition.

[9]  Comme preuve, l’Opposante a produit la déclaration de Josée Fiset, datée du 21 juin 2017. Mme Fiset atteste qu’elle est la cofondatrice de l’Opposante ainsi que sa vice-présidente, Réseau de détail depuis août 2014, et qu’elle a auparavant été sa directrice du marketing pendant plus de vingt ans.

[10]  Comme preuve, la Requérante a produit deux affidavits. Le premier est celui de Soly Ziv, daté du 3 octobre 2017. M. Ziv atteste qu’il est le fondateur, le président, le secrétaire, l’administrateur et le gestionnaire du franchisage et du marketing de la Requérante ainsi qu’un actionnaire principal de cette dernière. Le second affidavit est celui de Lynda Palmer, daté du 29 septembre 2017. Mme Palmer atteste qu’elle est une recherchiste en marques de commerce et la propriétaire de Lynda Palmer Trade Mark Searching, une société qui effectue des recherches dans les dossiers des marques de commerce de l’Office de la propriété intellectuelle du Canada.

[11]  Aucun des déposants n’a été contre-interrogé.

[12]  Les parties ont toutes deux produit un plaidoyer écrit; aucune audience n’a été tenue.

Fardeau de preuve

[13]  C’est au requérant qu’incombe le fardeau ultime de démontrer que sa demande est conforme aux dispositions de la Loi. L’opposant a toutefois le fardeau de preuve initial de présenter une preuve admissible suffisante pour permettre de conclure raisonnablement à l’existence des faits allégués à l’appui de chacun des motifs d’opposition. Une fois que l’opposant s’est acquitté de ce fardeau de preuve initial, le requérant doit convaincre le registraire, selon la prépondérance des probabilités, que les motifs d’opposition invoqués ne devraient pas faire obstacle à l’enregistrement de la marque de commerce en cause [Joseph E Seagram & Sons Ltd c Seagram Real Estate Ltd (1984), 3 CPR (3d) 325 (COMC); Christian Dior SA c Dion Neckwear Ltd, 2002 CAF 29, 20 CPR (4th) 155].

Motif d’opposition rejeté sommairement : conformité à l’article 30b)

[14]  Pour que la demande soit conforme à l’article 30b) de la Loi, la marque de commerce doit avoir été employée de façon continue dans la pratique normale du commerce de la date de premier emploi revendiquée dans la demande à la date de production de la demande [voir Benson & Hedges (Canada) Ltd c Labatt Brewing Co (1996), 67 CPR (3d) 258 (CF 1re inst); Ivy Lea Shirt Co c Muskoka Fine Watercraft & Supply Co, 2001 CFPI 253, 11 CPR (4th) 489]. L’Opposante allègue que la Demande n’est pas conforme aux exigences de l’article 30b), parce que la Requérante n’a pas employé la Marque au Canada en liaison avec les Services depuis au moins aussi tôt que novembre 2014, la date de premier emploi revendiquée. Cependant, il n’y a aucune preuve au dossier à l’appui de cette allégation. Je souligne également que l’Opposante n’a pas abordé ce motif d’opposition dans son plaidoyer écrit. En conséquence, le motif d’opposition fondé sur l’article 30b) de la Loi est rejeté, car l’Opposante ne s’est pas acquittée de son fardeau de preuve initial.

Motif d’opposition fondé sur l’enregistrabilité suivant l’article 12(1)d)

[15]  L’Opposante allègue que la Marque n’est pas enregistrable suivant l’article 12(1)d) de la Loi, parce qu’elle crée de la confusion avec la marque de commerce déposée P Dessin de l’Opposante, reproduite ci-dessous (le Dessin P de l’Opposante) :

[16]  Le Dessin P de l’Opposante est constitué de la lettre P de laquelle émergent des vrilles et un épi de blé ou d’une céréale semblable. Il a été enregistré le 10 mai 2012 sous le no LMC823,762 (l’Enregistrement de l’Opposante) pour emploi en liaison avec les produits et les services énoncés à l’annexe A de la présente décision. Les produits comprennent divers produits alimentaires, dont des produits de boulangerie-pâtisserie, des mets préparés, des salades, des sandwichs, des produits de charcuterie, des boissons et des confiseries, entre autres; des articles ménagers, nommément des sacs à usage général, des sacs d’épicerie, des serviettes de table et des verres à boire; et des certificats-cadeaux et des cartes de fidélité. Les services comprennent des services d’exploitation d’un magasin vendant des produits fins, des produits de charcuteries, des produits d’épicerie, des pâtisseries, des produits de boulangerie, des mets préparés, des conserves et des confiseries; un café bistro; et des services de traiteur.

[17]  Dans l’enregistrement de l’Opposante, l’emploi de cette marque de commerce en liaison avec les produits « amandes caramélisées, viandes et charcuteries » est revendiqué depuis au moins aussi tôt que septembre 2010. Une déclaration d’emploi a été produite à l’égard des autres produits et des services visés par l’enregistrement le 23 avril 2012. Un imprimé des détails de l’enregistrement tiré de la Base de données sur les marques de commerce canadiennes tenue par le registraire et accessible en ligne a été joint comme pièce A à la déclaration Fiset.

[18]  La date pertinente pour l’analyse d’un motif d’opposition fondé sur l’article 12(1)d) est la date de la décision du registraire [voir Park Avenue Furniture Corporation c Wickes/Simmons Bedding Ltd (1991), 37 CPR (3d) 413 (CAF)].

[19]  L’opposant s’acquitte de son fardeau de preuve initial à l’égard de ce motif d’opposition si l’enregistrement qu’il invoque est en règle à la date de la décision du registraire. Le registraire a le pouvoir discrétionnaire de consulter le registre à cet égard [voir Quaker Oats of Canada Ltd/La Compagnie Quaker Oats du Canada Ltée c Menu Foods Ltd (1986), 11 CPR (3d) 410 (COMC)]. J’ai exercé ce pouvoir discrétionnaire et je confirme que l’Enregistrement de l’Opposante existe; l’Opposante s’est donc acquittée de son fardeau de preuve initial. Il incombe maintenant à la Requérante de convaincre le registraire, selon la prépondérance des probabilités, que la Marque ne risque pas de créer de la confusion avec la marque de commerce de l’Opposante.

Le test en matière de confusion

[20]  Le test en matière de confusion est énoncé à l’article 6(2) de la Loi, qui prévoit que l’emploi d’une marque de commerce crée de la confusion avec une autre marque de commerce lorsque l’emploi des deux marques de commerce dans la même région serait susceptible de faire conclure que les produits liés à ces marques de commerce sont fabriqués, vendus, donnés à bail ou loués, ou que les services liés à ces marques sont loués ou exécutés, par la même personne.

[21]  Certaines des circonstances de l’espèce à prendre en considération pour évaluer la probabilité de confusion entre deux marques de commerce sont énoncées à l’article 6(5) de la Loi : a) le caractère distinctif inhérent des marques de commerce et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues; b) la période pendant laquelle les marques de commerce ont été en usage; c) le genre de produits, services ou entreprises; d) la nature du commerce; et e) le degré de ressemblance entre les marques de commerce dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’elles suggèrent. Ces critères ne forment pas une liste exhaustive et le poids qu’il convient d’accorder à chacun d’eux n’est pas nécessairement le même [voir Veuve Clicquot Ponsardin c Boutiques Cliquot Ltée, 2006 CSC 23, 49 CPR (4th) 401; Mattel USA Inc c 3894207 Canada Inc, 2006 CSC 22, 49 CPR (4th) 321; Masterpiece Inc c Alavida Lifestyles Inc, 2011 CSC 27, 92 CPR (4th) 361].

[22]  Le test en matière de confusion est décrit en ces termes par le juge Binnie dans Veuve Clicquot, supra, au paragraphe 20 [Traduction] :

Le critère applicable est celui de la première impression que laisse dans l’esprit du consommateur ordinaire plutôt pressé la vue [de la marque du requérant], alors qu’il n’a qu’un vague souvenir des marques de commerce [de l’opposant] et qu’il ne s’arrête pas pour réfléchir à la question en profondeur, pas plus que pour examiner de près les ressemblances et les différences entre les marques.

[23]  Ce test ne concerne pas la confusion entre les marques elles-mêmes, mais la confusion portant à croire que les produits et les services liés à chacune des marques de commerce proviennent de la même source.

Degré de ressemblance entre les marques de commerce

[24]  Comme l’a indiqué la Cour suprême du Canada dans Masterpiece, supra, dans la plupart des cas, le degré de ressemblance entre les marques de commerce en cause est le facteur qui revêt le plus d’importance dans l’évaluation de la probabilité de confusion. Il faut envisager le degré de ressemblance entre les marques de commerce du point de vue de leur présentation, de leur son et des idées qu’elles suggèrent. Il est préférable de se demander d’abord si les marques de commerce présentent un aspect [Traduction] « particulièrement frappant ou unique » [Masterpiece, supra, au paragraphe 64]. Cependant, il faut éviter de placer les marques de commerce côte à côte dans le but de les examiner attentivement et d’en relever les similitudes ou les différences; chaque marque de commerce doit être considérée dans son ensemble [voir Veuve Clicquot, supra].

[25]  Comme l’a fait observer le juge Denault dans Pernod Ricard c Molson Breweries (1992), 44 CPR (3d) 359 (CF 1re inst), au para 34 [Traduction] :

Les marques de commerce devraient être examinées du point de vue du consommateur moyen qui a un souvenir non pas précis, mais général de la marque précédente. En conséquence, les marques ne devraient pas être disséquées ni soumises à une analyse microscopique en vue d’apprécier leurs ressemblances et leurs différences. Au contraire, elles devraient être envisagées dans leur ensemble et évaluées en fonction de leur effet sur le consommateur moyen en général [références omises].

[26]  Dans son affidavit, M. Ziv formule certains commentaires quant au degré de ressemblance entre les marques de commerce en cause. Cependant, M. Ziv n’a pas établi qu’il est un expert en droit canadien des marques de commerce. Je ne tiendrai donc pas compte des opinions qu’il exprime sur le degré de ressemblance entre les marques.

[27]  L’Opposante soutient que l’élément dominant des deux marques de commerce en l’espèce est la lettre P; que les dessins des deux marques de commerce sont très semblables; et que, sous le coup de la première impression, ni l’une ni l’autre des marques de commerce ne suggère une idée en particulier autre qu’une lettre de l’alphabet. L’Opposante soutient en outre que les marques en cause sont celles qui se ressemblent le plus parmi toutes les marques présentant la lettre P repérées dans le cadre de la recherche qu’a effectuée Mme Palmer dans le registre, comme l’indique son affidavit, examiné ci-dessous.

[28]  La Requérante soutient que les différences entre les marques de commerce en l’espèce sont clairement visibles et permettent de distinguer les marques de commerce l’une de l’autre. La Requérante soutient que ces différences comprennent les styles de caractères, dont un seul comporte des empattements; les embellissements, soit un pois chiche en germination émergeant du milieu de la lettre et s’étendant vers la gauche dans la marque de la Requérante, par opposition à un motif de blé émergeant du bas de la lettre et s’étendant vers la droite dans la marque de commerce de l’Opposante; et les arrière-plans, soit un cercle plein entouré d’un anneau de points dans la marque de la Requérante et un fond vide dans la marque de commerce de l’Opposante. La Requérante soutient en outre que la lettre P dans sa marque est représentative de son nom et de sa [Traduction] « marque principale » PUMPERNICKEL’S, tandis que le Dessin P de l’Opposante représente le mot PREMIÈRE dans le nom et la [Traduction] « marque principale » PREMIÈRE MOISSON de l’Opposante.

[29]  Je soulignerais en premier lieu que c’est la Marque elle-même qui doit être considérée lorsqu’il s’agit d’évaluer la ressemblance, et non la combinaison de la Marque et d’éléments supplémentaires en liaison avec lequel elle peut être employée. En conséquence, le fait que la Marque puisse être reconnue comme la première lettre du nom ou de la [Traduction] « marque principale » de la Requérante lorsque la Marque est présentée à côté du mot PUMPERNICKEL’S n’est pas utile à la cause de la Requérante. En outre, il n’y a aucune preuve que la Marque est à ce point connue et fortement liée à la marque de la Requérante qu’elle aurait en elle-même acquis une signification secondaire en tant qu’abréviation de PUMPERNICKEL’S. De même, le Dessin P de l’Opposante doit être considéré en lui-même, et il n’y a aucune preuve qui donne à penser que le consommateur canadien ordinaire comprendrait qu’il signifie PREMIÈRE ou reconnaîtrait qu’il s’agit d’une référence à PREMIÈRE MOISSON.

[30]  Je souligne que, dans GSW Ltd c Great West Steel Industries Ltd (1975), 22 CPR (2d) 154 (CF 1re inst), affaire dans laquelle les deux marques de commerce en cause étaient inspirées des premières lettres des noms de leur propriétaire, il a été conclu que [Traduction] « un observateur a naturellement tendance à faire le lien entre les lettres et leur origine et à penser aux dénominations sociales, qui sont considérablement différentes, et dont les lettres sont en réalité des abréviations » [au para 67]. Cependant, dans cette affaire, les lettres de la marque de commerce de l’opposant étaient entrecoupées de points, et les lettres de la marque de commerce du requérant étaient délimitées par une ligne présentant « deux dentelures s’étendant jusqu’à l’espace entre les lettres…, qui suggèrent des points » [ibid.]. La présente espèce est différente de cette affaire, car chacune des marques de commerce en cause ne comporte qu’une seule lettre, sans point ni indication similaire signalant que la lettre pourrait représenter une abréviation.

[31]  Je suis d’avis que, sous le coup de la première impression, les marques de commerce en cause dans la présente affaire véhiculent toutes deux l’idée de la lettre P de laquelle émergent de courtes pousses recourbées et que c’est cette combinaison qui constitue la caractéristique la plus frappante des deux marques de commerce, sur les plans visuel et conceptuel.

[32]  J’estime que l’arrière-plan circulaire bordé d’un contour pointillé de la Marque de la Requérante ne constitue pas une caractéristique particulièrement frappante ou unique. Ce dernier a pour effet d’attirer l’attention sur le P embelli et de faire paraître la lettre décentrée, ce qui lui confère un certain intérêt visuel. Cependant, il demeure un élément d’arrière-plan, et je suis d’avis que son effet d’encadrement est loin d’être frappant ou unique.

[33]  En outre, la Requérante ne m’a pas convaincu que les différences dans les polices de caractères utilisées pour la lettre P ou dans le positionnement ou le style des motifs végétaux entraînent des différences significatives dans la présentation entre les deux marques de commerce. Je suis plutôt d’avis qu’il existe un degré de ressemblance assez élevé entre les dessins dans la présentation générale. Pour relever ces différences subtiles, la Requérante a effectué une analyse côte à côte dans le but de distinguer les marques en se concentrant sur leurs détails. Cependant, comme je l’ai souligné ci-dessus, ce type de décomposition et d’analyse minutieuse n’est pas la bonne approche. Les marques de commerce doivent plutôt être considérées sous l’angle du souvenir imparfait. Je suis d’avis que les différences visuelles entre les marques en cause dans la présente affaire ne seraient pas suffisantes pour éliminer la probabilité de confusion chez le consommateur moyen n’ayant qu’un souvenir général de la marque de commerce de l’Opposante.

[34]  Sur le plan sonore, les deux marques de commerce sont identiques, étant donné que le seul élément nominal dans chacune d’entre elles est la lettre P. À cet égard, je souligne là encore que ni l’une ni l’autre des marques ne comprend le mot anglais PUMPERNICKEL’S ou les mots français PREMIÈRE MOISSON. En conséquence, rien ne donne à penser que l’une ou l’autre des marques de commerce est plus susceptible d’être prononcée en anglais ou en français.

[35]  Enfin, l’idée que suggère chaque marque de commerce est essentiellement la même : la lettre P de laquelle émergent des pousses recourbées.

[36]  Dans son affidavit, M. Ziv explique que la Marque a été adoptée pour illustrer [Traduction] « un pois chiche en germination », les pois chiches étant l’un des principaux ingrédients de la tartinade de houmous employée et vendue par la Requérante et, en tant que produit végétarien, projetant une image de mode de vie sain [au para 12]. Cependant, il n’y a aucune preuve que le consommateur moyen percevrait le motif végétal dans la Marque comme représentant un pois chiche. Il n’y a pas de preuve non plus que le consommateur moyen s’attarderait nécessairement à la nature précise de la céréale représentée par le motif végétal de l’Opposante.

[37]  En somme, les différences entre les deux marques de commerce en cause se trouvent dans les détails. Tout bien considéré, j’estime que ces différences — seules ou en combinaison — ne sont pas suffisamment significatives pour se démarquer dans l’esprit du consommateur moyen n’ayant qu’un souvenir général de la marque de commerce précédente.

[38]  Compte tenu du degré de ressemblance entre les marques de commerce des parties dans la présentation, dans le son et dans les idées qu’elles suggèrent, ce facteur favorise l’Opposante.

Caractère distinctif inhérent des marques de commerce

[39]  Les marques de commerce qui ne possèdent qu’un faible caractère distinctif ne peuvent bénéficier que d’une protection limitée, en ce sens qu’on peut légitimement s’attendre à ce que le public fasse preuve d’un plus grand discernement et que des différences relativement légères entre les marques de commerce peuvent être suffisantes pour éviter toute confusion [voir Prince Edward Island Mutual Insurance c Insurance Co of Prince Edward Island (1999), 86 CPR (3d) 342 (CF 1re inst); et GSW, supra].

[40]  On considère généralement que les marques de commerce principalement constituées d’une ou de plusieurs lettres de l’alphabet possèdent un faible caractère distinctif inhérent [voir GSW, supra]. Il a également été statué qu’un commerçant unique ne devrait pas être autorisé à obtenir des droits de propriété exclusifs sur une lettre ou une combinaison de lettres qui se trouvent à être ses initiales, au détriment d’autres commerçants pouvant avoir les mêmes initiales [Afred Grass c Grand Industries (1991), 47 FTR 231]. En conséquence, les marques constituées de lettres doivent généralement le caractère distinctif inhérent qu’elles possèdent à leurs autres éléments, à savoir leurs caractéristiques graphiques. En effet, dans le cas des marques constituées d’une seule lettre, les différences dans les caractéristiques graphiques peuvent être suffisantes pour distinguer les marques l’une de l’autre [voir, à titre d’exemple, Cerruti 1881 SA c Conte of Florence SPA (1990), 34 CPR (3d) 452 (COMC)].

[41]  La Requérante soutient que la Marque, qui comporte des éléments graphiques différents et en plus grand nombre, en particulier les éléments d’arrière-plan que sont le cercle plein derrière la lettre P et l’anneau de points entourant le cercle, est clairement la plus distinctive des deux marques de commerce en cause.

[42]  Cependant, je suis d’avis que les caractéristiques graphiques de chacune des marques de commerce sont essentiellement des embellissements de la lettre P.

[43]  À cet égard, en général, les caractéristiques graphiques comme les caractères fantaisistes ou autres embellissements, qui font partie intégrante des lettres comprises dans une marque de commerce et ne peuvent être dissociées des lettres elles-mêmes, contribuent peu au caractère distinctif inhérent d’une marque de commerce [voir Canadian Jewish Review Ltd c The Registrar of Trade-marks (1961), 37 CPR 89 (C de l’Éch); et John Labatt Ltd c Canada (Registrar of Trade Marks) (1984), 79 CPR (2d) 110 (CF 1re inst)]. En l’espèce, même si je ne dirais pas que les motifs végétaux font partie intégrante des lettres, les motifs végétaux sont au moins assez étroitement liés à leur lettre respective.

[44]  De plus, ces caractéristiques graphiques pourraient fort bien être perçues comme étant associées aux produits et aux services alimentaires des parties, en suggérant des ingrédients végétariens prenant la forme, en particulier, de germes ou de grains de céréale.

[45]  Il a été statué à maintes reprises que, lorsque la partie dominante d’une marque de commerce est un mot descriptif ou suggestif courant, son importance s’en trouve diminuée [voir Park Avenue, supra, et Vancouver Sushiman Ltd c Sushiboy Foods Co (2002), 22 CPR (4th) 107 (COMC)]. À cet égard, il est bien établi que les marques descriptives ne possèdent pas de caractère distinctif inhérent [voir Prince Edward Island Mutual Insurance c Insurance Co of Prince Edward Island (1999), 86 CPR (3d) 342 (CF 1re inst)]. De façon similaire, les éléments graphiques qui suggèrent un aspect des produits ou des services du propriétaire de la marque de commerce peuvent ne pas contribuer de manière significative au caractère distinctif de la marque de commerce [voir, à titre d’exemple, CanWest Global Communications Corp c TV Globo Ltda, 2007 CarswellNat 1061 (COMC)]. Par conséquent, en l’espèce, les consommateurs pourraient avoir tendance à minimiser l’importance des motifs végétaux, dans la mesure où ces motifs suggèrent un aspect des produits et des services des parties.

[46]  Néanmoins, dans la mesure où le motif végétal compris dans la marque de commerce de l’Opposante est plus élaboré que les courbes plus simples du dessin de la Requérante, j’estime que l’élément végétal de l’Opposante est celui des deux motifs qui possède le plus de caractère distinctif inhérent.

[47]  La Marque comporte également un élément graphique supplémentaire : l’arrière-plan circulaire bordé d’un contour pointillé. Cependant, j’estime qu’un arrière-plan ayant une forme géographique aussi simple ne constitue pas une caractéristique particulièrement distinctive. Le fait que l’arrière-plan soit bordé d’un contour pointillé ne contribue guère à accroître le caractère distinctif de la Marque. Je suis d’avis que cet élément d’arrière-plan a principalement pour effet d’encadrer le P embelli. En effet, comme je l’indiquerai ci-dessous, l’affidavit Ziv démontre que la Marque est présentée au moins à l’occasion sans cet arrière-plan, ce qui tend à appuyer la conclusion selon laquelle cet élément ne constitue pas une caractéristique essentielle de la Marque.

[48]  En conséquence, bien que les caractéristiques graphiques des marques de commerce confèrent à chacune un certain caractère distinctif inhérent, dans l’ensemble, ni l’une ni l’autre des marques de commerce ne possède un caractère distinctif inhérent marqué. De plus, si je considère chacune des marques de commerce dans son ensemble, j’estime qu’aucune des marques de commerce ne possède un caractère distinctif inhérent plus marqué que l’autre.

Mesure dans laquelle les marques de commerce sont devenues connues

[49]  Le caractère distinctif d’une marque de commerce peut être accru par l’emploi et la promotion au Canada [voir Sarah Coventry Inc c Abrahamian (1984), 1 CPR (3d) 238 (CF 1re inst); GSW, supra]. Les parties ont toutes deux produit une preuve à cet égard.

Preuve d’emploi et de promotion de la Requérante

[50]  La preuve de la Requérante en ce qui concerne l’emploi et la promotion de la Marque au Canada est constituée de l’affidavit de Soly Ziv, le fondateur, président, secrétaire, administrateur et gestionnaire du franchisage et du marketing de la Requérante.

[51]  Dans son affidavit, M. Ziv affirme que la Requérante, de concert avec sa prédécesseure en titre Pumpernickel’s European Style Sandwiches Ltd. et ses franchisés et licenciés (collectivement les Sociétés de la Requérante), exploite des comptoirs de restauration rapide et offre des services de traiteur, de livraison et de mets à emporter, en liaison avec le nom et la marque de commerce PUMPERNICKEL’S, depuis au moins aussi tôt que mai 1986. Il explique que les restaurants PUMPERNICKEL’S sont principalement des restaurants à service rapide qui offrent également des services de traiteur spécialisés dans les aliments de style déli, y compris, sans toutefois s’y limiter, les sandwichs et les repas froids et chauds, les salades, les soupes, les produits alimentaires pour le petit-déjeuner, les boissons gazeuses et les desserts. Selon M. Ziv, à la date de son affidavit, il y avait 12 restaurants PUMPERNICKEL’S au Canada, tous situés dans la région du Grand Toronto et dans les environs, dix ayant ouvert leurs portes entre 1986 et 2013 et deux ayant ouvert leurs portes en 2016. De plus, un treizième restaurant a été exploité à Toronto, [Traduction] « d’environ l’an 2000 » à décembre 2013. M. Ziv souligne en particulier que l’achalandage quotidien au restaurant situé dans l’aire de restauration de la First Canadian Place — lequel a ouvert ses portes en 1986 — est [Traduction] « très important », car « des dizaines de milliers de personnes travaillent dans l’édifice, ou se rendent dans l’édifice, chaque jour » [au para 33].

[52]  Comme pièces 16 et 17, M. Ziv joint à son affidavit des photographies représentatives d’enseignes intérieures et extérieures et de tableaux de menu des restaurants PUMPERNICKEL’S. M. Ziv atteste que ces exemples sont représentatifs de la manière dont la Marque est employée depuis au moins novembre 2014. La Marque figure effectivement bien en vue sur ces enseignes. Dans bon nombre des photographies, le mot PUMPERNICKEL’S figure à côté de la Marque, dans l’arrière-plan circulaire de la Marque ou ailleurs sur la même enseigne ou sur une enseigne différente, dans le même champ de vision. Dans ces exemples, le mot PUMPERNICKEL’S est souvent stylisé : le P initial présente la même pousse végétale que celle comprise dans la Marque (mais pas l’arrière-plan circulaire), et l’apostrophe prend la forme d’un pois chiche en germination. Je souligne également que dans un de ces exemples — sur le coin du mur extérieur du restaurant situé au Centre TD — la Marque figure seule, sans l’arrière-plan circulaire (pièce 17).

[53]  Comme pièce 18, M. Ziv joint à son affidavit une copie de l’édition de 2016 de la brochure des services de traiteur de Pumpernickel’s, représentative de la manière dont la Marque est employée depuis au moins novembre 2014. Il atteste que la brochure peut être téléchargée sur le site Web de Pumpernickel’s et qu’elle est mise à la disposition des clients sous la forme d’un catalogue papier à emporter dans les différents restaurants. Il ajoute que de telles copies papier sont généralement aussi envoyées par la poste lorsque la brochure est mise à jour ou lorsqu’un nouveau restaurant ouvre ses portes, et qu’elles sont envoyées sur demande avec les livraisons des produits de traiteur. Il affirme que [Traduction] « [p]lusieurs milliers » de ces catalogues ont été envoyés par la poste à des clients potentiels ou ont été ramassés par des clients dans les différents restaurants depuis novembre 2014 et que des milliers de clients ont commandé des produits de traiteur après avoir consulté la brochure téléchargeable. La Marque figure bien en vue à côté du mot stylisé PUMPERNICKEL’S au-dessus de la table des matières et, là encore, elle est présentée seule à côté des renseignements sur les commandes à la dernière page. Certaines des images présentées dans la brochure montrent également la Marque sur des éléments semblables à ceux présentés dans d’autres pièces (examinées ci-dessous), y compris sur des enseignes, ainsi que sur des emballages de sandwich et un camion de livraison.

[54]  Comme pièce 19, M. Ziv joint à son affidavit des captures d’écran de pages représentatives du site Web de la Requérante accessible au www.pumpernickels.ca, qui est utilisé pour annoncer les produits, les services de restauration rapide et les services de traiteur de la Requérante, ainsi que des possibilités de franchise. Je souligne que les photographies d’enseignes de restaurant en pièce 16 ont également été imprimées à partir de ce site. M. Ziv affirme que, depuis au moins aussi tôt que 2014, la Marque est présentée dans la bannière supérieure de chaque page Web et parfois ailleurs sur ces pages, et que les exemples fournis sont représentatifs de la manière dont la Marque est employée depuis au moins novembre 2014. La pièce 19 montre effectivement à la fois la Marque et le mot stylisé PUMPERNICKEL’S figurant bien en vue dans la bannière supérieure des pages Web. La variante de la Marque qui inclut le mot PUMPERNICKEL’S dans le cercle figure dans le pied de page. Cependant, je souligne que, sur l’imprimé en pièce 16, cette variante de la Marque figure dans le pied de page sans l’arrière-plan circulaire.

[55]  M. Ziv affirme que, depuis l’adoption de la Marque en novembre 2014, cette dernière est également employée par les Sociétés de la Requérante dans divers autres documents publicitaires et promotionnels. À l’appui, il joint des photographies ou des copies des éléments suivants à son affidavit, et il atteste que ces spécimens sont représentatifs de la manière dont la Marque est employée depuis au moins novembre 2014 :

  • des sacs de mets à emporter et des sacs de livraison (pièces 4 à 6);
  • une serviette cocktail du type de celles fournies avec les commandes de produits de traiteur (pièce 7);
  • une boîte de livraison de produits de traiteur (pièce 8);
  • des pochettes et des emballages pour aliments employés dans les différents restaurants (pièces 9 à 11);
  • un gobelet à café en carton du type de ceux employés dans les restaurants et fournis avec les commandes de produits de traiteur (pièce 10);
  • des chemises portées par le personnel (pièces 12 à 13);
  • une facture partiellement caviardée se rapportant à une commande de produits de traiteur (pièce 14); et
  • un camion de livraison des services de traiteur qui, atteste M. Ziv, est l’un des six véhicules du genre à être exploités (pièce 15).

[56]  La Marque figure bien en vue sur chacun des éléments susmentionnés, généralement à côté du mot stylisé PUMPERNICKEL’S. Les exceptions comprennent la chemise boutonnée en pièce 12, sur laquelle PUMPERNICKEL’S figure dans l’arrière-plan circulaire de la Marque; la chemise à manches courtes en pièce 13, sur laquelle la Marque figure seule sur une manche (il est difficile de savoir si PUMPERNICKEL’S pourrait figurer ailleurs sur la chemise); et, en particulier, le sac de livraison illustré en pièce 6, sur lequel la Marque figure seule sans l’arrière-plan circulaire.

[57]  Je souligne également que la Marque figure sur les éléments suivants, qui sont représentés sous la forme d’images sur le site Web de la Requérante (pièce 19) :

  • des enseignes de restaurant, dont l’enseigne du Centre TD qui présente la Marque sans son arrière-plan circulaire;
  • des emballages de sandwich;
  • une carte-cadeau;
  • un grand chèque remis dans le cadre d’une initiative de bienfaisance menée en 2015; et
  • des vignettes de vidéo.

[58]  Enfin, M. Ziv fournit les chiffres des ventes de la Requérante de même que les chiffres des dépenses engagées dans la publicité et la stratégie de marque. Selon ces chiffres, les dépenses annuelles de la Requérante engagées dans la publicité et la stratégie de marque sont passées de plus de 150 000 $ à plus de 300 000 $ de 2012 à 2016, et ses ventes annuelles sont passées de plus de 10 millions de dollars à plus de 15 millions de dollars pendant la même période.

Preuve d’emploi et de promotion de l’Opposante

[59]  La preuve concernant l’emploi et la promotion du Dessin P de l’Opposante au Canada est constituée de la déclaration de Josée Fiset, une cofondatrice de l’Opposante et la vice-présidente responsable de la gestion de son réseau de détail.

[60]  Mme Fiset allègue l’emploi du Dessin P de l’Opposante en liaison avec les services visés par l’enregistrement — énoncés à l’annexe A ci-dessous — depuis au moins aussi tôt que le 30 octobre 2010. Elle confirme également l’emploi du Dessin P de l’Opposante en liaison avec les produits que sont les amandes caramélisées, les viandes et les charcuteries depuis au moins aussi tôt que septembre 2010 (mais sans autre preuve à l’appui), et elle confirme l’emploi au Canada en liaison avec tous les autres produits visés par l’enregistrement, pour lesquels une déclaration d’emploi a été produite le 23 avril 2012.

[61]  Plus particulièrement, Mme Fiset affirme que, à la date de sa déclaration, l’Opposante, elle-même ou par l’entremise de franchisés et de licenciés, exploitait 26 boutiques qui vendaient des produits de boulangerie et des pâtisseries, des viennoiseries, des charcuteries, des mets préparés, des chocolats, des conserves et des confiseries. Elle emploie le terme « Boulangeries » pour désigner collectivement ces boutiques. Elle précise que 24 des Boulangeries sont situées dans la région de Montréal et qu’il y en a une dans la ville de Québec et une autre à Ottawa. Elle affirme en outre que plusieurs des Boulangeries offrent une section « café bistro » avec service aux tables et que plusieurs d’entre elles offrent un service de traiteur depuis « bien avant » novembre 2014.

[62]  Pour démontrer la manière dont le Dessin P de l’Opposante est employé en liaison avec ces services, Mme Fiset fournit, sous la forme de pièces jointes à sa déclaration, des photographies de devantures de Boulangeries et d’enseignes intérieures; des photographies de produits des Boulangeries et de blocs sanitaires arborant sa marque; et des exemples de publications promotionnelles, dont des imprimés tirés du site Web de l’Opposante accessible au www.premieremoisson.com. Le Dessin P de l’Opposante figure dans l’ensemble du matériel produit en pièce, souvent au-dessus ou à côté des mots PREMIÈRE MOISSON.

[63]  Je constate en particulier que la pièce C contient des photographies de quatre devantures des Boulangeries. Selon Mme Fiset, chacun de ces établissements a commencé à présenter le Dessin P de l’Opposante à un moment donné entre le 14 janvier 2013 (établissement de Kirkland) et avril 2014 (établissement de la rue Masson). Chaque devanture présente le Dessin P de l’Opposante. À au moins deux des établissements, les mots PREMIÈRE MOISSON figurent à côté du Dessin P de l’Opposante ou sur une enseigne située à proximité.

[64]  Le Dessin P de l’Opposante figure seul aux endroits suivants illustrés dans les pièces :

  • sur le mur se trouvant immédiatement derrière un bloc sanitaire à la Boulangerie de la ville de Québec (pièce G);
  • sur un mur présentant du texte promotionnel au-dessus d’accessoires ressemblant à des robinets à la Boulangerie de la rue Masson (pièce H);
  • sur des sacs à provisions réutilisables (pièce I);
  • sur des médaillons utilisés comme garniture à desserts, dont ceux qui sont présentés sur le site Web de l’Opposante (pièces I, K et L); et
  • sur un ruban de gâteau, bien que les mots PREMIÈRE MOISSON figurent également sur le même ruban (présenté sur une page Web en pièce K).

[65]  Le Dessin P de l’Opposante figure au-dessus des mots PREMIÈRE MOISSON sur les éléments suivants illustrés dans les pièces :

  • une carte postale accompagnée de deux coupons qui, affirme Mme Fiset, a été envoyée à l’impression en octobre 2010 et a par la suite été envoyée par la poste pour promouvoir les Boulangeries et les produits de l’Opposante (pièce D);
  • la page couverture d’une brochure de Noël qui, affirme Mme Fiset, a été envoyée par la poste en novembre 2010 pour promouvoir les Boulangeries et les produits de l’Opposante (pièce E);
  • une serviette de table en papier; Mme Fiset affirme que plus de 25 millions de ces serviettes de table ont été fournies aux clients des Boulangeries depuis 2011 (pièce F);
  • des enseignes indiquant la présence de contenants de recyclage, de compostage et de déchets dans les blocs sanitaires susmentionnés (pièce G);
  • une variété d’étiquettes de produits, d’emballages, de cartes et d’affiches; sur certains d’entre eux, le Dessin P de l’Opposante est suivi du nombre 25 et de deux mots qui sont illisibles dans les photographies (pièce I);
  • des enseignes intérieures et extérieures présentées sur le site Web de l’Opposante (pièce J);
  • des étiquettes de pots de confiture et de tartinade présentés sur le site Web de l’Opposante (pièce K); et
  • une carte-cadeau présentée sur le site Web de l’Opposante (pièce K).

[66]  Je souligne que la Marque est également présentée sur la chemise d’un employé illustrée dans une des images tirées du site Web (pièce J); les mots écrits sous la Marque sont illisibles dans l’image floue, mais ils semblent correspondre aux mots PREMIÈRE MOISSON.

[67]  Sur certains des imprimés tirés du site Web, un symbole constitué d’un point d’interrogation dans une boîte figure dans l’en-tête de la page Web et à d’autres endroits. Mme Fiset atteste que, à l’écran, ce symbole est remplacé par le Dessin P de l’Opposante suivi des mots PREMIÈRE MOISSON.

[68]  Enfin, je souligne que certains des éléments illustrés dans les pièces sont ornés d’un motif répété du Dessin P de l’Opposante et d’une variante de ce dernier. La variante est constituée de deux Dessins P de l’Opposante joints par des vrilles et des épis de blé supplémentaires. Ces éléments comprennent ce qui suit :

  • des sacs à pain (pièce I);
  • un ruban scellant un petit contenant en plastique (pièce I); et
  • des éclats servant de garniture à desserts présentés sur le site Web de l’Opposante (pièce K).

[69]  Mme Fiset affirme que les différentes photographies en pièce I sont représentatives de la manière dont les produits de l’Opposante ont été commercialisés dans ses Boulangeries depuis « bien avant » novembre 2014. Elle affirme également que les produits illustrés sur les pages de produits du site Web (pièce K) sont annoncés sur le site depuis au moins janvier 2011 et que les produits illustrés sur les pages des services de traiteur du site Web (pièce L) sont annoncés sur le site depuis « bien avant » novembre 2014. Cependant, ses déclarations n’indiquent pas clairement si le site Web et les produits qui y sont illustrés arborent le Dessin P de l’Opposante — de la même manière ou autrement — depuis ces dates.

[70]  Des rapports de Google Analytics concernant le trafic sur le site du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2016 sont joints comme pièce M à l’affidavit de Mme Fiset. Ces rapports indiquent que le site Web a eu plus de 200 000 visiteurs et a enregistré environ 2 millions de consultations de pages par année pendant cette période, ce qui représente plus d’un million de visiteurs et plus de 10 millions de consultations de pages pour l’ensemble de cette période.

[71]  Enfin, Mme Fiset affirme que, depuis l’exercice financier 2011-2012, l’Opposante a engagé des dépenses de plus de 800 000 $ par année pour faire la promotion de ses Boulangeries et des produits qui y sont vendus, et que les ventes annuelles réalisées dans ses Boulangeries s’élèvent à plus de 45 millions de dollars.

Conclusion en ce qui concerne la mesure dans laquelle les marques de commerce sont devenues connues

[72]  Ni l’une ni l’autre des parties ne précise la portion de ses ventes et de ses dépenses publicitaires annuelles qui peut être attribuée précisément aux marques de commerce en cause, par opposition aux marques PUMPERNICKEL’S ou PREMIÈRE MOISSON en général. Il est possible que les efforts publicitaires et les ventes des parties aient eu pour effet de faire davantage connaître les marques PUMPERNICKEL’S et PREMIÈRE MOISSON que les marques de commerce en cause. Par conséquent, une question qui se pose est celle de savoir si l’on peut dissocier le caractère distinctif des marques de commerce en cause de la notoriété acquise par les combinaisons.

[73]  Néanmoins, il ressort de la preuve dans son ensemble qu’une grande partie de la stratégie de marque de la Requérante inclut la Marque, et M. Ziv atteste que cette preuve est représentative de l’emploi de la Marque depuis au moins en novembre 2014. De façon similaire, il semblerait que, en date de 2014, une grande partie de la stratégie de marque de l’Opposante incluait le Dessin P de l’Opposante.

[74]  On ignore dans quelle mesure exactement le Dessin P de l’Opposante a été employé auparavant et, en particulier, avant la date de premier emploi par la Requérante. En ce qui concerne les services de « café bistro » et de traiteur, Mme Fiset formule seulement de vagues allégations selon lesquelles ces derniers sont offerts depuis « bien avant » novembre 2014. De façon similaire, en ce qui concerne les produits illustrés dans les photographies en pièce I et les pages Web des services de traiteur en pièce L, Mme Fiset allègue seulement que ces derniers sont commercialisés ou annoncés depuis « bien avant » novembre 2014.

[75]  Cependant, une partie de la preuve de Mme Fiset est plus précise. Sa preuve concernant la présentation de la Marque sur des devantures de Boulangeries indique que cette présentation a commencé le 14 janvier 2013 à une Boulangerie, et que trois autres Boulangeries ont emboîté le pas en avril 2014. Elle a également fourni une preuve montrant le Dessin P de l’Opposante figurant au-dessus des mots PREMIÈRE MOISSON sur une carte postale accompagnée de coupons envoyée à l’impression en octobre 2010 et envoyée ensuite par la poste; sur une brochure de Noël envoyée par la poste en novembre 2010; et sur des serviettes de table en papier utilisées dans les Boulangeries depuis 2011. Sa preuve concernant les produits illustrés sur les pages de produits du site Web de l’Opposante (pièce K) indique que ces produits sont annoncés sur le site depuis au moins janvier 2011; cependant, comme je l’ai souligné ci-dessus, il est difficile de savoir si les imprimés fournis sont représentatifs de la manière dont le Dessin P de l’Opposante a été présenté sur le site depuis ce temps. À titre d’exemple, Mme Fiset ne précise pas à quel moment le Dessin P de l’Opposante a été présenté pour la première fois dans les en-têtes de page ou à quel moment il a été présenté pour la première fois sur les types de présentation illustrés sur le site, comme des étiquettes de pots, des garnitures pour les desserts et des rubans de gâteaux, ou sur des cartes-cadeaux.

[76]  Néanmoins, en général, la preuve décrite ci-dessus, et en particulier les chiffres des ventes et des dépenses publicitaires, favorise l’Opposante. À la lumière de cette preuve, je conclus que la Marque est devenue connue dans une certaine mesure — plus précisément, dans la région de Toronto —, mais que le Dessin P de l’Opposante est devenu connu dans une plus grande mesure, principalement dans la région de Montréal. Étant donné qu’il ressort de la preuve que le Dessin P de l’Opposante est devenu connu dans une plus grande mesure que la Marque, ce facteur favorise l’Opposante.

Période pendant laquelle les marques de commerce ont été en usage

[77]   Ainsi qu’il ressort de la preuve décrite ci-dessus, la Requérante emploie la Marque en liaison avec les Services depuis au moins aussi tôt que novembre 2014, tandis que l’emploi du Dessin P de l’Opposante en liaison avec des services d’exploitation de ses Boulangeries remonte à au moins aussi tôt qu’octobre 2010. En outre, bien que Mme Fiset allègue seulement l’emploi du Dessin P de l’Opposante en liaison avec des services de café bistro et de traiteur depuis « bien avant » novembre 2014, la déclaration d’emploi de l’Opposante produite le 23 avril 2012 me permet d’inférer au moins un emploi minimal du Dessin P de l’Opposante en liaison avec ces services depuis cette date [voir Entre Computer Centers Inc c Global Upholstery Co (1991), 40 CPR (3d) 427 (COMC) en ce qui concerne les inférences qui peuvent être tirées d’un enregistrement à première vue].

[78]  De même, l’Enregistrement de l’Opposante me permet d’inférer au moins un emploi minimal du Dessin P de l’Opposante en liaison avec des amandes caramélisées, des viandes et des charcuteries depuis au moins aussi tôt que septembre 2010, et en liaison avec tous les autres produits visés par l’enregistrement depuis le 23 avril 2012.

[79]  En conséquence, ce facteur favorise également l’Opposante.

Genre des produits et des services et nature du commerce des parties

[80]  S’agissant du genre des produits et des services et de la nature du commerce des parties au titre de l’article 12(1)d) de la Loi, je dois comparer l’état déclaratif des produits et des services qui figure dans la demande du requérant avec l’état déclaratif des produits et des services qui figure dans l’enregistrement de l’opposant, eu égard aux voies de commercialisation qu’emprunteraient normalement ces produits et ces services [voir Mr Submarine Ltd c Amandista Investments Ltd (1987), 19 CPR (3d) 3 (CAF); et Henkel Kommanditgesellschaft auf Aktien c Super Dragon Import Export (1986), 12 CPR (3d) 110 (CAF)]. L’examen de ces états déclaratifs doit être effectué dans l’optique de déterminer le type probable d’entreprise ou de commerce envisagé par les parties, et non l’ensemble des commerces que le libellé est susceptible d’englober; une preuve de la nature véritable des commerces exercés par les parties est utile à cet égard [voir McDonald’s Corp c Coffee Hut Stores Ltd (1996), 68 CPR (3d) 168 (CAF)].

[81]  D’après une lecture objective des états déclaratifs des services figurant dans la Demande et dans l’Enregistrement de l’Opposante, il semble que le genre des services et la nature du commerce des parties soient en grande partie les mêmes. En effet, la preuve démontre que les parties exploitent et franchisent toutes deux des établissements à service rapide et de traiteur qui accordent une importance similaire aux produits alimentaires naturels et artisanaux.

[82]  Les services annoncés sur les pages Web de l’Opposante fournies comme pièces J à L comprennent la création, la préparation et la vente de produits de boulangerie, de pâtisseries, de viennoiseries, de charcuteries, de mets préparés et de spécialités fines, ainsi que des services de traiteur. Le site Web fournit aussi des recettes des chefs cuisiniers de l’Opposante. Une des images en pièce J montre une devanture d’établissement avec des tables et des chaises, bien que je souligne que l’enseigne dans cette image en particulier ne présente pas le Dessin P de l’Opposante.

[83]  Ces services recoupent les services de restaurant, de traiteur, de mets à emporter et de livraison énumérés dans la Demande et annoncés sur le site Web de la Requérante. Il existe également un recoupement avec le service consistant à offrir un site Web présentant des vidéos dans les domaines de la préparation des aliments et des recettes énoncés dans la Demande. À cet égard, je souligne que certaines des vignettes de vidéo sur le site Web de la Requérante comportent des légendes qui mentionnent la préparation de sandwichs, ce qui donne à penser que les vidéos présentent des recettes de préparation de sandwichs.

[84]  La preuve démontre qu’il existe un important recoupement entre les produits vendus dans les [Traduction] « comptoirs de restauration rapide » de la Requérante et les produits vendus dans les « Boulangeries » de l’Opposante.

[85]  À cet égard, M. Ziv atteste que les restaurants de la Requérante sont spécialisés dans les aliments de style déli, y compris, sans toutefois s’y limiter, les sandwichs et les repas froids et chauds, les salades, les soupes, les produits alimentaires pour le petit-déjeuner, les boissons gazeuses et les desserts. La brochure et les pages Web jointes comme pièces 18 et 19 à son affidavit démontrent que les produits alimentaires offerts par la Requérante comprennent des aliments pour le petit-déjeuner; divers plateaux de fruits, de légumes, de pains et de charcuteries; des sandwichs et des sandwichs roulés; des salades; des plats principaux à base de viande et de pâtes alimentaires; des plats d’accompagnement; des hors-d’œuvre; des sucreries et des desserts; et des boissons.

[86]  Les produits visés par l’Enregistrement de l’Opposante comprennent des produits alimentaires pour le petit-déjeuner, à savoir des mélanges à crêpes et à gaufres; des pâtisseries; des pains; des confitures; des fruits et des légumes en conserve et séchés; des cafés et des jus de fruits; des produits de charcuterie; des sandwichs; des salades; des mets préparés; des pâtes alimentaires et des sauces pour pâtes alimentaires; des riz aromatisés ou assaisonnés; des amuse-gueules; des confiseries; et diverses boissons; entre autres produits. En outre, les documents promotionnels, les photographies en magasin et les pages Web joints comme pièces D, E et I à L à la déclaration Fiset démontrent que les produits alimentaires offerts dans les faits par l’Opposante comprennent des pâtisseries; des pains; des confitures et des tartinades; du café; des produits qui semblent être des fromages; des produits de charcuterie; des plateaux de fruits, de légumes, de fromages et de charcuteries; des sandwichs et des canapés; des salades; des sauces et de la soupe en pots; des mets préparés (quiches, pâtés à la viande, salades de pâtes alimentaires, mini-pizzas); des bouchées; des plats d’accompagnement; des biscuits, des muffins, des gâteaux et des tartes; et des sucreries, à savoir des guimauves.

[87]  Dans l’ensemble, il existe un recoupement considérable entre les services des parties — ainsi qu’entre leurs produits — et leurs voies de commercialisation.

[88]  Je souligne que les services de la Requérante sont à l’heure actuelle seulement offerts en Ontario — dans la région de Toronto — tandis que les services de l’Opposante sont principalement offerts dans la province du Québec, à l’exception d’une seule Boulangerie à Ottawa, en Ontario. Cependant, rien n’empêche les parties d’exploiter leurs établissements respectifs dans les mêmes provinces, voire dans les mêmes villes.

[89]  Par conséquent, ces facteurs favorisent également l’Opposante.

Autres circonstances de l’espèce

[90]   Dans son plaidoyer écrit, la Requérante invoque plusieurs autres circonstances de l’espèce, lesquelles sont examinées ci-dessous.

État du registre et état du marché

[91]  La Requérante soutient qu’un commerçant qui emploie une marque de commerce comprenant un élément couramment employé dans le commerce ne peut s’attendre à ce que cette marque de commerce bénéficie d’une protection étendue.

[92]  Effectivement, l’emploi courant d’un élément incite les acheteurs à porter une plus grande attention aux autres caractéristiques de ces marques de commerce et à les distinguer les unes des autres au moyen de ces autres caractéristiques [voir Polo Ralph Lauren Corp c United States Polo Assn (2000), 9 CPR (4th) 51 (CAF); Maximum Nutrition Ltd c Kellogg Salada Canada Inc (1992), 43 CPR (3d) 349 (CAF)].

[93]  L’affidavit de Mme Palmer présente en preuve, par la voie de documents joints comme pièce, les résultats d’une recherche que cette dernière a effectuée dans le registre canadien des marques de commerce le 30 août 2017. La recherche visait à repérer les marques de commerce qui comprennent la lettre P — soit seule ou en conjugaison avec un mot dans lequel le P occupe une place importante — employées en liaison avec des produits alimentaires; en liaison avec des services de restaurants, de cafés, de bistros, de boulangeries, de charcuteries, de comptoirs de restauration rapide, d’épiceries ou de dépanneurs et ainsi de suite; et qui sont des Marques interdites suivant l’article 9 de la Loi (dans sa version immédiatement antérieure au 17 juin 2019). La recherche a révélé l’existence de 116 marques de commerce de ce genre.

[94]  M. Ziv présente des observations sur ces résultats de recherche dans son affidavit. Il exprime la conviction selon laquelle, [Traduction] « compte tenu des nombreuses marques figuratives P qui sont employées et qui font l’objet de demandes en instance ou ont été enregistrées au Canada, toutes en liaison avec un produit [sic] et/ou des services dans l’industrie des services alimentaires, les consommateurs ont l’habitude de distinguer entre elles les marques de ce genre » [au para 37]. M. Ziv prétend également savoir qu’il est [Traduction] « extrêmement courant » que des entités, y compris dans l’industrie des services alimentaires, emploient une lettre ou des lettres comme marques de commerce pour identifier leurs produits et leurs services respectifs, surtout lorsque cette lettre représente la première lettre du nom de marque ou de la marque de commerce [au para 33]. Il prétend qu’il est par conséquent [Traduction] « naturel » que la Requérante adopte un dessin P comme marque de commerce, pour représenter et compléter la marque PUMPERNICKEL’S [ibid.].

[95]  Cependant, la question de savoir quelles inférences peuvent être tirées de la preuve de l’état du registre en ce qui concerne la perception des consommateurs et la probabilité de confusion est une question qui doit être tranchée par le registraire. M. Ziv n’a pas établi qu’il est un expert en droit canadien des marques de commerce et, en conséquence, je ne suis pas disposé à accorder de poids à ses opinions à cet égard.

[96]  Dans son plaidoyer écrit, la Requérante donne un certain nombre d’exemples parmi les résultats de recherche dans lesquels la lettre P représente la première lettre d’un nom de marque ou d’une marque de commerce, qu’elle soit employée seule ou en liaison avec un nom de marque ou une marque. Cependant, comme je l’ai mentionné ci-dessus, c’est la Marque elle-même qui doit être considérée au moment d’évaluer la probabilité de confusion, et non la Marque en conjugaison avec d’autres éléments avec lesquels elle peut ou non être employée. Bien qu’il puisse y avoir des cas dans lesquels une marque de commerce a acquis un caractère distinctif en tant qu’acronyme d’un nom commercial, d’un nom de marque ou d’une marque de commerce, comme je l’ai souligné ci-dessus, je ne suis pas convaincu que la preuve de la Requérante établit que la Marque a acquis une telle signification secondaire en l’espèce. La preuve concernant des enregistrements de marques de commerce constituées de la lettre P en conjugaison avec un mot qui commence par la lettre P n’est par conséquent pas pertinente.

[97]  La Requérante mentionne également 15 enregistrements et quatre demandes en instance inscrits au nom de tiers et se rapportant à des marques de commerce qu’elle décrit comme étant constituées uniquement d’un dessin P stylisé, pour emploi en liaison avec des produits alimentaires ou des services liés à la vente de produits alimentaires. La Requérante soutient que ces résultats de recherche établissent clairement que les marques de commerce figuratives P sont très courantes dans le registre en liaison avec de tels produits et services.

[98]  Cependant, parmi ces marques de commerce précises, seulement neuf présentent la lettre P seule dans une police de caractères relativement simple. Huit des autres marques de commerce sont très stylisées, dont certaines au point que la lettre P est à peine reconnaissable. Les deux dernières marques de commerce comprennent une autre lettre ou d’autres éléments nominaux : les mots « we deliver » [nous livrons] dans le cas de la marque P We Deliver & Dessin de flèche de Panago Pizza Inc., et la lettre L dans le cas de la marque L P & Dessin de Lovepizza Inc.

[99]  En outre, la lettre P est combinée à un motif végétal dans seulement trois des neuf dessins :

Enregistrement no LMC356,414

Enregistrement no LMC413,328

Demande no 1,564,478

[100]  Cependant, aucun de ces dessins ne représente la lettre P dans une police de caractères standard combinée à une pousse ou à une vrille. Le dessin visé par l’enregistrement no LMC356,414 présente la lettre P dans une police de caractères standard, mais le motif végétal prend la forme d’une fleur positionnée dans l’ouverture du P. Les dessins visés par l’enregistrement no LMC413,328 et par la demande no 1,564,478 présentent des pousses ou des vignes recourbées, mais ils n’embellissent pas une lettre distincte de l’alphabet. De plus, bien que ces deux dessins aient la forme générale de la lettre P, je suis d’avis qu’ils ne donnent pas l’impression immédiate de représenter une lettre de l’alphabet.

[101]  Quoi qu’il en soit, dans trois décisions récentes [voir McDowell c Laverana GmbH & Co KG, 2017 CF 327, 154 CPR (4th) 128, McDowell c The Body Shop International PLC, 2017 CF 581, 148 CPR (4th) 195 et Canada Bread Company, Limited c Dr. Smood APS, 2019 CF 306, 2019 CarswellNat 694], la Cour fédérale a statué que, à moins que la preuve de l’état du registre ne comprenne un grand nombre de marques de commerce, l’emploi des marques de commerce citées doit être établi. Lorsqu’un grand nombre de marques de commerce est relevé, le registraire peut inférer que l’élément que toutes les marques ont en commun est employé sur le marché, de sorte que les consommateurs sont à même de distinguer ces marques entre elles d’après leurs caractéristiques supplémentaires. Lorsque le nombre de marques de commerce n’est pas grand, une preuve de leur emploi doit être fournie.

[102]  En l’espèce, la seule preuve d’emploi des marques de commerce relevées par la Requérante se trouve dans l’affidavit de M. Ziv, qui atteste avoir personnellement connaissance de l’existence de deux des marques de commerce déposées qui, affirme-t-il, sont employées pour promouvoir des produits et des services de restaurant et de comptoirs de restauration rapide au Canada depuis de nombreuses années. Une de ces marques de commerce présente la lettre P dans une police de caractères sans empattement dans un dessin ovale, et l’autre présente la lettre P dans une police de caractères avec empattement sur l’arrière-plan de la planète Terre :

Enregistrement no LMC540,756

Enregistrement no LMC742,570

[103]  Je ne suis pas disposé à tirer quelque inférence que ce soit quant à l’état du marché sur le fondement des marques de commerce relevées par la Requérante et de la déclaration de M. Ziv. La preuve de ce dernier n’établit pas la mesure dans laquelle ces deux marques de commerce ont été employées par leur propriétaire respectif pour promouvoir les services de restaurant et de comptoirs de restauration rapide en question ou la mesure dans laquelle des Canadiens peuvent avoir visité de tels établissements ou peuvent avoir autrement été exposés à ces marques de commerce. Par conséquent, sa preuve n’est pas suffisante pour me permettre de tirer des conclusions quant à la perception du public au Canada.

[104]  Compte tenu du petit nombre d’enregistrements et de demandes de marque de commerce pertinents cités et de l’absence d’une preuve probante d’emploi de l’une quelconque des marques citées, il m’est impossible de tirer une quelconque inférence quant à l’état du marché. Par conséquent, je ne peux pas inférer que les consommateurs canadiens ont l’habitude de voir de nombreuses marques de commerce constituées uniquement d’une lettre P embellie dans le domaine d’intérêt des parties, que l’embellissement prenne ou non la forme d’un motif végétal.

[105]  En conséquence, ce facteur ne constitue pas une circonstance significative en l’espèce.

Aucun cas de confusion réelle

[106]  La Requérante fait valoir que les marques de commerce des parties coexistent depuis près de trois ans sans qu’il y ait de preuve de cas de confusion.

[107]  La Requérante souligne que, pendant cette période de coexistence, les parties ont toutes deux exploité plusieurs points de vente au détail dans l’industrie des services alimentaires, réalisant des ventes substantielles de l’ordre de [Traduction] « plusieurs millions de dollars par année » et dépensant des centaines de milliers de dollars par année en publicité.

[108]   Je soulignerais en premier lieu qu’un opposant n’est aucunement tenu de faire la preuve de l’existence de cas de confusion réelle. C’est au requérant qu’incombe le fardeau de démontrer l’absence de probabilité de confusion. Cela étant dit, la Cour suprême du Canada a statué, dans Mattel, Inc c 3894207 Canada Inc (2006), 49 CPR (4th) 321, qu’une inférence défavorable peut néanmoins être tirée de l’absence d’une preuve de confusion réelle, lorsqu’une telle preuve pourrait facilement être obtenue si l’allégation de confusion probable était justifiée. Par conséquent, bien qu’il ne s’agisse pas d’un facteur déterminant, si la preuve démontre un emploi simultané significatif des deux marques de commerce dans la même région pendant de nombreuses années, l’absence d’une preuve de confusion réelle peut appuyer la conclusion que la confusion est peu probable.

[109]  En l’espèce, dans son affidavit, M. Ziv affirme que, à sa connaissance, aucun cas de confusion réelle entre la Marque et le Dessin P de l’Opposante n’a été [Traduction] « signalé » pendant la période de près de trois ans qui a suivi l’adoption de la Marque par la Requérante.

[110]  Cependant, il n’indique pas à qui un tel [Traduction] « signalement » serait fait ou comment, en sa qualité de président, secrétaire, administrateur et gestionnaire du franchisage et du marketing, il serait informé de tels cas de confusion.

[111]  De plus, comme je l’ai mentionné ci-dessus, la preuve indique que la Marque a uniquement été employée dans la région de Toronto, tandis que l’emploi du Dessin P de l’Opposante en Ontario a été limité à un seul établissement à Ottawa. En dehors de cet établissement, l’emploi du Dessin P de l’Opposante a eu lieu dans la région de Montréal et la ville de Québec. Par conséquent, l’absence de cas de confusion réelle pourrait fort bien s’expliquer par le fait que les parties ont employé leur marque de commerce respective dans des régions différentes du Canada.

[112]  En conséquence, j’estime que l’absence d’une preuve de confusion réelle ne constitue pas un facteur pertinent en l’espèce.

Dessin P de l’Opposante non cité pendant l’examen

[113]  La Requérante souligne que le registraire n’a pas identifié le Dessin P de l’Opposante comme étant une marque de commerce dont la similitude est susceptible de créer de la confusion — et donc de faire obstacle à l’enregistrement — pendant l’examen de la Demande. La Requérante soutient essentiellement que, en ne soulevant pas la question de la confusion à l’étape de l’examen, le registraire a clairement indiqué qu’il estimait que la Marque n’était pas susceptible de créer de la confusion avec le Dessin P de l’Opposante.

[114]  Cependant, il a été mentionné à plusieurs reprises que la présente Commission n’est pas en mesure d’expliquer les conclusions des examinateurs. Les examinateurs ne disposent pas des éléments de preuve produits par les parties dans une procédure d’opposition, et le fardeau de preuve n’est pas le même à l’étape de l’examen [voir Simmons IP Inc c Park Avenue Furniture Corp (1994), 56 CPR (3d) 284 (COMC); et Proctor & Gamble Inc c Morlee Corp (1993), 48 CPR (3d) 377 (COMC)]. À cet égard, à l’étape de l’examen, le registraire doit être convaincu que la marque de commerce n’est pas enregistrable pour rejeter la demande au titre de l’article 37 de la Loi. En revanche, dans une procédure d’opposition engagée en vertu de l’article 38 de la Loi, la demande doit être rejetée sauf si le registraire est convaincu, selon la prépondérance des probabilités, que la marque de commerce est enregistrable [voir Joseph E Seagram & Sons, supra; Christian Dior, supra]. En conséquence, la décision d’annoncer une marque de commerce à la suite de l’examen ne signifie pas que la marque de commerce est enregistrable; cette question doit être tranchée par le registraire à l’étape de l’opposition, à la lumière de l’ensemble de la preuve au dossier et des arguments présentés par les deux parties [voir Carling Breweries Ltd c Molson Cos, 1984 CarswellNat 83 (CF 1re inst)].

[115]  Par conséquent, j’estime que la décision de l’examinateur en l’espèce ne constitue pas une circonstance de l’espèce utile à la cause de la Requérante.

Emploi et enregistrement antérieurs par la Requérante de PUMPERNICKEL’S

[116]   Enfin, la Requérante soutient que l’emploi de la Marque de la Requérante [Traduction] « en conjugaison avec, ou à proximité immédiate de, sa marque principale PUMPERNICKELS », sachant que le Dessin P de l’Opposante est employé [Traduction] « en conjugaison avec, ou à proximité immédiate de, sa marque principale PREMIERE MOISSON », atténue la probabilité de confusion.

[117]  Des facteurs comme la stratégie de marque dans le cadre de laquelle une marque de commerce est employée peuvent s’avérer pertinents dans une action en commercialisation trompeuse. Cependant, dans l’évaluation d’un motif d’opposition fondé sur l’article 12(l)d), c’est l’effet de la marque visée par la demande et de la marque de commerce de l’opposant elles-mêmes qui doit être considéré, et non celui de l’ensemble des étiquettes ou des enseignes ou des autres signes qui peuvent accompagner les marques de commerce [voir Reno-Dépôt Inc c Homer TLC Inc, 2010 COMC 11; Groupe Fruits & Passion Inc., 2007 CarswellNat 2319 (COMC)]. De tels facteurs contextuels ne font pas partie de la marque de commerce dont le requérant veut obtenir l’enregistrement, pas plus qu’ils ne limitent la portée de l’enregistrement de l’opposant.

[118]  J’ajouterais également que l’enregistrement antérieur no LMC963,518 de la Requérante relatif à la marque PUMPERNICKEL’S pour emploi en liaison avec ses services n’aide en rien la Requérante à démontrer qu’il n’existe pas de probabilité de confusion entre la Marque et le Dessin P de l’Opposante. Le fait qu’un requérant soit propriétaire d’une ou de plusieurs autres marques de commerce ne lui confère pas automatiquement le droit d’obtenir l’enregistrement d’une autre marque de commerce [Coronet-Werke Heinrich Schlerf GmbH c Produits Ménagers Coronet Inc (1984), 4 CPR (3d) 108, à la p 115 (COMC); Groupe Lavo Inc c Procter & Gamble Inc (1990), 32 CPR (3d) 533 (COMC)]. De plus, étant donné que la marque visée par cet enregistrement antérieur n’inclut pas la Marque ou n’intègre pas autrement un motif qui ressemble à ceux en cause dans la présente affaire, je suis d’avis que l’enregistrement antérieur de la Requérante ne constitue pas une circonstance pertinente de l’espèce.

Conclusion en ce qui concerne la confusion

[119]  Dans le cas des marques constituées de lettres, des différences dans les caractéristiques graphiques peuvent suffire à distinguer les marques l’une de l’autre. La question qui se pose est celle de savoir si un consommateur qui n’a qu’un souvenir général et imprécis de la marque de commerce de l’opposant sera porté à croire, à la vue de la marque du requérant, que les produits et les services liés aux deux marques de commerce pourraient provenir de la même source. Cependant, l’opposant n’a pas le fardeau de démontrer qu’une telle confusion est probable; c’est plutôt au requérant qu’il incombe de convaincre le registraire qu’il n’existe pas de probabilité de confusion.

[120]  En l’espèce, la Requérante soutient que les consommateurs [Traduction] « se rendront certainement compte que les produits et les services alimentaires vendus en liaison avec une marque comprenant la lettre P ne proviennent pas tous de l’Opposante » [au para 10.4.5].

[121]  Cependant, les marques de commerce en cause dans la présente affaire ne partagent pas seulement la lettre P, mais bien une lettre P de laquelle émerge une courte pousse recourbée, et il existe un recoupement important entre les produits, les services et les commerces des parties. Dans les circonstances, la Requérante ne m’a pas convaincu que les différences entre les P en germination respectifs des parties sont telles que les consommateurs n’ayant qu’un vague souvenir du Dessin P de l’Opposante ne sont pas susceptibles de croire que les Services offerts sous la Marque proviennent de la même source. En outre, je suis d’avis que l’arrière-plan de la Marque ne contribue guère à atténuer la probabilité que les consommateurs ayant un vague souvenir du Dessin P de l’Opposante considèrent que la Marque indique la même source.

[122]  Compte tenu de ce qui précède, et étant donné que l’analyse de chaque circonstance de l’espèce favorise l’Opposante, la Requérante n’a pas démontré, selon la prépondérance des probabilités, que la Marque ne crée pas de confusion avec le Dessin P de l’Opposante.

[123]  En conséquence, ce motif d’opposition est accueilli.

Motif d’opposition fondé sur le droit à l’enregistrement suivant l’article 16(1)a)

[124]  L’Opposante allègue également que la Requérante n’est pas la personne ayant droit à l’enregistrement de la Marque parce que, à la date à laquelle la Requérante prétend avoir employé la Marque pour la première fois en liaison avec les Services, à savoir depuis au moins aussi tôt que novembre 2014, la Marque créait de la confusion avec le Dessin P de l’Opposante, employé antérieurement au Canada par l’Opposante en liaison avec ses produits et ses services, tel que revendiqué dans l’Enregistrement de l’Opposante.

[125]  Pour s’acquitter de son fardeau de preuve initial à l’égard de ce motif, l’Opposante doit établir non seulement l’emploi antérieur de sa marque de commerce conformément à l’article 16(1)a) de la Loi, mais également qu’elle n’avait pas abandonné sa marque de commerce à la date de l’annonce de la demande de la Requérante, ainsi que le prescrit l’article 16(5).

[126]  Comme je l’ai mentionné ci-dessus à l’égard du motif d’opposition fondé sur l’article 12(1)d), l’affidavit Fiset fournit une preuve de l’emploi du Dessin P de l’Opposante avant novembre 2014. En outre, je suis disposé à admettre les imprimés tirés du site Web de l’Opposante produits en pièce, datés de 2017, comme preuve que l’Opposante n’avait pas abandonné sa marque de commerce à la date de l’annonce de la Demande, à savoir le 18 mai 2016.

[127]  En conséquence, j’estime que l’Opposante s’est acquittée du fardeau de preuve initial qui lui incombait à l’égard de ce motif d’opposition.

[128]  En ce qui concerne le test en matière de confusion selon les facteurs énoncés à l’article 6(5) de la Loi, la date pertinente plus ancienne qui s’applique au motif d’opposition fondé sur l’article 16(1)a) n’a pas d’incidence significative sur les résultats de l’analyse réalisée à l’égard du motif d’opposition précédent.

[129]  Je soulignerais que la preuve concernant l’emploi du Dessin P de l’Opposante avant novembre 2014 démontre que ce dernier figurait sur des documents promotionnels immédiatement au-dessus des mots PREMIÈRE MOISSON, dans lesquels le second S de MOISSON est stylisé de manière à ressembler à une vrille, comme le montre l’exemple ci-dessous, tiré de la serviette de table en pièce F:

[130]   En conséquence, dans la mesure où l’Opposante s’appuie sur cette marque composée — plutôt que sur le Dessin P de l’Opposante tel qu’il est enregistré — j’estime que la cause de l’Opposante n’est pas aussi solide qu’elle l’était à l’égard du motif fondé sur l’article 12(1)d).

[131]  Néanmoins, il est bien établi que deux ou plusieurs marques de commerce peuvent être employées simultanément du moment qu’elles ne sont pas combinées de façon à rendre indiscernables les marques individuelles [voir AW Allen Ltd c WarnerLambert Canada Inc (1985), 6 CPR (3d) 270 (CF 1re inst); et Loro Piana, supra]. En règle générale, l’emploi d’une marque de commerce en conjugaison avec des mots ou des éléments graphiques supplémentaires constitue un emploi de cette marque de commerce si, sous le coup de la première impression, le public y verrait un emploi de la marque de commerce en soi [Nightingale Interloc Ltd c Prodesign Ltd (1984), 2 CPR (3d) 535 (COMC)]. En l’espèce, bien que la combinaison du Dessin P de l’Opposante et des mots stylisés PREMIÈRE MOISSON puisse constituer une marque composée, j’estime qu’il est apparent que ces deux éléments sont également, en eux-mêmes, des marques de commerce distinctes. Si j’applique les principes énoncés dans Canada (Registrar of Trade Marks) c Cie International pour l’informatique CII Honeywell Bull SA (1985), 4 CPR (3d) 523 (CAF), je suis convaincu que le Dessin P de l’Opposante, en raison de sa taille et de sa position, se démarque suffisamment pour avoir une identité qui se distingue de l’ensemble [pour une conclusion semblable, voir Loro Piana, supra, confirmant (2008), 72 CPR (4th) 220 (COMC).]

[132]  En outre, les exemples d’enseignes extérieures en pièce C jointe à l’affidavit Fiset démontrent que le Dessin P de l’Opposante a été présenté seul bien en vue — sur une enseigne ou un panneau distinct — depuis décembre 2013 à la Boulangerie de l’avenue Monkland, depuis mars 2014 à la Boulangerie de l’avenue du Mont-Royal, et depuis avril 2014 à la Boulangerie de la rue Masson. De plus, Mme Fiset atteste que les sacs à pain et le ruban scellant ornés d’un motif répété fondé sur le Dessin P de l’Opposante sont représentatifs de la manière dont les produits de l’Opposante étaient commercialisés avant novembre 2014.

[133]  Dans les circonstances, je suis convaincu que, en date de novembre 2014, le Dessin P de l’Opposante était devenu connu en lui-même au moins dans une certaine mesure. En revanche, il n’y a aucune preuve de l’emploi ou de la promotion de la Marque au Canada. En conséquence, les facteurs énoncés aux articles 6(5)a) et b) à considérer dans le cadre du test en matière de confusion favorisent là encore l’Opposante. De plus, comme je l’ai souligné ci-dessus, la date pertinente plus ancienne n’a pas d’incidence significative sur l’analyse des autres facteurs.

[134]  En conséquence, ce motif d’opposition est également accueilli.

Motif d’opposition fondé sur le caractère distinctif de la Marque invoqué au titre de l’article 2 de la Loi

[135]  L’Opposante allègue également que la Marque n’est pas distinctive au sens de l’article 2 de la Loi, parce que la Marque n’est pas adaptée à distinguer ni ne peut distinguer les Services des produits et des services de tiers et, plus particulièrement, des produits et des services énoncés à l’annexe A de la présente décision, en liaison avec lesquels le Dessin P de l’Opposante a été employé et continue d’être employé au Canada par l’Opposante et ses licenciés autorisés. La date pertinente qui s’appliquerait à ce motif est la date de production de la déclaration d’opposition [voir Re Andres Wines Ltd c E & J Gallo Winery (1975), 25 CPR (2d) 126, à la p 130 (CAF); et Park Avenue Furniture Corporation c Wickes/Simmons Bedding Ltd (1991), 37 CPR (3d) 412, à la p 424 (CAF)].

[136]  Cependant, l’Opposante ayant obtenu gain de cause relativement à deux motifs, il n’est pas nécessaire que j’examine cet autre motif d’opposition.

Décision

[137]  Compte tenu de ce tout qui précède, dans l’exercice des pouvoirs qui m’ont été délégués en vertu des dispositions de l’article 63(3) de la Loi, je rejette la demande d’enregistrement selon les dispositions de l’article 38(12) de la Loi.

 

Jean Carrière

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

Traduction certifiée conforme

Marie-Pierre Hétu, trad.

 


 

Annexe A

PRODUITS :

(1)  Pâtisseries, viennoiseries, biscuits, tartes et pains, frais ou congelés.

(2)  Fromages.

(3)  Bouillons et soupes.

(4)  Poissons et fruits de mer.

(5)  Mets préparés frais et mets préparés congelés, salades, sandwichs, pizza, amuse-gueules.

(6)  Marchandises d’épicerie, nommément, cafés, jus de fruits, jus de légumes, thés, tisanes, chocolats chauds, breuvages santé chauds et froids, nommément, thé glacé, café glacé, lait, eau de source et eau pétillante, cocoa, confitures, noix, cornichons, huiles comestibles, marinades, chapelure, farines, bases pour muffins, gâteaux, crêpes, gaufres et biscuits, levure, miel, sirop d’érable, tartinades sucrées à base de chocolat, caramel, fruits et noix, pâtes alimentaires, sauces pour pâtes alimentaires, riz aromatisés ou assaisonnés, café en grains, céréales, épices, assaisonnements, sel, vinaigres, moutardes, mayonnaises, sucre, fruits et légumes en conserve, fruits et légumes séchés, tapenades, confits salés, chutney, sorbets et crème glacée.

(7)  Chocolats, confiseries, nommément, confiseries au chocolat, aux amandes, aux arachides, glacées et sucrées.

(8)  Articles ménagers, nommément, sacs (général), sacs d’épicerie, serviettes de table, tasses à boire.

(9)  Certificats-cadeaux et cartes fidelité [sic].

(10)  Amandes caramélisées.

(11)  Viandes et charcuteries.

SERVICES :

(1)  Services d’opération d’un magasin d’alimentation gastronomique, charcuterie, épicerie, pâtisserie, boulangerie, prêt à manger, conserves et confiserie.

(2)  Café bistrot.

(3)  Services de traiteur.


 


COMMISSION DES OPPOSITIONS DES MARQUES DE COMMERCE

OFFICE DE LA PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE DU CANADA

COMPARUTIONS ET AGENTS INSCRITS AU DOSSIER

___________________________________________________

Aucune audience tenue

AGENT(S) AU DOSSIER

Norton Rose Fulbright Canada LLP/S.E.N.C.R.L., s.r.l.

POUR L’OPPOSANTE

Sheldon S. Lazarovitz

POUR LA REQUÉRANTE

 

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