Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

THE REGISTRAR OF TRADEMARKS

Référence : 2019 COMC 145

Date de la décision : 2019-12‑31

[TRADUCTION CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

DANS L’AFFAIRE DE LA PROCÉDURE DE RADIATION EN VERTU DE L’ARTICLE 45

 

Self-Portrait Ltd.

Partie requérante

et

 

Hardwater Fashion Inc./Les Modes Hardwater Inc.

Propriétaire inscrite

 

LMC557,021 pour la marque de commerce PORTRAIT

Enregistrement

[1]  La présente décision concerne une procédure de radiation sommaire engagée en vertu de l’article 45 de la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, ch T-13 (la Loi) à l’égard de l’enregistrement no LMC557,021 pour la marque de commerce PORTRAIT (la Marque), détenue par Hardwater Fashion Inc./Les Modes Hardwater Inc.

[2]  La Marque est enregistrée pour emploi en liaison avec les produits suivants :

Robes, costumes pantalons, chemisiers, chemises, jupes, pyjamas de plage, manteaux, imperméables, paletots d’auto, chapeaux, maillots de bain, pantalons sport, costumes, survêtements de loisir, tabliers, vestes, gilets, jodhpurs, shorts, chasubles, pantalons corsaire et jupes-culottes; ceintures, boutons de vêtements, boucles pour vêtements, nattes et fermetures à glissière pour dames, demoiselles, jeunes filles et fillettes.

[3]  Pour les raisons qui suivent, je conclus qu’il n’y a lieu de maintenir l’enregistrement qu’en ce qui concerne les produits visés par l’enregistrement « manteaux » et « vestes ».

Introduction

[4]  Le 28 juin 2017, à la demande Self-Portrait Ltd. (la Partie requérante), le registraire des marques de commerce a donné l’avis prévu à l’article 45 de la Loi sur les marques de commerce (la Loi) à Hardwater Fashion Inc./Les Modes Hardwater Inc. (la Propriétaire), la propriétaire inscrite de la Marque.

[5]  L’avis enjoignait à la Propriétaire d’indiquer, à l’égard de chacun des produits spécifiés dans l’enregistrement, si la marque de commerce a été employée au Canada à un moment quelconque au cours des trois années précédant immédiatement la date de l’avis et, dans la négative, qu’elle précise la date à laquelle la marque a ainsi été employée en dernier lieu et la raison de son défaut d’emploi depuis cette date. En l’espèce, la période pertinente pour établir l’emploi s’étend du 28 juin 2014 au 28 juin 2017.

[6]  La définition pertinente d’« emploi » en liaison avec des produits est énoncée à l’article 4 de la Loi, lequel est libellé comme suit :

4(1) Une marque de commerce est réputée employée en liaison avec des produits si, lors du transfert de la propriété ou de la possession de ces produits, dans la pratique normale du commerce, elle est apposée sur les produits mêmes ou sur les emballages dans lesquels ces produits sont distribués, ou si elle est, de toute autre manière, liée aux produits à tel point qu’avis de liaison est alors donné à la personne à qui la propriété ou possession est transférée.

[7]  Le 28 septembre 2017, en réponse à l’avis du registraire, la Propriétaire a produit l’affidavit de Jeffrey Langleben, souscrit le 28 septembre 2017. Les deux parties ont produit des observations écrites et ont été représentées lors d’une audience orale.

Affaire préliminaire : Prorogation rétroactive du délai de production de la preuve

[8]  D’emblée, je souligne que certains documents mentionnés dans l’affidavit de M. Langleben sont absents des pièces; à savoir, « Instructions for Production » [Instructions de production] aux pièces 14, 17 et 21. Lors de l’audience, l’avocat de la Partie requérante a indiqué que ces documents étaient inclus dans sa copie de la preuve de la Propriétaire.

[9]  Cependant, après examen de la preuve à l’audience, il a également été mis au jour qu’un certain nombre de pages de la preuve sur facture avaient été omises d’une autre pièce (pièce 12) de la copie de la preuve de la Propriétaire détenue par la Partie requérante, mais avaient été incluses dans la copie de la preuve de la Propriétaire détenue par le registraire.

[10]  Ces documents manquants ne font pas partie du dossier de preuve. Étant donné que le délai dont dispose la Propriétaire pour produire la preuve dans la présente procédure a expiré le 28 septembre 2017, la Propriétaire doit demander une prorogation de délai rétroactive conformément à l’article 47(2). Une telle prorogation ne peut être accordée que si le droit prescrit est acquitté et que le registraire est convaincu que l’omission d’accomplir l’acte ou de demander la prorogation dans le délai pertinent n’était pas raisonnablement évitable. À l’audience, Mme Monique Couture, avocate de la Partie requérante, a gracieusement consenti à ce que la Propriétaire obtienne une telle prorogation pour les pièces 14, 17 et 21 manquantes, que la Partie requérante avait reçues, mais que le registraire n’avait pas reçues.

[11]  Le 20 septembre 2019, la Propriétaire a demandé une prorogation rétroactive du délai de production de la preuve. Le droit approprié a été acquitté et la Propriétaire a expliqué que l’oubli n’était pas intentionnel et n’avait pas été remarqué au moment de vérifier les documents avant de les produire. Je souligne que certains problèmes persistent quant aux documents présentés par la Propriétaire; par exemple, il semble que la Propriétaire ait présenté des documents se rapportant aux pièces 13 et 16, qui sont des copies de documents déjà en preuve, plutôt que les documents manquants des pièces 14 et 17. Néanmoins, je suis convaincu que l’omission de produire les documents manquants n’était pas raisonnablement évitable. La prorogation de délai rétroactive est donc accordée jusqu’au 20 septembre 2019, et les documents produits par la Propriétaire seront versés au dossier. Quoi qu’il en soit, je suis convaincu que ces documents ne seront pas importants pour le résultat de ma décision, puisqu’ils ne concernent que les produits identifiés comme des « manteaux »; tel qu’il est indiqué ci-dessous, la preuve de la Propriétaire suffit pour établir l’emploi de la marque en liaison avec des « manteaux », même sans ces documents.

La preuve de la Propriétaire

[12]  Dans son affidavit, M. Langleben déclare qu’il est président de la Propriétaire depuis sa création; avant cela, il était président des importations à Fen-Nelli Inc. [Fen-Nelli] et président de Fen-Nelli Fashions Inc./Modes Fen-Nelli Inc. [Modes Fen-Nelli]. Il explique que Modes Fen‑Nelli et Fen-Nelli ont fusionné en 2012 et que la Propriétaire est le successeur de ces entités. Il explique en outre que la Marque était employée initialement par Modes Fen-Nelli depuis 2002, puis par Fen-Nelli, avant d’être transférée à la Propriétaire le 1er mai 2017. M. Langleben indique que la Propriétaire et ses prédécesseurs en titre ont participé à la fabrication et à l’importation au Canada des produits visés par l’enregistrement, qui ont été et continuent d’être distribués aux détaillants et aux distributeurs partout au Canada dans le cours ordinaire des affaires, et qui ont été vendus dans chaque province du Canada.

[13]  M. Langleben déclare que chacun des produits visés par l’enregistrement portait [traduction] « une étiquette et/ou une étiquette volante » au moment où les produits visés par l’enregistrement étaient livrés aux clients de détail et au moment où ils été offerts à la vente au public. Comme pièces 2 et 3, il joint des photos d’étiquettes et d’étiquettes volantes, respectivement. Chaque étiquette et chaque étiquette volante comprennent le mot « PORTRAIT » à côté d’un élément graphique stylisé de la lettre « P » ou à côté des mots « PAR/BY FEN-NELLI ».

[14]  Les pièces 4, 6, 8 et 10 à 17 comprennent des factures indiquant les ventes des prédécesseurs de la Propriétaire à des détaillants au Canada. Je souligne toutefois que seules les pièces 4, 10 et 12 à 16 comprennent des factures dont la date coïncide avec la période pertinente. Chaque facture comprend la description du produit « Vestes » pour tous les articles énumérés; les articles ne sont par ailleurs identifiés que par le numéro de style. Bien que la Marque n’apparaisse pas sur les factures elles-mêmes, M. Langleben déclare qu’en raison de sa connaissance des numéros de style utilisés sur les factures, il est en mesure d’indiquer lequel des éléments énumérés est associé à la Marque.

[15]  Les pièces 5, 7, 9, 11 à 13, 16, 18, 19 et 22 contiennent des documents « Instructions for Production » [Instructions de production] montrant des croquis de vêtements et des instructions à l’intention des fabricants. M. Langleben explique que la Propriétaire et ses prédécesseurs en titre ont pour pratique de préparer des croquis de ses produits environ un an avant la saison au cours de laquelle les produits seraient vendus au public. Chaque document comprend une colonne intitulée « Labels » [Étiquettes], avec le mot « Portrait » dans la rangée « Neck » [Cou]. Les documents comprennent des dates, des descriptions de produit et des numéros de style. Quelques-uns de ces documents sont accompagnés de photographies des vêtements.

[16]  Bon nombre des pièces comprennent à la fois des documents d’instructions pour la production et des factures. Dans son affidavit, M. Langleben établit une corrélation entre certains des numéros de style de produit indiqués sur les factures et les vêtements indiqués dans les documents d’instructions pour la production; par ailleurs, je souligne que dans de nombreux cas, le même numéro de style figure sur les factures et dans les instructions de production correspondantes. Plus particulièrement, je souligne que les pièces 13 et 16 comprennent toutes deux des factures dont la date coïncide avec la période pertinente, ainsi que les documents d’instructions de production correspondants pour les vêtements identifiés comme des « manteaux » dans leurs descriptions de produit. Les mêmes numéros de style apparaissent dans les documents d’instructions de production et dans les factures correspondantes de ces pièces.

[17]  Bien que certains des documents d’instructions de production montrent des vêtements identifiés comme des « car coats » [paletots d’auto] ou des « jackets » [vestes], chacun de ces documents correspond à une facture dont la date ne coïncide pas avec la période pertinente. Dans certains cas, M. Langleben déclare que ces documents font référence à des vêtements que la Propriétaire est en voie de commercialiser au Canada et qu’elle avait l’intention de vendre après la période pertinente. Cependant, toutes les factures dont la date coïncide avec la période pertinente correspondent à des vêtements simplement identifiés comme des « manteaux », à l’exception des factures jointes comme pièce 15. Les factures de la pièce 15 ne sont pas corrélées avec d’autres documents; au lieu de cela, M. Langleben affirme que ces factures montrent des ventes de « PORTRAIT wares conforming to style  4230 » [marchandises PORTRAIT conformes au style A4230], sans explication supplémentaire. Comme pour toutes les factures, le mot « Vestes » apparaît dans l’en-tête de la description du produit pour tous les articles énumérés dans les factures de la pièce 15.

[18]  M. Langleben affirme qu’il est informé, d’après son examen des livres de la société et des conversations avec les représentants des ventes et les clients de détail de la Propriétaire, que plusieurs milliers de vêtements portant la Marque ont été achetés par des clients au Canada auprès des clients de détail entre 2002 et aujourd’hui. Il confirme qu’il y a eu pendant la période pertinente des ventes, en liaison avec la Marque, de manteaux, d’imperméables, de paletots d’auto et de vestes, mais non de pantalons, de costumes pantalons, de pantalons sport, de costumes, de shorts, de pantalons corsaire, de ceintures ou de chapeaux. Il explique que ces derniers produits ont été vendus en liaison avec différentes marques de commerce [traduction] « parce que des programmes spéciaux ont été mis en place pour des détaillants particuliers ».

Analyse

[19]  D’emblée, je remarque que la Propriétaire reconnaît qu’il n’y a pas eu de vente des produits « Robes, costumes pantalons, chemisiers, chemises, jupes, pyjamas de plage, [...] chapeaux, maillots de bain, pantalons sport, costumes, survêtements de loisir, tabliers, [...] gilets, jodhpurs, shorts, chasubles, pantalons corsaire et jupes-culottes; ceintures, boutons de vêtements, boucles pour vêtements, nattes et fermetures à glissière pour dames, demoiselles, jeunes filles et fillettes » en liaison avec la Marque pendant la période pertinente, et qu’elle n’a présenté aucune circonstance spéciale qui justifierait un tel non‑emploi. Ainsi, les seuls produits en cause sont les manteaux, les imperméables, les paletots d’auto et les vestes.

[20]  En ce qui concerne ces produits restants, la Partie requérante soutient que la Propriétaire n’a tenté d’établir l’emploi de la marque qu’en liaison avec des manteaux, des paletots d’auto et des vestes, et qu’en tout état de cause, la preuve à l’égard de ces produits n’est pas suffisante. À cet égard, la Partie requérante signale un certain nombre de lacunes dans l’affidavit de M. Langleben; à savoir, qu’elle comprend une preuve par ouï-dire inadmissible, que la marque de commerce affichée sur les étiquettes et les étiquettes volantes n’est pas la marque déposée, que M. Langleben ne précise pas que les étiquettes ou les étiquettes volantes ont été employées en liaison avec certains produits pendant la période pertinente, et que la preuve documentaire est par ailleurs insuffisante pour établir l’emploi de la marque en liaison avec l’un des produits visés par l’enregistrement. Bien que la partie requérante note également que la pièce 19 n’a pas été correctement souscrite dans sa copie de la preuve, la pièce est correctement souscrite dans l’affidavit soumis au registraire. Les autres observations de la Partie requérante seront maintenant examinées à tour de rôle.

Ouï-dire

[21]  La Partie requérante soutient que les déclarations de M. Langleben concernant les ventes par ses clients de détail, ou l’affichage de la Marque au détail, doivent être considérées comme des preuves par ouï-dire inadmissibles, étant donné que la Propriétaire et ses prédécesseurs ne se livrent qu’à la fabrication, à l’importation et à la distribution de produits. Cependant, il est bien établi que, compte tenu de la nature sommaire de la procédure prévue à l’article 45, [traduction] « [t]oute préoccupation quant au fait que [l]a preuve constitue du ouï‑dire devrait être dirigée vers le poids de celle-ci, plutôt que son admissibilité » [Eva Gabor International Ltd c 1459243 Ontario Inc, 2011 CF 18, au para 18]. Par conséquent, toute préoccupation concernant la fiabilité des déclarations de M. Langleben dans l’analyse qui suit seront évaluées en fonction du poids plutôt que de l’admissibilité.

Écart

[22]  La Partie requérante soutient que les marques de commerce présentées dans la preuve de la Propriétaire constitue un dessin mixte et des marques nominales mixtes, plutôt que la Marque telle qu’elle a été déposée, puisqu’elles comprennent le mot « PORTRAIT » à côté des mots « PAR/BY FEN-NELLI » ou à côté d’un élément graphique stylisé de la lettre « P ».

[23]  L’emploi d’une marque nominale en conjugaison avec d’autres mots ou éléments graphiques constitue un emploi de la marque nominale si le public, sous le coup de la première impression, y voit un emploi de la marque nominale en soi [Nightingale Interloc Ltd c Prodesign Ltd (1984), 2 CPR (3d) 535 (COMC); voir également 88766 Canada Inc c National Cheese Co (2002), 24 CPR (4th) 410 (COMC)]. En l’espèce, en ce qui concerne la Marque telle qu’elle apparaît à côté des mots « PAR/BY FEN-NELLI », je suis convaincu que l’acheteur moyen comprendrait que « FEN-NELLI » est soit la marque maison de la Propriétaire, soit le nom commercial et donc que « PORTRAIT » est une marque distincte de l’autre affaire [pour des résultats similaires, voir Brooks c Ranpro Inc, 2011 COMC 74; Gowling Lafleur Henderson LLP c Ten Ren Tea Co, 2012 COMC 21; Bennett Jones LLP c Pirelli Tyre SpA, 2013 COMC 37]. En ce qui a trait à l’inclusion de l’élément de dessin stylisé de la lettre « P », la Marque est séparée et éloignée de l’élément graphique qui se trouve au-dessus, et rien n’empêche que dans de tels cas, une marque nominale soit affichée en combinaison avec des éléments graphiques [voir Cox & Palmer c PB Brands Inc, 2018 COMC 15, au para 22]. À ce titre, je suis convaincu que l’une ou l’autre des formulations de la Marque constituerait l’emploi de la marque telle qu’elle est déposée.

Étiquettes et étiquettes volantes

[24]  La Partie requérante soutient que M. Langleben n’a pas affirmé que les étiquettes et les étiquettes volantes portant la Marque étaient employées sur les produits pendant la période pertinente. Cependant, tel qu’il a été mentionné ci-dessus, l’affidavit de M. Langleben indique clairement que chacun des produits visés par l’enregistrement portait [traduction] « une étiquette et/ou une étiquette volante » au moment où les produits visés par l’enregistrement étaient livrés aux clients de détail et au moment où ils été offertes à la vente au public. Même s’il se peut que les déclarations de M. Langleben concernant la façon dont la Marque était affichée lorsque les produits ont été offerts au public ne soient pas fiables, je n’ai aucune difficulté à conclure que M. Langleben saurait directement si les produits portaient les étiquettes ou les étiquettes volantes au moment du transfert de possession de la Propriétaire à ses clients de détail.

[25]  La loi indique clairement que l’emploi d’une marque de commerce à n’importe quel moment de la chaîne de distribution suffit à démontrer l’emploi au sens de l’article 4 de la Loi, et que cet emploi profitera au propriétaire à condition que les produits portant la marque de commerce proviennent du propriétaire [Manhattan Industries Inc c Princeton Manufacturing Ltd (1971), 4 CPR (2d) 6 (CF 1re inst); Osler, Hoskin & Harcourt c Canada (Registraire des marques de commerce) (1997), 77 CPR (3d) 475 (CF 1re inst)]. À ce titre, vu les déclarations clairement souscrites de M. Langleben à ce sujet, j’accepte que les étiquettes ou les étiquettes volantes portant la Marque qui étaient apposées à l’un des produits visés par l’enregistrement livrés aux clients de détail au cours de la période pertinente établissent un avis de lien entre la Marque et ces produits.

Preuve documentaire

[26]  La Partie requérante soutient, et je suis d’accord, que les documents d’instructions de production ne permettent pas, en soi, d’établir l’emploi de la Marque. Bien que j’accepte les déclarations de M. Langleben selon lesquelles il était d’usage que la Propriétaire et ses prédécesseurs fournissent des croquis de leurs marchandises environ un an avant leur vente potentielle, l’existence de ces croquis n’établit pas que de telles ventes ont réellement eu lieu. Toutefois, l’affidavit de M. Langleben établit une corrélation entre bon nombre de ces documents et les articles énumérés dans la preuve sur facture. Par conséquent, l’utilité des documents d’instructions de production consiste à clarifier la nature des produits énumérés dans la preuve sur facture comme ayant été vendus pendant la période pertinente.

[27]  En ce qui a trait à la preuve sur facture de la Propriétaire, la Partie requérante souligne que les produits énumérés dans le document sont identifiés par un numéro de style seulement, sans indication quant à savoir s’ils ont affiché la marque, et elle soutient qu’il faudrait en tirer une conclusion négative, puisque [traduction] « nous sommes invités aux propres connaissances de l’auteur de l’affidavit sur les numéros de style pour être assurés que ceux-ci affichent la [Marque] ». Dans ses observations orales, la Partie requérante a soutenu qu’il est difficile de croire qu’en 2017, le déposant pouvant se souvenir des numéros de style qui correspondaient à des produits particuliers en 2014, surtout compte tenu du changement de propriétaire et du fait que la Propriétaire et ses prédécesseurs fabriquaient des produits en liaison avec de multiples marques de commerce.

[28]  La Propriétaire fait remarquer que l’affidavit de M. Langleben explique que la Propriétaire ou ses prédécesseurs n’ont pas pour pratique d’indiquer l’emploi de marques de commerce sur ses documents commerciaux. Il fait en outre remarquer en outre que M. Langleben était président de la Propriétaire et de ses prédécesseurs et qu’il a collaboré avec chacune de ces entités à temps plein. De plus, la Propriétaire fait référence à la confirmation que donne M. Langleben, dans son affidavit, que chacune de ses déclarations est fidèle à sa connaissance personnelle et qu’il a personnellement vérifié que les documents, documents et pièces reflètent fidèlement le dossier de la Propriétaire et de ses prédécesseurs.

[29]  Rien dans l’affidavit de M. Langleben ne me ferait douter de sa crédibilité ou de la fiabilité de ses déclarations sous serment. En l’absence d’une preuve contraire, il convient d’admettre sans réserve les déclarations faites sous serment par un déposant et d’accorder une crédibilité substantielle aux déclarations contenues dans un affidavit produit dans le cadre de la procédure prévue à l’article 45 [Oyen Wiggs Green & Mutala LLP v Atari Interactive, Inc, 2018 COMC 79 au para 25]. En l’espèce, je suis d’accord avec la Propriétaire pour dire qu’il n’est pas exagéré pour un homme d’affaires de longue date de connaître les numéros de styles de produits vendus en liaison avec des marques de commerce particulières. Par conséquent, j’accepte que les déclarations contenues dans l’affidavit de M. Langleben indiquent avec exactitude les numéros de style des factures qui correspondent aux produits vendus en liaison avec la Marque.

[30]  Quoi qu’il en soit, je constate que dans certains cas, notamment aux pièces 13 et 16, les numéros de style figurant dans les documents d’instructions de production apparaissent également sur les factures correspondantes. De plus, ces documents d’instructions de production comprennent une colonne « Label » [Étiquette] contenant le mot « Portrait », et « Coat » [Manteau] figure dans la description de produit. De plus, je souligne que la Propriétaire a fait une déclaration sous serment selon laquelle les étiquettes ou étiquettes volantes susmentionnées accompagnaient tous les produits décrits dans sa preuve au moment du transfert aux clients de détail de la Propriétaire. Étant donné que les factures des pièces 13 et 16 montrent des ventes au cours de la période pertinente à des clients au Canada, je suis convaincu, d’après ces éléments de preuve, que la Propriétaire a établi l’emploi de la Marque en liaison avec les produits visés par l’enregistrement « manteaux » au sens des articles 4 et 45 de la Loi.

[31]  Comme nous l’avons vu plus haut, toutes les factures décrivent les articles vendus uniquement comme des « vestes », même les factures identifiées par M. Langleben comme correspondant aux documents d’instructions de production identifiant les produits vendus comme des « coats » [manteaux] ou des « car coats » [paletots d’auto]. Cela me porte à croire que le terme « jacket » [veste] est utilisé comme une catégorie plus large sur les factures englobant d’autres descripteurs plus spécifiques comme « coats » [manteaux] et « car coats » (paletots d’auto). Néanmoins, comme nous l’avons mentionné plus haut, je souligne que la pièce 15 montre les ventes au cours de la période pertinente d’un produit identifié par M. Langleben comme « PORTRAIT wares conforming to style A4230 » [marchandises PORTRAIT conformes au style A4230], portant seulement la description « jacket » [veste] dans la facture, sans autre description dans d’autres documents. Parce que ce produit n’est décrit dans la preuve de M. Langleben qu’à titre de « jacket » [veste], et en raison de la déclaration sous serment de M. Langleben selon laquelle chaque vêtement mentionné aux pièces 4 à 22 était accompagné d’une étiquette ou d’une étiquette volante affichant la marque au moment du transfert aux clients de détail du propriétaire, je suis également convaincu que la Propriétaire a établi l’emploi de la marque en liaison avec les produits visés par l’enregistrement « veste » au sens des articles 4 et 45 de la Loi.

[32]  Certains des autres documents d’instructions de production comprennent la description de produit « car coat » [paletot d’auto]; toutefois, aucun de ces documents ne correspond à des factures dont la date coïncide avec la période pertinente. Par conséquent, je ne peux conclure que la Propriétaire a établi l’emploi de la Marque en liaison avec ces produits au sens des articles 4 et 45 de la Loi.

[33]  Enfin, parce qu’aucun élément de preuve documentaire ne comprend le descripteur « raincoat » [imperméable], et parce que M. Langleben n’a pas corrélé les imperméables avec des numéros de style dans la preuve, je ne peux conclure que la Propriétaire a établi l’emploi de la marque en liaison avec ce produit au sens des articles 4 et 45 de la Loi. Même s’il est possible que certains des manteaux qui ont été vendus au cours de la période pertinente puissent être utilisés comme imperméables, l’emploi attesté en liaison avec un produit spécifique ne peut généralement pas servir à maintenir plusieurs produits dans l’état déclaratif des produits, puisque le propriétaire est tenu de fournir une preuve d’emploi pour chacun des produits visés par l’enregistrement [voir John Labatt; Sharp Kabushiki Kaisha c 88766 Canada Inc (1997), 72 CPR (3d) 195 (CF 1re inst)].

[34]  La Propriétaire n’a pas présenté de circonstances spéciales qui justifieraient le non-emploi de la Marque en liaison avec les produits visés par l’enregistrement « paletots d’auto » et « imperméables ». Bien que M. Langleben affirme que la Propriétaire avait l’intention de vendre une partie des produits « car coat » [paletot d’auto] après la période pertinente, la loi indique clairement qu’une intention continue d’employer une marque de commerce ne peut pas être considérée comme une circonstance spéciale en soi, comme l’a expliqué la Cour d’appel fédérale dans Scott Paper Ltd c Smart & Biggar, 2008 CAF 129 :

[28] Il appert de cette analyse que l’intention de l’inscrivant de reprendre l’emploi d’une marque qui était absente du marché ne peut correspondre aux circonstances spéciales qui justifient le non-emploi de la marque et ce, même si des mesures ont été prises pour actualiser ces plans. Les plans d’usage futur n’expliquent pas la période de non-emploi et ne sauraient donc constituer des circonstances spéciales. Aucune interprétation raisonnable des mots utilisés à l’article 45 ne peut mener à cette conclusion.

[35]  Comme la Propriétaire n’a présenté aucune autre circonstance pour justifier le non‑emploi de la Marque en liaison avec des « paletots d’auto » et des « imperméables », ces produits seront retirés de l’enregistrement.

[36]  Compte tenu de ce qui précède, je suis convaincu que la Propriétaire a établi l’emploi de la Marque en liaison avec les produits visés par l’enregistrement « manteaux » et « vestes » au sens des articles 4 et 45 de la Loi.

Décision

[37]  Dans l’exercice des pouvoirs qui m’ont été délégués en vertu des dispositions de l’article 63(3) de la Loi, l’enregistrement sera modifié, conformément aux dispositions de l’article 45, afin de radier les produits « Robes, costumes pantalons, chemisiers, chemises, jupes, pyjamas de plage, [...] imperméables, paletots d’auto, chapeaux, maillots de bain, pantalons sport, costumes, survêtements de loisir, tabliers, [...] gilets, jodhpurs, shorts, chasubles, pantalons corsaire et jupes-culottes; ceintures, boutons de vêtements, boucles pour vêtements, nattes et fermetures à glissière pour dames, demoiselles, jeunes filles et fillettes » de la liste des produits visés par l’enregistrement.

[38]  L’état déclaratif des produits modifié sera libellé comme suit :

Manteaux, vestes.

 

G.M. Melchin

Agent d’audience

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

Traduction certifiée conforme

François Cyrenne, trad. a.


COMMISSION DES OPPOSITIONS DES MARQUES DE COMMERCE

OFFICE DE LA PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE DU CANADA

COMPARUTIONS ET AGENTS INSCRITS AU DOSSIER

___________________________________________________

DATE D’AUDIENCE 2019-09-18

COMPARUTIONS

Harold W. Ashenmil

Pour la Propriétaire inscrite

Monique Couture

Pour la Partie requérante

AGENTS AU DOSSIER

Harold W. Ashenmil

Pour la Propriétaire inscrite

Gowling WLG (Canada) LLP

Pour la Partie requérante

 

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