Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

THE REGISTRAR OF TRADEMARKS

Référence : 2019 COMC 118

Date de la décision : 2019-10-31

[TRADUCTION CERTIFIÉE,

NON RÉVISÉE]

 

DANS L’AFFAIRE DE LA PROCÉDURE DE RADIATION EN VERTU DE L’ARTICLE 45

 

Miller Thomson LLP

Partie requérante

et

 

Groupe Modulo Inc.

Propriétaire inscrit

 

LMC655,151 pour la marque de commerce ALLEZ, HOP!

Enregistrement

[1]  Le 2 décembre 2016, à la demande de Miller Thomson LLP (la Partie requérante), le registraire des marques de commerce a donné l’avis prévu à l’article 45 de la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, ch T-13 (la Loi) au Groupe Modulo Inc. (le Propriétaire), le propriétaire inscrit de l’enregistrement no LMC655,151 de la marque de commerce ALLEZ, HOP! (la Marque).

[2]  La Marque est enregistrée pour emploi en liaison avec les produits suivants :

Collection de livres et matériel didactique en éducation physique, nommément livres de l’élève, guides d’enseignement, cahiers d’exercices, cédéroms pré-enregistrés ne contenant pas de logiciel, cassettes audio-visuelles pré-enregistrées, pour l’enseignement au secondaire.

[3]  L’avis enjoignait au Propriétaire de fournir une preuve établissant que la Marque a été employée au Canada en liaison avec les produits spécifiés dans l’enregistrement à un moment quelconque entre le 2 décembre 2013 et le 2 décembre 2016. Si la Marque n’avait pas été ainsi employée, le Propriétaire devait fournir une preuve établissant la date à laquelle la Marque a été employée en dernier lieu et les raisons de son défaut d’emploi depuis cette date.

[4]  La définition pertinente d’« emploi » en liaison avec des produits est énoncée au paragraphe 4(1) de la Loi, lequel est libellé comme suit :

4(1) Une marque de commerce est réputée employée en liaison avec des produits si, lors du transfert de la propriété ou de la possession de ces produits, dans la pratique normale du commerce, elle est apposée sur les produits mêmes ou sur les emballages dans lesquels ces produits sont distribués, ou si elle est, de toute autre manière, liée aux produits à tel point qu’avis de liaison est alors donné à la personne à qui la propriété ou possession est transférée.

[5]  Il est bien établi que l’objet et la portée de l’article 45 de la Loi sont de prévoir une procédure simple, sommaire et expéditive visant à débarrasser le registre du « bois mort ». À ce titre, le niveau de preuve auquel le propriétaire inscrit doit satisfaire est peu élevé [Performance Apparel Corp c Uvex Toko Canada Ltd, 2004 CF]. Le propriétaire inscrit doit néanmoins fournir une preuve prima facie d’emploi [Diamant Elinor Inc c 88766 Canada Inc, 2010 CF 1184]. À cet égard, il faut présenter des faits suffisants pour permettre au registraire de conclure que la marque de commerce a été employée en liaison avec chacun des produits et services spécifiés dans l’enregistrement pendant la période pertinente [John Labatt Ltd c Rainer Brewing Co (1984), 80 CPR (2d) 228 (CAF].

[6]  En réponse à l’avis du registraire, le Propriétaire a produit la déclaration de son directeur général, Patrick Lutzy, en date du 28 février 2017. Les parties ont toutes les deux produit des représentations écrites et se sont présentées à l’audience.

La preuve du propriétaire

[7]  Dans sa déclaration, M. Lutzy affirme que le Propriétaire a employé la Marque au Canada pendant la période pertinente en liaison avec une collection de livres et du matériel pédagogique dans le domaine de l’éducation physique, notamment des livres pour les élèves, des guides d’enseignement, et des cahiers d’exercices, pour l’enseignement au niveau secondaire (les Produits). Il explique que les Produits sont pour le marché des écoles secondaires et sont vendus directement en ligne sur le site Web www.groupemodulo.com ou aux librairies des écoles ou directement aux écoles par le distributeur exclusif du Propriétaire TC Média Livres Inc. Il fournit le chiffre d’affaires annuel visant ces Produits pour les années 2014 à 2016.

[8]  Au soutien de ses allégations, M. Lutzy joint trois pièces à sa déclaration.

[9]  La pièce P-1 se compose des pages de couverture et de table des matières pour deux publications d’ALLEZ, HOP! reliées en spirale, identifiées sur leur couverture respective comme « MANUEL-CAHIER 1 » et « MANUEL-CAHIER 2 ».  M. Lutzy atteste qu’il s’agit des premières pages des Produits portant la Marque et représentatives de la façon dont le Propriétaire a utilisé la Marque au Canada en liaison avec les Produits pendant la période pertinente. Je remarque que les renseignements au bas des tables des matières considèrent chaque publication comme un « livre », alors que les pages de couverture indiquent que chaque publication est pour l’« Éducation physique et à la santé — 1er cycle du secondaire » La Marque est affichée bien en vue en tant que titre sur chaque page de couverture et est également incluse parmi les mentions de la publication dans les pages de la table des matières. Je précise également que le Propriétaire est nommé sur l’une des pages de couverture pour chaque publication et est identifié comme titulaire du droit d’auteur dans les pages de la table des matières.

[10]  La pièce P-2 se compose de deux extraits du site Web www.scolaire.groupemodulo.com, décrivant le Propriétaire en tant qu’éditeur de ressources pédagogiques et présentant différentes publications d’ALLEZ, HOP! similaires à celles de la pièce P­1. M. Lutzy atteste que ces pages montrent les Produits offerts pour la vente en ligne par le Propriétaire et qu’elles sont représentatives des Produits d’ALLEZ, HOP! que le Propriétaire a offerts et vendus au Canada pendant la période pertinente.

[11]  Le premier extrait est une page Web intitulée « Manuel scolaire et matériel pédagogique primaire & secondaire | Modulo ». Elle fait état des résultats d’une recherche des Produits du Propriétaire par l’emploi des mots clés « allez hop ». Elle contient neuf pages imprimées de résultats de publications d’ALLEZ, HOP!, avec des sujets allant du général, comme le conditionnement physique (« OPÉRATION CONDITIONNEMENT PHYSIQUE ») et les sports d’équipe (« L’ÉQUIPE ET LES SPORTS COLLECTIFS »), au spécifique, comme la musculation (« OPTION MUSCULATION ») et le football drapeau (« L’ABC DU FOOTBALL DRAPEAU »). Le niveau pédagogique n’est pas précisé, mais les pages de couverture décrites montrent des athlètes dont l’âge semble conforme à l’école secondaire. Les pages de couverture affichent également la Marque de manière évidente. Dans leur coin inférieur gauche, les pages de couverture présentent un numéro entre 1 et 11 en gros caractères; le mot superposé sur certains de ces numéros, et à peine lisible, est le mot « FASCICULE ». Il y a également du texte imprimé dans les coins supérieurs droits; quoiqu’il soit difficile d’en déchiffrer le contenu, le Propriétaire soutient dans ses représentations que le texte indique « Manuel de l’élève » et la forme du texte est conforme à cette interprétation.

[12]  Les résultats de la recherche dans le premier extrait incluent également deux autres publications : « Guide pédagogique 1er cycle », examiné ci-dessous, et « Ensemble d’affiches du 1er cycle », qui semble être de par son nom un ensemble d’affiches, bien qu’aucune image ou description supplémentaire ne soit fournie.

[13]  Le deuxième extrait est une page Web intitulée « Allez Hop! – Guide pédagogique 1er cycle – Éducation physique et à la santé | Modulo ». Elle présente une publication d’ALLEZ, HOP! intitulée « Guide pédagogique », décrite sur cette page Web comme étant approuvée en Alberta, en Nouvelle-Écosse et au Québec, pour le premier cycle d’enseignement secondaire au Québec et pour les années 7 et 8 dans le reste du Canada. La description mentionne également que le guide inclut « les affiches ». La Marque est affichée bien en vue sur la page de couverture décrite.

[14]  La pièce P-3 contient des copies de 13 factures—dont dix sont datées de la période pertinente—adressées à divers bénéficiaires canadiens qui, à en juger par leurs noms, incluent les écoles et les librairies. Les factures viennent de TC Média Livres Inc., qui est désigné sur la facture comme le distributeur exclusif pour « MODULO » et trois autres entités. Huit des factures de la période pertinente incluent une entrée pour au moins une unité d’« ALLEZ, HOP | MANUEL-CAHIER 1 », dont le numéro international normalisé du livre (ISBN) correspond à celui de la première publication à la pièce P­1. Une autre facture de la période pertinente inclut une entrée similaire pour un « MANUEL-CAHIER 2 », dont l’ISBN correspond à celui de la deuxième publication à la pièce P­1. L’autre facture de la période pertinente est pour un « ALLEZ, HOP | 2E CYCLE – FASCIC » et un « ALLEZ, HOP | GUIDE PÉD. 2E CYC ». En tenant compte de ces entrées de concert avec les publications représentées à la pièce P­2, j’admets que « FASCIC » est une abréviation de « FASCICULE » ou « FASCICULES »; « GUIDE PÉD. » est une abréviation de « Guide pédagogique »; et « 2E CYC » et « 2E CYCLE » font tous les deux référence au deuxième cycle d’enseignement secondaire au Québec. Je remarque également que chacune de ces entrées est suivie de la mention « LOISELLE », qui est conforme avec l’auteur identifié sur les pages à la pièce P­1.

Analyse

[15]  Dans ses représentations écrites et à l’audience, le Propriétaire a reconnu que la preuve n’est pas suffisante pour établir l’emploi de la Marque en liaison avec des cédéroms pré‑enregistrés ou des cassettes audio-visuelles. En effet, il n’y a ni preuve que la Marque a été affichée ou autrement associée avec ces produits ni preuve que de tels produits ont été vendus ou autrement transférés au Canada pendant la période pertinente. Je ne dispose également d’aucune preuve de circonstances spéciales justifiant le défaut d’emploi de la Marque, comme l’a également admis le Propriétaire. En conséquence, les produits énumérés dans l’enregistrement « cédéroms pré-enregistrés ne contenant pas de logiciel, cassettes audio-visuelles pré‑enregistrées » seront supprimés de l’enregistrement.

[16]  À l’audience, la Partie requérante a contesté le fait que ce défaut de l’emploi, sa durée et les motifs de celle-ci, n’ont pas été abordés par la preuve du Propriétaire. Toutefois, le paragraphe 45(3) de la Loi prévoit que, lorsqu’il apparaît au registraire, en raison du défaut de fournir une preuve, que la marque de commerce n’a pas été employée au Canada en liaison avec certains produits ou services spécifiés dans l’enregistrement au cours de la période pertinente et que le défaut d’emploi n’a pas été attribuable à des circonstances spéciales qui le justifient, l’enregistrement de cette marque de commerce est susceptible de « modification en conséquence ». Je ne vois donc aucune raison de nous écarter de la pratique usuelle du registraire en supprimant simplement ces produits de l’enregistrement.

[17]  En ce qui concerne les produits restants spécifiés dans l’enregistrement, M. Lutzy a fait une claire affirmation de l’emploi de la Marque au Canada en liaison avec ces produits. Son affirmation est appuyée par des images représentatives de la Marque affichées sur ces produits—notamment sur leur page de couverture—et par des factures montrant la vente de ces produits au Canada pendant la période pertinente par le distributeur du Propriétaire. Toutefois, la Partie requérante conteste le caractère suffisant de cette preuve, telle qu’examinée ci-dessous.

Affichage de la Marque sur chacun des Produits

[18]  Les descriptions et représentations aux pièces P­1 et P­2 confirment que les produits du Propriétaire de la marque ALLEZ, HOP!- sont des publications dans le domaine de l’éducation physique destinées aux élèves du niveau secondaire. De plus, je suis disposée à accepter les publications représentées et décrites dans ces pièces comme une collection de livres et de matériel didactique, notamment des livres de l’élève, des guides d’enseignement, et des cahiers d’exercices, correspondant aux produits visés par l’enregistrement : « Collection de livres et matériel didactique…, nommément livres de l’élève, guides d’enseignement, cahiers d’exercices ».

[19]  La Partie requérante soutient que de telles corrélations tirées de la déclaration de M. Lutzy ne sont pas claires et que sa preuve est ambiguë quant à la nature des produits du Propriétaire. À l’audience, la Partie requérante a également contesté la position du Propriétaire selon laquelle son « MANUEL-CAHIER » correspond à la fois aux « livres de l’élève » et aux « cahiers d’exercices » et que « manuel » et « livre » sont des synonymes. À cet égard, la Partie requérante s’est également opposée à l’inclusion d’extraits de deux dictionnaires analogiques en ligne dans les représentations écrites du Propriétaire. Dans l’observation de la Partie requérante, le paragraphe 45(2) de la Loi exige que la preuve soit sous forme d’affidavit ou de déclaration solennelle et, de ce fait, ne permet pas de prendre connaissance d’office des définitions des dictionnaires et autres. Le Propriétaire a répondu à son observation en précisant que le fait de prendre connaissance d’office des définitions des dictionnaires est une pratique bien établie du registraire.

[20]  Je voudrais d’abord mentionner le fait que « connaissance d’office » renvoie à l’acceptation de faits sans exigence de la preuve à cet égard, de sorte que les dispositions de la Loi renvoyant à la preuve des faits ne pourront pas s’appliquer. Toutefois, en l’espèce, il n’est pas nécessaire d’avoir recours à des entrées de dictionnaires analogiques dont a fait référence le Propriétaire ou de décider s’il serait approprié de prendre connaissance d’office d’après ces sources en particulier.

[21]  Il est bien établi, dans l’interprétation de l’état déclaratif des produits dans une procédure prévue par l’article 45, qu’il faut se garder d’« examiner avec un soin méticuleux le langage utilisé » [voir Levi Strauss & Co. c. Canada (Registraire des marques de commerce), 2006 CF 654, au paragraphe 17]. De plus, il faudrait éviter de « radier une marque de commerce dont l’emploi est établi en conformité avec le paragraphe 45(1), en raison uniquement de l’ambiguïté de la description des marchandises qu’elle vise » [voir Conagra foods Inc. c. Fetherstonhaugh & Co., 2002 CFPI 1257, au paragraphe 23]. Pareil résultat « serait incompatible avec l’objet de l’article 45, qui est de prévoir une procédure expéditive pour radier du registre les marques de commerce dont l’emploi n’est pas établi au cours de la période pertinente, en l’absence de circonstances spéciales qui expliqueraient l’omission d’employer la marque » [ibid].

[22]  En l’espèce, j’estime que les titres, les identifications et les descriptions des publications du Propriétaire, tels qu’ils apparaissent dans les pièces jointes, fournissent la confirmation suffisante que les publications vendues en liaison avec la Marque correspondent à la collection particulière de livres et de matériel didactique définie dans l’enregistrement.

[23]  À cet égard, l’enregistrement énumère trois types de publications imprimées : « guides d’enseignement », « cahiers d’exercices » et « livres de l’élève ».

[24]  Je conviens que le produit visé par l’enregistrement « guides d’enseignement » renvoie à un type de publication identifié à la pièce P­2 comme un « guide pédagogique » pour les enseignants.

[25]  De plus, je conviens que le produit visé par l’enregistrement « cahiers d’exercices » correspond au type de publication identifié à la pièce P­1 comme un « MANUEL-CAHIER », ce qui, d’après ma compréhension, est une publication pour les élèves, qui a un élément de « cahier » de la nature d’un cahier de travail pour les exercices écrits et physiques.

[26]  En ce qui concerne les « livres de l’élève », dans le contexte de l’état déclaratif des produits dans son ensemble, je comprends que ce produit renvoie à des livres pour élèves contenant des renseignements ou des directives, contrairement aux cahiers. En conséquence, je suis disposée à accepter que le reste des types de publications utilisées comme preuve fasse partie de cette catégorie restante. Plus précisément, je suis disposée à accepter les séries de publications numérotées identifiées comme « FASCICULE » sur la couverture—traitant d’une variété de sujets de l’éducation physique, de la forme physique aux sports d’équipe, à la musculation et au football drapeau—à ce titre, des livres pour les élèves, publiés en partie ou en tranches (c.-à-d. en fascicules).

[27]  Je suis également disposée à accepter la partie « manuel » des publications du « MANUEL-CAHIER » comme étant de la nature d’un cahier ou d’un guide d’instructions pour les élèves, faisant partie de la catégorie « livres ». À cet égard, je remarque que les pages de la table des matières à la pièce P­1 identifient chacune de ces publications en spirale comme un « livre ». Je suis par conséquent disposée à accepter « livres » à titre de terme général qui peut englober à la fois les textes ou les manuels et les cahiers pédagogiques, et qui peut englober un tel contenu qui s’y rattache autre qu’une couverture rigide ou souple, par exemple, des publications en spirales.

[28]  Sur la base d’une lecture juste de l’état déclaratif des produits enregistrés, la collection de publications imprimées d’ALLEZ, HOP! comprend des textes d’instruction pour les élèves, ainsi que des cahiers d’exercices pour les élèves et des guides pédagogiques pour les enseignants, et la preuve concorde avec une collection offrant les trois types de publications.

Transferts pendant la période pertinente

[29]  En ce qui concerne les transferts des Produits au Canada pendant la période pertinente, j’accepte le fait que la facture du mois de février 2016 à la pièce P­3 pour « 2E CYCLE – FASCIC » renvoie à « FASCICULES » du type représenté à la pièce P­2, que l’entrée pour « GUIDE PÉD. 2E CYC » sur la même facture renvoie à un « Guide pédagogique » du type représenté à la pièce P­2 et que les factures de la période pertinente pour un « MANUEL‑CAHIER » renvoient aux publications avec le même ISBN représenté à la pièce P­1. Par conséquent, j’accepte le fait que les factures de la période pertinente couvrent tous les Produits.

[30]  La Partie requérante précise une différence de ponctuation entre la Marque telle qu’elle est enregistrée et la Marque présentée sur les factures. Malgré cet écart mineur, j’estime que la mention « ALLEZ, HOP | » sur les factures renvoie à la collection des publications ALLEZ, HOP! représentées aux pièces P­1 et P­2. Quoi qu’il en soit, puisque je suis convaincue que la Marque est constamment imprimée sur les produits en soi de la façon indiquée dans ces deux pièces, il n’est pas nécessaire de renvoyer aux factures à titre de preuve supplémentaire de l’affichage de la Marque.

[31]  La Partie requérante précise également que les avis de droits d’auteur pour « MANUEL‑CAHIER 1 » et « MANUEL-CAHIER 2 » datent de 2005 et de 2006 respectivement. Toutefois, ces avis indiquent simplement l’année à laquelle les droits d’auteur ont été revendiqués et ne sont pas nécessairement incompatibles avec la distribution des travaux dans les années subséquentes. En effet, les entrées de facture de la période pertinente incluent les ISBN correspondant à ceux des publications à la pièce P-1. De plus, les documents imprimés à la pièce P-2, datés du 27 février 2017, montrent la Marque affichée sur les pages de couverture des publications de la même manière, suggérant une continuité dans la façon d’affichage. En effet, la déclaration de M. Lutzy confirme que la Marque a été affichée de la même manière au cours de la période pertinente.

[32]  Étant donné que j’ai admis les factures jointes à titre de preuve des transferts des Produits au Canada au cours de la période pertinente, il n’est pas nécessaire de renvoyer aux chiffres d’affaires fournis dans la déclaration de M. Lutzy. Dans les circonstances, il n’est pas nécessaire d’examiner l’observation de la Partie requérante selon laquelle les chiffres d’affaires n’ont pas été répartis par Produit et selon laquelle on ne mentionne pas que les ventes sont limitées au Canada.

Emploi par le Propriétaire par l’intermédiaire d’un distributeur

[33]  Enfin, la Partie requérante soutient que les ventes par TC Média Livres ne sont pas exécutées au bénéfice du Propriétaire, puisqu’il n’existe aucune preuve selon laquelle le Propriétaire a obtenu un permis pour que cette entité emploie la Marque ou exerce le contrôle nécessaire des produits vendus sous licence. À l’inverse, le Propriétaire soutient que, là où le titulaire d’une marque de commerce applique une marque de commerce à un produit ou à son emballage, tout emploi de cette marque de commerce résultant des ventes du produit par un distributeur ou un revendeur est utilisé par le propriétaire de la marque de commerce [citant Reckitt Benckiser (Canada) Inc c Tritap Food Broker, 2013 COMC 65; et Malcolm Johnston & Associates c A & A Jewellers Ltd (2000), 8 CPR (4th) 56 (FCTD), infirmant 78 CPR (3d) 527 (COMC)].

[34]  À l’audience, la Partie requérante a répondu aux observations du Propriétaire en déclarant que les causes évoquées ne sont pas applicables et devraient être restreintes à leurs faits, et, plus précisément, au fait que le propriétaire de la marque de commerce et son distributeur, dans chacune de ces affaires, étaient des entreprises connexes. La Partie requérante a par la suite soutenu que, puisque les factures indiquent que TC Média Livres distribue le produit de plusieurs entreprises, il n’est pas clair en l’espèce que les ventes facturées reviendraient précisément au Propriétaire.

[35]  Toutefois, comme l’a fait remarquer à juste titre le Propriétaire, il est bien établi qu’une pratique normale du commerce d’un propriétaire de marque de commerce implique souvent les distributeurs, les grossistes et les détaillants, et que la distribution et la vente par de telles entités étaient au bénéfice du propriétaire sans avoir besoin d’un permis, à condition que le propriétaire ait amorcé le premier maillon dans la série de transactions [voir Manhattan Industries c Princeton Manufacturing Ltd (1971), 4 CPR (2d) 6 (CFPI); et Osler, Hoskin & Harcourt c Canada (Le Registraire des marques de commerce) (1997), 77 CPR (3d) 475 (CFPI)].

[36]  Dans les affaires évoquées par le Propriétaire, toute relation d’affaires entre le propriétaire de la marque de commerce et le distributeur n’est pas prise en compte dans l’analyse de l’entité qui avait employé la marque en litige.

[37]  Dans Reckitt Benckiser, le registraire a confirmé qu’« un distributeur de produits n’a pas besoin de licence du propriétaire de la marque de commerce pour les distribuer » [au paragraphe 14, je souligne]. Le registraire a déduit que le vendeur évident en l’espèce était simplement un distributeur selon la pratique normale du commerce du propriétaire et le nom du vendeur; le fait que le propriétaire de la marque de commerce et le vendeur étaient des entreprises connexes n’a pas été considéré à cet égard [au paragraphe 13].

[38]  De plus, dans A & A Jewellers, bien que le registraire ait la preuve que les entreprises qui vendaient des produits sous la marque en litige étaient des filiales en propriété exclusive du propriétaire de la marque de commerce, cette relation d’affaires ne suffisait pas pour conclure que l’emploi de la marque était au bénéfice du propriétaire. Ce qui a convaincu la Cour fédérale de maintenir l’enregistrement en appel était la présentation d’une nouvelle preuve établissant que les vendeurs étaient « simplement des distributeurs » des produits du propriétaire, plutôt que des « licenciés » employant la marque [aux paragraphes 10 à 12].

[39]  En l’espèce, je suis convaincue que, comme l’atteste M. Lutzy, TC Média Livres est simplement le distributeur des Produits du propriétaire et, à ce titre, simplement un intermédiaire de la série de transactions entre le Propriétaire et le consommateur final. Le fait que TC Média Livres distribue également les publications d’autres entreprises, mais émet des factures qui ne font pas la corrélation de chaque publication avec sa source, importe peu. Il n’y a aucune obligation d’identifier le propriétaire de la marque de commerce sur les factures ou par ailleurs en liaison avec la marque [voir Novopharm Ltd c Monsanto Canada Inc (1998), 80 CPR (3d) 287 (COMC); et Gowling Lafleur Henderson LLP c Classical Remedia Ltd, 2008 CarswellNat 4604 (COMC)]. Quoi qu’il en soit, ainsi que l’atteste la pièce P­1, les pages de couverture et de table des matières des publications du Propriétaire identifient elles-mêmes le Propriétaire, et non TC Média Livres, à titre de source des produits. De plus, la preuve à la pièce P­2 montre que les mêmes produits sont mis en vente directement par le propriétaire, comme l’atteste M. Lutzy.

[40]  Puisque je suis convaincue que le propriétaire est le premier maillon dans la chaîne de distribution au consommateur final, la preuve d’une utilisation en vertu d’une licence conformément à l’article 50 de la Loi n’est pas requise.

Décision

[41]  Compte tenu de tout ce qui précède, je suis convaincue que le Propriétaire a établi l’emploi de la Marque au sens du paragraphe 4(1) et de l’article 45 de la Loi uniquement en liaison avec les produits visés par l’enregistrement suivants :

Collection de livres et matériel didactique en éducation physique, nommément livres de l’élève, guides d’enseignement, cahiers d’exercices, […] pour l’enseignement au secondaire.

[42]  De plus, je ne dispose d’aucune preuve de circonstances spéciales justifiant le défaut d’emploi en liaison avec les produits visés par l’enregistrement restants.

[43]  Compte tenu de tout ce qui précède, dans l’exercice des pouvoirs qui m’ont été délégués en vertu des dispositions du paragraphe 63(3) de la Loi et conformément à l’article 45 de la Loi, l’enregistrement sera modifié de manière à supprimer les produits suivants de l’enregistrement :

[…] cédéroms pré-enregistrés ne contenant pas de logiciel, cassettes audio-visuelles pré-enregistrées […].

[44]  L’état déclaratif des produits modifié sera libellé comme suit :

Collection de livres et matériel didactique en éducation physique, nommément livres de l’élève, guides d’enseignement, cahiers d’exercices, pour l’enseignement au secondaire.

 

Oksana Osadchuk

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

 

Traduction certifiée conforme

Crystal Simard


COMMISSION DES OPPOSITIONS DES MARQUES DE COMMERCE

OFFICE DE LA PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE DU CANADA

COMPARUTIONS ET AGENTS INSCRITS AU DOSSIER

___________________________________________________

DATE DE L’AUDIENCE : 2019-06-06

COMPARUTIONS

Isabelle Jomphe

POUR LE PROPRIÉTAIRE INSCRIT

Karen Durell

FOR LA PARTIE REQUÉRANTE

AGENT(S) AU DOSSIER

Lavery, de Billy, LLP

POUR LE PROPRIÉTAIRE INSCRIT

 

Miller Thomson LLP

FOR LA PARTIE REQUÉRANTE

 

 

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