Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

THE REGISTRAR OF TRADEMARKS

Référence : 2020 COMC 16

Date de la décision : 2020-02-13

[TRADUCTION CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

 

DANS L’AFFAIRE DE LA PROCÉDURE DE RADIATION EN VERTU DE L’ARTICLE 45

 

McCarthy Tetrault LLP

Partie requérante

et

 

Biosential Inc

Propriétaire inscrit

 

LMC731,986 pour ZZZ BAR

Enregistrement

Introduction

[1]  Le 8 février 2017, à la demande de McCarthy Tetrault LLP (la Partie requérante), le registraire des marques de commerce a donné l’avis prévu à l’article 45 de la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, ch T-13 (la Loi) à Biosential Inc (le Propriétaire), le propriétaire inscrit de l’enregistrement no LMC731,986 de la marque de commerce ZZZ BAR (la Marque). 

[2]  La Marque est enregistrée pour emploi en liaison avec les produits suivants :

Barres alimentaires, nommément barres alimentaires à base de graines et de céréales.

[3]  L’avis enjoignait au Propriétaire de fournir une preuve établissant que la Marque a été employée au Canada en liaison avec les produits spécifiés dans l’enregistrement à un moment quelconque au cours de la période de trois ans précédant immédiatement la date d’avis et, si ce n’était pas le cas, la date à laquelle elle a été employée pour la dernière fois et la raison de son défaut d’emploi depuis cette date. Dans ce cas-ci, la période pertinente pour prouver l’emploi est du 8 février 2014 au 8 février 2017.

[4]  La définition pertinente « d’emploi » en liaison avec des produits est énoncée à l’article 4 de la Loi comme suit :

4(1) Une marque de commerce est réputée employée en liaison avec des produits si, lors du transfert de la propriété ou de la possession de ces produits, dans la pratique normale du commerce, elle est apposée sur les produits mêmes ou sur les emballages dans lesquels ces produits sont distribués, ou si elle est, de toute autre manière, liée aux produits à tel point qu’avis de liaison est alors donné à la personne à qui la propriété ou possession est transférée.

[5]  Il est bien établi que de simples allégations d’emploi ne sont pas suffisantes pour établir l’emploi dans le contexte d’une procédure en vertu de l’article 45 [Plough (Canada) Ltd c Aerosol Fillers Inc (1980), 53 CPR (2d) 62 (CAF)]. Bien que le niveau de preuve requis pour établir l’emploi dans le cadre de cette procédure soit peu élevé [Woods Canada Ltd c Lang Michener (1996), 71 CPR (3d) 477 (CF 1re inst)] et qu’il ne soit pas nécessaire de produire une surabondance d’éléments de preuve [Union Electric Supply Co Ltd c le Registraire des marques de commerce (1982), 63 CPR (2d) 56 (CF 1re inst)], il n’en faut pas moins présenter des faits suffisants pour permettre au registraire de conclure que la marque de commerce a été employée en liaison avec chacun des produits et des services spécifiés dans l’enregistrement pendant la période pertinente [John Labatt Ltd c Rainer Brewing Co (1984), 80 CPR (2d) 228 (CAF)]. 

[6]  En réponse à l’avis du registraire, le Propriétaire a produit l’affidavit de M. Craig Hudson, établi sous serment le 6 septembre 2017. Les parties ont toutes les deux produit des représentations écrites et ont été représentées lors d’une audience.

[7]  À titre préliminaire, je souligne que, dans ses représentations écrites, le Propriétaire mentionne un certain nombre de faits qui n’ont pas été présentés en preuve en liaison avec M. Hudson et à sa relation avec le Propriétaire. Toutefois, conformément à l’article 45 de la Loi, je peux uniquement tenir compte de la preuve produite sous la forme d’un affidavit ou d’une déclaration solennelle; par conséquent, j’ai ignoré ces références [Ridout & Maybee LLP c Encore Marketing International Inc (2009), 72 CPR (4th) 204 (COMC].

La preuve du Propriétaire

[8]  Dans son affidavit, M. Hudson affirme qu’il est un psychiatre clinique agréé par l’Ordre des médecins et chirurgiens de l’Ontario (OMCO) et est le premier dirigeant et cofondateur du Propriétaire avec sa femme, Susan Hudson. Il affirme que le premier produit du Propriétaire s’appelait la préparation pour boissons Zenbev, une préparation pour boissons en poudre organique qui comporte le composé chimique tryptophane. Il explique que le produit ZZZ BAR a évolué à partir de la recherche entourant le tryptophane et que le Propriétaire a élaboré du matériel de marketing pour le produit en 2002. À titre de Pièce A, il joint un mémoire de recherche sur l’utilisation du tryptophane pour traiter l’insomnie fondée sur la recherche relative au prototype de barre, publié en 2005. La Marque ne figure pas dans le mémoire.

[9]  M. Hudson affirme que, puisque le produit de boisson Zenbey était plus facile à produire, le Propriétaire a concentré ses efforts sur la commercialisation du produit Zenbey, avec l’intention de revenir au produit ZZZ BAR une fois le produit Zenbey établi. Toutefois, à la fin de 2014, M. Hudson a reçu la directive de l’OMCO de cesser de promouvoir la vente de tout produit. À titre de Pièce C, il joint une copie du décret de l’OMCO, daté du 8 décembre 2014, qui indique que [traduction] « le Comité a déterminé que la disposition appropriée est d’exiger que M. Hudson se présente au Collège pour être averti en personne au sujet de l’infraction du Règlement sur l’annonce », moment auquel [traduction] « les membres du Comité lui fourniront des directives concernant les démarchent que le Comité estime qu’il doit entreprendre afin d’éviter des difficultés futures ». Je précise que le document de la Pièce C indique que la plainte entraînant le décret de l’OMCO a été reçue par l’OMCO en juin 2014 et que l’OMCO a communiqué pour la première fois avec M. Hudson au sujet des problèmes concernant le Règlement sur l’annonce le 14 octobre 2014.

[10]  M. Hudson indique que, en l’absence de ses efforts de promotion et de marketing, les ventes des produits Zenbey [traduction] « ont chuté », affectant les revenus d’exploitation du Propriétaire. Il affirme qu’il a produit une « contestation constitutionnelle » auprès de la Commission d’appel et de révision des professions de la santé en réponse au décret de l’OMCO et il a joint une copie de l’Avis de question constitutionnelle à titre de Pièce D. M. Hudson affirme que la contestation a été entendue le 15 novembre 2016 et qu’une décision sur la question était en suspens au moment de produire l’affidavit. Il affirme également que [traduction] « bien que les efforts de commercialisation et de marketing du produit ZZZ BAR aient également ralenti en juillet 2014 », il se prépare à développer et à vendre les produits à une échelle commerciale une fois la résolution de la contestation constitutionnelle. Il explique qu’il est en communication avec un certain nombre de fabricants au Canada et aux États-Unis pour préparer la production commerciale du produit.

[11]  M. Hudson affirme également qu’actuellement, le Propriétaire a un produit appelé ZZZ BAR en vente, [traduction] « sans grande pompe », sur son site Web. Il explique que [traduction] « des ventes ont été faites au Canada, mais nous ne sommes pas en mesure de promouvoir le produit de manière importante ». À titre de Pièce E, il joint une capture d’écran sans date de zenbev.com, montrant un produit appelé zzzBar disponible pour la vente. Comme Pièce F, il joint des copies des dossiers de transactions pour des [traduction] « ventes représentatives des produits ZZZ BAR », y compris une vente le 15 mars 2017 à un client au Danemark et une autre le 29 juin 2017 à un client canadien. M. Hudson reconnaît que ces ventes ont eu lieu après la période pertinente, mais affirme [traduction] « qu’elles démontrent que nos efforts commerciaux en association au produit ZZZ BAR sont en cours ». Au total, il affirme que le Propriétaire a vendu approximativement 17 de tels produits depuis leur introduction sur le site Web du Propriétaire, générant des revenus d’approximativement 230 $. Enfin, il explique que dès qu’une décision sera rendue pour la contestation constitutionnelle, il a l’intention de vendre le produit ZZZ BAR à plus grande échelle et de promouvoir sa vente.

Analyse

[12]  La Partie requérante soulève deux questions principales par rapport à la preuve du Propriétaire : d’abord, elle ne démontre pas l’emploi de la Marque au cours de la période pertinente et, deuxièmement, elle n’établit pas les circonstances spéciales justifiant le défaut de l’emploi de la Marque. Puisque le Propriétaire concède, dans ses représentations écrites, que la Marque n’a pas été employée en liaison avec les produits visés par l’enregistrement au cours de la période pertinente, la question dans ce cas est de déterminer si des circonstances spéciales existent pour justifier le défaut de l’emploi de la Marque au cours de la période pertinente, conformément à l’article 45(3) de la Loi.

[13]  Pour déterminer si l’existence de circonstances spéciales a été établie, le registraire doit en premier lieu déterminer les raisons pour lesquelles la marque de commerce n’a pas été employée pendant la période pertinente. En second lieu, le registraire doit déterminer si les raisons du défaut d’emploi constituent des circonstances spéciales [Canada (Registraire des marques de commerce) c Harris Knitting Mills Ltd (1985), 4 CPR (3d) 488 (CAF)]. Les circonstances spéciales sont des circonstances ou des raisons qui sont inhabituelles, peu communes ou exceptionnelles [John Labatt Ltd c Cotton Club Bottling Co (1976), 25 CPR (2d) 115 (CF 1er inst) [Cotton Club]].

[14]  S’il détermine que les raisons du défaut d’emploi constituent des circonstances spéciales, le registraire doit encore déterminer si ces circonstances justifient la période de défaut d’emploi. Cette détermination repose sur l’examen de trois critères : 1) la durée de la période pendant laquelle la marque de commerce n’a pas été employée; 2) la question de savoir si les raisons du défaut d’emploi étaient indépendantes de la volonté du propriétaire inscrit; et 3) s’il existe une intention sérieuse de reprendre l’emploi de la marque à court terme [selon Harris Knitting]. Ces critères sont tous trois pertinents, mais la satisfaction du deuxième critère est essentielle pour conclure à l’existence de circonstances spéciales justifiant le défaut d’emploi [selon Scott Paper Ltd c Smart & Biggar, 2008 CAF 129].

[15]  Le Propriétaire allègue que la raison pour le défaut d’emploi de la Marque était le décret de l’OMCO ordonnant à M. Hudson de cesser de promouvoir des produits et de veiller à ce que son nom ou son expertise ne soient pas utilisés pour promouvoir de tels produits. Dans ses représentations écrites, le Propriétaire affirme que, vu que M. Hudson occupe le poste de dirigeant principal du Propriétaire, le décret de l’OMCO est en pratique une interdiction au Propriétaire de faire le marketing des produits visés par l’enregistrement. Le Propriétaire allègue que ces circonstances correspondent à des circonstances peu communes, inhabituelles ou exceptionnelles.

[16]  La Partie requérante allègue que le décret de l’OMCO n’est pas la raison pour le défaut d’emploi, précisant que le décret a été émis près d’un an après le début de la période pertinente et que le Propriétaire a vendu les produits visés par l’enregistrement après la période pertinente, mais avant qu’une décision sur la constitutionnalité du décret ait été rendue. De plus, la Partie requérante allègue que le décret a seulement interdit à M. Hudson de faire la promotion du produit dans sa capacité personnelle et n’empêchait pas le Propriétaire de vendre les produits visés par l’enregistrement; elle observe que M. Hudson affirme que, avant le décret, le Propriétaire avait choisi de se concentrer sur le développement et la commercialisation du produit de boisson Zenbey plutôt que des produits visés par l’enregistrement.

[17]  Selon l’ensemble de la preuve, il semble que le Propriétaire ait pris la décision commerciale délibérée de ne pas employer la Marque. Bien que je reconnaisse que le décret de l’OMCO (une fois émis) aurait été un facteur dans cette décision commerciale et que le décret ait pu compter pour une situation inhabituelle, peu commune ou exceptionnelle s’il avait été l’unique facteur empêchant le Propriétaire de vendre ses produits pour toute la période pertinente [selon Marks & Clerk c SC Prodal 94 SRL, 2006 CF 520 et Przedsiebiorstwo Polmos Bialystok Spolka Akcyjna c Underberg AG, 2013 COMC 133, les deux concernant des efforts visant à se conformer à des normes réglementaires], l’affirmation du Propriétaire selon laquelle le décret était la raison pour laquelle il n’a pas employé la Marque au cours de la période pertinente est contredite par sa propre preuve sur trois aspects.

[18]  D’abord, comme il a été susmentionné, M. Hudson affirme dans son affidavit que le Propriétaire avait en premier lieu choisi de se concentrer sur le produit de boisson Zenbey, puisqu’il était plus facile à produire.

[19]  Deuxièmement, M. Hudson affirme que [traduction] « les efforts de commercialisation et de marketing du produit ZZZ BAR […] avaient ralenti en juillet 2014 », alors que l’OMCO n’a pas communiqué avec lui concernant le Règlement sur l’annonce avant octobre 2014 et n’a pas émis son décret avant décembre 2014. Cela indique également que, même avant que l’OMCO soulève des questions concernant les activités promotionnelles de M. Hudson, le Propriétaire avait déjà pris la décision de ne pas prioriser la mise en marché du produit ZZZ BAR.

[20]  Troisièmement, la preuve du Propriétaire démontre qu’il a vendu les produits visés par l’enregistrement en liaison avec la Marque alors que le décret était toujours en vigueur. Cela appuie la conclusion selon laquelle le Propriétaire aurait pu vendre le produit ZZZ BAR au cours de la période pertinente, mais n’a pas choisi de le faire. Si M. Hudson estime que la vente par le Propriétaire du produit ZZZ BAR au cours de la période pertinente l’aurait fait contrevenir au décret de l’OMCO, il n’est pas clair de savoir pourquoi cela ne serait également pas le cas après la période pertinente, mais avant qu’une décision soit rendue concernant cette contestation constitutionnelle.

[21]  Par conséquent, il semble que le défaut d’emploi de la Marque au cours de la période pertinente était dû à une décision commerciale volontaire de la part du Propriétaire, ce qui ne peut pas être considéré comme inhabituel, peu commun ou exceptionnel à un point tel que cela correspond à des circonstances spéciales. Bien que le décret de l’OMCO soit sans aucun doute devenu un facteur dans cette décision lorsqu’il a été émis à la fin de 2014, le décret à lui seul ne peut pas constituer des circonstances spéciales, puisqu’il s’applique uniquement à une partie de la période pertinente. Les circonstances spéciales doivent s’appliquer à toute la période pertinente [voir, par exemple, Oyen Wiggs Green & Mutala LLP c Rath, 2010 COMC 34 au paragraphe 12; PM-DSC Toronto Inc c PM-International AG, 2013 COMC 15 au paragraphe 15; Norton Rose Fulbright Canada LLP c Solomon Kennedy, exerçant ses activités sous le nom de Luv Life Productions, 2019 COMC 22 au paragraphe 35; Supreme Brands LLC c Joy Group OY, 2019 COMC 45 au paragraphe 31].

[22]  Compte tenu de ce qui précède, il m’est impossible de conclure que les raisons du défaut d’emploi de la Marque au Canada au cours de la période pertinente constituent des circonstances spéciales. Toutefois, même si je devais conclure que la raison déclarée par le Propriétaire pour le défaut d’emploi constituait des circonstances spéciales, cela ne justifierait pas le défaut d’emploi de la Marque. À cet égard, je mentionne la longue période de huit ans de défaut d’emploi et le fait que le décret de l’OMCO n’empêchait pas le Propriétaire de vendre les produits en liaison avec la Marque alors que le décret était toujours en vigueur, ce qui suggère que le défaut d’emploi n’était pas indépendant de la volonté du Propriétaire.

Décision

[23]  En conséquence, dans l’exercice des pouvoirs qui m’ont été délégués en vertu des dispositions de l’article 63(3) de la Loi, l’enregistrement sera radié conformément aux dispositions de l’article 45 de la Loi.

 

G.M. Melchin

Agent d’audience

Commission d’opposition des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

 

Traduction certifiée conforme

William Desroches


COMMISSION DES OPPOSITIONS DES MARQUES DE COMMERCE

OFFICE DE LA PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE DU CANADA

COMPARUTIONS ET AGENTS INSCRITS AU DOSSIER

___________________________________________________

DATE DE L’AUDIENCE : 2019-12-11

COMPARUTIONS

Edward Kang

Pour le Propriétaire inscrit

Michael O’Neil

Pour la Partie requérante

AGENTS AU DOSSIER

Rowand LLP

Pour le Propriétaire inscrit

Gowling WLG (Canada) LLP

Pour la Partie requérante

 

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