Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

THE REGISTRAR OF TRADEMARKS

Référence : 2020 COMC 84

Date de la décision : 2020-08-05

DANS L'AFFAIRE DE L’OPPOSITION

 

Lawyers Without Borders, Inc.

Opposante

et

 

Avocats sans frontières Québec

Requérante

 

1,398,785 pour LAWYERS WITHOUT BORDERS

 

Demande

I. Introduction

[1]  Lawyers Without Borders, Inc. (LWOB) est une société américaine à but non lucratif. Elle s’oppose à l’enregistrement de la marque de commerce LAWYERS WITHOUT BORDERS (la Marque) faisant l’objet de la demande no 1,398,785, au nom d’Avocats sans frontières Québec (ASFQ), une corporation canadienne à but non lucratif membre du mouvement international Avocats sans frontières, et basée sur l’emploi de la Marque au Canada en liaison avec les produits et services suivants :

Produits :

(1) Publications, nommément bulletins en relation avec le renforcement des intervenants de la justice, la lutte contre l'impunité ainsi que la promotion et la défense des droits humains, de l'accessibilité à la justice, des principes de gouvernance démocratique et de la primauté du droit.

Services :

(1) Opération d'une entreprise de renforcement des intervenants de la justice, de lutte contre l'impunité ainsi que de promotion et de défense des droits humains, de l'accessibilité à la justice, des principes de gouvernance démocratique et de la primauté du droit; organisation de missions humanitaires visant à renforcer les intervenants de la justice, lutter contre l'impunité ainsi que promouvoir et défendre les droits humains, l'accessibilité à la justice, les principes de gouvernance démocratique et la primauté du droit; services de collecte de fonds pour organisation de missions et activités sur le renforcement des intervenants de la justice, la lutte contre l'impunité ainsi que la promotion et la défense des droits humains, de l'accessibilité à la justice, des principes de gouvernance démocratique et de la primauté du droit.

(2) Organisation de conférences et séances d'information sur le renforcement des intervenants de la justice, la lutte contre l'impunité et la défense et la promotion des droits humains, de l'accessibilité à la justice, des principes de gouvernance démocratique et de la primauté du droit.

Revendications :

  • Employée au Canada depuis au moins aussi tôt que novembre 2006 en liaison avec les produits.
  • Employée au Canada depuis au moins aussi tôt que novembre 2002 en liaison avec les services (1).
  • Employée au Canada depuis au moins aussi tôt que juin 2003 en liaison avec les services (2).

[2]  LWOB s’oppose à la demande en faisant essentiellement valoir la probabilité de confusion entre la Marque et une marque de commerce identique de LWOB, que celle-ci allègue avoir antérieurement employée, et continuer d’employer, au Canada en liaison avec sensiblement le même genre de produits et services. Puisque j’ai précédemment défini la marque de commerce LAWYERS WITHOUT BORDERS comme la Marque, cette définition s’appliquera également à la marque de commerce de LWOB dans le cadre de ma décision.

[3]  Comme il ressortira de mon analyse, j’estime qu’il y a lieu de rejeter la demande.

II. Le dossier

[4]  La demande relative à la Marque a été produite par ASFQ le 10 juin 2008 et annoncée dans le Journal des marques de commerce aux fins d’opposition, le 26 juin 2013.

[5]  La déclaration d’opposition de LWOB a été originalement produite le 26 novembre 2013, et a été par la suite modifiée par celle-ci le 6 janvier 2014, en réponse aux objections soulevées par le registraire dans une lettre officielle datée du 6 décembre 2013 en regard de la suffisance des motifs d’opposition plaidés par LWOB, portant sur l’absence de caractère distinctif de la Marque au sens de l’article 2 de la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, ch T-13 (la Loi); l’absence de droit à l’enregistrement au sens de l’article 16(1)(a) de la Loi; et la non-conformité de la demande au sens de l’article 30(a) de la Loi.

[6]  ASFQ a produit une contre-déclaration le 27 mars 2014, niant tous et chacun des motifs d’opposition plaidés par LWOB et faisant également valoir une décision, rendue le 14 janvier 2013, par la Cour fédérale dans une affaire impliquant les mêmes parties, ayant abouti à l’invalidation et la radiation de l’enregistrement no TMA631,359, au nom de LWOB, visant la Marque en liaison avec des services juridiques, à savoir Avocats sans frontières Québec c Lawyers Without Borders, Inc, 2013 CF 27 (le Jugement en invalidation) (appel auprès de la Cour d’appel fédérale (dossier A-566-12) discontinué le 7 mars 2013). Je reviendrai plus loin sur cette décision.

[7]  Au soutien de son opposition, LWOB a produit :

·  Un affidavit de Christina Storm, souscrit aux États-Unis, le 24 octobre 2014 (l’affidavit Storm). Mme Storm est la présidente-directrice générale et fondatrice de LWOB. Son affidavit a pour but de démontrer l’emploi au Canada de la Marque par LWOB, et relate notamment l’historique, la nature et la portée des activités de LWOB au Canada. Mme Storm a été contre-interrogée sur son affidavit et la transcription de son contre-interrogatoire, de même que les réponses aux engagements souscrits lors de celui-ci, sont au dossier. Je note que lors de son contre-interrogatoire, Mme Storm a apporté de légères corrections à certains passages de son affidavit [cf. transcription pp 4, 5, 7 et 83 portant sur les paragraphes 1, 27 et 37, et la suppression du sous-titre « Avocats sans Frontière [sic] Québec » de son affidavit].

·  Un affidavit de Matthew Taylor, également souscrit le 24 octobre 2014 (l’affidavit Taylor). M. Taylor est un avocat à l’emploi du Ministère de la Justice – section de la politique en matière de droit pénal. Son affidavit a pour but de relater son expérience passée comme coordonnateur, notamment du programme Pro Bono Students Canada (PBSC), alors qu’il était étudiant en droit de l’Université d’Ottawa, au cours des années 2001 et 2002, et ses interactions, à ce titre, avec LWOB.

·  Un affidavit de Marion Williams, de la ville de St-Augustine, à Trinidad, dans les Caraïbes, souscrit le 4 novembre 2014 (l’affidavit Williams). Mme Williams est directrice de Williams Law, ayant une boîte postale à Toronto. Son affidavit a pour but de relater son expérience passée comme représentante de LWOB au Canada. Mme Williams a été contre-interrogée sur son affidavit et la transcription de son contre-interrogatoire est au dossier. Je note que lors de son contre-interrogatoire, Mme Williams a apporté de légères corrections à certains passages de son affidavit [cf. transcription pp 4 et 5 portant sur les paragraphes 1, 5 et 8 de son affidavit].

[8]  Au soutien de sa demande, ASFQ a produit :

·  Un affidavit de Pascal Paradis, souscrit le 3 mars 2016 (l’affidavit Paradis). M. Paradis est le directeur général d’ASFQ. Son affidavit a pour but de démontrer l’emploi au Canada de la Marque par ASFQ, et relate notamment l’historique, la nature et la portée des activités d’ASFQ. M. Paradis a été contre-interrogé sur son affidavit et la transcription de son contre-interrogatoire, de même que les réponses aux engagements souscrits lors de celui-ci, sont au dossier. Je note que lors de son contre-interrogatoire, M. Paradis a apporté une correction au paragraphe 38 de son affidavit [cf. transcription pp 1-2].

·  Un affidavit de Simon V. Potter, avocat et ancien président de l’Association du Barreau canadien (ABC) en 2002-2003, souscrit le 1er mars 2016 (l’affidavit Potter). Son affidavit vise à supporter les prétentions d’ASFQ concernant l’association de la Marque à ASFQ, et l’absence de connaissance quelconque de tout emploi de pareille marque de commerce fait par LWOB au Canada.

·  Un affidavit de Fred Headon, avocat et ancien président de l’ABC en 2013-2014, souscrit le 3 mars 2016 (l’affidavit Headon). Son affidavit vise à supporter les prétentions d’ASFQ concernant l’association de la Marque à ASFQ, et l’absence de connaissance quelconque de tout emploi de pareille marque de commerce fait par LWOB au Canada.

·  Une copie certifiée de l’enregistrement no TMA954,925 pour la marque AVOCATS SANS FRONTIÈRES, au nom d’ASFQ.

[9]  Chacune des parties a produit un plaidoyer écrit et était représentée à une audience. Lors de cette audience, LWOB a, d’entrée de jeu, retiré volontairement un de ses motifs d’opposition, nommément celui basé sur la non-conformité de la demande au sens de l’article 30(a) de la Loi, laissant ainsi comme seuls motifs d’opposition celui basé sur l’absence de droit à l’enregistrement au sens de l’article 16(1)(a) de la Loi, et celui basé sur l’absence de caractère distinctif au sens de l’article 2 de la Loi, tournant tous deux autour de la question de la probabilité de confusion entre la Marque et la même marque de commerce de LWOB, que celle-ci allègue avoir antérieurement employée, et continuer d’employer, au Canada en liaison avec des produits et services similaires à ceux visés par la présente demande.

[10]  De nombreuses modifications à la Loi sont entrées en vigueur le 17 juin 2019. La date utilisée pour déterminer quelle version de la Loi s’applique à une procédure d’opposition est la date à laquelle la demande visée par l’opposition a été annoncée. La présente demande ayant été annoncée avant le 17 juin 2019, conformément à l’article 70 de la Loi, les motifs d’opposition seront évalués sur le fondement de la Loi dans sa version du 16 juin 2019, à l’exception de la question de la confusion qui, elle, sera évaluée au regard des articles 6(2) à (4) de la Loi dans sa version actuelle.

III. Analyse

III.1 Remarques préliminaires - Litige antérieur entre les parties

[11]  Comme indiqué plus haut, les parties à la présente procédure ont été impliquées dans un litige antérieur, ayant ultimement abouti à l’invalidation et la radiation de l’enregistrement no TMA631,359, au nom de LWOB, visant la Marque en liaison avec des services décrits comme [traduction] « services juridiques » (« legal services »).

[12]  Il convient ici d’expliquer brièvement le contexte de ce litige antérieur.

[13]  En effet, le Jugement en invalidation résulte d’une procédure qui avait été entreprise le 16 janvier 2010 par ASFQ, sous le régime de l’article 57 de la Loi, en vue d’obtenir l’invalidation et la radiation de pareil enregistrement qui avait été cité contre elle par le registraire dans le cadre de l’examen de certaines demandes d’enregistrement de marques de commerce produites par ASFQ, dont la présente demande [para 9, affidavit Paradis]. ASFQ avait fondé sa demande d’invalidation et de radiation sur l’allégation que l’enregistrement no TMA631,359, basé à la fois sur l’emploi de la Marque au Canada par LWOB depuis au moins aussi tôt que juillet 2001, et l’emploi et l’enregistrement de pareille marque aux États-Unis par LWOB, était invalide sous le régime de l’article 18 de la Loi pour quatre motifs, exposés comme suit par la Cour au paragraphe 4 de sa décision :

[traduction] :

  • a) À la date de l’enregistrement de la marque de commerce [LAWYERS WITHOUT BORDERS], soit au 27 janvier 2005, LWOB Inc. ne l’avait pas employée de la manière exposée dans sa demande d’enregistrement. Cette allégation de la demanderesse [ASFQ] soulève la question de savoir si LWOB Inc a employé la marque [LAWYERS WITHOUT BORDERS] au Canada en liaison avec des services juridiques.

  • b) Au 26 janvier 2010, date où la présente demande de radiation a été portée devant notre Cour, la marque de commerce [LAWYERS WITHOUT BORDERS] n’était pas distinctive des activités de son propriétaire, LWOB Inc, mais plutôt de celles d’ASFQ.

  • c) LWOB Inc a abandonné la marque de commerce [LAWYERS WITHOUT BORDERS].

  • d) À la date où LWOB Inc a produit sa demande d’enregistrement, soit au 25 [sic] octobre 2003, ASFQ, plutôt que LWOB, était la personne ayant droit d’en obtenir l’enregistrement au Canada. Cette allégation d’ASFQ soulève les questions de savoir qui, d’elle‑même ou de LWOB, a employé en premier lieu la marque de commerce [LAWYERS WITHOUT BORDERS] au Canada, et de quand date ce premier emploi.

[Les soulignements sont ceux de la Cour. À noter également que la date à laquelle la demande d’enregistrement de LWOB avait été produite, est le 15 octobre 2003 (comme correctement indiqué au paragraphe 1 de la décision) et non pas le 25 octobre 2003.]

[14]  Dans cette affaire, la Cour a statué aux paragraphes 5 à 7 que :

[traduction] :

[…] ASFQ a prouvé que l’enregistrement de la marque de commerce [LAWYERS WITHOUT BORDERS] au Canada est invalide pour deux motifs : 1) au moment de la production de la demande de radiation, soit au 26 janvier 2010, la marque de commerce déposée « Lawyers Without Borders » ne distinguait pas véritablement les services en liaison avec lesquels elle était employée par LWOB Inc, ni n’était adaptée à les distinguer ainsi, mais elle était plutôt distinctive des activités exercées par ASFQ depuis 2002.

Notre Cour conclut également que, à la date où LWOB Inc a produit sa demande d’enregistrement de la marque considérée, c’est-à-dire au 25 [sic] octobre 2003, ASFQ, plutôt que LWOB, était la personne ayant droit d’en obtenir l’enregistrement au Canada.

Par conséquent, notre Cour n’a pas à prononcer [sic] sur les deux autres motifs d’invalidité invoqués par ASFQ.

[15]  Or, cette procédure en invalidation et radiation avait été entreprise par ASFQ de façon relativement parallèle à une autre procédure de radiation, sommaire cette fois, engagée par le registraire en vertu de l’article 45 de la Loi, à la demande des anciens agents de marques de commerce d’ASFQ et portant précisément sur le même enregistrement, ayant abouti à la décision McCarthy Tétrault c Lawyers Without Borders Inc, 2010 TMOB 169 (la Décision d’avis 45), par la suite portée en appel par ASFQ devant la Cour fédérale (dossier T-2103-10).

[16]  Plus particulièrement, dans la Décision d’avis 45, le registraire avait refusé de radier l’enregistrement no TMA631,359 pour non-emploi, étant d’avis que LWOB avait démontré l’emploi de la Marque au Canada au cours de la période pertinente visée dans cette procédure, soit entre le 30 juin 2005 et le 30 juin 2008 (date de l’avis émis par le registraire), en liaison avec les services décrits dans l’enregistrement comme des [traduction] « services juridiques ».

[17]  Comme il fallait s’y attendre, il a été fait référence à la Décision d’avis 45 dans le Jugement en invalidation. Ce dernier ayant ultimement abouti à l’invalidation et la radiation de l’enregistrement no TMA631,359 contesté, la procédure d’appel de la Décision d’avis 45 a été discontinuée le 3 juin 2013.

[18]  Bien que je conçoive les raisons pour lesquelles ASFQ fait valoir le Jugement en invalidation dans la présente affaire, il convient d’insister sur le fait que pareille décision n’est toutefois pas nécessairement déterminante dans le présent cas. Il suffit de mentionner que chaque affaire repose sur des faits qui lui sont propres. Cela dit, je ferai référence au Jugement en invalidation lorsque j’estimerai qu’il convient de le faire.

III.2 Le fardeau qui repose sur les parties

[19]  C’est à LWOB qu’il appartient au départ d’établir le bien-fondé de son opposition. LWOB doit faire en sorte que chacun de ses motifs d’opposition soit dûment plaidé et s’acquitter du fardeau de preuve initial en établissant les faits sur lesquels elle appuie chacun de ceux-ci. Une fois ce fardeau de preuve initial rencontré, il incombe à ASFQ d’établir, selon la prépondérance des probabilités, qu’aucun de ces motifs d’opposition ne fait obstacle à l’enregistrement de la Marque [John Labatt Ltd c Molson Companies Ltd (1990), 30 CPR (3d) 293 (CF 1re inst); et Dion Neckwear Ltd c Christian Dior, SA et al (2002), 20 CPR (4th) 155 (CAF)].

III.3 Motif d’opposition fondé sur l’absence de droit à l’enregistrement de la Marque au sens de l’article 16(1)(a) de la Loi

[20]  Il convient de reproduire ici le motif d’opposition, comme plaidé par LWOB, dans son intégralité :

The Applicant is not the person entitled to registration of the [Mark] in Canada pursuant to section 16(1)(a) of the Act, as the [Mark] is confusing with the Opponent’s mark LAWYERS WITHOUT BORDERS (“Opponent’s Mark”), which had been previously used in Canada by the Opponent. The Opponent’s Mark has previous use in Canada in association with various wares and services, including: legal services, recruitment materials, promotional materials, fundraising materials, private and public newsletters, educational materials, greeting cards, calendars, books and websites. Through this prior use, the Opponent’s Mark has acquired a substantial degree of distinctiveness in Canada.

[Mes soulignements]

[21]  Contrairement à ce que LWOB indique au paragraphe 6 de son plaidoyer écrit, ce motif d’opposition n’allègue pas que la Marque a été antérieurement employée et révélée (« previously used and made known ») au Canada par LWOB, mais seulement antérieurement employée. Cela dit, les produits et services en liaison avec lesquels LWOB allègue avoir antérieurement employé la Marque au Canada, ne sont pas limités aux seuls produits et services expressément énumérés dans son motif d’opposition, compte tenu du mot « including » précédant l’énumération. Comme ASFQ n’a présenté aucune demande de décision interlocutoire afin de voir ce motif d’opposition précisé ou restreint aux seuls produits et services expressément énumérés, ce motif d’opposition doit être apprécié en fonction de la preuve au dossier [Novopharm Ltd c AstraZeneca AB (2002), 2002 CAF 387, 21 CPR (4th) 289]. Gardant à l’esprit le Jugement en invalidation, je conviens avec LWOB qu’il s’agit d’une distinction importante, en ce que le présent motif d’opposition n’est ainsi pas limité à une allégation d’emploi antérieur de la Marque par LWOB en liaison avec des services juridiques seulement.

[22]  Afin de satisfaire le fardeau de preuve initial lui incombant en regard de ce motif, LWOB doit démontrer qu’aux dates de premier emploi de la Marque alléguées par ASFQ dans la présente demande, la Marque avait été antérieurement employée au Canada par LWOB, et qu’elle n’avait pas été abandonnée par celle-ci à la date de l’annonce de la demande d’ASFQ, le 26 juin 2013 [article 16(5) de la Loi].

III.3.1 Concepts juridiques applicables

[23]  Les définitions pertinentes d’« emploi » en liaison avec des produits et services sont énoncées à l’article 4 de la Loi :

 (1) Une marque de commerce est réputée employée en liaison avec des produits si, lors du transfert de la propriété ou de la possession de ces produits, dans la pratique normale du commerce, elle est apposée sur les produits mêmes ou sur les emballages dans lesquels ces produits sont distribués, ou si elle est, de toute autre manière, liée aux produits à tel point qu’avis de liaison est alors donné à la personne à qui la propriété ou possession est transférée.

(2) Une marque de commerce est réputée employée en liaison avec des services si elle est employée ou montrée dans l’exécution ou l’annonce de ces services.

[24]  Comme souligné par la Cour fédérale dans la décision Hilton Worldwide Holding LLP c Miller Thomson, 2018 CF 895 (en appel devant la Cour d’appel fédérale (dossier A-325-18)), au paragraphe 35 : [traduction] « Si le paragraphe 4(2) de la Loi prévoit que l’annonce de services constitue un emploi, il est clair que le simple fait d’annoncer des services au Canada qui ne sont ni exécutés ou fournis ici ne constitue pas un emploi au sens de la Loi […] ». À cet égard, la Cour, procédant à une revue de la jurisprudence récente sur cette question, notamment aux paragraphes 41 à 56, précise que : [traduction] « l’'emploi' en liaison avec des services au Canada peut être établi par la possibilité donnée à des canadiens de tirer directement avantage d’un service ».

[25]  De plus, comme rappelé par le registraire dans la décision Olive Me Inc, et al c 1887150 Ontario Inc, 2020 TMOB 26, aux paragraphes 13 à 15, l’article 16 de la Loi n’impose pas à un opposant d’établir un certain niveau d’emploi ou de réputation acquise. Si l’opposant démontre que son emploi satisfait aux exigences de l’article 4 de la Loi, que cet emploi a eu lieu pendant la période pertinente, et que sa marque de commerce n’a pas été abandonnée à la date de l’annonce de la demande du requérant, l’opposant se sera acquitté de son fardeau de démontrer l’emploi antérieur aux fins d’une opposition fondée sur l’article 16(1)(a) de la Loi, même si cette preuve se limite à une seule vente ou un seul événement, dans la mesure où cela s’inscrit dans la pratique normale du commerce [7666705 Canada Inc c 9301-7671 Québec Inc, 2015 TMOB 150].

[26]  Cela dit, l’évaluation de l’emploi doit être examinée en fonction de ses faits particuliers. À cet égard, l’article 16 de la Loi n’impose pas à un opposant de démontrer nécessairement l’emploi continu de la marque de commerce alléguée au soutien d’un motif d’opposition fondé sur l’article 16(1)(a) de la Loi. En effet, comme rappelé par la Cour d’appel fédérale dans la décision Iwasaki Electric Co Ltd c Hortilux Schreder B.V., 2012 CAF 321, au paragraphe 21 :

[traduction]

Le paragraphe 16(5) de la Loi ne repose pas sur le fait qu’une personne cesse d’employer (au sens de la Loi) une marque de commerce, mais plutôt sur le fait qu’une personne abandonne une marque de commerce en question. Comme je l’ai déjà dit, l’abandon d’une marque de commerce n’est pas déterminé en fonction uniquement du fait qu’une personne cesse d’employer cette marque de commerce. La personne doit également avoir eu l’intention d’abandonner la marque de commerce. Il est vrai que pour déterminer si une personne a l’intention d’abandonner une marque de commerce, on pourrait se fonder sur le fait qu’elle ne l’a pas employée depuis longtemps en l’absence de toute autre preuve.

[27]  Ceci m’amène à revoir la preuve produite par LWOB dans le présent dossier, de même que celle d’ASFQ, afin de déterminer dans quelle mesure LWOB a, de fait, rencontré son fardeau de preuve initial.

III.3.2 Revue de la preuve produite par LWOB

[28]  Comme indiqué plus haut, cette preuve est constituée de trois affidavits, dont deux ont fait l’objet de contre-interrogatoires.

[29]  L’affidavit principal consiste en l’affidavit Storm, comptant 74 paragraphes et accompagné des pièces « A » à « Z » et « AA » à « SS ». À cela s’ajoute le fait que ce volumineux affidavit doit être lu en considérant la transcription du contre-interrogatoire de Mme Storm sur cet affidavit, laquelle transcription compte quelque 275 pages, en plus d’être accompagnée à son tour de pièces et réponses aux engagements relativement volumineuses. Au sujet des pièces produites lors de ce contre-interrogatoire, il convient de noter à ce stade-ci de ma décision, que celles-ci sont au nombre de trois et consistent en les documents suivants :

  • Pièce « CS-A » : une copie de l’affidavit de Mme Storm, souscrit le 13 août 2010, qui avait été soumis comme seule et unique preuve au nom de LWOB dans le dossier visé par le Jugement en invalidation. Cet affidavit comptait 49 paragraphes et était accompagné des pièces « A » à « Y ». Je note ici que l’affidavit Storm produit dans le présent dossier est calqué en partie sur cet affidavit antérieur. Par contre, le présent affidavit est substantiellement plus long et accompagné de plus du double de pièces jointes.

  • Pièce « CS-B » : une copie de l’affidavit de Mme Storm, souscrit le 30 décembre 2008, qui avait été soumis comme seule et unique preuve au nom de LWOB dans le dossier visé par la Décision d’avis 45. Cet affidavit, relativement bref, comptait 9 paragraphes et était accompagné des pièces « A » à « C ».

  • Pièce « CS-C » : une copie de l’affidavit de Catherine McKenna, fondatrice et directrice administrative de la société à but non lucratif Canadian Lawyers Abroad (CLA), souscrit en décembre 2010, qui avait été soumis à titre de preuve au nom d’ASFQ (laquelle preuve d’ASFQ comprenait également trois autres affidavits) dans le dossier visé par le Jugement en invalidation. Cet affidavit comptait 8 paragraphes.

[30]  Les affidavits Taylor et Williams visent à corroborer ou développer certaines des affirmations de Mme Storm ou certains des éléments de preuve introduits par celle-ci concernant l’emploi de la Marque fait par LWOB. Aussi, plutôt que de revoir et de discuter de chacun de ces affidavits successivement, je tenterai ici de résumer les portions de l’affidavit Storm que j’estime les plus pertinentes aux fins de mon analyse, en précisant au fur et à mesure comment les affidavits Taylor et Williams complètent ou corroborent l’affidavit Storm.

[31]  Cela dit, j’estime que ce résumé nécessite néanmoins un niveau de détail élevé afin de me permettre de distinguer certains des faits et conclusions propres au Jugement en invalidation des circonstances du présent dossier, et étant donné la position d’ASFQ à l’effet que LWOB n’a pas rencontré son fardeau de preuve initial au regard du présent motif d’opposition.

[32]  Mme Storm a fondé LWOB en la ville de Hartford, au Connecticut, le 30 janvier 2000, laquelle entreprise fut par la suite constituée en société dans cet État américain le 1er mars 2000. Mme Storm occupe le poste de directrice-administrative et présidente de LWOB depuis cette date et est salariée de cette société depuis 2006. À la date du contre-interrogatoire de Mme Storm, LWOB comptait, à ses bureaux des États-Unis situés au Connecticut et à Washington D.C., en tout 9 salariés, 10 à 15 bénévoles/stagiaires à temps plein, un bénévole à temps partiel, et faisait appel à un consultant externe [affidavit Storm, para 1; transcription Storm, pp 6-20].

[33]  En plus de ses bureaux aux États-Unis, LWOB possède des bureaux au Royaume-Uni et au Kenya [transcription Storm, pp 10-14]. Par contre, LWOB ne possède aucun bureau physique ou établissement au Canada, pas plus qu’il n’a jamais existé de section canadienne (« Canadian chapter ») de LWOB, malgré quelques vaines discussions exploratoires à ce sujet [transcription Storm, pp 14 et 135; transcription Williams, pp 27-29].

[34]  Contrairement à ASFQ, LWOB n’est pas reliée au mouvement international Avocats sans frontières. LWOB s’est inspirée pour la création de son nom de groupes tels Doctors Without Borders et Action Without Borders [transcription Storm, pp 24-25].

[35]  Aux dires de Mme Storm:

3. Since 2001, LWOB has offered lawyers, judges, and students in Canada an opportunity to learn about legal pro bono work, both in Canada, and abroad. LWOB provides education in Canada on how lawyers can transfer their skills to other jurisdictions. LWOB also does this work in the US and the UK.

4. LWOB has made continuing efforts to connect with the Canadian legal community. As a result of these efforts, LWOB has established a reputation in Canada for:

  • a) Organizing, facilitating, and providing legal education;

  • b) Promoting and raising awareness for rule of law issues (including domestic and international law) in developing nations;

  • c) Planning, managing, and mobilizing volunteers for participating in rule of law programs in developing nations;

  • d) Coordinating and connecting lawyers from developed nations for mentorship programs for mentoring lawyers in developing nations;

  • e) Initiating and coordinating legal research projects at Canadian Universities;

  • f) Running a job board for employers and job seekers looking for opportunities in rule of law projects.

[36]  Aux dires de Mme Storm, LWOB a, depuis 2001, employé la Marque au Canada, dans sa forme nominale, et également sous différentes formes stylisées, incluant des éléments graphiques secondaires [affidavit Storm, paras 5-9], comme reproduit ci-dessous :

[37]  Je note à ce stade-ci de ma décision que j’estime que l’emploi de la Marque dans l’une ou l’autre de ces formes graphiques vaut également pour l’emploi de la marque nominale LAWYERS WITHOUT BORDERS, conformément aux principes établis dans Registraire des marques de commerce c Compagnie Internationale pour l’informatique CII Honeywell Bull (1985), 4 CPR (3d) 523 (CAF); et Nightingale Interloc c Prodesign (1984), 2 CPR (3d) 535 (COMC). Je note de plus que le fait que la Marque corresponde également au nom commercial de LWOB n’empêche pas l’emploi concurrent de la Marque.

[38]  Aux dires de Mme Storm, l’enregistrement no LMC631,359, radié par le Jugement en invalidation, couvrait seulement qu’un sous-ensemble relativement restreint (« only a relatively narrow subset ») des services offerts par LWOB sous la Marque. Plus particulièrement, Mme Storm affirme au paragraphe 11 de son affidavit que :

Since 2001, we have continuously and actively promoted LWOB, and its goals and visions, to the Canadian legal community, and we have done so using the [Mark]. Our objective was to:

(a)  Provide access to the Canadian legal community, including lawyers, students, universities, and professors, resources for plugging in to the international pro bono community;

(b)  Provide Canadian resident volunteers with opportunities to participate in rule of law programs, mentoring programs, community outreach, and legal education in developing nations;

(c)  Connect Canadian NGOs with volunteers for legal-centric projects in Canada and abroad;

(d)  Provide opportunities in Canada to Canaidan [sic] law students to participate in legal research projects;

(e)  Promote LWOB and its projects in the Canadian legal community, including to law students, law professors, lawyers, law firms, and judges.

[39]  Aux dires de Mme Storm, et comme souligné par LWOB lors de l’audience tenue dans le présent dossier, le tout premier projet officiel de recherche initié par LWOB au Canada remonte à 2001. Ce projet fut mené en collaboration avec l’Université d’Ottawa et portait sur la primauté du droit (« rule of law ») au Kosovo et a mené à l’élaboration du modèle CLEARS (Creating Legal Accessibility and Resources with Students), ayant prétendument servi de modèle aux collaborations ultérieures de LWOB avec diverses organisations étudiantes canadiennes, Mme Storm ajoutant : « I believe that model developed by LWOB is a core activity of the Canadian NGO [CLA] formed by a former LWOB volunteer » [affidavit Storm, para 27 (corrigé)].

[40]  Plus particulièrement, Mme Storm explique que LWOB a effectué, de concert avec des étudiants et un professeur de droit de cette université, des recherches juridiques sur différents sujets relatifs à la primauté du droit. Mme Storm affirme que la Marque figurait sur la plus grande partie, si ce n’est la totalité, de la correspondance que LWOB a échangée avec l’Université d’Ottawa et ses bénévoles. Elle produit au soutien de son affidavit, comme pièce « C », un rapport, non daté ni signé, ayant été préparé par Matthew Taylor (le même individu ayant souscrit l’affidavit Taylor dans le présent dossier), selon son souvenir aux alentours de l’année 2004, décrivant les travaux ainsi réalisés à ladite université [transcription Storm, pp 217-219]. Mme Storm produit également, comme pièce « D », une copie d’une lettre datée du 11 juillet 2001, qu’elle affirme avoir envoyée à M. Taylor, aux fins de distribution de matériel promotionnel (en l’occurrence des stylos) de LWOB aux étudiants de l’Université d’Ottawa travaillant sur les projets de LWOB (« Enclosed please find the promotional pens from our organization. Please distribute them to the folks working on LWOB projects. »).

[41]  Comme noté par ASFQ, la copie de la lettre de la pièce « D » n’arbore aucune signature, ni en-tête. Toutefois, il ressort clairement du contre-interrogatoire de Mme Storm que ceci est dû au fait que Mme Storm n’avait pas conservé, à l’époque, de copie de la lettre dûment signée et imprimée sur le papier à en-tête de LWOB. Mme Storm a tout simplement imprimé, à partir des documents conservés dans les registres informatiques de LWOB, une copie du texte de la lettre en question, afin de faire état de son contenu dans le cadre du présent dossier [transcription Storm, pp 219-220]. Qui plus est, je note que la réception et la distribution de pareil matériel promotionnel sont expressément corroborées par M. Taylor, au paragraphe 6 de son affidavit, lequel confirme également que « these promotional materials were branded with the name of the organization ('Lawyers Without Borders') ».

[42]  Revenant sur le rapport produit comme pièce « C » au soutien de l’affidavit Storm, je note que M. Taylor explique la relation qui s’était alors développée entre LWOB et PBSC de l’Université d’Ottawa en ces termes :

This is a brief summary of the relationship that Pro Bono Students Canada at the University of Ottawa has formed with [LWOB] and how we have linked together to provide pro bono services on an international stage. This report is meant to outline the steps that were taken to establish this linkage and the important features necessary for such partnership to succeed. It should be noted at the outset that this was made all the more easier because of the fact that the two organizations, [LWOB] and [PBSC], each had as primary goals the provision of pro bono legal services. As such, both organizations were uniquely focused, both had the experience and the framework to work on such projects:

1. My first entry point with LWOB was their website. I simply sent an email letting them know about our organization and whether there would be opportunities for student involvement in rule of law projects.

2. After establishing formal ties with [LWOB] and determining there was in fact work to be done. The first thing done was an assessment of the resources available here in Ottawa in support of the project. […]

3. In terms of recruiting students, it was determined that six would be required for the project. […]

4. Not only is academic and administrative support and linkage required, project support from those frontline professionals working on the project is also to be encouraged. Having a lawyer familiar with the project and immediate needs is crucial. LWOB provided this link with one of its lawyers familiar and in regular contact with the client NGO. […] Through the use of email and the pro bono office as a central link to the University, this 1st linkage proved successful.

[…]

Since the first CLEARS project implemented in 2001, LWOB has experienced some of the pitfalls and benefits of such a program. A Manager whose task is to develop this project and a team to create a working model for it was assigned in early 2004. A Project intake form was created by LWOB with the insights suggested by Pro Bono Canada and a vehicle for that intake form to be processed at the LWOB website is in development and should be in a launch position before the end of February 2004.

[Mes soulignements]

[43]  Je note que ce rapport aurait été rédigé par M. Taylor alors que celui-ci n’agissait plus comme coordonnateur du programme PBSC (comme expliqué ci-après dans ma revue de son affidavit). En ce sens, il est permis de se questionner sur la connaissance personnelle de M. Taylor des faits relatés dans le dernier paragraphe de ce rapport reproduit plus haut, concernant la création d’un formulaire d’accueil (« intake form ») par LWOB. Cela dit, je note que les affirmations de Mme Storm concernant les liens créés par LWOB avec PBSC et l’Université d’Ottawa dans le cadre de ce premier projet réalisé en 2001 sont aussi corroborées par l’affidavit Taylor.

[44]  Plus particulièrement, M. Taylor affirme dans son affidavit qu’alors qu’il était étudiant en droit à l’Université d’Ottawa, il fut engagé par celle-ci afin de coordonner deux programmes, dont le PBSC. Il a occupé le poste de coordonnateur de mai 2001 à mai 2002 environ, après quoi il a pris de nouvelles responsabilités au sein de la Faculté de droit [affidavit Taylor, para 2].

[45]  M. Taylor affirme qu’en sa qualité de coordonnateur, il a affecté des étudiants bénévoles de l’Université d’Ottawa inscrits au programme PBSC à des programmes bénévoles lancés par diverses organisations, dont LWOB [affidavit Taylor, para 3].

[46]  Plus particulièrement, M. Taylor affirme au paragraphe 4 de son affidavit que :

The [PBSC] program began working with LWOB in the summer of 2001. During the course of my tenure as Coordinator of the University’s Program, students from the University worked on two of LWOB’s projects. The first project involved students preparing a legal research memorandum examining possible legal remedies available to respond to actions taken by special forces operating in Kosovo. The second project involved law students assisting in annotating Kosovo’s Criminal Code. Faculty professors were also identified to assist the students working on these projects.

[47]  M. Taylor décrit également brièvement deux évènements survenus au cours de l’automne 2001, lors desquels le partenariat développé entre l’Université d’Ottawa et LWOB aurait été discuté. Le premier, lors d’une table ronde à laquelle participait Mme Storm en tant que représentante de LWOB, tenue dans le cadre de l’assemblée annuelle de l’International Lawyers Association à New York, aux États-Unis, à laquelle M. Taylor a assisté (et pour lequel évènement, LWOB a remboursé une partie des frais encourus par M. Taylor [cf. affidavit Storm, pièce « A » incluant copie d’un chèque au nom de celui-ci, daté du 22 octobre 2001, au montant de 200 $, et copie d’une lettre de couverture adressée par Mme Storm à M. Taylor]). Le second, lors d’une journée « portes ouvertes » de l’Université d’Ottawa ayant pour but de promouvoir notamment le programme PBSC et les différents projets offerts aux étudiants, dont ceux avec LWOB. M. Taylor ajoute que du matériel promotionnel fourni par diverses organisations, dont LWOB, a été distribué lors de cette journée [affidavit Taylor, para 7]. Par contre, aucune autre information concernant le matériel ainsi distribué pour le compte de LWOB n’a été fournie.

[48]  Enfin, M. Taylor affirme qu’en sa qualité de coordonnateur, il a préparé plusieurs rapports concernant le programme PBSC au sein de l’Université d’Ottawa. À cet effet, il joint à son affidavit, comme pièces « A », « B » et « C », copie de trois rapports faisant état notamment des projets avec LWOB, datés respectivement des 22 juin 2001, 23 août 2001, et 2 avril 2002. À titre d’exemple, l’on peut lire dans le rapport de la pièce « B » que :

PBSC has secured a large number of new organisations and interesting projects for our students in Ottawa. Notably, organisations like [LWOB] […] will provide quality placements for our participants. […]

Below is a list of organisations that have accepted student volunteers over the past summer: […] LWOB […]

MAJOR PROJECTS:

[…]

Partnering with [LWOB]. This has proven to be extremely beneficial for our office and is leading to a number of spinoffs for our office. LWOB is currently exploring the idea of creating a complimentary network of law students to assist in their ongoing work. PBSC will likely assist in that as we are already organized in a way to easily support LWOB initiatives. Publicity around this project has resulted in our information being found in news articles, web pages, and magazine features.

[Mes soulignements]

Et dans celui produit comme pièce « C » :

MAJOR PROJECTS/DEVELOPMENTS

[LWOB]: Through our partnership with this organisation, our school has formed links with the Criminal Defense Resource Centre in Pristina, Kosovo. Over the past year, we have participated in two projects with the Centre. […] I would expect the incoming coordinator to ensure that communication is maintained on this project and that they ensure that our partnership with [LWOB] and the Criminal Defence Resource Centre are maintained.

[49]  Lors de l’audience tenue dans le présent dossier, ASFQ a fait valoir que ce premier projet de recherche impliquant PBSC de l’Université d’Ottawa ne démontrait pas en soi l’exécution de services par LWOB au Canada en liaison avec la Marque, mais plutôt que de tels services étaient le fait de tiers au Canada, en l’occurrence PBSC (LWOB étant en fait bénéficiaire des services de PBSC). LWOB a, au contraire, fait valoir que pareil projet démontrait la fourniture de services au Canada par LWOB en liaison avec la Marque, puisque LWOB avait fourni le « linkage » (couplage) entre PBSC et l’organisation non gouvernementale (ONG) Criminal Defense Resource Centre du Kosovo. Avant de discuter plus amplement de cette question, je souhaite continuer ma revue de la preuve au dossier en tentant d’identifier des évènements ou faits précis (dont certains soulignés expressément par LWOB lors de l’audience), plutôt que de reprendre les affirmations, souvent vagues et générales, contenues dans les affidavits Storm et Williams.

[50]  Ainsi, je note la pièce « E » produite au soutien de l’affidavit de Mme Storm, à l’appui de ses prétentions concernant les liens crées par LWOB avec diverses organisations étudiantes canadiennes, ayant pour but de démontrer l’emploi de la Marque fait par LWOB antérieurement à la date de premier emploi alléguée par ASFQ en liaison avec les services (1) listés dans la présente demande. Cette pièce, que LWOB a fait valoir précisément lors de l’audience tenue dans le présent dossier, consiste en une copie d’une lettre datée du 16 juillet 2002, adressée par Mme Storm à Pam Shime, Directrice nationale de PBSC à la Faculté de droit de l’Université de Toronto, lui transmettant les nouvelles brochures de recrutement de LWOB :

Enclosed please find our newly created recruitment brochures. We have a few projects in the pipeline, which may yield something for your group in the fall. I have been contacted by Patrice Thomas from the University of Toronto looking for projects for her group. My copies of my correspondence with Patrice are enclosed.

[51]  Mme Storm joint à son affidavit comme pièce « F » un spécimen représentatif des brochures en question [elle confirme à la page 222 de son contre-interrogatoire : « It’s the only brochure we had until we did our first annual report many years later »].

[52]  Comme noté par ASFQ lors de l’audience, la copie de la lettre de la pièce « E » n’arbore aucune signature, ni en-tête, et n’est accompagnée d’aucune pièce jointe. Toutefois, il ressort encore ici du contre-interrogatoire de Mme Storm que ceci serait dû au fait que Mme Storm n’avait pas conservé, à l’époque, de copie de la lettre dûment signée et imprimée sur le papier à en-tête de LWOB. Mme Storm a tout simplement imprimé, à partir des documents conservés dans les registres informatiques de LWOB, une copie du texte de la lettre en question, afin de faire état de son contenu dans le cadre du présent dossier [transcription Storm, p 221].

[53]  À la revue du spécimen de brochure de la pièce « F », je note que celle-ci arbore clairement la Marque et décrit LWOB en ces termes :

LWOB links legal professionals with pro bono projects from Connecticut to Kosovo, the Midwest to the Middle East. To date, we have created an association with hundreds of lawyers from around the world, including the USA, Canada, Australia […].

[…]

LWOB facilitates a global linkage between NGOs, non-profits and governmental organizations with pro bono partners in areas of human rights, business law, litigation and advocacy. […]

[…]

How it works: we do the linking. LWOB makes your skills available to NGOs and non-profits on a global basis, using not only USA-based lawyers but also those around the world. […]

[…]

Our website is your one-stop resource for internships and eleemosynary opportunities. We monitor and maintain lists of useful links showcasing intern, volunteer and lawyer positions. One visit to our homepage will familiarize you with the opportunities available for humanitarian work in your field and the global issues facing those dealing with conflict resolution and human rights.

[…]

Play an integral part of peace in the making, from your office or from abroad, short-term or long-term. You can use your legal skills for a worthwhile endeavor.

[…]

Want to get involved? Visit www.lawyerswithoutborders.org today!

[Mes soulignements]

[54]  Par contre, je ne relève dans la preuve aucun projet ou réalisation concrète de concert avec l’Université de Toronto, suite à l’envoi de la lettre de Mme Storm discutée plus haut sous la pièce « E ».

[55]  À ce sujet, je note que Mme Storm fait référence, au paragraphe 30 de son affidavit, aux étudiantes Raha et Rose Shahidsaless, comme ayant agi, à titre de « représentantes » de LWOB au sein de cette université au cours des années 2004 à 2009 environ, et ayant travaillé avec « various teams of University of Toronto students on a variety of legal research projects. » Toutefois, aucune autre information, ni documentation concernant ces soi-disant projets, n’a été fournie [transcription Storm, pp 45-49]. Tout au plus, Mme Storm mentionne-t-elle que l’une des sœurs Shahidsaless aurait été invitée à présenter une avocate iranienne du nom de Shirin Ebadi, militante des droits humains et ancienne juge, lors d’un événement tenu au Canada en l’honneur de Mme Ebadi. Encore ici, aucune autre information, ni documentation sur l’évènement en question, n’a été fournie, si ce n’est qu’il aurait s’agit d’une présentation informelle dans le cadre d’un dîner-rencontre, ne s’étant pas nécessairement tenu en lien avec l’Université de Toronto [transcription Storm, pp 43-46]. Qui plus est, il ressort du contre-interrogatoire de Mme Storm que bien qu’invitée, suite à ce dîner-conférence, de manière informelle ou exploratoire, à organiser et/ou commanditer une tournée pancanadienne de Mme Ebadi au sujet des droits humains, LWOB n’a pas été en mesure de le faire, faute de financement [transcription Storm, p 47].

[56]  Toujours en lien avec l’Université de Toronto, je note que Mme Storm joint à son affidavit comme pièce « SS », un échange de courriels, en partie caviardés, survenu entre les mois d’août 2003 et novembre 2003 concernant un vague projet potentiel impliquant PBSC de la Faculté de droit de l’Université de Toronto. Par contre, de ce qu’il est permis de comprendre de cet échange de courriels et du contre-interrogatoire de Mme Storm, LWOB n’a effectué aucun travail dans ce dossier, ne disposant pas des ressources nécessaires (« staffing issues »), hormis de mettre en relation PBSC et un dénommé Peter Henner. En fait, Mme Storm a expliqué en contre-interrogatoire que :

[Réponse à la Q. 780] The nature of the relationship between [LWOB] and schools or law firms is that they have an ongoing request for interesting projects for their students that involve research skills, international rule of law issues. […]

[Réponse à la Q. 788] […] So basically this little linkage was made, and whether Mr. Henner took it forward I’d have toI’d continue examining the thread, but that didn’t seem to be critical to this particular proceeding except to show importantly that we took a project and we tried to introduce it to pro bono students of Toronto.

[57]  Lors de l’audience tenue dans le présent dossier, LWOB a également fait valoir les pièces « KK » et « W » produites au soutien de l’affidavit Storm afin de démontrer l’emploi de la Marque fait par LWOB antérieurement à la date de premier emploi alléguée par ASFQ en liaison avec les services (2) listés dans la présente demande.

[58]  La pièce « KK » consiste en diverses chaînes de courriels, tous datés au cours du mois de novembre 2002, discutant d’une journée « carrière sans frontières » (Career Without Borders event) à l’Université McGill à Montréal. Un premier courriel, daté du 15 novembre 2002, aurait été envoyé à Mme Storm par une étudiante de cette université (dont l’identité a été caviardée aux fins de confidentialité), représentant être membre de la McGill International Law Society et aider à organiser pareil évènement. On peut y lire :

The purpose of this event is to familiarize law students with all the possible careers in international law, by meeting with legal practitioners involved in various fields.

Working on the assumption that there is such a thing as a Canadian “chapter” to your organization, or at the very least –

[59]  Le reste du message est coupé, i.e. on ne peut pas lire le reste de la présomption y mentionnée. (Je note que lorsque contre-interrogée au sujet de la pièce « KK », Mme Storm a précisé que les liens créés avec l’Université McGill remontaient à avant son échange de courriels concernant la journée carrière, i.e. la pièce « KK » concerne seulement cet évènement, et non pas le début de la relation avec l’Université McGill [transcription Storm, p 151]).

[60]  Selon ce qu’il est permis de comprendre du paragraphe 16 de l’affidavit de Mme Storm et des divers courriels de la pièce « KK », Mme Storm aurait transféré ce premier courriel à Marion Williams (la même personne ayant souscrit l’affidavit Williams dans le présent dossier) et Hamid Mojtahedi (un avocat canadien) en leur demandant s’il leur était possible d’assister à cet évènement au nom de LWOB. Dans l’un des courriels envoyés par Mme Storm à un destinataire identifié comme « Canadian International Counsel » (M. Mojtahedi), avec Mme Williams en copie conforme, Mme Storm écrit :

I can share with you a) a Power point presentation and b) some written materials that we’ve developed about pro bono, human rights work, etc. This should help. We’ll also mail brochures to you…some pens to pass out if we can. I will respond to this young woman that we can send a representative (there is another Canadian lawyer willing to go – and she can speak to the work, for example, that she’s doing for us from Canada-and you can speak about LWOB in general terms, as well as, from your help in developing the role of lawyers as observers, your trip to Iran, all in the context of maintaining a rather traditional law practice in Canada.

[61]  Dans sa réponse du 21 novembre 2002, à l’étudiante de l’Université McGill confirmant la participation de LWOB à ladite journée carrière, Mme Storm écrit :

We have two lawyer volunteers in Canada who are willing to attend your proposed meeting. Each has worked on a project with LWOB, one a research question from her office in Canada, the other a short trip to conduct an observation in Iran. I will equip them with materials for your students. Please keep me informed as you set the dates and agenda of your program.

[62]  Je note que Mme Storm produit également à ce sujet, comme pièce « W » au soutien de son affidavit, une copie d’une photographie de Mme Williams et de M. Mojtahedi, prise lors de l’évènement en question, qui se serait tenu le ou vers l’année 2003 (« in and around 2003 ») [affidavit Storm, para 16]. À la revue de cette photo, je constate qu’aucune mention de LWOB n’est visible (ou lisible) sur celle-ci.

[63]  Il ressort de la preuve qu’il s’agirait là de la seule journée carrière du genre auquel LWOB a participé [transcription Storm, p 146; et transcription Williams, p 51]. Mme Williams et M. Mojtahedi auraient distribué environ 30 à 50 brochures de LWOB [affidavit Williams, para 6; transcription Williams, p 59] lors de cet évènement, auquel auraient assisté peut-être une centaine d’étudiants, et ils auraient dirigé les étudiants intéressés vers le site Internet de LWOB [affidavit Storm, para 16; transcription Storm, p 141; affidavit Williams, para 6; transcription Williams, pp 58-59]. Mme Storm atteste également que LWOB a remboursé à Mme Williams et M. Mojtahedi une partie des frais encourus par ceux-ci afin d’assister à cet évènement [affidavit Storm, pièce « A » incluant copie de chèques aux noms de ceux-ci, datés du «2/14/03 » au montant de 200 $ chacun; transcription Williams, p 53]. Je reviendrai plus loin sur le rôle joué par Mme Williams et M. Mojtahedi. Qu’il suffise d’ajouter à ce stade-ci, que Mme Williams a expliqué dans le cadre de son contre-interrogatoire, qu’elle et M. Mojtahedi ont participé, dans le cadre de cet évènement, à un panel de discussion, au cours duquel ils ont relaté leur expérience de travail avec LWOB [transcription Williams, p 55].

[64]  Avant de poursuivre ma discussion des autres pièces produites au soutien de l’affidavit Storm sur lesquelles LWOB a attiré plus particulièrement mon attention lors de l’audience afin de démontrer l’emploi antérieur de la Marque par LWOB au Canada, je souhaite compléter ici la liste des exemples fournis par Mme Storm concernant les liens crées par LWOB avec des universités canadiennes.

[65]  Mme Storm fait référence au paragraphe 33 de son affidavit à un courriel, daté du 24 avril 2003, envoyé à Mmes Shime et Brigitte St-Laurent (de l’Université McGill), afin de les informer de possibilités de stages (« human rights internet internships opportunities ») pouvant intéresser leurs étudiants, et à un échange de courriels, daté du 17 décembre 2003, avec Mme St-Laurent concernant la transmission d’un bulletin d’information de décembre (« December Newsletter ») de LWOB arborant la Marque. Mme Storm joint copie des courriels en question comme pièce « RR » au soutien de son affidavit. Je reviendrai plus loin sur ce type de bulletin d’information.

[66]  Mme Storm fait également référence, au paragraphe 31 de son affidavit, à une présentation faite aux étudiants de l’Osgood Hall Law School de l’Université York en 2004, arborant la Marque, dont copie est jointe à son affidavit comme pièce « G ». Toutefois, lorsque contre-interrogée à ce sujet, Mme Storm ne pouvait se rappeler précisément des détails « of who, what, when, and where » de cette présentation, ajoutant notamment au passage que « I can tell you until this last week we have an ongoing relationship with Osgoode. We stay in touch with them, we support their students who are interested in pro bono, and I assume this was part of the development of this relationship with Osgoode over the years. »” [transcription Storm, pp 34-40].

[67]  Mme Storm fait de plus référence, au paragraphe 32 de son affidavit, à un groupe d’étudiants de l’Université McGill qui aurait contacté LWOB en 2006, en lui soumettant une demande en ligne pour de l’aide juridique bénévole (« a request through our online pro bono lawyer assistance request mechanism seeking assistance in a case in Panama »). Aux dires de Mme Storm, ce groupe d’étudiants avait lui-même été contacté par une ONG du Panama du nom de Los Pescadores. Mme Storm ajoute au paragraphe 32 de son affidavit que « LWOB was able to procure lawyers to assist and provide legal services for the project only to discover that the students had opted not to continue with their support of the group in Panama ». Toutefois, lorsque contre-interrogée à ce sujet, Mme Storm n’a pu fournir, de mémoire, de détail précis à ce sujet [transcription Storm, pp 223-225].

[68]  Revenant sur les autres pièces produites au soutien de l’affidavit Storm sur lesquelles LWOB a attiré plus particulièrement mon attention lors de l’audience afin de démontrer l’emploi de la Marque fait par LWOB antérieurement à la date de premier emploi alléguée par ASFQ en liaison avec les produits listés dans la présente demande, je note les pièces « B » et « J ».

[69]  La pièce « B » consiste en une copie du premier numéro du bulletin d’information (« newsletter ») intitulé « BorderLines » publié par LWOB en avril 2002. Je note que ce bulletin arbore la Marque de façon proéminente, comme souligné d’ailleurs par Mme Storm. Celle-ci affirme de plus, que ce bulletin (et d’autres) a été distribué au Canada à des avocats, des cabinets d’avocats, des étudiants d’universités, des ONG, etc. de même que lors de séminaires, conférences, etc. [affidavit Storm, para 15]. Mme Storm souligne qu’un avocat international (« international lawyer ») qu’elle a rencontré alors qu’elle assistait à une formation offerte en Nouvelle-Écosse en 2001, a rédigé un article dans ce numéro. En contre-interrogatoire, Mme Storm a notamment indiqué qu’elle avait profité de cette formation pour donner une présentation sur LWOB [transcription Storm, pp 167-168]. Je note que plus loin dans son affidavit, Mme Storm affirme que pareil bulletin consiste en la version « papier » du bulletin électronique (« digital newsletter ») « BorderBriefs » publié sur le site Internet de LWOB. À la revue de la pièce « B », je note que celle-ci décrit les activités de LWOB en ces termes :

The launch of this newsletter, as well as LWOB itself, signals the commitment by members of the legal profession around the world, to join in a global effort to resolve conflicts and together rebuild societies emerging from turmoil.

LWOB intends to embrace every lawyer and fraternal association of lawyers, every non-profit organization in need of service and counsel, and global human rights issues and initiatives with the particular goal of assembling all available pro bono resources […].

LWOB is and has been during this last year, the second since its creation, a work in progress.

[Mes soulignements]

[70]  La pièce « J » consiste en une copie des numéros du printemps 2006 et de l’été 2010 du bulletin électronique (« digital newsletter ») « BordersBriefs » de LWOB, arborant lui aussi la Marque de façon proéminente. Mme Storm affirme que pareils bulletins électroniques sont publiés sur le site Internet de LWOB depuis 2002 et continuent à ce jour d’y être publiés. À la revue de la pièce « J », je note que celle-ci décrit la mission de LWOB en ces termes : « The mission of LWOB is to create a global association of lawyers dedicated to the promotion and protection of justice via pro bono service » [mon soulignement]. Il y est également fait mention de la déception de LWOB de ne pas avoir atteint son indépendance financière :

As LWOB moves through the second phase of the ten year plan its founder envisioned […] The “one” disappointment is fairly critical, however : our failure to realize the financial independence we anticipated achieving by the end of year five—the year that was to make the transition of the organization from a wholly volunteer-run organization to one with full time paid staff overseeing programs and operations. That is still a key goal and one we are working hard to realize late this year.

[71]  Toujours au sujet de ces bulletins d’information, Mme Storm explique que l’un des objectifs de ceux-ci est d’éduquer les avocats, comme décrit en ces termes lors de son contre-interrogatoire :

We feature lawyers and what they’re doing for us, and we feature stories about our projects and programming. The newsletter we consider an educational tool because many lawyers don’t understand how they can apply their skills, but they read our newsletter and they see biographical sketches of other lawyers and what they’ve done. And we consider that as a way of educating them and helping them understand the diverse use to which they might be able to put their skills. That was true then and it’s true now. We consider that a very key informative educational tool for lawyers.

[Transcription Storm, p 23]

[72]  Revenant sur le rôle joué par Mme Williams et M. Mojtahedi, je comprends de la preuve qu’outre sa participation à la journée carrière tenue à l’Université McGill, M. Mojtahedi aurait voyagé en Iran à trois occasions en tant que représentant bénévole de LWOB au cours environ des années 2001 à 2003 [affidavit Storm, para 17; transcription Storm, pp 154-157].

[73]  Le premier voyage effectué par M. Mojtahedi à ce titre aurait consisté à accompagner un ressortissant canadien devant retourner en Iran, qui craignait pour sa sécurité et souhaitait être accompagné d’un observateur pouvant attester de son arrestation en Iran. M. Mojtahedi aurait par la suite effectué un deuxième voyage dans ce pays pour s’enquérir de la nature du procès intenté à l’encontre de ce ressortissant canadien. Son troisième voyage aurait eu pour but d’agir en tant qu’observateur d’un procès impliquant trois ressortissants américains. Par contre, M. Mojtahedi n’aurait pas pu assister à ce procès car celui-ci aurait été tenu à huis clos.

[74]  Pour appuyer ses dires, Mme Storm se réfère aux pièces « GG » et « MM » produites au soutien de son affidavit. La pièce « GG » consiste en une photographie de la carte d’identification de M. Mojtahedi en tant que « Special Counsel », ayant été utilisée par celui-ci en Iran en 2003, et arborant la Marque. La pièce « MM » consiste en une copie d’un courriel, daté du 5 avril 2002, envoyé par M. Mojtahedi (Canadian International Counsel) à Mme Storm, faisant notamment référence à des préparatifs : « While the Iran project has been placed on hold, I look forward to receiving the ID and other paper work (releases) since the circumstances may change at any time. Particularly in light of Dr. Yazdi’s expected return to Iran in the coming weeks. […] ». J’estime ces éléments de preuve des plus parcellaires. En ce sens, je ne suis pas prête à considérer que des services juridiques aient été rendus par LWOB au Canada. Tout au plus suis-je prête à considérer cette preuve comme appuyant les dires de Mme Storm à l’effet que des Canadiens comptent parmi les rangs des bénévoles de LWOB et puissent, par l’intermédiaire de LWOB, profiter d’expériences de travail bénévole diverses à l’étranger.

[75]  Concernant le rôle joué par Mme Williams, je retiens de ma revue des affidavits de Mmes Storm et Williams et de leurs contre-interrogatoires respectifs que Mme Williams a agi comme « représentante » de LWOB au Canada à partir d’environ janvier 2002 jusqu’en 2005 ou 2006 [transcription Williams, pp 29-30 et 50]. Il s’agissait essentiellement d’un travail bénévole auquel Mme Williams consacrait une partie de son temps libre [transcription Williams, p 37]. Au souvenir de Mme Williams, LWOB avait mis en place une adresse courriel pour celle-ci (mwilliams@lwob.org), dans les deux à trois mois après janvier 2002 [transcription Williams, pp 18-20].

[76]  Il ressort du contre-interrogatoire de Mme Williams que celle-ci n’est membre d’aucun barreau au Canada, ni ne possède de droit de pratique au Canada [transcription Williams, p 15]. En fait, Mme Williams, qui est née au Canada et y a passé quelques années de sa vie à différents moments de celle-ci, a fait l’essentiel de ses études de droit à l’étranger et a complété son barreau dans les Caraïbes. Du temps où elle était représentante de LWOB au Canada, Mme Williams résidait à Toronto. Elle est retournée vivre dans les Caraïbes en 2006 environ, après avoir partagé une partie de son temps entre le Canada et les Caraïbes [transcription Williams, pp 6-12].

[77]  Aux dires de Mme Williams, celle-ci est devenue la représentante canadienne de LWOB peu de temps après avoir commencé à être bénévole pour LWOB. Mme Williams affirme avoir aussi agi à titre de « Special Counsel for LWOB and the LWOB – UN ECOSOC Representative for Latin America and the Caribbean, a volunteer position with LWOB » [affidavit Williams, paras 2-3].

[78]  Bien que Mme Williams affirme avoir réalisé différentes tâches dans le cadre de ses divers rôles (« various positions ») au sein de LWOB, j’estime que peu d’exemples concrets—et surtout détaillés et/ou appuyés par des pièces corroboratives—ressortent de l’ensemble de son témoignage. À titre d’exemple, bien que je ne remette pas nécessairement en doute les affirmations générales de Mme Williams selon lesquelles elle aurait participé à un ou plusieurs projets en Afrique sous l’ombrelle des Nations Unies (notamment au Liberia au cours des années 2005-2006 environ), j’estime la preuve au dossier insuffisante pour raisonnablement comprendre et corroborer la nature du travail réalisé par Mme Williams, en tant que représentante canadienne de LWOB, dans le cadre de pareils projets, d’autant plus que ceux-ci semblent s’être déroulés en partie à l’époque où Mme Williams aurait aussi agi en tant que représentante UN ECOSOC pour l’Amérique latine et les Caraïbes pour LWOB [transcription Williams, pp 23-25].

[79]  Cela dit, il ressort tout de même du témoignage de Mme Williams, qu’outre sa participation à la journée carrière de l’Université McGill discutée plus haut, elle a rédigé en 2003 un document intitulé « Lawyers Without Borders – Skill Sets Concept Paper » ayant pour but de fournir « a summary of skills that LWOB believes lawyers possess ». Ce document ne portait pas spécifiquement sur les avocats canadiens, mais plutôt sur les aptitudes et connaissances des avocats de manière générale. Ce rapport a été transmis à Mme Storm une fois complété. Ce rapport ne semble toutefois pas avoir fait l’objet d’une distribution ou d’une publication quelconque [affidavit Williams, para 7 et pièce « A » au soutien de celui-ci; transcription Williams, pp 61-63].

[80]  Il ressort également du contre-interrogatoire de Mme Williams que celle-ci n’est pas en mesure de confirmer quand LWOB a débuté ses activités au Canada, contrairement à ce qui est indiqué au paragraphe 8 de son affidavit où elle affirme :

LWOB began operating in Canada in 2001, the organization has been known as “Lawyers without Borders”. We use, and have always used, “Lawyers without Borders” in all areas of our operations, […].

[81]  La date de 2001 lui a été communiquée par Mme Storm, « because when [Ms. Williams] joined, apparently Christina [Storm] was already communicating with other lawyers in Canada » [transcription Williams, pp 67-68]. Je reviendrai plus loin sur ce point.

[82]  J’arrête ici ma discussion de l’affidavit Williams et me limiterai à souligner seulement certaines autres portions de son témoignage, lorsque pertinentes à mon analyse, comme fait plus haut dans ma discussion entourant la participation de LWOB à la journée carrière de l’Université McGill.

[83]  Aussi, revenant sur le témoignage de Mme Storm, il ressort que la façon de fonctionner de LWOB a évolué depuis 2001 et l’évolution de l’Internet, comme expliqué en ces termes par Mme Storm lors de son contre-interrogatoire :

[…] there’s been a change in how we do it, but not a change in what we do.

[…]

In the early days we sought to go out there and tell the world about what we could help them do. As we have evolved our reputation and our presence, and the evolution of the internet and social media, has given us the opportunity to put ourselves out there, and it is more common now that people go searching for these opportunities, find us and reach out to us, and then we respond to them; than in the early days when the internet was not so popular and it was not a key vehicle for communicating. It wasn’t the way you were going to getting your message out if you relied solely on the internet, so we had to be more physically proactive in the early days that we need to be now.

[Transcription Storm, p 22 et au même effet p 145]

[84]  Au sujet du site Internet de LWOB, Mme Storm explique au paragraphe 43 de son affidavit, que le site employant l’URL www.lawyerswithoutborders.org a été créé en 2001 environ. Avant cela, LWOB maintenait, depuis la mise sur pied de LWOB le 30 janvier 2000, un site Internet à l’adresse https://lawyerswithoutborders.gobizgo.com. Mme Storm joint à son affidavit, comme pièce « K », une copie d’un imprimé de ce dernier, daté du 27 février 2001, arborant la Marque de façon proéminente. À la revue de cette pièce, je note que les activités et services de LWOB en liaison avec la Marque y sont décrits de la manière suivante :

Welcome to Lawyers Without Borders website. As we bring our first year to a close we are pleased to boast a membership of over 100 lawyers from around the world including USA, Canada, Australia, UK, […].

 

Our efforts to connect non-profit organizations with a pool of experienced attorneys and enthusiastic interns are being realized daily now. We will continue to create a clearinghouse of opportunities for practicing attorneys worldwide to share their expertise and experience […]

[…]

At this site, we intend to provide a forum where you will discover educational opportunities (for younger attorneys and law students) and employment (paid and volunteer) opportunities, long and short term.

Please explore the site thoroughtly [sic]. Announcements and links are changed and updated regularly. For special announcements, vacancies and other news, subscribing to our List as a member is advised. There is no fee for joining LWOB at this time. Entering our Database does however involve payment of a nominal fee of $35.

LWOB is financed largely through the generosity of several attorneys who believe firmly in its mission. You are encouraged to click on the eCharity button to contribute to LWOB. In this regard, LWOB sincerely thanks the International Section of the Connecticut Bar Association for its financial support.

[Mes soulignements]

[85]  Ce qui m’amène à parler du financement de LWOB. Il ressort de la preuve que LWOB n’a jamais obtenu de financement ou de subvention officielle (« funding »/« formal grant ») du Canada, malgré de vagues et vaines tentatives de Mme Williams [transcription Storm, pp 129-132; transcription Williams, pp 40 et 46]. Par contre, LWOB a reçu certains paiements ou dons en provenance du Canada, notamment :

  • Un chèque reçu d’un individu en paiement des frais d’inscription de 35 $US exigés, selon ma compréhension, à l’époque, pour être inscrit dans la base de données de bénévoles de LWOB. Je note toutefois que la copie du chèque en question n’est pas incluse. Ce chèque est seulement référencé dans une lettre, datée du 10 janvier 2001, reçue d’un individu de Toronto (dont l’identité a été caviardée aux fins de confidentialité), ayant pour but de transmettre un curriculum vitae et le chèque en question [affidavit Storm, para 55, pièce « BB »].

  • Des chèques reçus d’individus en paiement des frais d’inscription (« subscriber fees ») exigés un temps par LWOB pour accéder à son « tableau d’offres » (« opportunities board ») (discuté plus bas) [affidavit Storm, para 54; transcription Storm, pp 179-180; pièce « Z », incluant des copies de chèques reçus d’individus (dont l’identité a été caviardée aux fins de confidentialité), un de Calgary, l’autre de Vancouver, au montant de 50 $US chacun, datés respectivement des 29 août 2001 et 30 novembre 2002].

  • Un chèque de l’Université McGill, daté du 21 octobre 2003, au montant de 250 $, en paiement de leur abonnement annuel afin d’avoir accès audit « tableau d’offres » de LWOB [affidavit Storm, para 22; transcription Storm, pp 178-180; pièce « Z »].

  • Un genre de commandite ou don reçu d’une succursale de Toronto de la Banque de Montréal (BMO), laquelle aurait fourni certains objets à être offerts en cadeau lors d’un tournoi de golf (activité bénéfice) organisé par LWOB aux États-Unis, du temps où Mme Williams agissait comme représentante canadienne de LWOB [transcription Williams, pp 40-41].

[86]  Revenant sur les paiements faits en lien avec le « tableau d’offres », Mme Storm explique que depuis 2002, LWOB propose un « tableau d’offres » (« opportunities board ») en liaison avec la Marque, à l’intention des personnes à la recherche d’un emploi comme stagiaires, étudiants ou avocats, au Canada ou ailleurs, souhaitant participer à des projets internationaux de primauté du droit. Dans les premiers temps, ce tableau d’offres était disponible seulement pour les membres ayant payé un frais d’inscription, ou qui faisaient partie d’institutions ayant payé un frais d’inscription. Aux dires de Mme Storm, pendant plusieurs années (« for several years »), au moins une université (McGill) a payé les frais donnant accès audit tableau d’offres. Mme Storm ajoute que LWOB a créé, en 2004, un tableau d’offres d’emploi (« job board ») accessible au grand public [affidavit Storm, paras 22-23]. Au soutien de ses affirmations, Mme Storm se réfère, en sus de la pièce « Z » mentionnée plus haut, aux pièces « T » et « FF » jointes à son affidavit. La pièce « T » consiste en une copie d’un échange de courriels qu’elle a eu avec Mme St-Laurent, de l’Université McGill, dans lequel Mme Storm annonçait à Mme St-Laurent qu’à compter de mars 2004, le tableau d’offres de LWOB serait converti en un tableau d’offres gratuit, accessible au grand public. La pièce « FF » consiste en une copie d’une facture pour services rendus (« for services rendered »), arborant la Marque et adressée à l’Université McGill par LWOB en date du 10 septembre 2003, au montant de 250 $ et portant la description suivante : « For :  Job Vacancy and Intern Postings List Serv ». Je note que lorsque contre-interrogée à ce sujet, Mme Storm a indiqué que l’Université McGill aurait payé les frais d’inscription pour le tableau d’offres « payant » pendant environ 2-3 ans. Par contre, en réponse à l’engagement no 7 demandant de fournir la preuve des autres paiements faits par cette université, LWOB a répondu que : « No additional documents could be located » [transcription Storm, pp 177-181]. Je note également que bien que Mme Storm affirme que ce « tableau d’offres » (converti en 2004 en un tableau d’offres gratuit (« job board ») accessible au grand public) soit, depuis 2002, offert en liaison avec la Marque, je ne relève dans la preuve aucun exemple faisant voir comment la Marque a été effectivement employée dans l’annonce ou l’exécution de pareil service avant la facture de 2003. En effet, bien que je n’aie aucune raison de croire que pareil tableau d’offres n’ait pas été offert à l’époque en liaison avec la Marque comme affirmé par Mme Storm, le fait demeure que l’imprimé du site Internet de LWOB de la pièce K serait antérieur à la mise sur pied de pareil service selon ce qu’il ressort de la page 101 du contre-interrogatoire de Mme Storm.

[87]  Au sujet de leur tableau d’offres accessible au grand public, Mme Storm affirme au paragraphe 23 de son affidavit que des canadiens y ont accédé et s’en sont servi :

Google analytics confirm substantial access to the job board by individuals from throughout Canada. Since 2005, our job board has received 21 specific applications from Canadians to positions offered by LWOB. Since 2004, our job board has received 119 resumes from Canadians who posted their resumes for registered companies with our job board to review and pick from when conducting an applicant search.

[88]  Mme Storm affirme que LWOB a employé, ou accueilli comme bénévoles, des stagiaires et des avocats à temps plein venant du Canada et/ou d’universités canadiennes. Elle donne deux exemples d’individus qui auraient œuvré aux bureaux de LWOB des États-Unis et du Royaume-Uni au cours des années 2008-2010, et deux exemples concernant un projet en Amérique latine (« major Latin America (LAC) project ») dans lequel des individus, basés au Canada, auraient travaillé en 2008-2009 [affidavit Storm, para 24; transcription, pp 189-199]. Faute de plus d’information au sujet de ces exemples et de pièces corroboratives probantes, je ne m’attarderai pas sur ceux-ci.

[89]  Mme Storm affirme par ailleurs que les avocats canadiens qui agissent comme représentants et bénévoles de LWOB participent à toutes sortes d’activités de cette dernière au Canada aussi bien qu’à l’étranger. Aux dires de Mme Storm, LWOB compte, depuis 2006, plus de 200 bénévoles inscrits comme résidant au Canada, ce qui représenterait une proportion importante de leur réseau mondial [affidavit Storm, para 35; transcription Storm, pp 232-237, et 272; et réponse à l’engagement no 13—ce chiffre correspond au nombre de personnes inscrites depuis 2006, i.e. leur statut, disponibilité et/ou intérêt peut avoir changé depuis le moment de leur inscription. Tel qu’expliqué par Mme Storm aux pages 232 et 272 de son contre-interrogatoire « the goal of [LWOB] is to match the right person for the right job. […] And sometimes a lawyer enters a database and doesn’t end up getting placed for five, six, seven years. »]. Elle explique que LWOB reste en contact avec ses bénévoles au moyen d’une base de données en ligne que LWOB a créée il y a plusieurs années (pour remplacer sa liste de diffusion listserv, qui comprenait aussi, aux dires de Mme Storm, des personnes physiques et des organisations résidant au Canada) et que LWOB a tenue à jour jusqu’à maintenant. Elle affirme de plus que depuis au moins aussi tôt que 2001 LWOB s’en sert pour promouvoir ses activités et services sous la Marque :

[LWOB has] periodically sent e-mails to people and/or organizations in our listserv and/or database, promoting legal services and providing news regarding LWOB projects and activities around the world under the trade-mark LAWYERS WITHOUT BORDERS and continue to do so to this day.

[90]  Mme Storm ajoute aux paragraphes 36 et 37 (corrigé) de son affidavit que LWOB a travaillé avec des avocats canadiens sur des projets d’évaluation et d’observation à travers le monde :

On numerous occasions, LWOB has worked, in conjunction with Canadian lawyers, to assess and observe the legal and justice systems in developing nations, including Namibia, West Bank, Iran and Liberia. […]

 

In the last few years alone, we have briefed and dispatched a number of Canadians who are lawyers into rule of law assessments, trial observations and other projects around the world. Canadian lawyers have been sent to Kenya, Uganda and Namibia […]

Et elle cite comme exemples:

  • Le cas de Stephanie Case : Mme Storm explique qu’elle est l’une des bénévoles de LWOB, qui, sous la direction et la supervision de LWOB, a travaillé pendant ses études de droit et ensuite comme avocate, dans divers pays en développement, sur toutes sortes de programmes de primauté du droit, concernant notamment les questions internationales de droits de la personne, incluant :

  • o In 2007-2008, Ms. Case worked with us during the CUD Trial Observation in Ethiopia, networking with the local legal community and conducting legal research […]

  • o In 2006-2007, Ms. Case was placed at an NGO in Rwanda then called Sisters with Rwanda for whom LWOB Inc acted as a fiscal sponsor and provided legal and other support services to this NGO. […] Marked as Exhibit “H” is a report by Ms. Case detailing her observations from hearings held in the Supreme Court, Temple of Justice.

  • o In 2007, Ms. Case travelled to Liberia to conduct a post-program evaluation of one of our projects in that area […]. She and the other volunteer were also involved in observing trials and reaching out to the community through various promotional activities. […]

  • o Most recently, Ms. Case traveled to the West Bank to conduct due diligence and investigate partner prospects in connection with […].

Il ressort du contre-interrogatoire de Mme Storm que dans chacun de ces projets, Mme Case se rapportait à Mme Storm et que LWOB est celle qui « a envoyé et payé pour envoyer » Mme Case, à tout le moins dans le cas de la mission d’observation en Éthiopie. La dernière mission de Mme Case avec LWOB remonterait à 2013. Mme Case résiderait aujourd’hui à Gaza où elle travaillerait pour les Nations Unies [transcription Storm, pp 237-240].

  • Le cas de Michael Wicklum : Mme Storm explique qu’il s’agit d’un « Canadian criminal lawyer, [who] volunteered to investigate the rural legal needs in Uganda in connection with a UN request of LWOB to suggest mechanisms for residents in Uganda’s rural areas. »Elle joint à son affidavit, comme pièce “I”, un rapport d’évaluation préparé par M. Wicklum, daté du 29 décembre 2008. Aux dires de Mme Storm, M. Wicklum « also served as an observer of the “Caprivi Treason Trial” in Windhoek, Namibia for LWOB ». Par contre, aucune autre information à ce sujet n’est donnée.

  • Le cas de Jenny Mboutsiadis « of Toronto, […] served as an observer in Namibia. »Par contre, aucune autre information à ce sujet n’est donnée.

[91]  Mme Storm ajoute également qu’en 2008, LWOB « dispatched a Canadian lawyer and law graduate Adam Samarillo, to manage our UK operations in London » [affidavit Storm, para 38].

[92]  Mme Storm affirme par ailleurs qu’à l’été 2010, elle s’est entretenue avec un juge canadien « about an effort to create a training program, focused on highlighting the similarities and differences between common law trials and civil law trials, in French for launch in francophone Africa ». Par contre, lorsque conte-interrogée à ce sujet, Mme Storm a indiqué qu’elle ne se rappelait pas, sur le coup, du nom du juge en question, et qu’aucune suite n’avait été donnée à leur discussions exploratoires [affidavit Storm, para 18; transcription Storm, pp 157-159].

[93]  Aux dires de Mme Storm, LWOB « also connects Canadian NGOs in need of legal services in Canada with student groups and/or lawyers in Canada » [affidavit Storm, para 19]. Bien que Mme Storm ajoute que LWOB « manages, oversees and controls the quality of the legal services provided by the individuals and any of its representatives in varying degrees depending upon the entity involved », je note que les seuls exemples concrets concernant des ONG canadiennes fournis par Mme Storm ne portent que sur l’aspect « linkage » (couplage) entre pareilles ONG et des étudiants/avocats au Canada, comme décrit ci-après :

  • ONG de Winnipeg RESPECT (Refugee Education Sponsorship Program: Enhancing Communities Together). Il ressort du témoignage de Mme Storm que LWOB a été contactée par cette ONG canadienne, laquelle recherchait les services de représentation bénévole d’un avocat canadien. RESPECT a complété le formulaire d’accueil (« intake form ») de LWOB, disponible sur le site Internet de LWOB, et cette dernière a par la suite annoncé la demande d’aide bénévole de RESPECT aux membres listserv de LWOB le 8 janvier 2004, comme il appert d’une copie de pareille annonce, arborant la Marque, produite comme pièce « DD » au soutien de l’affidavit Storm. Aux dires de Mme Storm, LWOB aurait déployé des efforts considérables pour trouver un avocat bénévole canadien à cette ONG, ce qui ne s’est finalement pas concrétisé compte tenu du fait que LWOB avait par la suite été avisée par RESPECT que celle-ci avait trouvé un autre conseiller [transcription Storm, pp 162-165].

  • ONG d’Ottawa MBAs Without Borders. Il ressort du témoignage de Mme Storm que LWOB a été contactée par cette ONG canadienne, laquelle recherchait les services de représentation bénévole d’un avocat canadien. MBAs Without Borders a complété le formulaire d’accueil (« intake form ») de LWOB, arborant la Marque, disponible sur le site Internet de LWOB, comme il appert d’une copie de pareil formulaire complété en date du 8 septembre 2006, produit comme pièce « V » au soutien de l’affidavit Storm. Bien que Mme Storm affirme au paragraphe 21 de son affidavit que LWOB aurait fourni à cette ONG « pro bono lawyers providing legal services under the quality control of LWOB », il ressort du contre-interrogatoire de Mme Storm que les seuls services fournis par LWOB auraient plutôt consisté en le « linkage » (couplage) entre pareille ONG et un avocat canadien [transcription Storm, p 172: « That was one of our successful matches »]. En fait, LWOB ne s’implique pas dans la relation qui s’établit par la suite entre l’ONG et l’avocat/le cabinet d’avocats ayant été mis en rapport [transcription Storm, pp 170-174].

[94]  Mme Storm joint également à son affidavit comme « recent exemples of our efforts to connect NGOs with Canadian volunteers », un échange de courriels (en partie caviardés), daté du 18 octobre 2014 (compris dans la pièce « HH »), entre LWOB et une personne dont l’identité a été caviardée, ayant contacté LWOB en ces termes : « We need assistance in submitting the non-profit paperwork necessary to establish ourselves as a functioning, registered non-profit Canadian organization. This –  ». Le reste du message est coupé (caviardé). Dans sa réponse, Mme Storm écrit : « We can send you an intake form to fill out – and “shop” your request to various Canadian firms in an effort to recruit one to take you on as a pro bono client. The “intake form” will be forwarded to you on Monday. […]. »

[95]  Au sujet plus précisément du « linkage » (couplage) effectué par LWOB en ce qui a trait aux ONG, il ressort du témoignage de Mme Storm, qu’il y eut une courte période de temps au cours de laquelle LWOB a tenté d’automatiser pareil « linkage », comme il appert de la copie du formulaire d’accueil de l’année 2010 retrouvé sur le site Internet de LWOB, produite comme pièce « Y » au soutien de l’affidavit Storm et comportant le message suivant :

If we feel that simple queries cannot be managed between your NGO and our offices, we will not even begin the process of attempting to profile your request to the law firms.

[…]

Our new policy will simply take your information and post it to our website. It will remain there until you advise us in writing to please remove it. We will no longer undertake to recruit lawyers to assist you, but invite lawyers viewing our site to make direct contact with you, so be sure your “contact” person be someone knowledgeable about your legal need.

[96]  Toutefois, LWOB n’aurait pas poursuivi avec cette automatisation, n’étant pas satisfaite du résultat (tant les ONG que les bénévoles n’appréciaient pas cette nouvelle façon de faire), et LWOB serait revenue « to a more – more engagement on our part than an automatic linking partnering system permits » [transcription Storm, pp 251-252].

[97]  Au sujet des activités promotionnelles réalisées par LWOB, outre les bulletins « papier » et électroniques des pièces « B » et « J » discutés plus haut, Mme Storm mentionne au paragraphe 32 de son affidavit, qu’elle aurait été, entre 2006-2008, « on at least one occasion, […] a guest speaker for a live 30 minute radio talk-show in Canada […] ». Toutefois, lorsque contre-interrogée à ce sujet, Mme Storm n’a pu fournir le nom de la chaîne, la date précise, etc., faute de mémoire [transcription Storm, pp 246-249].

[98]  Mme Storm fournit par ailleurs aux paragraphes 43 à 52 de son affidavit, différentes données concernant le site Internet de LWOB www.lawyerswithoutborders.org et la présence de LWOB dans les médias sociaux, incluant :

  • Pièce « U » : un imprimé faisant état du nombre de visites (« hits ») effectuées sur le site Internet de LWOB durant le mois de mai 2002, selon lequel ce dernier aurait reçu plus de 200 visites en provenance du Canada.

  • Pièce « L » : un imprimé concernant le nombre de visites effectuées sur le site Internet de LWOB entre le 26 juin 2010 et le 26 juillet 2010, selon lequel ce dernier aurait reçu plus de 300 visites en provenance de 70 villes canadiennes.

  • Pièce « M » : un imprimé concernant le nombre de visites effectuées sur le site Internet de LWOB entre le 8 août 2009 et le 8 août 2010, selon lequel ce dernier aurait reçu 1396 visites en provenance de 186 villes canadiennes. Bien que Mme Storm ajoute qu’entre le 22 septembre 2014 et le 21 octobre 2014, LWOB a reçu 337 visites en provenance du Canada—au troisième rang mondial—aucune pièce justificative n’est fournie.

  • Pièce « NN » : un courriel résumant des statistiques concernant le nombre de visites effectuées sur le site Internet de LWOB en janvier 2004 en provenance de 7 provinces canadiennes.

  • Pièce « N » : un imprimé concernant des statistiques de visites par page, entre (aux dires de Mme Storm) les années 2009-2010. Bien que Mme Storm explique que « along with the home page, our job board and newsletter pages are amongst the most frequently visited pages », aucune donnée se rattachant spécifiquement au Canada n’y figure.

  • Pièce « JJ » : un relevé du nombre de fans Facebook, faisant état de 177 fans en provenance du Canada. Aux dires de Mme Storm, ce nombre est pour le dernier trimestre fourni par Facebook au moment de la signature de son affidavit. Mme Storm fournit également d’autres informations concernant Facebook pour le mois d’octobre 2014, générés à partir du site www.simplymeasured.com, pour les rubriques « People Talking About This by Country » et « Reach by Country », faisant état respectivement de 2 et 31 personnes en provenance du Canada. Elle fournit aussi un imprimé de la page Facebook de LWOB, arborant la Marque, en date du 21 octobre 2014 à la pièce « II ».

  • Pièce « AA » : un imprimé de la page Twitter de LWOB, arborant la Marque et faisant état de 1080 abonnés (« followers ») en date du 22 octobre 2014. De ce nombre, 5,83 % seraient en provenance du Canada, i.e. selon mon calcul, 63 canadiens.

[99]  En complément de l’ensemble de son témoignage concernant les activités de LWOB au Canada, Mme Storm joint également à son affidavit copie de diverses correspondances ou échanges de courriels, dont plusieurs datés des années 2001 et 2002. À titre d’exemples (non exhaustifs) :

  • Sont également incluses en liasse à la pièce « BB » mentionnée plus haut :

    • o Une copie d’une lettre, datée du 11 février 2001, adressée par Mme Storm à une personne résidant en Ontario (dont l’identité a été caviardée aux fins de confidentialité), qui aurait travaillé bénévolement pour LWOB dans l’élaboration de matériel promotionnel et/ou du bulletin d’information de LWOB d’avril 2002. Toutefois, le travail réalisé par cette bénévole n’a pu être précisé lors du contre-interrogatoire de Mme Storm, faute de mémoire [transcription Storm, pp 256-259].

    • o Une copie d’une lettre, datée du 23 octobre 2002, adressée par Mme Storm à un avocat de Vancouver, lui faisant parvenir « some materials regarding Lawyers Without Borders » et lui demandant s’il pouvait leur envoyer une copie « of the Bar Article about LWOB? ». Dans la même lettre, Mme Storm ajoute : « Please consider joining our Yahoo Group as well as our listserv to stay informed about developments. (See the “Join” page at our website). »

  • Pièce « CC » : copie d’une lettre datée du 1er novembre 2001, adressée par Mme Storm à un professeur de l’University of Connecticut, School of Law, dans laquelle Mme Storm fait référence au modèle développé avec l’Université d’Ottawa.

·  Pièce « LL » : en liasse, copie de divers courriels reçus ou échangés avec des bénévoles potentiels du Canada, s’enquérant, pour la plupart, de l’existence ou non d’un chapitre canadien de LWOB et/ou désirant devenir membres de LWOB, dont notamment :

o  Un courriel, daté du 15 juin 2002, reçu d’un étudiant de l’Université McGill (dont l’identité a été caviardée aux fins de confidentialité) désirant devenir membre de LWOB.

o  Un courriel, daté du 2 mai 2002, reçu d’un avocat canadien faisant parvenir à LWOB son curriculum vitae.

o  Un courriel, daté du 5 juillet 2002, reçu d’une personne (dont l’identité a été caviardée aux fins de confidentialité) représentant être « one of the Student Co-ordinators for the [PBSC] at the University of Toronto Faculty of Law » faisant notamment référence au travail effectué par PBSC de l’Université d’Ottawa avec LWOB.

o  Un courriel, daté du 12 août 2002, reçu d’un avocat de la Colombie-Britannique (dont l’identité a été caviardée aux fins de confidentialité) désirant devenir membre de LWOB et faisant référence à la réception « of my monthly edition of BarTalk in which there is an article about LWOB ».

·  Pièce « PP » : un courriel, daté du 2 avril 2003, envoyé par LWOB aux membres listserv inscrits à son service « LWOB Subscriber Internships, Scholarships, and Fellowships Posting Service ». Mme Storm ajoute à ce sujet que « [a] number of Canadian [sic] were on LWOB’s listserv at that time. » [Voir aussi transcription Storm, pp 269-270].

·  Pièce « QQ » : des copies de courriels automatiques, datés respectivement des 11 juin 2002, 18 juillet 2002, et 19 juillet 2002, attestant de l’inscription de trois nouveaux abonnés (« New subscriber ») (dont l’identité a été caviardée pour fins de confidentialité) en provenance du Canada (« This is your automated subscriber report »).

[100]  Dans l’avant-dernière section de son affidavit, Mme Storm fait état de cas où LWOB a eu connaissance d’articles de revues, de journaux ou d’autres publications où l’on a fait référence à « Avocats sans frontières » comme « lawyers without borders ». Il ressort du contre-interrogatoire de Mme Storm que certains de ces cas se rapportaient non pas à ASFQ, mais plutôt à d’autres entités du mouvement international Avocats sans frontières, dont plus particulièrement l’organisation belge, et ne concernaient pas nécessairement le Canada. Quoiqu’il en soit, Mme Storm joint à son affidavit comme pièces « O », « P », « Q » et « S », copie des lettres ou courriels envoyés par LWOB aux publications canadiennes ou étrangères concernées au cours des années 2002, 2004, 2008 et 2009 afin de les informer d’une part, de l’existence de LWOB et de ses droits allégués dans la Marque, et d’autre part, du fait qu’ASFQ ou autre entité référencée comme « lawyers without borders » selon le cas, n’avait aucun lien avec LWOB. Aucun suivi n’a par la suite été effectué par LWOB. Également, LWOB n’aurait entrepris aucune démarche en vue d’aviser ASFQ de ses droits dans la Marque autour des années 2002-2004, puisque selon le souvenir de Mme Storm, ASFQ n’était pas joignable, ni n’avait de site Internet à l’époque [transcription Storm, pp 67-86].

[101]  Enfin, Mme Storm conclut son affidavit en revenant sur la finalité du travail de LWOB au Canada, faisant notamment valoir aux paragraphes 72 et 73 de son affidavit que :

LWOB’s work in Canada is to encourage the growth of pro bono legal services, and to raise awareness amongst NGOs, and residents in Canada of the potential and opportunities for pro bono legal services in Canada […] and find opportunities for Canadian lawyers to become employed or volunteer in internationally oriented rule of law programming […]

[…] our Canadian oriented work is not segregated from our work throughout UK, Europe and North America. LWOB is a globally oriented group of lawyers and Canada has always been a big part of that global orientation […]

[102]  En terminant, je souhaite revenir sur certains aspects de la preuve de LWOB ayant été discutés en contre-interrogatoire.

[103]  Tout d’abord, concernant le fait que plusieurs des pièces produites par Mme Storm au soutien de son affidavit comportent des informations ayant été caviardées, j’estime que cela ne rend pas nécessairement ces pièces inadmissibles ou inutilisables. En effet, Mme Storm a expliqué lors de son contre-interrogatoire (et/ou dans ses réponses aux engagements), la raison pour laquelle certaines de ces informations avaient été caviardées, comme par exemple, pour assurer la confidentialité de l’identité des personnes concernées, lesquelles pouvaient être à la recherche d’un autre emploi, etc. Aussi, dans la mesure où les informations ainsi caviardées ne nuisent pas, par exemple, à la compréhension du document produit comme pièce et/ou à la détermination de sa provenance géographique, j’estime que pareilles expurgations n’affectent pas nécessairement la valeur probante de ces pièces.

[104]  Par ailleurs, concernant le fait que plusieurs des réponses fournies par Mme Storm lors de son contre-interrogatoire se sont avérées vagues ou incertaines, j’estime que cela ne mine pas nécessairement la crédibilité de l’ensemble de son témoignage. En effet, je note qu’à certains endroits au cours de son contre-interrogatoire, Mme Storm a répondu au mieux de son souvenir du moment, tout en offrant d’effectuer des vérifications ultérieures dans les dossiers de LWOB afin de répondre avec précision aux questions d’ASFQ, ce qui a été refusé par ASFQ. Comme expliqué par Mme Storm, plusieurs des questions posées remontaient à des évènements survenus il y a plus d’une douzaine d’années. Aussi, dans la mesure où les réponses fournies par Mme Storm sont corroborées par d’autres éléments de preuve probants et suffisamment précis, j’estime que certaines des imprécisions ou incertitudes exprimées par Mme Storm lors de son contre-interrogatoire ne sont pas nécessairement problématiques.

[105]  À cet égard, gardant à l’esprit le Jugement en invalidation dans lequel la Cour fédérale fut d’avis qu’elle ne pouvait « accorder que peu de poids » à l’affidavit de Mme Storm dans cette affaire en raison notamment de « déclarations entachées de contradictions importantes », je note qu’à certains endroits de son contre-interrogatoire dans le présent dossier, Mme Storm a fait allusion à certains de ses propos ayant été déformés dans le cadre de la procédure ayant mené au Jugement en invalidation, comme ici :

Q. 441 Okay. I have a proposition to make to your counsel. In order to save time on some of the statements that may or may not be inconsistent, why don’t we just mark the previous cross and I can skip over all those questions.

A. No, I’d rather go through the inconsistencies. I really felt in the first proceeding that my words were often twisted, and I’d like to have the opportunity to clarify if I can on the record.

[106]  Ce qui m’amène à discuter des pièces « CS-A », « CS-B », et « CS-C » produites lors du contre-interrogatoire de Mme Storm.

[107]  Il ressort de celui-ci que le but apparemment recherché par ASFQ, par l’introduction de ces trois affidavits, était de remettre en cause ou contredire les affirmations de Mme Storm concernant certaines dates de premier emploi de la Marque au Canada par LWOB, alléguées dans l’affidavit de Mme Storm produit dans le présent dossier.

[108]  Concernant plus particulièrement l’affidavit McKenna de la pièce « CS-C », Mme McKenna affirme dans celui-ci qu’en septembre 2004 ou à peu près, Yasmin Shaker et elle-même sont entrées en discussion avec Mme Storm afin d’explorer la possibilité de créer une section canadienne de LWOB. Après quelques discussions exploratoires, Mmes Shaker et McKenna ont décidé de ne pas poursuivre leurs discussions avec LWOB et de plutôt fonder leur propre organisation. Aux dires de Mme McKenna, la philosophie de LWOB ne correspondait pas à celle envisagée par Mme Shaker et elle-même. Mme McKenna ajoute n’avoir jamais travaillé, comme bénévole ou autrement, pour LWOB et que le modèle d’affaires de CLA n’est pas modelé sur celui de LWOB. Dans le Jugement en invalidation, la Cour fédérale avait été d’avis que l’affidavit McKenna contestait « certains passages » de l’affidavit de Mme Storm dans cette affaire.

[109]  Lorsque contre-interrogée au sujet de l’affidavit McKenna dans le présent dossier, Mme Storm a indiqué être d’accord avec les affirmations de Mme McKenna concernant leurs discussions passées, tout en prenant soin de corriger que c’était initialement Mme Shaker qui était entrée en discussion avec LWOB et qui avait par la suite impliqué Mme McKenna dans leurs discussions [transcription Storm, pp 208-215]. Au sujet de la question de savoir si le modèle d’affaires adopté par CLA fut inspiré de celui de LWOB, Mme Storm a notamment répondu que :

[Réponse à la Q. 732] You know, the issue isn’t invented, we worked with Yasmeen [sic] Shaker and she became aware of our organization and what we did through our work with students. She and her friend decided that they wanted to create an organization that was exclusively used and had access to tremendous resources in Canada, financial resources, which she wanted to take advantage of, doing student-oriented focused program. Were we the first people to come up with doing student-oriented focused programs, I’m sure we weren’t. Did they get their inspiration from LWOB, I’d like to think that they did. I don’t think it’s relevant.

The point is we were going to embark on doing a chapter of LWOB with them, but it was clear that their focus was going to be students and our focus was broader, more diverse, we mutually agreed that what they did was admirable, what they were going to do was admirable, I wished them the best of luck, and we parted our ways. We’re doing two different things and hopefully we’re both doing them well.

[110]  Considérant le témoignage de Mme Storm dans son ensemble, je ne vois pas en quoi l’affidavit McKenna, produit dans le cadre de la procédure ayant mené au Jugement en invalidation, contredit ou affaiblit la preuve produite par LWOB dans le présent dossier. À cet égard, comme il ressortira de mon analyse plus bas, le simple fait que LWOB n’a jamais eu de section canadienne n’est pas suffisant en soi pour remettre en cause ou contredire nécessairement certaines des affirmations de Mme Storm concernant l’emploi de la Marque au Canada fait par LWOB.

[111]  Concernant les pièces « CS-A » et « CS-B », ASFQ a discuté plus particulièrement de certains paragraphes des affidavits antérieurs de Mme Storm concernant le moment à partir duquel Mme Williams a agi comme représentante canadienne de LWOB. Dans son affidavit produit au soutien de la procédure ayant mené à la Décision d’avis 45 (pièce « CS-B »), Mme Storm a affirmé au paragraphe 8 que « Since at least 2003 LWOB has had a permanent representative in Toronto, Marion Williams. ». Dans son affidavit produit au soutien de la procédure ayant mené au Jugement en invalidation (pièce « CS-A »), Mme Storm a affirmé au paragraphe 6 : « Marion Williams is a Canadian lawyer, and has been operating under the directions of LWOB since its inception, and was LWOB’s representative in Canada from about 2001 to the present. » Dans le présent dossier, Mme Storm a affirmé au paragraphe 12 de son affidavit : « Marion Williams is a Canadian lawyer, and has been operating under the directions of LWOB since its inception, and was LWOB’s representative in Canada from about January 2002 to the present. » En réponse à une question posée par ASFQ relativement à ces différentes dates, Mme Storm a commenté en ces termes:

[Réponse à la Q. 393] Yeah, I understand the question. The question is : Was it 2001, was it 2002? The answer is that Marion apparently her records reflect her involvement initiated in January 2002. The records -- I believe we went with actually the date Marion confirmed her involvement, but I was – able to find documents in the last week or two – not documents, online portals that reflected that her involvement with us may have actually predated even what she and I had originally thought were her first communications with us and worked with us.

Q. 394: Okay. So just going back to my questions, in 2010 you said she started in 2001. I’m showing you another affidavit [pièce « CS-B »] […] and I see there at paragraph 8 that you refer to Ms. Williams’ beginning since at least 2003. Do you see that?

A. Yes, this is an argument you made at the last hearing to the Court.

Q. 395: Yes, and I --  

A. And the thing I wanted to mention to you, which we’re not allowed to do in Canadian Courts than you can do in American courts, is that that says « at least ».

Q. 397: Yes.

A. And that is true, that at least as of 2003, and I probably should amend my affidavit here to say « at least 2002 », because our records evidence the fact that Marion was involved with us probably as early as 2001.

Q. 398: Okay.

A. And that’s the truth.

[112]  Comme il ressort de cet extrait et de certains autres passages du contre-interrogatoire de Mme Storm ainsi que du témoignage de Mme Williams dans le présent dossier, il est permis de comprendre que les premières interactions entre LWOB et Mme Williams ont débuté au cours de l’année 2001, i.e. avant que celle-ci ne commence à travailler comme « représentante » de LWOB au Canada au début de l’année 2002. Quoiqu’il en soit, j’ai déjà indiqué que les seuls éléments de preuve que j’étais prête à retenir, essentiellement du témoignage de Mme Williams, consistaient en sa participation à la journée carrière de l’Université McGill et sa préparation du « Skill Sets Concept Paper » n’ayant apparemment jamais été distribué. Pour conclure, j’estime que les pièces « CS-A » et « CS-B » n’affaiblissent pas nécessairement la preuve de LWOB dans le présent dossier.

[113]  Ce qui m’amène à revoir la preuve produite par ASFQ en sus des pièces produites lors du contre-interrogatoire de Mme Storm dans le présent dossier.

III.3.3 Revue de la preuve produite par ASFQ

[114]  Considérant, dans un premier temps, les affidavits souscrits par MM. Potter et Headon, ceux-ci affirment essentiellement trois choses : 1) avoir toujours associé l’emploi de la marque de commerce AVOCATS SANS FRONTIÈRES et/ou de la Marque avec ASFQ, et ce, de mémoire, depuis au moins leurs mandats respectifs en tant que président de l’ABC; 2) que tout emploi dont ils ont eu connaissance des marques de commerce AVOCATS SANS FRONTIÈRES et LAWYERS WITHOUT BORDERS au Canada a été en association avec ASFQ; et 3) n’avoir jamais eu connaissance d’un emploi de la Marque au Canada par LWOB. Je conviens avec LWOB que pareilles affirmations sont insuffisantes en soi pour remettre en cause ou contredire nécessairement certaines des allégations de Mme Storm concernant l’emploi de la Marque au Canada fait par LWOB. Au mieux pour ASFQ, j’estime que pareilles affirmations concernent plutôt la mesure dans laquelle la Marque est devenue connue au Canada ou la réputation acquise par LWOB.

[115]  Considérant maintenant l’affidavit Paradis, celui-ci compte 80 paragraphes et est accompagné des pièces « PP-1 » à « PP-126 », totalisant 10 volumes. À cela s’ajoute le fait que ce volumineux affidavit doit être lu en considérant la transcription du contre-interrogatoire de M. Paradis sur cet affidavit, laquelle transcription compte quelque 178 pages, en plus d’être accompagnée de pièces et réponses aux engagements.

[116]  Je résumerai ici les portions de cet affidavit que j’estime les plus pertinentes aux fins de mon analyse. Cela dit, j’estime que ce résumé nécessite néanmoins un niveau de détail passablement élevé afin d’apprécier le contexte de certaines des affirmations de M. Paradis ayant apparemment pour but de remettre en cause ou contredire certaines des allégations de Mme Storm concernant l’emploi de la Marque au Canada fait par LWOB. J’en profiterai également pour commenter certains aspects de la preuve d’ASFQ concernant l’emploi de la Marque fait par celle-ci en regard notamment de quelques-unes des observations présentées par ASFQ dans le présent dossier.

[117]  M. Paradis affirme au paragraphe 2 de son affidavit, être l’un des membres fondateurs d’ASFQ, en être le secrétaire du conseil d’administration depuis le 25 novembre 2002, et occuper le poste de directeur général de l’organisation depuis le mois d’octobre 2004.

[118]  M. Paradis affirme aux paragraphes 3 et 6 de son affidavit qu’ASFQ dirige au Canada, depuis le mois de mai 2002, une entreprise à but non lucratif (constituée en corporation le 23 octobre 2002) dont la mission est de soutenir la défense des droits des personnes en situation de vulnérabilité dans des pays en développement, fragiles ou en crise, par le renforcement de l’accès à la justice et à la représentation légale. Plus particulièrement, ASFQ œuvre à partir du Canada à la promotion de la justice et à la défense des droits humains à travers le monde, notamment par la gestion de programmes de coopération internationale et l’organisation de missions de coopérant(e)s volontaires à l’étranger; organise des collectes de fonds au Canada en vue du financement de ces missions ainsi que des conférences; organise des campagnes de sensibilisation et diffuse des informations à travers le Canada portant sur différents thèmes reliés aux activités d’ASFQ.

[119]  M. Paradis affirme au paragraphe 7 de son affidavit, qu’ASFQ a employé à son siège de Québec plus de 45 personnes depuis 2012, dont 14 étaient, à la date de son affidavit, employées à temps complet. ASFQ compte également 20 employés dans ses bureaux de Bamako (Mali), Bogota (Colombie), Ciudad de Guatemala (Guatemala) et Port-au-Prince (Haïti) et 21 coopérant(e)s volontaires long terme à temps complet en Colombie, au Pérou, au Guatemala, au Honduras, au Costa Rica, en Haïti, au Mali, en Côte d’Ivoire, en Tunisie et au Maroc, en plus d’une équipe de 600 bénévoles provenant de plusieurs provinces canadiennes.

[120]  M. Paradis affirme au paragraphe 8 de son affidavit, que dans les cinq dernières années, le budget annuel moyen d’ASFQ a dépassé les 2 millions de dollars canadiens. À cet égard, il ressort de l’ensemble de son témoignage, dont notamment des paragraphes 9 à 15 de son affidavit, qu’ASFQ peut compter sur de nombreux contributeurs et bailleurs de fonds canadiens, incluant des organismes gouvernementaux, des sociétés, d’autres organismes sans but lucratif, et des particuliers. Sans reprendre la liste détaillée de ceux-ci fournie par M. Paradis, je me contenterai de mentionner ici, à titre d’exemples, le ministère de la Justice du Québec, plusieurs barreaux de section du Québec, Affaires mondiales Canada, etc. Également, la présidente d’honneur d’ASFQ est l’honorable Claire L’Heureux-Dubé, juge retraitée de la Cour suprême du Canada. Cela dit, il n’en a pas toujours été ainsi, comme expliqué en ces termes à la page 1 du Rapport d’activités d’ASFQ du 1er janvier 2008 au 30 juin 2009 [pièce « PP-4 »] :

Depuis la dernière assemblée des membres tenue en juin 2008, [ASFQ] a tellement progressé qu’on peut pratiquement parler d’une nouvelle ONG.

Sur le plan du financement, [ASFQ] s’est extirpé de la situation précaire dans laquelle l’association était perpétuellement plongée depuis sa fondation et qui limitait sa capacité d’agir. [ASFQ] peut maintenant envisager avec une modeste marge de manœuvre le développement de ses activités et de son organisation comme l’avait voulu le conseil d’administration en adoptant le Plan stratégique 2005-08.

[…]

Bien que la situation financière d’[ASFQ] ne soit pas encore sécurisée, loin s’en faut, les recettes des derniers évènements de financement et les nouvelles contributions obtenues lui ont permis de faire un pas de géant en ouvrant ses bureaux à Québec et en embauchant ses deuxième et troisième employés à temps plein au début de 2009 […].

[121]  Il convient de noter ici qu’avant l’ouverture du bureau en question en 2008, M. Paradis travaillait de chez lui, son appartement étant « devenu en quelques sortes le bureau, le centre d’actions d’[ASFQ]. » En fait, M. Paradis a commencé à travailler à temps plein pour ASFQ en 2004, étant jusqu’à mai 2005 environ, sans salaire [transcription Paradis, pp 21-24 et 163-164].

[122]  Il ressort également du témoignage de M. Paradis, dont notamment des paragraphes 16 à 18 de son affidavit, qu’ASFQ a une présence marquée dans plusieurs universités canadiennes. Plus particulièrement, ASFQ chapeaute les associations étudiantes suivantes :

  • Avocats sans frontières Université Laval (ASF Université Laval), fondée en 2006.

  • Avocats sans frontières Université de Montréal (ASF Université de Montréal), fondée en 2008.

  • Lawyers Without Borders McGill (LWB McGill), fondée en 2008.

  • Avocats sans frontières – Section Université d’Ottawa (ASF Ottawa), fondée en 2008.

  • Avocats sans frontières Université de Sherbrooke (ASF Université de Sherbrooke), fondée en 2008.

[Pièces « PP-10 » à « PP-16 » jointes à son affidavit].

[123]  M. Paradis explique de plus que grâce à son partenariat avec l’International Human Rights Clinic de l’Université de Toronto, ASFQ diffuse l’information sur ses activités dans cette université, alors que le partenariat d’ASFQ avec Level/Égaliser (autrefois connue sous le nom Avocats canadiens à l’étranger/Canadian Lawyers Abroad) lui permet de joindre les étudiants des facultés de droit suivantes pour les informer sur ses activités et recruter des stagiaires et coopérant(e)s volontaires : Université de Victoria, Université de la Colombie-Britannique, Université de Calgary, Université de l’Alberta, Université de la Saskatchewan, Université du Manitoba, Université de Windsor, Université Western Ontario, Université Queen’s, Université du Nouveau Brunswick, Université Dalhousie.

[124]  S’agissant plus particulièrement des marques de commerce employées par ASFQ dans la poursuite de ses activités, M. Paradis affirme au paragraphe 19 de son affidavit, qu’ASFQ emploie, en liaison avec ses biens et services, les marques de commerce AVOCATS SANS FRONTIÈRES, LAWYERS WITHOUT BORDERS, et ASF, qu’il définit collectivement comme les « Marques ASF ». Il convient de noter à ce stade-ci de mon analyse que les marques de commerce ASF et AVOCATS SANS FRONTIÈRES sont enregistrées respectivement sous les nos TMA766,649 et TMA954,925 [pièce « PP-17 » jointe à son affidavit; et copie certifiée mentionnée plus haut]. Également, je note que les produits et services visés par ces enregistrements ainsi que les dates de premier emploi revendiquées à l’égard de ceux-ci sont les mêmes que dans la présente demande, sauf en ce qui a trait à la date de « au moins aussi tôt que juin 2005 » (plutôt que « au moins aussi tôt que novembre 2006 ») revendiquée en liaison avec les produits dans le cas de la marque de commerce AVOCATS SANS FRONTIÈRES.

[125]  Dans le reste de son affidavit, M. Paradis ne discute jamais de façon séparée de l’emploi de la Marque par ASFQ, mais toujours des Marques ASF collectivement.

[126]  Ainsi, M. Paradis fait valoir que :

  • ASFQ a, depuis sa fondation, fait l’objet d’une revue de presse étendue en liaison avec les Marques ASF à travers le Canada, comprenant des centaines de mentions dans la presse écrite, des périodiques et des magazines, etc., en sus de ses propres activités promotionnelles et de financement [paras 25-36, 54 et 65-73; et pièces « PP-22 » à « PP-60 »; « PP-73 » à « PP-82 »; et « PP-98 » à « PP-111 »].

  • ASFQ a employé et continue d’employer toutes et chacune des Marques ASF en liaison avec les produits et services visés par la présente demande, et ce de façon continue, depuis au moins aussi tôt que les dates revendiquées dans ses demandes d’enregistrement et/ou enregistrements correspondant(e)s [para 38 (corrigé); et pièces « PP-17 » à « PP-19 »].

  • Avec la permission d’ASFQ, les associations étudiantes chapeautées par ASFQ emploient également les Marques ASF dans le cadre de leurs activités, toujours sous le contrôle, la direction et au bénéfice d’ASFQ [para 39].

  • Depuis juin 2005, ASFQ publie régulièrement des bulletins en lien avec les Marques ASF traitant des activités d’ASFQ. M. Paradis affirme qu’à la date de signature de son affidavit, 2 161 personnes étaient abonnées et recevaient l’infolettre d’ASFQ [paras 40-42; et pièces « PP-61 » à « PP-64 »];

  • ASFQ emploie les Marques ASF en liaison avec l’organisation de missions de coopération internationale et des activités de défense et de promotion des droits humains (ASFQ ayant réalisé, depuis sa fondation, pas moins de 270 missions de coopération internationale au Canada et dans 23 autres pays) [paras 43-46; et pièces « PP-65 » et « PP-66 »].

  • ASFQ est présente sur les réseaux sociaux et sur Internet. Plus particulièrement, M. Paradis affirme que :

    • o Depuis le mois de janvier 2004, ASFQ gère en liaison avec les Marques ASF un site Internet au www.asfcanada.ca qui permet à la communauté juridique et au public en général de s’informer sur les activités d’ASFQ, leurs résultats et les changements concrets qu’elles suscitent sur le terrain, etc. Les statistiques compilées automatiquement par le logiciel de gestion du trafic sur le site Internet d’ASFQ, pour la période de janvier 2005 à février 2016, indiquent un nombre dépassant les 200 000 sessions ouvertes, dont plus de la moitié sont de nouveaux visiteurs. Le site Internet d’ASFQ compte plus de 500 000 pages vues [paras 47-48 de son affidavit].

    • o ASFQ possède un compte Twitter institutionnel depuis février 2010, qui avait 290 abonnements à la date de signature de l’affidavit de M. Paradis. Également, le compte Twitter de M. Paradis associé au rôle de Directeur général d’ASFQ comptait 723 abonnés à la date de signature de son affidavit [para 49; et pièces « PP-67 » et « PP-68 »].

    • o Le compte Facebook d’ASFQ existe depuis décembre 2013 et comptait, à la date de signature de son affidavit, 2 824 mentions « J’aime ». Les groupes universitaires d’ASFQ possèdent également des comptes Facebook utilisant les Marques ASF. M. Paradis affirme qu’à la date de signature de son affidavit, le compte de l’Université Laval comptait 919 mentions « J’aime », celui de l’Université de Montréal, 670, celui de l’Université McGill, 489, celui de l’Université de Sherbrooke, 1 109, et celui de l’Université d’Ottawa, 450 [para 50; et pièce « PP-69 »].

    • o Depuis le 1er novembre 2006, ASFQ publie aussi, en liaison avec les Marques ASF, un blogue notamment destiné à la communauté juridique canadienne et au public en général, offrant des nouvelles des activités d’ASFQ et des dossiers suivis par l’organisme. M. Paradis affirme que les statistiques compilées par le logiciel de gestion du trafic sur le site Internet d’ASFQ pour la période de janvier 2005 à février 2016 confirment plus de 55 000 vues. M. Paradis ajoute que certains des billets publiés sur le blogue d’ASFQ ont également été publiés à l’échelle nationale sur le FP Legal Post [paras 51-52; et pièces « PP-70 » et « PP-71 »].

  • ASFQ a mené de nombreuses campagnes de sensibilisation sur plusieurs enjeux d’accès à la justice et des droits humains au Canada. Sans reprendre la liste détaillée de celles-ci fournie par M. Paradis, je me contenterai de mentionner ici, à titre d’exemples, celles concernant le rapatriement d’Omar Khadr au Canada et la libération du blogueur saoudien Raïf Badawi [paras 55 à 64; et pièces « PP-22 », « PP-79 » et « PP-83 à « PP-97 »]

  • Depuis novembre 2002, ASFQ mène des activités de collectes de fonds au Canada, ayant pour but de financer les missions de coopération internationale d’ASFQ, ainsi que ses activités au Canada. M. Paradis affirme également que depuis 2002, sur une base continue, ASFQ mène des activités et campagnes de financement en liaison avec les Marques ASF auprès d’institutions publiques et privées de même qu’auprès du public au Canada [paras 65 à 73; et pièces « PP-13 » à « PP-16 » et « PP-98 » à « PP-111 »].

  • Depuis 2002, ASFQ a organisé ou donné plus de 100 conférences et séances d’information ou de formation en liaison avec les Marques ASF [paras 74-75; et pièces « PP-82 » et « PP-112 » à « PP-126 »].

[127]  À la revue de l’ensemble des pièces produites par M. Paradis au soutien de ses affirmations, je note que la Marque, lorsqu’elle y apparaît, est pratiquement toujours accompagnée d’autres mots et/ou éléments graphiques, comme dans les principaux exemples reproduits ci-dessous :

[Je référerai à cet exemple comme « l’ancien modèle » de carte de visite]

[Je référerai à cet exemple comme « l’ancienne signature trilingue » d’ASFQ]

[Avec ou sans le mot « Canada ». Je référerai à cet exemple comme « la nouvelle signature trilingue » d’ASFQ, laquelle semble avoir été adoptée au cours de l’hiver-printemps 2008, selon l’un des bulletins de la pièce « PP-63 »]

[128]  Avant de discuter plus avant de la question de la variation de la Marque, je souhaite revenir sur certains aspects du témoignage de M. Paradis concernant l’historique d’emploi de la Marque.

[129]  Il ressort du contre-interrogatoire de M. Paradis que les premières réunions en vue de fonder ASFQ, en tant que membre du mouvement international Avocats sans frontières, ont eu lieu à partir du mois de février 2002 [transcription Paradis, p 8]. De là jusqu’à la date d’incorporation d’ASFQ le 23 octobre 2002, les membres fondateurs d’ASFQ ont tenu diverses réunions, au cours desquelles ils ont commencé à employer la désignation « AVOCATS SANS FRONTIÈRES ». Bien que M. Paradis se réfère à certaines pièces afin d’appuyer ses affirmations concernant l’emploi des Marques ASF au cours de la période pré-incorporation d’ASFQ [voir notamment la pièce « PP-42 », incluant un article paru dans l’édition du 15 juin 2002 du Journal du Barreau intitulé « Avocats sans frontières pourrait avoir une antenne au Québec »; et la pièce « PP-94 », incluant le procès-verbal d’une réunion publique ayant eu lieu le 28 août 2002], je ne relève dans la preuve aucune référence à la version anglaise « LAWYERS WITHOUT BORDERS » pendant cette période, mais seulement à la version française « AVOCATS SANS FRONTIÈRES ».

[130]  À cet égard, il ressort du contre-interrogatoire de M. Paradis qu’ASFQ avait effectué certaines recherches préalablement à l’incorporation d’ASFQ et à la sélection du nom « LAWYERS WITHOUT BORDERS ». Par contre, il n’est pas clair à la revue de son témoignage de quel type de recherche il s’agissait (par exemple, s’il s’agissait seulement d’une recherche d’enregistrabilité ou d’une recherche de disponibilité plus exhaustive, etc.). Quoiqu’il en soit, il ressort du témoignage de M. Paradis qu’au moment de l’incorporation d’ASFQ, il n’y avait pas de marque de commerce « LAWYERS WITHOUT BORDERS » enregistrée au Canada, et qu’ASFQ a appris l’existence de LWOB aux États-Unis à un moment quelconque, autour soit de l’incorporation d’ASFQ ou des années 2003 ou 2004 [transcription Paradis, pp 33-39, et 41-42]. Je reviendrai sur ce dernier point plus loin.

[131]  Concernant l’incorporation d’ASFQ, l’extrait du registre des entreprises du Québec produit par M. Paradis, comme pièce « PP-1 » au soutien de son affidavit, fait état sous la rubrique « versions du nom dans une autre langue » de « LAWYERS WITHOUT BORDERS QUÉBEC » en date du 23 octobre 2002. On peut également y lire, sous la rubrique « Autres noms utilisés au Québec », un certain nombre d’autres noms (incluant « LAWYERS WITHOUT BORDERS CANADA »), portant tous comme « date de déclaration du nom », la date du 17 février 2009. Aux dires de M. Paradis, la date de premier emploi de la Marque revendiquée comme « au moins aussi tôt que novembre 2002 » en liaison avec les services (1) identifiés dans la présente demande a été choisie de façon conservatrice, prenant en considération la date d’incorporation d’ASFQ [transcription Paradis, pp 69-70].

[132]  Lors du contre-interrogatoire de M. Paradis, plusieurs questions ont tourné autour du tout premier emploi de la Marque à avoir été fait par ASFQ. Notamment, LWOB désirait obtenir une confirmation de M. Paradis à l’effet que le spécimen le plus ancien faisant référence aux mots « LAWYERS WITHOUT BORDERS » ou à la Marque produit au soutien de son affidavit consistait en le spécimen du tout premier modèle de la carte de visite personnelle de M. Paradis, imprimée en avril 2003, retrouvée à la pièce « PP-75 » (reproduite plus haut). M. Paradis a répliqué qu’il ne pouvait pas répondre à cette question, pour le motif qui suit :

[Réponse à la Q. 82] Nous avons des dizaines, sinon des milliers d’utilisation de notre marque de commerce en anglais et en français du début de nos activités en février 2002 jusqu’à aujourd’hui. Nous vous avons produit 10 volumes de documentation écrite dont certaines, comme je viens de le dire, dépendent de nos archives. Comme je vous le disais, aux fins de ce litige-là, on a essayé, bien sûr, de trouver le plus de documents possible dans nos archives. Mais sur est-ce que c’est la première fois qu’on la voit en anglais dans tous les documents que vous avez? Je ne peux pas vous répondre.

[…]

Q. 87 For the early years 2003, 2004, 2005, what you found that showed use of « Lawyers Without Borders », will that be in your Affidavit?

R. C’est pas facile de répondre à votre question parce que comme je viens de le mentionner, une des difficultés dans ce litige-là c’est qu’on en a des centaines, des milliers d’utilisation de marque de commerce. Je peux vous affirmer, par exemple, que dans les premiers mois d’activité à partir du mois de février, on a envoyé des communications écrites, donc, certaines en français avec « Avocats sans frontières » et certaines en anglais avec « Lawyers Without Borders » parce que c’est un pays bilingue et parce que des gens qu’on sollicitait notamment, étaient à Montréal. Et qu’à Montréal dans la communauté juridique, le français et l’anglais sont couramment utilisés.

Est-ce qu’on a pu produire ces documents-là, aujourd’hui je ne peux pas vous répondre à ça.

[133]  Je ne veux pas laisser entendre ici qu’ASFQ était tenue de démontrer l’emploi de la Marque en liaison avec tous et chacun des produits et services visés par la présente demande aux dates de premier emploi revendiquées dans celle-ci. Je tiens simplement à noter que ma revue de l’ensemble des pièces produites par M. Paradis au soutien de son affidavit m’amène à conclure que les plus anciens spécimens faisant possiblement état d’un emploi quelconque de la Marque, retrouvés parmi la preuve au dossier, consistent en la carte de visite de M. Paradis, imprimée, aux dires de ce dernier, en avril 2003 [pièce « PP-75 »], et le formulaire de cotisation et don [pièce « PP-98 »], qui a, aux dires de M. Paradis, été « utilisé par [ASFQ] et distribué au Canada depuis 2003, en anglais et en français », et qui comprend diverses mentions telles que « I wish to become a member of Lawyers without Borders Canada ». Toutefois, je me permets de noter qu’il m’apparaît douteux que le spécimen de formulaire produit comme pièce « PP-98 » corresponde exactement à celui qui était employé en 2003, étant donné qu’on y retrouve, tout en haut du titre « Membership and Donation Form », la nouvelle signature trilingue d’ASFQ, et que M. Paradis a confirmé lors de son contre-interrogatoire que le nom « Lawyers without Borders Canada » a été ajouté comme « autre nom » en 2009 [transcription Paradis, p 36; et pièce « PP-1 »].

[134]  Je tiens également à souligner que plusieurs des pièces produites par M. Paradis au soutien de son affidavit n’arborent que l’une ou l’autre des Marques ASF alléguées par celui-ci, et non pas toutes. À titre d’exemple, je note que le premier bulletin d’ASF de juin 2005 produit comme pièce « PP-61 » n’arborait aucune référence quelconque à la Marque (que ce soit sous forme nominale ou de logo), d’où je comprends, la date de premier emploi différente revendiquée par ASFQ en regard des produits visés par la présente demande, en comparaison de celle revendiquée dans l’enregistrement de la marque de commerce AVOCATS SANS FRONTIÈRES. À cet égard, je note qu’ASFQ fait elle-même valoir au paragraphe 61 de son plaidoyer écrit que : « Pour l’ensemble des activités [d’ASFQ] dont il est fait état à l’[a]ffidavit Paradis, sans exception, [ASFQ] affiche fièrement et en évidence la Marque, soit en français (AVOCATS SANS FRONTIÈRES), soit en anglais (LAWYERS WITHOUT BORDERS). » Encore ici, il convient d’insister sur le fait que bien que la Marque corresponde à la version anglaise de la marque de commerce AVOCATS SANS FRONTIÈRES, cela ne signifie pas pour autant que l’emploi de la version française vaut pour l’emploi de la Marque. Il s’agit de deux marques de commerce distinctes, bien qu’identiques au niveau des idées suggérées. Aussi suis-je en désaccord avec la position exprimée par ASFQ au paragraphe 48 de son plaidoyer écrit à l’effet que « si la Marque a été utilisée et était connue en français, alors on doit conclure que sa version anglaise était aussi utilisée et connue, et vice-versa, vu que dans les deux cas, la Marque évoque les mêmes concepts […] ». Je reviendrai plus loin sur ce point.

[135]  Revenant sur la question de la variation de la Marque, j’estime que l’emploi de la Marque avec l’ajout du mot « QUÉBEC » ou « CANADA », selon le cas, vaut également pour l’emploi de la marque nominale LAWYERS WITHOUT BORDERS, étant donné le caractère descriptif des mots « QUÉBEC » et « CANADA », servant à indiquer l’origine géographique des produits et services d’ASFQ et ne faisant pas perdre à la Marque son identité.

[136]  Pour ce qui est de l’emploi de la Marque comme illustré sur le spécimen de carte de visite reproduit plus haut, j’estime que celui-ci vaut également pour l’emploi de la marque nominale LAWYERS WITHOUT BORDERS, étant donné le caractère clairement bilingue de la carte en question. J’estime en effet que pareil emploi serait perçu comme faisant référence, d’une part, à la marque AVOCATS SANS FRONTIÈRES et, d’autre part, à la marque LAWYERS WITHOUT BORDERS, et non pas à un seul tout constitué des mots « AVOCATS SANS FRONTIÈRES LAWYERS WITHOUT BORDERS » [voir par analogie, la décision Kruger Products LP c Cascades Canada ULC, 2014 COMC 237].

[137]  Cela dit, j’estime qu’il est difficile d’appliquer le même raisonnement en ce qui a trait à l’emploi de la Marque comme illustré dans les ancienne et nouvelle signatures trilingues d’ASFQ reproduites plus haut. Comme argument soutenant la position que la nouvelle signature trilingue d’ASFQ puisse valoir pour l’emploi de la Marque, je note la présentation, sur trois lignes séparées, de chacune des expressions « LAWYERS WITHOUT BORDERS », « AVOCATS SANS FRONTIÈRES » et « ABOGADOS SIN FRONTERAS », avec emphase en caractères gras sur l’expression « AVOCATS SANS FRONTIÈRES » disposée sur la ligne du milieu. Un argument peut être fait à l’effet que pareille présentation puisse être perçue comme trois marques de commerce distinctes—l’une « principale », constituée de la version française « AVOCATS SANS FRONTIÈRES », les deux autres « secondaires », constituées de la traduction de la marque principale en langues anglaise et étrangère (en l’occurrence l’espagnol) disposées de part et d’autre de la marque principale—et non pas nécessairement comme voulant signaler un tout constitué d’un seul bloc trilingue accompagné d’un dessin de globe terrestre stylisé, évoquant ensemble une idée d’internationalité. Toutefois, il est plus difficile de faire pareil argument dans le cas de l’ancienne signature trilingue puisque la Marque se retrouve, dans ce dernier cas, sur la ligne du milieu sans emphase ou distanciation quelconque permettant de la distinguer des autres éléments représentés (faisant ainsi perdre à la Marque son identité). Quoiqu’il en soit, j’estime qu’il ne m’est pas nécessaire de trancher la question de savoir si l’emploi fait de la Marque sous l’une ou l’autre des ancienne et nouvelle signatures trilingues d’ASFQ vaut également pour l’emploi de la Marque puisque, comme il ressortira de mon analyse plus bas, cela ne change ultimement rien au résultat de la présente opposition.

[138]  Enfin, dans la dernière partie de son affidavit, M. Paradis se penche sur les activités de LWOB. Il affirme aux paragraphes 76 à 80 de son affidavit :

[…] j’ai une connaissance étendue du milieu des [ONG] œuvrant au Canada, ou à partir du Canada, dans les domaines de la coopération internationale, de la justice, des droits humains et de la promotion de l’État de droit.

À ma connaissance, [LWOB] est une organisation américaine basée […] au Connecticut.

En date de la signature du présent affidavit, je n’ai connaissance d’aucune activité de [LWOB] au Canada.

Le 25 mars 2009, à l’occasion du cocktail de lancement d’ASF Ottawa, j’ai rencontré un certain Jerry D. Kovacs. M. Kovacs m’a indiqué avoir reçu mandat de la part de Mme Christina Storm, alors dirigeante de [LWOB], de fonder la branche de [LWOB] au Canada.

Sur la base de cette information, je comprends qu’en date du 25 mars 2009, [LWOB] n’avait pas de branche canadienne.

[139]  Comme indiqué plus haut (et expliqué en plus de détail plus bas), le fait que LWOB n’a jamais eu de section canadienne n’est pas suffisant en soi pour remettre en cause ou contredire nécessairement certaines des affirmations de Mme Storm concernant l’emploi de la Marque au Canada fait par LWOB.

[140]  En terminant, je souhaite revenir sur les circonstances ayant entouré le moment où ASFQ a appris l’existence de LWOB. Comme indiqué plus haut, il n’est pas clair si ASFQ a appris l’existence de LWOB au moment de l’incorporation d’ASFQ ou des années 2003 ou 2004. Quoiqu’il en soit, à la revue de la transcription du contre-interrogatoire de M. Paradis, je crois comprendre qu’ASFQ aurait appris l’existence de la demande d’enregistrement de LWOB pour la Marque (ayant abouti à l’enregistrement no TMA631,359 ayant été ultimement invalidé et radié), au moment de l’annonce de celle-ci dans le Journal des marques de commerce ou de l’enregistrement de celle-ci. Aux dires de M. Paradis :

[Réponse à la Q. 58] : Notre première…la première fois où vraiment concrètement on a eu affaire avec [LWOB], c’était quand on a appris par l’entremise d’un des membres de notre Comité exécutif […] et qu’il l’a vu parce qu’ils reçoivent un bulletin qui annonce les enregistrements de marques, et cetera qui nous envoie l’enregistrement de la marque « Lawyers Without Borders, Inc. » au Canada par [LWOB]. Nous avons été stupéfaits. On ne comprenait pas comment ils aient pu enregistrer sans être au courant de notre existence puisque nous, on avait les noms de commerce déjà à l’époque. Et on comprenait difficilement comment une organisation américaine voulait enregistrer la marque au Canada, parce qu’il faut comprendre que dans notre domaine, cette façon de [LWOB] de gérer ses marques de commerce est assez unique. […] c’est à peu près unique de voir une organisation qui dit : « Même s’il y a des gens qui font déjà ça dans un autre pays, on va aller enregistrer notre marque et là on va dire que le mouvement international c’est nous. » Donc, je dis ça pour dire que ça prêtait pas beaucoup à ce qu’on réagisse en disant : « Bonjour. Qui êtes-vous? » Puis parlons-nous. Mais quand même on a eu des communications ensemble dans les années qui ont suivi. Notamment parce que le Président de [LWOB] à l’époque […] a participé à une mission d’observation internationale que nous financions en Colombie. Ce qui fait qu’à ce moment-là on a commencé à se parler et essayé de voir si on pouvait régler, notamment, cette question de marque de commerce qui visait à l’établissement de relation disons…

Q. 59 : Okay. That was a long answer. […] When you [ASFQ], found out about [LWOB] you did not contact them to find out if they had Canadian activities? Is that right?

R. Oui.

Q. 60: Did you visit their website when you find out about them?

R. Oui.

Q. 61: Did you look for Canadian activities?

R. Oui. Et on en a trouvé aucune.

Q. 62 : Did you contact lawyers in Canada for example, universities, any universities to find out whether [LWOB] was working with them?

R. Oui. Et comme d’ailleurs vous voyez des affidavits du Président de l’[ABC] à l’époque et le Président de l’[ABC] aujourd’hui ou l’année dernière, et comme tous nos partenaires du monde juridique et du monde des droits humains et de la coopération internationale au Canada nous disent, ils nous disent tous la même chose. « Votre cliente [LWOB] est inconnue. »

[141]  Également, lorsque contre-interrogé par LWOB afin de savoir pourquoi ASFQ n’avait pas produit ses demandes d’enregistrement concernant les Marques ASF plus tôt (i.e. dès les premiers temps de ses activités au Canada), M. Paradis a expliqué que c’était en raison du fait qu’ASFQ n’avait pas à l’époque « beaucoup de temps » ni d’argent et de « ressources » pour ce faire [transcription Paradis, p 66-68]. Il ressort aussi du contre-interrogatoire de M. Paradis qu’ASFQ ne croyait alors pas possible qu’une autre entité puisse tenter d’enregistrer pareilles marques de commerce au Canada, pas plus qu’ASFQ ne chercherait à enregistrer les Marques ASF en dehors du Canada :

[Réponse à la Q. 70] : […] compte tenu du domaine où on travaille, la solidarité internationale, les droits humains, je ne peux pas imaginer que quelqu’un d’autre va arriver au Canada puis va enregistrer une marque de commerce.

[Réponse à la Q. 229] : Bien, il ne nous viendrait pas à l’idée, je l’ai mentionné plus tôt, mais encore une fois, c’est très important dans ce dossier-ci, ce n’est pas une pratique habituelle dans notre domaine. Dentistes sans frontières USA ou UK ou France ne cherchera pas à enregistrer une marque au Canada ou en Belgique ou en Suisse. Donc, nous on fonctionne comme ça. On n’arrivera pas dans un pays en disant : « We are Lawyers Without Borders. Nous sommes Avocats sans frontières. » C’est la raison pour laquelle nous n’enregistrons pas de marques de commerce dans d’autres pays. Et aussi parce que, comme on le mentionne ailleurs dans l’[a]ffidavit, nous faisons partie d’un mouvement, dont il y a des branches nationales dans d’autres pays. Dont plusieurs d’entre elles ont leur marque de commerce dans leur pays. Donc Avocats sans frontières France a ses marques de commerce en France. Avocats sans frontières à Bruxelles a ses marques de commerce en Belgique, et européennes, je pense […]

[Mon soulignement]

[142]  Tout comme pour les affidavits Potter et Headon, j’estime que ces affirmations de M. Paradis sont insuffisantes en soi pour remettre en cause ou contredire nécessairement certaines des allégations de Mme Storm concernant l’emploi de la Marque au Canada fait par LWOB. Au mieux pour ASFQ, j’estime que pareilles affirmations concernent plutôt la mesure dans laquelle la Marque est devenue connue au Canada ou la réputation acquise par LWOB. J’ajouterai à ce sujet que je n’accorde aucun poids aux allégations gratuites de M. Paradis concernant les soi-disant pratiques d’autres entités du mouvement Avocats sans frontières en matière d’enregistrement de marques de commerce.

III.3.4 LWOB a-t-elle rencontré son fardeau de preuve initial?

[143]  J’estime qu’il y a lieu de répondre à cette question par l’affirmative pour les raisons ci-après.

[144]  Tout d’abord, concernant le fait que LWOB n’a jamais eu de section canadienne ou d’établissement réel au Canada, il est bien établi par la jurisprudence que cela ne peut empêcher un propriétaire de marque de commerce donnée d’offrir ou d’exécuter des services au Canada.

[145]  En effet, comme souligné par le registraire dans la décision Norman M. Cameron Law Corporation c CMS Cameron McKenna LLP, 2009 CanLII 82159 (COMC), l’article 4(2) de la Loi n’impose pas un tel fardeau afin de démontrer l’emploi d’une marque de commerce donnée en liaison avec des services. Comme indiqué plus haut, du moment que cette marque de commerce a été employée dans l’annonce de pareils services et que son propriétaire est prêt à fournir ceux-ci au Canada, cela est suffisant pour satisfaire aux exigences de l’article 4(2) de la Loi [voir notamment Wenward (Canada) Ltd c Dynaturf Co (1976), 28 CPR (2d) (COMC); et autre jurisprudence citée dans la décision Hilton Worldwide Holding LLP c Miller Thomson, précitée, faisant notamment état de l’« évolution » de la notion d’emploi en liaison avec des services, en parallèle avec « l’explosion des services offerts 'en ligne' »].

[146]  Ensuite, concernant la nature des produits et services en liaison avec lesquels je suis satisfaite que l’emploi antérieur de la Marque par LWOB au Canada et le non-abandon de celle-ci a été démontré aux dates pertinentes pour l’appréciation du présent motif d’opposition, j’estime que ceux-consistent, à tout le moins, en des services de « linkage » (couplage) et des bulletins d’information.

[147]  Je retiens de ma revue de l’ensemble de la preuve de LWOB que depuis au moins 2001, l’un des objectifs de celle-ci a été de fournir aux milieux juridiques canadiens, notamment aux avocats et étudiants en droit, des ressources pour entrer en rapport avec la communauté internationale des gens de loi bénévoles et différentes organisations bénévoles. En cela, j’estime que les produits et services de LWOB s’apparentent à ceux d’une association ayant pour but d’offrir à ses membres diverses ressources, comme il ressort de certains des extraits des différentes brochures, bulletins d’information et descriptions retrouvées sur le site Internet de LWOB, reproduits plus haut dans ma revue détaillée de la preuve de LWOB.

[148]  Comme expliqué par Mme Storm, et corroboré par diverses pièces produites au soutien de son affidavit, des individus en provenance du Canada ont souhaité joindre LWOB dès 2001, en s’inscrivant comme « membre » sur la liste Listserv de LWOB, lui faisant parvenir leurs curriculum vitae et allant même, pour certains, jusqu’à payer les frais exigés à l’époque par LWOB pour être inscrits à sa base de données de bénévoles ou avoir accès à son « tableau d’offres » (« opportunities board »). D’ailleurs, au sujet de ce tableau d’offres, n’eut été du fait que je n’ai pu relever dans la preuve d’exemple faisant voir comment la Marque a été effectivement employée dans l’annonce ou l’exécution de pareil service à l’époque de sa mise en service, j’aurais également conclu à l’emploi antérieur et au non-abandon de la Marque en liaison avec pareil service aux dates pertinentes pour l’appréciation du présent motif d’opposition.

[149]  Revenant sur les services de « linkage » (couplage), je retiens de ma revue de la preuve, dont l’affidavit Taylor et ses pièces jointes, que LWOB est celle qui, en 2001, a mis en relation PBSC et l’ONG du Kosovo Criminal Defense Resource Centre. PBSC était à l’époque à la recherche d’opportunités pour ses étudiants intéressés à participer à des projets centrés sur la primauté du droit et a contacté LWOB via son site Internet. S’en est suivi un « partenariat » développé entre PBSC et LWOB, comme décrit par M. Taylor. En cela, j’estime que PBSC, en tant qu’organisation canadienne, a tiré directement avantage d’un service de LWOB. Que LWOB ait agi à titre d’intermédiaire ou de « lien » entre PBSC et cette ONG, à partir des États-Unis, ne change rien au fait que PBSC a profité, au Canada, d’un service de LWOB, bien que ne pouvant pas nécessairement être qualifié comme tel de « services juridiques ». Il convient de rappeler ici que M. Taylor n’a pas été contre-interrogé sur son affidavit, lequel affidavit n’était également pas inclus dans la preuve soumise par LWOB dans la procédure ayant mené au Jugement en invalidation.

[150]  Toujours au sujet des services de « linkage » (couplage), je retiens de ma revue de la preuve qu’à tout le moins deux ONG canadiennes (nommément RESPECT en 2004 et MBAs Without Borders en 2006), ont fait appel aux services de référence de LWOB (et rempli le formulaire d’accueil (« intake form ») de LWOB) afin de tenter de trouver un avocat canadien bénévole, et que pareil « linkage » s’est avéré fructueux pour l’une d’elles. Bien que les exemples concrets de services de « linkage » fournis par Mme Storm soient peu nombreux, j’estime que l’on ne peut raisonnablement conclure de la preuve au dossier que LWOB avait cessé d’offrir pareils services au Canada (bien que ne trouvant pas nécessairement preneur), et encore moins qu’elle eut eu l’intention d’abandonner la Marque en liaison avec pareils services à la date de l’annonce de la présente demande, le 26 juin 2013. En effet, je note que les statistiques de visites par page du site Internet de LWOB fournies par Mme Storm à la pièce « N » de son affidavit pour les années 2009-2010 font référence aux pages de l’« intake form ». Bien que ces statistiques ne soient pas départagées par pays, le fait demeure qu’elles attestent de la présence de ce formulaire sur le site Internet de LWOB, pour lequel site Internet d’autres statistiques attestent de visites en provenance du Canada. De plus, dans l’échange de courriels daté du 18 octobre 2014 de la pièce « HH » produite au soutien de l’affidavit de Mme Storm, celle-ci fait expressément référence au formulaire d’accueil de LWOB : « We can send you an intake form to fill out – and “shop” your request to various Canadian firms in an effort to recruit one to take you on as a pro bono client […] ». Bien que cet échange de courriels soit postérieur au 26 juin 2013, j’estime que celui-ci supporte une certaine continuité au niveau de l’offre de services de LWOB, ou à tout le moins, que LWOB ne pouvait avoir eu l’intention d’abandonner la Marque en liaison avec pareil service de « linkage » quelque 16 mois auparavant.

[151]  Concernant les bulletins d’information, je retiens de ma revue de la preuve que pareils bulletins arborant la Marque ont été publiés depuis à tout le moins avril 2002. Plus particulièrement, concernant le bulletin papier « BorderLines » d’avril 2002 de la pièce « B » produite au soutien de l’affidavit de Mme Storm, considérant les efforts de démarchage et de recrutement déployés par LWOB auprès, notamment, des universités McGill et de Toronto au cours des années 2002 et 2003, je ne vois aucune raison de ne pas accorder foi aux affirmations de Mme Storm à l’effet que pareil bulletin papier a, de fait, été distribué au Canada à des avocats, des cabinets d’avocats, des étudiants d’universités, etc. Ceci est d’autant plus vrai considérant le fait que pareils bulletins d’information s’apparentent également à un outil marketing et/ou de recrutement. Encore ici, les statistiques de visites par page du site Internet de LWOB de la pièce « N » font également référence aux pages de la version électronique de la « Newsletter ».

[152]  Revenant sur l’ensemble des statistiques de la pièce « N », je note qu’il eut été préférable que celles-ci aillent au-delà de l’année 2010. Il semble que Mme Storm se soit en fait essentiellement contentée de reprendre sur ce point les statistiques qui avaient été fournies dans son affidavit du 13 août 2010 [pièce « CS-A »] dans le cadre de la procédure ayant mené au Jugement en invalidation. Néanmoins, considérant le témoignage de Mme Storm dans son ensemble, y compris l’imprimé de la page d’accueil du site Internet de LWOB, daté du 20 octobre 2014, joint à son affidavit comme pièce « EE » comprenant toujours des hyperliens aux rubriques « NGOs » et « BorderBriefs », entre autres rubriques, je n’ai aucune raison de ne pas accorder foi à ses affirmations à l’effet que son bulletin électronique et son formulaire d’accueil existaient toujours à la date de signature de son affidavit.

[153]  Si je suis dans l’erreur en concluant de la sorte, j’estime que je ne peux pas pour autant conclure, dans les circonstances du présent dossier, que LWOB eut eu l’intention d’abandonner la Marque en date du 26 juin 2013 [voir Iwasaki Electric Co Ltd c Hortilux Schreder B.V., précitée]. En effet, s’il me fallait conclure à une période de non-emploi depuis 2010, j’estime pareille période insuffisante en soi pour conclure à une intention de la part de LWOB d’abandonner la Marque en date du 26 juin 2013, considérant les informations fournies par Mme Storm relativement à la présence de LWOB dans les médias sociaux et le fait que LWOB compte toujours parmi ses rangs des bénévoles canadiens intéressés à profiter d’expériences de travail diverses.

III.3.5 Analyse de la probabilité de confusion

[154]  Le test en matière de confusion est celui de la première impression et du souvenir imparfait. Selon l’article 6(2) de la Loi, l’emploi d’une marque de commerce crée de la confusion avec une autre marque de commerce lorsque l’emploi des deux marques de commerce dans la même région serait susceptible de faire conclure que les produits liés à ces marques de commerce sont fabriqués, vendus, donnés à bail ou loués ou que les services liés à ces marques de commerce sont loués ou exécutés, par la même personne, que ces produits ou ces services soient ou non de la même catégorie générale ou figurent ou non dans la même classe de la classification de Nice.

[155]  En décidant si des marques de commerce créent de la confusion, le registraire doit tenir compte de toutes les circonstances de l’espèce, notamment de celles énumérées à l’article 6(5) de la Loi, à savoir : a) le caractère distinctif inhérent des marques de commerce et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues; b) la période pendant laquelle les marques de commerce ont été en usage; c) le genre de produits, services ou entreprises; d) la nature du commerce; et e) le degré de ressemblance entre les marques de commerce dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’elles suggèrent. Cette liste n’est pas exhaustive et un poids différent pourra être accordé à chacun de ces facteurs selon le contexte [voir Mattel, Inc c 3894207 Canada Inc (2006), 2006 CSC 22, 49 CPR (4th) 321; Veuve Clicquot Ponsardin c Boutiques Cliquot Ltée et al (2006), 2006 CSC 23, 49 CPR (4th) 401; et Masterpiece Inc c Alavida Lifestyles Inc (2011), 2011 CSC 27, 92 CPR (4th) 361 pour un examen plus approfondi des principes généraux qui régissent le test en matière de confusion].

[156]  Au vu de mon analyse détaillée de la preuve des parties faite plus haut, j’estime qu’il ne m’est pas nécessaire de discuter longuement de tous et chacun de ces facteurs pour conclure à l’existence d’une probabilité de confusion dans le présent cas. Bien que le caractère distinctif inhérent de la Marque soit très faible (à cet égard, j’estime que l’on ne peut conclure que le caractère distinctif de la Marque eut été accru de manière significative de par l’emploi fait de celle-ci aux dates de premier emploi alléguées dans la présente demande), le fait est que nous sommes en présence de deux marques de commerce nominales identiques et qu’il existe un chevauchement direct entre les produits et services des parties.

III.3.6 Conclusion

[157]  Compte tenu de l’ensemble de ce qui précède, j’accueille le motif d’opposition fondé sur l’article 16(1)(a) de la Loi.

[158]  Avant de me pencher sur le motif d’opposition fondé sur l’absence de caractère distinctif de la Marque, je souhaite ici discuter brièvement d’un argument présenté par ASFQ à savoir qu’« il serait absurde qu’[ASFQ] ne puisse obtenir l’enregistrement de la version anglaise de la Marque alors qu’elle est la propriétaire enregistrée de la version française. »

[159]  Comme indiqué précédemment, que la Marque corresponde à la version anglaise de la marque de commerce AVOCATS SANS FRONTIÈRES ne change rien au fait qu’il s’agit de deux marques de commerce distinctes. De plus, il est bien établi que l’article 19 de la Loi ne confère pas au propriétaire d’un enregistrement le droit d’obtenir automatiquement l’enregistrement d’autres marques de commerce, même si celles-ci sont étroitement liées à la marque visée par l’enregistrement initial [Groupe Lavo c Proctor & Gamble Inc (1990), 32 CPR (3d) 533 (COMC); Coronet-Werke Heinrich Schlerf GmbH c Produits Ménagers Coronet Inc (1984), 4 CPR (3d) 108 (COMC); American Cyanamid Co c Stanley Pharmaceuticals Ltd (1996), 74 CPR 571 (COMC); et 385229 Ontario Limited c ServiceMaster Company, 2012 COMC 59]. Je me dois de trancher le présent motif d’opposition en fonction des faits particuliers du dossier. À cet égard, je rappelle que le présent motif d’opposition porte non pas sur le droit pour ASFQ d’employer la Marque au Canada, mais sur le droit pour ASFQ d’enregistrer celle-ci.

III.4 Motif d’opposition fondé sur l’absence de caractère distinctif au sens de l’article 2 de la Loi

[160]  Il convient de reproduire ici le motif d’opposition, comme plaidé par LWOB, dans son intégralité :

The [Mark] is not distinctive within the meaning of section 2 of the Act. The [Mark] is not adapted to distinguish nor capable of distinguishing the wares and services in association with which it will be used from the wares and services used in association with [LWOB’s] Mark as outlined in the previous [section 16(1)(a) ground of opposition]. On the contrary, the [Mark] and its use by [ASFQ] is calculated to give rise to confusion, and to enable the Applicant to benefit from and trade-off the goodwill of [LWOB’s] Mark.

[161]  Afin de satisfaire le fardeau de preuve initial lui incombant en regard de ce motif, LWOB se devait de démontrer qu’à la date de production de la déclaration d’opposition, soit le 26 novembre 2013, sa marque de commerce LAWYERS WITHOUT BORDERS était devenue connue dans une mesure suffisante pour faire perdre à la marque de commerce identique d’ASFQ son caractère distinctif [Motel 6, Inc c No. 6 Motel Ltd (1981), 56 CPR (2d) 44 (CF 1re inst); et Bojangles’ International, LLC c Bojangles Café Ltd, 2006 CF 657, 48 CPR (4th) 427 (CF)].

[162]  En l’occurrence, bien que j’ai conclu à l’emploi antérieur de la Marque par LWOB et au non-abandon de celle-ci aux dates pertinentes pour l’appréciation du motif d’opposition fondé sur l’article 16(1)(a) de la Loi, j’estime que la preuve au dossier ne me permet pas de conclure qu’à la date pertinente pour l’appréciation du présent motif d’opposition, celle-ci était devenue connue à tout le moins jusqu’à un certain point pour annuler le caractère distinctif de la Marque d’ASFQ.

[163]  En effet, comme il ressort de mon analyse plus haut, la preuve d’emploi de la Marque au Canada soumise par LWOB demeure très mince. Qui plus est, aucune des données statistiques de fréquentation du site Internet de LWOB ne concerne la date pertinente pour l’appréciation du présent motif d’opposition. Dans les circonstances, j’estime la preuve de LWOB insuffisante pour me permettre de conclure que celle-ci était devenue connue à tout le moins jusqu’à un certain point pour annuler le caractère distinctif de la Marque d’ASFQ.

[164]  Par conséquent, j’estime que LWOB ne s’est pas déchargée de son fardeau de preuve initial en regard du présent motif et celui-ci est rejeté.

IV. Décision

[165]  En vertu des pouvoirs qui m’ont été délégués en vertu de l’article 63(3) de la Loi, je rejette la demande selon les dispositions de l’article 38(12) de la Loi.

 

Annie Robitaille

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada


 

 

COMMISSION DES OPPOSITIONS DES MARQUES DE COMMERCE

OFFICE DE LA PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE DU CANADA

COMPARUTIONS ET AGENTS INSCRITS AU DOSSIER

___________________________________________________

DATE DE L’AUDIENCE 2020-01-21

COMPARUTIONS

Gabriella Levkov

POUR L’OPPOSANTE

Joanne Chriqui et Sofia Lopez Bancalari

POUR LA REQUÉRANTE

AGENTS AU DOSSIER

DLA PIPER (Canada) LLP

POUR L’OPPOSANTE

Norton Rose Fulbright Canada LLP/S.E.N.C.R.L., s.r.l.

POUR LA REQUÉRANTE

 

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