Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

THE REGISTRAR OF TRADEMARKS

Référence : 2020 COMC 97

Date de la décision : 2020-08-05

[TRADUCTION CERTIFIÉE,

NON RÉVISÉE]

DANS L’AFFAIRE DE L’OPPOSITION

 

Cirrus Design Corporation

Opposante

et

 

Powervision Tech Inc.

Requérante

 

1,761,684 pour POWERVISION & dessin

Demande

Introduction

[1]  Cirrus Design Corporation (l’Opposante) s’oppose à l’enregistrement de la marque de commerce POWERVISION & dessin (la Marque), laquelle est visée par la demande d’enregistrement no 1,761,684 de Powervision Tech Inc. (la Requérante). La Marque est reproduite ci-dessous :

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[2]  La Marque visée par la demande est en liaison avec les produits suivants :

(1) Robots industriels; appareils de manutention automatiques pour le ramassage et la mise en place de voitures et de drones; dynamos; moteurs d’avion; moteurs pour l’aéronautique; valves, à savoir pièces de machine et de moteurs; transmissions pour machines; roulements en tant que pièces de machine; courroies de machine; chèvres pour marchandises; radiateurs de refroidissement pour moteurs; démarreurs pour moteurs; moteurs d’entraînement pour avions et bateaux; pulvérisateurs automatiques de peinture électrostatique; mécanismes de commande pour machines et moteurs, nommément commandes hydrauliques pour machines et moteurs.

  • (2) Appareils d’intercommunication, nommément téléphones, radios et téléphones cellulaires; radios pour véhicules; appareils électrodynamiques pour la commande à distance de signaux, nommément transformateurs électriques, capteurs de pression, redresseurs de courant, boîtes de distribution d’énergie pour la commande à distance de signaux; appareils de surveillance (électriques) pour la surveillance de l’état des équipements industriels, nommément panneaux électriques; caméscopes; objectifs; bonnettes d’approche; déclencheurs d’obturateur pour appareils photo; obturateurs pour appareils photo; appareils photo; sacs pour appareils photo et équipement photographique; instruments géodésiques; machines de mesure de niveau pour l’arpentage; vêtements de protection contre les accidents liés au travail, nommément les coupures, les égratignures, les contusions, les blessures causées par les rayonnements, la corrosion et le feu; vêtements de protection contre le feu; vêtements de protection contre les rayonnements; installations antivol électriques, nommément alarmes antivol et alarmes de sécurité personnelle; lunettes; piles et batteries à usage général.

  • (3) Avions; aéronefs; véhicules de locomotion par voie terrestre, aérienne, maritime ou ferroviaire, nommément motos, automobiles, camions, autobus, trains, bateaux, navires et avions; véhicules à guidage automatique; voitures électriques; pneus pour automobiles; voitures compactes; moyeux pour roues de véhicule; moteurs à traction; dirigeables; appareils aéronautiques, machines et appareils, nommément véhicules spatiaux, véhicules lunaires et navettes spatiales; amortisseurs de suspension pour véhicules; clignotants pour véhicules.

[3]  L’opposition est principalement fondée sur une allégation selon laquelle la Marque crée de la confusion avec la marque de commerce de l’Opposante VISION, précédemment employée en liaison avec des produits similaires.

Le dossier

[4]  La demande pour la Marque a été produite le 31 décembre 2015 pour un emploi projeté au Canada.

[5]  Elle a été annoncée aux fins d’opposition le 22 février 2017. De nombreuses modifications à la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, c T-13 (la Loi) sont entrées en vigueur le 17 juin 2019. La demande ayant été annoncée avant cette date, conformément à l’article 70 de la Loi, les motifs d’opposition seront évalués sur le fondement de la Loi dans sa version précédant immédiatement le 17 juin 2019, à l’exception que, en ce qui a trait à la confusion, les articles 6(2) à (4) de la Loi dans sa version actuelle seront appliqués.

[6]  Le 24 avril 2017, l’Opposante s’est opposée à la demande en produisant une déclaration d’opposition en vertu de l’article 38 de la Loi. Les motifs d’opposition étaient fondés sur les articles 30a), 30e), 30i), 16(3)a) et 2 de la Loi.

[7]  La Requérante a soumis une contre-déclaration niant chacun des motifs énoncés dans la déclaration d’opposition.

[8]  Afin d’appuyer son opposition, l’Opposante a produit l’affidavit de Curtis Landherr, assermenté le 9 novembre 2017, à Duluth, Minnesota [l’Affidavit]. M. Landherr n’a pas été contre-interrogé.

[9]  La Requérante a présenté une déclaration selon laquelle il ne produirait pas de preuve.

[10]  Les deux parties ont soumis des représentations écrites, mais seule l’Opposante a été représentée à une audience. Au lieu de participer à l’audience, la Requérante a présenté de brèves observations écrites supplémentaires au sujet de la jurisprudence invoquée par l’Opposante, dont il est question plus loin.

[11]  À l’audience, l’Opposante a confirmé le retrait des motifs d’opposition fondés sur l’article 30 de la Loi. Avant d’évaluer les deux motifs d’opposition restants, je donnerai d’abord un aperçu de la preuve de l’Opposante, du fardeau de preuve de l’Opposante et du fardeau ultime de la Requérante.

Aperçu de la preuve de l’Opposante

[12]  L’Affidavit donne un aperçu des activités commerciales de l’Opposante et de son emploi présumé de la marque de commerce VISION à l’échelle mondiale et au Canada. Il peut se résumer comme suit :

·  M. Landherr est vice-président principal et avocat général de l’Opposante [para 1].

·  L’Opposante est une société établie au Wisconsin qui fabrique, vend et distribue des aéronefs ainsi que des pièces et des éléments structurels d’aéronefs [para 2 et 3].

·  L’Opposante produit un certain nombre d’aéronefs qui sont vendus sous diverses marques et marques de commerce [para 5].

·  M. Landherr affirme que les aéronefs vendus en liaison avec la marque de commerce VISION sont la [traduction] « vedette » des offres de produits [traduction] « actuelles » de l’Opposante, indiquant que [traduction] « Cirrus Vision Jet est le premier jet “personnel” au monde – un turboventilateur à moteur unique conçu pour être piloté par son propriétaire », qui [traduction] « a reçu une certification (approbation) de la FAA en octobre 2016 » [para 6].

·  L’Opposante a commencé à vendre des [traduction] « positions d’achat » pour Vision Jet de l’Opposante à l’échelle mondiale en 2006 et M. Landherr affirme que l’Opposante a commencé à employer la marque de commerce VISION en 2008 dans des publicités et à l’égard de ces [traduction] « positions d’achat » [para 7].

·  À la date de l’affidavit, il y a plus de 600 [traduction] « commandes de position ou réservations d’aéronefs en liaison avec la marque de commerce VISION » [para 7].

·  Au Canada, la première vente de l’Opposante [traduction] « d’un aéronef qui serait fourni en vertu de la marque de commerce VISION a eu lieu en novembre 2006 à un acheteur au Québec »; à la date de production du 31 décembre 2015, l’Opposante avait vendu huit [traduction] « positions d’aéronef au Canada en liaison avec la marque de commerce VISION » [para 8 et 10, Pièce A].

·  M. Landherr affirme que, compte tenu de la nature, de la spécialisation et du prix des biens d’aéronef en question, la vente de huit aéronefs sur une période de dix ans sur le marché canadien [traduction] « est considérée comme une réussite dans l’industrie des aéronefs personnels » [para 9].

·  La Pièce A de l’Affidavit est une feuille de calcul qui indique les huit prétendues ventes d’aéronefs VISION à des clients canadiens entre novembre 2006 et la fin de 2015 [para 10];

·  La Pièce B de l’Affidavit est constituée de bons de commande et de documents connexes concernant [traduction] « certaines » des ventes susmentionnées aux clients canadiens [para 11]. Le [traduction] « no de modèle/de série » dans deux des ordonnances est « CIRRUS VISION » ou « Cirrus Vision », alors que les autres documents affichent « THE – JET BY CIRRUS » ou n’ont pas de référence à « VISION ». Je remarque également que le [traduction] « lieu de livraison » sur cinq des documents de commande est identifié comme une adresse à Duluth, au Minnesota.

·  La dernière page de la Pièce B semble être les modalités des bons de commande, notamment :

TRANSFERT DE TITRE/RISQUE DE PERTE
4.01 Au moment de la livraison après la réception du prix d’achat complet, y compris les ajustements, Cirrus transférera le titre de l’Aéronef à l’Acheteur avec un [traduction] « certificat de navigabilité de la FAA » et un [traduction] « Contrat de vente d’aéronef de la FAA ». CIRRUS garantit que l’aéronef sera libre et quitte de toutes les charges, à l’exception de celles créées par ou pour l’Acheteur.
4.02 Le risque de perte doit être transmis de Cirrus à l’Acheteur au moment de la signature du document [traduction] « Acceptation finale » de Cirrus au moment de la livraison.

·  L’Opposante commercialise ses aéronefs partout dans le monde, y compris par l’entremise de centres de vente situés au Canada et de la distribution de brochures et de dépliants publicitaires d’aéronefs VISION [para 12 à 14, Pièces C à E]

·  L’aéronef VISION de l’Opposante a été promu dans des publications de l’industrie, y compris dans la publication Plane & Pilot, qui [traduction] « annonçait JET VISION de CIRRUS comme l’“Avion de l’année” en 2017 » [para 15 et 16, Pièces F à H];

·  L’Opposante a assisté à plusieurs événements de marketing et salons professionnels au Canada de 2010 à 2014 pour promouvoir ses aéronefs, y compris ceux vendus en liaison avec la marque de commerce VISION [para 17];

·  L’aéronef VISION de l’Opposante est également promu sur son site Web, www.cirrusaircraft.com [para 18, Pièce I];

·  La marque VISION de l’Opposante est également promue par la distribution de vestes, de chapeaux et de tasses de café portant la marque de commerce VISION [para 19, Pièce J].

[13]  À titre préliminaire, la Requérante fait remarquer que l’Affidavit n’indique pas que M. Landherr a une connaissance personnelle des faits qui s’y trouvent, et soutient que la preuve de l’Opposante est irrecevable et qu’elle n’a aucun poids [citant à l’appui, Espanola Alimetaria Alcoyana, SA c Aceites Del Sur SA (2005), 51 CPR (4th) 123 (COMC) à 125; et Econospan Structures Corp c Pioneer Steel Manufacturing Ltd (2010), 81 CPR (4th) 393 (COMC)] [Observations écrites de la Requérante, para 5 et 17 à 19]. Comme nous l’expliquons plus loin, je conviens qu’il y a un certain degré de flou dans l’Affidavit. Toutefois, dans la mesure où la Requérante affirme qu’[traduction] « il est peu probable que M. Landherr ait une connaissance quelconque des renseignements fournis dans son affidavit », étant donné la position de M. Landherr auprès de la société et la nature des déclarations contenues dans son affidavit, je ne considère pas l’affidavit de M. Landherr comme un ouï-dire inadmissible. Les préoccupations de la Requérante peuvent être résolues par le poids accordé aux déclarations de M. Landherr et la restriction nécessaire à l’égard de la possibilité de tirer des conclusions favorables à une partie lorsqu’elle est confrontée à une preuve aussi vague.

Fardeau de preuve et fardeau ultime

[14]  Avant d’examiner les motifs d’opposition, j’estime nécessaire de rappeler certaines exigences de base en ce qui concerne i) le fardeau de preuve dont doit s’acquitter une opposante, soit celui d’étayer les allégations formulées dans la déclaration d’opposition, et ii) le fardeau ultime qui incombe à une requérante, soit celui de prouver sa cause.

[15]  En ce qui concerne le point i), conformément aux règles de preuve habituelles, l’opposant a le fardeau de preuve initial d’établir les faits sur lesquels il appuie les allégations formulées dans la déclaration d’opposition [John Labatt Ltd c Molson Companies Ltd, 1990 CanLII 1053, 30 CPR (3d) 293 (CF 1re inst)]. La présence d’un fardeau de preuve imposé à l’opposant à l’égard d’une question donnée signifie que, pour que cette question soit prise en considération, il doit exister une preuve suffisante pour permettre de conclure raisonnablement à l’existence des faits allégués à l’appui de cette question.

[16]  En ce qui concerne le point ii), le requérant a le fardeau ultime de démontrer que la demande d’enregistrement ne contrevient pas aux dispositions de la Loi ainsi que l’allègue l’opposant dans sa déclaration d’opposition (dans le cas des allégations à l’égard desquelles l’opposant s’est acquitté de son fardeau de preuve). La présence d’un fardeau ultime qui incombe au requérant signifie que, s’il est impossible d’arriver à une conclusion déterminante une fois que toute la preuve a été examinée, la question doit être tranchée à l’encontre du requérant.

Motifs d’opposition fondés sur l’article 30 – Exigences de la demande

[17]  Comme il est indiqué ci-dessus, l’Opposante a retiré des motifs d’opposition fondés sur l’article 30 de la Loi. En effet, l’Opposante n’a présenté aucune preuve à l’appui de ses motifs d’opposition liés au respect de l’article 30a), 30e) ou 30i) de la Loi.

[18]  Par conséquent, les motifs d’opposition fondés sur l’article 30 de la Loi sont rejetés sommairement.

Motif d’opposition fondés sur l’article 16 – Absence de droit à l’enregistrement

[19]  L’Opposante fait valoir que la Requérant n’est pas la personne ayant droit à l’enregistrement de la Marque en vertu de l’article 16(3)a) de la Loi parce qu’à la date de production de la demande, la Marque créait de la confusion avec la marque de commerce VISION de l’Opposante qui avait déjà été employée au Canada par l’Opposante. À cet égard, l’Opposante allègue que les produits visés par la demande chevauchent les produits VISION de l’Opposante, à savoir [traduction] « les aéronefs et leurs éléments structurels; les avions et leurs éléments structurels; l’avion, et tous les produits et services qui s’y rapportent ».

[20]  Pour s’acquitter de son fardeau initial à l’égard d’un motif d’opposition fondé sur l’emploi antérieur d’une marque de commerce en vertu de l’article 16(3)a), l’Opposante devait démontrer l’emploi de sa marque de commerce VISION au Canada avant la date pertinente, soit le 31 décembre 2015.

[21]  La définition d’« emploi » est énoncée à l’article 4 de la Loi, comme suit :

4(1) Une marque de commerce est réputée employée en liaison avec des produits si, lors du transfert de la propriété ou de la possession de ces produits, dans la pratique normale du commerce, elle est apposée sur les produits mêmes ou sur les emballages dans lesquels ces produits sont distribués, ou si elle est, de toute autre manière, liée aux produits à tel point qu’avis de liaison est alors donné à la personne à qui la propriété ou possession est transférée.

4(2) Une marque de commerce est réputée employée en liaison avec des services si elle est employée ou montrée dans l’exécution ou l’annonce de ces services.

4(3) Une marque de commerce mise au Canada sur des produits ou sur les emballages qui les contiennent est réputée, quand ces produits sont exportés du Canada, être employée dans ce pays en liaison avec ces produits.

[22]  Dans leurs observations, les deux parties se sont concentrées sur la définition de l’emploi en vertu de l’article 4(1) de la Loi, en ce qui concerne l’aéronef de l’Opposante.

[23]  Pour sa part, la Requérante soutient que l’Opposante ne s’est pas acquittée de son fardeau initial parce qu’elle n’a pas démontré l’emploi de la marque de commerce VISION au sens de l’article 4(1) de la Loi en ce qui a trait au transfert de produits au Canada [para 20 à 24]. À cet égard, la Requérante fait remarquer qu’il n’y a aucune affirmation selon laquelle la Marque figure sur les produits d’aéronef de l’Opposante; que l’Affidavit n’inclut aucune photographie des produits de l’Opposante présentant la marque de commerce VISION; que l’Affidavit n’indique pas que les bons de commande ou que du matériel promotionnel (qui peuvent avoir présenté la marque de commerce VISION) accompagnaient les produits de l’Opposante lorsqu’ils ont été livrés à des acheteurs au Canada; et qu’en tout état de cause, il n’y a aucune preuve de transfert au Canada avant la date pertinente.

[24]  Je suis d’accord avec la Requérante pour dire que la preuve concernant l’association de la marque de commerce VISION aux produits de l’opposante est, au mieux, faible. Comme l’a fait remarquer la Requérante, bien que la marque de commerce VISION soit présentée sur le matériel publicitaire, l’Affidavit n’est pas clair quant à la mesure dans laquelle ce matériel a été distribué au Canada. On peut se demander si ces matériaux ont été utilisés ou mentionnés par les acheteurs canadiens au moment de faire leur commande de l’aéronef de l’Opposante. En ce qui a trait aux bons de commande, d’après la preuve dont je suis saisi, je ne suis pas d’accord avec l’Opposante pour dire que la présentation de CIRRUS VISION en texte brut sur ces bons de commande constitue la présentation de la marque de commerce VISION avec la « marque maison » de la Propriétaire, CIRRUS. CIRRUS n’est pas distinguée du mot VISION d’une manière significative, et bien que l’Affidavit indique que l’Opposante commercialise des aéronefs en vertu d’autres marques de commerce, la mesure dans laquelle CIRRUS est utilisé par l’Opposante comme marque maison n’est pas claire, tout comme la mesure dans laquelle les consommateurs canadiens la reconnaîtraient comme telle.

[25]  En effet, les questions relatives à la question de savoir si la marque de commerce VISION était associée aux produits de l’Opposante sont attribuables à une question plus fondamentale : l’absence de preuve de transfert des produits d’aéronef de l’Opposante. De toute évidence, aucun transfert de possession de l’aéronef de l’Opposante n’a eu lieu au Canada avant la date pertinente. Néanmoins, dans ses observations, l’Opposante soutient que les bons de commande montrent des transferts de biens qui satisfont aux exigences du paragraphe 4(1) de la Loi. L’Opposant cite Hudson’s Bay Co c Sklar-Peppler Furniture Corp (2007), 60 CPR (4th) 174 (COMC), à l’appui de sa position selon laquelle un certain droit de propriété sur l’aéronef en question a été transféré aux clients canadiens en raison des paiements reflétés dans les bons de commande. Dans cette décision, le registraire a maintenu l’enregistrement du sujet conformément à l’article 45 de la Loi. La preuve dans cette affaire a montré que des transferts avaient eu lieu au cours de la période pertinente et a vérifié si le matériel publicitaire et promotionnel utilisé pour commander du mobilier personnalisé constituait un emploi de la marque de commerce en question. L’Opposante fait valoir que les bons de commande et le matériel publicitaire dans les pièces sont semblables aux matériaux dans cette affaire et, en particulier, renvoie au paragraphe suivant de cette décision [à la page 76] :

L’affidavit de M. Modjeski atteste que la marque en cause apparaît sur les dépliants et la documentation qui sont exposés dans les commerces des détaillants et utilisés au moment où les consommateurs commandent et achètent les marchandises. Je remarque que cette documentation fait état de la marque de commerce et indique les numéros de modèle des meubles. Étant donné que les meubles liés à la marque de commerce sont des « meubles personnalisés », je suis disposée à conclure, à la lumière des faits particuliers de l’espèce, que les dépliants et la documentation sur les produits, qui arborent la marque de commerce en cause et qui sont utilisés par les consommateurs au moment où ils commandent et achètent les marchandises, donnent à l’acheteur l’avis de liaison requis entre la marque de commerce et les marchandises. À mon avis, dans la mesure où il y a tout lieu de penser qu’un accord est conclu entre le vendeur et l’acheteur des marchandises au moment de l’achat de celles‑ci, je reconnais que certains droits de propriété dans le meuble sont transférés à l’acheteur à cette étape. Par conséquent, je conviens que l’emploi établi en l’occurrence satisfait aux exigences du paragraphe 4(1) de la Loi.

[26]  Toutefois, étant donné que la propriétaire inscrite dans cette affaire « a vendu un grand nombre de meubles de marque HOMESTYLES partout au Canada au cours de la période pertinente » [à la page 174], il était implicite que les produits en question i) existaient et ii) existaient au Canada pendant la période pertinente. Par conséquent, tout transfert pertinent de biens s’est produit pendant que les produits étaient au Canada.

[27]  Ici, comme l’a fait remarquer la Requérante, l’Opposante a simplement vendu des [traduction] « position d’achat » avant la date pertinente. Rien n’indique que l’aéronef de l’Opposante avait déjà été fabriqué avant la date pertinente, et encore moins qu’il était présent au Canada. Aux fins de l’« emploi » en vertu de l’article 4 de la Loi, je ne considère pas que la vente de [traduction] « positions d’achat » constitue un transfert de bien dans des produits lorsque ces produits n’existent pas. De plus, pour qu’un transfert ait eu lieu au Canada, c’est l’emplacement des produits dans lesquelles la possession ou les biens sont transférés qui est déterminant, et non nécessairement l’emplacement de l’acheteur.

[28]  Quoi qu’il en soit, en l’espèce, les modalités relatives au titre de l’aéronef, reproduites ci‑dessus, contredisent les observations de la Propriétaire. Il semblerait que le transfert de propriété ne se fasse qu’au moment du transfert de possession, avec de tels transferts se produisant au Minnesota.

[29]  Étant donné qu’il n’y a aucune preuve de transfert des produits de l’Opposante au Canada avant la date pertinente (en liaison avec la marque de commerce VISION ou autrement), je ne suis pas convaincu que l’Opposante a satisfait à son fardeau de preuve initial relativement à ce motif d’opposition.

[30]  Je signale que la preuve de l’Opposante n’aurait pas satisfait aux exigences relatives à la « révélation » prévues à l’article 5 de la Loi, même si elle avait plaidé que sa marque de commerce VISION avait déjà été révélée au Canada. À cet égard, la preuve démontre que la marque de commerce VISION de l’Opposante a été employée dans un pays de l’Union avant la date pertinente, et je conclurais également que la preuve de l’Opposante est loin d’établir qu’une telle marque était [traduction] « bien connue » au Canada de toute façon.

[31]  De plus, même si j’acceptais que la déclaration d’opposition ait été plaidée de façon à inclure les services de [traduction] « vente d’aéronefs » ou d’autres services semblables, la preuve de présentation de la marque de commerce VISION serait inférieure à la preuve d’emploi au Canada en liaison avec de tels services avant la date pertinente.

[32]  À cet égard, premièrement, la preuve de la distribution réelle du matériel publicitaire et de marketing au Canada est, au mieux, vague. Plus important encore, pour que la présentation d’une marque de commerce dans la publicité constitue un emploi en vertu du paragraphe 4(2) de la Loi, les services doivent pouvoir être exécutés au Canada [Wenward (Canada) Ltd c Dynaturf Co (1976), 28 CPR (2d) 20 (COMC)]. En l’espèce, l’Opposante n’a pas pu procéder à la vente de son aéronef – aucun n’existait pour la vente avant la date pertinente. Au plus, il acceptait des [traduction] « postes à l’achat » ou des acomptes pour la vente d’aéronefs, ce qui ne se produirait que plus tard lorsque l’Opposante aurait fini de développer l’aéronef et obtenu les approbations nécessaires de la FAA. Même à ce moment-là, de telles ventes ne pouvaient être réalisées qu’au Minnesota, le lieu de livraison apparent de n’importe quel aéronef.

[33]  Bien que l’Opposante ait accepté des dépôts avant la date pertinente, d’après la preuve de l’Opposante, il était clair que l’Opposante n’était pas en mesure d’effectuer le service de [traduction] « vente d’aéronefs » ou de services similaires jusqu’en 2016.

[34]  Compte tenu de ce qui précède, le motif d’opposition fondé sur l’absence de droit à l’enregistrement.

[35]  Même si j’acceptais que l’Opposante ait employé la marque de commerce CIRRUS VISION en liaison avec l’aéronef de l’Opposante vendu au Canada (selon son apparence sur certains bons de commande prouvés), je conclurais que le degré de ressemblance entre les marques de commerce des parties en apparence, lorsqu’elles sont fondées et dans les idées suggérées, favorisent la Requérante. À cet égard, i) la première partie importante des deux marques de commerce diffère; ii) bien que les deux marques intègrent le mot VISION, il s’agit d’un mot du dictionnaire ayant un caractère distinctif inhérent faible iii) et la preuve de l’emploi et de la présentation réels de la marque CIRRUS VISION de l’Opposante au Canada est minime.

[36]  Par conséquent, je ne conclurais pas à une probabilité de confusion à l’égard de la Marque et de CIRRUS VISION en fonction de la preuve dont je dispose, nonobstant du chevauchement dans la nature de certains des produits visés par la demande et le risque de chevauchement dans les transactions des parties.

Motif d’opposition fondé sur l’article 2 – Absence de caractère distinctif

[37]  L’Opposante plaide également que la Marque n’est pas distinctive au sens de l’article 2 de la Loi puisqu’elle n’est pas adaptée pour faire la distinction des produits de la Requérante des produits de l’Opposante en raison de l’emploi antérieur et continue de l’Opposante au Canada de la marque de commerce VISION.

[38]  La date pertinente pour ce motif d’opposition est la date de production de l’opposition, à savoir, le 24 avril 2017 [Metro-Goldwyn-Mayer Inc c Stargate Connections Inc, 2004 CF 1185, 34 CPR (4th) 317, au para 25].

[39]  Afin de s’acquitter du fardeau de preuve initial au titre de ce motif d’opposition, une opposante doit démontrer que sa marque de commerce avait une réputation importante, significative ou suffisante au Canada en liaison avec les produits ou les services pertinents en date de la production de l’opposition [voir Bojangles’ International LLC c Bojangles Café Ltd, 2006 CF 657, au para 34].

[40]  À la lumière de la preuve soumise et de mes constatations ci-dessus, je ne suis pas convaincu que l’Opposante a satisfait à son fardeau de preuve initial relativement à ce motif.

[41]  Par conséquent, le motif d’opposition fondé sur l’absence de caractère distinctif est rejeté.

Conclusion

[42]  Compte tenu de tout ce qui précède et conformément à l’article 38(1) de la Loi et conformément aux pouvoirs qui m’ont été délégués en vertu de l’article 63 de la Loi, je rejette l’opposition.

 

Andrew Bene

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

Traduction certifiée conforme

Marie-France Denis

 


 

 

COMMISSION DES OPPOSITIONS DES MARQUES DE COMMERCE

OFFICE DE LA PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE DU CANADA

COMPARUTIONS ET AGENTS INSCRITS AU DOSSIER

___________________________________________________

DATE DE L’AUDIENCE : 2020-06-08

COMPARUTIONS

Kevin Graham

Pour l’Opposante

Aucune comparution

Pour la Requérante

AGENTS AU DOSSIER

Stikeman Elliott S.E.N.C.R.L., srl/LLP

Pour l’Opposante

Ridout & Maybee LLP

Pour la Requérante

 

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