Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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Référence : 2020 COMC 100

Date de la décision : 2020-08-31

[TRADUCTION CERTIFIÉE,

NON RÉVISÉE]

DANS L’AFFAIRE DE LA PROCÉDURE DE RADIATION EN VERTU DE L’ARTICLE 45

 

Loopstra Nixon LLP

Partie requérante

et

 

Sulaiman Al-Abdul Karim & Bros. Co. W.L.L.

Propriétaire inscrite

 

LMC 467,276 pour SWAN IN A CIRCLE DESIGN

LMC 650,295 pour ALWAZAH Design

Enregistrements

Introduction

[1]  À la demande de Loopstra Nixon LLP (la Partie requérante), le registraire des marques de commerce a émis un avis en vertu de l’article 45 de la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, c T-13 (la Loi) à Sulaiman Al-Abdul Karim & Bros. Co. W.L.L. (la Propriétaire), la propriétaire inscrite de l’enregistrement no LMC 467,276 pour la marque de commerce SWAN IN A CIRCLE DESIGN, et l’enregistrement no LMCSSQW 650,295 pour ALWAZAH Design (collectivement, les Marques). L’avis concernant SWAN IN A CIRCLE DESIGN (la Marque SWAN) a été émis le 11 septembre 2017, et l’avis concernant ALWAZAH Design (la Marque ALWAZAH) a été émis le 8 septembre 2017.

[2]  Les Marques sont enregistrées pour emploi en liaison avec les produits « Thé » visés par l’enregistrement.

[3]  Pour les raisons qui suivent, je conclus qu’il y a lieu de maintenir les enregistrements.

[4]  Les avis enjoignaient à la Propriétaire d’indiquer, à l’égard des produits visés par les enregistrements, si les Marques ont été employées au Canada à un moment quelconque au cours des trois années précédant immédiatement la date de chaque avis et, dans la négative, qu’elle précise la date à laquelle les Marques ont ainsi été employées en dernier lieu et la raison de son défaut d’emploi depuis cette date. En l’espèce, la période pertinente pour démontrer l’emploi de la Marque SWAN s’étend du 11 septembre 2014 au 11 septembre 2017, et la période pertinente pour établir l’emploi de la Marque ALWAZAH s’étend du 8 septembre 2014 au 8 septembre 2017.

[5]  La définition pertinente d’emploi en liaison avec les produits est énoncée à l’article 4 de la Loi comme suit :

4(1) Une marque de commerce est réputée employée en liaison avec des produits si, lors du transfert de la propriété ou de la possession de ces produits, dans la pratique normale du commerce, elle est apposée sur les produits mêmes ou sur les emballages dans lesquels ces produits sont distribués, ou si elle est, de toute autre manière, liée aux produits à tel point qu’un avis de liaison est alors donné à la personne à qui la propriété ou possession est transférée.

[6]  Il est bien établi que les simples déclarations selon lesquelles une marque de commerce est employée ne sont pas suffisantes pour établir l’emploi dans le cadre d’une procédure en vertu de l’article 45 [Plough (Canada) Ltd c Aerosol Fillers Inc (1980), 53 CPR (2d) 62 (CAF)]. Bien que le niveau de preuve requis pour établir l’emploi dans le cadre de cette procédure soit peu élevé [Woods Canada Ltd c Lang Michener (1996), 71 CPR (3d) 477 (CF 1re inst)] et qu’il ne soit pas nécessaire de produire une surabondance d’éléments de preuve [Union Electric Supply Co Ltd c Registrar of Trade Marks (1982), 63 CPR (2d) 56 (CF 1re inst)], il n’en faut pas moins présenter des faits suffisants pour permettre au registraire de conclure que la marque de commerce a été employée en liaison avec chacun des services spécifiés dans l’enregistrement pendant de la période pertinente [John Labatt Ltd c Rainier Brewing Co (1984), 80 CPR (2d) 228 (CAF)].

[7]  En réponse à chacun des avis du registraire, la Propriétaire a produit un affidavit de Hani Teebi, établi sous serment le 29 mars 2018. Je remarque que les deux affidavits sont essentiellement identiques. Les deux parties ont produit des représentations écrites, qui sont substantiellement semblables pour les deux procédures. Les deux parties étaient représentées à une audience.

PREUVE DE LA PROPRIÉTAIRE

[8]  M. Teebi déclare qu’il est le directeur de Canary Trading Company, Inc. (Canary), la licenciée au Canada de la Propriétaire, une société du Koweït, depuis le 1er avril 2014. Il déclare qu’il a été autorisé par la Propriétaire et Canary à déposer son affidavit, et déclare que les faits et les renseignements contenus dans son affidavit sont personnellement connus de lui ou ont été obtenus à partir des dossiers et registres de Canary ou de la Propriétaire, auxquels M. Teebi a accès.

[9]  M. Teebi explique que les produits visés par l’enregistrement sont produits, distribués et vendus par la Propriétaire dans le cadre d’une entente tripartite entre la Propriétaire, Canary, et Finlay Tea Solutions Columbo (PVT) Ltd. (Finlays), selon laquelle Finlays cultive, produit, et emballe le thé au Sri Lanka sous le contrôle de la Propriétaire, puis exporte les produits vers d’autres pays, y compris le Canada. Le 1er avril 2014, Canary a obtenu une licence de la Propriétaire et de Finlays pour être l’agent, l’importateur, et le distributeur exclusif de thé sous les Marques au Canada. Comme Pièce C à son affidavit, M. Teebi joint une copie d’une lettre de Finlays à Canary indiquant que Canary est désignée à titre d’agent, d’importateur, et de distributeur exclusif de thé sous les Marques au Canada, à compter du 1er avril 2014, pour trois ans. Sous les signatures, le nom de la Propriétaire est indiqué au-dessus du mot « PARTENAIRE ». M. Teebi déclare que [traduction] « Par conséquent, Sulaiman contrôle, directement ou indirectement, les caractéristiques ou la qualité des produits (thé) lorsqu’ils sont utilisés au Canada en liaison avec les [Marques], y compris pendant les [périodes pertinentes] ».

[10]  M. Teebi déclare que l’emballage du thé de la Propriétaire affichait bien en vue les Marques au Canada pendant les périodes pertinentes. Comme Pièce D, il joint des photographies de l’emballage du thé qui affiche bien en vue les deux Marques. Il déclare que ces images sont représentatives de l’emballage du thé vendu ou distribué par Canary pendant la période pertinente. Comme Pièce E, il joint les gros plans de ces photographies montrant que l’emballage identifie la Propriétaire comme propriétaire des Marques et Canary comme l’« AGENT EXCLUSIF AUX ÉTATS-UNIS ET AU CANADA ».

[11]  M. Teebi explique que, généralement, Canary vend le thé de la Propriétaire à des grossistes ou des distributeurs canadiens, qui revendent ensuite les produits aux épiceries canadiennes pour les vendre au public. Ces grossistes ou distributeurs comprennent Groupe Phoenicia Inc. (Phoenicia) au Québec et Odeco Trading Inc. (Odeco) en Ontario. Comme Pièces G et I, il joint des factures commerciales indiquant l’exportation de milliers de cartons de thé vers Montréal. Je note que les factures indiquent que ces thés ont été vendus par Finlays à Canary, avec un chiffre total des ventes de plusieurs dizaines de milliers de dollars. Si l’une des factures fait également référence à Phoenicia, je constate que cette facture est postérieure aux périodes pertinentes. Comme Pièce H, M. Teebi joint des photographies des cartons dans lesquels ce thé est expédié; les deux Marques sont visibles sur ces cartons.

Analyse

[12]  La Partie requérante soutient que la preuve de la Propriétaire est insuffisante pour démontrer l’emploi de l’une ou l’autre de ces Marques en liaison avec les produits visés par l’enregistrement. En particulier, elle soutient qu’il n’y a aucune preuve établissant que M. Teebi a été autorisé par la Propriétaire à présenter des éléments de preuve en son nom, et que la preuve est insuffisante pour établir que tout emploi des Marques par Finlays ou Canary profiterait à la Propriétaire conformément aux exigences de l’article 50 de la Loi. Chaque observation sera examinée à tour de rôle.

[13]  En ce qui concerne la question de savoir si M. Teebi était autorisé par la Propriétaire à fournir des éléments de preuve dans la présente procédure, la Partie requérante note qu’il n’existe aucun document à l’appui de l’affirmation de M. Teebi selon laquelle il a été autorisé par la Propriétaire à déposer l’affidavit. Cependant, il est bien établi que dans une procédure en vertu de l’article 45, [traduction] « le propriétaire de la marque peut fournir au registraire [...] des affidavits [...] signés par lui ou par des tiers » [Canada (Registraire des marques de commerce) c Harris Knitting Mills Ltd (1985), 4 CPR (3d) 488 (CAF), au para 14]. Étant donné que M. Teebi déclare qu’il a été autorisé par la Propriétaire et Canary à déposer les affidavits, et que la Propriétaire a à son tour fourni les affidavits de M. Teebi à titre de preuve dans le cadre de cette procédure, j’accepte le fait qu’il a été autorisé par la Propriétaire à fournir des éléments de preuve dans le cadre de cette procédure.

[14]  En ce qui concerne la question de savoir si cet emploi profitait à la Propriétaire, la Partie requérante soutient que la licence de la Pièce C semble être entre Finlays et Canary, même si la Propriétaire est simplement mentionnée à la fin du document. La Partie requérante soutient que pour conclure que l’emploi profite à la Propriétaire, il faut admettre il y avait au moins deux licences en vigueur, une entre la Propriétaire et Finlays et une seconde entre Finlays et Canary, et que [traduction] « toute conclusion de ce type nécessite un exercice déraisonnable de la foi que les affirmations non étayées du déposant sont vraies ». À cet égard, la Partie requérante soutient qu’il n’y a aucune preuve d’une licence entre la Propriétaire et Finlays de telle sorte que cette dernière puisse autoriser Canary à agir à titre de licenciée de la Propriétaire au Canada, et qu’en conséquence, peu de poids devrait être accordé à la déclaration de M. Teebi selon laquelle le contrôle requis existe.

[15]  En réponse, la Propriétaire soutient que le contrôle requis en vertu de l’article 50 [traduction] « peut être établi par l’inscrit ou le licencié jurant clairement du fait que le contrôle exigé par l’article 50 existe […] ou par la soumission d’une copie de la licence contenant des dispositions concernant le contrôle que l’inscrit exerce sur les caractéristiques et la qualité des marchandises et du service ». En l’espèce, la Propriétaire soutient que M. Teebi a clairement juré du fait que le thé est cultivé, produit et emballé par Finlays sous le contrôle de la Propriétaire conformément à l’entente tripartite entre la Propriétaire, Finlays et Canary.

[16]  En outre, la Propriétaire fait référence à l’article 50(2) de la Loi, qui est libellé comme suit :

Pour l’application de la présente loi, dans la mesure où un avis public a été donné quant à l’identité du propriétaire et au fait que l’emploi d’une marque de commerce fait l’objet d’une licence, cet emploi est réputé, sauf preuve contraire, avoir fait l’objet d’une licence du propriétaire, et le contrôle des caractéristiques ou de la qualité des produits et services est réputé, sauf preuve contraire, être celui du propriétaire.

[17]  Étant donné que l’emballage joint en tant que Pièces D et E identifie clairement la Propriétaire comme étant la propriétaire inscrite des Marques et Canary comme son agent exclusif au Canada, la Propriétaire soutient qu’il existe une présomption que le contrôle requis existe.

[18]  Comme l’a indiqué la Cour fédérale, le propriétaire d’une marque de commerce dispose essentiellement de trois méthodes pour démontrer qu’il exerce le contrôle prévu par l’article 50(1) de la Loi : premièrement, attester clairement qu’il exerce le contrôle exigé; deuxièmement, fournir une preuve démontrant qu’il exerce le contrôle exigé; ou troisièmement, produire une copie du contrat de licence qui prévoit le contrôle exigé [Empresa Cubana Del Tobaco Trading c Shapiro Cohen, 2011 CF 102, au para 84]. En outre, il n’est pas nécessaire de fournir un contrat de licence écrit pour établir l’emploi d’une marque de commerce dans le cadre d’une licence [voir Wells’ Dairy Inc c UL Canada Inc (2000), 7 CPR (4e) 77 (CF 1re inst)].

[19]  En l’espèce, M. Teebi a produit une déclaration claire sous serment selon laquelle la Propriétaire exerce le contrôle requis sur l’emploi des Marques par Finlays et Canary. Cela est suffisant aux fins d’une procédure prévue à l’article 45. Je ne suis pas prêt à accorder moins de poids aux déclarations de M. Teebi simplement parce que la structure de licence comprend un tiers. À cet égard, je fais remarquer que M. Teebi décrit clairement l’entente de licence entre la Propriétaire, Canary et Finlays et explique que les sources de ses renseignements comprennent ses connaissances personnelles ainsi que les dossiers et registres de Canary et de la Propriétaire, auxquels il a accès. En l’absence d’une preuve contraire, il convient d’admettre sans réserve les déclarations faites par un déposant et d’accorder une crédibilité substantielle aux déclarations contenues dans un affidavit produit dans le cadre de la procédure prévue à l’article 45 [Oyen Wiggs Green & Mutala LLP c Atari Interactive Inc, 2018 COMC 79, au para 25].

[20]  En l’espèce, il n’y a rien dans les éléments de preuve qui me ferait douter de l’affirmation de M. Teebi selon laquelle une entente tripartite existait entre la Propriétaire, Finlays et Canary aux termes de laquelle la Propriétaire contrôle la production et l’emballage des produits par Finlays et l’emploi de la Marque par Canary en liaison avec les produits au Canada. En outre, les affirmations de M. Teebi sont appuyées par des preuves documentaires comme la lettre de la Pièce C faisant référence aux trois parties, ainsi que l’emballage présenté à la Pièce D et à la Pièce E identifiant la Propriétaire comme la propriétaire des marques et Canary comme son agent exclusif. Compte tenu de cette preuve et de la déclaration sous serment de M. Teebi selon laquelle la Propriétaire a exercé le contrôle requis, je suis convaincu que tout emploi des Marques conformément à cette entente au Canada pendant la période pertinente profiterait à la Propriétaire.

[21]  Compte tenu des factures des Pièces G et I montrant les ventes du thé par Finlays à Canary au Canada au cours de la période pertinente, ainsi que des photographies de la Pièce H montrant que les deux marques étaient affichées sur l’emballage de ces produits, je suis convaincu que la Propriétaire a démontré l’emploi des Marques en liaison avec les transferts de Finlays à Canary dans la pratique normale du commerce au Canada pendant la période pertinente. À cet égard, je souligne que la loi indique clairement que l’emploi d’une marque de commerce à n’importe quel moment de la chaîne de distribution suffit à démontrer l’emploi au sens de l’article 4 de la Loi, et que cet emploi profitera au propriétaire à condition que les produits portant la marque de commerce proviennent du propriétaire [Manhattan Industries Inc c Princeton Manufacturing Ltd (1971), 4 CPR (2d) 6 (CF 1re inst); Osler, Hoskin & Harcourt c Canada Registraire des marques de commerce) (1997), 77 CPR (3d) 475 (CF 1re inst)].

[22]  Par conséquent, je suis convaincu que la Propriétaire a établi l’emploi des Marques en liaison avec les produits visés par l’enregistrement au sens des articles 4 et 45 de la Loi.

DÉCISION

[23]  En conséquence, dans l’exercice des pouvoirs qui m’ont été délégués en vertu des dispositions de l’article 63(3) de la Loi, les deux enregistrements seront maintenus selon les dispositions de l’article 45 de la Loi.

 

 

G.M. Melchin

Agent d’audience

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

Traduction certifiée conforme

Hortense Ngo


COMMISSION DES OPPOSITIONS DES MARQUES DE COMMERCE

OFFICE DE LA PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE DU CANADA

COMPARUTIONS ET AGENTS INSCRITS AU DOSSIER

___________________________________________________

DATE DE L’AUDIENCE 4 août 2020

COMPARUTIONS

Sander Gelsing

Pour la Propriétaire inscrite

Matthew Thurlow

Pour la Partie requérante

AGENTS AU DOSSIER

Warren Sinclair LLP

Pour la Propriétaire inscrite

Loopstra Nixon LLP

Pour la Partie requérante

 

 

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