Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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Référence : 2020 COMC 125

Date de la décision : 2020-10-30

[TRADUCTION CERTIFIÉE,

NON RÉVISÉE]

DANS L’AFFAIRE DE L’OPPOSITION

 

Eagle’s Flight, Creative Training Excellence Inc.

Opposante

et

 

Yara International ASA

Requérante

 

1,724,316 pour SAFE BY CHOICE et Dessin

 

Demande

Introduction

[1]  Eagle’s Flight, Creative Training Excellence Inc. (l’Opposante) s’oppose à l’enregistrement de la marque de commerce SAFE BY CHOICE et Dessin, présentée ci-dessous (la Marque), qui fait l’objet de la demande no 1,724,316, laquelle a été produite par Yara International ASA (la Requérante).

safe BY CHOICE Design

[2]  Produite le 17 avril 2015, la demande est fondée à la fois sur l’emploi de la Marque au Canada depuis au moins le 1er juin 2013 ainsi que son emploi en Norvège sous l’enregistrement no 282,235, en liaison avec les services suivants :

(1) (a) Gestion des affaires; administration des affaires; tâches administratives, nommément administration et gestion des affaires, gestion d’immeubles de bureaux, gestion de locaux pour bureaux et services de traitement de texte et de dactylographie; conseils aux entreprises dans les domaines de la santé, de la sécurité, de l’environnement; services de soutien aux entreprises en matière de santé, de sécurité et d’environnement; gestion de questions liées à la santé, à la sécurité et à l’environnement; évaluation et analyse des risques, tournées d’inspection de sécurité; (b) formation dans les domaines de la sécurité au travail, des solutions de promotion de la santé au travail et des solutions écologiques au travail; formation dans les domaines de la sécurité au travail, des solutions de promotion de la santé au travail et des solutions écologiques au travail; organisation et tenue de conférences dans les domaines de la sécurité au travail, des solutions de promotion de la santé au travail et des solutions écologiques au travail; (c) services de sécurité pour la protection de biens et de personnes; services personnels et sociaux offerts par des tiers pour répondre aux besoins de personnes, nommément consultation dans le domaine de la sécurité au travail, consultation ayant trait à la réglementation sur la sécurité au travail, consultation dans le domaine des questions de santé au travail et consultation dans le domaine des questions environnementales au travail; inspections de sécurité, nommément inspections de sécurité dans les domaines de la santé, de la sécurité et de l’environnement au travail; services d’enquête et de surveillance ayant trait à la sécurité de personnes et d’entités; études de sécurité, nommément études pour l’évaluation de questions liées à la santé, à la sécurité et à l’environnement.

[3]  La demande a été annoncée dans le Journal des marques de commerce du 16 décembre 2015.

[4]  L’Opposante soutient que (i) la demande n’est pas conforme aux exigences de l’article 30b) de la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, c T-13 (la Loi), (ii) la Marque n’est pas enregistrable selon l’article 12(1)d) de la Loi, (iii) la Requérante n’est pas la personne ayant droit à l’enregistrement de la Marque au titre de l’article 16 de la Loi, et (iv) la Marque n’est pas distinctive au sens de l’article 2 de la Loi. Les trois derniers motifs d’opposition ont trait à la probabilité de confusion entre la Marque et la marque SAFE BY CHOICE de l’Opposante (la Marque de l’Opposante), enregistrée sous le numéro LMC907,505. Une liste complète des produits et services associés à la Marque de l’Opposante est jointe à titre d’Annexe A à la présente décision.

[5]  À titre préliminaire, je fais remarquer que la Loi a été modifiée le 17 juin 2019. Toutes les dispositions de la Loi mentionnées dans la présente décision renvoient à la Loi dans sa version modifiée, à l’exception de celles concernant les motifs d’opposition qui renvoient à la Loi dans sa version antérieure aux modifications (voir l’article 70 de la Loi, qui prévoit que l’article 38(2) de la Loi dans sa version antérieure au 17 juin 2019 s’applique aux demandes annoncées avant cette date).

[6]  Pour les raisons exposées ci-dessous, je rejette la demande.

Le dossier

[7]  L’Opposante a déposé sa déclaration d’opposition le 11 février 2016. Le 10 juin 2016, la Requérante a produit et signifié sa contre-déclaration réfutant tous les motifs d’opposition.

[8]  À l’appui de son opposition, l’Opposante a produit l’affidavit de David Root, assermenté le 11 octobre 2016, ainsi que les Pièces A à I.

[9]  À l’appui de sa demande, la Requérante a produit l’affidavit de Claire Gordon, assermenté le 4 juillet 2017, accompagné de la Pièce A; l’affidavit de Gay Owens, assermenté le 15 août 2017, accompagné de la Pièce A; et l’affidavit de Michael S. Duchesneau, assermenté le 2 août 2017, accompagné des Pièces 1 à 25.

[10]  Aucun des déposants n’a été contre-interrogé sur son affidavit.

[11]  Seule l’Opposante a produit des observations écrites.

[12]  Il n’y a pas eu d’audience.

Le fardeau de preuve incombant à chacune des Parties

[13]  C’est à la Requérante qu’incombe le fardeau ultime de démontrer, selon la prépondérance des probabilités, que sa demande est conforme aux exigences de la Loi. Cela signifie que si une conclusion déterminée ne peut être tirée en faveur de la Requérante après examen de l’ensemble de la preuve, la question doit être tranchée à l’encontre de cette dernière. Toutefois, l’Opposante doit s’acquitter du fardeau de preuve initial en produisant suffisamment d’éléments de preuve admissibles à partir desquels on pourrait raisonnablement conclure à l’existence des faits allégués à l’appui de chaque motif d’opposition [voir John Labatt Limited c The Molson Companies Limited (1990), 30 CPR (3d) 293 (CF 1re inst), à la p. 298].

[14]  Les dates pertinentes relatives aux motifs d’opposition sont les suivantes :

·  articles 38(2)a) et 30b) – date de production de la demande, à savoir le 17 avril 2015 [Georgia-Pacific Corporation/Scott Paper (1984), 3 CPR (3d) 469, à la p. 475 (COMC)];

·  articles 38(2)b) et 12(1)d) – la date de ma décision [voir Park Avenue Furniture Corp c Wickes/Simmons Bedding Ltd (1981), 37 CPR (3d) 413 (CAF)];

·  articles 38(2)c) et 16(1)a) – la date de la première utilisation revendiquée dans la demande, à savoir le 1er juin 2013 [voir Metro-Goldwyn-Mayer Inc c Stargate Connections Inc, 2004 CF 1185, 34 CPR (4th) 317 (CF 1re inst) et article 16(1) de la Loi];

·  articles 38(2)d) et 2 – la date de production de la déclaration d’opposition, en l’espèce le 11 février 2016 [voir Metro-Goldwyn-Mayer, précitée].

Analyse

Motif d’opposition fondé sur l’article 30b)

[15]  L’Opposante a soutenu que la demande n’est pas conforme aux dispositions de l’article 30b) de la Loi, en ce sens que la Requérante n’a pas utilisé la marque de commerce au Canada en liaison avec les services énumérés dans la demande en question depuis au moins le 1er juin 2013, comme il est revendiqué dans la demande.

[16]  Le fardeau initial d’un opposant en vertu de l’article 30b) de la Loi est léger [Tune Masters c Mr P’s Mastertune Ignition Services Ltd (1986), 10 CPR (3d) 84 (COMC), à la p. 89 (COMC)] et il peut être respecté par renvoi non seulement à la preuve de l’opposant, mais également à celle du requérant [voir La Brasserie Labatt Limitée c Les Brasseries Molson, Société en nom collectif (1996), 68 CPR (3d) 216 (CF 1re inst), à la p. 230]. En l’espèce, l’Opposante n’a fourni aucun élément de preuve à l’appui de son motif d’opposition en vertu de l’article 30b), pas plus que la Requérante n’a produit d’éléments de preuve d’emploi de sa marque. En l’absence de toute preuve indiquant que la Requérante n’a pas employé sa Marque au Canada à la date de premier emploi alléguée, la Requérante n’est pas tenue de fournir une preuve positive de cet emploi. Je conclus donc que l’Opposante ne s’est pas acquittée de son fardeau de preuve et je rejette ainsi ce motif.

Motif d’opposition fondé sur l’article 16(1)a)

[17]  L’Opposante a fait valoir que la Requérante n’a pas droit à l’enregistrement de la marque en cause parce qu’à la date de production de la demande, à savoir le 17 avril 2015, la marque de commerce créait de la confusion avec la Marque de l’Opposante, précédemment employée au Canada par l’Opposante en liaison avec les produits et services énumérés à l’Annexe A à cette décision depuis au moins janvier 2012.

[18]  En vertu d’un motif d’opposition fondé sur l’article 16(1)a) de la Loi, l’Opposante a le fardeau initial d’établir que sa marque de commerce alléguée à l’appui de ce motif d’opposition a été employée ou révélée avant la date de premier emploi revendiquée de la Requérante, en l’espèce, le 1er juin 2013, et n’a pas été abandonnée à la date de l’annonce de la demande visant la Marque (en l’espèce, le 16 décembre 2015) [article 16(5) de la Loi].

[19]  Comme il est indiqué ci-dessus, l’Opposante a produit l’affidavit de David Root, le DPF de l’Opposante, au soutien de son opposition.

[20]  Bien que la déclaration d’opposition de l’Opposante invoque une date de premier emploi antérieure, à savoir, depuis au moins en janvier 2012, je remarque que M. Root atteste dans son affidavit que l’Opposante a d’abord employé sa marque de commerce SAFE BY CHOICE au Canada en liaison avec les produits et services de l’Opposante en décembre 2014. Étant donné que la preuve est conforme à cette déclaration assermentée et qu’il n’y a aucune preuve que la marque de commerce SAFE BY CHOICE de l’Opposante a été révélée au Canada avant la date de premier emploi revendiquée de la Requérante, je conclus que l’Opposante ne s’est pas acquittée de son fardeau initial en vertu de ce motif d’opposition.

[21]  Par conséquent, le motif d’opposition fondé sur l’article 16(1)a) est rejeté.

Motif d’opposition fondé sur l’article 12(1)d)

[22]  Le fardeau de preuve initial d’un opposant est satisfait à l’égard d’un motif d’opposition prévu à l’article 12(1)d) si l’enregistrement invoqué est en règle. Le registraire a le pouvoir discrétionnaire de consulter le registre pour confirmer l’existence de tout enregistrement invoqué par un opposant [voir Quaker Oats of Canada Ltd/La Compagnie Quaker Oats du Canada Ltée c Menu Foods Ltd (1986), 11 CPR (3d) 410 (COMC)]. J’ai exercé le pouvoir discrétionnaire du registraire et je confirme que l’enregistrement SAFE BY CHOICE no LMC907,505 de l’Opposante est en règle à la date d’aujourd’hui, laquelle est la date pertinente pour l’appréciation du motif d’opposition fondé sur l’article 12(1)d), comme il a été indiqué précédemment [Park Avenue Furniture Corp, précitée]. L’Opposante s’est donc acquittée de son fardeau de preuve.

[23]   Je dois maintenant déterminer, selon la prépondérance des probabilités, si la Marque risque de créer de la confusion avec la marque de commerce de l’Opposante.

Le test en matière de confusion

[24]  Le critère à appliquer pour déterminer s’il y a confusion est celui de la première impression et du souvenir imparfait. L’article 6(2) de la Loi indique que l’emploi d’une marque de commerce crée de la confusion avec une autre marque de commerce lorsque l’emploi des deux marques de commerce dans la même région serait susceptible de faire conclure que les produits liés à ces marques de commerce sont fabriqués, vendus, donnés à bail ou loués, ou que les services liés à ces marques sont loués ou exécutés, par la même personne, que ces produits ou services soient ou non de la même catégorie générale.

[25]  Dans l’application du test en matière de confusion, le registraire doit tenir compte de toutes les circonstances entourant l’affaire, y compris celles qui sont expressément énumérées à l’article 6(5) de la Loi, à savoir a) le caractère distinctif inhérent des marques de commerce et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues; b) la période pendant laquelle les marques de commerce ont été en usage; c) le genre de produits, services ou entreprises; d) la nature du commerce; e) le degré de ressemblance entre les marques de commerce dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’elles suggèrent. La liste de ces critères n’est pas exhaustive et la valeur probante de chacun peut varier [voir, en général, Mattel, Inc c 3894207 Canada Inc, 2006 CSC 22, 1 RCS 772, au para 54; Veuve Clicquot Ponsardin c Boutiques Cliquot Ltée, 2006 CSC 23, 49 CPR (4th) 401; et Masterpiece Inc c Alavida Lifestyles Inc, 2011 CSC 27, 92 CPR (4th) 361 (Masterpiece)].

Article 6(5)e) – le degré de ressemblance entre les marques de commerce dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’elles suggèrent

[26]  Dans la plupart des cas, le facteur le plus important pour trancher la question de la confusion est le degré de ressemblance entre les marques de commerce dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’elles suggèrent, et les autres facteurs jouent un rôle secondaire [voir Beverley Bedding & Upholstery Co c Regal Bedding & Upholstering Ltd (1980), 47 CPR (2d) 145, (CF 1re inst), conf. par (1982), 60 CPR (2d) 70 (CAF)].

[27]  Dans Masterpiece, la Cour suprême du Canada a examiné l’importance de l’article 6(5)e) dans l’analyse de la probabilité de confusion comme suit au paragraphe 49 :

[…] il arrive souvent que le degré de ressemblance soit le facteur susceptible d’avoir le plus d’importance dans l’analyse relative à la confusion, et ce même s’il est mentionné en dernier lieu au par. 6(5) […] si les marques ou les noms ne se ressemblent pas, il est peu probable que l’analyse amène à conclure à la probabilité de confusion même si les autres facteurs tendent fortement à indiquer le contraire. En effet, ces autres facteurs ne deviennent importants que si les marques sont jugées identiques ou très similaires […] En conséquence, certains prétendent que, dans la plupart des cas, l’étude de la ressemblance devrait constituer le point de départ de l’analyse relative à la confusion […]

[28]  Compte tenu de ce qui précède, j’ai choisi de commencer mon analyse en examinant l’article 6(5)e).

[29]  La partie la plus importante des marques de commerce des parties, c’est-à-dire les éléments nominaux, est identique. De plus, je ne suis pas d’avis pas que le dessin de la Marque de la Requérante diminue le degré de ressemblance, parce qu’il renforce simplement l’idée que la Marque est liée aux produits et services associés au milieu de travail. J’en arrive à cette conclusion après avoir examiné la totalité des marques des parties et évalué leur effet sur l’ensemble des consommateurs moyens.

[30]  Ce facteur favorise donc fortement l’Opposante.

Article 6(5)a) – le caractère distinctif inhérent des marques et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues

[31]  L’examen global du facteur de l’article 6(5)a) comporte une combinaison de caractères distinctifs inhérents et acquis des marques des parties.

[32]  L’Opposante fait valoir que les marques des deux parties présentent un minimum de caractère distinctif inhérent en ce sens que les marques dans leur ensemble ne décrivent pas clairement les caractéristiques ou la qualité des produits ou services de l’une ou l’autre partie, tout en reconnaissant que le mot SAFE peut être quelque peu suggestif.

[33]  La Requérante, de son côté, n’a pas présenté d’observations, mais a fourni des éléments de preuve de définitions selon le dictionnaire des mots SAFE et CHOICE, qui appuient la position de l’Opposante quant au caractère distinctif inhérent.

[34]  Même si je conviens que les marques des parties dans leur ensemble ne sont pas clairement descriptives, je remarque que les produits et services des parties ont trait au maintien de la sécurité des employés ou des travailleurs, ou de la sécurité au travail, et que, par conséquent, le mot SAFE est descriptif. Les marques des parties sont aussi constituées de mots ordinaires du dictionnaire, et à ce titre, je considère qu’elles ne possèdent qu’un léger degré de caractère distinctif inhérent. Bien que la Marque de la Requérante incorpore un élément graphique, ce dernier n’est pas trop distinctif, puisqu’il s’agit de silhouettes de travailleurs et qu’il vise donc des produits et services liés au milieu de travail. Par conséquent, et comme les parties les plus importantes des marques des parties sont identiques, il me semble raisonnable de conclure que les marques de commerce des parties ont un caractère distinctif inhérent presque similaire.

[35]  En tout état de cause, il est possible de renforcer une marque de commerce en faisant en sorte qu’elle devienne connue au Canada par sa promotion ou son emploi.

[36]  La Requérante n’a fourni aucune preuve de l’emploi ou de la promotion de sa Marque.

[37]  En revanche, en ce qui concerne l’emploi et la promotion de la marque de commerce de l’Opposante, M. Root affirme que la marque a été employée pour la première fois au Canada en liaison avec le programme de formation par l’expérience de l’Opposante et le matériel pédagogique connexe en décembre 2014. De plus, M. Root précise ce qui suit :

·  une photographie d’une partie du matériel pédagogique SAFE BY CHOICE de l’Opposante portant la marque de commerce en question (Pièce D);

·  une photocopie d’autres documents de formation SAFE BY CHOICE (y compris des manuels et des guides de compte rendu), qui arborent la marque de commerce (Pièce E);

·  des exemples de pages du site Web de l’Opposante arborant la marque de commerce SAFE BY CHOICE et décrivant les services de l’Opposante, y compris les brochures et les vidéos qui, selon lui, peuvent être téléchargées (Pièces F, G et H);

·  les chiffres de ventes pour les années 2014 à 2016 au Canada (ainsi que des chiffres distincts pour les États-Unis et l’étranger) pour les recettes provenant des ventes et de la livraison des services SAFE BY CHOICE et des documents connexes de l’Opposante. Au Canada, le total s’élève à près de 170 000 $;

·  deux exemples de factures, datées en 2014, des ventes des services SAFE BY CHOICE et de documents connexes au Canada (Pièce I);

·  les chiffres mondiaux de publicité pour la période 2013 à 2016 (prévisions). Il déclare que l’Opposante fait principalement de la publicité pour la marque sur son site Web et que des documents promotionnels pour les services et les produits connexes de l’Opposante sont apparus sur le site Web à partie de 2013 (selon les Pièces F, G et H ci‑dessus);

·  les données relatives aux visites sur le site Web de l’Opposante; cependant, encore une fois, cette information est de nature mondiale, car aucune donnée précise concernant les visites en provenance du Canada n’a été fournie.

[38]  Malgré la preuve de l’emploi fournie par l’Opposante, il est difficile de s’assurer que la marque de l’Opposante est devenue connue en liaison avec ses produits et services au Canada et que, dans une certaine mesure, elle a acquis un degré de distinction même modéré. Les chiffres de vente ne semblent pas significatifs en ce qui concerne ces produits et services, seules deux factures ont été fournies et les chiffres de publicité ainsi que les données relatives aux visites sur le site Web de l’Opposante sont des chiffres mondiaux, plutôt que des chiffres précisément attribuables au Canada. Par conséquent, je ne peux que conclure que ce facteur favorise très légèrement, au mieux, l’Opposante.

Article 6(5)b) – la période pendant laquelle les marques de commerce ont été en usage

[39]  La Requérante n’a fourni aucune preuve de l’emploi de sa marque de commerce.

[40]  Toutefois, comme il est indiqué ci-dessus, l’Opposante a fourni une preuve de l’emploi de sa marque de commerce au Canada en liaison avec ses produits et services depuis 2014. Par conséquent, ce facteur favorise l’Opposante.

Articles 6(5)c) et d) – le genre de services ou entreprises ou la nature du commerce

[41]  Lorsqu’on examine les articles 6(5)c) et d) de la Loi, les états déclaratifs des produits et services définis dans la demande pour la Marque et dans l’enregistrement de l’Opposante régissent l’évaluation de la probabilité de confusion en vertu de l’article 12(1)d) de la Loi [voir Henkel Kommanditgesellschaft auf Aktien c Super Dragon Import Export Inc (1986), 12 CPR (3d) 110 (CAF); et Mr Submarine Ltd c Amandista Investments Ltd (1987), 19 CPR (3d) 3 (CAF)].

[42]  L’Opposante fait valoir, et je suis d’accord, que les produits et services respectifs des parties semblent être très semblables en ce sens que les produits et services des deux parties se rapportent à la sécurité en milieu de travail. De plus, l’Opposante fait valoir que, puisque la Requérante n’a produit aucune preuve de l’utilisation de sa Marque ni aucune description détaillée de la nature des services qu’elle offre en liaison avec sa Marque, rien au dossier ne prouve que les services de formation axés sur la sécurité de la Requérante diffèrent de ceux de l’Opposante. Encore une fois, je suis d’accord et, en l’absence de preuve du contraire, je conclus que les produits et services des parties comportent vraisemblablement les mêmes voies de commercialisation.

[43]  Compte tenu de ce qui précède, ces facteurs favorisent grandement l’Opposante.

Circonstances de l’espèces – État du registre et situation du marché

[44]  La preuve relative à l’état du registre n’est pertinente que dans la mesure où l’on peut en dégager des conclusions sur l’état du marché et l’on ne peut tirer de conclusions sur l’état du marché que si l’on relève un grand nombre d’enregistrements pertinents [Ports International Ltd c Dunlop Ltd (1992), 41 CPR (3d) 432 (COMC); et Welch Foods Inc c Del Monte Corp (1992), 44 CPR (3d) 205 (CF 1re inst), 36 CPR (3d) 562 (COMC); et Kellogg Salada Canada Inc c Maximum Nutrition Ltd (1992), 43 CPR (3d) 349 (CAF)].

[45]  Encore une fois, je remarque que même si la Requérante n’a pas présenté d’observations, elle a produit des éléments de preuve de l’état du registre et du marché.

[46]  À cet égard, l’affidavit de Gay Owens, chercheure en marques auprès de l’agent de la Requérante, comprend les résultats d’une recherche effectuée dans le registre canadien des marques de commerce. À titre de Pièce A, Mme Owens joint les détails de 15 marques de commerce qu’elle a trouvées dans le cadre de sa recherche.

[47]  En plus du témoignage de Mme Owen, l’affidavit de Michael Duchesneau, assistant judiciaire auprès de l’agent de la Requérante, contient des captures d’écran provenant de divers sites Web, qui semblent correspondre aux marques de commerce et aux propriétaires associés des marques de commerce indiqués dans la recherche de Mme Owen. M. Duchesneau inclut des captures d’écran datées du 2 août 2017, ainsi que celles qu’il est possible de trouver par l’utilisation des archives Internet de Wayback Machine plusieurs années avant la date de son affidavit.

[48]  Toutes les marques de commerce indiquées dans la preuve susmentionnée des déposants comprennent le mot SAFE. Cependant, comme je l’ai indiqué plus tôt, je trouve ce mot descriptif ou, à tout le moins très suggestif lorsqu’il est employé en liaison avec des produits et des services qui ont trait à la sécurité. En outre, à l’exception de deux marques, les marques de commerce indiquées ne comprennent pas non plus le mot CHOICE. Dans l’ensemble, ces marques sont suffisamment différentes quant à la présentation ou le son et dans les idées qu’elles suggèrent; elles ne sont donc pas pertinentes. En ce qui concerne les deux autres marques de commerce indiquées, SAFE BY CHOICE, NOT BY ACCIDENT, et SAFECHOICE, Shield for Hand and Body Protection et Dessin, telles qu’elles ont été présentées par l’Opposante, elles concernent des marchandises suffisamment différentes, avec différentes voies de commercialisation, de sorte qu’elles ne sont pas pertinentes non plus et ne font pas avancer le dossier de la Requérante en ce qui concerne la confusion.

Conclusion

[49]  Dans l’application du test en matière de confusion, je l’ai examiné du point de vue de la première impression et du souvenir imparfait.

[50]  Comme je l’ai indiqué précédemment, dans l’arrêt Masterpiece, précité, la Cour suprême du Canada a souligné l’importance du facteur en vertu de l’article 6(5)e) dans l’analyse de la probabilité de confusion. En l’espèce, la partie la plus importante des marques des parties est identique.

[51]  Par ailleurs, j’ai conclu que la nature des produits et services et les voies de commercialisation des parties se recoupent et que, même si le caractère distinctif inhérent des marques des parties est relativement faible, la période pendant laquelle la marque a été en usage favorise l’Opposante.

[52]  Compte tenu de ce qui précède, je conclus que la prépondérance des probabilités en ce qui concerne la question de la confusion entre les marques des parties favorise fortement l’Opposante. Par conséquent, la Requérante n’a pas établi, selon la prépondérance des probabilités, que la Marque ne crée pas de confusion avec la marque SAFE BY CHOICE de l’Opposante.

[53]  Par conséquent, le motif d’opposition fondé sur l’article 12(1)d) de la Loi est accueilli.

Motif d’opposition fondé sur l’article 2

[54]  L’Opposante a fait valoir que la Marque n’est pas distinctive, étant donné qu’elle ne distingue pas les services de la Requérante tels qu’ils sont énoncés dans la demande des produits et services d’autrui, et en particulier des produits et services de l’Opposante vendus en liaison avec la Marque de l’Opposante, et qu’elle n’est pas adaptée à les distinguer ainsi.

[55]  Bien que la Requérante ait le fardeau ultime de démontrer que la Marque distingue réellement ses marchandises de celles d’autres parties au Canada et qu’elle est adaptée à les distinguer ainsi, il revient à l’Opposante de prouver les faits invoqués à l’appui du motif d’absence de caractère distinctif [voir Muffin Houses Incorporated c The Muffin House Bakery Ltd (1985), 4 CPR (3d) 27 (COMC)].

[56]  En vertu de son fardeau de preuve, l’Opposante est tenue de démontrer qu’à la date de production de la déclaration d’opposition, sa marque de commerce était devenue suffisamment connue pour annuler le caractère distinctif de la Marque [voir Bojangles’ International, LLC c Bojangles Café Ltd, 48 CPR (4th) 427 (CF)].

[57]  Comme on l’a mentionné plus en détail dans l’analyse du motif d’opposition fondé sur l’article 12(1)d), je ne suis pas convaincue, malgré la preuve de l’emploi fournie par l’Opposante, que la marque de commerce de l’Opposante était devenue connue dans une large mesure en liaison avec ses produits et services au Canada. En effet, les chiffres de vente ne semblent pas significatifs en ce qui concerne ces produits et services, et seules deux factures ont été fournies. Je remarque que les montants indiqués sur les factures varient d’environ 7 000 $ à 12 000 $, ce qui laisse entendre, étant donné le total des ventes de l’Opposante au Canada de 2014 à 2016, que cette dernière comptait moins de 20 clients. De plus, les chiffres de publicité ainsi que les données relatives aux visites sur le site Web de l’Opposante sont des chiffres mondiaux, plutôt que des chiffres précisément attribuables au Canada.

[58]  La date pertinente antérieure en vertu de ce motif d’opposition n’est d’aucune utilité pour l’Opposante. Par conséquent, je ne suis pas convaincue que l’Opposante s’est acquittée de son fardeau de preuve initial de démontrer qu’à compter du 11 février 2016, sa marque de commerce était devenue suffisamment connue pour annuler le caractère distinctif de la Marque.

[59]  Par conséquent, le motif d’opposition fondé sur l’absence de caractère distinctif est rejeté.

Décision

[60]  Compte tenu de ce qui précède, dans l’exercice des pouvoirs qui m’ont été délégués en vertu des dispositions de l’article 63(3) de la Loi, je rejette la demande selon les dispositions de l’article 38(12) de la Loi.

 

 

Kathryn Barnett

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

Traduction certifiée conforme

Liette Girard

 



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