Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

THE REGISTRAR OF TRADEMARKS

Référence : 2021 COMC 152

Date de la décision : 2021-01-15

[TRADUCTION CERTIFIÉE,

NON RÉVISÉE]

DANS L’AFFAIRE DE LA PROCÉDURE DE RADIATION EN VERTU DE L’ARTICLE 45

 

Lavery, De Billy, LLP

Partie requérante

et

 

Dimatt Investments Inc., faisant affaire sous le nom de Genesis

Propriétaire inscrite

 

LMC345,075 pour GENESIS

Enregistrement

 

Introduction

[1]  La présente décision concerne une procédure de radiation sommaire engagée en vertu de l’article 45 de la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, c T-13 (la Loi) à l’égard de l’enregistrement no LMC345,075 pour la marque de commerce GENESIS (la Marque), appartenant à Dimatt Investments Inc., faisant affaire sou le nom de Genesis (la Propriétaire).

[2]  Sauf indication contraire, toutes les mentions visent la Loi telle qu’amendée le 17 juin 2019.

[3]  La Marque est enregistrée pour emploi en liaison avec ce qui suit :

PRODUITS

  • (1) Vêtements pour hommes, nommément complets, manteaux, pantalons et vestes de sport.

  • (2) Vêtements pour hommes, nommément cravates et ceintures de smoking.

  • (3) Vêtements pour hommes, nommément, chemises.

  • (4) Vêtements pour hommes, nommément, manteaux, vestes et pantalons de cuir et de suède; et bouffants, foulards, peignoirs, pyjamas, tee-shirts, pulls d’entraînement, survêtements, maillots de bain, shorts, sous-vêtements et gilets de corps; boutons de manchettes, chaînes à clés et portefeuilles.

  • (5) Vêtements pour hommes, nommément, chandails.

  • (6) Vêtements pour hommes, nommément, chaussettes et stylos.

  • (7) Vêtements pour hommes, nommément, ceintures.

  • (8) Bijoux, nommément, montres.

 

SERVICES

  • (1) Exploitation d’un magasin de détail spécialisé pour la vente de vêtements pour hommes.

[4]  Pour les raisons qui suivent, je conclus qu’il y a lieu de maintenir l’enregistrement en ce qui a trait aux services et en partie aux produits.

La procédure

[5]  Le 13 novembre 2018, à la demande de Lavery, De Billy, LLP (la Partie requérante), le registraire des marques de commerce a donné l’avis prévu à l’article 45 de la Loi à la Propriétaire.

[6]  L’avis enjoignait à la Propriétaire d’indiquer, à l’égard de chacun des produits et services spécifiés dans l’enregistrement, si la marque de commerce a été employée au Canada à un moment quelconque au cours des trois années précédant la date de l’avis et, dans la négative, qu’elle précise la date à laquelle la Marque a ainsi été employée en dernier lieu et la raison de son défaut d’emploi depuis cette date. En l’espèce, la période pertinente pour démontrer l’emploi est du 13 novembre 2015 au 13 novembre 2018.

[7]  Les définitions pertinentes d’emploi sont énoncées comme suit à l’article 4 de la Loi :

4(1) Une marque de commerce est réputée employée en liaison avec des produits si, lors du transfert de la propriété ou de la possession de ces produits, dans la pratique normale du commerce, elle est apposée sur les produits mêmes ou sur les emballages dans lesquels ces produits sont distribués, ou si elle est, de toute autre manière, liée aux produits à tel point qu’avis de liaison est alors donné à la personne à qui la propriété ou possession est transférée.

4(2) Une marque de commerce est réputée employée en liaison avec des services si elle est employée ou montrée dans l’exécution ou l’annonce de ces services.

[8]  Il est bien établi que le but et l’objet de l’article 45 de la Loi consistent à assurer une procédure simple, sommaire et expéditive pour débarrasser le registre du « bois mort ». À ce titre, le critère relatif à la preuve que le propriétaire inscrit doit respecter est très peu sévère [Performance Apparel Corp c Uvex Toko Canada Ltd, 2004 CF 448, au para 6] et une « surabondance d’éléments de preuve » n’est pas requise [voir Union Electric Supply Co Ltd c Registraire des marques de commerce (1982), 63 CPR (2d) 56 (CF 1re inst), au para 3]. Néanmoins, il n’en faut pas moins présenter des faits suffisants pour permettre au registraire de conclure que la marque a été employée en liaison avec chacun des produits et services spécifiés dans l’enregistrement pendant de la période pertinente [John Labatt Ltd c Rainer Brewing Co (1984), 80 CPR (2d) 228 (CAF) (John Labatt)].

[9]  En l’absence d’emploi tel que défini ci-dessus, conformément à l’article 45(3) de la Loi, une marque de commerce est susceptible d’être radiée, à moins que le défaut d’emploi ne soit en raison de circonstances spéciales.

[10]  En réponse à l’avis du registraire, la Propriétaire a fourni l’affidavit de Gene Dimatteo, président de la Propriétaire, assermenté le 12 février 2019. Seule la Partie requérante a produit des observations écrites. Aucune audience n’a été tenue.

La preuve

[11]  M. Dimatteo atteste que lui ou la Propriétaire a exploité un magasin de détail à Toronto de 1973 à décembre 2016. En décembre 2016, la société ontarienne GEN-RAM Inc. (GEN‑RAM) est passée aux commandes du magasin de détail. M. Dimatteo affirme que GEN‑RAM a été autorisée pendant la Période pertinente à employer la Marque au Canada [traduction] « sous la responsabilité et le contrôle » de la Propriétaire.

[12]  M. Dimatteo déclare que, pendant la période pertinente, la Propriétaire et GEN-RAM, en vertu d’une licence, ont offert et vendu à des clients canadiens des vêtements, accessoires et bijoux en liaison avec la Marque, y compris les produits indiqués dans l’enregistrement. De plus, M. Dimatteo déclare qu’il s’est rendu en Italie au nom de la Propriétaire et de GEN-RAM [traduction] « pour fournir aux clients canadiens les derniers vêtements, accessoires et bijoux pour hommes de qualité et suivant la mode “FABRIQUÉ EN Italie” » fabriquées par un certain nombre de tiers. De plus, M. Dimatteo explique que la Propriétaire et GEN-RAM, en vertu d’une licence, fabriquent et vendent également des vêtements et des accessoires pour hommes [traduction] « conçu sur mesure » et [traduction] « personnalisé ». De plus, il déclare qu’ils fournissent des services de taillage et de retouche d’experts internes ainsi que des services d’achats personnels et privés en liaison avec la Marque, y compris pendant la période pertinente.

[13]  M. Dimatteo affirme que la Marque est affichée bien en vue sur les produits vendus au magasin de détail et qu’elle est également présente au moment de la vente des produits sur les factures, dont des copies sont fournies aux clients au moment de l’achat, ainsi que sur les sacs à emplettes, les boîtes et les sacs à vêtements donnés aux clients.

[14]  Selon M. Dimatteo, la Propriétaire et/ou GEN-RAM ont vendu plus de 2 300 000 $ en produits et services de janvier 2016 à octobre 2018. Toutefois, à l’exception d’une ventilation mensuelle des ventes totales, l’affidavit ne fournit aucune autre ventilation des chiffres des ventes par rapport aux produits particuliers.

[15]  M. Dimatteo explique que la Propriétaire et/ou GEN-RAM ont annoncé et commercialisé les produits et services par l’entremise du site Web canadien www.genesis-toronto.com (le site Web) pendant la période pertinente, et que le site Web est un outil important pour permettre aux clients d’effectuer des recherches sur les produits et services offerts avant de faire une visite en magasin.

[16]  Les pièces pertinentes suivantes sont jointes à l’affidavit de M. Dimatteo :

  • Pièce B : Photographies non datées démontrant l’entrée avant et arrière d’un magasin de détail affichant la Marque, ainsi que des photographies de l’intérieur d’un magasin de vêtements.
  • Pièce C : Imprimés non datés du site Web affichant la Marque en haut de chaque page et montrant les vêtements et accessoires pour hommes. Je remarque que, bien que le site Web lui-même affiche la Marque, aucun des produits affichés sur le site Web ne semble afficher la Marque.
  • Pièce D : Copies de plusieurs factures datées au cours de la période pertinente affichant la Marque sur le haut de chaque facture, au milieu de chaque page, en tant qu’arrière-plan ou filigrane. La plupart des factures contiennent aussi, dans le coin inférieur gauche de la page, quelques lignes de texte qui se lisent, « Celebrating 43 years ...Thank you for shopping at Genesis » (Nous célébrons nos 43 ans... Merci d’avoir magasiné chez Genesis). M. Dimatteo affirme que les factures sont représentatives [traduction] « de la vente de Produits et de Services », et il confirme que tous les produits et services indiqués sur les factures soumises ont été achetés et reçus par les clients du magasin de détail de Toronto pendant la Période pertinente. Je remarque que chacun des produits indiqués dans les factures est identifié par une brève description du produit, qui comprend souvent une marque de commerce ou un fabricant; toutefois, la seule présentation de la Marque dans ces descriptions est « SILK PUFF [...] GENESIS made in Italy » (BOUFFANTS EN SOIE [...] GENESIS fabriqué en Italie). Je remarque que, dans quelques cas, pour les produits « pantalon » et « boutons de manchettes », aucune marque de commerce n’apparaît dans la ligne de description du produit.
  • Pièce E : Photographies de vêtements et d’accessoires comportant des étiquettes cousues ou des étiquettes volantes affichant le mot GENESIS, « Made in Italy GENESIS » (Fabriqué en Italie GENESIS) ou « Made in Italy for GENESIS » (Fabriqué en Italie pour GENESIS), parfois avec des marques de commerce de tiers. M. Dimatteo ne décrit pas la nature des vêtements démontrés dans les photographies, et il n’est pas toujours clair quels types de vêtements sont démontrés dans les photographies. Toutefois, il semble que les vêtements avec des étiquettes cousues qui affichent la Marque comprennent des manteaux, cravates, ceintures, pantalons, stylos, portefeuilles, chemises et chandails. Il semble que les vêtements avec des étiquettes volantes comprennent des gants, pulls d’entraînement, peignoirs, bijoux, sous-vêtements et gilets de corps; je remarque que dans le cas des pulls d’entraînement, peignoirs, sous-vêtements et gilets de corps, des étiquettes arborant d’autres marques de commerce sont visibles dans les photographies, alors que dans le cas des gants et des bijoux, je ne peux pas déterminer à partir des photographies si les produits arborent ou non d’autres marques de commerce. Toutefois, je constate que les gants ne figurent pas sur la liste des produits enregistrés et que les bijoux ne semblent pas inclure les montres, tel que précisé dans l’enregistrement. M. Dimatteo explique que les photographies de la Pièce E sont des échantillons représentatifs des Produits et qu’ils sont aussi représentatifs de la façon dont ils [traduction] « ont été offerts à la vente et vendus » et de la façon dont la Marque a été affichée sur les produits pendant la période pertinente.
  • Pièce F : Copies de photographies de matériel publicitaire et promotionnel arborant la Marque, nommément des cintres à vêtements, étiquettes d’échantillons, des cartes professionnelles, des sacs à vêtements et des sacs à emplettes. M. Dimatteo affirme que ces photographies sont représentatives du matériel publicitaire et promotionnel employé par la Propriétaire et/ou GEN-RAM au cours de la période pertinente pour annoncer, promouvoir et associer la Marque aux produits et services fournis au client au moment de l’achat.

 

Analyse et motifs de la décision

Emploi sous licence de la Marque

[17]  La Partie requérante fait valoir que tout emploi de la Marque par licencié GEN-RAM après décembre 2016 ne profite pas au Propriétaire parce que ce dernier n’a pas satisfait aux exigences énoncées à l’article 50(1) de la Loi en démontrant qu’il avait un contrôle direct ou indirect sur la nature ou la qualité des Produits et Services.

[18]  Comme l’a indiqué la Cour fédérale, le propriétaire d’une marque de commerce dispose essentiellement de trois méthodes pour démontrer qu’il exerce le contrôle prévu par l’article 50(1) de la Loi : premièrement, attester explicitement qu’il exerce effectivement le contrôle prévu; deuxièmement, produire des preuves démontrant qu’il exerce effectivement le contrôle nécessaire; ou troisièmement, produire une copie du contrat de licence qui prévoit l’exercice d’un tel contrôle [Empresa Cubana Del Tobaco Trading c Shapiro Cohen, 2011 CF 102, au para 84]. En l’espèce, M. Dimatteo affirme clairement, au paragraphe 7 de son affidavit, que GEN-RAM [traduction] « était et continue d’être pendant la Période pertinente, licencié pour employer la Marque enregistrée au Canada sous la responsabilité et le contrôle » de la Propriétaire. Cela est suffisant aux fins de cette procédure. À ce titre, je suis convaincu que tout emploi de la Marque par le licencié profite au Propriétaire.

Emploi en liaison avec les Services

[19]  En ce qui a trait aux les services, la Partie requérante soutient que la preuve de la Propriétaire est insuffisante pour démontrer l’emploi de la Marque en liaison avec les services, notant que nulle part dans l’affidavit n’est mentionné le magasin de détail appelé GENESIS; qu’il n’y a aucune indication que les photographies de la Pièce B ou que les captures d’écran de la Pièce C sont représentatives de l’apparence de l’extérieur ou du site Web du magasin pendant la période pertinente; et qu’il n’est pas clair si le mot GENESIS est employé comme nom commercial ou comme marque de commerce sur les factures de la Pièce D. En ce qui a trait la première observation de la Propriétaire, il est évident de l’ensemble de la preuve, y compris les photographies de vitrine de la Pièce B, les captures d’écran de la Pièce C et les factures de la Pièce D émises pendant la période pertinente, que Genesis était le nom d’un magasin de vêtements de détail exploité par la Propriétaire et son licencié pendant la période pertinente.

[20]  En ce qui a trait aux factures présentées comme Pièce D, la Partie requérante soutient que le mot GENESIS est employé uniquement sur les factures en tant que nom commercial, par opposition à une marque de commerce, citant, entre autres, Good Earth Corporation c Good Earth Cafes Ltd, 2013 COMC 75. Comme l’a fait remarquer la Partie requérante, pour décider si une marque de commerce a été employée en tant que marque de commerce plutôt qu’en tant que nom commercial, il faut tenir compte du contexte de l’emploi, y compris des facteurs comme la distinction entre la marque de commerce et la dénomination sociale ou commerciale et d’autres renseignements sur l’identificateur de l’entreprise, dans la mesure où le public considérerait cet emploi comme une marque de commerce et non comme une simple identification d’une personne morale [voir aussi Consumers Distributing Co/Cie Distribution aux Consommateurs c Toy World Ltd, 1990 CarswellNat 1398 (COMC); Road Runner Trailer Manufacturing Ltd c Road Runner Trailer Co (1984), 1 CPR (3d) 443 (CF 1re inst)].

[21]  Dans la présente affaire, comme nous l’avons mentionné ci-dessus, le mot GENESIS figure premièrement dans le coin supérieur gauche des factures en gros caractères cursifs, sous lequel « dal 1973 » est affiché en petits caractères d’imprimerie stylisés, suivi de l’adresse et des coordonnées de la Propriétaire, le tout en petits caractères d’imprimerie non stylisés. Deuxièmement, le mot « Genesis » apparaît dans la même police cursive, mais de taille plus grande, au milieu de chaque page de facture comme filigrane ou arrière-plan au milieu de la facture. Troisièmement, la plupart des factures contiennent aussi quelques lignes de texte dans le coin inférieur gauche de la page qui se lisent, « Celebrating 43 years ...Thank you for shopping at Genesis ». En raison de la proéminence de la Marque dans chacune de ces formulations, je conclus que le public percevrait cet emploi comme une marque de commerce, et non pas simplement comme l’identification d’une entité juridique. Étant donné que la Marque est employée pour identifier le détaillant et que d’autres marques de commerce ou fabricants sont indiqués en liaison avec presque tous les produits indiqués sur les factures, je conclus que l’affichage de la Marque de cette façon serait associé aux services de magasins de détail de la Propriétaire, plutôt qu’en liaison avec les produits [voir Hortilux Schreder BV v Iwasaki Electric Co, 2012 CAF 321, au para 1; Tint King of California Inc c Canada (Registraire des marques de commerce), 2006 CF 1440, au para 35]. Je remarque que la Marque est également affichée dans les descriptions de produit du produit [traduction] « BOUFFANTS EN SOIE » comme identificateur pour ce produit particulier; l’affichage de la Marque de cette façon sera abordé dans la prochaine section.

[22]  Puisque le Propriétaire ou son licencié a affiché la Marque sur ses factures au Canada au cours de la période pertinente dans le cadre de l’exploitation d’un magasin de vêtements de détail, et étant donné que M. Dimatteo a déclaré que ces factures sont remises aux clients au moment de l’achat des produits au magasin de détail, je suis convaincu que la Propriétaire a démontré l’emploi de la Marque en liaison avec l’exécution des services enregistrés au sens de la Loi.

Emploi en liaison avec les Produits

[23]  La Partie requérante fait valoir que la preuve de la Propriétaire ne démontre pas l’emploi en liaison avec l’un des produits visés par l’enregistrement. Plus particulièrement, la Partie requérante soutient que la preuve de la Propriétaire ne démontre pas que la Propriétaire a transféré les produits dans le cours normal des affaires et que la Propriétaire n’a pas établi que la Marque était associée aux produits au moment du transfert.

Transfert des Produits

[24]  La Partie requérante fait remarquer que les factures ne montrent pas de ventes de produits identifiées par la Marque, à l’exception des « bouffants »; les factures montrent plutôt des ventes de produits arborant des marques de commerce de tiers. À ce titre, la Partie requérante soutient qu’il n’y a donc aucune preuve de transfert dans le cours normal des affaires d’articles arborant la Marque, comme ceux qui figurent dans les photographies de la Pièce E.

[25]  Bien qu’il ne soit pas obligatoire de produire des factures pour répondre de façon satisfaisante à un avis prévu à l’article 45 [Lewis Thomson & Son Ltd c Rogers, Bereskin & Parr (1988), 21 CPR (3d) 483 (CF 1re inst)], une certaine preuve que des transferts de chacun des produits dans la pratique normale du commerce au Canada est nécessaire [voir John Labatt]. Il ne suffit pas d’offrir à la vente les produits [voir, par exemple, The Molson Companies Ltd c Halter (1976), 28 CPR (2d) 158 à 177 (CF 1re inst); et Gowling, Strathy & Henderson c Royal Bank of Canada (1995), 63 CPR (3d) 322 à 327 (CF 1re inst)]. Une telle preuve peut prendre la forme de documents comme des factures ou des rapports de vente, mais elle peut aussi être obtenue à l’aide de déclarations assermentées claires [voir, par exemple, Davis LLP c Office of the Commissioner of Baseball, 2015 COMC 107, au para 9; Barrette Legal Inc c Southbrook Farms Ltd, 2015 COMC 179, au para 13].

[26]  En l’espèce, j’accepte que les produits indiqués dans les factures de la Pièce D aient été vendus dans le cours normal des affaires au Canada pendant la période pertinente. En ce qui a trait aux produits décrits à la Pièce E, bien que M. Dimatteo n’indique pas clairement que ces produits correspondent à l’un ou l’autre des articles indiqués sur les factures de la Pièce D, il déclare clairement dans son affidavit que les articles présentés à la Pièce E sont représentatifs des produits qui [traduction] « ont été mis en vente et vendus » [italique ajouté] pendant la période pertinente. Cette déclaration sous serment est conforme à sa description de la Propriétaire et du cours normal des affaires de son licencié, ainsi qu’aux chiffres des ventes généralisés indiquant des ventes importantes pendant la période pertinente. Je suis donc convaincu que les produits indiqués à la Pièce E ont été transférés dans le cours normal des affaires au Canada au cours de la période pertinente [pour une conclusion similaire concernant les produits [traduction] « offerts à la vente et vendus », voir Brownlee LLP v 555, 129 Ontario Ltd, 2013 COMC 23, au para 17].

Liaison entre la Marque et les Produits

[27]  Par conséquent, la question à trancher est de savoir si la Propriétaire a établi que la Marque a été employée au sens de la Loi en liaison avec les produits démontrés comme ayant été transférés. À cet égard, la Partie requérante fait valoir que l’affichage de la Marque sur les factures, les étiquettes volantes, les cintres, les étiquettes et les sacs à emplettes ne constitue pas un emploi de la Marque au sens de la Loi.

[28]  En ce qui a trait aux factures, la Marque est affichée au haut et au bas des factures et sur un filigrane; toutefois, à l’exception des « bouffants », chacun des produits indiqués dans les factures est identifié par une marque de commerce de tiers ou par aucune marque de commerce. Comme il a été mentionné ci-dessus, je suis d’accord avec la Partie requérante pour dire que de telles présentations de la Marque sont en liaison avec des services de magasins de détail, plutôt qu’avec l’un des produits visés par l’enregistrement. Toutefois, étant donné que la Marque figure dans la description du produit de l’article [traduction] « BOUFFANT EN SOIE » (que M. Dimatteo explique comme un mouchoir de poche), que les factures montrent que cet article a été transféré au Canada dans le cours normal des affaires pendant la période pertinente, et que M. Dimatteo a confirmé que les factures accompagnent les produits au moment de l’achat dans le magasin de détail, je suis convaincu que la Propriétaire a démontré l’emploi de la Marque en liaison avec le produit visé par l’enregistrement « bouffants » au sens de la Loi.

[29]  Étant donné que les autres articles facturés ont des marques de commerce de tiers, ou aucune marque de commerce, dans leurs descriptions de produits plutôt que la Marque, je ne suis pas convaincu que les factures établissent que la Marque a été employée en liaison avec l’un des autres produits restants.

[30]  En ce qui a trait aux photographies fournies aux Pièces E et F, la Partie requérante fait valoir, et je suis d’accord, que la présence d’étiquettes volantes, d’étiquettes de prix ou d’autres enseignes en liaison avec des produits de tiers au moment de la vente est insuffisante, à elle seule, pour établir l’emploi de cette marque en liaison avec ces produits au sens de la Loi [voir Moffat & Co c Big Erics Inc, 2015 COMC 52 (Moffat); McMillan LLP c April Cornell Holdings, 2015 COMC 111; Transport for London c Stiles Clothiers Inc, 2018 COMC 67]. De façon similaire, le fait de placer des produits arborant les marques d’un tiers dans un sac à emplettes arborant une marque de commerce au moment de l’achat ne suffit pas en soi à établir l’emploi de cette marque de commerce en liaison avec les produits du tiers [voir, par exemple, 6438423 Canada Inc c Consumers Nutrition Center Ltd, 2009 CanLII 82 134 (COMC), aux para 12 à 14; et Moffat, au para 17].

[31]  Pour qu’une marque de commerce soit « apposée sur les produits mêmes », une marque de commerce doit généralement être apposée sur un produit de manière permanente, généralement par le fabricant des produits [voir Moffat, au para 29]. Un exemple pertinent serait une marque de commerce apposée sur l’étiquette cousue de la chemise [Smiths IP c Saks & Co, 2015 COMC 133, au para 64 (Saks)]. En l’espèce, je considère que la Marque est « apposée sur les produits mêmes » pour les produits portant une étiquette en relief, gravée ou cousue arborant la Marque. Bien que certains articles démontrés arborent également la marque de tiers en plus de telles étiquettes permanentes arborant la Marque, rien dans la Loi n’empêche un propriétaire de marque de commerce d’employer plus d’une marque de commerce en même temps en liaison avec les mêmes produits [AW Allen Ltd c Warner-Lambert Canada Inc (1985)), 6 CPR (3d) 270 (CF 1re inst) et Sara Lee Corp c Kretschmar Inc, 2005 CarswellNat 4474 (COMC), au para 18; Sharadha Terry Products Ltd c Dial Corp, 2014 COMC 285, au para 28]. Comme nous l’avons mentionné ci-dessus, la Pièce E démontre que les produits suivants arborent la Marque de cette façon : manteaux, cravates, ceintures, pantalons, stylos, portefeuilles, chemises et pulls d’entraînement. Comme j’ai conclu ci-dessus que ces articles photographiés étaient transférés dans la pratique normale du commerce au Canada pendant la période pertinente, je suis convaincu que la Propriétaire a établi l’emploi de la Marque en liaison avec ces produits au sens de la Loi.

[32]  La Pièce E démontre également d’autres produits avec des étiquettes volantes attachées arborant la Marque; toutefois, comme nous l’avons mentionné plus haut, parmi les produits correspondant aux produits indiqués dans l’enregistrement, chaque photographie semble démontrer de tels produits arborant des marques de commerce de tiers. Par conséquent, puisque la Marque n’a pas été apposée de façon permanente à ces produits, je ne suis pas convaincu que la Propriétaire ait démontré l’emploi de la Marque sur les produits eux-mêmes ou en association de quelque autre façon, au sens de la Loi, selon le raisonnement de Moffat et de Saks. À cet égard, étant donné que ces produits semblent afficher des marques de commerce de tiers, je suis convaincu que la présente affaire se distingue de McDowell c Laverana GmbH & Co KG, 2016 CF 1276, en ce qui concerne une tendance factuelle où il était ambigu de savoir si les produits provenaient d’un tiers [pour des conclusions similaires, voir Positec Group Ltd c Orange Works Kitchen & Home Corp, 2017 COMC 141, aux para 25 et 26; TRANSPORT FOR c STILES CLOTHIERS INC, 2018 COMC 67, au para 31].

[33]  Par conséquent, en l’absence d’autres éléments de preuve, je ne suis pas convaincu que la Propriétaire ait démontré l’emploi de la Marque en liaison avec l’un ou l’autre des produits autres que les manteaux, les cravates, les ceintures, les pantalons, les stylos, les portefeuilles, les chemises, les pulls d’entraînement et les bouffants, tel qu’indiqué ci-dessus. En l’absence de circonstances spéciales justifiant le défaut d’emploi, l’enregistrement sera modifié en conséquence.

Décision

[34]  Par conséquent, dans l’exercice des pouvoirs qui m’ont été délégués en vertu des dispositions de l’article 63(3) de la Loi, l’enregistrement sera modifié afin de radier les produits : « complets, manteaux [...] et vestes de sport »; « ceintures de smoking »; « manteaux, vestes [...] de suède; [...] foulards, peignoirs, pyjamas, tee-shirts, pulls d’entraînement, survêtements, maillots de bain, shorts, sous-vêtements et gilets de corps; boutons de manchettes, chaînes à clés »; « chaussettes »; et « bijoux, nommément, montres » selon les dispositions de l’article 45 de la Loi.

[35]  L’état déclaratif des produits et services modifié sera libellé comme suit :

PRODUITS

  • (1) Vêtements pour hommes, nommément, pantalons.

  • (2) Vêtements pour hommes, nommément cravates.

  • (3) Vêtements pour hommes, nommément, chemises.

  • (4) Vêtements pour hommes, nommément, vestes et pantalons; et bouffants; et portefeuilles.

  • (5) Vêtements pour hommes, nommément, chandails.

  • (6) Stylos.

  • (7) Vêtements pour hommes, nommément, ceintures.

 

SERVICES

  • (1) Exploitation d’un magasin de détail spécialisé pour la vente de vêtements pour hommes.

 

 

G. M. Melchin

Agent d’audience

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

Traduction certifiée conforme

Marie-France Denis


COMMISSION DES OPPOSITIONS DES MARQUES DE COMMERCE

OFFICE DE LA PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE DU CANADA

COMPARUTIONS ET AGENTS INSCRITS AU DOSSIER

___________________________________________________

DATE DE L’AUDIENCE Aucune audience tenue

AGENTS AU DOSSIER

Riches, McKenzie & Herbert LLP

Pour la Propriétaire inscrite

Lavery, De Billy, LLP

Pour la Partie requérante

 

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