Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

THE REGISTRAR OF TRADEMARKS

Référence : 2020 COMC 146

Date de la décision : 2020-12-28

DANS L’AFFAIRE DE LA PROCÉDURE DE RADIATION EN VERTU DE L’ARTICLE 45

 

Robinson Sheppard Shapiro S.E.N.C.R.L./L.L.P.

Partie requérante

et

 

Pouliot Machinerie Inc.

Propriétaire inscrite

 

LMC456,139 pour RE-TRACK

Enregistrement

[1]  Le 2 février 2018, à la demande de Robinson Sheppard Shapiro S.E.N.C.R.L./L.L.P. (la Partie requérante), le registraire a envoyé l’avis prévu à l’article 45 de la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, c T-13 (la Loi) à Pouliot Machinerie Inc. (la Propriétaire), la propriétaire inscrite de l’enregistrement n°LMC456,139 pour la marque de commerce RE-TRACK (la Marque).

[2]  Sauf indication contraire, toutes les mentions visent la Loi telle qu’amendée le 17 juin 2019.

[3]  La Marque est enregistrée en liaison avec les produits suivants :

Plate-forme rétractable de dimension 4’ x 6’ ou 4’ x 8’ et qui se pose à l’intérieur d’une boîte de camionnette de dimension semblable; l’utilité de la plate-forme est de faciliter aux utilisateurs de véhicules récréatifs le chargement sécuritaire lors du transport de leur véhicule.

(les Produits)

[4]  L’avis prévu à l’article 45 de la Loi exige que la Propriétaire indique si la Marque a été employée au Canada en liaison avec les Produits à un moment quelconque au cours des trois années précédant immédiatement la date de l’avis et, dans la négative, qu’elle précise la date à laquelle la Marque a été employée de la sorte pour la dernière fois de même que la raison de son défaut d’emploi depuis cette date. La période pertinente ici s’étend du 2 février 2015 au 2 février 2018.

[5]  La définition d’« emploi » en liaison avec des produits pertinente à nos fins apparaît à l’article 4(1) de la Loi qui se lit comme suit :

4(1) Une marque de commerce est réputée employée en liaison avec des produits si, lors du transfert de la propriété ou de la possession de ces produits, dans la pratique normale du commerce, elle est apposée sur les produits mêmes ou sur les emballages dans lesquels ces produits sont distribués, ou si elle est, de toute autre manière, liée aux produits à tel point qu’avis de liaison est alors donné à la personne à qui la propriété ou possession est transférée.

[6]  L’article 45 de la Loi a pour objet et portée d’offrir une procédure simple, sommaire et expéditive pour débarrasser le registre du « bois mort ». Le niveau de preuve requis pour établir l’emploi dans le contexte d’une procédure prévue à l’article 45 est peu élevé [Lang, Michener, Lawrence & Shaw c Woods Canada Ltd (1996), 71 CPR (3d) 477 (CF 1re inst)]. Il n’est pas nécessaire de produire une surabondance d’éléments de preuve [Union Electric Supply Co c Canada (Registraire des marques de commerce) (1982), 63 CPR (2d) 56 (CF 1re inst)]. Il suffit d’établir prima facie un emploi de la Marque aux termes des articles 4 et 45 de la Loi [1459243 Ontario Inc c Eva Gabor International, Ltd, 2011 CF 18]. Toutefois, il demeure que de simples allégations d’emploi sont insuffisantes pour ce faire [Plough (Canada) Ltd c Aerosol Fillers Inc (1980), 53 CPR (2d) 63 (CAF)].

[7]  En réponse à l’avis du registraire, la Propriétaire a produit les déclarations solennelles de Jean Pouliot et de Sébastien Noël respectivement souscrites les 19 mars et 27 avril 2018. Seule la Partie requérante a produit des représentations écrites; aucune audience n’a été tenue.

[8]  Les déclarations solennelles produites à titre de preuve sont très brèves (comportant chacune seulement trois paragraphes) et à teneur sensiblement similaire. MM. Pouliot et Noël se décrivent comme étant respectivement le président et l’un des administrateurs de Produits Métalliques Pouliots Machinerie inc. (Produits Métalliques PMI) [paras 1]. Ils indiquent que la Propriétaire a modifié son nom par statuts de modification datés du 21 septembre 2002 pour devenir Produits Métalliques PMI [paras 2] et affirment tous deux que Produits Métalliques PMI « fait toujours usage de la marque RE-TRACK tel qu’en font foi les factures […] et la liste des ventes » jointes à leurs déclarations [paras 3].

[9]  Dans ses représentations écrites, la Partie requérante développe essentiellement trois arguments pouvant être résumés comme suit :

-  Les déclarations solennelles de MM. Pouliot et Noël des 19 mars et 27 avril 2018 consistent en de la preuve additionnelle et ne sont pas admissibles en preuve.

-  Les pièces accompagnant ces déclarations ne sont pas identifiées ou assermentées et ne sont pas admissibles en preuve.

-  L’emploi de la Marque n’a pas été démontré puisque la preuve ne contient pas d’informations sur la manière dont les Produits ont pu être vendus en association avec la Marque ou sur la pratique normale du commerce de la Propriétaire.

[10]  Je les aborderai maintenant dans cet ordre.

La décision du registraire visant l’admissibilité de la preuve au dossier n’a pas à être revue

[11]  La Partie requérante remet en question l’admissibilité des déclarations solennelles de MM. Pouliot et Noël des 19 mars et 27 avril 2018 produites par la Propriétaire. Plus spécifiquement, en faisant référence à certains documents soumis antérieurement par la Propriétaire, elle allègue que ces déclarations se trouvent en fait à être de la preuve additionnelle et sont, à ce titre, inadmissibles.

[12]  Je note que le registraire, par voie d’une lettre officielle datée du 5 juin 2018, rejetait les « déclarations » produites le 27 avril 2018 à titre de preuve de la Propriétaire (que la Partie requérante identifie comme « Pouliot No. 1 Declaration » et « Noël No. 1 Declaration ») puisqu’elles ne respectaient pas la forme prescrite. Ces documents ne font donc pas partie du dossier et ne méritent pas d’être discutés plus avant.

[13]  Je note également que le registraire, par voie d’une lettre officielle datée du 15 octobre 2018, d’une part, accordait une prolongation de délai rétroactive à la Propriétaire afin de lui permettre de produire sa preuve dans un format acceptable et d’autre part, confirmait réception des déclarations solennelles de MM. Pouliot et Noël produites le 7 septembre 2018 à ce titre. Aucune objection visant ces documents n’a alors été soulevée, que ce soit par la Partie requérante ou par le registraire. À ce stade, je ne vois donc pas de raison de revoir la décision du registraire de verser la preuve de la Propriétaire au dossier.

Les documents produits par la Propriétaire à titre de pièces sont admissibles

[14]  La Partie requérante critique également les documents joints au soutien des déclarations solennelles de MM. Pouliot et Noël. Plus spécifiquement, elle allègue que les pièces accompagnant celles-ci ne sont pas identifiées ou assermentées et sont donc inadmissibles.

[15]  Je note en effet que les documents joints à ces déclarations solennelles sont fournis en exemplaire unique et ne sont ni datés, ni signés ou assermentés, ni même expressément identifiés en tant que « pièces » comme telles à l’une ou l’autre de ces déclarations (aucun n’est précédé d’une page frontispice ou d’un quelconque autre identifiant).

[16]  Toutefois, il est bien établi que des lacunes techniques ne devraient pas empêcher une partie de répondre à un avis en vertu de l’article 45 de la Loi lorsque la preuve fournie pourrait suffire à démontrer l’emploi de la marque de commerce [Baume & Mercier SA c Brown (1985), 4 CPR (3d) 96 (CF 1re inst)]. Par exemple, le registraire peut à l’occasion admettre en preuve des pièces qui ne sont pas correctement souscrites si elles sont clairement identifiées dans le corps de la déclaration [Borden & Eilliot c Raphaël Inc (2001), 16 CPR (4th) 96 (COMC)]. Dans le présent cas, puisque les déclarations de MM. Pouliot et Noël identifient toutes deux clairement tant la nature que la date de chacun des documents annexés, je suis prête à les accepter en preuve malgré leurs lacunes décrites plus haut.

L’emploi de la Marque n’a pas été démontré

[17]  La Partie requérante soumet enfin que la preuve ne contient pas d’informations sur la manière dont les Produits ont pu être vendus en association avec la Marque. Plus particulièrement, la Partie requérante soumet que la Propriétaire n’a fourni aucune photographie, étiquette ou quelconque autre matériel faisant voir comment la Marque est apposée ou autrement employée en liaison avec les Produits, ni aucune information relativement à sa pratique normale du commerce.

[18]  L’ensemble de la preuve soumise par la Propriétaire ne démontre effectivement pas l’emploi de la Marque aux termes de l’article 4(1) de la Loi à un quelconque moment, incluant pendant la période pertinente.

[19]  Tel qu’indiqué plus haut, les déclarations solennelles de MM. Pouliot et Noël sont très brèves, les déposants faisant essentiellement valoir que la Propriétaire « fait toujours usage de la [Marque] tel qu’en font foi les factures […] et la liste des ventes » jointes à leurs déclarations. Bien qu’il convient généralement d’accorder une crédibilité substantielle aux affirmations contenues dans une déclaration solennelle [Ogilvy Renault c Compania Roca‑Radiadores SA, 2008 CarswellNat 776 (COMC)], j’estime que les affirmations de MM. Pouliot et Noël concernant l’emploi de la Marque s’avèrent en l’occurrence trop vagues et imprécises. En effet, aucune de ces affirmations ne décrit la manière dont la Marque a été employée en liaison avec les Produits pendant la période pertinente et ce, même lorsque considérées en liaison avec les pièces produites au soutien de celles-ci pour les raisons expliquées ci-après.

[20]  À la revue des factures jointes aux déclarations de MM. Pouliot et Noël, je note qu’elles sont au nombre de trois et que seules deux d’entre elles couvrent la période pertinente, nommément les factures datées des 8 septembre et 13 décembre 2017. Ces factures sont toutes deux adressées par Produits Métalliques PMI à une même entreprise au Canada et reflètent le même numéro de produit, lequel est suivi de la mention « RETRACK RAMPE 48" X 96" TOLE GALV. » dans la partie « description » retrouvée dans le corps des factures. Cette référence à la Marque sans trait d’union m’apparaît sans conséquence puisqu’il s’agit d’un écart mineur par rapport à la Marque telle qu’enregistrée. J’estime toutefois qu’il n’en va pas nécessairement de même de la description du produit, étant d’avis que se pose la question de savoir si le produit décrit comme une « rampe » dans ces factures, correspond bel et bien à la « plate-forme rétractable » visée par l’enregistrement.

[21]  Cela dit, en l’absence de représentations de l’une ou l’autre des parties sur cette question, j’estime qu’il n’est pas nécessaire de trancher celle-ci puisque de toute façon, la preuve au dossier ne me permet pas de déterminer dans quelle mesure ces factures ont, de fait, accompagné les produits visés par celles-ci lors de leur transfert de propriété de manière à donner un avis de liaison entre la Marque et pareils produits et ainsi démontrer l’emploi de la Marque au sens de l’article 4 de la Loi [voir sur cette question Riches, McKenzie & Herbert c Pepper King Ltd (2000), 8 CPR (4th) 471 (CF 1re inst)].

[22]  En effet, MM. Pouliot et Noël ne précisent pas si ces factures ont de fait accompagné les Produits lorsque ceux-ci ont été transférés au client. Mis à part le fait qu’elles indiquent la même adresse de vente et d’expédition, ces factures ne mentionnent aucune date d’expédition, ni aucune autre information à ce sujet. On ne sait rien non plus de la façon dont les clients prennent possession ou acquièrent la propriété des Produits (par exemple, si ces derniers doivent nécessairement être livrés ou si un client ne pourrait pas également en prendre possession en se rendant lui-même au point de vente de la Propriétaire).

[23]  Le rapport sommaire auquel la Propriétaire réfère comme la « liste des ventes » ne comble en rien ces imprécisions. En effet, ce rapport consiste essentiellement en une liste des ventes effectuées entre le 1er janvier 2013 et 31 décembre 2017 (dont au moins une douzaine pendant la période pertinente) concernant le même numéro de produit que celui apparaissant aux factures datées des 8 septembre et 13 décembre 2017, également décrit comme « RETRACK RAMPE 48" X 96" TOLE GALV. », incluant les dates des transactions, les numéros de factures, de même que les prix de vente.

[24]  Or, il est bien établi qu’en l’absence de preuve à cet effet, le registraire ne peut pas présumer que les factures accompagnaient les produits au moment de leur transfert de propriété [Riches, McKenzie & Herbert].

[25]  En raison de l’absence d’explication et de preuve concernant la façon dont la Marque figurait sur les Produits ou était autrement liée à ces derniers à tel point qu’un avis de liaison ait été donné par la Propriétaire aux consommateurs au moment du transfert des Produits, je ne suis pas en mesure de conclure à l’emploi de la Marque en liaison avec les Produits au sens des articles 4 et 45 de la Loi au cours de la période pertinente. Aucun fait justifiant un défaut d’emploi n’a par ailleurs été fourni.

Décision

[26]  Dans l’exercice des pouvoirs qui m’ont été délégués en vertu des dispositions de l’article 63(3) de la Loi, l’enregistrement sera radié selon les dispositions de l’article 45 de la Loi.

 

Iana Alexova

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

 

 


COMMISSION DES OPPOSITIONS DES MARQUES DE COMMERCE

OFFICE DE LA PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE DU CANADA

COMPARUTIONS ET AGENTS INSCRITS AU DOSSIER

___________________________________________________

Aucune audience tenue

AGENTS AU DOSSIER

CAIN LAMARRE S.E.N.C.R.L.

Pour la Propriétaire inscrite

ROBINSON SHEPPARD SHAPIRO S.E.N.C.R.L./L.L.P.

Pour la Partie requérante

 

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