Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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Référence : 2021 COMC 156

Date de la décision : 2021-01-28

[TRADUCTION CERTIFIÉE,

NON RÉVISÉE]

DANS L’AFFAIRE DE L’OPPOSITION

 

Precision Nutrition, Inc.

Opposante

et

 

Baxter International Inc.

Requérante

 

1,637,634 pour PN Design

Demande

introduction

[1] Le 31 juillet 2013, Baxter International Inc. (la Requérante) a produit la demande no 1,637,634 (la Demande) en vue d’enregistrer la marque de commerce PN Design, reproduite ci‑dessous (la Marque).

PN Design

[2] La Demande est liaison avec les produits et services suivants :

Services d’enseignement et de formation dans le domaine de la nutrition parentérale; services médicaux et de soins de santé, nommément offre de services de conseillers et d’information sur les besoins nutritionnels et les produits alimentaires; offre d’information médicale clinique; information et conseils sur les besoins nutritionnels des patients et les produits alimentaires; évaluation d’hôpitaux et d’établissements médicaux et de soins de santé, nommément diffusion d’information médicale pour le traitement médical clinique et la diffusion d’information et de conseils dans le domaine des besoins nutritionnels des patients.

[3] La Demande est fondée sur l’emploi proposé de la Marque au Canada et sur l’emploi et l’enregistrement de la Marque en Australie. La demande revendique la priorité à l’égard d’une demande produite en Australie le 10 juillet 2013.

[4] La Demande a été annoncée aux fins d’opposition dans le Journal des marques de commerce le 1er juillet 2015. Le 1er décembre 2015, Precision Nutrition, Inc. (l’Opposante) a produit une déclaration d’opposition à l’encontre la Demande en vertu de l’article 38 de la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, c T-13 (la Loi). Je fais remarquer que la Loi a été modifiée le 17 juin 2019. Toutes les mentions dans la présente décision visent la Loi dans sa version modifiée, à l’exception des renvois aux motifs d’opposition qui se rapportent à la Loi dans sa version avant sa modification (voir l’article 70 de la Loi qui prévoit que l’article 38(2) de la Loi, dans sa version antérieure au 17 juin 2019, s’applique aux demandes annoncées avant cette date).

[5] L’Opposante soulève des motifs d’opposition fondés sur l’absence de droit à l’enregistrement en vertu des articles 16(2)a) et 16(3)a), l’absence de caractère distinctif en vertu de l’article 2 et la non-conformité aux articles 30d), e) et i) de la Loi. En ce qui concerne les motifs d’opposition fondés sur l’absence de droit à l’enregistrement et l’absence de caractère distinctif, l’Opposante invoque l’emploi qu’elle a fait au Canada de la marque de commerce PN Logo, reproduite ci-dessous :

Pn Logo

[6] En particulier, l’Opposante affirme que sa marque de commerce PN Logo est employée au Canada par l’Opposante et ses licenciés depuis au moins aussitôt que le 7 décembre 2001 en liaison avec les services suivants (les Services de l’Opposante) :

Services éducatifs, nommément offre de cours en ligne dans les domaines de l’alimentation et de l’entraînement physique; services éducatifs, nommément offre de cours, de conférences et d’ateliers dans les domaines de l’alimentation et de l’entraînement physique; services éducatifs, nommément tenue de cours, de conférences et d’ateliers dans les domaines de l’alimentation et de l’entraînement physique ainsi que distribution de matériel éducatif connexe; services éducatifs, nommément offre de cours en ligne dans les domaines de l’alimentation et de l’entraînement physique; services d’encadrement par des pairs dans les domaines de l’alimentation et de l’entraînement physique; services d’encadrement personnel dans les domaines de l’alimentation et de l’entraînement physique; services d’encadrement professionnel dans les domaines de l’alimentation et de l’entraînement physique; offre d’encadrement de groupe dans les domaines de l’alimentation et de l’entraînement physique.

[7] La Requérante a produit une contre-déclaration le 26 janvier 2016, contestant les motifs d’opposition. Les deux parties ont produit des preuves. Seule la Requérante a produit des observations écrites. Une audience a eu lieu au cours de laquelle les deux parties étaient représentées.

[8] Pour les motifs énoncés ci-dessous, la Demande est rejetée en partie.

la preuve

[9] La preuve produite par les parties est résumée ci-dessous et est également examinée dans l’analyse des motifs d’opposition.

La preuve de l’Opposante

[10] L’Opposante a produit l’Affidavit de Robert Lombardi souscrit le 23 décembre 2016 (l’Affidavit Lombardi). M. Lombardi n’a pas été contre-interrogé au sujet de son affidavit.

[11] M. Lombardi est le directeur financier de l’Opposante. Il décrit l’Opposante comme l’une des plus grandes sociétés privées de conseil en nutrition au monde. Le siège de l’Opposante se trouve à Toronto.

[12] M. Lombardi indique que l’Opposante est la propriétaire de la marque de commerce PN Logo présentée au paragraphe 5, ci-dessus. Il déclare que la marque PN Logo a été employée au Canada par l’Opposante, ses prédécesseurs en titre ou ses licenciés depuis au moins aussi tôt que le 7 décembre 2001 en liaison avec les Services de l’Opposante.

[13] M. Lombardi déclare que l’Opposante est connue pour ses services de conseil dans les domaines de l’alimentation, de la santé et de l’entraînement physique pour hommes et femmes offerts par le biais de sa plateforme de conseils en ligne et de son site Web qui se trouve à l’adresse ebwww.precisionnutrition.com (le « site Web PN »). Les clients de l’Opposante s’inscrivent à un processus de conseils de 12 mois, disponible en ligne et par des appareils personnels. Chaque jour, grâce à la plateforme de conseils en ligne, les clients reçoivent une leçon, une séance d’entraînement et une habitude à mettre en pratique. L’Opposante propose également des cours de certification pour les professionnels de l’entraînement physique.

[14] Des imprimés du site Web PN, qui affichent la marque PN Logo, sont inclus en tant que Pièces « A » à « D », et comme Pièces « H » et « I ». En outre, des imprimés de pages archivées du site Web PN de 2009-2010, affichant également la marque PN Logo, sont inclus comme pièce « J ». Des imprimés des pages des médias sociaux de l’Opposante affichant la marque PN Logo sont inclus comme Pièce « K ».

[15] M. Lombardi déclare que les Pièces « A » à « K » sont représentatives de la manière dont la marque PN Logo a été employée, annoncée et promue au Canada pendant de nombreuses années, et continue à être employée, annoncée et promue au Canada.

[16] Les chiffres de ventes annuelles au Canada en liaison avec la marque PN Logo de 2008 à 2015 sont inclus dans l’Affidavit Lombardi, allant de plus de 200 000 $ à plus de 2 500 000 $ en 2015. Le trafic annuel sur le site Web du Canada vers le site Web PN y est également inclus.

La preuve de la Requérante

[17] La Requérante a produit l’Affidavit de Soultana (Tania) Marvaki souscrit le 21 avril 2017 (l’Affidavit Marvaki) et l’Affidavit d’Ellen Anastacio souscrit le 27 avril 2017 (l’Affidavit Anastacio). Mme Marvaki et Mme Anastacio ont toutes deux été contre-interrogées au sujet de leurs affidavits respectifs et les transcriptions, les pièces, ainsi que les réponses aux engagements font partie du dossier.

L’Affidavit Marvaki

[18] Mme Marvaki est la directrice de l’unité opérationnelle, Nutrition de Baxter Corporation, qu’elle décrit comme une société affiliée de la Requérante. Elle déclare que l’acronyme « PN » dans la Marque [traduction] « signifie nutrition parentérale et est un acronyme courant utilisé dans l’industrie pour désigner ce type d’alimentation par voie intraveineuse. »

[19] La Pièce « A » de l’Affidavit Marvaki est constituée de résultats d’une recherche en ligne sur le terme « nutrition parentérale ». Le premier résultat de la recherche provient de Wikipédia et décrit la nutrition parentérale comme suit :

[traduction]

La nutrition parentérale (NP) est le fait de suppléer artificiellement à l’alimentation d’un patient par voie intraveineuse en évitant ainsi le circuit habituel de l’alimentation et de la digestion. La personne reçoit la préparation nutritionnelle contenant du glucose, des sels, des acides aminés, des lipides, des minéraux alimentaires, des compléments de vitamines.

[20] Mme Marvaki indique que la Requérante a employé la Marque de façon continue au Canada depuis septembre 2013 en liaison avec un programme de nutrition parentérale. Elle déclare que la Marque est employée au Canada par Baxter Corporation en vertu d’une licence accordée par la Requérante qui exerce le contrôle sur la nature et la qualité des services liés à la Marque.

[21] La Pièce « B » de l’Affidavit Marvaki est constituée de documents décrits comme [traduction] « divers documents de promotion et d’information concernant le programme de nutrition parentérale arborant la Marque ». La Pièce comprend des documents arborant la Marque qui décrivent les produits et services de nutrition parentérale de la Requérante, ainsi que des diapositives d’une présentation relative à la nutrition parentérale lors de l’International Conference for Advancing Nutrition (ICAN) en mars 2016 à Chicago. Certaines diapositives arborant la Marque font également la promotion d’une autre conférence de l’ICAN qui a lieu plus tard en 2016 à Toronto.

[22] Dans presque tous les cas où la Marque est affichée dans les documents de la Pièce « B », la Marque est affichée directement à côté du titre d’appel « La Nutrition des patients, repensée » (ou en anglais « Patient nutrition, evolved »). Dans le corps des documents, le terme nutrition parentérale est souvent abrégé « PN ».

[23] Mme Marvaki décrit que les documents de la Pièce « B » sont [traduction] « disponibles sur l’application mobile Vablet, sont distribués aux consommateurs sous forme imprimée et par courrier électronique et sont distribués et présentés lors de conférences de l’industrie. » Cependant, aucune donnée n’est fournie dans l’Affidavit Marvaki concernant l’étendue de la distribution de ces documents au Canada. Dans ses réponses écrites aux engagements pris lors du contre-interrogatoire de Mme Marvaki, la Requérante a fourni quelques chiffres intitulés « QTÉ imprimée » pour certains documents figurant dans la Pièce « B », sans toutefois préciser où ni même si ces documents ont été distribués. Dans ses réponses écrites, la Requérante a également fourni des commentaires concernant la présentation de la Marque à l’ICAN et à d’autres événements; toutefois, je n’ai aucun détail concernant ces événements, s’ils ont eu lieu au Canada, et bon nombre des documents censés arborer la Marque et mentionnés dans ces réponses n’ont pas été fournis et ne semblent pas être inclus dans l’Affidavit Marvaki.

[24] Mme Marvaki déclare que le principal marché pour les services de la Requérante en liaison avec la Marque est constitué d’hôpitaux et d’établissements de soins de santé, et qu’étant donné la nature de la nutrition parentérale (c’est-à-dire qu’il s’agit d’un produit intraveineux), il n’existe réellement aucun autre marché applicable pour ces services.

L’Affidavit Anastacio

[25] Mme Anastacio est une recherchiste en marques de commerce employée par l’agent de la Requérante. Son affidavit comprend, comme Pièce « A », des imprimés d’une recherche qu’elle a effectuée sur le site Web de l’Opposante à l’adresse www.precisionnutrition.com et, comme Pièce « B », des imprimés de pages archivées de ce site Web datées du 1er décembre 2015.

[26] L’Affidavit Anastacio semble avoir pour but de suggérer que toutes les pages du site Web PN de l’Opposante n’arborent pas la marque de commerce PN Logo de l’Opposante. Toutefois, je n’ai pas trouvé l’Affidavit Anastacio utile sur ce point de fait, étant donné le nombre limité de pages du site Web PN qui y sont incluses, par rapport aux nombreux éléments de preuve du site Web produits par l’Opposante arborant la marque de commerce PN Logo, et compte tenu des doutes soulevés lors du contre-interrogatoire quant à savoir si les imprimés des Pièces « A » et « B » de l’Affidavit Anastacio constituaient une représentation complète de ce qui aurait été visible pour un visiteur de la page Web [par exemple, voir les Q19 à Q30 de la transcription du contre‑interrogatoire de Mme Anastacio]. En conséquence, je n’examinerai pas cet affidavit davantage.

fardeau de preuve et dates pertinentes

motifs d’opposition fondés sur l’article 30

Non-conformité à l’article 30d) de la Loi

[29] L’Opposante soutient que la Demande n’est pas conforme à l’article 30d) de la Loi, parce qu’à la date de production de la Demande, la Marque n’était pas employée par la Requérante ni par un prédécesseur en titre désigné, en Australie en liaison avec les services ou la Requérante n’avait pas d’établissement industriel ou commercial effectif et sérieux en Australie. L’Opposante soutient également que la revendication de priorité de la Requérante est invalide.

[30] Il n’y a aucune preuve au dossier pour appuyer un motif d’opposition fondé sur l’article 30d). Plus précisément, il n’y a aucune preuve de l’une ou l’autre des parties qui fait état de l’emploi (ou du défaut d’emploi) de la Marque par la Requérante en Australie, ni d’ailleurs de quoi que ce soit en rapport avec les activités de la Requérante en Australie. À l’audience, l’Opposante a fait valoir que, comme l’Affidavit Marvaki décrivait l’emploi de la Marque au Canada par Baxter Corporation comme étant en vertu d’une licence accordée par la Requérante, cela suggérait que le même contrat de licence était en place en Australie et qu’un tel emploi en vertu d’une licence ne serait pas suffisant pour étayer la revendication de l’emploi et de l’enregistrement de la Marque à l’étranger, conformément à la décision Molson Cos Ltd c Rola Weinbrennerei Und 21 Likorfabrick GmbH (1988), 23 CPR (3d) 197 (COMC). À mon avis, rien dans le dossier de preuve ne permet de supposer que les circonstances de l’emploi de la Marque en Australie sont les mêmes que celles du Canada, et je rejette donc l’argument de l’Opposante sur ce point.

[31] À l’audience, l’Opposante a également cherché à invoquer la décision Allergan Inc c. Lancôme Parfums & Beauté & Cie, société en nom collectif (2007), 64 CPR (4th) 147, au para 93 (COMC) (Allergan), une affaire dans laquelle un motif d’opposition fondé sur l’article 30d) a été accueilli à l’égard d’une demande basée sur l’emploi et l’enregistrement en France. Cependant, dans Allergan, il y avait des éléments de preuve de l’Opposante établissant le défaut d’emploi de la marque de commerce en France, de sorte que l’Opposante a pu s’acquitter de son fardeau de preuve initial. Comme il est indiqué ci-dessus, je ne suis saisi d’aucune preuve comparable concernant l’Australie en l’espèce.

[32] Par conséquent, l’Opposante ne s’est pas acquittée de son fardeau de preuve initial en ce qui concerne le motif d’opposition fondé sur l’article 30d) et ce motif est donc rejeté.

Non-conformité avec l’article 30e) de la Loi

[33] L’Opposante soutient que la Demande n’est pas conforme aux exigences de l’article 30e) de la Loi parce que la Requérante, soit par elle-même ou par l’intermédiaire d’une personne licenciée, n’avait pas l’intention d’employer la Marque au sens de l’article 4 de la Loi en liaison avec les services énumérés dans la Demande. Il n’y a pas de preuve au dossier pour soutenir ce motif d’opposition et, à l’audience, l’Opposante a indiqué qu’elle renonçait à ce motif. Je conclus que l’Opposante ne s’est pas acquittée de son fardeau de preuve initial et le motif d’opposition fondé sur l’article 30e) est rejeté.

Non-conformité avec l’article 30i) de la Loi

[34] L’Opposante soutient que la Demande n’est pas conforme à l’article 30i) de la Loi parce que la Requérante n’aurait pas pu être convaincue qu’elle avait le droit d’employer la Marque au Canada puisqu’elle créait de la confusion avec la marque de commerce PN Logo de l’Opposante, dont la Requérante avait ou aurait dû avoir connaissance.

[35] Lorsqu’un requérant a fourni la déclaration exigée par l’article 30i), un motif d’opposition fondé sur cet article devrait être accueilli seulement dans des cas exceptionnels, comme lorsqu’il y a une preuve de mauvaise foi de la part du requérant ou une violation d’une loi fédérale [voir Sapodilla Co Ltd c Bristol-Myers Co (1974), 15 CPR (2d) 152 (COMC), à la p. 155 et Interprovincial Lottery Corp c Monetary Capital Corp (2006), 51 CPR (4th) 447 (COMC)]. La simple connaissance de l’existence d’une marque de commerce d’un opposant n’appuie pas en soi une allégation selon laquelle un requérant n’aurait pas pu être convaincu de son droit d’employer une marque de commerce [voir Woot, Inc c WootRestaurants Inc / Les Restaurants Woot Inc, 2012 COMC 197].

[36] À l’audience, l’Opposante a indiqué qu’elle renonçait à ce motif. De toute façon, la Demande contient la déclaration requise et il n’y a aucune preuve qu’il s’agit d’une situation exceptionnelle comportant de la mauvaise foi ou une violation d’une loi fédérale. Par conséquent, le motif d’opposition fondé sur l’article 30i) est rejeté.

motifs d’opposition fondés sur la confusion alléguée

Motif d’opposition fondé sur l’absence de droit à l’enregistrement – articles 16(2)a) et 16(3)a)

[37] L’Opposante fait valoir que la Requérante n’est pas la personne ayant droit à l’enregistrement de la Marque car, à la date de dépôt prioritaire de la Demande (soit le 10 juillet 2013), la Marque créait de la confusion avec la marque PN Logo de l’Opposante, qui avait antérieurement été employée au Canada par l’Opposante ou ses licenciés depuis au moins aussi tôt que le 7 décembre 2001 en liaison avec les Services de l’Opposante.

[38] L’Opposante a démontré l’emploi de sa marque de commerce PN Logo en liaison avec les Services de l’Opposante bien avant la date pertinente, et il n’y a aucune preuve suggérant que l’Opposante avait abandonné sa marque de commerce à la date de l’annonce de la Demande. Par conséquent, je suis convaincu que l’Opposante s’est acquittée de son fardeau de preuve initial relativement au motif d’opposition fondé sur l’absence de droit à l’enregistrement. Ce motif d’opposition repose sur la question de probabilité de confusion entre la Marque et la marque de commerce PN Logo de l’Opposante.

Le test en matière de confusion

[39] Le test permettant de trancher la question de la confusion est énoncé à l’article 6(2) de la Loi, qui prévoit que l’emploi d’une marque de commerce crée de la confusion avec une autre marque de commerce lorsque l’emploi des deux marques de commerce dans la même région serait susceptible de faire conclure que les produits liés à ces marques de commerce sont fabriqués, vendus, donnés à bail ou loués, ou que les services liés à ces marques sont loués ou exécutés, par la même personne, que ces produits ou ces services soient ou non de la même catégorie générale ou figurent ou non dans la même classe de la classification de Nice. En faisant une telle évaluation, je dois tenir compte de toutes les circonstances pertinentes de l’espèce, y compris celles énumérées à l’article 6(5) de la Loi : le caractère distinctif inhérent des marques de commerce et la mesure dans laquelle elles ont été connues, la durée d’emploi des marques de commerce, la nature des produits, services ou des affaires, la nature du commerce et le degré de ressemblance entre les marques de commerce en apparence, en son ou dans les idées qu’elles suggèrent.

[40] Ces critères ne sont pas exhaustifs et un poids différent sera accordé à différents facteurs selon le contexte [voir Veuve Clicquot Ponsardin c Boutiques Cliquot Ltée, 2006 CSC 23, 49 CPR (4th) 401; Mattel, Inc c 3894207 Canada Inc, 2006 CSC 22, [2006] 1 RCS 772, au para 54]. Je m’appuie également sur l’affirmation de la Cour suprême du Canada dans Masterpiece Inc c Alavida Lifestyles Inc, 2011 CSC 27, 92 CPR (4th) 361 (CSC), au para 49, selon laquelle le critère énoncé à l’article 6(5)e), la ressemblance entre les marques, est souvent celui qui revêt le plus d’importance dans l’analyse relative à la confusion.

[41] Le critère relatif à la confusion est évalué par rapport à la première impression que laisse dans l’esprit du consommateur ordinaire plutôt pressé la vue de la marque de la requérante, alors qu’il n’a qu’un vague souvenir de la marque de commerce de l’opposante et qu’il ne s’arrête pas pour réfléchir à la question en profondeur, pas plus que pour examiner de près les ressemblances et les différences entre les marques [Veuve Clicquot, précitée, au para 20].

Degré de ressemblance

[42] Le degré de ressemblance entre les marques de commerce des parties est élevé. L’élément frappant des marques de commerce des deux parties est l’acronyme « PN » et dans les marques des deux parties, ces lettres sont encadrées par une forme hexagonale. Il existe certaines différences d’apparence entre les marques; par exemple, dans le cas de la Marque de la Requérante, l’hexagone est orienté différemment et la Marque incorpore une forme de gouttelette dans l’hexagone qui est absente de la marque de commerce de l’Opposante. La marque de commerce de l’Opposante semble également comporter un mélange de lettres majuscules et de minuscules. Toutefois, dans l’ensemble, je ne considère pas que les différences visuelles soient importantes, sous l’angle de la première impression, pour une personne ayant un vague souvenir de la marque de commerce de l’Opposante. Les marques sont également identiques lorsqu’elles sont prononcées.

[43] La Requérante soutient que les idées suggérées par les marques de commerce sont différentes, en partie parce la marque PN Logo de l’Opposante est généralement affichée à côté du nom « Precision Nutrition », de sorte que les consommateurs comprendraient que « PN » renvoie à « Precision Nutrition », par rapport au « PN » de la Marque de la Requérante qui, selon cette dernière, signifie « nutrition parentérale ». Toutefois, je ne trouve pas cet argument particulièrement convaincant en l’espèce, car, à mon avis, la preuve suggère que la marque PN Logo de l’Opposante serait perçue comme une marque de commerce en soi, distincte du nom « Precision Nutrition » (à cet égard, il existe de nombreux exemples dans les éléments de preuve de l’Oopposante où la marque PN Logo est affichée seule, séparée du nom « Precision Nutrition » – par exemple, voir les Pièces « B3 » et « D » de l’Affidavit Lombardi). En outre, sur la base des preuves au dossier, je ne puis conclure que la Marque de la Requérante serait nécessairement comprise comme une référence à la « nutrition parentérale », étant donné que bon nombre des services énumérés dans la Demande ne sont pas limités à la nutrition parentérale.

[44] À la lumière de ce qui précède, dans l’ensemble, le facteur du degré de ressemblance favorise l’Opposante.

Le caractère distinctif inhérent des marques de commerce et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues

[45] En règle générale, les marques de commerce constituées d’acronymes sont considérées comme des marques « faibles » ayant un caractère distinctif inhérent à faible degré [voir GSW Ltd c Great West Steel Industries Ltd (1975), 22 CPR (2d) 154 (C.F 1re inst), aux p. 163 et 164; et Gemological Institute of America Inc c Gemology Headquarter International LLC, 2014 CF 1153, 127 CPR (4th) 163]. En l’espèce, les marques de commerce des deux parties sont des marques de commerce composites qui comprennent les lettres « PN » en conjonction avec un élément de dessin. J’estime que les marques de commerce des deux parties possèdent un certain caractère distinctif inhérent au regard des éléments de dessin; toutefois, les marques de commerce des deux parties demeurent intrinsèquement faibles et se situent à l’extrémité inférieure du spectre du caractère distinctif inhérent.

[46] En ce qui concerne la mesure dans laquelle les marques de commerce des parties sont devenues connues, la preuve de l’Opposante démontre l’emploi de sa marque de commerce au Canada depuis de nombreuses années, y compris les chiffres de ventes annuelles en liaison avec la marque PN Logo remontant à 2008. Je suis convaincu que la marque de commerce de l’Opposante est connue dans une mesure raisonnable au Canada en liaison avec les Services de l’Opposante.

[47] La Requérante n’a pas démontré que sa Marque était employée ou était devenue connue dans une quelconque mesure au Canada à la date pertinente relativement au motif d’opposition fondé sur l’absence de droit à l’enregistrement (10 juillet 2013), car la preuve de la Requérante indique qu’elle a commencé à employer la Marque au Canada en septembre 2013. De toute façon, quelle que soit la date pertinente, la preuve de la Requérante de l’étendue de son emploi de la Marque au Canada à tout moment est faible. L’Affidavit Marvaki produit par la Requérante ne fournit aucun chiffre de vente ou de distribution en lien avec la Marque au Canada, et les renseignements supplémentaires fournis par la Requérante dans ses réponses aux engagements ne me permettent pas, selon moi, de conclure que la Marque était connue dans une mesure significative au Canada.

[48] Par conséquent, en tenant compte à la fois du caractère distinctif inhérent des marques de commerce des parties et de la mesure dans laquelle elles sont devenues connues, ce facteur favorise l’Opposante.

Durée d’emploi des marques de commerce

[49] L’Affidavit Lombardi indique que la marque PN Logo a été employée au Canada par l’Opposante, ses prédécesseurs en titre ou ses licenciés, depuis au moins aussitôt que décembre 2001 en liaison avec les Services de l’Opposante. L’Affidavit Lombardi fournit de multiples exemples de l’emploi de la marque PN Logo, qui sont qualifiés de « représentatifs » de l’emploi par l’Opposante de sa marque de commerce, et aucun de ces éléments de preuve n’a été contestée lors du contre-interrogatoire. Je note que le premier exemple de l’emploi de la marque de l’Opposante contenu dans l’Affidavit Lombardi date de 2009 (voir le paragraphe 26 et la Pièce « J » de l’Affidavit Lombardi), et la Pièce « J » de l’Affidavit Lombardi comprend également ce qui semble être des versions archivées du site Web PN de 2005 qui n’arborent pas la marque PN Logo de l’Opposante.

[50] Cependant, indépendamment de la date précise à laquelle l’emploi de la marque PN Logo de l’Opposante a commencé, l’Affidavit Lombardi démontre que l’Opposante a commencé à employer sa marque bien avant la date pertinente relativement au motif d’opposition fondé sur l’absence de droit à l’enregistrement, et bien avant le premier emploi de sa Marque par la Requérante au Canada. Par conséquent, ce facteur favorise également l’Opposante.

Genre de produits, services ou entreprises; et nature du commerce

[51] Compte tenu des autres facteurs qui pèsent en faveur de l’Opposante en l’espèce, l’analyse relative à la confusion repose en grande partie sur la mesure dans laquelle la nature des produits, des services et celle des voies de commerce probables des parties se chevauchent. En particulier, la Requérante a-t-elle démontré que ses produits et services et la nature de ses échanges commerciaux sont suffisamment différents de ceux de l’Opposante pour éviter une probabilité de confusion?

[52] C’est le libellé de l’état déclaratif des services dans la demande qui régit l’analyse relative à la confusion. L’état déclaratif doit être interprété dans l’optique de déterminer le type probable d’entreprise ou de commerce envisagé par le requérant et non l’ensemble des commerces que la description des services est susceptible d’englober. À cet égard, la preuve de commerce réel du requérant peut être utile [voir McDonald’s Corporation v Coffee Hut Stores Ltd (1996), 68 CPR (3d) 168 (CAF), à la p. 169; London Life Insurance Co v Nesbitt Thomson Inc (1997), 75 CPR (3d) 114 (COMC)].

[53] Je commencerai par le premier service décrit dans la demande, à savoir « Services d’enseignement et de formation dans le domaine de la nutrition parentérale ». La preuve de la Requérante indique que la « nutrition parentérale » est le fait de suppléer artificiellement à l’alimentation d’un patient par voie intraveineuse en évitant ainsi le circuit habituel de l’alimentation et de la digestion [Affidavits Marvaki, para 3 et Pièce « A »]. Au cours de l’audience, j’ai demandé si l’Opposante contestait cette définition de la nutrition parentérale et j’ai cru comprendre que ce n’était pas le cas.

[54] Le reste de la preuve de la Requérante suggère que les services de nutrition parentérale sont fournis par des professionnels de la santé dans un milieu médical comme un hôpital afin de traiter des patients sous-alimentés pour lesquels d’autres moyens d’ingestion des aliments sont compromis. Ainsi, le marché des produits et services de nutrition parentérale semble être celui des professionnels de la santé et des institutions de la communauté médicale.

[55] À mon avis, ce premier service énuméré dans la Demande est fondamentalement différent des Services de l’Opposante. Les éléments de preuve indiquent que les Services de l’Opposante en liaison avec la marque PN Logo sont des conseils relatifs à l’alimentation et à l’entraînement physique destinés au grand public qui cherche à perdre du poids et à améliorer sa santé et son bien-être en général. L’Opposante propose ses services au grand public par l’intermédiaire de son site Web. Enfin, je considère qu’il est peu probable qu’une personne ayant un vague souvenir de la marque PN Logo de l’Opposante en liaison avec les conseils relatifs à l’alimentation et à l’entraînement physique pense que les services de nutrition parentérale (c’est-à-dire l’alimentation par voie intraveineuse) en liaison avec la Marque proviennent de la même source que ceux de l’Opposante, ou qu’ils soient autrement employés sous licence, parrainés ou autorisés par l’Opposante. À mon avis, la nature des services et les circuits commerciaux probables sont trop dissemblables.

[56] Cependant, les autres services figurant dans la Demande ne sont pas définis de manière aussi étroite et ne sont pas intrinsèquement limités au domaine spécifique de la nutrition parentérale. En effet, les autres services figurant dans la Demande pourraient raisonnablement être considérés comme englobant des services généraux de consultation et de conseil en matière de nutrition, bien que dans un environnement médical. À mon avis, ces autres services, tels que décrits dans la Demande, sont potentiellement de nature plus proche des Services de l’Opposante, en particulier les services de l’Opposant relatifs au conseil en nutrition. En outre, les éléments de preuve fournis par la Requérante en l’espèce ne permettent pas de déterminer quelles activités spécifiques ces autres services figurant dans la Demande pourraient comprendre, au-delà des services d’enseignement et de formation dans le domaine de la nutrition parentérale. Sur ce point, je note qu’au paragraphe 86 de ses observations écrites, la Requérante déclare : [traduction] « Tout service d’enseignement ou de formation fourni par la Requérante est limité à la nutrition parentérale et ne serait pas confondu avec les services généraux axés sur l’entraînement physique fournis par l’Opposante ». Cependant, la Demande comprend néanmoins une liste des autres services qui ne sont pas expressément liés à la nutrition parentérale et que je dois considérer comme faisant partie de l’analyse relative à la confusion. Avec ces autres services tels que décrits dans la Demande, il existe, à mon avis, un risque de chevauchement avec les Services de l’Opposante.

Autres circonstances additionnelles

Emploi simultané

[57] La Requérante soutient que la coexistence des marques de commerce des parties est une circonstance de l’espèce qui pèse en sa faveur.

[58] La preuve de cas réels de confusion n’est pas requise pour démontrer une probabilité de confusion. Cependant, l’emploi simultané de deux marques de commerce sans de tels cas de confusion réelle est une circonstance de l’espèce qui peut suggérer une absence de probabilité de confusion, selon la nature et la durée particulières de cet emploi simultané [voir Christian Dior SA c Dion Neckwear Ltd, 2002 CAF 29, 20 CPR (4th) 155, au para 19].

[59] En l’espèce, bien que l’Affidavit Marvaki indique que la Requérante a employé la Marque au Canada, je n’ai pas de preuve suffisante de la Requérante concernant l’étendue de cet emploi pour attribuer un poids à la prétendue coexistence des marques de commerce des parties. De plus, l’Affidavit Marvaki indique que l’emploi de la Marque par la Requérante n’a commencé au Canada qu’après la date pertinente relativement au motif d’opposition fondé sur l’absence de droit à l’enregistrement, ce qui réduit encore davantage l’importance de toute coexistence.

[60] Par conséquent, ce facteur n’aide pas la Requérante.

Conclusion concernant la confusion

[61] Après avoir examiné toutes les circonstances de l’espèce, je conclus que la Requérante s’est acquittée de son fardeau ultime de démontrer qu’il n’y a aucune probabilité raisonnable de confusion entre les marques de commerce des parties en ce qui concerne les services « Services d’enseignement et de formation dans le domaine de la nutrition parentérale ». Je suis convaincu que ces services sont suffisamment différents des Services de l’Opposante que la confusion est peu probable.

[62] Toutefois, en ce qui concerne les autres services figurant dans la Demande, j’estime qu’au mieux pour la Requérante, la prépondérance des probabilités est également partagée entre une conclusion de confusion et une conclusion d’absence de confusion. À mon avis, pour les autres services mentionnés dans la Demande, il existe un risque de chevauchement avec les Services de l’Opposante. Étant donné que le fardeau de démontrer, selon la prépondérance des probabilités, qu’il n’existe pas de probabilité raisonnable de confusion incombe à la Requérante, je dois donc trancher à l’encontre de la Requérante à l’égard des autres services.

[63] Compte tenu de ce qui précède, le motif d’opposition fondé sur l’absence de droit à l’enregistrement en vertu des articles 16(2)a) et 16(3)a) de la Loi est rejeté à l’égard des services « Services d’enseignement et de formation dans le domaine de la nutrition parentérale », et le motif d’opposition fondé sur l’absence du droit à l’enregistrement est accueilli l’égard des autres services énumérés dans la Demande.

Motif d’opposition fondé sur le caractère distinctif – article 2

[64] Avec ce motif d’opposition, l’Opposante plaide que la Marque n’est pas distinctive compte tenu de l’emploi antérieur par l’Opposante, et de la publicisation de sa marque PN Logo. La date pertinente relativement à ce motif d’opposition est la date de production de la déclaration d’opposition, à savoir le 1er décembre 2015. À l’instar du motif d’opposition fondé sur l’absence du droit à l’enregistrement, ce motif d’opposition repose sur la question de probabilité de confusion entre les marques de commerce des deux parties.

[65] Afin de s’acquitter du fardeau de preuve initial à l’égard d’un motif d’opposition fondé sur l’absence de caractère distinctif, une opposante doit démontrer que sa marque de commerce avait une réputation importante, significative ou suffisante au Canada en liaison avec les services pertinents [voir Bojangles’ International, LLC et Bojangles Restaurants, Inc c Bojangles Café Ltd, 2006 CF 657, 48 CPR (4th) 427, au para 34]. En l’espèce, je suis convaincu que l’Opposante s’est acquittée de ce fardeau de preuve initial en raison de sa preuve d’un emploi considérable de la marque PN Logo au Canada liaison avec les Services de l’Opposante avant le 1er décembre 2015.

[66] La question à trancher devient donc celle de savoir si les marques de commerce des parties créent de la confusion à la date pertinente. À mon avis, la différence de date pertinente relativement au motif d’opposition fondé sur l’absence de caractère distinctif (par rapport à l’absence de droit à l’enregistrement) n’a pas d’incidence sur le résultat de l’analyse relative à la confusion. Ainsi, pour des raisons effectivement identiques à celles exposées ci-dessus concernant le motif d’opposition fondé sur l’absence de droit à l’enregistrement, le motif d’opposition fondé sur l’absence de caractère distinctif en vertu de l’article 2 de la Loi est également rejeté à l’égard des services « Services d’enseignement et de formation dans le domaine de la nutrition parentérale », mais est accueilli à l’égard des autres services visés par la Demande.

décision

[67] Dans l’exercice des pouvoirs qui m’ont été délégués en vertu des dispositions de l’article 63(3) de la Loi, je rejette l’opposition en ce qui a trait aux services « Services d’enseignement et de formation dans le domaine de la nutrition parentérale », et je rejette la demande en ce qui a trait au reste des services selon les dispositions de l’article 38(12) de la Loi.

 

Timothy Stevenson

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

Traduction certifiée conforme

Hortense Ngo

 


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