Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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Référence : 2020 COMC 145

Date de la décision : 2020-12-28

[TRADUCTION CERTIFIÉE,

NON RÉVISÉE]

DANS L’AFFAIRE DE L’OPPOSITION

 

Amann Co., Ltd., Amann USA Inc., Shanghai Jie Bing Restaurant Management Co. Ltd. et Snowy Dessert Inc.

Opposantes

et

 

Snowy Village Dessert Cafe Ltd.

Requérante

 

1 787 626 pour SNOWY VILLAGE

Demande

Introduction

[1] Amann Co., Ltd., Amann USA Inc., Shanghai Jie Bing Restaurant Management Co. Ltd. et Snowy Dessert Inc. (appelées collectivement l’Opposante) s’oppose à l’enregistrement de la marque de commerce SNOWY VILLAGE (la Marque), qui fait l’objet de la demande no 1 787 626 produite par Snowy Village Dessert Cafe Ltd. (la Requérante) en liaison avec :

Produits :

(1) Cartes-cadeaux; sacs en papier; serviettes de table en papier.

(2) Sacs à provisions en tissu.

(3) Café, thé, pain, pâtisseries, confiseries, nommément confiseries (pâtisseries), et desserts glacés.

(4) Desserts glacés à base de produits laitiers.

 

Services :

 

[2] L’emploi du terme « Produits » dans la présente décision fait collectivement référence aux produits mentionnés aux paragraphes (1) à (4) ci-dessus, autrement appelés individuellement « Produits (1) », « Produits (2) », « Produits (3) » et « Produits (4) » respectivement.

[3] La Demande revendique l’emploi de la Marque au Canada depuis au moins aussi tôt que le 31 août 2015 en liaison avec les Produits (3) et (4) et les Services, et l’emploi proposé de la Marque au Canada en liaison avec les Produits (1) et (2).

[4] Pour les motifs qui suivent, la demande est rejetée en partie.

Le dossier

[5] La demande d’enregistrement relative à la Marque a été produite le 17 juin 2016 et a été annoncée aux fins d’opposition dans le Journal des marques de commerce du 16 août 2017. Le 16 janvier 2018, l’Opposante a produit une déclaration d’opposition en vertu de l’article 38 de la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, c T-13 (la Loi). Tous les renvois dans la présente décision sont faits à la Loi dans sa version modifiée le 17 juin 2019, à l’exception des renvois faits aux motifs d’opposition, qui renvoient à la Loi avant sa modification [voir l’article 70 de la Loi qui prévoit que l’article 38(2) de la Loi, dans sa version antérieure au 17 juin 2019, s’applique aux demandes annoncées avant cette date].

[6] L’Opposante soulève des motifs d’opposition fondés sur la non-conformité à l’article 30; l’absence de droit à l’enregistrement en vertu de l’article 16; et l’absence de caractère distinctif en vertu de l’article 2 de la Loi, tel qu’il est précisé à l’Annexe A de la présente.

[7] Le 14 février 2018, la Requérante a produit et signifié une contre-déclaration dans laquelle elle conteste les motifs d’opposition invoqués dans la déclaration d’opposition.

[8] À l’appui de son opposition, l’Opposante a produit l’affidavit de Zheng Guan, directeur de Snowy Dessert Inc., assermenté le 29 mai 2018, accompagné des Pièces A à G (l’affidavit Guan) et de l’affidavit de Jason Sungjin Lee, président-directeur général d’Amann USA Inc., assermenté le 1er juin 2018 avec les Pièces A à U (l’affidavit Lee). Les auteurs des affidavits n’ont pas été contre-interrogés.

[9] À l’appui de sa demande, la Requérante a produit l’affidavit de son unique administratrice, Ayoung Jo, assermenté le 2 octobre 2018 par l’entremise de Susan Ritchie (une interprète pour l’anglais et le coréen) avec les Pièces A à O (l’affidavit Jo). L’auteur de l’affidavit n’a pas été contre-interrogé.

[10] Les deux parties ont produit des plaidoyers écrits et aucune audience n’a été tenue.

Fardeau de preuve et dates pertinentes

[11] L’Opposante doit s’acquitter du fardeau de preuve initial en produisant suffisamment d’éléments de preuve admissibles à partir desquels on pourrait raisonnablement conclure à l’existence des faits allégués à l’appui de chaque motif d’opposition [John Labatt Limited c The Molson Companies Limited (1990), 30 CPR (3d) 293 (CF 1re inst)]. Si elle s’acquitte de ce fardeau, la Requérante a ensuite le fardeau ultime de démontrer, selon la prépondérance des probabilités, que sa demande est conforme aux exigences de la Loi.

[12] Les dates pertinentes se rapportant aux motifs d’opposition sont les suivantes :

· Articles 38(2)a) et 30 de la Loi – la date de production de la demande, soit le 17 juin 2016 [Georgia-Pacific Corporation c Scott Paper Ltd (1984), 3 CPR (3d) 469, à la p. 475 (COMC)].

· Articles 38(2)c) et 16(1) de la Loi – la date d’emploi revendiquée dans la demande, à savoir le 31 août 2015 [article 16(1) de la Loi]. Cependant, si cette date de premier emploi est contestée avec succès, la date pertinente devient la date de production de la demande [Everything for a Dollar Store (Canada) Inc c Dollar Plus Bargain Centre Ltd (1998), 86 CPR (3d) 269 (COMC)].

· Articles 38(2)c) et 16(3) de la Loi – la date de production de la demande, à savoir le 17 juin 2016 [article 16(3) de la Loi].

· Articles 38(2)d) et 2 de la Loi – la date de production de l’opposition, à savoir le 16 janvier 2018 [Metro-Goldwyn-Mayer Inc c Stargate Connections Inc (2004), 34 CPR (4th) 317 (CF)].

Analyse

Article 30a)

[13] L’Opposante soutient que, contrairement à l’article 30a) de la Loi, les Produits (4) contenus dans la demande d’enregistrement de la Marque ne sont pas décrits dans les termes ordinaires du commerce. Plus particulièrement, étant donné que les termes « desert » [désert] et « dessert » [dessert] ont des significations différentes, l’Opposante soutient qu’il [traduction] « n’est pas clair ce qu’est un “désert glacé à base de produits laitiers” ». Je ne suis pas d’accord. En lisant l’ensemble de la description des Produits (4), je suis convaincue que l’inclusion du terme « desert » [désert] par la Requérante dans l’état déclaratif des Produits comme produit était une erreur typographique, qu’elle était clairement destinée à être une référence au terme « dessert » [dessert] et qu’elle serait facilement comprise comme tel. Je ne suis pas disposée à conclure que la demande d’enregistrement relative à la Marque ne satisfait pas aux exigences de l’article 30a) de la Loi simplement en raison de cette erreur typographique. En conséquence, ce motif d’opposition est rejeté.

Article 30b)

[14] L’article 30b) de la Loi exige l’emploi ininterrompu de la Marque dans la pratique normale du commerce, de la date revendiquée (le 31 août 2015) à la date de dépôt de la demande (le 17 juin 2016) [Labatt Brewing Co c Benson & Hedges (Canada) Ltd (1996), 67 CPR (3d) 258 (CF 1re inst), à la p. 262]. La définition d’« emploi » est décrite à l’article 4 de la Loi, les parties pertinentes étant reproduites ci-dessous :

4(1) Une marque de commerce est réputée employée en liaison avec des produits si, lors du transfert de la propriété ou de la possession de ces produits, dans la pratique normale du commerce, elle est apposée sur les produits mêmes ou sur les emballages dans lesquels ces produits sont distribués, ou si elle est, de toute autre manière, liée aux produits à tel point qu’avis de liaison est alors donné à la personne à qui la propriété ou possession est transférée.

(2) Une marque de commerce est réputée employée en liaison avec des services si elle est employée ou montrée dans l’exécution ou l’annonce de ces services.

[15] Le fardeau initial de l’Opposante est léger quant à la question de la non-conformité avec l’article 30b) de la Loi, étant donné que les faits concernant le premier emploi par la Requérante relèvent particulièrement des connaissances de la Requérante [Tune Masters c Mr P’s Mastertune Ignition Services Ltd (1986), 10 CPR (3d) 84 (COMC)]. Il est possible de s’acquitter de ce fardeau en renvoyant non seulement à la preuve de l’Opposante, mais également à celle de la Requérante [Brasserie Labatt Ltée c Brasseries Molson (1996), 68 CPR (3d) 216 (CF 1re inst)]. L’Opposante peut donc se fonder avec sur un élément de preuve présenté par la Requérante pour s’acquitter de son fardeau initial, s’il démontre que la preuve de la Requérante remet en question les allégations formulées dans la demande de la Requérante [Corporativo de Marcas GJB, SA de CV c Bacardi & Company Ltd, 2014 CF 323, aux para 30 à 38].

[16] À l’appui de son motif d’opposition fondé sur l’article 30b), l’Opposante s’appuie sur une combinaison de sa propre preuve (l’affidavit Lee) et de la preuve de la Requérante (l’affidavit Jo). Plus précisément, l’Opposant soutient que l’ouverture du premier emplacement commercial de la Requérante a eu lieu en décembre 2015 [affidavit Lee, Pièce U; affidavit Jo, para 15] et qu’aucune preuve n’a été produite relativement à l’emploi des Produits (3) et (4) de la Requérante ou de ses Services à la date de premier emploi revendiquée.

[17] À l’appui de la date de premier emploi revendiquée par la Requérante, Mme Jo déclare ce qui suit :

[traduction]

· La Requérante a continuellement employé la Marque en liaison avec les Services au Canada depuis la date de premier emploi revendiquée. [para 11]

· Entre le 8 et le 15 août 2015, des affiches de vitrine et de fenêtres arborant la Marque, ainsi que des affiches temporaires « coming soon » [prochainement], ont été installées au premier emplacement commercial de la Requérante à Richmond, en Colombie‑Britannique. [para 8, 12 et 13, Pièces C et D montrant [traduction] « l’affiche et les dessins de fenêtres »]

Je note que l’Opposante conteste la déclaration de Mme Jo qui figure au paragraphe 13 et le contenu de la Pièce D, en soutenant que cette preuve est un ouï-dire inadmissible. Cependant, je ne crois pas qu’il soit nécessaire de régler cette question à la lumière de mes commentaires ci-dessous.

· La grande ouverture du premier emplacement commercial de la Requérante a eu lieu en décembre 2015. [para 15]

· Avant décembre 2015, la Requérante avait organisé des événements et était disponible pour organiser des événements à l’intention d’amis, de la famille, du grand public et d’investisseurs potentiels à son premier emplacement commercial à Richmond, où des échantillons de tous ses éléments de menu, y compris les Produits, étaient fournis. Ces événements avaient pour but de développer un marché pour les Produits et Services. [para 16, Pièce E montrant [traduction] « des photographies prises à un certain moment à partir d’octobre 2015 [à] décembre 2015 à l’un des événements organisés par [la Requérante] »]

· Les « revenus tirés de la vente des Produits » de la Requérante à son emplacement à Richmond (Colombie-Britannique) était d’environ 700 000 $ entre novembre 2015 et octobre 2016 et de 650 000 $ entre novembre 2016 et octobre 2017. De ces quantités, environ 78 % des produits vendus étaient des desserts glacés à base de produits laitiers et non laitiers; 20 % étaient du pain, des pâtisseries et des confiseries; et 2 % étaient du café et du thé. [para 27]

[18] Dans son affidavit, Mme Jo indique clairement que la Requérante a ouvert son premier établissement commercial en décembre 2015 [affidavit Jo, para 15], soit plus de trois mois après la date de premier emploi revendiquée. Compte tenu de cet aveu, et en l’absence de preuve démontrant effectivement l’emploi de la Marque avec l’un des Produits ou Services le 31 août 2015 ou avant, je suis convaincue que l’Opposante a suffisamment soulevé les revendications de la Requérante concernant l’emploi de la Marque en liaison avec les Produits (3) et (4) et les Services. L’Opposante s’étant acquittée de son léger fardeau de preuve initial relativement à ce motif d’opposition, il incombe à la Requérante de démontrer, selon la prépondérance des probabilités, que sa demande de marque d’enregistrement de la Marque est conforme aux dispositions de l’article 30b) de la Loi.

[19] À mon avis, la preuve au dossier est insuffisante pour appuyer la date du premier emploi revendiquée dans la demande d’enregistrement de la Marque. Plus précisément, en ce qui concerne l’emploi de la Marque en liaison avec des Produits (3) et (4), la Requérante n’a fourni aucune preuve d’emploi au sens de l’article 4(1) de la Loi. Sauf lorsqu’elle fournit des chiffres pour l’emplacement de la Requérante à Richmond [affidavit Jo, para 27], la preuve de Mme Jo est dépourvue d’assertions d’emploi précises à l’égard des Produits (3) ou (4). Mme Jo ne fournit pas d’étiquettes, d’emballages, de factures ou d’exemples clairs démontrant comment la Requérante affiche la Marque en lien avec l’un ou l’autre des Produits. De plus, bien qu’elle affirme que des échantillons des éléments du menu de la Requérante ont été distribués pendant des événements promotionnels, comme il en sera question plus en détail ci-dessous, Mme Jo ne fournit aucun document pour prouver que de tels événements ont eu lieu à la date revendiquée de la demande, soit le 31 août 2015 ou avant. La preuve la plus ancienne de tels événements datait d’octobre 2015.

[20] En ce qui concerne l’emploi de la Marque en liaison avec les services, il a été établi que dans la mesure où les services sont offerts pour exécution au Canada, cela suffit pour s’acquitter des exigences en vertu de l’article 4(2) de la Loi, si la Marque est employée ou affichée dans leur publicité [Wenward (Canada) Ltd c Dynaturf Co (1976), 28 CPR (2d) 20 (COMC)]. Cependant, compte tenu de la preuve de Mme Jo, je ne suis pas en mesure de conclure que la Requérante pouvait offrir des services de cafés-restaurants à la date de premier emploi revendiquée. Mme Jo ne fait aucune déclaration claire à cet égard. En fait, bien que sa preuve porte sur la disponibilité de la Requérante à promouvoir les Services pendant des événements d’études de commercialisation à un moment donné à l’automne 2015, Mme Jo ne précise pas la date exacte à partir de laquelle elle était en mesure de le faire. La preuve la plus ancienne de tels événements n’est présentée qu’à partir d’octobre 2015 et il est douteux qu’elle établisse même comment la Marque a pu être employée ou affichée à cette occasion. À mon avis, il est également douteux que la seule réceptivité de la Requérante d’organiser des activités promotionnelles pour les Services équivaut nécessairement à sa réceptivité d’offrir ces Services ou à son état de préparation de participer audits Services. Néanmoins, même si j’acceptais que l’affichage extérieur fût présent depuis le 15 août 2015 et que je présume que l’événement tenu en octobre 2015 constituait l’emploi de la Marque en liaison avec les Services, il demeure que rien n’indique que la Requérante était disposée et en mesure d’exécuter les Services en date du 31 août 2015.

[21] Par conséquent, le motif d’opposition invoqué en vertu de l’article 30b) est retenu à l’égard des Produits (3) et (4) et à l’égard des Services. Je remarque que j’en serais peut-être arrivée à une différente conclusion en ce qui a trait aux Services si la Requérante avait fourni des déclarations claires et des preuves documentaires concernant ses pratiques commerciales normales, ses activités promotionnelles tenues entre août et octobre 2015 et sa disponibilité pour exécuter les Services.

Article 30e)

[22] L’Opposante n’a produit aucun élément de preuve ou n’a présenté aucune observation à l’appui du motif d’opposition en vertu de l’article 30e). Par conséquent, ce motif est rejeté parce que l’Opposante ne s’est pas acquittée de son fardeau de preuve.

Article 30i)

[23] L’article 30i) de la Loi exige qu’un requérant inclue dans sa demande une déclaration portant qu’il est convaincu qu’il a droit d’employer sa marque de commerce. Lorsque le requérant a fourni cette déclaration, un motif d’opposition fondé sur l’article 30i) ne devrait être accueilli que dans des cas exceptionnels, comme lorsqu’il existe une preuve de mauvaise foi [Sapodilla Co Ltd v Bristol Myers Co (1974), 15 CPR (2d) 152 (COMC)] ou l’existence d’une relation contractuelle qui serait enfreinte par l’enregistrement de la marque de commerce [AFD China Intellectual Property Law Office v AFD China Intellectual Property Law (USA) Office, Inc, 2017 COMC 30].

[24] L’Opposante soutient que la demande d’enregistrement de la Marque a été déposée de mauvaise foi en raison de : (1) la relation antérieure de la Requérante avec Amann Co., Ltd.; (2) la Requérante ayant connaissance lui profitant des marques de commerce de l’Opposante, des droits à ses marques de commerce et de l’intention d’élargir ses activités au Canada; et (3) la révélation par les Opposantes d’une de leurs marques de commerce ou plus au Canada.

[25] Même s’il semble plus probable que la Requérante connaissait les restaurants ou les marques de commerce de l’Opposante à l’étranger, le simple fait de connaître l’existence des marques de commerce ou des noms commerciaux d’un opposant ne suffit pas pour établir qu’une requérante ne pouvait pas être convaincue d’avoir le droit d’employer sa Marque [Woot, Inc c WootRestaurants Inc Les Restaurants Woot Inc, 2012 COMC 197]. La seule connaissance des droits antérieurs qu’allègue un opposant n’empêche pas le requérant de produire sincèrement la déclaration prévue à l’article 30i) de la Loi [Effigi Inc c ZAM Urban Dynamics Inc, 2010 COMC 214; Bousquet c Barmish Inc (1991), 37 CPR (3d) 516 (CF 1re inst), conf. par (1993), 46 CPR (3d) 510 (CAF)]. Même demander l’enregistrement d’une marque de commerce au Canada tout en sachant qu’elle a été employée dans un autre pays ne constitue pas en soi de la mauvaise foi [Taverniti SARL c DGGM Bitton Holdings Inc (1986), 8 CPR (3d) 400 (COMC), aux p. 404 et 405; Viper Room Development, LLC c 672661 Alberta Ltd, 2014 COMC 201, au para 4; Restaurant Development Group LLC c Vescio Group Inc, 2016 COMC 82, au para 43].

[26] En ce qui a trait à ce motif, la preuve de l’Opposante est :

· Elle est la propriétaire des marques de commerce incluse dans le tableau ci-dessous.

[affidavit Lee, para 8 à 37, Pièces A à N; affidavit Guan, para 8]

· Les caractères coréens et chinois dans les marques de commerce de l’Opposante ci‑dessus peuvent se traduire par « Snowy Village » en anglais. [affidavit Lee, para 9, 26 et 33; affidavit Guan, para 9 et 10]

· [traduction] « [Amann Co., Ltd.] exploite des restaurants et des cafés (l’“Entreprise”) ». [traduction] « L’un des principaux desserts les plus populaires de [son] Entreprise est un dessert fait de glace pilée et de haricots rouges qui est servi dans un bol ». [affidavit Lee, para 39, affidavit Guan, para 6 et 7]

· [traduction] « [Amann Co., Ltd.] élargit son Entreprise en engageant des licenciés exclusifs potentiels dans différentes administrations du monde entier ». [affidavit Lee, para 43]

· [traduction] « En juillet 2015 ou vers cette période » Amann Co., Ltd. a entamé des discussions avec Ayoung Jo au sujet de [traduction] l’« intérêt de Mme Jo à devenir le licencié exclusif d’[Amann Co., Ltd.] ». [affidavit Lee, para 48]

· [traduction] « Le 31 juillet 2015 ou vers cette date », la Requérante a été constituée en société. [affidavit Lee, para 49, Pièce P]

· [traduction] « À la mi-août 2015 ou vers cette époque », Amann Co., Ltd. et Mme Jo ont échangé sur un projet d’accord de franchise, bien qu’aucun accord définitif n’ait jamais été conclu. [affidavit Lee, para 50 à 52, Pièce Q]

[27] La Requérante, contestant la preuve de M. Lee au sujet des négociations, soutient qu’il s’agit d’un ouï-dire inadmissible étant donné que M. Lee n’affirme pas qu’il était présent pendant les négociations alléguées, et qu’il n’identifie pas de personne au sein d’Amann Co., Ltd. qui a participé à ces discussions. La Requérante soutient en outre que l’Opposante n’a pas de droits de marque de commerce au Canada qu’il pourrait licencier et qu’en tout état de cause, la Requérante n’a jamais conclu d’accord avec l’Opposante.

[28] On peut se demander si M. Lee a été le choix le plus approprié de personne pour soumettre la preuve des négociations alléguées des parties. Les déclarations de M. Lee sont faites en se fondant sur connaissance personnelle, « à moins qu’elles n’aient été déclarées en fonction de renseignements ou de croyances » ou sont obtenues des dossiers et registres d’Amann USA Inc. et d’Amann Co., Ltd. [para 7]. Toutefois, je note que M. Lee n’indique pas expressément qu’il a consulté ces dossiers et ces registres. De plus, il ne s’ensuit pas inévitablement que, dans son poste chez Amann USA Inc. [para 1], M. Lee était également chargé de superviser et de gérer les opérations nord-américaines d’Amann Co., Ltd. [para 4], et qu’il aurait personnellement participé à de telles négociations ou aurait acquis une connaissance directe de ces dernières. Quoi qu’il en soit, je ne crois pas qu’il soit nécessaire de régler cette question à la lumière de mes commentaires ci-dessous.

[29] Premièrement, la preuve de l’Opposante ici n’établit pas que l’une de ses marques de commerce SNOWY VILLAGE a été employée, révélée ou avait acquis une réputation au Canada à la date pertinente, de sorte que la Requérante n’aurait pas pu déclarer qu’elle avait le droit d’employer sa Marque.

[30] Deuxièmement, même en supposant que les parties ont participé à des négociations sur l’octroi de licences et/ou le franchisage, il y a des lacunes dans les éléments de preuve de M. Lee qui rendent difficile la détermination de l’ampleur des négociations qui auraient pu avoir lieu. En fait, M. Lee n’indique pas qui, au sein des organisations de l’Opposante, a participé aux échanges allégués en vue de faire de la Requérante le licencié exclusif d’Amann Co. Ltd. M. Lee ne fournit aucune preuve que l’ébauche de l’accord mentionnée ci-dessus est effectivement échangée à un moment quelconque (il n’y a aucune référence à une piste de communication ou à des détails sur l’affranchissement ou l’expédition à cet égard) et il n’indique pas précisément qui a fait des inscriptions sur l’accord (la traduction fournie n’identifie pas les initiales qui figurent à côté des inscriptions). Il est également loin d’être clair que cet accord devait conférer une licence exclusive aux marques de commerce étrangères de l’Opposante au Canada. Le document ne contient aucune mention des enregistrements de marque de commerce étrangers de l’Opposante, aucune mention des droits exclusifs, aucune limitation territoriale claire et aucune indication de ce que les deux références à une [traduction] « marque de commerce, nom commercial et secret commercial » qu’il contient peuvent désigner. De plus, même si je constate que le libellé « Snowy Village » figure dans le paragraphe d’introduction de l’accord et dans le coin supérieur droit de chaque page, il n’est jamais mentionné ni défini expressément comme une marque de commerce ou un nom commercial. Par conséquent, par ouï-dire ou non, j’estime que la preuve de négociations de M. Lee et un projet d’accord n’aident guère l’Opposante.

[31] Par conséquent, je ne suis pas convaincue que l’Opposante ait démontré une preuve suffisante en ce qui a trait à son allégation de mauvaise foi.

[32] L’Opposante ne s’est également pas acquittée de son fardeau de preuve initial à l’égard de son allégation selon laquelle la Requérante ne pouvait être convaincue qu’elle avait droit d’employer la Marque en raison de l’application combinée des articles 7b) et c) de la Loi. D’une part, l’Opposante n’a démontré aucun droit exécutoire sur les marques de commerce au Canada, par exemple en démontrant que ses marques ont été utilisées, révélées ou ont acquis une réputation au Canada [Kirkbi AG c Ritvik Holdings Inc, 2003 CAF 297]. L’Opposante devait également produire des éléments de preuve à l’appui des trois éléments requis d’une action en commercialisation trompeuse : (1) l’existence de l’achalandage; (2) la déception du public due à la représentation trompeuse; et (3) des dommages actuels ou possibles [Ciba-Geigy Canada Ltd c Apotex Inc, [1992] 3 RCS 120, à la p. 132 cité par Pharmacommunications Holdings Inc c Avencia International Inc, 2008 CF 828, au para 41], ce qu’elle n’a pas fait.

[33] Par conséquent, le motif d’opposition fondé sur l’article 30i) est rejeté dans son intégralité.

Articles 16(1)a) et 16(3)a)

[34] Pour s’acquitter de son fardeau de preuve à l’égard de ces motifs, l’Opposante doit démontrer que l’une de ses marques de commerce invoquées, qu’elle affirme avoir été employée à l’extérieur du Canada, a été révélée au Canada avant le 17 juin 2016 et n’avait pas été abandonnée en date du 16 août 2017, date de l’annonce de la demande.

[35] La définition de « révélé » est décrite à l’article 5 de la Loi, reproduit ci-dessous :

Quand une marque de commerce est réputée révélée

5 Une personne est réputée faire connaître une marque de commerce au Canada seulement si elle l’emploie dans un pays de l’Union, autre que le Canada, en liaison avec des produits ou services, si, selon le cas :

a) ces produits sont distribués en liaison avec cette marque au Canada;

b) ces produits ou services sont annoncés en liaison avec cette marque :

i) soit dans toute publication imprimée et mise en circulation au Canada dans la pratique ordinaire du commerce parmi les marchands ou usagers éventuels de ces produits ou services,

ii) soit dans des émissions de radio ordinairement captées au Canada par des marchands ou usagers éventuels de ces produits ou services,

et si la marque est bien connue au Canada par suite de cette distribution ou annonce.

[36] La preuve de l’Opposante ne démontre pas que ses marques de commerce ont été révélées au Canada conformément aux exigences de l’article 5. Premièrement, la preuve n’établit pas clairement l’emploi des marques de commerce de l’Opposante dans un pays de l’Union. M. Lee et M. Guan fournissent tous deux peu de renseignements sur l’emploi de la marque de commerce de l’Opposante à l’étranger et sur leurs affirmations respectives selon lesquelles Amann Co., Ltd. a exploité son Entreprise, en liaison avec une ou plus des marques de commerce invoquées par l’Opposante (qu’il s’agisse de marques de commerce en soi ou de licenciés exclusifs), en Corée du Sud et en République populaire de Chine [affidavit Lee, para 40 et 42; affidavit Guan, para 6] n’est pas étayé par la preuve au dossier. De plus, il n’y a aucune preuve de distribution ou de publicité des marques invoquées par l’Opposante au Canada à la date pertinente. Enfin, je ne peux souscrire à l’argument de l’Opposante selon lequel la « révélation » des marques invoquées par l’Opposante directement à Mme Jo dans le cadre des négociations alléguées des parties constitue une autre circonstance ou condition selon laquelle ces marques peuvent être réputées avoir été révélées au Canada. Même si les négociations mentionnées avaient été démontrées de façon satisfaisante, il demeure qu’une marque de commerce doit être connue dans une région importante du Canada, en raison de sa distribution ou de sa publicité, pour être considérée comme « bien connue » au sens de l’article 5 de la Loi [Valle’s Steak House c Tessier (1980), 49 CPR (2d) 218 (DFCT); Motel 6, Inc c. No 6 Motel Ltd (1981), 56 CPR (2d) 44 (CF 1re inst)]. Par conséquent, ces motifs d’opposition sont rejetés.

Article 2

[37] Le motif d’opposition fondé sur l’absence de caractère distinctif est à deux volets. L’Opposante allègue que la Marque ne fait pas de distinction, n’est pas adaptée pour distinguer et n’est pas non plus en mesure de distinguer les Produits et Services de la Requérante des produits, services et entreprises de : (1) Amann Co., Ltd., et ses licenciés sous les marques de commerce SNOWY VILLAGE mentionnées ci-dessus qui ont été révélées ou sont devenus connues et ont une réputation, un achalandage ou les deux au Canada en raison de leur emploi en Corée du Sud et en Chine; et (2) Snowy Dessert Inc., sous la marque de commerce et le nom commercial SNOWY DESSERT.

[38] Afin de s’acquitter de son fardeau de preuve, l’Opposante doit démontrer qu’au moins l’une de ses marques de commerce, ou ses noms commerciaux, est devenu connu dans une mesure suffisante au Canada afin de nier le caractère distinctif de la Marque, en date du 16 janvier 2018 [Motel 6, Inc; Bojangles’ International LLC c Bojangles Café Ltd (2004), 40 CPR (4th) 553 (COMC), conf. par (2006), 48 CPR (4th) 427 (CF 1re inst)]. À cet égard, elle doit établir que ses marques ou noms étaient soit connus au Canada au moins dans une certaine mesure (c’est-à-dire, qu’ils avaient acquis une réputation qui était « importante, significative ou suffisante », ou qui étaient bien connues dans une région particulière du Canada [Bojangles »]. Toutefois, le terme « réputation » ici sous-entend plus que la simple connaissance : les marques ou noms de l’Opposante doivent être connus par les consommateurs, à titre d’indicateurs de source [Scott Paper Ltd c Georgia-Pacific Consumer Products LP (2010) 83 CPR (4th) 273 (CF); 1648074 Ontario Inc c Akbar Brothers (PVT) Ltd, 2019 CF 1305; Domaines Pinnacle Inc c Les Vergers de la Colline Inc 2014 COMC 110, conf. par 2016 CF 188].

[39] Puisqu’il n’y a aucune preuve démontrant que les marques SNOWY VILLAGE de l’Opposante à l’étranger sont devenues connues des consommateurs canadiens, le premier volet de ce motif d’opposition est rejeté parce que l’Opposante n’a pas rempli son fardeau de preuve initial.

[40] Le deuxième volet de ce motif d’opposition est également rejeté parce que l’Opposante ne s’est pas acquittée de son fardeau de preuve. L’Opposante, au para 94 de son plaidoyer écrit, soutient que sa marque de commerce SNOWY DESSERT [traduction] « a acquis une réputation et un achalandage substantiels ». À cet égard, M. Guan affirme que le restaurant SNOWY DESSERT ouvert par Snowy Dessert Inc. [traduction] « en juillet 2017 ou vers cette époque » [traduction] « est devenu bien connu au moins à Edmonton, en Alberta » [affidavit Guan, para 13 et 14] et fournit trois articles publiés sur Internet entre le 20 et le 27 août 2017. [affidavit Guan, para 16 à 18, Pièces A à C], critiques de restaurants sur Internet [affidavit Guan, para 19 et 20, Pièces D et E] et un imprimé de la page d’accueil du site Web de Snowy Dessert Inc. à www.snowydessert.ca [affidavit Guan, para 21, Pièce F].

[41] Étant donné que M. Guan ne fournit aucun chiffre de vente ou aucune publicité concernant le restaurant SNOWY DESSERT de l’Opposante, ni aucun détail sur la façon dont il est promu, qu’il n’y a aucune indication du nombre de visiteurs canadiens au site Web www.snowydessert.ca et compte tenu du manque d’information sur le nombre de consommateurs qui ont pu être exposés aux quelques publications pertinentes diffusées sur Internet, je ne suis pas en mesure de déterminer dans quelle mesure la marque de commerce et le nom commercial SNOWY DESSERT de l’Opposante seraient devenus connus au Canada, encore moins à Edmonton, en Alberta, à la date pertinente pour évaluer ce motif d’opposition.

[42] Par conséquent, le motif d’opposition fondé sur l’article 2 est rejeté dans son intégralité.


 

Décision

[43] Vu que l’Opposante a en partie eu gain avec ce motif d’opposition en fonction de l’article 30b) de la Loi, dans l’exercice des pouvoirs qui m’ont été délégués en vertu des dispositions de l’article 63(3) de la Loi, je rejette la demande d’enregistrement en ce qui a trait aux Produits (3), (4) et aux Services et je rejette l’opposition en ce qui a trait aux Produits (1), (2), tous en vertu de l’article 38(12) de la Loi.

 

Iana Alexova

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

Traduction certifiée conforme

Marie-France Denis


Annexe A

Extraits de la déclaration d’opposition

[traduction]

[…]

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Par conséquent, la Requérante savait ou aurait raisonnablement dû savoir qu’elle n’était pas propriétaire d’une des Marques de commerce ou de la Marque de commerce de l’Opposante et qu’elle n’avait pas et n’a pas le droit d’employer une des Marques de commerce de l’Opposante ou la marque de commerce au Canada en liaison avec les produits et services décrits dans la Demande, sauf sous une licence de l’Opposante, Amann Co., Ltd., qu’elle ne détenait pas. Par conséquent, la Requérante a présenté la Demande de « mauvaise foi ».

 

De plus, la Requérante savait ou aurait raisonnablement dû savoir que tout emploi de la Marque de commerce au Canada par la Requérante en liaison avec les produits et services décrits dans la Demande serait raisonnablement susceptible de : (i) créer de la confusion avec n’importe laquelle des Marques de commerce de l’Opposante contrairement à l’article 7b) et 20 de la Loi; (ii) d’être une commercialisation trompeuse contrairement à l’article 7c) de la Loi; ou (iii) à la fois (i) et (ii) ci-dessus.

 

 

 

 

 

[…]

 


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