Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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CIPO

LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

THE REGISTRAR OF TRADEMARKS

Référence : 2021 COMC 56

Date de la décision : 2021-03-29

[TRADUCTION CERTIFIÉE,

NON RÉVISÉE]

DANS L’AFFAIRE DE LA PROCÉDURE DE RADIATION EN VERTU DE L’ARTICLE 45

 

Fasken Martineau Dumoulin LLP

Partie requérante

et

 

GENTEC, une société de personnes constituée de 901089 Ontario Limited et 2494979 Ontario Limited

Propriétaire inscrite

 

LMC780,998 pour iQ

Enregistrement

Introduction

[1] Le 13 décembre 2017, à la Fasken Martineau Dumoulin (la Partie requérante), le registraire des marques de commerce a émis un avis en vertu de l’article 45 de la Loi sur les marques de commerce, LRC (1985), c T‑13 (la Loi), à GENTEC, une société de personnes constituée de 901089 Ontario Limited et 2494979 Ontario Limited (la Propriétaire), la propriétaire inscrite de l’enregistrement no LMC780,998 pour la marque de commerce iQ (la Marque).

[2] La Marque est enregistrée pour l’emploi en liaison avec les produits suivants :

[traduction]

Accessoires pour lecteurs de musique personnels, lecteurs MP3, radios par satellite, téléphones cellulaires et lecteurs de musique portatifs, mais excluant tout emploi en liaison avec des produits de système mondial de localisation (GPS), nommément étuis, haut-parleurs, stations d’accueil pour la lecture de musique enregistrée ou pour le téléchargement et l’affichage d’images numériques, casques d’écoute, câbles d’interconnexion, adaptateurs de courant et produits d’entretien, nommément produits de nettoyage (liquides, en tissu et synthétiques) ainsi que protecteurs d’écran.

[3] L’avis enjoignait à la Propriétaire de démontrer qu’elle avait employé la Marque au Canada en liaison avec chacun des produits spécifiés dans l’enregistrement, à un moment quelconque au cours des trois années précédant la date de l’avis et, dans la négative, qu’elle précise la date à laquelle la Marque a ainsi été employée en dernier lieu et la raison de son défaut d’emploi depuis cette date. En l’espèce, la période pertinente pour démontrer l’emploi est du 13 décembre 2014 au 13 décembre 2017.

[4] La définition pertinente de l’emploi en ce qui a trait aux produits en l’espèce est énoncée à l’article 4(1) de la Loi comme suit :

4(1) Une marque de commerce est réputée employée en liaison avec des produits si, lors du transfert de la propriété ou de la possession de ces produits, dans la pratique normale du commerce, elle est apposée sur les produits mêmes ou sur les emballages dans lesquels ces produits sont distribués, ou si elle est, de toute autre manière, liée aux produits à tel point qu’avis de liaison est alors donné à la personne à qui la propriété ou possession est transférée.

[5] Il est bien établi que le but et l’objet de l’article 45 de la Loi sont d’assurer une procédure simple, sommaire et expéditive pour éliminer le « bois mort » du registre [Performance Apparel Corp c Uvex Toko Canada Ltd, 2004 CF 448, au para 68]. Même si le seuil pour établir l’emploi dans le cadre de cette procédure est faible [Woods Canada Ltd c Lang Michener (1996), 71 CPR (3d) 477 (CF 1re inst)] et qu’une preuve surabondante n’est pas requise [Union Electric Supply Co Ltd c Registraire des marques de commerce (1982), 63 CPR (2d) 56 (CF 1re inst)], de simples allégations d’emploi ne sont pas suffisantes pour établir l’emploi [Plough (Canada) Ltd c Aerosol Fillers Inc (1980), 53 CPR (2d) 62 (CAF)]. Il n’en faut pas moins présenter des faits suffisants pour permettre au registraire de conclure que la marque de commerce a été employée en liaison avec chacun des produits spécifiés dans l’enregistrement pendant la période pertinente [John Labatt Ltd c Rainer Brewing Co (1984), 80 CPR (2d) 228 (CAF)].

[6] En réponse à l’avis du registraire, la Propriétaire a remis l’affidavit de Dorothy Hayashi, la directrice des finances de la Propriétaire, souscrit le 11 octobre 2018.

[7] Les parties ont toutes les deux présenté des observations écrites et ont été présentes à l’audience qui a été tenue.

[8] Je remarque que la Propriétaire a déposé une demande de prolongation de l’état des produits en novembre 2016. Cette demande demeure en instance et n’est pas en cause dans la présente procédure.

La preuve

[9] Dans son affidavit, Mme Hayashi atteste que la Propriétaire fabrique, importe et vend une gamme de produits de consommation, y compris [traduction] « une gamme de produits et d’accessoires audiovisuels et de téléphones intelligents » [para 7]. Elle explique que la Propriétaire vend ses produits de marque iQ à des détaillants au Canada (par exemple, London Drugs, Bell Mobilité, Winners et La Source), qui les vendent ensuite aux consommateurs finaux. Elle confirme que pendant la période pertinente, la Propriétaire a constamment affiché la Marque sur l’emballage de ses produits iQ, en identifiant la Marque avec un symbole ® ou ™ adjacent [para 6].

[10] À l’appui, Mme Hayashi joint à son affidavit des photographies d’emballage ou d’images qu’elle confirme démontrer la façon dont la Marque figurait sur l’emballage pendant la période pertinente. Ces images comprennent les produits pertinents suivants :

  • iQ Power Case [Pièce B];
  • Station de chargement IQ Qi sans fil [Pièce D];
  • iQ Podz Écouteurs véritablement sans fil avec étui de chargement [Pièce F];
  • iQ câble de chargement et de synchronisation [Pièce H];
  • iQ Ensemble de charge suprême [Pièce J];
  • iQ Crystal Clear Screen Protector [Pièce N].

[11] En ce qui a trait à la Pièce D, je note que Mme Hayashi décrit les produits [traduction] « Station de chargement IQ Qi sans fil » comme des [traduction] « stations d’accueil ».

[12] En ce qui a trait au volume des ventes de produits iQ au Canada pendant la période pertinente, Mme Hayashi affirme que les ventes totales pour les produits enregistrés, à savoir les « étuis, stations d’accueil, casques d’écoute, câbles d’interconnexion, adaptateurs de courant, et produits d’entretien » dépassent 1 000 000 $ CA, avec des ventes pour chaque groupe précis excédant 5 000 $ [para 15].

[13] Mme Hayashi joint également à son affidavit des exemples de factures démontrant les détails des ventes de produits aux clients au Canada [Pièces C, E, G, I, K, M et O]. Même si je note que la date de certaines des factures n’était pas visée par la période pertinente, il semble que les produits iQ indiqués sur les factures datées de la période pertinente correspondent aux produits indiqués ci-dessus qui figurent sur les images des emballages. Ces produits facturés sont généralement identifiés par le « IQ » dans les colonnes de la description du produit et du code du produit. Une exception à cette règle est les factures à la Pièce O, qui indiquent « IPhone 5/5s/5c Crystal Clear Scr Screen Protector ». Toutefois, Mme Hayashi confirme que ces produits font référence aux protecteurs d’écran arborant la Marque, comme le montre la Pièce N [para 14].

Analyse

[14] Tout d’abord, la Propriétaire reconnaît que l’emploi de la Marque au cours de la période pertinente n’a pas été démontré en liaison avec les produits enregistrés « produits de nettoyage (liquides, en tissu et synthétiques) ». Comme il n’y a aucune preuve de circonstances spéciales justifiant tout défaut d’emploi de la Marque, l’enregistrement sera modifié en conséquence.

[15] Autrement, la Partie requérante soutient que la preuve de la Propriétaire n’indique pas l’emploi de la Marque en liaison avec chacun des produits restants visés par l’enregistrement pendant la période pertinente, sauf comme possible exception l’un des types précis de « câbles d’interconnexion ». Ses principales observations peuvent être résumées comme suit :

  • La preuve relative au produit « Station de chargement IQ Qi sans fil » ne démontre pas un emploi en liaison avec les produits visés par l’enregistrement plus particulier « stations d’accueil pour la lecture de musique enregistrée ou pour le téléchargement et l’affichage d’images numériques ».
  • Parmi les casques d’écoute présentés à la Pièce F, il n’y a pas de prévue qu’ils ont tous été vendus au Canada au cours de la période pertinente. De plus, la preuve portant sur le produit « iQ Podz Écouteurs véritablement sans fil » ne démontre pas un emploi en liaison avec les produits visés par l’enregistrement « casques d’écoute », puisque les produits en preuve ne sont pas des casques d’écoute. De plus, la marque de commerce employé en liaison avec les produits de « casques d’écoute » représentés ne constitue pas l’emploi de la Marque telle qu’elle a été enregistrée.
  • L’état déclaratif des produits tel qu’enregistré doit être compris comme étant composé de 35 produits individuels, chacun des sept produits précis étant un accessoire pour chacun des cinq appareils indiqués; par conséquent, la Propriétaire n’a pas démontré l’emploi en liaison avec chacun des produits visés par l’enregistrement.

Stations d’accueil

[16] En ce qui a trait aux produits visés par l’enregistrement, « stations d’accueil pour la lecture de musique enregistrée ou pour le téléchargement et l’affichage d’images numériques », la Partie requérante soutient que la fonction de la « Station de chargement IQ Qi sans fil » (comme le montre la Pièce D) vise à charger des appareils électroniques, ce qui constitue une différence [traduction] « frappante » de « pour le téléchargement et l’affichage d’images numériques ».

[17] En réponse, la Propriétaire fait valoir qu’un état déclaratif des produits devrait recevoir une interprétation généreuse [citant Fetherstonhaugh & Co c ConAgra Inc (2002), 23 CPR (4th) 49 (CF 1re inst); et Molson Canada c Kaiserdom-Privatbrauverei Bamberg Wörner KG (2005), 43 CPR (4th) 313 (COMC)]. En particulier, la Propriétaire fait valoir que [traduction] « le sens ordinaire de “station d’accueil” comprend les accessoires qui relient les appareils électroniques portatifs à une source d’alimentation », et que [traduction] « fournir une alimentation d’un appareil est un aspect essentiel de la “lecture” et du “téléchargement et de l’affichage” ». À l’audience, la Propriétaire a également invoqué Legault Joly Thiffault SENCRL c Harman International Industries Inc, 2019 COMC 58. Dans ce cas, on a constaté que les haut-parleurs sans fil correspondent à un système de son « complet », car un consommateur s’attendrait à ce qu’un haut-parleur sans fil comprenne les divers éléments énumérés dans l’état déclaratif des produits, étant un « système de son complet et ses éléments, nommément haut‑parleurs, amplificateurs de puissance, mélangeurs, processeurs de signaux, microphones et câbles ».

[18] Toutefois, même avec une vaste interprétation, j’estime que la présente affaire est différente des faits de la décision Harman. Plus précisément, je ne conclus pas que le chargement sans fil relève des produits enregistrés « stations d’accueil pour la lecture de musique enregistrée ou pour le téléchargement et l’affichage d’images numériques ». C’est-à-dire, même si Mme Hayashi identifie les produits « Station de chargement IQ Qi sans fil » comme étant des « stations d’accueil », je constate qu’elle ne décrit pas ces stations par les fonctions particulières énoncées expressément dans l’état déclaratif des produits, et je ne suis pas en mesure de les identifier comme des caractéristiques dans la preuve. Par conséquent, je suis d’accord avec la Partie requérante que, s’il s’agit d’une « station », ce produit semble avoir la seule fonction de charger des appareils électroniques, ce qui ne correspond pas aux produits tels qu’ils ont été enregistrés.

[19] Compte tenu de ce qui précède, je ne suis pas convaincu que la Propriétaire ait établi l’emploi de la Marque en liaison avec « stations d’accueil pour la lecture de musique enregistrée ou pour le téléchargement et l’affichage d’images numériques » au sens des articles 4 et 45 de la Loi. Puisqu’il n’y a aucune preuve de circonstances spéciales, l’enregistrement sera modifié en conséquence.

Casques d’écoute

[20] La Propriétaire reconnaît que, parmi les produits présentés à la Pièce F, seul « iQ Podz Écouteurs véritablement sans fil » comporte une prévue de vente au Canada au cours de la période pertinente. Toutefois, la Partie requérante soutient que ce produit ne constitue pas des « casques d’écoute » parce qu’il ne comprend aucune bande ni aucun autre moyen d’être joint sur la tête. À l’appui, la Partie requérante fournit plusieurs définitions de dictionnaire pour le mot « headphones » (casques d’écoute), comme celles du The Canadian Oxford Dictionary, où les « headphones » sont définis comme [traduction] « une paire d’écouteurs jointe par une bande placée sur la tête ou autour du cou, pour écouter de l’équipement audio, etc. » La Partie requérante fait également valoir que pour déterminer la signification du mot « headphones » (casques d’écoute), il faut se demander quelle serait la compréhension commune du propriétaire de la marque de commerce et du consommateur [citant Hilton Worldwide Holding LLP c Miller Thomson, 2018 CF 895, au para 72] et que, dans ce cas, le consommateur ne considérerait pas le produit représenté comme un « headphone » (casque d’écoute).
À cet égard, bien que le mot « headphones » soit affiché sur l’emballage, la Partie requérante fait remarquer que le registraire doit examiner la nature réelle des produits au lieu de se conformer à l’étiquette et aux observations de la Propriétaire [citant Plough, précité, au para 12, où la Cour d’appel a déclaré que ni la Cour ni le registraire « ni la Cour ni le registraire ne sont liés par l’opinion ou la conclusion du signataire, selon laquelle l’emploi qu’il fait de la marque de commerce est conforme à ce que la Loi prévoit à ce chapitre »].

[21] La Propriétaire, en revanche, soutient que ses « iQ Podz Écouteurs véritablement sans fil » vendus pendant la période pertinente sont en fait des casques d’écoute, comme en témoigne l’inclusion du mot descriptif « casques d’écoute » dans le nom du produit et sur l’emballage du produit. Selon la Propriétaire, la compréhension commune peut être déduite de la description employée sur l’emballage du produit. De plus, la Propriétaire fait remarquer que la signification des termes dans un enregistrement est influencée par l’évolution du commerce [citant Hilton, précité, aux para 80 et 82; également Levi Strauss & Co c Canada (Registraire des marques de commerce), 2006 CF 654], de sorte que la définition restrictive de la Partie requérante de « headphones » n’est, au mieux, plus appropriée. À cet égard, la Propriétaire attire l’attention sur Merriam-Webster.com, où la définition de « headphone » comprend l’entrée suivante : [traduction] « également : un petit écouteur inséré dans l’oreille ».

[22] Je suis d’accord avec les observations de la Propriétaire et j’accepte que ses « iQ Podz Écouteurs véritablement sans fil » entrent dans la portée des produits enregistrés « casques d’écoute ». Il ne s’agit pas d’un cas où la corrélation avec les produits visés par l’enregistrement se fait simplement dans des observations intéressées après coup. Mme Hayashi identifie des produits comme des « headphones » (casques d’écoute) dans son affidavit et je ne suis pas d’accord avec la Partie requérante pour dire qu’il y a une incohérence dans la preuve à cet égard. Contrairement aux stations de chargement mentionnées ci-dessus, il n’est pas exagéré de considérer que les « iQ Podz Écouteurs véritablement sans fil » de la Propriétaire entrent dans la portée de l’enregistrement.

[23] En ce qui concerne l’affichage de la Marque, la Partie requérante soutient que les produits identifiés comme étant des « iQ Podz Écouteurs véritablement sans fil » ne montrent pas l’emploi de la Marque telle qu’elle est enregistrée puisque la première impression du consommateur ne serait pas « iQ » seulement, mais la marque de commerce composite « iQ Podz » comme une expression. La Partie requérante soutient en outre que le fait que « iQ » soit représenté en rouge et « Podz » en gris est [traduction] « insuffisant pour générer une impression indépendante ». De plus, la Partie requérante considère que le symbole ® à droite des lettres « iQ » sur l’emballage est [traduction] « si petit » qu’il ne faut pas en tenir compte.

[24] Tout d’abord, je considère que ces observations sont théoriques, puisque l’emballage en preuve démontre également le boîtier d’entreposage des casques d’écoute – le boîtier représenté est gravé avec la Marque, sans aucun autre libellé.

[25] Quoi qu’il en soit, je considère que le public, lorsqu’il consulte le nom du produit tel qu’il est affiché sur l’emballage en preuve, considérerait que la Marque en soi est affichée puisqu’elle se démarque clairement du matériau additionnel par l’emploi de couleurs, de lettres et de dimensions différentes. De plus, les lettres « iQ » sont suivies du symbole ® – en rouge – et le mot « Podz » est suivi du symbole ™ – en gris argenté [selon Nightingale Interloc Ltd c Prodesign Ltd (1984), 2 CPR (3d) 535 (TMOB) et 88766 Canada Inc c National Cheese Co (200) 2), 24 CPR (4th) 410 (COMC)]. De plus, rien dans la Loi n’empêche un propriétaire de marque de commerce d’employer plus d’une marque de commerce en même temps en liaison avec les mêmes produits [AW Allen Ltd c Warner-Lambert Canada Inc (1985), 6 CPR (3d) 270 (CF 1re inst) et Conseil canadien des ingénieurs c Ardex Inc (2001), 13 CPR (4th) 554 (COMC)].

[26] À la lumière de ce qui précède, je suis convaincu que la Propriétaire a établi l’emploi de la Marque en liaison avec les « casques d’écoute » au sens des articles 4 et 45 de la Loi.

Étuis, câbles d’interconnexion, adaptateurs de courant, protecteurs d’écran

[27] En ce qui a trait aux produits visés par l’enregistrement « étuis », « câbles d’interconnexion », « adaptateurs de courant » et « protecteurs d’écran », il existe une preuve claire que des ventes ont été réalisées au Canada au cours de la période pertinente, et que de tels produits arboraient la Marque au moment du transfert.

[28] Cependant, la Partie requérante fait remarquer que la preuve ne contient qu’une seule facture de la période pertinente pour chacun des produits « iQ Ensemble de charge suprême » [Pièce K] et « iQ Protecteur d’écran invisible » [Pièce O], faisant remarquer en outre que la vente en preuve pour les protecteurs d’écran a appliqué des [traduction] « substitutions de prix ». Néanmoins, la preuve d’une seule vente peut suffire aux fins d’une procédure de radiation en vertu de l’article 45, pour autant qu’elle présente les caractéristiques d’une opération commerciale authentique et qu’elle ne soit pas perçue comme ayant été délibérément fabriquée ou inventée en vue de protéger l’enregistrement [voir Philip Morris Inc c Imperial Tobacco Ltd (1987), 13 CPR (3d) 289 (CF 1re inst), au para 12]. En l’espèce, la preuve dans son ensemble démontre que la pratique normale du commerce de la Propriétaire consiste à vendre des produits et des accessoires audiovisuels et de téléphones intelligents aux détaillants. Malgré les prix réduits, rien dans la preuve ne permet de croire qu’il ne s’agit pas d’une vente de bonne foi dans la pratique normale du commerce. En effet, étant donné que Mme Hayashi a déclaré que les ventes pour chaque produit spécifique dépassaient 5 000 $ au cours de la période pertinente, j’accepte que ces factures uniques pour chacune d’elles soient simplement représentatives des ventes dans la pratique normale du commerce.

[29] La Partie requérante fait également valoir que, sur la facture des protecteurs d’écran de la Pièce O, l’absence des lettres « IQ » dans la description du produit représente une ambiguïté qui devrait être interprétée à l’encontre de la Propriétaire. Il est entendu que, contrairement à tous les autres produits de la marque iQ mentionnés dans la preuve, « IPhone 5/5s/5c Crystal Clear Scr Screen Protector » semble être le seul produit indiqué sur une facture sans les lettres « IQ ». Toutefois, compte tenu d’une lecture équitable de l’ensemble de la preuve, cette absence n’est pas pertinente, puisque j’accepte que les produits de protection d’écrans facturés aient été vendus sur des emballages arborant la Marque, comme le montre la Pièce N.

[30] Compte tenu de ce qui précède, je suis convaincu que la Propriétaire a établi l’emploi de la Marque en liaison avec les produits visés par l’enregistrement « étuis », « câbles d’interconnexion », « adaptateurs de courant » et « protecteurs d’écran » au sens des articles 4 et 45 de la Loi.

« Approche matricielle » par rapport à « l’élimination du bois mort »

[31] Enfin, la Partie requérante fait valoir que l’état déclaratif des produits visés par l’enregistrement est [traduction] « quelque peu alambiqué » et doit être compris comme une liste de sept produits spécifiques (« étuis », « stations de chargement », « casques d’écoute », « câbles d’interconnexion », « adaptateurs de courant », « nettoyeurs » et « protecteurs d’écran »), chacun étant un accessoire pour cinq appareils électroniques différents (« lecteurs de musique », « lecteurs MP3 », « téléphones cellulaires » et « appareils de musique portatifs »). Au total, comme l’affirme la Partie requérante, la Propriétaire était donc tenue de démontrer l’emploi de la Marque en liaison avec 35 produits individuels [citant John Labatt, au para 14].

[32] À ce titre, la Partie requérante soutient en outre que, même si les éléments de preuve démontrent un emploi en liaison avec les produits visés par l’enregistrement « câbles d’interconnexion », cela ne représenterait que l’emploi en liaison avec les appareils électroniques précisés dans l’enregistrement, mais non en liaison avec de multiples appareils ou la totalité des appareils.

[33] En réponse, la Propriétaire fait valoir qu’une telle [traduction] « approche matricielle » est contraire à la portée et à l’objet des procédures de radiation prévues à l’article 45 ainsi qu’à une jurisprudence bien établie. Elle réitère qu’un état déclaratif des produits doit se voir accorder une interprétation généreuse dans le cadre d’une procédure prévue à l’article 45, ce qui comprend la prise en considération du contexte de la description des produits [citant Molson, précité; ConAgra, précité; Gowling Lafleur Henderson LLP c Liwayway Marketing Corporation, 2015 COMC 194; et le Manuel d’examen des marques de commerce du Canada].

[34] Quoi qu’il en soit, à l’audience, la Propriétaire a fait remarquer qu’au moins trois de ses accessoires, soit les « casques d’écoute », les « adaptateurs de courant » et les « câbles d’interconnexion », peuvent être employés avec les cinq appareils indiqués dans l’état déclaratif des produits. La Propriétaire a également souligné que certains des produits en preuve indiquent clairement sur leur emballage que ces accessoires ont été fabriqués pour un emploi avec divers appareils.

[35] Comme nous l’avons déjà mentionné, il est bien établi que l’objet et la portée de l’article 45 de la Loi sont de fournir une procédure simple, sommaire et rapide pour retirer le « bois mort » du registre [Performance Apparel, précité; voir aussi Philip Morris Inc c Imperial Tobacco Ltd (1987), 13 CPR (3d) 289 (CF 1re inst); et Wolfville Holland Bakery Ltd c Canada (Registraire des marques de commerce), 1964 CarswellNat 4, 42 CPR 88 (C de l’É)].

[36] Cette métaphore du « bois mort » est tout à fait appropriée et aide à expliquer pourquoi l’approche de la Partie requérante à l’égard de l’état déclaratif des produits est inappropriée. Dans ce cas, la bonne approche peut être illustrée en faisant un pas de plus dans la métaphore du « bois mort ». Plutôt que de réinterpréter l’état déclaratif des produits comme une matrice, l’approche la plus appropriée consiste à concevoir la première partie de l’état comme le « tronc » d’un arbre, les produits spécifiés après le mot « nommément » constituant les « branches ». En l’espèce, le tronc de l’arbre est [traduction] « accessoires pour lecteurs de musique personnels, lecteurs MP3, radios par satellite, téléphones cellulaires et lecteurs de musique portatifs, mais excluant tout emploi en liaison avec des produits de système mondial de localisation (GPS) » – il s’agit de la catégorie générale de produits, fournissant le contexte et le « soutien » pour les sept branches qui complètent cet état déclaratif particulier de produits.

[37] Dans cette métaphore, toute « feuille » sur les branches peut représenter une preuve d’emploi. Comme nous l’avons mentionné plus haut, même une seule facture peut suffire à démontrer qu’une branche particulière est vivante et non pas du « bois mort ». En revanche, sur les sept branches en l’espèce, les deux branches pour lesquelles il n’y a aucune preuve d’emploi sont correctement retirées comme du bois mort, comme nous l’avons vu plus haut (c’est‑à‑dire stations de chargement et nettoyeurs).

[38] Sinon, dans ce cas, aucune partie du tronc n’est du bois mort. Chaque partie du tronc sert à soutenir, au moins en partie, une des cinq branches restantes. Cette caractérisation est suffisante aux fins de l’article 45. Dans certains cas, il se peut qu’une partie du tronc soit lui-même du bois mort et puisse être retiré de la déclaration. Cependant, le retrait du bois mort du tronc d’une déclaration, s’il est possible, doit être fait avec prudence. À cet égard, selon le libellé et le contexte de l’état déclaratif des produits, certaines parties du tronc peuvent effectivement servir à fournir le contexte et à limiter la portée de l’état, et tout retrait peut, par inadvertance et de façon inappropriée, entraîner l’élargissement de la portée des produits visés par l’enregistrement.

[39] Bien sûr, cette métaphore de « retrait du bois mort d’un arbre » est ouverte à des interprétations différentes et ne devrait pas nécessairement être considérée de manière rigide comme appropriée dans tous les cas. Toutes les déclarations ne doivent pas être vues de cette façon. Par exemple, dans John Labatt, précité, l’état déclaratif des produits était « bière, ale, porter, stout, boissons à base de malt, sirop de malt et extraits de malt ». Que cette déclaration soit mieux interprétée comme sept arbres ou sept branches, il est resté que l’emploi devait être démontré pour sept produits spécifiques.

[40] Dans ce cas, cependant, la métaphore aide à illustrer pourquoi l’« approche matricielle » est inappropriée. Cette approche exigerait la dissection du tronc et peut-être la transplantation de ce qui reste. Selon la complexité d’un état déclaratif des produits particuliers, cela commence immédiatement à éroder le concept de la procédure prévue à l’article 45 comme étant une procédure « simple, sommaire et expéditive ». En dehors des questions de complexité, il serait autrement inapproprié d’appliquer une approche matricielle et d’interpréter le présent énoncé des produits comme sept « arbres » individuels. Bien que le sens sémantique de la Partie requérante ou d’une personne puisse préférer cette approche, cela ne tiendrait pas compte de l’état déclaratif des produits tel qu’il est indiqué dans l’enregistrement.

[41] La Propriétaire a-t-elle choisi d’exprimer son état déclaratif des produits en sept « arbres » distincts (par exemple, « (1) Accessoires pour lecteurs de musique personnels, nommément étuis, casques d’écoute, [etc.]); (2) Accessoires pour lecteurs MP3, nommément [etc.] »), les exigences en matière de preuve et d’analyse seraient nécessairement différentes, et ressembleraient davantage à celles dans John Labatt. Cependant, le fait est que la Propriétaire a choisi d’exprimer l’état déclaratif des produits comme elle l’a fait. Il est important de noter que, par voie d’examen, cette déclaration a été évaluée aux fins de conformité à l’article 30 de la Loi par le registraire. La demande, y compris cette déclaration, a ensuite fait l’objet d’une opposition potentielle à la suite de sa publication. Après avoir été enregistré en tant que tel, le registraire doit accepter l’état déclaratif des produits tel qu’il est formulé, même s’il peut être d’avis que l’état est [traduction] « meilleur » ou [traduction] « plus précis » s’il est exprimé d’une autre façon. Il est bien établi que la validité de l’enregistrement n’est pas en cause dans une procédure en vertu de l’article 45. De plus, une approche qui entraînerait la dissection ou la réarticulation de l’état déclaratif des produits serait non seulement contraire à une jurisprudence bien établie, mais elle risquerait également d’empiéter sur la compétence exclusive de la Cour fédérale en vertu de l’article 57 de la Loi.

[42] À cet égard, la Cour d’appel fédérale a clairement déclaré que « l’analyse du libellé de l’enregistrement et de la catégorie générale à laquelle se rattachent en l’espèce des [produits] nommément identifiées » se situe au-delà de la portée de l’article 45 de la Loi [Omega SA c Ridout & Maybee LLP, 2005 CAF 306, au para 3]. Lorsqu’une propriétaire d’une marque de commerce démontre l’emploi d’une marque de commerce d’une manière qui relève d’une catégorie générale figurant dans l’état déclaratif des produits, la catégorie générale devrait être maintenue [Empresa Cubana del Tabaco c Shapiro Cohen, 2011 CF 102, 91 CPR (4th) 248 (CF) citant Omega, précité; voir aussi Graduate Management Admissions Council c Attachmate Corp, 2015 COMC 224, au para 18]. De plus, il est bien établi que le registraire n’a pas le pouvoir de redéfinir ou de modifier les produits pour lesquels l’emploi a été démontré [voir, par exemple, Carter-Wallace Inc c Wampole Canada Inc (2000), 8 CPR (4th) 30 (CF 1re inst); Scott Paper Co, Re, 1997 CarswellNat 3231 (COMC); Gowling, Strathy & Henderson c Multibond Inc, 2000 CarswellNat 2474 (COMC); et Sim & McBurney c Huit Diffusion, société anonyme, 2009 CarswellNat 5039 (COMC)].

[43] Par conséquent, je considère que l’approche de la Partie requérante est contraire aux directives de la jurisprudence susmentionnée. Dans ce cas, il n’est ni nécessaire ni approprié de multiplier les sept accessoires sur les cinq appareils identifiés dans l’état déclaratif des produits. L’emploi doit être démontré par rapport aux sept accessoires spécifiés, dans le contexte de la catégorie générale comme indiqué.

[44] Dans ce cas, alors que les branches des « stations de chargement » et des « nettoyeurs » semblent être devenues du bois mort, la Propriétaire a présenté des preuves représentant les branches pour les « étuis », les « casques d’écoute », les « câbles d’interconnexion », les « adaptateurs de courant » et les « protecteurs d’écran ». De plus, j’accepte qu’aucune partie du tronc (soit les cinq appareils identifiés) ne soit elle-même en bois mort. À cet égard, la preuve de la Propriétaire – si ce n’est simplement qu’une lecture équitable de l’état déclaratif des produits et l’application du bon sens – démontre que, par exemple, les « casques d’écoute » sont un accessoire qui peut être employé avec n’importe quel appareil identifié. Autrement dit, il y a de la « vie » dans toutes les parties du tronc menant à chacune des cinq branches restantes. Encore une fois, aux fins de la présente procédure, cela suffit.

[45] Par conséquent, je suis satisfait que la Propriétaire ait démontré l’emploi de la Marque en liaison avec [traduction] « Accessoires pour lecteurs de musique personnels, lecteurs MP3, radios par satellite, téléphones cellulaires et lecteurs de musique portatifs, mais excluant tout emploi en liaison avec des produits de système mondial de localisation (GPS), nommément étuis, […] casques d’écoute, câbles d’interconnexion, adaptateurs de courant et produits d’entretien, nommément […] protecteurs d’écran » au sens des articles 4 et 45 de la Loi.

Décision

[46] Compte tenu de ce qui précède, dans l’exercice des pouvoirs qui m’ont été délégués en vertu des dispositions de l’article 63(3) de la Loi et conformément aux dispositions de l’article 45 de la Loi, l’enregistrement sera modifié afin de supprimer « stations d’accueil pour la lecture de musique enregistrée ou pour le téléchargement et l’affichage d’images numériques » et « produits de nettoyage (liquides, en tissu et synthétiques) » de l’état déclaratif des produits.

[47] L’état déclaratif des produits modifié disposera ce qui suit :

[traduction]

Accessoires pour lecteurs de musique personnels, lecteurs MP3, radios par satellite, téléphones cellulaires et lecteurs de musique portatifs, mais excluant tout emploi en liaison avec des produits de système mondial de localisation (GPS), nommément étuis, casques d’écoute, câbles d’interconnexion, adaptateurs de courant et produits d’entretien, nommément protecteurs d’écran.

 

 

Andrew Bene

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

Traduction certifiée conforme

Marie-France Denis


COMMISSION DES OPPOSITIONS DES MARQUES DE COMMERCE

OFFICE DE LA PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE DU CANADA

COMPARUTIONS ET AGENTS INSCRITS AU DOSSIER

___________________________________________________

DATE DE L’AUDIENCE 2021-03-09

COMPARUTIONS

Mark Robbins

Pour la Propriétaire inscrite

Jean-Philippe Mikus

Pour la Partie requérante

AGENTS AU DOSSIER

Bereskin & Parr LLP/S.E.N.C.R.L., S.R.L.

Pour la Propriétaire inscrite

Fasken Martineau Dumoulin LLP

Pour la Partie requérante

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