Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

THE REGISTRAR OF TRADEMARKS

Référence : 2021 COMC 175

Date de la décision : 2021-08-09

DANS L’AFFAIRE DE L’OPPOSITION

 

LT Overseas North America, Inc.

Opposante

et

 

AFOD LTD.

Requérante

 

1,787,233 pour ROYAL SAMPAGUITA

Demande

Introduction

[1] LT Overseas North America, Inc. (l’Opposante) s’oppose à l’enregistrement de la marque de commerce ROYAL SAMPAGUITA (la Marque), qui fait l’objet de la demande no 1,787,233 produite par AFOD Ltd. (la Requérante).

[2] La Marque visée par la demande est en liaison avec les produits et les services suivants :

Produits : (1) Riz; produits à base de riz, nommément farine de riz et vermicelles de riz, riz glutineux, farine de riz glutineux, fécule de maïs, fécule de pomme de terre et fécule de manioc; (2) Haricots, nommément haricots rouges et haricots mungo verts, haricots mungo jaunes; (3) Huile de canola, de maïs et de coco et huile alimentaire.

Services : Vente au détail d’aliments; vente en gros d’aliments; services d’épicerie de détail; agences d’importation et d’exportation.

[3] L’opposition est principalement fondée sur une allégation selon laquelle la Marque crée de la confusion avec les marques de commerce ROYAL de l’Opposante, déjà enregistrée ou visée par la demande en liaison avec des produits identiques ou apparentés.

Le dossier

[4] La demande relative à la Marque a été produite le 15 juin 2016 pour un emploi proposé au Canada. La demande comprend la traduction de caractères étrangers suivante :

Selon le requérant, la traduction anglaise du mot SAMPAGUITA est JASMINUM SAMBAC, qui est le nom commun d’une espèce de fleur.

[5] La demande a été annoncée à des fins d’opposition le 31 janvier 2018. De nombreuses modifications à la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, c T-13 (la Loi) sont entrées en vigueur le 17 juin 2019. Conformément à l’article 70 de la Loi, les motifs d’opposition seront évalués en fonction de la Loi dans sa version précédant le 17 juin 2019, à l’exception que, en ce qui a trait à la confusion, les articles 6(2) à (4) de la Loi dans sa version actuelle seront appliqués.

[6] Le 29 juin 2018, l’Opposante s’est opposée à la demande en produisant une déclaration d’opposition en vertu de l’article 38 de la Loi. Les motifs d’opposition sont fondés sur la non‑enregistrabilité en vertu de l’article 12(1)d), l’absence de droit à l’enregistrement en vertu de l’article 16(3), l’absence de caractère distinctif en vertu de l’article 2 et la non-conformité de l’article 30i) de la Loi.

[7] À l’appui de son opposition, l’Opposante a produit des copies certifiées conformes de deux enregistrements et de trois demandes.

[8] À l’appui de sa demande, la Requérante a produit l’affidavit de Hong Bing Xia, assermenté le 8 avril 2019 à Vancouver, en Colombie-Britannique (l’Affidavit Xia). M. Xia n’a pas été contre-interrogé.

[9] Les deux parties ont soumis des observations écrites et étaient représentées à une audience.

[10] Avant d’évaluer les motifs d’opposition, je donnerai d’abord un aperçu de la preuve des parties, du fardeau de preuve de l’Opposante et du fardeau ultime de la Requérante.

Aperçu de la preuve de l’Opposante

[11] L’Opposante a soumis des copies certifiées conformes des deux enregistrements suivants (les enregistrements ROYAL de l’Opposante) :

Marque de commerce

Détails de l’enregistrement

Produits

Royal & Dessin LMC468651

Date d’enregistrement
14 janvier 1997

Riz.

Royal & Queen Dessin LMC480082

Date d’enregistrement
11 août 1997

Riz.

[12] L’Opposante a également soumis des copies certifiées conformes des trois demandes suivantes (les demandes ROYAL de l’Opposante) :

Marque de commerce

Détail de la demande

Produits

ROYAL CHEF’S BLEND

Marque nominale
1756699

Produite : 26 novembre 2015

Café, thé, cacao, sucre, riz, tapioca, sagou, succédané de café; farine; préparations à base de céréales, nommément de farine de maïs, d’avoine entière, de son de maïs, de riz; pain, pâtisseries; confiseries, nommément chocolats, bonbons, gélifiés, menthes, caramels, caramels anglais, gomme à mâcher, confiseries glacées; glaces, miel, mélasse; levure; sel, moutarde; vinaigre; épices; glace.

ROYAL AUTHENTIC ADVENTURES

Marque nominale
1787382

Produite : 16 juin 2016

Café, thé, cacao, sucre, riz, tapioca, sagou, succédané de café; farine; préparations à base de céréales, nommément de farine de maïs, d’avoine entière, de son de maïs, de riz; pain, pâtisseries; confiseries, nommément chocolats, bonbons, jujubes, menthes, caramels, caramels anglais, gomme à mâcher, confiseries glacées; glaces, miel, mélasse; levure; sel, moutarde; vinaigre, condiments, nommément sauces à mijoter; épices; glace.

1799424
A Tradition of Excellence Royal Authentic Chef’s Blend & Design

Produite : 8 septembre 2016

Riz.

[13] Je note que la demande visant la marque nominale ROYAL CHEF’S BLEND a été retirée par la propriétaire en juillet 2019. Toutefois, comme cette demande était toujours en instance à la date de l’annonce de la demande d’enregistrement pour la Marque (le 31 janvier 2018), l’Opposante peut s’en prévaloir pour l’application de l’article 16(3)b) de la Loi. Je note également que, bien que les deux autres demandes aient par la suite donné lieu à l’enregistrement, puisque l’Opposante n’a pas modifié sa déclaration d’opposition pour inclure ces enregistrements ultérieurs dans le champ d’application de son motif fondé sur l’article 12(1)d), ils ne seront pris en considération que pour les motifs d’opposition d’absence de droit à l’enregistrement de l’Opposante.

Aperçu de la preuve de la Requérante

L’Affidavit Xia

[14] M. Xia est le directeur général de la Requérante [para 1]. La Requérante est un importateur, un commerçant et un distributeur d’aliments spécialisés dans les aliments de l’Asie de l’Est et de l’Asie du Sud-Est pour le marché de l’épicerie au Canada [para 5]. L’Affidavit Xia atteste ce qui suit :

· L’emploi de la Marque par la Requérante au Canada depuis la production de la demande en question. En particulier, la Requérante a vendu dans plusieurs provinces et territoires [traduction] « du riz, du riz glutineux, des haricots, des pâtes et des macaronis » de marque ROYAL SAMPAGUITA, par l’intermédiaire de magasins indépendants et de chaînes de magasins de détail tels que Wal-Mart, No Frills et Shoppers Drug Mart [para 8].

· Le sens de la SAMPAGUITA, en tant qu’espèce de plantes de jasmin [para 10, Pièce B].

· Preuve de l’état du registre, à savoir cinq marques de commerce déposées qui comprennent le mot ROYAL, toutes en liaison avec le « riz » [para 11, Pièce C].

· Irrégularités présumées concernant le prédécesseur en titre de l’Opposante et la cession subséquente des deux enregistrements de marques de commerce invoquée par l’Opposante [para 14 à 18, Pièce D].

[15] L’emballage représentatif des produits de marque ROYAL SAMPAGUITA de la Requérante est fourni à la Pièce A de l’Affidavit Xia.

Fardeau de preuve et fardeau ultime

[16] Conformément aux règles de preuve habituelles, un opposant a le fardeau de preuve de prouver les faits sur lesquels il appuie les allégations formulées dans sa déclaration d’opposition [John Labatt Ltd c Molson Companies Ltd, 1990 CarswellNat 1053, 30 CPR (3d) 293 (CF 1re inst)]. L’existence d’un fardeau de preuve imposé à l’opposant à l’égard d’une question donnée signifie que, pour que cette question soit prise en considération, il doit exister une preuve suffisante pour permettre de conclure raisonnablement à l’existence des faits allégués à l’appui de cette question.

[17] Le requérant a le fardeau ultime de démontrer que la demande d’enregistrement ne contrevient pas aux dispositions de la Loi ainsi que l’allègue l’opposant dans le cas des allégations à l’égard desquelles il s’est acquitté de son fardeau de preuve. L’existence d’un fardeau ultime qui incombe au requérant signifie que, s’il est impossible d’arriver à une conclusion déterminante une fois que toute la preuve a été examinée, la question doit être tranchée à l’encontre du requérant.

Motif d’opposition fondé sur l’article 12(1)d) – Confusion avec une marque de commerce déposée

[18] L’Opposante soutient que la Marque n’est pas enregistrable en liaison avec les produits et services visés par la demande parce que, contrairement à l’article 12(1)d) de la Loi, elle crée de la confusion avec les enregistrements ROYAL de l’Opposante, à savoir LMC468,651 et LMC480,082.

[19] La date pertinente en ce qui a trait à la confusion avec une marque de commerce déposée est la date de la présente décision [Park Avenue Furniture Corporation c Wickes/Simmons Bedding Ltd et al, 1991 CarswellNat 1119, 37 CPR (3d) 413 (CAF)].

[20] Dans ses observations, la Requérante fait valoir que [traduction] « l’Opposante ne peut pas être le propriétaire légal des deux enregistrements de marques de commerce canadiennes cités », notant que le prédécesseur en titre de l’Opposante [traduction] « a peut-être déjà été dissous il y a quelque temps » [para 15 et 16]. Toutefois, j’ai exercé mon pouvoir discrétionnaire et vérifié le registre pour confirmer que les enregistrements ROYAL de l’Opposante existent bel et bien [selon Quaker Oats of Canada Ltd c Menu Foods Ltd (1986), 11 CPR (3d) 410 (COMC)]. Par conséquent, l’Opposante s’acquitte de son fardeau initial à l’égard de ce motif.

[21] Ainsi, la Requérante doit démontrer, selon la prépondérance des probabilités, qu’il n’existe pas de probabilité raisonnable de confusion entre la Marque et l’un des enregistrements ROYAL de l’Opposante.

[22] J’examinerai d’abord la confusion au sujet de Royal & Queen Dessin de l’Opposante, bien que je remarque que l’analyse est essentiellement la même pour les deux enregistrements.

Test en matière de confusion

[23] Le test à appliquer pour trancher la question de la confusion est énoncé à l’article 6(2) de la Loi, qui prévoit que l’emploi d’une marque de commerce crée de la confusion avec une autre marque de commerce lorsque l’emploi des deux marques de commerce dans la même région serait susceptible de faire conclure que les produits liés à ces marques de commerce sont fabriqués, vendus, donnés à bail ou loués, ou que les services liés à ces marques sont loués ou exécutés, par la même personne, que ces produits ou services soient ou non de la même catégorie générale ou figurent ou non dans la même classe de la classification de Nice.

[24] Le critère applicable est celui de la première impression que laisse dans l’esprit du consommateur ordinaire « plutôt pressé » la vue de la Marque en liaison avec les produits et services visés par la demande alors qu’il n’a qu’un vague souvenir de la marque de commerce de l’Opposante et qu’il ne s’arrête pas pour réfléchir à la question en profondeur [voir Veuve Clicquot Ponsardin c Boutiques Cliquot Ltée, 2006 CSC 23, au para 20].

[25] Aux fins de cette évaluation, je dois tenir compte de toutes les circonstances pertinentes de l’espèce, y compris celles énoncées à l’article 6(5) : le caractère distinctif inhérent des marques de commerce et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues; la période pendant laquelle les marques de commerce ont été en usage; le genre de produits, services ou entreprises; la nature du commerce; et le degré de ressemblance entre les marques de commerce dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’elles suggèrent.

[26] Les critères ou les facteurs énoncés à l’article 6(5) de la Loi ne forment pas une liste exhaustive et le poids qu’il convient d’accorder à chacun d’eux varie en fonction du contexte propre à chaque affaire [Mattel, Inc c 3894207 Canada Inc, 2006 CSC 22, 1 RCS 772, au para 54]. Dans Masterpiece Inc c Alavida Lifestyles Inc, 2011 CSC 27, la Cour suprême du Canada a déclaré que l’article 6(5)e), la ressemblance entre les marques de commerce est souvent le facteur susceptible d’avoir le plus d’importance dans l’analyse relative à la confusion [au para 49] et que, bien que le premier mot dans la marque de commerce puisse être le plus important dans certains cas, l’approche préférable consiste à se demander si l’un des aspects de la marque de commerce est particulièrement « frappant ou unique » [para 66].

Caractère distinctif inhérent et mesure dans laquelle les marques sont devenues connues

[27] La première partie des marques de commerce déposées des deux parties est le mot ROYAL. Étant donné que le registraire peut prendre connaissance d’office des définitions de dictionnaire [Tradall SA c Devil’s Martini Inc, 2011 COMC 65], je note que le Merriam‑Webster Dictionary comprend les définitions suivantes pour ROYAL :

1 a: of kingly ancestry

b: of, relating to, or subject to the crown

c: being in the crown's service

2 a: suitable for royalty: MAGNIFICENT

b: requiring no exertion: EASY

3 a: of superior size, magnitude, or quality

[traduction]

1 a : de l’ancêtre

b : de la Couronne, la concernant ou y étant soumis

c : être au service de la Couronne

2 a : convenant à la royauté : MAGNIFIQUE

b : ne nécessitant aucun effort : FACILE

3 a : de taille, d’ampleur ou de qualité supérieure

[28] Des définitions similaires sont trouvées dans d’autres dictionnaires en ligne, comme www.collinsdictionary.com. Bien que la plupart des définitions se rapportent à la redevance au sens « royal » conformément à la définition 3a ci-dessus, la jurisprudence a généralement considéré ROYAL comme ayant essentiellement une connotation louable [voir Molson Cos c Richmond Breweries Ltd, 1985 CarswellNat 538 (COMC), au para 22; Nabisco Brands Ltd/Nabisco Brands Ltée c Little Oly’s Coffee Service Ltd, 1987 CarswellNat 730 (COMC), au para 5; Nabisco Brands Ltd/Nabisco Brands Ltée c Harvest Inn Inc, 1988 CarswellNat 1393 (COMC), au para 7; Mafcote Industries Inc c Roylco Ltd, 1994 CarswellNat 3068 (COMC), au para 12; McGregor Industries Inc c Park Lane Neckwear Inc, 1997 CarswellNat 3170 (COMC), au para 6; Royal & Sun Alliance Insurance Group PLC c Royal Bank, 2008 CarswellNat 395 (COMC), au para 14; Scenic Holidays (Vancouver) Ltd c Royal Scenic Holidays Ltd, 2010 COMC 63, aux para 24 et 32].

[29] Bien que la connotation louable de ROYAL soit probablement dérivée de la connotation royale ou liée à celle-ci, compte tenu de la forme de figure particulière, je suis d’accord avec l’Opposante pour dire que sa marque ROYAL sous-entend la connotation royale, plutôt qu’une simple connotation louable. Toutefois, c’est ce dessin particulier (et dans une certaine mesure, la police particulière du mot ROYAL) qui confère au modèle Royal & Queen Dessin de l’Opposante son caractère distinctif inhérent.

[30] De même, c’est le mot SAMPAGUITA qui confère à la Marque son caractère distinctif inhérent. Qu’un consommateur reconnaisse le mot comme faisant référence à une fleur ou qu’il soit considéré comme un terme inventé, ce mot et la Marque dans son ensemble n’ont pas de signification claire en relation avec les produits et services visés par la demande. Par conséquent, je considère que la Marque a également un caractère distinctif inhérent.

[31] En ce qui concerne la mesure dans laquelle les marques de commerce des parties sont devenues connues, notant que sa marque de commerce est enregistrée au Canada depuis 1997, l’Opposante fait valoir qu’il [traduction] « est probable qu’elle a été utilisée pendant une période comparable et qu’elle aura acquis la réputation et l’achalandage que la Loi vise à protéger » [observations écrites de l’Opposante, au para 30]. Toutefois, l’Opposante n’a fourni aucune preuve de l’emploi de ses marques de commerce et il n’y a aucune preuve quant à la mesure dans laquelle la marque Royal & Queen Dessin de l’Opposante est devenue connue au Canada.

[32] En ce qui a trait à la marque de la Requérante, bien que l’Affidavit Xia ne donne aucun volume ou montant en dollars, les éléments de preuve non contestés concernant les ventes dans plusieurs grands magasins de détail de diverses administrations provinciales et territoriales permettent de conclure que la marque est devenue connue au Canada au moins dans une certaine mesure à la date de la présente décision.

[33] Compte tenu de ce qui précède, ce facteur favorise la Requérante.

Période d’usage

[34] En ce qui concerne la Marque, l’Affidavit Xia fait état d’au moins un certain emploi en liaison avec le riz et d’autres produits alimentaires à un moment non précisé entre la date de production de la demande en juin 2016 et la date de l’Affidavit Xia en avril 2019. Je reconnais que cette preuve démontre une durée d’emploi d’un peu plus de deux ans.

[35] Il n’y a aucune preuve d’emploi des enregistrements ROYAL de l’Opposante. Toutefois, l’Opposante fait remarquer que l’enregistrement pour sa marque Royal & Queen Dessin comprend une revendication d’emploi au Canada [traduction] « depuis au moins en janvier 1996 ». Citant Cartier Men’s Shops Ltd c Cartier Inc (1981), 58 CPR (2d) 68 (CF 1re inst) (Cartier), au para 10, l’Opposante fait valoir qu’il y a présomption que la date de premier emploi indiquée dans un enregistrement est correcte et, par conséquent, qu’elle peut être utilisée pour prouver la durée d’emploi de la marque de commerce déposée [observations écrites de l’Opposante au para 35].

[36] Bien qu’il ne soit pas directement mentionné dans Cartier ou dans les observations de l’Opposante, ce principe découle vraisemblablement de l’article 54 de la Loi, qui stipule en partie ce qui suit :

54(1) La preuve d’un document, ou d’un extrait d’un document, en la garde officielle du registraire peut être fournie par la production d’une copie du document ou de l’extrait, donnée comme étant certifiée conforme par le registraire.

(2) Une copie de toute inscription dans le registre, donnée comme étant certifiée conforme par le registraire, fait foi des faits y énoncés.

[37] En réponse, la Requérante a fait valoir qu’il n’y a pas de preuve par affidavit que l’une quelconque des marques de commerce invoquées par l’Opposante est employée ou a déjà été employée au Canada [observations écrites de la Requérante au para 10]. Étant donné que l’allégation d’emploi énoncée dans l’enregistrement Royal & Queen Dessin n’a pas fait l’objet d’un contre-interrogatoire, la Requérante a soutenu qu’il serait injuste de permettre à l’Opposante de bénéficier de cette simple allégation. À cet égard, la Requérante soutient essentiellement que le [traduction] « fait » énoncé dans l’enregistrement est au mieux une revendication d’emploi, plutôt que la preuve de l’emploi réel conformément à la Loi, étant donné qu’il n’existe aucune preuve que l’emploi présumé était i) en liaison avec la marque de commerce qui a été enregistrée, ii) l’a été par l’Opposante ou un licencié approprié, iii) était continu depuis la date revendiquée; ou iv) était par ailleurs conforme à la définition d’emploi énoncée à l’article 4 de la Loi. Par conséquent, la Requérante fait valoir que ce facteur devrait la favoriser plutôt que l’Opposante.

[38] Je note que dans Tokai of Canada Ltd c Kingsford Products Company, LLC, 2018 CF 951, la Cour fédérale a déclaré ce qui suit en ce qui concerne la production de copies certifiées conformes et le poids à accorder aux revendications qui y sont présentées :

Je dois toutefois signaler que, même si la Commission des oppositions des marques de commerce et la Cour sont saisies de quelques affaires ayant accordé au moins un poids de minimis aux dates d’usage indiquées dans les enregistrements des marques de commerce sans qu’aucun élément de preuve de l’usage réel n’ait été présenté, j’aurais tendance à n’accorder aucun poids à ces allégations d’usage, sauf si, à tout le moins, des copies certifiées des enregistrements sont produites en preuve. [au para 37]

[39] À mon avis, même si la Cour fédérale dans Tokai n’a pas revu le principe prétendu de Cartier, elle a laissé la porte ouverte à l’adoption d’une approche qui – en l’absence d’au moins une preuve de l’emploi réel – ne donne aucun poids à une revendication d’emploi énoncée dans un enregistrement aux fins de déterminer la durée d’emploi de la marque invoquée. Je note qu’une telle approche semble être conforme à certaines décisions récentes du registraire, qui ont indiqué qu’un enregistrement fondé sur l’emploi ne permet pas en soi de conclure que la marque a été employée de façon continue [voir, par exemple, Yardley c American Girl, LLC, 2015 COMC 218, au para 24]; et SoftCom Inc c Your Holding BV, 2018 COMC 103, au para 28].

[40] Quoi qu’il en soit, comme l’a souligné l’Opposante à l’audience, cette question importe peu. La jurisprudence qui a suivi Cartier a toujours conclu que, au mieux, seul l’emploi de minimis peut être déduit de la revendication énoncée dans un enregistrement et que, en outre, même s’il favorise nominalement un opposant, il tend à avoir peu ou pas de poids dans l’analyse globale de la confusion [voir, par exemple, Entre Computer Centers Inc c Global Upholstery Co, 1991 CarswellNat 1361 (COMC), aux para 9 et 10; Uniboard Surfaces Inc c Quickstyle Industries Inc, 2007 CarswellNat 2211 (COMC), au para 16; Sun Media Corp c Montreal Sun (Journal Anglophone) Inc, 2010 COMC 49, au para 20; 1772887 Ontario Ltd c Mohammadi, 2012 COMC 246, au para 39; MAPA GmbH c 2956-2691 Québec Inc, 2013 COMC 22, au para 29; Nada Fashion Designs Inc c Ghodsi, 2013 COMC 115, au para 31; Monster, Inc c Mattel, Inc, 2014 COMC 197, à la p. 34; Advance Magazine Publishers Inc c NASDAQ Corporate Solutions Canada ULC, 2018 COMC 10, au para 44].

[41] En effet, en l’espèce, en acceptant que la revendication énoncée dans son enregistrement donne lieu à ce facteur favorisant l’Opposante, elle ne le fait que de façon nominale et elle est contrebalancée par la conclusion ci-dessus concernant la mesure dans laquelle la Marque de la Requérante est devenue connue.

Le genre de produits, services ou entreprises; la nature du commerce

[42] Lorsqu’il est question de considérer le genre des produits et services des parties par rapport à la question de confusion, ce sont les états déclaratifs dans la demande et l’enregistrement en question qui gouvernent [Mr Submarine Ltd c Amandista Investments Ltd, 1987 CarswellNat 749 (CAF); Miss Universe Inc c Bohna, 1994 CarswellNat 1443 (CAF)].

[43] La marque Royal & Queen Dessin de l’Opposante est enregistrée en liaison avec le « riz », qui chevauche le plus étroitement les produits suivants visés par la demande : « Riz; produits à base de riz, nommément farine de riz et vermicelles de riz, riz glutineux, farine de riz glutineux ». Dans la mesure où les services généraux de la Requérante comprennent la vente ainsi que l’importation et l’exportation de riz ou de produits à base de riz, je considère que les services visés par la demande chevauchent également les enregistrements de l’Opposante. Les autres produits visés par la demande sont liés en ce sens qu’ils sont des produits de base et d’autres produits alimentaires.

[44] Bien qu’il n’y ait aucune preuve concernant les voies de commercialisation de l’Opposante, étant donné le chevauchement des marchandises et l’étendue démontrée des propres voies de commercialisation e de la Requérante, il est probable qu’il y ait également chevauchement en ce qui concerne les échanges des parties.

[45] Par conséquent, ces facteurs favorisent l’Opposante.

Degré ressemblance

[46] Comme il est indiqué ci-dessus, la première partie des marques de commerce des deux parties est le mot ROYAL. Toutefois, étant donné qu’il s’agit d’un mot de dictionnaire ordinaire ayant un faible caractère distinctif inhérent, je ne considère pas le mot ROYAL comme l’aspect frappant ou unique de l’une ou l’autre marque. L’aspect frappant de la marque Royal & Queen Dessin de l’Opposante est plutôt le dessin de la figure, alors que l’aspect frappant de la Marque est le mot SAMPAGUITA. Ainsi, considérant les marques de commerce dans leur ensemble, je crois qu’il y a des différences significatives d’apparence et de son, nonobstant l’élément ROYAL partagé. En ce qui concerne l’idée proposée, alors que la marque de commerce de l’Opposante suggère l’idée d’une figure royale ou d’une reine, cette idée n’est pas reflétée dans la Marque, qui suggère peut-être l’idée d’une fleur fine, et non celle d’une figure de reine ou d’autres éléments.

[47] En conséquence, ce facteur favorise la Requérante.

Autres circonstances de l’espèce – État du registre

[48] L’Affidavit Xia inclut la référence à cinq marques de commerce de tiers, enregistrées en liaison avec des produits de « riz » et incorporant l’élément ROYAL [au para 11]. Les cinq enregistrements comprennent la marque LMC929177 pour ROYAL BLEND, la marque LMC89943 pour ROYAL PRINCESS, la marque LMC813726 pour ROYAL BLUE, et deux marques figuratives.

[49] Toutefois, la preuve de l’état du registre n’est pertinente que dans la mesure où elle permet de tirer des inférences quant à l’état du marché [Ports International Ltd c Dunlop Ltd, 1992 CarswellNat 1431 (COMC); et Welch Foods Inc c Del Monte Corp, 1992 CarswellNat 178 (CF 1re inst)]. Des inférences quant à l’état du marché ne peuvent être tirées que lorsqu’un grand nombre d’enregistrements pertinents est repéré [Maximum Nutrition Ltd c Kellogg Salada Canada Inc, 1992 CarswellNat 124 (CAF)]. En l’espèce, il n’y a aucune preuve quant à la mesure dans laquelle ces marques de commerce de tiers ont été employées ou sont devenues connues au Canada. Bien que j’admette que les éléments de preuve montrent la coexistence dans le registre des marques de commerce, je ne suis pas d’accord avec la Requérante pour dire que les éléments de preuve montrent la coexistence sur le marché canadien.

[50] À la suite de l’audience, la Requérante a tenté de présenter d’autres observations écrites, y compris quatre longues listes d’enregistrements de marques de commerce qui comprennent l’élément verbal ROYAL, triées par différents produits et/ou catégories de Nice. Toutefois, si la Requérante souhaitait que la preuve de l’état du registre soit examinée, elle aurait dû fournir en temps opportun des éléments de preuve.

[51] Compte tenu de ce qui précède, je ne considère pas que la preuve de l’état du registre soit une circonstance importante.

Autre circonstance de l’espèce – preuve de l’état du marché

[52] Dans ses observations, la Requérante a fait valoir que si l’on se rend simplement à une épicerie et qu’on examine les étagères, on peut voir de nombreux produits de riz ROYAL de tiers disponibles sur le marché. La Requérante a également invité le registraire à examiner les éléments de preuve produits dans une procédure d’opposition contre l’une des demandes ROYAL de l’Opposante, en faisant valoir que la preuve relative à l’emploi par un tiers de l’élément ROYAL en liaison avec les produits à base de riz a été fournie dans cette procédure.

[53] Toutefois, si la Requérante souhaitait que cette preuve ou d’autres éléments semblables soient examinés, elle devait la fournir dans le cadre de sa preuve dans la présente instance.

[54] Par conséquent, comme je ne suis saisi d’aucune preuve sur l’état du marché à l’égard des tiers, cette circonstance ne favorise aucune des deux parties.

Conclusion – Confusion avec la marque de commerce de l’Opposante

[55] Après avoir examiné toutes les circonstances de l’espèce, je conclus que la Requérante s’est acquittée de son fardeau ultime en ce qui concerne le risque de confusion entre les marques de commerce des parties. Je parviens à cette conclusion en raison des différences de ressemblance entre les marques et le faible caractère distinctif inhérent de l’élément partagé ROYAL, et nonobstant le chevauchement dans la nature des produits, des services et du commerce des parties.

[56] Compte tenu de ce qui précède, le motif d’opposition fondé sur l’article 12(1)d) et la confusion avec la marque de commerce Royal & Queen Dessin de l’Opposante est rejeté.

[57] Comme l’analyse de la confusion est essentiellement identique, le motif fondé sur l’article 12(1)d) et la confusion avec la marque de commerce Royal & Dessin de l’Opposante est également rejeté.

Motif d’opposition fondé sur l’article 16(3)b) – Absence de droit à l’enregistrement – Demande antérieure

[58] L’Opposante fait valoir que la Requérante n’est pas la personne habilitée à enregistrer la Marque, en vertu de l’article 16(3)b) de la Loi, en ce qui concerne les produits et services visés par la demande, parce qu’au moment de la date de production et à tout autre moment important, la Marque crée et créait de la confusion comme les demandes ROYAL de l’Opposante qui avaient déjà été déposées et étaient en attente à la date d’annonce.

[59] Étant donné que les demandes ROYAL de l’Opposante étaient en instance à la date d’annonce de la demande visant la Marque, l’Opposante s’acquitte de son fardeau initial à l’égard de chacune de ses trois demandes.

[60] Toutefois, comme je l’ai indiqué ci-dessus, je conclus que la Requérante s’est acquittée de son fardeau ultime en ce qui a trait à la question de la confusion en vertu de ce motif. Bien que l’emploi attesté et l’étendue connue de la Marque soient postérieurs à la date pertinente pour ce motif (15 juin 2016), la Requérante bénéficie néanmoins du caractère distinctif inhérent de la Marque et du faible degré de ressemblance entre elle et les marques de l’Opposante.

[61] À cet égard, j’estime que l’élément supplémentaire dans chacune des demandes ROYAL de l’Opposante fait en sorte que le degré de ressemblance favorise encore plus la Requérante, de sorte qu’il n’y a aucun risque de confusion à l’égard de l’un des produits et services visés par la demande. Par exemple, alors que le premier mot de la marque de commerce ROYAL AUTHENTIC ADVENTURES de l’Opposante est le même que la Marque, la ressemblance dans la présentation, le son ou dans les idées qu’elle suggère est considérablement diminuée par l’élément AUTHENTIC ADVENTURES supplémentaire.

[62] Compte tenu de ce qui précède, ce motif d’opposition fondé sur l’absence de droit à l’enregistrement est rejeté.

Autres motifs d’opposition

[63] Les autres motifs d’opposition énoncés dans la déclaration d’opposition (fondés sur l’article 16(3)a), l’article 2 et l’article 30i) de la Loi), exigeaient des éléments de preuve à l’appui de ces actes de procédure pour que l’Opposante s’acquitte de son fardeau de preuve initial; ces éléments de preuve n’ont pas été fournis en l’espèce. En fait, à l’audience, l’Opposante a refusé de présenter des observations de fond sur ces motifs.

[64] Étant donné que l’Opposante ne s’est pas acquittée de son fardeau initial relativement à chacun des autres motifs, les motifs fondés sur les articles 16(3)a), 2 et 30i) de la Loi sont rejetés.

Décision

[65] Compte tenu de tout ce qui précède, conformément à l’article 38(12) de la Loi et conformément aux pouvoirs qui m’ont été délégués en vertu de l’article 63(3) de la Loi, je rejette l’opposition.

 

 

Andrew Bene

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

Traduction certifiée conforme

Liette Girard

 


 

COMMISSION DES OPPOSITIONS DES MARQUES DE COMMERCE

OFFICE DE LA PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE DU CANADA

COMPARUTIONS ET AGENTS INSCRITS AU DOSSIER

___________________________________________________

DATE D’AUDIENCE 2021-06-29

COMPARUTIONS

Michael O’Neil

Pour l’Opposante

Yunwei (Edmund) Xie

Pour la Requérante

AGENTS INSCRITS AU DOSSIER

Gowling WLG (Canada) LLP

Pour l’Opposante

Yunwei (Edmund) Xie

Pour la Requérante

 

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