Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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OPIC

CIPO

LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

THE REGISTRAR OF TRADEMARKS

Référence: 2021 COMC 201

Date de la décision: 2021-09-20

DANS L’AFFAIRE DE LA PROCÉDURE DE RADIATION EN VERTU DE L’ARTICLE 45

 

Nine West Holdings Inc.

Partie requérante

et

 

Aaron SARL

Propriétaire inscrite

 

LMC910,636 pour la marque AMERICAN VINTAGE A.M. (dessin)

Enregistrement

introduction

[1] La présente décision concerne une procédure de radiation sommaire engagée à l’égard de l’enregistrement no LMC910,636 pour la marque de commerce AMERICAN VINTAGE A.M. (dessin) suivante (la Marque) :

[2] La Marque est enregistrée pour emploi en liaison avec les produits suivants :

Cuir et imitations du cuir; sacs, à savoir sacs à main, sacs à bandoulière, sacs à dos, sacs de sport, pochettes; vêtements à savoir manteaux, blousons, imperméables, parkas, costumes nommément smoking, ensemble veste et pantalons, costumes de jogging, vestes, blouses, pantalons, jeans, shorts, bermudas, robes, jupes, jupons, tee-shirts, débardeurs, chandails, pulls, chemises, gilets, sweat-shirts, pantalons de survêtement, vestes de survêtement, maillots de bain, sous-vêtements, foulards, écharpes, étoles, ceintures.

[3] Pour les raisons qui suivent, je conclus que l’enregistrement doit être modifié.

la procédure

[4] Le 20 août 2018, à la demande de Nine West Holdings Inc. (la Partie requérante), le registraire des marques de commerce a émis un avis conformément à l’article 45 de la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, c T-13 (la Loi), à Aaron SARL (la Propriétaire).

[5] L’avis enjoignait à la Propriétaire de fournir une preuve démontrant que la Marque a été employée au Canada en liaison avec chacun des produits que spécifie l’enregistrement à un moment quelconque au cours des trois ans précédant la date de l’avis et, en cas de non-emploi, la date à laquelle la Marque a été employée en dernier lieu et la raison de son défaut d’emploi depuis cette date. En l’espèce, la période pertinente pour démontrer l’emploi est du 20 août 2015 au 20 août 2018.

[6] La définition pertinente d’« emploi » en liaison avec les produits est énoncée à l’article 4 de la Loi comme suit :

4(1) Une marque de commerce est réputée employée en liaison avec des produits si, lors du transfert de la propriété ou de la possession de ces produits, dans la pratique normale du commerce, elle est apposée sur les produits mêmes ou sur les emballages dans lesquels ces produits sont distribués, ou si elle est, de toute autre manière, liée aux produits à tel point qu’avis de liaison est alors donné à la personne à qui la propriété ou possession est transférée.

[7] En réponse à l’avis du registraire, la Propriétaire a soumis la déclaration solennelle de Michael Azoulay, déclarée le 3 décembre 2018.

[8] Aucune des parties n’a produit d’observations écrites. Les deux parties étaient représentées à l’audience.

analyse et motifs de la décision

Présentation de la Marque telle qu’enregistrée

[9] Dans sa déclaration, M. Azoulay atteste que, durant la période pertinente, la Marque était apposée sur des étiquettes cousues à l’intérieur des produits de la Propriétaire. Au soutien, il joint comme Pièce B à sa déclaration des « exemplaires des diverses étiquettes qui sont représentatives de toutes celles utilisées au Canada au cours de la Période Pertinente sur les Produits portant [la Marque] et vendus au Canada tel qu’il appert des factures produites ».

[10] Cette pièce contient des photographies de sacs et vêtements portant tous une étiquette sur laquelle arbore la marque suivante :

[11] La Partie requérante fait valoir que la preuve fournie par la Propriétaire n’affiche pas la Marque telle qu’elle est enregistrée en raison du déplacement vers la droite des lettres « A.M. » dans la marque figurant à la Pièce B.

[12] Pour déterminer si une présentation d’une marque de commerce constitue la présentation de la marque telle qu’enregistrée, la question à se poser est celle de savoir si celle-ci a été employée d’une manière telle qu’elle a conservé son identité et qu’elle est demeurée reconnaissable malgré les différences entre la forme sous laquelle elle a été enregistrée et celle sous laquelle elle a été employée [Canada (Registraire des marques de commerce) c Cie International pour l’informatique CII Honeywell Bull SA (1985), 4 CPR (3d) 523 (CAF)]. Pour trancher cette question, il faut déterminer si les « caractéristiques dominantes » de la marque de commerce déposée ont été préservées [Promafil Canada Ltée c Munsingwear Inc (1992), 1992 CanLII 12831 (FCA), 44 CPR (3d) 59 (CAF)].

[13] En l’espèce, j’estime que les caractéristiques dominantes de la Marque sont la combinaison des mots AMERICAN et VINTAGE entrelacés dans une police de caractères stylisée.

[14] À mon avis, la marque arborée sur les étiquettes de la Pièce B ne constitue qu’une variation mineure de la Marque telle qu’enregistrée. En effet, la Marque demeure reconnaissable, elle n’a pas perdu son identité et le déplacement du terme « A.M. » légèrement vers la droite n’est aucunement susceptible de tromper ou d’induire en erreur le public, les caractéristiques dominantes ayant été préservées. J’accepte donc que la présentation de la Marque telle que montrée dans la Pièce B constitue la présentation de la Marque telle qu’enregistrée.

[15] De plus, compte tenu de l’affirmation de M. Azoulay selon laquelle les photographies d’étiquettes sont représentatives de toutes celles utilisées durant la période pertinente, j’accepte que des étiquettes arborant la Marque étaient cousues à l’intérieur des produits vendus par la Propriétaire et ce, pendant la période pertinente, de manière à donner un avis de liaison au sens de l’article 4(1) de la Loi.

[16] Par contre, je note que M. Azoulay n’identifie pas les produits figurant dans cette pièce et ne fournit pas d’information me permettant de conclure que ces produits spécifiques ont été vendus au Canada pendant la période pertinente. Par conséquent, j’estime que la Pièce B sert simplement à démontrer la manière dont la Marque était apposée sur les produits de la Propriétaire.

Emploi de la Marque démontré en liaison avec certains Produits

[17] Je note d’entrée de jeu que M. Azoulay explique que la Marque n’a pas été employée en liaison avec les produits « Cuir et imitations du cuir », « sacs à dos » et « costumes nommément smoking ». Puisqu’il n’y a aucune preuve les concernant ni de circonstances spéciales justifiant le défaut d’emploi de la Marque, ces produits seront supprimés.

[18] Cela étant dit, M. Azoulay affirme que la Marque fut employée au cours de la période pertinente au Canada dans le cours normal des affaires en liaison avec tous les produits restants. Il désigne les produits en liaison avec lesquels il affirme l’emploi de la Marque avec le terme « les Produits », une désignation que je ferai mienne.

[19] Il est néanmoins bien établi qu’une simple allégation d’emploi reprenant les termes de la Loi n’est pas suffisante pour établir l’emploi dans le cadre d’une procédure en vertu de l’article 45 [Diamant Elinor Inc c 88766 Canada Inc, 2010 CF 1184, aux paras 8 et 9; et Plough (Canada) Ltd c Aerosol Fillers Inc (1980), 53 CPR (2d) 62 (CAF)]. L’allégation générale d’emploi de M. Azoulay n’est donc pas suffisante en soi; il incombe à la Propriétaire de démontrer l’emploi en décrivant des faits qui permettent de former une opinion ou de déduire logiquement qu’il y a eu emploi au sens de l’article 4 en liaison avec chacun des Produits [Guido Berlucchi & C Srl’s c Brouillette Kosie Prince, 2007 CF 245 au para 18; John Labatt Ltd c Rainier Brewing Co (1984), 80 CPR (2d) 228 (CAF)].

[20] Comme preuve démontrant la vente des Produits, M. Azoulay joint comme Pièce A à sa déclaration des copies de factures qui, selon lui, démontrent la vente de chacun des Produits. Il affirme que « [c]haque produit désigné dans chacune de ces factures arborait [la Marque] au moment de la vente ».

[21] Les factures jointes à la déclaration sont datées pendant la période pertinente et démontrent la vente de plusieurs articles par la Propriétaire à PYA Importer LTD, ayant une adresse au Canada. À cet égard, M. Azoulay indique qu’entre novembre 2015 et la fin du mois d’août 2017, la Propriétaire vendait ses Produits par l’intermédiaire d’un distributeur, soit la Société PYA Importer LTD. Au sujet du cours normal des affaires de la Propriétaire, il ajoute également que depuis septembre 2017, la Propriétaire fabrique elle‑même et vend ses Produits directement sur le marché canadien.

[22] M. Azoulay explique que les articles désignés « tuniques » dans les factures sont en réalité des « blouses », et similairement, les articles désignés « wrap » et « plaid » dans les factures sont des « étoles ». Il ne fournit aucune corrélation additionnelle entre les articles facturés et les Produits.

[23] Néanmoins, puisqu’ils sont soit désignés clairement dans les factures produites à la Pièce A ou bien spécifiquement corrélés par M. Azoulay (en ce qui concerne les blouses et les étoles), j’accepte les factures présentés à la Pièce A comme preuve de transfert des produits suivants identifiés dans l’enregistrement:

  • manteaux (e.g. « MANTEAU MI LONG ML »),

  • costumes de jogging (e.g. « SWEAT SUIT »),

  • vestes (e.g. « VESTE COURTE DROITE ML »),

  • blouses (e.g. « ROUND COLLAR LONGSLEEVES STRIPED TUNIC »),

  • pantalons (e.g. « PANTALON LARGE TAILLE HAUTE »),

  • jeans (e.g. « SKINNY 5 POCKETS JEANS »),

  • shorts (e.g. « HIGH WAIST OVERSIZED SHORTS »),

  • bermudas (e.g. « TRAPEZE SEMI-LONG SHORTS »),

  • robes (e.g. « ROBE BRETELLES COL ROND »),

  • jupes (e.g. « JUPE LONGUE »),

  • tee-shirts (e.g. « TEE-SHIRT »),

  • débardeurs (e.g. « DÉBARDEUR COL ROND »),

  • chandails (e.g. « ROUND COLLAR LONGSLEEVES TRAPEZE SWEATER »),

  • pulls (e.g. « PULL ML COL BATEAU »),

  • chemises (e.g. « CHEMISE ML »),

  • gilets (e.g. « GILET MANCHES 7/8 »),

  • sweat-shirts (e.g. « SWEATSHIRT LS BOAT NECK»),

  • foulards (e.g. « SCARF »),

  • écharpes (e.g. « ECHARPE »), et

  • étoles (e.g. « PLAID »).

[24] Outre les factures de la Pièce A, M. Azoulay réfère également à des factures qui ne sont pas jointes à sa déclaration. Plus particulièrement, il fournit au paragraphe 10 de sa déclaration, les numéros de sept factures et identifie certains articles qui figurent présumément dans celles-ci, ainsi que leurs « codes »:

  • Sous-vêtement (body) : MALI9T et OPY49

  • Costumes (veste de costume) : PAT97, JAG79 et IPI193

  • Veste de survêtement : TOU86

  • Jupon : AXI110

  • Costume de jogging : MISA90 (pull) et MISA91 (pantalon jogging)

  • Manteau (Parka) : CHIC401 et FUNY316

  • Jogging (pantalon) : CONY230

  • Trench imperméable : STAR162

  • Sac (cuir) : EDDIE et KENNY

  • Ceinture en cuir : KEITH et WILSON

  • Sac de sport : BRITON

  • Autres sacs : JAMIE et ETHAN

[25] Sans moyen d’établir que les factures non-présentées en preuve concernent des ventes au Canada pendant la période pertinente, je ne suis pas disposée à accepter la simple référence à ces factures comme preuve d’emploi de la Marque.

[26] Cependant, certaines corrélations faites par M. Azoulay entre les codes et les Produits, ainsi que sa manière de référer à certains Produits, peuvent servir à éclairer la lecture des factures qui sont jointes à la déclaration. Par exemple, les références de M. Azoulay à un « Trench imperméable » et un « Sous-vêtement (body) » laissent comprendre que les termes TRENCH et BODY dans les factures désignent des « imperméables » et des « sous-vêtements », respectivement. Similairement, les références de M. Azoulay à un « Jogging (pantalon) » et un « Legging (pantalon jogging) » éclaire l’utilisation des termes JOGGING et LEGGING dans les factures comme désignant des « pantalons de survêtement ».

[27] À la lumière de ce qui précède, j’accepte les factures présentés à la Pièce A comme preuve de transfert des produits suivants identifiés dans l’enregistrement:

  • imperméables (e.g. « BLAZER COLLAR 7/8 SLEEVES DOULE-BREASTED LONG TRENCH »),

  • pantalons de survêtements (e.g. « JOGGING » et « LEGGING »), et

  • sous-vêtements (e.g. « BODY ML COL U »).

[28] Je constate également que certaines factures de la Pièce A réfèrent à des articles désignés par des codes identifiés par M. Azoulay au paragraphe 10 de sa déclaration. J’accepte donc que ces factures font état de ventes des Produits suivants :

  • parkas (désigné par le code CHIC401H16 et la description « LONG COAT LS BLAZER COLLAR »),

  • jupons (désigné par le code H17AXI110 et la description « JUPE IMPRIMÉE »), et

  • vestes de survêtement (désigné par le code H17TOU86 et la description « SWEAT ML CAPUCHE »).

[29] À la lumière de ce qui précède, j’estime que la Propriétaire a démontré l’emploi de la Marque, au sens des articles 4(1) et 45 de la Loi, en liaison avec les produits suivants :

… vêtements à savoir manteaux, … imperméables, parkas, … costumes de jogging, vestes, blouses, pantalons, jeans, shorts, bermudas, robes, jupes, jupons, tee-shirts, débardeurs, chandails, pulls, chemises, gilets, sweat-shirts, pantalons de survêtement, vestes de survêtement, … sous-vêtements, foulards, écharpes, étoles… .

[30] Cependant, pour les raisons qui suivent, j’estime que la preuve ne démontre pas l’emploi de la Marque en liaison avec les produits suivants :

… sacs, à savoir sacs à main, sacs à bandoulière, … sacs de sport, pochettes; … blousons, … ensemble veste et pantalons, … maillots de bain, … ceintures (les Produits Restants).

[31] Plus particulièrement, la preuve fournie ne me permet pas de faire des corrélations entre les Produits Restants et les produits mis en preuve. Premièrement, je ne vois pas de lien évident entre ceux-ci et quelconque description dans les factures.

[32] Deuxièmement, M. Azoulay ne fournit pas de corrélation entre les produits facturés et les Produits Restants. D’ailleurs, sauf dans le contexte de l’état déclaratif des produits visés par l’enregistrement et celui de l’identification de codes associés à certains sacs et ceintures au paragraphe 10 de sa déclaration, M. Azoulay ne mentionne aucun des Produits Restants. Par conséquent, je ne suis pas en mesure d’établir d’autres corrélations sans spéculer de manière inappropriée quant à la nature des articles facturés [voir Fraser Milner Casgrain LLP c Fabric Life Ltd, 2014 COMC 135 au para 13 pour le principe selon lequel le registraire n’a pas à conjecturer sur le genre de marchandises vendues].

[33] Par ailleurs, selon les représentations de la Propriétaire à l’audience, certains articles facturés (tels que les « COMBINAISON PANTALON MANCHES 7/8 COL CROISÉ », « ROUND COLLAR SLEEVELESS SHORT PANTS SUIT » ou « U COLLAR 7/8 SLEEVES LARGE SWEATER ») correspondent à certains Produits Restants. Cependant, je ne suis pas prête à accepter ces corrélations sur la simple base des représentations de la Propriétaire. À cet égard, je note qu’il aurait été simple pour M. Azoulay de fournir de telles corrélations, comme il l’a fait pour les « blouses » et les « étoles ».

[34] Finalement, je reconnais que M. Azoulay fournit les chiffres de ventes pour les ventes relatives aux « Produits identifiés par [la Marque] ». Toutefois, ceux-ci sont composés des chiffres de vente annuels, agglomérés par catégorie (femme, homme, accessoires). Ils ne sont pas ventilés de manière à me permettre de conclure qu’ils comprennent la vente des Produits Restants.

[35] Par conséquent, j’estime que la Propriétaire n’a pas démontré l’emploi de la Marque en liaison avec les Produits Restants au sens des articles 4(1) et 45 de la Loi. Puisqu’il n’y a aucune preuve de circonstances spéciales justifiant le défaut d’emploi de la Marque, l’enregistrement sera modifié en conséquence.

décision

[36] Dans l’exercice des pouvoirs qui m’ont été délégués en vertu des dispositions de l’article 63(3) de la Loi et conformément aux dispositions de l’article 45 de la Loi, l’enregistrement sera modifié afin de supprimer les produits suivants :

Cuir et imitations du cuir; sacs, à savoir sacs à main, sacs à bandoulière, sacs à dos, sacs de sport, pochettes; … blousons, … costumes nommément smoking, ensemble veste et pantalons, … maillots de bain, … ceintures,.

[37] L’état déclaratif modifié sera donc libellé comme suit :

vêtements à savoir manteaux, imperméables, parkas, costumes de jogging, vestes, blouses, pantalons, jeans, shorts, bermudas, robes, jupes, jupons, tee-shirts, débardeurs, chandails, pulls, chemises, gilets, sweat-shirts, pantalons de survêtement, vestes de survêtement, sous-vêtements, foulards, écharpes, étoles.

 

Eve Heafey

Agent d’audience

Commission des opposition des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada


 

COMMISSION DES OPPOSITIONS DES MARQUES DE COMMERCE

OFFICE DE LA PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE DU CANADA

COMPARUTIONS ET AGENTS INSCRITS AU DOSSIER

___________________________________________________

DATE DE L’AUDIENCE Le 9 septembre 2021

COMPARUTIONS

Chantal Desjardins

Pour la Propriétaire inscrite

R. Scott MacKendrick

Pour la Partie requérante

AGENTS AU DOSSIER

Lavery, De Billy, LLP

Pour la Propriétaire inscrite

Bereskin & Parr LLP/S.E.N.C.R.L., S.R.L.

Pour la Partie requérante

 

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