Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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Référence : 2021 COMC 224

Date de la décision : 2021-10-06

[TRADUCTION CERTIFIÉE,

NON RÉVISÉE]

DANS L’AFFAIRE DE LA PROCÉDURE DE RADIATION EN VERTU DE L’ARTICLE 45

 

Barrette Legal Inc.

Partie requérante

et

 

Grace Foods Limited

Propriétaire inscrite

 

LMC152,875 pour GRACE & Design

Enregistrement

Introduction

[1] La présente décision concerne une procédure de radiation sommaire engagée en application de l’article 45 de la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, c T-13 (la Loi) à l’égard de l’enregistrement no LMC152,875 pour la marque de commerce GRACE & Design (la Marque), reproduite ci-dessous:

GRACE & DESIGN


 

[2] La Marque est enregistrée pour emploi en liaison avec les produits suivants :

(1) Fruits en conserve.

(2) Saucisses en conserve.

(3) Pois secs, haricots, semoule de maïs et riz.

(4) Sirops de fruits.

(5) Boissons gazeuses.

(6) Fruits de mer en conserve.

(7) Viande en conserve.

(8) Thé, épices et sauces.

(9) Soupes séchées, mélanges de soupe.

(10) Boissons gazeuses, nommément les eaux minérales et gazeuses.

(11) Jus de fruits/légumes, nommément orange, mangue, fruit de la passion, cerise, noix de coco, carotte.

(12) Condiments, nommément poivre concassé, marinades.

(13) Crème de noix de coco.

(14) Lait de coco.

(15) Avoine instantanée.

(16) Produits laitiers, nommément lait concentré, huiles comestibles; purées de légumes/fruits, nommément goyave.

(les Produits)

[3] Pour les raisons qui suivent, je conclus que l’enregistrement doit être modifié afin de supprimer « fruit de la passion » et « cerise » des produits identifiés comme « jus de fruits/légumes nommément orange, mangue, fruit de la passion, cerise, noix de coco, carotte », conformément aux dispositions de l’article 45 de la Loi.

La procédure

[4] Le 4 juin 2020, à la demande de Barrette Legal Inc. (la Partie requérante), le registraire des marques de commerce a donné l’avis prévu à l’article 45 de la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, c T-13 (la Loi) à Grace Foods Limited, la propriétaire inscrite de la marque (la Propriétaire).

[5] L’avis enjoignait à la Propriétaire d’indiquer, à l’égard de chacun des Produits spécifiés dans l’enregistrement, si la marque de commerce a été employée au Canada à un moment quelconque au cours des trois années précédant la date de l’avis et, dans la négative, de préciser la date à laquelle la Marque a ainsi été employée en dernier lieu et la raison de son défaut d’emploi depuis cette date. En l’espèce, la période pertinente pour établir l’emploi s’étend du 4 juin 2017 au 4 juin 2020 (la Période pertinente).


 

[6] La définition pertinente d’emploi en l’espèce est énoncée à l’article 4(1) de la Loi :

4(1) Une marque de commerce est réputée employée en liaison avec des produits si, lors du transfert de la propriété ou de la possession de ces produits, dans la pratique normale du commerce, elle est apposée sur les produits mêmes ou sur les emballages dans lesquels ces produits sont distribués, ou si elle est, de toute autre manière, liée aux produits à tel point qu’avis de liaison est alors donné à la personne à qui la propriété ou possession est transférée.

[7] Il est bien établi que le but et l’objet de l’article 45 de la Loi consistent à assurer une procédure simple, sommaire et expéditive pour débarrasser le registre du « bois mort ». La preuve dans une procédure en vertu de l’article 45 n’a pas à être parfaite; en effet, un propriétaire inscrit doit uniquement établir une preuve prima facie d’emploi au sens des articles 4 et 45 [voir Diamant Elinor Inc c 88766 Canada Inc, 2010 CF 1184]. Ce fardeau de preuve à atteindre est bas; il suffit que les éléments de preuve établissent des faits à partir desquels une conclusion d’emploi peut logiquement être inférée [selon Diamant, au para 9].

[8] En réponse à l’avis du registraire, la Propriétaire a produit l’affidavit de Nimal Amitirigala, souscrit le 25 août 2020, auquel étaient jointes les Pièces « A » à « H ».

[9] La Partie requérante et la Propriétaire ont produit des observations écrites. Aucune audience n’a été tenue.

La preuve

[10] M. Amitirigala est le président de Grace Foods Canada Inc. (GFC). Il déclare que GFC et la Propriétaire sont toutes deux des filiales à part entière de Grace Kennedy & Company Limited, domiciliée en Jamaïque [para 4].

[11] M. Amitirigala décrit GFC comme un importateur, un producteur et un distributeur en gros d’une grande variété de produits alimentaires. GFC vend ses produits alimentaires dans tout le Canada à des détaillants d’aliments tels que Loblaws, Sobeys et Walmart, ainsi qu’à de petits dépanneurs. [para 5].

[12] M. Amitirigala déclare que GFC est autorisée par la Propriétaire à utiliser la Marque au Canada en vertu d’un contrat de licence daté du 8 décembre 1986. Une copie du contrat de licence est jointe en tant que Pièce B à son affidavit. En vertu du contrat de licence, GFC a accepté d’employer la Marque conformément aux normes et spécifications convenues entre elle et la Propriétaire. M. Amitirigala confirme que la Propriétaire a exercé un contrôle sur la qualité des produits vendus au Canada par GFC en liaison avec la Marque [paras 6, 7 et 8].

[13] À l’appui, M. Amitirigala joint les pièces pertinentes suivantes à son affidavit :

· Pièce A : une copie du contrat de licence entre la Propriétaire et GFC.

· Pièce C : un tableau qui énumère les produits de la Propriétaire vendus au Canada en liaison avec la Marque, la corrélation avec les produits visés par l’enregistrement et les références aux numéros de facture correspondants [paras 9 et 10].

· Pièce D : des photographies de boîtes et de bouteilles arborant la Marque pour chacun des produits énumérés à la Pièce C [para 11].

· Pièce E : des copies de factures représentatives montrant les ventes des produits énumérés à la Pièce C et illustrés à la Pièce D à des détaillants au Canada pendant la Période pertinente [para 13].

[14] M. Amitirigala déclare que les ventes totales de produits au Canada en liaison avec la Marque, pour la période 2017, 2018 et 2019, s’élevaient à 146 727 109 $ [para 14].

Analyse et motifs de la décision

[15] L’article 50(1) de la Loi exige que la propriétaire d’une marque de commerce contrôle, directement ou indirectement, la nature ou la qualité des produits ou services vendus sous cette marque de commerce.

[16] Comme l’a indiqué la Cour fédérale, la propriétaire d’une marque de commerce dispose essentiellement de trois méthodes pour démontrer qu’elle exerce le contrôle prévu par l’article 50(1) de la Loi : premièrement, attester explicitement qu’elle exerce effectivement le contrôle prévu; deuxièmement, produire des preuves démontrant qu’elle exerce effectivement le contrôle nécessaire; ou troisièmement, produire une copie du contrat de licence qui prévoit l’exercice d’un tel contrôle [Empresa Cubana Del Tobaco Trading c Shapiro Cohen, 2011 CF 102, au para 84].

[17] Compte tenu du témoignage de M. Amitirigala quant au contrôle de la Propriétaire sur la nature ou la qualité des produits vendus au Canada en liaison avec la Marque et du contrat de licence fourni [Pièce A], je suis convaincu que tout emploi démontré de la Marque au Canada en liaison avec de tels produits profite à la Propriétaire.

[18] Compte tenu du témoignage de M. Amitirigala selon lequel la Marque a été employée au Canada pendant la Période pertinente en liaison avec chacun des produits énumérés à la Pièce C et illustrés à la Pièce D avec les factures pertinentes à la Pièce E, je suis convaincu que la Propriétaire a démontré l’emploi de la Marque au Canada en liaison avec ces produits pendant la Période pertinente, à l’exception peut-être de deux produits contestés par la Partie requérante.

[19] La Partie requérante soutient qu’il n’existe aucune preuve d’emploi en ce qui concerne les « boissons gazeuses, nommément les eaux minérales et gazeuses » et les « jus de fruits/légumes, à savoir [...] le fruit de la passion, la cerise [...] » et qu’ils devraient être radiés de l’enregistrement.

[20] En conséquence, je limiterai mon analyse aux produits contestés par la Partie requérante.

Boissons gazeuses, nommément les eaux minérales et gazeuses

[21] La Partie requérante soutient que l’image fournie par la Propriétaire dans la Pièce D à l’appui des « boissons gazeuses, nommément les eaux minérales et gazeuses » est étiquetée MALTA et [traduction] « se rapporte apparemment à des boissons à base de malt et non aux produits demandés, à savoir les produits d’eau embouteillée ». La partie requérante fait valoir que le mot « malta » est un mot espagnol qui se traduit par « malte ».

[22] En réponse, la Propriétaire soutient que M Amitirigala identifie le produit MALTA comme un produit relevant de la catégorie des « boissons gazeuses, nommément les eaux minérales et gazeuses ». La Propriétaire soutient en outre qu’il n’y a aucune raison de douter de la véracité de la déclaration de M. Amitirigala et que tout doute concernant la preuve doit être résolu en faveur de la Propriétaire.

[23] Je suis d’accord avec la Propriétaire. Les déclarations de l’auteur de l’affidavit doivent être acceptées à première vue et on doit leur accorder une crédibilité importante dans une procédure en vertu de l’article 45 [Oyen Wiggs Green & Mutala LLP c Atari Interactive Inc, 2018 COMC 79, au para 25]. Compte tenu de la déclaration de M. Amitirigala selon laquelle la boisson énumérée à la Pièce C et illustrée à la Pièce D entre dans la catégorie des « boissons gazeuses, nommément les eaux minérales et gazeuses », je suis convaincu que la Propriétaire a établi une preuve prima facie d’emploi de la Marque au Canada en liaison avec les « boissons gazeuses, nommément les eaux minérales et gazeuses » pendant la Période pertinente.

Jus de fruits/légumes, nommément fruit de la passion, cerise

[24] La Partie requérante soutient qu’il n’y a aucune référence aux jus de fruit de la passion ou de cerise dans la Pièce C et qu’il n’y a aucune photographie de jus de fruit de la passion ou de cerise dans la Pièce D.

[25] Dans ses observations, la Propriétaire reconnaît qu’aucune preuve spécifique n’a été produite pour établir les ventes de ces jus de fruits spécifiques, mais il poursuit en affirmant que la preuve établit la vente d’une grande variété de jus de fruits/légumes, y compris l’orange, la mangue, la noix de coco et la carotte. La Propriétaire affirme que les éléments de preuve fournissent des faits suffisants pour permettre au registre de conclure qu’il existe également un emploi en liaison avec des jus de fruit de la passion et de cerise.

[26] Je ne suis pas d’accord avec la Propriétaire. Bien que, dans le cadre de la procédure de radiation prévue à l’article 45, il ne soit pas nécessaire de produire une surabondance d’éléments de preuve et une preuve représentative puisse être fournie [Saks & Co c Canada (Registraire des Marques de Commerce) (1989), 24 CPR (3d) 49 (CF 1re inst)], la Propriétaire doit tout de même établir une preuve prima facie d’emploi de la marque de commerce en liaison avec chacun des produits indiqués dans l’enregistrement [John Labatt Ltd c Rainier Brewing Co (1984), 80 CPR (2d) 228 (CAF); voir aussi Diamant Elinor Inc c 88766 Canada Inc, 2010 CF 1184]. Autrement dit, la registraire doit être en mesure de « se fonder sur une inférence tirée de faits établis plutôt que sur de la spéculation » pour combler chaque élément requis par la Loi [Diamant Elinor, au para 11; voir également Smart & Biggar c Curb, 2009 CF 47].

[27] En l’espèce, la Propriétaire me demande de déduire qu’il y a un emploi en liaison avec les jus de fruit de la passion et de cerise parce qu’il y a un emploi en association avec d’autres types de jus de fruits. Ce n’est pas une déduction raisonnable, c’est de la spéculation.

[28] Tel que reconnu dans les observations écrites de la Propriétaire, il n’y a aucune preuve spécifique déposée pour établir l’emploi de la Marque en liaison avec des jus de fruit de la passion ou de cerise ni aucune déclaration claire dans l’affidavit à cet effet. Il n’y a pas suffisamment de preuves pour me permettre de tirer une conclusion raisonnable qu’il y a eu un tel emploi. Par conséquent, je ne suis pas convaincu que la Propriétaire ait démontré l’emploi de la Marque au Canada, ou des circonstances spéciales justifiant le défaut d’emploi de la Marque, au cours de la Période pertinente en liaison avec les jus de fruit de la passion ou de cerise. L’enregistrement sera modifié en conséquence.

Décision

[29] Dans l’exercice des pouvoirs qui m’ont été délégués en vertu des dispositions de l’article 63(3) de la Loi et conformément aux dispositions de l’article 45 de la Loi, l’enregistrement sera modifié afin de supprimer « fruit de la passion » et « cerise » des produits identifiés comme « Jus de fruits/légumes nommément orange, mangue, fruit de la passion, cerise, noix de coco, carotte ».

[30] L’état déclaratif des produits modifié dans l’enregistrement se lira comme suit :

(1) Fruits en conserve.

(2) Saucisses en conserve.

(3) Pois secs, haricots, semoule de maïs et riz.

(4) Sirops de fruits.

(5) Boissons gazeuses.

(6) Fruits de mer en conserve.

(7) Viande en conserve.

(8) Thé, épices et sauces.

(9) Soupes séchées, mélanges de soupe.

(10) Boissons gazeuses, nommément les eaux minérales et gazeuses.

(11) Jus de fruits/légumes, nommément orange, mangue, noix de coco, carotte.

(12) Condiments, nommément poivre concassé, marinades.

(13) Crème de noix de coco.

(14) Lait de coco.

(15) Avoine instantanée.

(16) Produits laitiers, nommément lait concentré, huiles comestibles; purées de légumes/fruits, nommément goyave.

 

Martin Béliveau

Président

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

 

Traduction certifiée conforme,

Hortense Ngo

 

Le français est conforme aux WCAG.


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