Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

THE REGISTRAR OF TRADEMARKS

Référence : 2021 COMC 247

Date de décision : 2021-11-15

[TRADUCTION CERTIFIÉE,

NON RÉVISÉE]

DANS L’AFFAIRE DE L’OPPOSITION

 

Sherwood Homes Ltd.

Opposante

et

 

Sonia Tarabay

Requérante

 

1,777,248 pour Sonia Sells Sherwood Park Homes! & Design

Demande

Introduction

[1] Sherwood Homes Ltd. (l’Opposante) s’oppose à l’enregistrement de la marque de commerce Sonia Sells Sherwood Park Homes! & Design (la Marque), qui fait l’objet de la demande d’enregistrement no 1,777,248 de Sonia Tarabay (la Requérante). La Marque est reproduite ci-dessous :

[2] La demande d’enregistrement de la Marque est fondée sur son emploi au Canada depuis au moins aussi tôt que janvier 2016 en liaison avec des « Services immobiliers ».

[3] L’opposition est principalement fondée sur l’allégation selon laquelle la Marque crée de la confusion avec la marque de commerce SHERWOOD HOMES de l’Opposante, antérieurement employée en liaison avec des services de biens immobiliers et des services connexes.

Le dossier

[4] La demande d’enregistrement de la Marque a été produite le 13 avril 2016. La demande comprend le désistement suivant : [traduction] « Le droit à l’emploi exclusif des mots SHERWOOD PARK HOMES en dehors de la marque de commerce n’est pas accordé. »

[5] La demande comprend également la revendication de couleur suivante : « La couleur est revendiquée comme caractéristique de la marque de commerce. Les mots “Sonia Sells” sont rouges, les mots “Sherwood Park Homes!” sont noirs, et le cœur à motif de léopard est noir, brun clair et brun foncé. »

[6] La demande a été annoncée à des fins d’opposition le 24 janvier 2018. De nombreuses modifications à la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, c T‑13 (la Loi), sont entrées en vigueur le 17 juin 2019. Conformément à l’article 70 de la Loi, les motifs d’opposition seront évalués sur le fondement de la Loi dans sa version précédant immédiatement le 17 juin 2019, à l’exception que, en ce qui a trait à la confusion, les articles 6(2) à (4) de la Loi dans sa version actuelle seront appliqués.

[7] Le 25 juin 2018, l’Opposante s’est opposée à la demande en produisant une déclaration d’opposition en vertu de l’article 38 de la Loi. Les motifs d’opposition sont fondés sur l’absence de droit à l’enregistrement en vertu de l’article 16(1) de la Loi, l’absence de caractère distinctif en vertu de l’article 2 de la Loi et la non-conformité à l’article 30i) de la Loi.

[8] La Requérante a produit une contre-déclaration niant les motifs d’opposition.

[9] À l’appui de son opposition, l’Opposante a produit l’affidavit de Tim Blevins, souscrit le 30 novembre 2018 à Cambridge (Ontario) (l’affidavit Blevins).

[10] À l’appui de sa demande, la Requérante a produit l’affidavit de Sonia Tarabay, souscrit le 23 janvier 2019 à Sherwood Park (Alberta) (l’affidavit Tarabay).

[11] Aucun des auteurs des affidavits n’a été contre-interrogé. Les deux parties ont déposé de brèves observations écrites. Aucune audience n’a été demandée.

[12] Avant d’évaluer les motifs d’opposition, je donnerai d’abord un aperçu de la preuve des parties, du fardeau de preuve de l’Opposante et du fardeau ultime de la Requérante.

Aperçu de la preuve de l’Opposante

Affidavit Blevins

[13] M. Blevins est le président de l’Opposante [para 1]. Il affirme que, depuis 1998, l’Opposante [traduction] « s’occupe de la promotion de biens immobiliers, et de la construction de maisons résidentielles, entre autres services, sous sa marque de commerce SHERWOOD HOMES » [para 3]. Le 5 avril 2018, l’Opposante a produit une demande pour la marque de commerce SHERWOOD HOMES [para 4, Pièce B].

[14] Comme preuve de l’emploi de la marque de commerce SHERWOOD HOMES par l’Opposante, M. Blevins joint ce qui suit en tant que Pièce C à son affidavit :

· une liste de neuf des projets immobiliers de l’Opposante, qui indique le lieu des projets dans la ville et la date de la [traduction] « première clôture » de chaque projet – les dates des projets s’étendent de 1998 à 2010 et tous les projets semblent avoir été réalisés en Ontario [para 5a];

· un plan du site du projet de Georgian Meadows de 2002 de l’Opposante [para 5b];

· des échantillons de publicités de l’Opposante concernant ses projets immobiliers de 2007 [para 5c];

· des œuvres pour un signe utilisé dans le cadre du projet de Collingwood de l’Opposante, lequel a débuté en 2008 [para 5d];

· une copie d’une invitation à une journée portes ouvertes utilisée dans le cadre du projet de Silver Glen Preserve de l’Opposante de 2010 [para 5e];

· une copie de la publicité de l’Opposante concernant son projet immobilier de Silver Glen Preserve en 2014.

[15] Je note que, dans toutes les pièces, la marque de commerce SHERWOOD HOMES de l’Opposante figure principalement dans le logo illustré ci-dessous, ou dans des variantes mineures de celui-ci :

[16] Je note également que certaines des pièces présentent ce qui semble être l’adresse du site Web de l’Opposante, à savoir www.SherwoodHomesLtd.com.

Aperçu de la preuve de la Requérante

Affidavit Tarabay

[17] Dans son bref affidavit, Mme Tarabay atteste qu’elle est agente immobilière à Sherwood Park (Alberta) [para 2]. Elle affirme qu’elle aide principalement ses clients à vendre et à acheter des propriétés résidentielles à Sherwood Park [para 2]. Elle confirme que Sherwood Park est l’emplacement de son bureau et son principal siège d’affaires [para 3]. Mme Tarabay affirme qu’elle offre les services immobiliers visés par la demande en liaison avec la Marque depuis au moins aussi tôt que janvier 2016, date de premier emploi revendiquée dans la demande [para 4]. La Pièce B jointe à son affidavit comprend une photographie [traduction] « distribuée par la Requérante dans du matériel publicitaire utilisé pour promouvoir [les] services [de la Requérante] » [para 6]. La photographie n’est pas datée, mais arbore la Marque.

Fardeau de preuve et fardeau ultime

[18] Conformément aux règles de preuve habituelles, l’opposant a le fardeau de preuve initial d’établir les faits sur lesquels il appuie les allégations formulées dans sa déclaration d’opposition [John Labatt Ltd c Molson Companies Ltd, 1990 CarswellNat 1053, 30 CPR (3d) 293 (CF 1re inst)]. L’imposition d’un fardeau de preuve à l’opposant à l’égard d’une question donnée signifie que, pour que cette question soit examinée, il doit exister une preuve suffisante pour permettre de conclure raisonnablement à l’existence des faits allégués à l’appui de cette question.

[19] En ce qui concerne les allégations à l’égard desquelles l’opposant s’est acquitté de son fardeau de preuve, le requérant a le fardeau ultime de démontrer que la demande d’enregistrement ne contrevient pas aux dispositions de la Loi, tel qu’allégué dans le la déclaration d’opposition. Le fait qu’un fardeau ultime incombe au requérant signifie que, s’il est impossible d’arriver à une conclusion déterminante une fois que l’ensemble de la preuve a été examinée, la question doit être tranchée à l’encontre du requérant.

Motif d’opposition fondé sur l’article 16(1)a) – Confusion avec une marque de commerce antérieurement employée

[20] Conformément à l’article 38(2)c) de la Loi, l’Opposante fait valoir que la Requérante n’est pas la personne ayant droit à l’enregistrement de la Marque. Plus précisément, l’Opposante fait valoir qu’à la date à laquelle la Requérante a employé la Marque pour la première fois, elle créait de la confusion avec la marque de commerce SHERWOOD HOMES de l’Opposante, qui était déjà employée au Canada par l’Opposante en liaison avec les services [traduction] « Promotion, gestion, vente et location de biens immobiliers; entreprise générale et construction pour des résidences, des lotissements et des biens immobiliers commerciaux; services de courtage immobilier; plomberie; installation, réparation et entretien de systèmes d’électricité, de chauffage, de ventilation et de conditionnement d’air », et ce, depuis au moins aussi tôt que 1998.

[21] La date pertinente en ce qui a trait à la confusion avec une marque de commerce antérieurement employée est la date de premier emploi revendiquée dans la demande, soit janvier 2016 en l’espèce.

[22] Je tiens d’abord à souligner que ni l’affidavit Blevins ni les observations écrites de l’Opposante n’établissent une corrélation claire entre les pièces produites en preuve et chacun des services invoqués. Par exemple, on peut se demander si le service [traduction] « réparation et entretien de systèmes d’électricité, de chauffage, de ventilation et de conditionnement d’air » invoqué, est l’un des [traduction] « autres services » auxquels M. Blevins fait allusion au paragraphe 3 de son affidavit. Néanmoins, je reconnais au moins que l’Opposante a démontré l’emploi antérieur de sa marque de commerce à l’égard des services de promotion de biens immobiliers. En effet, la Requérante semble reconnaître ce point [observations écrites de la Requérante, au para 8], et je considère que l’emploi antérieur à l’égard de ces services représente le cas le plus solide de l’Opposante de toute façon.

[23] Par conséquent, l’Opposante s’acquitte au moins de son fardeau de preuve en vertu de ce motif à l’égard de ces services. En conséquence, la Requérante doit établir, selon la prépondérance des probabilités, qu’il n’existe pas de probabilité raisonnable de confusion entre la Marque et la marque de commerce SHERWOOD HOMES de l’Opposante.

Critère en matière de confusion

[24] Le critère à appliquer pour trancher la question de la confusion est énoncé à l’article 6(2) de la Loi, qui prévoit que l’emploi d’une marque de commerce crée de la confusion avec une autre marque de commerce lorsque l’emploi des deux marques de commerce dans la même région serait susceptible de faire conclure que les produits liés à ces marques de commerce sont fabriqués, vendus, donnés à bail ou loués, ou que les services liés à ces marques sont loués ou exécutés, par la même personne, que ces produits ou services soient ou non de la même catégorie générale ou figurent ou non dans la même classe de la classification de Nice.

[25] Le critère applicable est celui de la première impression que laisse dans l’esprit du consommateur ordinaire « plutôt pressé » la vue de la Marque en liaison avec les services visés par la demande alors qu’il n’a qu’un vague souvenir de la marque de commerce de l’Opposante et qu’il ne s’arrête pas pour réfléchir à la question en profondeur [voir Veuve Clicquot Ponsardin c Boutiques Cliquot Ltée, 2006 CSC 23, au para 20].

[26] En faisant cette évaluation, je dois tenir compte de toutes les circonstances pertinentes, y compris celles énumérées à l’article 6(5) de la Loi : le caractère distinctif inhérent des marques de commerce et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues; la période pendant laquelle les marques de commerce ont été en usage; le genre de services ou entreprises; la nature du commerce; et le degré de ressemblance entre les marques de commerce dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’elles suggèrent.

[27] Les critères ou les facteurs énoncés à l’article 6(5) de la Loi ne forment pas une liste exhaustive et le poids qu’il convient d’accorder à chacun d’eux varie en fonction du contexte propre à chaque affaire [Mattel, Inc c 3894207 Canada Inc, 2006 CSC 22, [2006] 1 RCS 772, au para 54]. Dans Masterpiece Inc c Alavida Lifestyles Inc, 2011 CSC 27, 92 CPR (4th) 361, la Cour suprême du Canada a déclaré que l’article 6(5)e), la ressemblance entre les marques de commerce, est souvent celui qui revêt le plus d’importance dans l’analyse relative à la confusion [au para 49] et que, bien que le premier mot dans la marque de commerce puisse être le plus important dans certains cas, l’approche préférable est de déterminer d’abord s’il y a un aspect de la marque de commerce qui est particulièrement « frappant ou unique » [au para 66].

Caractère distinctif inhérent et mesure dans laquelle les marques sont devenues connues

[28] Dans ses brèves observations écrites, l’Opposante réitère essentiellement son plaidoyer, notant i) que la Marque incorpore les mots SHERWOOD et HOMES, et ii) que la Marque est employée dans le même domaine d’affaires que celui dans lequel est employée la marque de commerce de l’Opposante [para 3 et 4].

[29] Dans ses observations écrites, la Requérante fait d’abord remarquer que la marque de commerce de l’Opposante [traduction] « comprend simplement le terme SHERWOOD HOMES ». Elle soutient que, bien qu’aucune preuve n’ait été présentée à ce sujet, [traduction] « il est généralement entendu que le mot SHERWOOD est un nom de famille », et fait en outre remarquer que le mot HOMES est générique en ce qui a trait aux services de l’Opposante [para 7].

[30] En ce qui concerne la mesure dans laquelle la marque de commerce de l’Opposante est devenue connue, bien que la Requérante reconnaisse la preuve d’emploi de l’Opposante depuis 1998, elle soutient que la preuve d’emploi semble limitée et fait en outre remarquer que l’Opposante n’a pas allégué que la marque de commerce SHERWOOD HOMES de l’Opposante a acquis un degré significatif de caractère distinctif [para 8].

[31] En revanche, la Requérante fait remarquer que la Marque est un logo qui incorpore les mots SONIA SELLS SHERWOOD PARK HOMES, les mots SONIA SELLS en grande police par rapport aux mots SHERWOOD PARK HOMES qui ont fait l’objet d’un désistement. À cet égard, la Requérante fait remarquer que Sherwood Park est une municipalité de l’Alberta, où la Requérante offre ses services [para 10, renvoyant à l’affidavit Tarabay, au para 2].

[32] Autrement, bien que Mme Tarabay affirme que la Marque est employée depuis janvier 2016 et qu’elle ait produit en preuve une publicité [para 4 et 6, Pièce B], il n’y a aucune preuve concernant la mesure dans laquelle la Marque était devenue connue à cette date pertinente ou autrement.

[33] Bien qu’aucune des parties n’ait démontré la signification de SHERWOOD en soi, le registraire peut prendre connaissance d’office des termes du dictionnaire [Tradall SA c Devil’s Martini Inc, 2011 COMC 65]. En l’espèce, je note les définitions suivantes de SHERWOOD :

[traduction] Sherwood (nom biographique) : Robert Emmet [Sherwood] 1896-1955 dramaturge américain [merriam.webster.com]

[traduction] Sherwood : 1) Robert Emmet [Sherwood] 1896-1955, dramaturge américain; 2) une ville dans le centre de l’Arkansas; 3) un prénom masculin [dictionary.com]

[34] Le renvoi au dramaturge Robert Emmet Sherwood semble appuyer l’observation de la Requérante selon laquelle SHERWOOD est un nom de famille. J’aimerais également faire remarquer que le Merriam-Webster définit « Sherwood Forest » comme étant une [traduction] « forêt dans le centre de l’Angleterre, principalement dans le comté de Nottingham », avec la note suivante : [traduction] « La forêt de Sherwood était un ancien terrain de chasse royal et est associée au légendaire hors-la-loi Robin des Bois » [merriam-webster.com].

[35] Compte tenu de ce qui précède, je ne considère pas que la marque de commerce SHERWOOD HOMES de l’Opposante possède un degré élevé de caractère distinctif inhérent. En revanche, la Marque est une combinaison de divers éléments qui, du moins en combinaison, crée une marque de commerce qui possède un degré élevé de caractère distinctif inhérent.

[36] Bien qu’il y ait une certaine preuve de l’emploi de la marque de commerce de l’Opposante, je suis d’accord avec la Requérante que cette preuve est limitée et que, dans l’ensemble, ce facteur favorise la Requérante.

Période pendant laquelle la marque a été en usage

[37] L’Opposante a démontré l’emploi de sa marque de commerce SHERWOOD HOMES depuis 1998, tandis que la Requérante n’a employé la Marque que depuis janvier 2016, soit la date pertinente en vertu de ce motif.

[38] Par conséquent, ce facteur favorise l’Opposante.

Genre des services ou entreprises, et nature du commerce

[39] Dans ses observations, bien que la Requérante reconnaisse que les services des deux parties [traduction] « concernent des biens résidentiels », la Requérante soutient que l’Opposante [traduction] « n’a présenté aucune preuve ni aucun argument concernant la question de savoir si un consommateur ordinaire s’attendrait à ce que les services de biens immobiliers soient liés aux services de promotion de biens immobiliers de [l’Opposante] » et que l’Opposante [traduction] « n’a pas établi que le genre des services serait considérée comme étant similaire par un consommateur ordinaire » [para 14 et 15].

[40] Toutefois, étant donné que l’Opposante s’est acquittée de son fardeau initial en vertu de ce motif, le fardeau incombe à la Requérante. Bien que le genre des services et des entreprises, et la nature des commerces des parties diffèrent dans une certaine mesure, en ce sens que la Requérante est une agente immobilière de l’Alberta et que l’Opposante est une promotrice immobilière de l’Ontario, tous deux vendent des biens immobiliers résidentiels.

[41] Par conséquent, je reconnais au moins qu’il y a un risque de chevauchement, dans une certaine mesure, dans le genre des services et des entreprises, et les voies de commercialisation des parties.

[42] Par conséquent, ces facteurs favorisent l’Opposante.

Degré de ressemblance

[43] Dans ses observations, la Requérante soutient que les éléments frappants ou distinctifs de la Marque sont les mots stylisés SONIA SELLS et le cœur en motif de léopard; aucun n’est reflété dans la marque de commerce de l’Opposante. En outre, la Requérante soutient qu’un consommateur ordinaire [traduction] « verrait une différence importante entre SHERWOOD HOMES et SHERWOOD PARK HOMES, dans la mesure où SHERWOOD PARK est une municipalité et serait donc considéré ensemble » [para 13].

[44] Je suis d’accord avec la Requérante que, dans le contexte des marques de commerce dans leur ensemble, les marques de commerce des parties ont un faible degré de ressemblance dans la présentation, le son et les idées qu’elles suggèrent.

[45] Je tiens également à noter que – bien que la Requérante semble reconnaître que l’Opposante a démontré l’emploi antérieur de la marque nominale SHERWOOD HOMES de l’Opposante –, dans la mesure où les arbres du logo SHERWOOD HOMES de l’Opposante invoquent l’idée de Sherwood Forest, cette idée n’est pas reflétée dans la Marque.

[46] Par conséquent, ce facteur favorise la Requérante.

Conclusion – Confusion avec la marque de commerce de l’Opposante

[47] Comme je l’ai mentionné ci‑dessus, le degré de ressemblance entre les marques de commerce des parties constitue le facteur réglementaire qui est souvent susceptible de revêtir le plus d’importance dans l’analyse relative à la confusion.

[48] Après avoir examiné toutes les circonstances de l’espèce, je conclus que la Requérante s’est acquittée du fardeau ultime en ce qui a trait à la probabilité de confusion entre les marques de commerce des parties. J’arrive à cette conclusion en raison du faible degré de ressemblance entre les marques de commerce et du faible caractère distinctif inhérent des éléments communs SHERWOOD et HOMES, nonobstant la période pendant laquelle la marque de commerce de l’Opposante a été en usage et le chevauchement potentiel du genre des services et la nature des commerces des parties.

[49] Compte tenu de ce qui précède, le motif d’opposition fondé sur l’article 16 concernant la confusion avec la marque de commerce SHERWOOD HOMES de l’Opposante est rejeté.

Motif d’opposition fondé sur l’article 2 – Absence de caractère distinctif

[50] Conformément à l’article 38(2)d) de la Loi, l’Opposante fait valoir que la Marque n’est pas distinctive au sens de l’article 2 de la Loi, en ce sens qu’elle ne distingue pas véritablement et n’est pas adaptée à distinguer les services en liaison avec lesquels elle est employée par la Requérante des produits et services d’autres personnes, y compris les services de l’Opposante en liaison avec lesquels la marque de commerce SHERWOOD HOMES de l’Opposante est employée.

[51] La date pertinente pour ce motif d’opposition est la date de production de l’opposition, à savoir le 25 juin 2018 [Metro-Goldwyn-Mayer Inc c Stargate Connections Inc, 2004 CF 1185, 34 CPR (4th) 317].

[52] L’article 2 de la Loi, dans sa version alors en vigueur, définit le terme « distinctif » comme suit :

distinctif Se dit de la marque de commerce qui distingue véritablement les produits ou services en liaison avec lesquels elle est employée par son propriétaire de ceux d’autres personnes, ou qui est adaptée à les distinguer ainsi. 

[53] Une marque de commerce se « distingue véritablement » en acquérant un caractère distinctif par son emploi, ce qui lui confère un caractère distinctif en fait. D’autre part, une marque de commerce qui est « adaptée à les distinguer ainsi » est une marque qui ne dépend pas de son emploi pour acquérir son caractère distinctif, car elle possède un caractère distinctif inhérent [voir Astrazeneca AB c Novopharm Ltd, 2003 CAF 57, au para 16].

[54] Dans ses observations écrites, l’Opposante réitère essentiellement son plaidoyer [para 5].

[55] Dans ses observations écrites, la Requérante soutient que l’Opposante n’a présenté aucune preuve ni aucun argument à l’appui de sa simple allégation selon laquelle la Marque n’est pas distinctive, et que l’Opposante ne s’est donc pas acquittée de son fardeau [para 18]. Subsidiairement, la Requérante soutient que la Marque contient des éléments possédant un caractère distinctif inhérent et que, du moins sur ce fondement, la Marque est distinctive au sens de l’article 2 de la Loi [para 19].

[56] Comme je l’ai noté ci‑dessus, l’Opposante a le fardeau de preuve de prouver les faits sur lesquels elle appuie les allégations formulées dans sa déclaration d’opposition [John Labatt Ltd, précité]. En l’espèce, il n’y a aucune preuve concerne les marques de commerce ou les services « d’autres personnes », comme il est indiqué dans le plaidoyer. Par conséquent, l’Opposante a le fardeau initial d’établir qu’à la date pertinente, sa marque de commerce était connue dans une certaine mesure au Canada en liaison avec les services pertinents et avait au Canada une réputation « importante, significative ou suffisante » de façon à annuler le caractère distinctif de la Marque [voir Bojangles’ International, LLC c Bojangles Café Ltd, 2006 CF 657, aux para 33 et 34; et Ontario Dental Assistants Association c Association dentaire canadienne, 2013 CF 266, au para 42, conf. par 2013 CAF 279]. Dans Suzanne’s Inc c Auld Phillips Ltd, 2005 CAF 429, dans le cadre d’une procédure de radiation prévue à l’article 57 de la Loi, la Cour d’appel fédérale a affirmé que, « [é]videmment, il ne peut arriver que rarement qu’un commerçant unique soit en mesure de faire perdre à une marque son caractère distinctif, mais rien ne l’empêche en principe » [au para 7].

[57] En l’espèce, bien qu’il existe une certaine preuve d’emploi de la marque de commerce de l’Opposante à la date pertinente, je note qu’au mieux, tout emploi semble limité à certaines municipalités de l’Ontario. Toutefois, il est clair que l’affidavit Blevins ne démontre pas que la marque de commerce SHERWOOD HOMES de l’Opposante jouit d’une réputation importante, significative ou suffisante de façon à annuler le caractère distinctif inhérent de la Marque.

[58] Quoi qu’il en soit, dans la mesure où ce motif s’appuie en fin de compte en partie sur la question de la confusion, j’arriverais à la même conclusion que celle que j’ai tirée concernant le motif fondé sur l’article 16, nonobstant la date pertinente ultérieure.

[59] Par conséquent, le motif d’opposition fondé sur l’article 2 est rejeté.

Motif d’opposition fondé l’article 30 – Non-conformité

[60] Conformément à l’article 38(2)a) de la Loi, l’Opposante fait valoir que la demande n’est pas conforme aux exigences de l’article 30 de la Loi. Plus précisément, l’Opposante fait valoir que la Requérante n’aurait pas pu être convaincue qu’elle avait le droit d’employer la Marque au Canada en liaison avec les services visés par la demande, puisque, à la date de production, la Requérante connaissait ou aurait dû connaître la marque de commerce SHERWOOD HOMES de l’Opposante, avec laquelle la Marque crée de la confusion.

[61] L’Opposante n’a présenté aucune preuve à l’appui de ce motif. Dans ses observations écrites, l’Opposante réitère essentiellement son plaidoyer, notant encore une fois i) que la Marque incorpore les mots SHERWOOD et HOMES, et ii) que la Marque est employée dans le même domaine d’affaires que celui dans lequel est employée la marque de commerce de l’Opposante [para 3].

[62] L’article 30i) de la Loi, dans sa version alors en vigueur, exigeait simplement que le requérant inclue dans sa demande une déclaration portant qu’il est convaincu d’avoir droit d’employer sa marque de commerce au Canada en liaison avec les produits ou services décrits dans la demande.

[63] Comme l’a fait remarquer la Requérante dans ses observations écrites [para 3], lorsque cette déclaration est fournie, un motif d’opposition fondé sur l’article 30i) ne devrait être accueilli que dans des circonstances exceptionnelles, comme lorsqu’il y a une preuve de mauvaise foi du requérant [Sapodilla Co Ltd c Bristol-Myers Co, 1974 CarswellNat 476, 15 CPR (2d) 152 (COMC)]. La connaissance de l’existence de la marque de commerce d’un opposant ne peut pas en soi appuyer une allégation selon laquelle le requérant ne pouvait pas être convaincu d’avoir droit d’employer sa marque de commerce [Woot, Inc c WootRestaurants Inc, 2012 COMC 197].

[64] En l’espèce, la déclaration requise a été fournie, et rien n’indique qu’il s’agit d’un cas exceptionnel. Par conséquent, le motif d’opposition fondé sur l’article 30i) de la Loi est rejeté.


 

Décision

[65] Compte tenu de tout ce qui précède, conformément à l’article 38(12) de la Loi et aux pouvoirs qui m’ont été délégués en vertu de l’article 63(3) de la Loi, je rejette l’opposition.

 

Andrew Bene

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

Traduction certifiée conforme

Anne Laberge

Le français est conforme aux WCAG.


 

COMMISSION DES OPPOSITIONS DES MARQUES DE COMMERCE

OFFICE DE LA PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE DU CANADA

COMPARUTIONS ET AGENTS INSCRITS AU DOSSIER

___________________________________________________

DATE DE L’AUDIENCE Aucune audience tenue

AGENTS AU DOSSIER

D. Michael Bean

Pour l’Opposante

Nathan Woodruff

Pour la Requérante

 

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