Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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OPIC

CIPO

LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

THE REGISTRAR OF TRADEMARKS

Référence : 2021 COMC 269

Date de la décision : 2021-11-30

[TRADUCTION CERTIFIÉE,

NON RÉVISÉE]

DANS L’AFFAIRE DES OPPOSITIONS

 

Canadian Osteopathic Association
American Osteopathic Association

Opposantes

et

 

Society for the Promotion of Manual Practice Osteopathy (SPMPO)

Requérante

 

1,784,488 pour
OSTEOPATHY BC & Dessin

Demande

Introduction

[1] La médecine ostéopathique a été mise au point du milieu à la fin des années 1800 par Andrew Taylor Still. La médecine ostéopathique est une médecine et une chirurgie complètes qui comprend l’utilisation de la manipulation des tissus pour restaurer la fonction dans le corps. Aujourd’hui, il semble y avoir deux courants de professionnels de la santé associés à l’ostéopathie : (i) les ostéopathes qui sont réglementés et qui pratiquent le diagnostic et offrent un traitement en tant que médecins et (ii) les fournisseurs de soins de santé non réglementés qui ont une portée de soins limitée et ne sont pas des médecins.

[2] La marque OSTEOPATHY BC & Dessin présentée ci-dessous (la Marque) a été produite par la Society for the Promotion of Manual Practice Osteopathy (SPMPO) (la Requérante), qui représente les praticiens de la Colombie‑Britannique qui ne sont pas médecins et qui ont une portée de soins limitée. La Canadian Osteopathic Association et l’American Osteopathic Association se sont opposées à cette demande. Ces associations représentent les médecins ostéopathes au Canada et aux États‑Unis, respectivement.

[3] Étant donné que la Canadian Osteopathic Association et l’American Osteopathic Association ont comparu à la même audience, j’estime qu’il convient de rendre une seule décision pour les deux oppositions.

[4] Produite le 27 mai 2016, la demande est fondée sur l’emploi par la Requérante de la Marque au Canada en liaison avec les produits et services suivants. La demande revendique l’emploi au Canada depuis au moins avril 2015 des Produits et Services (1) et l’emploi au Canada depuis au moins mai 2016 des Services (2).

Produits : (1) Matériel éducatif, nommément brochures dans le domaine de l’ostéopathie, enregistrements audionumériques et vidéos numériques téléchargeables contenant de l’information dans le domaine de l’ostéopathie ainsi que des bulletins d’information téléchargeables et des guides de ressources dans le domaine de l’ostéopathie.

Services : (1) Administration d’une association de praticiens en ostéopathie qui offre du perfectionnement professionnel et l’adhésion aux ostéopraticiens qualifiés; services de marketing, nommément publicité dans le domaine de l’ostéopathie pour le compte des membres; offre d’information et d’éducation sur les soins de santé aux membres et au public dans le domaine de l’ostéopathie; diffusion d’information éducative imprimée et en ligne sur l’ostéopathie et les ostéopraticiens; promotion des connaissances et de la compréhension du public concernant l’ostéopathie et les ostéopraticiens; élaboration de normes de pratique pour les ostéopraticiens; élaboration de normes pour les établissements d’enseignement de l’ostéopathie.

(2) Services éducatifs, nommément organisation de séminaires, d’ateliers et de conférences dans le domaine de l’ostéopathie.

[5] La demande a été annoncée le 3 janvier 2018.

[6] Pour les raisons qui suivent, je rejette les oppositions de la Canadian Osteopathic Association et de l’American Osteopathic Association.

L’opposition de la Canadian Osteopathic Association

[7] La Canadian Osteopathic Association (l’Opposante) a produit sa déclaration d’opposition le 5 février 2018. Le registraire a accordé l’autorisation de modifier la déclaration d’opposition et a rendu une décision interlocutoire radiant le motif d’opposition fondé sur l’article 30i) de la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, c T‑13 (Loi). Après la décision interlocutoire, les paragraphes pertinents de la déclaration d’opposition sont présentés ci-dessous :

[traduction]

3

L’Opposante est la propriétaire de la marque de commerce reconnue en common law [la Marque de l’Opposante] et du nom commercial suivants :

(i) CANADIAN OSTEOPATHIC ASSOCIATION employée dès 1926 en liaison avec des services d’ostéopathie et la représentation des ostéopraticiens.

4

(ii) Conformément au paragraphe 38(2)c), compte tenu du paragraphe [16(1)a)], la Requérante n’a pas droit à l’enregistrement de sa marque de commerce alléguée au Canada en liaison avec les Produits et les Services visés par la demande parce qu’à la date de premier emploi et/ou à la date de production, la marque de commerce alléguée créait de la confusion avec la Marque de l’Opposante, de telle sorte qu’elle est susceptible d’être confondue avec elle.

 

(iii) Conformément au paragraphe 38(2)c), compte tenu du paragraphe [16(1)c)], la Requérante n’a pas droit à l’enregistrement de sa marque de commerce alléguée au Canada en liaison avec les Produits et les Services visés par la demande parce qu’à la date de premier emploi et/ou à la date de production, la marque de commerce alléguée créait de la confusion avec le nom commercial antérieurement employé de l’Opposante.

Conformément à l’article 70 de la Loi, tous les renvois aux articles de la Loi relatifs aux motifs d’opposition visent la Loi dans sa version antérieure au 17 juin 2019.

[8] À l’appui à son opposition, l’Opposante a produit l’affidavit de M. James Church, son ancien président et directeur exécutif. À l’appui de sa demande, la Requérante a produit les affidavits de Gail Abernethy, sa vice-présidente, et Ceilidh Stubbs, une stagiaire employée par son agent. Les deux parties ont produit des observations écrites et étaient présentes à l’audience.

Fardeau de preuve et fardeau ultime

[9] Bien qu’un opposant ait un fardeau de preuve initial, le fardeau ultime relève du requérant, selon la prépondérance des probabilités [John Labatt Ltd c Molson Cos (1993), 30 CPR (3d) 293 (CF 1re inst)].

Analyse

Motifs d’opposition fondés sur les articles 16(1)a) et 16(1)c)

[10] Compte tenu des motifs d’opposition fondés sur l’absence du droit à l’enregistrement en vertu des articles 16(1)a) et c) de la Loi, la date pertinente est la date de premier emploi dans la demande. Par conséquent, les dates pertinentes pour évaluer la confusion sont, relativement aux Produits et aux Services (1), avril 2015, et aux Services (2), mai 2016.

L’Opposante s’est acquittée de son fardeau de preuve initial

[11] Afin d’examiner les motifs d’opposition fondés sur les articles 16(1)a) et 16(1)c) de la Loi, l’Opposante a le fardeau de preuve initial de prouver que sa marque de commerce CANADIAN OSTEOPATHIC ASSOCIATION [article 16(1)a)] ou son nom commercial Canadian Osteopathic Association [article 16(1)c)] avait été employé au Canada avant les dates revendiquées de premier emploi de la Marque au Canada. L’Opposante doit également démontrer qu’elle n’avait pas abandonné sa marque de commerce ou son nom commercial à la date de l’annonce de la Marque.

[12] Le déposant de l’Opposante, M. Church, fournit la preuve suivante :

a) L’Opposante représente la profession ostéopathique à l’échelle nationale depuis sa constitution en 1926 (para 12; Pièce P).

b) La médecine ostéopathique est une médecine et une chirurgie complètes qui comprend l’utilisation de la manipulation des tissus pour restaurer la fonction dans le corps. Un ostéopathe est un médecin qui pratique la médecine ostéopathique. Il existe de nombreuses variantes et dérivés des expressions « médecine ostéopathique » et « ostéopathe » qui sont utilisées pour désigner ce domaine de la médecine (para 9).

c) Les normes de pratique de l’Opposante qui expliquent qui est qualifié pour être ostéopathe comprennent la marque de commerce et le nom commercial Canadian Osteopathic Association (Pièce P). Comme ce document indique qu’il a été mis à jour en mai 2017, mais qu’il fait référence à plusieurs normes provinciales mises en place à une date antérieure et que M. Church mentionne l’approbation d’une norme nationale à la fin des années 2000 (para 28), j’estime qu’un document similaire aurait existé à la date pertinente.

d) Le site Web de l’Opposante présente la CANADIAN OSTEOPATHIC ASSOCIATION comme une marque de commerce et un nom commercial (Pièce G). Le site Web de l’Opposante encourage fortement le public à demander un traitement auprès d’ostéopathes plutôt que d’autres personnes ou organisations non réglementées qui prétendent offrir des services ostéopathiques. Le site Web distingue les ostéopathes, décrits comme des personnes hautement qualifiées qui sont assujetties à un cadre réglementaire, d’autres personnes ou organisations non réglementées qui prétendent pratiquer l’ostéopathie sans avoir suivi la formation nécessaire (para 16).

e) M. Church joint des diplômes délivrés en 1906, 1952 et 1984 pour les « Docteurs en ostéopathie » (Pièce H), une lettre confirmant que sa demande de pratique de la médecine ostéopathique a été approuvée (Pièce I), un certificat d’enregistrement confirmant qu’il a le droit de pratiquer la médecine ostéopathique en Colombie‑Britannique (Pièce J), une correspondance relative à la réglementation de l’ostéopathie (Pièces K et L) et une correspondance relative à la pratique non autorisée de l’ostéopathie (Pièce N). Toutefois, aucune de ces Pièces ne comprend la marque de commerce ou le nom commercial CANADIAN OSTEOPATHIC ASSOCIATION.

f) Le 3 juin 2016, l’Opposante a produit une demande de marque de commerce pour les marques de commerce OSTEOPATHIC et OSTEOPATHY (Pièces B et C).

[13] Même si la preuve relative à l’étendue de l’emploi de la marque de commerce et du nom commercial par l’Opposante est incontestablement faible, la présentation de CANADIAN OSTEOPATHIC ASSOCIATION sur les normes de pratique lui suffit pour s’acquitter de son fardeau de preuve [Consumers Distributing Co/Cie Distribution aux Consommateurs c Toy World Ltd, 1990 CarswellNat 1398 (COMC), au para 14, qui confirme que l’emploi des marques de commerce et des noms commerciaux n’est pas nécessairement mutuellement exclusif].

Moment où les marques de commerce et les noms commerciaux créent de la confusion

[14] Les marques de commerce créent de la confusion lorsqu’il existe une probabilité raisonnable de confusion au sens de l’article 6(2) de la Loi :

L’emploi d’une marque de commerce crée de la confusion avec une autre marque de commerce lorsque l’emploi des deux marques de commerce dans la même région serait susceptible de faire conclure que les produits liés à ces marques de commerce sont fabriqués, vendus […] ou que les services liés à ces marques sont […] exécutés, par la même personne, que ces produits ou services soient ou non de la même catégorie générale ou figurent ou non dans la même classe de la classification de Nice.

[15] L’article 6(3) de la Loi énonce un critère analogue pour la confusion avec un nom commercial. Ainsi, la question ne concerne pas la confusion entre les marques de commerce ou une marque de commerce et un nom commercial, mais la confusion des produits et des services d’une source avec ceux d’une autre source.

[16] En l’espèce, la question posée par les articles 6(2) et 6(3) de la Loi est celle de savoir si les consommateurs des Produits et Services vendus en liaison avec la Marque peuvent croire qu’ils étaient fabriqués, autorisés ou exécutés par l’Opposante. Le test en matière de confusion est celui de la première impression et du vague souvenir. Dans l’application du test en matière de confusion, le registraire doit tenir compte de toutes les circonstances de l’espèce, y compris celles expressément énoncées à l’article 6(5) de la Loi. L’importance qu’il convient d’accorder à chacun des facteurs variera en fonction des circonstances [voir Veuve Clicquot Ponsardin c Boutiques Cliquot Ltée, 2006 CSC 23, 49 CPR (4th) 40; Mattel, Inc c 3894207 Canada Inc, 2006 CSC 22, [2006] 1 RCS 772; et Masterpiece Inc c Alavida Lifestyles Inc, 2011 CSC 27, 92 CPR (4th) 361].

Genre de produits, services ou entreprises et nature du commerce

[17] Je considère qu’il convient de commencer par le genre des produits, services et entreprises et le commerce.

[18] L’Opposante représente la profession ostéopathique depuis 1926 (affidavit Church, para 12). L’Opposante définit la médecine ostéopathique comme une médecine et une chirurgie complètes qui comprend l’utilisation de la manipulation des tissus pour restaurer la fonction dans le corps (affidavit Church, para 9). Un ostéopathe est un médecin qui pratique la médecine ostéopathique (affidavit Church, para 9). Pour devenir ostéopathe autorisé au Canada, il faut d’abord terminer quatre années d’enseignement médical intensif dans un collège américain de médecine ostéopathique accrédité par l’American Osteopathic Association pour obtenir un diplôme de docteur en médecine ostéopathique (para 14). Cette formation rigoureuse garantit que les ostéopathes ont la même formation médicale complète que leurs collègues docteurs en médecine (MD) (para 14). De nombreuses provinces canadiennes ont des règlements qui réservent les titres d’ostéopathe, d’ostéopraticien, de docteur en ostéopathie, de médecin ostéopathe et de médecin praticien en ostéopathie aux médecins et chirurgiens de ces provinces (Pièce M, para 24). L’Opposante savait que plus de 30 ostéopathes étaient enregistrés dans l’ensemble du Canada en mai 2018, dont des médecins certifiés dans les spécialités de la médecine familiale, de la psychiatrie, de la pédiatrie, de la médecine physique, du sport et de la médecine musculosquelettique ostéopathique (Pièce F). J’en déduis que le nombre aurait été semblable à la date pertinente.

[19] Mme Abernethy explique dans son affidavit que les membres de l’Opposante et les membres de la Requérante n’ont pas la même portée de pratique. Le site Web de la Requérante explique ce qui suit :

[traduction]

Au siècle dernier, différentes structures juridiques et réglementaires dans le monde ont divisé l’ostéopathie en deux courants professionnels. Un ostéopathe a atteint les normes académiques et professionnelles reconnues à l’échelle nationale dans son pays pour pratiquer le diagnostic et fournir un traitement en tant que médecin. Sa principale différence avec les médecins (MD) est qu’il a terminé ses études dans une école qui intègre également les principes de philosophie ostéopathique et de formation sur le TMO.

Les ostéopathes (qui pratiquent l’ostéopathie) sont des fournisseurs de soins de santé de premier contact ayant des droits de pratique limités, qui ne prescrivent pas de produits pharmaceutiques, n’effectuent pas d’opérations chirurgicales ou n’assument aucune des diverses fonctions d’un médecin à part entière. Un ostéopathe est une personne qui a atteint les normes académiques et professionnelles reconnues à l’échelle nationale dans son pays pour pratiquer l’ostéopathie.

Bien qu’il n’y ait aucune preuve que ces documents existaient à la date pertinente, je conclus que c’est le cas étant donné que la Requérante a été constituée en société en 2005.

[20] Selon la preuve de la Requérante, deux de ses objectifs sont (i) de promouvoir, de représenter et de démontrer l’ostéopathie et d’informer le public à son sujet et ainsi que sur le rôle qu’elle joue dans les soins de santé et (ii) de veiller à ce que la meilleure qualité possible de la pratique manuelle de l’ostéopathie soit fournie à la population de la C.‑B. par des ostéopraticiens (affidavit Abernethy, para 1).

[21] Bien que la Requérante invoque une différence dans ce domaine et dans le domaine d’intérêt ciblé de l’Opposante (ostéopathe par rapport à un fournisseur de soins de santé qui pratique l’ostéopathie avec des droits de pratique limités), il y a un chevauchement évident entre les Produits et Services et les Services de l’Opposante. La Requérante et l’Opposante représentent toutes deux des professionnels de la santé dans le domaine de l’ostéopathie et font connaître leurs praticiens respectifs au public. Ce facteur favorise fortement l’Opposante.

Caractère distinctif inhérent

[22] La Marque et la marque de commerce et le nom commercial CANADIAN OSTEOPATHIC ASSOCIATION de l’Opposante ont un faible caractère distinctif inhérent, car ces deux éléments sont étroitement liés au domaine d’intérêt et à l’emplacement des parties. En raison de la présence de l’élément graphique et du slogan FOR EVERY BODY, la Marque présente un degré de caractère distinctif inhérent légèrement plus élevé que la marque de commerce et le nom commercial de l’Opposante.

[23] En ce qui a trait à la preuve de Mme Stubbs visant à démontrer que l’élément OSTEOPATHY est commun au métier, tous ses éléments de preuve sont postérieurs à la date pertinente.

Mesure dans laquelle les marques sont devenues connues et période pendant laquelle elles ont été en usage

[24] Rien dans la preuve n’indique que la Requérante avait commencé à employer sa marque de commerce avant les dates pertinentes. À cet égard, je conclus que la preuve d’emploi de la Marque présentée par Mme Abernethy est postérieure aux dates pertinentes.

[25] La Canadian Osteopathic Association a été fondée en 1926 (affidavit Church, Pièce F). Toutefois, la preuve d’emploi de l’Opposante ne me permet pas de déterminer l’étendue de l’emploi de sa marque de commerce et de son nom commercial de 1926 à l’une ou l’autre des dates pertinentes.

Degré de ressemblance entre les marques de commerce dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’elles suggèrent

[26] Il est bien établi en droit, lorsqu’il s’agit de déterminer le degré de ressemblance, qu’il faut examiner dans leur ensemble les marques de commerce et les noms commerciaux. Il n’est pas approprié de les placer côte à côte et de comparer et d’observer les ressemblances ou les différences entre leurs éléments ou leurs composants.

[27] Il y a à la fois des similitudes et des différences entre la Marque et la marque de commerce et le nom commercial de l’Opposante. À cet égard, les marques et le nom commercial de l’Opposante décrivent ou suggèrent l’emplacement géographique et le genre de services offerts. Toutefois, la première partie de la marque de commerce et du nom commercial de l’Opposante est la région géographique CANADIAN et son suffixe est ASSOCIATION, alors que la marque commence par OSTEOPATHY et inclut BC et le slogan FOR EVERY BODY.

[28] Bien qu’il y ait des similitudes entre la Marque et la marque de commerce et le nom commercial de l’Opposante en raison des composants OSTEOPATHIC et OSTEOPATHY, je ne considère pas que ces mots sont frappants ou uniques puisqu’ils décrivent simplement le domaine des produits ou services connexes. Les idées suggérées par la Marque ainsi que la marque de commerce et le nom commercial de l’Opposante sont également quelque peu similaires, puisqu’ils suggèrent les personnes qui pratiquent l’ostéopathie dans différentes administrations. En définitive, compte tenu de la nature descriptive et suggestive de la Marque et de la marque de commerce et du nom commercial de l’Opposante, bien qu’il y ait des similitudes entre eux, je ne considère pas qu’il y ait un degré élevé de ressemblance lorsqu’on évalue l’ensemble de ces marques. Il y a suffisamment de différences visuelles, phonétiques et dans les idées suggérées en raison des différents composants des marques de commerce, y compris l’ordre des composants et le slogan FOR EVERY BODY.

Circonstance de l’espèce : jurisprudence relative aux marques de commerce faibles

[29] La jurisprudence relative aux marques de commerce faibles favorise la Requérante. Il est généralement admis que des différences peu importantes suffiront à distinguer des marques de commerce faibles les unes des autres [Boston Pizza International Inc c Boston Chicken Inc (2001), 2001 CFPI 1024, 15 CPR (4th) 345 (CF 1re inst), au para 66]. Comme il est expliqué dans Provigo Distribution Inc c Max Mara Fashion Group SRL (2005), 2005 CF 1550 (CanLII), 46 CPR (4th) 112, au para 31 :

Comme les deux marques en elles-mêmes sont faibles, il est juste d’affirmer que même de petites différences suffiraient à les différencier. S’il en était autrement, le premier utilisateur de termes couramment employés se verrait conférer injustement un monopole de ces termes. Les tribunaux ont également justifié cette conclusion en affirmant qu’on s’attend à ce que le public soit plus prudent lorsque des noms commerciaux faibles comme ceux-ci sont employés […]

[30] Une partie qui adopte une marque de commerce faible est réputée accepter un certain risque de confusion [General Motors c Bellows (1949), 10 CPR 101, aux p. 115 et 116 (CSC)]. Bien qu’il soit possible d’accroître le caractère distinctif d’une marque de commerce faible par un emploi à grande échelle [Sarah Coventry Inc c Abrahamian (1984), 1 CPR (3d) 238 (CF 1re inst), au para 6], il n’y a aucune preuve que cela s’est produit en l’espèce.

Circonstances de l’espèce – protection des consommateurs et risque pour le public

[31] L’Opposante fait valoir que la Marque créerait de la confusion dans la source en ce sens que les consommateurs qui demandent des services aux membres de la Requérante croiraient qu’ils reçoivent un traitement d’un ostéopathe. Il existe une preuve très limitée à la date pertinente quant à la question de savoir si la Marque aurait donné comme première impression aux consommateurs qui demandent un traitement que les membres de la Requérante étaient des ostéopathes. À cet égard, bien que la preuve de l’Opposante indique qu’il y avait une trentaine d’ostéopathes pratiquant au Canada, l’Opposante n’a pas présenté de preuve qui me permettrait de déduire que, comme première impression, la Marque suggère aux consommateurs que des produits ou services connexes ont été fournis par un ostéopathe.

[32] En ce qui a trait à la preuve de l’Opposante concernant diverses lois provinciales qui réservent les titres d’ostéopathe et d’ostéopraticien aux personnes autorisées par le Collège des médecins et chirurgiens d’une province donnée (affidavit Church, Pièce M), ainsi que les documents et sites Web de la Requérante et de l’Opposante, qui comprennent des avertissements selon lesquels les personnes qui prétendent pratiquer l’ostéopathie ne sont pas toutes des médecins (en supposant que ces avertissements étaient disponibles à la date pertinente), je considère qu’il s’agit de documents que les consommateurs sont susceptibles de rencontrer au cours du processus de recherche de la Requérante ou de l’Opposante (ou des services de leurs membres). Par conséquent, ces explications et ces avertissements ne m’aident pas à déterminer s’il y a un risque de confusion à titre de première impression.

[33] En ce qui a trait aux copies des lettres jointes à titre de Pièce N à l’affidavit Church du College of Physicians and Surgeons de la Colombie‑Britannique et de l’Ordre des médecins et chirurgiens de l’Ontario, avisant les personnes non autorisées qu’elles enfreignent les lois et règlements provinciaux parce qu’elles pratiquent l’ostéopathie, la médecine ostéopathique ou qu’elles se désignent comme un ostéopathe ou un ostéopraticien, ces lettres ne m’aident pas à déterminer s’il existe un risque de confusion entre la Marque et la marque de commerce ou le nom commercial de l’Opposante. Comme il n’y a que quelques lettres datées entre 1999 et 2010, il est peu probable qu’elles aient eu une incidence sur le risque de confusion de la source aux dates pertinentes.

Conclusion

[34] La question posée par les articles 6(2) et 6(3) de la Loi est celle de savoir si les consommateurs des Produits et Services fournis sous la Marque croient qu’ils étaient fournis ou autorisés par l’Opposante en raison de sa marque de commerce ou de son nom commercial CANADIAN OSTEOPATHIC ASSOCIATION. Je l’ai évalué comme une question de première impression dans l’esprit du consommateur ordinaire plutôt pressé à la vue de la Marque, alors qu’il n’a qu’un vague souvenir de la marque de commerce ou du nom commercial de l’Opposante, et qu’il ne s’arrête pas pour réfléchir à la question en profondeur, pas plus que pour examiner de près les ressemblances et les différences entre la Marque et la marque de commerce ou le nom commercial CANADIAN OSTEOPATHIC ASSOCIATION de l’Opposante.

[35] Eu égard à l’article 6(5), en particulier au faible caractère distinctif inhérent de la marque de commerce et du nom commercial de l’Opposante, au fait que de petites différences peuvent suffire à différencier les marques faibles et au fait qu’il n’existe aucune preuve que la marque de commerce ou le nom commercial de l’Opposante est connu dans une large mesure, je conclus que la Requérante s’est acquittée du fardeau ultime qui lui incombe de démontrer, selon la prépondérance des probabilités, qu’il n’y a aucune probabilité raisonnable de confusion entre la Marque et la marque de commerce ou le nom commercial de l’Opposante. Par conséquent, ces motifs d’opposition sont rejetés.

L’opposition de l’American Osteopathic Association

[36] L’American Osteopathic Association (AOA) s’est également opposée à cette demande. Après une décision interlocutoire, les autres motifs d’opposition sont présentés ci-dessous :

[traduction]

3

L’[AOA] est une organisation qui gère la Commission on Osteopathic College Accreditation (COCA) de l’American Osteopathic Association, laquelle offre la seule formation médicale et chirurgicale avancée requise pour l’obtention d’un permis d’ostéopathe au Canada. L’[AOA] est un leader international dans les techniques avancées de traitement manuel.

4

L’[AOA] est la propriétaire des [marques de commerce] et du nom commercial suivants :

(i) AMERICAN OSTEOPATHIC ASSOCIATION employé depuis 1901 en liaison avec les services professionnels d’ostéopathie.

(ii) Marque déposée aux États‑Unis, AMERICAN OSTEOPATHIC ASSOCIATION & Dessin, numéro d’enregistrement 4249300, employée depuis dès 2005 aux États‑Unis et révélé au Canada […].

(iii) Marque déposée aux États‑Unis, AMERICAN OSTEOPATHIC ASSOCIATION & Dessin, numéro d’enregistrement 3162198, employée aux États‑Unis et révélé au Canada depuis dès 2005 […].

5

(ii) Conformément au paragraphe 38(2)c), compte tenu du paragraphe [16(1)a)], la Requérante n’a pas droit à l’enregistrement de sa marque de commerce alléguée au Canada en liaison avec les Produits et les Services visés par la demande parce qu’à la date de premier emploi et/ou à la date de production, la marque de commerce alléguée créait de la confusion avec les [marques de commerce de l’AOA], de telle sorte qu’elle est susceptible d’être confondue avec elle.

[37] La preuve de l’American Osteopathic Association est fournie par Joshua L. Prober, son premier vice-président et avocat général. Selon la preuve de M. Prober, l’AOA détient le nom commercial AMERICAN OSTEOPATHIC ASSOCIATION et la marque de commerce AMERICAN OSTEOPATHIC ASSOCIATION (para 5 et 6). La Commission on Osteopathic College Accreditation de l’AOA accrédite 35 écoles de médecine ostéopathique qui offrent des cours dans 55 établissements d’enseignement aux États‑Unis (para 13). La preuve de l’emploi de la marque de commerce et du nom commercial AMERICAN OSTEOPATHIC ASSOCIATION fournie par M. Prober comprend les éléments suivants :

· sur le site Web osteopathic.org de l’American Osteopathic Association (Pièce G);

· sur le site Web de la Canadian Osteopathic Association (Pièce K);

· sur une page Wikipédia intitulée « Osteopathic medicine in Canada » (Pièce M);

· dans le document de l’Opposante « Osteopathic Practice in Canada » (Pièce U) qui explique que :

[traduction]

[…] En novembre 2009, la Fédération des ordres des médecins du Canada a approuvé « l’Accord sur les normes médicales de la FOMC », qui reconnaît le diplôme de médecine ostéopathique d’une école de médecine accréditée par la Commission on Osteopathic College Accreditation de l’American Osteopathic Association comme un diplôme de médecine reconnu par toutes les autorités de réglementation du Canada pour s’inscrire à la pratique médicale.

Bien que cette Pièce soit datée de mai 2017, je conclus qu’un document similaire aurait existé étant donné qu’il fait référence à un document de 2009, l’entente sur les normes nationales de la FOMC (Pièce V) qui stipule :

[traduction]

[…] La norme canadienne exige que les nouveaux candidats possèdent les qualifications suivantes afin d’être admissibles à une licence complète (sans restriction) d’exercice de la médecine :

a) détenir un diplôme de médecine d’une école de médecine figurant dans l’International Medical Education Directory (IMED) de la FAIMER ou le Répertoire mondial des écoles de médecine (RMEM) de l’OMS ou un doctorat en ostéopathie d’une école américaine accréditée par la Commission on Osteopathic College Accreditation de l’American Osteopathic Association […].

La preuve de la Requérante se compose des affidavits de Gail Abernethy et Ceilidh Stubbs. L’AOA et la Requérante ont toutes deux produit des observations écrites et assisté à l’audience.

Motif d’opposition fondé sur l’article 16(1)a)

[38] L’AOA a le fardeau initial de prouver qu’elle a employé ou révélé au moins une de ses marques de commerce AMERICAN OSTEOPATHIC ASSOCIATION invoquée dans la déclaration d’opposition en avril 2015 en ce qui concerne les Produits et Services (1) et en mai 2016 pour les Services (2). L’AOA doit également démontrer qu’elle n’avait pas abandonné ses marques de commerce à la date de l’annonce de la Marque (le 3 janvier 2018). Comme je considère que la marque de commerce AMERICAN OSTEOPATHIC ASSOCIATION de l’AOA offre à l’Opposante ses meilleures chances de succès, je concentrerai mon analyse sur cette marque de commerce.

L’American Osteopathic Association ne s’est pas acquitté de son fardeau de preuve

[39] L’AOA ne s’est pas acquitté de son fardeau de preuve en ce qui concerne le motif d’opposition.

Révélation de la marque de commerce AMERICAN OSTEOPATHIC ASSOCIATION

[40] L’AOA ne s’est pas acquitté de son fardeau de preuve en ce qui a trait à la révélation de ses marques de commerce AMERICAN OSTEOPATHIC ASSOCIATION. Les exigences sur la révélation établies à l’article 5 exigent une conclusion selon laquelle la Marque est devenue bien connue au Canada en raison de la distribution ou de l’annonce des produits et services de l’AOA au Canada, de sorte qu’une région importante du Canada connaît sa marque de commerce [Marineland Inc. c Marine Wonderland and Animal Park Ltd. (1974), 16 CPR (2d) 97 (CF 1re inst)]. Il n’existe aucune preuve que l’une des marques de commerce de l’AOA est connue dans une telle mesure.

Emploi des marques de commerce AMERICAN OSTEOPATHIC ASSOCIATION

[41] Les articles 4(1) et 4(2) de la Loi expliquent ce qui est exigé pour qu’une marque de commerce soit considérée comme employée en liaison avec des produits et services.

L’AOA ne s’est pas acquittée de son fardeau de preuve

[42] Pour les raisons qui suivent, je conclus que la preuve de l’AOA ne suffit pas pour démontrer l’emploi de ses marques de commerce AMERICAN OSTEOPATHIC ASSOCIATION au Canada.

a) Site Web – La présentation sur le site Web osteopathic.org ne constitue pas un emploi au Canada puisqu’il n’est pas clair que les services sont réellement destinés et offerts aux Canadiens ou qu’ils sont exécutés au Canada [HomeAway.com, Inc c Hrdlicka, 2012 CF 1467; Unicast SA c South Asian Broadcasting Corp (2014), 2014 CF 295, 122 CPR (4th) 409, aux para 46 et 47]. Le site Web affirme plutôt que [traduction] « nous sommes la famille professionnelle de plus de 145 000 ostéopathes et étudiants en médecine aux États‑Unis ». De plus, rien dans la preuve n’indique que les Canadiens ont accès au site Web, et il ne semble pas non plus y avoir d’information propre aux Canadiens [Star Island Entertainment LLC c Provent Holdings Ltd (2013), 2013 COMC 84 (CanLII), 112 CPR (4th) 321 (COMC), au para 30; McCarthy Tétrault c Lawyers Without Borders Inc (2010), 87 CPR (4th) 437 (COMC), au para 21; Unicast, précité, au para 64].

b) Législation – Les références à AMERICAN OSTEOPATHIC ASSOCIATION dans les diverses lois et divers règlements ne correspondent pas à l’emploi de la marque par l’AOA.

c) Référence sur les sites Web et documents de tiers – Les références à l’AMERICAN OSTEOPATHIC ASSOCIATION sur le site Web de BC Health Link, le site Web MyHealthAlberta.ca, le site Web de la CANADIAN OSTEOPATHIC ASSOCIATION et d’autres documents, l’entrée Wikipédia sur la médecine ostéopathique au Canada et les sites Web du College of Physicians and Surgeons de la Colombie‑Britannique ne correspondent pas à des emplois de la marque de commerce par l’AOA. Bien que ces éléments de preuve aient pu aider l’AOA à démontrer que sa marque de commerce était connue dans une certaine mesure, ils ne remplissent pas les conditions énoncées aux articles 4(1) ou 4(2) de la Loi.

[43] Comme l’AOA ne s’est pas acquittée de son fardeau de preuve, le motif d’opposition est rejeté et il n’est pas nécessaire d’examiner la preuve de la Requérante.

Décision

[44] Dans l’exercice des pouvoirs qui me sont délégués en vertu des dispositions de l’article 63(3) de la Loi, je rejette les oppositions selon les dispositions de l’article 38(12) de la Loi.

 

 

Natalie de Paulsen

 

Membre

 

Commission des oppositions des marques de commerce

 

Office de la propriété intellectuelle du Canada

 

Traduction certifiée conforme

Liette Girard

 

Le français est conforme aux WCAG.


COMMISSION DES OPPOSITIONS DES MARQUES DE COMMERCE

OFFICE DE LA PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE DU CANADA

COMPARUTIONS ET AGENTS INSCRITS AU DOSSIER

___________________________________________________

DATE DE L’AUDIENCE 2021-07-20

COMPARUTIONS

LuAnne Morrow

Pour les Opposantes

R. Nelson Godfrey

Pour la Requérante

AGENTS AU DOSSIER

Borden Ladner Gervais LLP

Pour les Opposantes

Gowling WLG (Canada) LLP

 

Pour la Requérante

 

 

 

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