Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

THE REGISTRAR OF TRADEMARKS

Référence : 2022 COMC 058

Date de la décision : 2022-03-28

[TRADUCTION CERTIFIÉE,

NON RÉVISÉE]

DANS L’AFFAIRE DE L’OPPOSITION

 

Coca-Cola Ltd.

Opposante

et

 

ORGY Co. Ltd.

Requérante

 

1,837,815 pour SUICOKE

Demande

Introduction

[1] Coca-Cola Ltd. (l’Opposante) s’oppose à l’enregistrement de la marque de commerce SUICOKE (la Marque), qui fait l’objet de la demande no 1,837,815 produite par ORGY Co. Ltd. (la Requérante).

[2] La demande d’enregistrement de la Marque est fondée sur l’emploi projeté au Canada en liaison avec les produits suivants :

(1) Sacs de sport tout usage; sacs à dos; sacs à dos, sacs à livres, sacs de sport, sacs banane, portefeuilles et sacs à main; sacs de sport; sacs cylindriques; sacs de plage; sacs à cordon coulissant; sacs à main; sacs banane; sacs en similicuir; sacs en cuir; sacoches de messager; portefeuilles de poche; sacs d’écolier; sacs à provisions; sacs à bandoulière; petits sacs pour hommes; sacs d’entraînement; fourre-tout; sacs de voyage; parapluies; sacs banane.

(2) Articles chaussants de sport; casquettes et chapeaux de baseball; articles chaussants de plage; vêtements tout-aller; vêtements tout-aller, à savoir pantalons, robes et shorts; articles chaussants tout-aller; articles chaussants d’exercice; chapeaux de mode; chapeaux; vestes d’extérieur; bottes imperméables; articles chaussants imperméables; sandales; casquettes et chapeaux de sport; vêtements de sport; articles chaussants de sport; chaussures de sport; chapeaux de soleil.

 

[3] L’opposition est principalement fondée sur l’allégation selon laquelle la Marque crée de la confusion avec les marques de commerce COKE de l’Opposante, antérieurement déposées ou employées au Canada en liaison avec des produits semblables ou connexes.

Le dossier

[4] La demande visant la Marque a été produite le 16 mai 2017. La demande a été annoncée aux fins d’opposition le 4 juillet 2018. De nombreuses modifications à la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, c T-13 (la Loi) sont entrées en vigueur le 17 juin 2019. Conformément à l’article 70 de la Loi, les motifs d’opposition seront évalués sur le fondement de la Loi dans sa version précédant immédiatement le 17 juin 2019, à l’exception que, en ce qui a trait à la confusion, les articles 6(2) à (4) de la Loi dans sa version actuelle seront appliqués.

[5] Le 4 décembre 2018, l’Opposante s’est opposée à la demande en produisant une déclaration d’opposition en vertu de l’article 38 de la Loi. Les motifs d’opposition sont fondés sur la non-conformité à l’article 30i) de la Loi, l’absence d’un droit à l’enregistrement en vertu de l’article 16(3) de la Loi, la non-enregistrabilité en vertu de l’article 12(1)d) de la Loi et l’absence de caractère distinctif en vertu de l’article 2 de la Loi.

[6] La Requérante a produit une contre-déclaration niant les motifs d’opposition.

[7] À l’appui de son opposition, l’Opposante a présenté les éléments de preuve suivants :

· Affidavit de Carolyn Harty, souscrit le 6 juin 2019 à Toronto (l’Affidavit Harty);

· Affidavit de Katharine C. Dwyer, souscrit le 10 juin 2019 à Atlanta, en Géorgie (l’Affidavit Dwyer).

[8] À l’appui de sa demande, la Requérante a produit l’affidavit de Junbeom Her, souscrit le 11 octobre 2019 à Toronto (l’Affidavit Her).

[9] Aucun des déposants n’a été contre-interrogé. Les deux parties ont produit des observations écrites, et ont été représentées à l’audience tenue le 15 novembre 2021.

[10] Avant d’évaluer les motifs d’opposition, je donnerai d’abord un aperçu de la preuve des parties, du fardeau de preuve de l’Opposante et du fardeau ultime de la Requérante.

Aperçu de la preuve de l’Opposante

[11] Comme elle l’a plaidé dans sa déclaration d’opposition, l’Opposante est la propriétaire de 41 enregistrements de marques de commerce qui consistent en le mot COKE, ou qui l’incorporent, lequel est enregistré en liaison avec un grand éventail de produits et de services (collectivement, les marques de commerce COKE). Le plus ancien de ces enregistrements est LMCDF16464 pour la marque de commerce COKE, enregistrée en liaison avec [traduction] « boissons sans alcool et sirops à utiliser dans la fabrication de ces boissons ».

[12] Pour les fins de la présente décision, je prends note des enregistrements suivants, qui, à mon avis, illustrent la portée des enregistrements de l’Opposante et qui représentent le ou les arguments les plus forts de la présente procédure. En particulier, ces enregistrements comprennent les produits qui chevauchent les produits visés par la demande [voir également les observations écrites de l’Opposante au para 46] :

Enregistrement

Produits

COKE
LMC356072
Date d’enregistrement :
1989-05-19

[traduction] (1) Chemises, chandails, hauts molletonnés, pantalons d’entraînement, jupes, shorts, jeans, hauts et bas, nommément pantalons d’entraînement, lorsque tous ces bas sont destinés à être vendus avec des hauts; vestes, bonneterie, ceintures, gants, foulards, bandeaux absorbants.
(2) Chemises de nuit pour adultes et enfants et combinaisons (c.-à-d. pyjamas à une pièce).
(3) Casquettes et chapeaux visières de sport.

COKE
LMC377009
1990-12-14

(1) Parasols de patio, parasols commerciaux, parasols de plage, parapluies de golf.
[…]

COKE
LMC384429
1991-05-17

[traduction] (1) Sacs fourre-tout. (2) Gants de cuisinier, poignées isolantes, napperons. (3) Torchons à vaisselle, nappes, serviettes de table, serviettes de plage. (4) Tabliers, chapeaux de chef.

COKE
LMC390734
1991-11-29

[traduction] (1) Bagages; sacs à bandoulière de voyage, sacs de vol, sacs de sport, sacs polochons, sacs isolants, sacs d’écolier, sacs à dos.

COKE
LMC466368
1996-11-26

(1) Vêtements nommément, pantalons, blouses, robes, manteaux, gilets, combinaisons-pantalons, salopettes, cravates, bretelles, costumes de bain, léotards, bas de réchauffement, caleçons boxeurs; sacs à lunch et sacs ventraux.

DIET COKE
LMC821206
2012-04-02

(1) Casquettes, chemises, pulls d’entraînement, shorts, pantalons, pantalons d’entraînement, chaussettes et pyjamas

CHERRY COKE
LMC821238
2012-04-02

(1) Casquettes, chemises, pulls d’entraînement, shorts, pantalons, pantalons d’entraînement, chaussettes et pyjamas

L’Affidavit Harty

[13] Mme Harty est une administratrice de l’Opposante [para 1]. Elle affirme que l’Opposante emploie les Marques de commerce COKE au Canada [traduction] « depuis des décennies » [para 4], dont les ventes dépassent 5 milliards de dollars canadiens entre 2008 et 2018, y compris la vente de plus de 14 milliards de litres de boissons gazeuses de marque COKE au Canada [para 6, 8 et 53].

[14] Mme Harty affirme qu’entre 2008 et 2018, l’Opposante a dépensé plus de 600 millions de dollars pour la commercialisation des boissons gazeuses de marque COKE au Canada [para 10 et 54]. Elle confirme que les efforts de publicité sont antérieurs à 2008, mais elle donne par ailleurs un aperçu et donne des exemples concernant cette publicité et cette promotion, notamment :

· campagnes de commercialisation remarquables [traduction] « au cours des dix dernières années » [para 11, Pièce 3];

· publicité télévisée, y compris en ce qui concerne la publicité de la marque COKE ZERO dans différentes régions géographiques au Canada [para 13 à 18, Pièce 4];

· publicité imprimée et dans les journaux [para 19, Pièce 6];

· publicité dans les transports en commun [para 20 et 21, Pièce 7];

· panneaux publicitaires [para 22, Pièce 8];

· publicité sur des camions [para 23 et 24, Pièces 9 et 10];

· commandite d’événements sportifs [para 25 à 31, Pièces 11 à 14];

· publicité au point d’achat [para 32 à 36, Pièces 15 à 18];

· distribution d’articles promotionnels de marque COKE [para 37];

· [traduction] « marketing expérientiel », par exemple, la distribution gratuite de boissons gazeuses de marque COKE [traduction] « aux membres du public pour qu’ils puissent découvrir les produits gratuitement, en augmentant la notoriété et la loyauté de la marque » [para 38 à 40, Pièces 19 et 20];

· promotions par publipostage direct, par exemple l’envoi ou la livraison de coupons pour les boissons gazeuses de marque COKE [para 41];

· présence et publicité sur Internet, par exemple par l’entremise du site Web de l’Opposante, coca-cola.ca, publicité sur les sites Web de tiers et les pages des médias sociaux [para 42 à 44, Pièces 21 et 22];

· jeux en ligne, contenu téléchargeable et concours [para 45 à 47, Pièces 23 et 24];

· accords exclusifs de partenariat commercial avec, entre autres, McDonald’s, Air Canada, Pizza et Cineplex, par exemple, la vente exclusive de boissons gazeuses de marque COKE dans tous les restaurants McDonald’s du Canada [para 48 à 52, Pièces 25 et 26].

[15] En résumé, Mme Harty affirme que [traduction] « Grâce à ces efforts et à ces dépenses considérables consacrés à la commercialisation et à la promotion de la marque COKE depuis un certain nombre d’années, [l’Opposante] a développé un achalandage important relativement aux marques COKE au point où ces marques sont devenues célèbres sur le marché canadien ».

[16] En examinant les pièces à l’affidavit de Mme Harty, je constate que bon nombre des pièces qui sont censées illustrer les marques de commerce COKE ne montrent que la marque Coca-Cola, qui n’était pas l’une des 41 marques de commerce COKE invoquées dans la déclaration d’opposition et reproduites à la Pièce 2 de l’Affidavit Harty. Par exemple, la bouteille de boisson gazeuse décrite à la Pièce 1 n’arbore que les marques de commerce Coca-Cola et Coca-Cola Zero. Toutefois, certains documents publicitaires de la Pièce 3 présentent les marques de commerce COKE et « Cherry Coke », et je note qu’une marque de commerce COKE figure sur un disque volant promotionnel indiqué à la Pièce 20.

L’Affidavit Dwyer

[17] Mme Dwyer est une administratrice de The Coca-Cola Company, société mère de l’Opposante. L’Affidavit Dwyer met en évidence l’octroi de licences et la vente de produits de marque COKE au Canada depuis 2014, ventilée par année, avec des exemples [para 6 à 10, Pièces 1 à 4]. Par exemple, Mme Dwyer atteste qu’en 2015, [traduction] « plus de 10 000 articles de marque COKE ont été vendus au Canada à un coût de gros de plus de 85 000 $ CAN à des détaillants, y compris Wal-Mart et Winners » et que les dessins de ces articles sont joints à son affidavit sous la cote 1. Je note que la Pièce 1 représente quatre chemises, dont une seule arbore la marque de commerce COKE. Les autres chemises arborent un logo Coca-Cola.

[18] Mme Dwyer atteste qu’entre 2015 et 2018, la Herschel Supply Company a autorisé les marques de commerce COKE et a vendu des sacs à dos, des fourre-tout, des petits sacs, des casquettes et des chapeaux de marque COKE au Canada par l’entremise de divers détaillants et en ligne [para 11, Pièce 5]. Toutefois, je constate encore une fois que les documents promotionnels produits en preuve montrent la marque de commerce Coca-Cola, plutôt que la marque de commerce COKE ou l’une des 41 Marques de commerce COKE invoquées.

[19] Mme Dwyer atteste également qu’en 2018, trois détaillants (Forever 21, Desigual et Tommy Hilfiger) ont lancé des [traduction] « collections exclusives de capsules de marque COKE » [para 12]. Toutefois, je note que les communiqués de presse produits en preuve n’arborent pas la marque de commerce COKE [Pièce 6].

[20] Néanmoins, Mme Dwyer atteste que près de 300 000 articles de marque COKE, d’une valeur de gros de plus de 1,5 million de dollars canadiens, ont été vendus à des détaillants canadiens entre 2014 et 2018 [para 13].

[21] Je note que les produits décrits dans les pièces comprennent des chemises et chandails, ainsi que des vestes, des chapeaux, des shorts, des sacs à dos et des sacs. Toutefois, parmi les produits illustrés, seuls trois t-shirts, un chapeau et une chemise à manches longues semblent arborer la marque de commerce COKE.

Aperçu de la preuve de la Requérante

L’Affidavit Her

[22] M. Her est directeur du marketing de SlavinRaphael Distribution Inc. (SRD), une société de vente en gros et de distribution de mode qui agit à titre d’agent canadien pour diverses marques de mode et d’articles chaussants, y compris les bottes Hunter, Ted Baker et New Balance [para 2]. SRD est le distributeur canadien exclusif de produits de marque SUICOKE fabriqués par la Requérante. Depuis 2017, SRD achète des chaussures SUICOKE à la Requérante et les revend au Canada [para 3]. Les articles chaussants SUICOKE comprennent des tongs, des bottes de pluie, des bottes d’hiver, des chaussures, des sandales, des espadrilles et des mocassins [para 4, Pièces A et B].

[23] SRD vend des articles chaussants SUICOKE par l’entremise de divers grands détaillants et magasins de diverses provinces [para 5] ainsi que par l’entremise du magasin en ligne de SRD, suicoke.ca [para 8]. Depuis 2017, les ventes en gros par l’entremise de détaillants ont dépassé 3 100 paires et 380 000 $ par année [para 6 et 7, Pièce C], tandis que SRD a vendu plus de 300 paires de chaussures sur son site Web, pour une valeur de détail de plus de 75 000 $ [para 8].

[24] M. Her fournit des données de Google Analytics concernant le site Web de SRD, indiquant qu’il y a eu plus de 27 000 visiteurs uniques sur le site suicoke.ca depuis 2017 [para 13].

[25] M. Her indique également qu’à titre de directeur du marketing, il est responsable de la surveillance des médias sociaux pour SUICOKE au Canada, comme sur Facebook, Instagram et Twitter, ainsi que par l’intermédiaire de la page [traduction] « Nous joindre » du site suicoke.ca. Il affirme qu’il n’a jamais eu connaissance qu’une personne a exprimé son opinion sur ces forums sur le fait qu’il y avait – ou a demandé s’il y avait – un lien entre les produits SUICOKE et Coca-Cola [para 14]. De même, M. Her affirme qu’il s’entretient régulièrement avec les détaillants des produits SUICOKE et confirme qu’il n’a [traduction] « jamais été informé qu’un consommateur a déclaré qu’il croyait qu’il y avait un lien entre les produits SUICOKE et Coca-Cola ou demandé s’il y en avait un ».

[26] Par ailleurs, l’Affidavit Her fait état de la prétendue manière de présenter la Marque sur les produits chaussants SUICOKE et leur emballage [para 9 à 12]. Je note que cette présentation est toujours effectuée au moyen de la marque figurative suivante :

[27] La question de savoir si cette présentation constitue la présentation et l’emploi de la Marque visée par la demande sera examinée ci-dessous.

Fardeau de preuve et fardeau ultime

[28] Conformément aux règles de preuve habituelles, l’Opposante a le fardeau de preuve d’établir les faits sur lesquels elle appuie les allégations formulées dans la déclaration d’opposition [John Labatt Ltd c Molson Companies Ltd, 1990 CarswellNat 1053, 30 CPR (3d) 293 (CF 1re inst)]. L’existence d’un fardeau de preuve imposé à l’Opposante à l’égard d’une question donnée signifie que, pour que cette question soit prise en considération, il doit exister une preuve suffisante pour permettre de conclure raisonnablement à l’existence des faits allégués à l’appui de cette question.

[29] La Requérante a le fardeau ultime de démontrer que la demande d’enregistrement ne contrevient pas aux dispositions de la Loi ainsi qu’il est allégué dans le cas des allégations à l’égard desquelles l’Opposante s’est acquittée de son fardeau de preuve. L’existence d’un fardeau ultime qui incombe à un requérant signifie que, s’il est impossible d’arriver à une conclusion déterminante une fois que toute la preuve a été examinée, la question doit être tranchée à l’encontre de celui-ci.

Motif fondé sur l’article 12(1)d) – Confusion avec une marque de commerce déposée

[30] L’Opposant fait valoir que la Marque n’est pas enregistrable en vertu de l’article 12(1)d) de la Loi, parce qu’elle crée de la confusion avec les Marques de commerce COKE de l’Opposante qui sont célèbres au Canada et qui font l’objet des 41 enregistrements de marques de commerce figurant à l’Annexe B de la déclaration d’opposition.

[31] La date pertinente en ce qui a trait à la confusion avec une marque de commerce déposée est la date de la présente décision [Park Avenue Furniture Corporation c Wickes/Simmons Bedding Ltd et al, 1991 CarswellNat 1119 (CAF)].

[32] Puisque les Marques de commerce COKE de l’Opposante existent dans le registre, l’Opposante s’acquitte de son fardeau de preuve en vertu de ce motif à l’égard de chacun de ses 41 enregistrements.

[33] Par conséquent, la Requérante doit établir, selon la prépondérance des probabilités, qu’il n’existe pas de probabilité raisonnable de confusion entre la Marque et l’une des Marques de commerce COKE de l’Opposante.

[34] J’examinerai d’abord la confusion concernant l’enregistrement LMC356072 de l’Opposante pour COKE, enregistrée en liaison avec un éventail de produits de vêtements, puis j’aborderai brièvement les autres enregistrements de l’Opposante.

Test en matière de confusion

[35] Le test à appliquer pour trancher la question de la confusion est énoncé à l’article 6(2) de la Loi, qui prévoit que l’emploi d’une marque de commerce crée de la confusion avec une autre marque de commerce lorsque l’emploi des deux marques de commerce dans la même région serait susceptible de faire conclure que les produits liés à ces marques de commerce sont fabriqués, vendus, donnés à bail ou loués, ou que les services liés à ces marques sont loués ou exécutés, par la même personne, que ces produits ou services soient ou non de la même catégorie générale ou figurent ou non dans la même classe de la classification de Nice.

[36] Le critère applicable est celui de la première impression que laisse dans l’esprit du consommateur ordinaire « plutôt pressé » la vue de la Marque en liaison avec les produits visés par la demande, alors qu’il n’a qu’un vague souvenir de la marque de commerce de l’Opposante et qu’il ne s’arrête pas pour réfléchir à la question en profondeur [voir Veuve Clicquot Ponsardin c Boutiques Cliquot Ltée, 2006 CSC 23].

[37] En faisant une telle évaluation, je dois tenir compte de toutes les circonstances de l’espèce pertinentes, y compris celles énumérées à l’article 6(5) de la Loi : le caractère distinctif inhérent des marques de commerce et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues; la période pendant laquelle les marques de commerce ont été en usage; le genre des produits, services ou entreprises; la nature du commerce; et le degré de ressemblance entre les marques de commerce, notamment dans la présentation ou le son ou dans les idées qu’elles suggèrent.

[38] Les critères ou les facteurs énoncés à l’article 6(5) de la Loi ne forment pas une liste exhaustive, et un poids différent sera accordé à chacun d’eux selon le contexte [Mattel, Inc c 3894207 Canada Inc, 2006 CSC 22, au para 54]. Dans Masterpiece Inc c Alavida Lifestyles Inc, 2011 CSC 27, la Cour suprême du Canada a déclaré que l’article 6(5)e), la ressemblance entre les marques de commerce, est le facteur susceptible d’avoir le plus d’importance dans l’analyse relative à la confusion [au para 49] et que, bien que le premier mot dans la marque de commerce puisse être le plus important dans certains cas, il est préférable de se demander si l’un des aspects de la marque de commerce est particulièrement « frappant ou unique » [au para 66].

Degré de ressemblance

[39] En apparence, les marques de commerce des parties partagent l’élément COKE, bien que cet élément soit à la fin de la Marque, SUICOKE.

[40] Quant au son, il n’est pas clair quelle est la prononciation « correcte » de la Marque, mais je suis d’accord avec l’Opposante pour dire qu’à tout le moins le son pourrait ressembler à « Swee-Coke » ou ses variations de telle sorte que l’élément COKE constitue une deuxième syllabe distincte.

[41] En ce qui concerne les idées suggérées, l’Opposante fait valoir que COKE [traduction] « fait uniquement référence à l’Opposante » [observations écrites de l’Opposante, au para 57], tandis que la Requérante fait observer que « coke » est un mot ordinaire faisant référence au résidu de charbon ou à une forme abrégée commune du mot [traduction] « cocaïne » [observations écrites de la Requérante, au para 57]. Nonobstant les questions de preuve examinées ci-dessous, pour les fins de ce facteur, je suis prêt à accepter que l’idée suggérée par la marque de commerce COKE de l’Opposante est celle de son produit de boisson bien connu, également connu sous le nom de Coca-Cola. Toutefois, je ne suis pas d’accord avec l’Opposante pour dire que la même idée est suggérée par la Marque, car il s’agit d’un mot inventé avec l’élément « SUI » qui précède l’élément COKE. Étant donné que le mot COKE a d’autres significations, je ne considère pas que l’idée suggérée par la Marque est une sorte de variation de la marque de commerce COKE de l’Opposante ou qu’elle est liée aux produits de l’Opposante. Je suis d’accord avec la Requérante pour dire que SUICOKE est [traduction] « un mot inventé, sans aucune signification ni idée suggérée » [observations écrites de la Requérante, au para 58].

[42] Dans l’ensemble, étant donné le premier élément distinctif de la Marque SUI, et compte tenu de l’ensemble des marques de commerce, je considère qu’il y a un faible degré de ressemblance dans la présentation ou le son et les idées suggérées

[43] Par conséquent, cet important facteur favorise la Requérante.

Caractère distinctif inhérent et mesure dans laquelle les marques sont devenues connues

[44] Dans ses observations écrites, l’Opposante fait valoir que la Marque et les Marques de commerce COKE de l’Opposante ont un caractère distinctif inhérent [para 33]. De plus, l’Opposante soutient qu’elle a [traduction] « présenté des éléments de preuve démontrant des ventes importantes de Produits COKE et une promotion connexe, de sorte que l’on peut conclure que [les Marques de commerce COKE] sont célèbres au Canada en liaison avec les produits de boissons COKE et que les Marques COKE sont bien connues au Canada en liaison avec les produits sous licence COKE » [para 34]. Toutefois, comme je l’ai mentionné, la preuve de l’Opposante porte en grande partie sur le logo et les marques de commerce Coca-Cola de l’Opposante, et non sur les Marques de commerce COKE de l’Opposant en tant que telle. Bien que les éléments de preuve contiennent des exemples de Marques de commerce COKE, étant donné que les deux affidavits de l’Opposante combinent toute preuve de vente et de promotion avec celle des marques de commerce Coca-Cola, les éléments de preuve de l’Opposante ne précisent pas dans quelle mesure les Marques de commerce COKE sont devenues connues au Canada en liaison avec les produits de boisson, et encore moins les produits sous licence (comme les vêtements) qui chevauchent les produis visés par la demande en l’espèce.

[45] Néanmoins, le registraire peut prendre connaissance d’office des termes de dictionnaire [Tradall SA c Devil’s Martini Inc, 2011 COMC 65]. En l’espèce, je note les définitions suivantes de « coke » :

[traduction]

coke : 1) (nom) le produit solide résultant de la distillation destructrice du charbon dans un four ou une chambre fermée ou par combustion imparfaite, consistant principalement en carbone : utilisé principalement comme combustible dans la métallurgie pour réduire les oxydes métalliques des métaux; 2) (verbe) convertir ou devenir de la cocaïne [dictionary.com]

coke : 1) (nom) le résidu de charbon laissé après la distillation destructrice et utilisé comme combustible; également : un résidu similaire laissé par d’autres matières (comme le pétrole) distillé à la sécheresse; 2) se transformer en coke; devenir coke ou assimilé à la coke; 3) (nom) cocaïne; 4) (marque de commerce) [Coke] utilisée pour une boisson de cola; 5) (nom biographique) Sir Edward [Coke] 1552-1634 Lord Coke Juriste anglais [Merriam-Webster Dictionary]

[46] L’inclusion de la marque de commerce de l’Opposante dans le Merriam-Website Dictionary semble appuyer l’argument de l’Opposante selon lequel sa marque de commerce COKE est bien connue, sinon célèbre, du moins en ce qui concerne les boissons de cola. En fait, cette conclusion n’a pas été sérieusement contestée par la Requérante.

[47] En ce qui concerne la Marque, comme il est indiqué dans la preuve de la Requérante et reconnu par l’Opposante, SUICOKE est un terme inventé, sans signification descriptive ou suggestive par rapport aux produits visés par la demande. En ce qui concerne la mesure dans laquelle la Marque est devenue connue au Canada, bien que la Marque soit visée par la demande sur la base de l’emploi projeté, l’Affidavit Her fournit une preuve d’emploi ultérieur [par exemple, Affidavit Her, aux para 6 à 8]. Toutefois, je suis d’accord avec l’Opposante pour dire qu’une partie de la preuve d’emploi vise une marque figurative (reproduite ci-dessus) qui ne serait pas nécessairement perçue comme arborant la Marque telle qu’elle est enregistrée. Selon les images aux paragraphes 9 et 10 de l’Affidavit Her, les articles chaussants de l’Opposante et les emballages arborent une marque figurative selon laquelle le K dans SUICOKE pourrait être perçu comme un I et une apostrophe (en d’autres termes, SUICOI’E au lieu de SUICOKE). Comme l’a fait remarquer l’Opposante à l’audience, si cette marque figurative était la marque de commerce visée par la demande, il n’y aurait probablement pas d’opposition de la part de l’Opposante en l’espèce. En tout état de cause, il y a au moins quelques éléments de preuve d’emploi et de présentation de la Marque nominale SUICOKE, comme dans les factures de l’Opposante aux détaillants [Affidavit Her, au para 7, et Pièce C] et le site Web de l’Opposante et les comptes de médias sociaux [Affidavit Her, aux para 13 et 14].

[48] Compte tenu de ce qui précède, bien que j’admette que la marque de commerce COKE est devenue bien connue au Canada, je considère que cette distinction est équilibrée par le caractère distinctif inhérent de la Marque. Par conséquent, en somme, je ne considère pas que ce facteur favorise de façon significative l’une ou l’autre des parties.

Période pendant laquelle la marque a été en usage

[49] En ce qui concerne la période pendant laquelle les marques de commerce des parties ont été en usage, selon la preuve de vente d’articles chaussants SUICOKE aux détaillants dans l’Affidavit Her, la Requérante emploie la Marque depuis 2017 [para 7 et Pièce C].

[50] Prenant note de l’amalgame susmentionné entre l’emploi par l’Opposante des Marques de commerce COKE et l’emploi de ses marques de commerce Coca-Cola, la Requérante fait valoir qu’il [traduction] « n’existe aucune preuve crédible et particulière quant au moment où l’une des [Marques de commerce COKE] a été employée pour la première fois au Canada, en liaison avec des produits » [observations écrites de la Requérante, au para 71]. Toutefois, à tout le moins, je suis disposé à accepter qu’il y a eu au moins un certain emploi de la marque de commerce COKE de l’Opposante en liaison avec des produits de vêtements depuis 2015 au Canada. Bien que les chiffres de vente totaux des produits de marque COKE soient confondus avec ceux des produits de marque Coca-Cola dans l’Affidavit Dwyer, je note que Mme Dwyer affirme que les produits de marque Coke ont été vendus à des détaillants canadiens comme Wal‑Mart depuis 2015, et des exemples de ces produits incluent une chemise arborant la marque de commerce COKE [para 7 et Pièce 1].

[51] De plus, bien que cela ne soit pas clairement précisé, il serait malhonnête de conclure qu’aucune des Marques de commerce COKE de l’Opposante n’a été liée, au moins dans une certaine mesure, aux efforts de vente ou de promotion attestés de l’Opposante depuis 2008 au Canada, comme l’énonce l’Affidavit Harty.

[52] Par conséquent, ce facteur favorise l’Opposante.

Genre des produits ou entreprises et nature du commerce

[53] Lorsqu’il est question de considérer le genre des produits des parties par rapport à la question de confusion, ce sont les états déclaratifs dans la demande et l’enregistrement ou les enregistrements en question qui gouvernent [Mr Submarine Ltd c Amandista Investments Ltd, 1987 CarswellNat 749 (CAF); Miss Universe Inc c Bohna, 1994 CarswellNat 1443 (CAF)].

[54] Bien qu’aucune des Marques de commerce COKE de l’Opposante ne soit enregistrée en liaison avec des produits chaussants, il y a par ailleurs un chevauchement dans le genre des produits de vêtements et de couvre-chefs visés par la demande avec les produits de vêtements et de couvre-chefs mentionnés dans l’enregistrement LMCA356072 de l’Opposante. Je signale également à ce stade qu’il y a chevauchement direct entre les produits de parasols, de bagages, de sacs et d’accessoires visés par la demande et certains autres enregistrements de la Marque de commerce COKE de l’Opposante, y compris ceux mentionnés ci-dessus.

[55] Je suis également d’accord avec l’Opposante pour dire que le genre de l’entreprise de l’Opposante est tel qu’elle emploie sa marque de commerce COKE sur un grand éventail de produits de consommation, comme en témoignent ses éléments de preuve et ses nombreux enregistrements. De plus, compte tenu du genre des produits, les articles des parties seraient vendus dans les mêmes magasins de détail ou dans des magasins semblables. En fait, la preuve des parties révèle que les articles chaussants de la Requérante ont été vendus dans les magasins Winners au Canada [Affidavit Her, au para 5], tout comme les produits de vêtements de l’Opposante [Affidavit Dwyer, au para 7].

[56] Par conséquent, ces facteurs favorisent l’Opposante.

Autres circonstances de l’espèce – Famille de marques de commerce COKE de l’Opposante

[57] Lorsqu’il existe une famille de marques de commerce, il peut y avoir une probabilité accrue que le public considère une marque de commerce semblable comme une autre marque de commerce de la famille et, par conséquent, suppose que le produit ou service en liaison avec cette marque de commerce est fabriqué ou offert par le propriétaire de la famille de marques de commerce. Il n’y a, toutefois, aucune présomption de l’existence d’une famille de marques de commerce dans les procédures d’opposition. Une partie souhaitant établir l’existence une famille de marques de commerce doit prouver qu’elle emploie plus d’une ou deux marques de commerce au sein de la famille alléguée [Techniquip Ltd c Canadian Olympic Assn, 1998 CarswellNat 323 (CF 1re inst), conf par 1999 CarswellNat 2511 (CAF); et Now Communications Inc c CHUM Ltd, 2003 CarswellNat 5017 (COMC), au para 35].

[58] Dans ses observations écrites, l’Opposante fait valoir qu’elle a produit des éléments de preuve démontrant que sa propriété d’une famille de marques de commerce COKE est une circonstance de l’espèce en sa faveur [para 60 à 62].

[59] Toutefois, il n’est pas clair que l’Opposante a correctement attesté l’existence d’une famille pertinente de Marques de commerce COKE en l’espèce. Bien que l’Opposante ait 41 enregistrements, les éléments de preuve réels concernant ces Marques de commerce COKE sont minces, y compris, étonnamment, en liaison avec les boissons de cola. Encore une fois, c’est parce que les affidavits de l’Opposante confondent en grande partie son emploi du logo et de la marque de commerce Coca-Cola avec l’emploi présumé de ses Marques de commerce COKE. La Requérante fait valoir que la preuve de ce genre devrait être considérée comme « sommaire », car elle ne précise pas quelles marques de commerce citées par l’Opposante ont été employées et elle ne fournit pas de ventilation des ventes par marque de commerce [citant The Clorox Company of Canada Ltd c Chloretec, 2020 CAF 76].

[60] Même si l’Opposante avait plus clairement démontré sa famille de Marques de commerce COKE, ces marques de commerce se limitent à COKE et à des éléments descriptifs ou suggestifs avec COKE, tels que DIET COKE et CHERRY COKE. Même si ces mots ne sont que descriptifs ou suggestifs en liaison avec des produits liés aux boissons, ils sont néanmoins des mots de dictionnaire courants. Cependant, la Marque diffère en ce que SUICOKE est un mot comportant l’élément SUI – et donc, la Marque dans son ensemble – n’ayant pas de signification claire et étant intrinsèquement distinctif. À mon avis, le consommateur moyen ne considérerait pas la Marque comme appartenant à une famille quelconque des marques de commerce COKE de l’Opposante.

[61] Par conséquent, même si je devais conclure qu’il s’agit d’une circonstance de l’espèce pertinente favorisant l’Opposante, ce ne serait que d’une façon nominale.

Autres circonstances de l’espèce – Marques de commerce célèbres et bien connues

[62] Bien que la prétendue renommée des Marques de commerce COKE de l’Opposante ait été évoquée ci-dessus, l’Opposante fait valoir qu’il s’agit là d’une autre circonstance de l’espèce la favorisant [para 53 et 64]. À cet égard, l’Opposante fait valoir que la renommée de ses Marques de commerce COKE élargit la portée de la protection et qu’une telle renommée [traduction] « est même en mesure de transcender les marques de différentes catégories de produits » [citant Mattel USA Inc c 3894207 Canada Inc, 2006 CSC 22, au para 63 (Mattel USA)].

[63] Toutefois, je souscris aux arguments de la Requérante selon lesquels la preuve de la renommée des Marques de commerce COKE en l’espèce est problématique ou, au mieux, « sommaire » [para 22 et 88]. En tout état de cause, je suis également d’accord avec la Requérante pour dire que toute [traduction] « renommée » n’est pas déterminante – chaque situation doit être jugée dans son contexte complet [observations écrites de la Requérante, au para 87, citant Mattel USA, aux para 72 et 73].

[64] À mon avis, l’Opposante revendique essentiellement un monopole sur le mot ou la syllabe COKE. Toutefois, la Marque a un caractère distinctif inhérent qui la distingue des Marques de commerce COKE de l’Opposante.

[65] Par conséquent, même si je considérais qu’il s’agit d’une circonstance de l’espèce qui favorise l’Opposante, ce ne serait que d’une façon nominale.

Autres circonstances de l’espèce – Aucune preuve de confusion réelle

[66] Dans ses observations écrites, la Requérante fait valoir que, même si ce n’est pas déterminant, l’absence de confusion réelle en l’espèce constitue une circonstance de l’espèce [para 85]. À cet égard, la Requérante se demande pourquoi aucun cas de confusion n’a été signalé, malgré la renommée présumée des Marques de commerce COKE de l’Opposante et la disponibilité des produits SUICOKE de la Requérante dans les magasins et en ligne depuis 2017 [para 86].

[67] Dans ses observations écrites, l’Opposante note à juste titre qu’il peut encore y avoir confusion entre les marques de commerce, même s’il n’y a pas eu de cas de confusion [para 66]. Elle fait valoir que l’absence de confusion réelle semble s’expliquer par le fait que les parties ne vendent pas leurs produits dans les mêmes magasins [para 67]. Comme je l’ai indiqué, la preuve indique en fait que les parties ont toutes deux vendu leurs produits dans les magasins de détail Winners. En tout état de cause, et comme je l’ai aussi indiqué, la marque de commerce présentée sur les articles chaussants et les emballages de la Requérante au niveau du consommateur du magasin de détail est une variante figurative de la Marque, qui peut être perçue comme SUICOI’E plutôt que comme SUICOKE. Cette différence de perception peut expliquer l’absence de cas de confusion signalés par les consommateurs, malgré l’apparition de la Marque sur le site Web de l’Opposante et les comptes de médias sociaux depuis 2017.

[68] Par conséquent, je ne considère pas qu’il s’agisse d’une circonstance de l’espèce importante qui favorise l’une ou l’autre des parties.

Conclusion – Confusion avec la marque de commerce COKE de l’Opposante

[69] Comme je l’ai mentionné, le degré de ressemblance entre les marques de commerce des parties constitue le facteur réglementaire qui est susceptible d’avoir le plus d’importance dans l’analyse relative à la confusion.

[70] Après avoir examiné toutes les circonstances de l’espèce, je conclus que la Requérante s’est acquittée de son fardeau ultime à l’égard de la probabilité de confusion entre les marques de commerce des parties. J’arrive à cette conclusion en raison du faible degré de ressemblance entre les marques de commerce des parties et le caractère distinctif inhérent de la Marque de la Requérante, nonobstant le chevauchement du genre des produits et des entreprises et de la nature des commerces des parties ou la prétendue renommée de la marque de commerce COKE de l’Opposante.

[71] Compte tenu de ce qui précède, le motif d’opposition fondé sur l’article 12(1)d) relatif à la confusion avec l’enregistrement no LMC356072 de l’Opposante pour COKE est rejeté.

[72] Étant donné que cet enregistrement représentait l’un des arguments les plus forts, sinon le plus fort, pour l’Opposante, je parviens à la même conclusion en ce qui concerne la question de la confusion avec les autres Marques de commerce COKE de l’Opposante.

[73] Par conséquent, le motif d’opposition fondé sur l’article 12(1)d) concernant la confusion est rejeté.

Motif fondé sur l’article 16(3)a) – Absence de droit à l’enregistrement – Emploi antérieur

[74] L’Opposante plaide que la Requérante n’est pas la personne qui a droit à l’enregistrement de la Marque en vertu de l’article 16(3)a) de la Loi, puisque, à la date de production de la demande, la Marque créait de la confusion avec les Marques de commerce COKE de l’Opposante, antérieurement employées au Canada en liaison avec les produits COKE qui sont célèbres au Canada.

[75] Comme la Marque est visée par la demande sur la base de l’emploi projeté, la date pertinente pour ce motif est la date de production de la demande de la Marque, à savoir le 16 mai 2017.

[76] Dans ses observations écrites, la Requérante fait valoir que l’Opposante ne s’est pas acquittée de son fardeau initial au titre de ce motif, en ce sens que la preuve ne révèle aucun élément clair et particulier d’emploi antérieur au Canada à l’égard de l’une des Marques de commerce COKE [para 39 et 41].

[77] Bien que le défaut de l’Opposante de préciser sa preuve à l’égard de chacune de ses Marques de commerce COKE soit problématique, comme je l’ai indiqué, j’accepte que l’Affidavit Dwyer démontre l’emploi antérieur de la marque de commerce COKE de l’Opposante en liaison avec des produits de vêtements à tout le moins [Affidavit Dwyer, au para 7 et Pièce 1].

[78] Par conséquent, il incombe à la Requérante de démontrer qu’il n’y a pas une probabilité de confusion entre les marques de commerce des parties.

[79] En l’espèce, compte tenu de la date pertinente antérieure, certaines des circonstances de l’espèce sont plutôt favorables à l’Opposante en ce sens que la demande est fondée sur l’emploi projeté et qu’il n’existe aucune preuve quant à la mesure dans laquelle la Marque est devenue connue à la date de production de la demande. Toutefois, même en donnant une interprétation généreuse à la preuve problématique de l’Opposante, je ne considère pas que ce changement modifie de façon significative l’analyse et la conclusion concernant la question de la confusion en l’espèce.

[80] Après avoir examiné toutes les circonstances de l’espèce, je conclus que la Requérante s’est acquittée de son fardeau ultime à l’égard de la probabilité de confusion entre les marques de commerce des parties. J’arrive à cette conclusion en raison du faible degré de ressemblance entre les marques de commerce des parties et le caractère distinctif inhérent de la Marque de la Requérante, nonobstant le chevauchement du genre des produits et des entreprises et de la nature des commerces des parties ou la prétendue renommée de la marque de commerce COKE de l’Opposante.

[81] Par conséquent, le motif d’opposition fondé sur l’absence de droit à l’enregistrement est rejeté.

Motif fondé sur l’article 2 – absence de caractère distinctif

[82] L’Opposante fait valoir que la Marque n’est pas distinctive de la Requérante au sens de l’article 2 de la Loi parce que la Marque ne distingue pas véritablement les produits dont l’emploi est projeté par la Requérante des produits de l’Opposante, et ne peut pas le faire, ni ne s’adapte à les distinguer ainsi, étant donné que la Marque crée de la confusion avec les Marques de commerce COKE employées et promues au Canada par l’Opposante en liaison avec les produits COKE et qui sont célèbres au Canada.

[83] La date pertinente pour ce motif est la date de production de l’opposition, soit le 4 décembre 2018 [Metro-Goldwyn-Mayer Inc c Stargate Connections Inc, 2004 CF 1185].

[84] L’article 2 de la Loi, dans sa version alors en vigueur, définit le terme « distinctif » comme suit :

distinctive Relativement à une marque de commerce, celle qui distingue véritablement les produits ou services en liaison avec lesquels elle est employée par son propriétaire, des produits ou services d’autres propriétaires, ou qui est adaptée à les distinguer ainsi.

[85] Une marque de commerce « distingue véritablement » en acquérant le caractère distinctif par l’emploi, ce qui donne lieu à un caractère distinctif dans les faits. En revanche, une marque de commerce qui est « adaptée à les distinguer ainsi » est une marque qui ne dépend pas de l’emploi pour son caractère distinctif, parce qu’elle possède un caractère distinctif inhérent [voir Astrazeneca AB c Novopharm Ltd, 2003 CAF 57, au para 16].

[86] L’Opposante a le fardeau initial d’établir qu’à la date pertinente, sa marque de commerce était connue dans une certaine mesure au Canada en liaison avec les produits pertinents et avait au Canada une réputation « importante, significative ou suffisante » de façon à annuler le caractère distinctif de la Marque [voir Bojangles’ International, LLC c Bojangles Café Ltd, 2006 CF 657, aux para 33 et 34; et Ontario Dental Assistants Association c Association dentaire canadienne, 2013 CF 266, au para 42, conf par 2013 CAF 279]. Dans Suzanne’s Inc c Auld Phillips Ltd, 2005 CAF 429, dans le cadre d’une procédure de radiation prévue à l’article 57 de la Loi, la Cour d’appel fédérale a déclaré qu’« [é]videmment, il ne peut arriver que rarement qu’un commerçant unique soit en mesure de faire perdre à une marque son caractère distinctif, mais rien ne l’empêche en principe » [au para 7].

[87] En l’espèce, étant donné les questions soulevées par la preuve et décrites ci-dessus, je suis d’accord avec la Requérante pour dire que l’Opposante ne s’acquitte pas de son fardeau initial en l’espèce.

[88] Quoi qu’il en soit, dans la mesure où ce motif s’appuierait en fin de compte sur la question de la confusion, je parviendrais à la même conclusion que celle que j’ai tirée concernant la probabilité de confusion. En particulier, après avoir examiné toutes les circonstances de l’espèce, je conclurais que la Requérante s’est acquittée de son fardeau ultime à l’égard de la probabilité de confusion entre les marques de commerce des parties. J’arriverais à cette conclusion en raison du faible degré de ressemblance entre les marques de commerce des parties et le caractère distinctif inhérent de la Marque et nonobstant le chevauchement du genre des produits et des entreprises et de la nature des commerces ou la prétendue renommée des Marques de commerce COKE de l’Opposante.

[89] Par conséquent, le motif d’opposition fondé sur l’absence de caractère distinctif est rejeté.

Motif fondé l’article 30 – Non-conformité

[90] L’Opposante plaide que la demande ne se conforme pas à l’article 30i) de la Loi parce que, à la date de production de la demande, la Requérante n’aurait pas pu être convaincue qu’elle avait droit d’employer la Marque au Canada en liaison avec les produits visés par la demande, étant donné que la Marque crée de la confusion avec les Marques de commerce COKE de l’Opposante qui sont célèbres au Canada.

[91] L’article 30i) de la Loi exigeait simplement que le requérant inclue dans sa demande une déclaration portant qu’il est convaincu d’avoir droit d’employer sa marque de commerce au Canada en liaison avec les produits ou services décrits dans la demande. Lorsque cette déclaration est fournie, un motif d’opposition fondé sur l’article 30i) ne devrait être accueilli que dans des circonstances exceptionnelles, comme lorsqu’il y a une preuve de mauvaise foi du requérant [Sapodilla Co Ltd c Bristol-Myers Co, (1974) CarswellNat 476 (COMC)]. Même si un requérant avait connaissance de l’existence de la marque de commerce d’un opposant – qu’elle ait été ou non en fin de compte jugée comme créant de la confusion par rapport à la marque de commerce visée par la demande – cela ne suffit pas à étayer une allégation selon laquelle un requérant ne pouvait pas être convaincu d’avoir le droit d’employer sa marque de commerce [voir Woot, Inc c WootRestaurants Inc, 2012 COMC 197].

[92] En l’espèce, la déclaration requise a été fournie, et rien n’indique qu’il s’agit d’un cas exceptionnel.

[93] Par conséquent, le motif fondé sur la non-conformité à l’article 30 de la Loi est rejeté.

Décision

[94] Compte tenu de tout ce qui précède et conformément à l’article 38(12) de la Loi et aux pouvoirs qui m’ont été délégués en vertu de l’article 63(3) de la Loi, je rejette l’opposition.

 

Andrew Bene

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

Traduction certifiée conforme

Liette Girard

Le français est conforme aux WCAG.


 

 

 

 

COMMISSION DES OPPOSITIONS DES MARQUES DE COMMERCE

OFFICE DE LA PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE DU CANADA

COMPARUTIONS ET AGENTS INSCRITS AU DOSSIER

___________________________________________________

DATE DE L’AUDIENCE 2021-11-15

COMPARUTIONS

Monique Couture

Pour l’Opposante

David Reive

Pour la Requérante

AGENTS AU DOSSIER

Gowling WLG (Canada) LLP

Pour l’Opposante

Miller Thomson LLP

Pour la Requérante

 

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