Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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Référence : 2022 COMC 092

Date de la décision : 2022-05-03

[TRADUCTION CERTIFIÉE,

NON RÉVISÉE]

DANS L’AFFAIRE DE L’OPPOSITION

 

Empire Communities Corp.

Opposante

et

 

Vijay Patel

Requérant

 

1,811,012 pour EMPIRE SUITES

Demande

Aperçu

[1] Empire Communities Corp. (l’Opposante) s’oppose à l’enregistrement de la marque de commerce EMPIRE SUITES (la Marque), reproduite ci-dessous, laquelle est visée par la demande d’enregistrement no 1,811,012 au nom de Vijay Patel (le Requérant).

EMPIRE SUITES

[2] La demande d’enregistrement de la Marque a été produite le 23 novembre 2016 sur la base de son emploi au Canada depuis le 1er octobre 1993 en liaison avec les produits et services suivants :

Produits

Boissons au café; boissons au thé; céréales de déjeuner; café décaféiné; café; café et thé; boissons à base de café

Boissons à base de cola

Services

Gestion administrative d’hôtels; gestion hôtelière; gestion hôtelière.

Services d’hébergement hôtelier; réservation d’hôtels; services de réservation de chambres d’hôtel; services d’hôtel; hôtels; offre d’hébergement hôtelier temporaire; réservation de chambres d’hôtel pour les voyageurs

[3] La Marque a été annoncée aux fins d’opposition dans le Journal des marques de commerce le 2 mai 2018 et le 28 septembre 2018, l’Opposante a produit une déclaration d’opposition en vertu de l’article 38 de la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, c T-13 (la Loi). De nombreuses modifications à la Loi sont entrées en vigueur le 17 juin 2019. Dans le contexte de l’opposition, la date qui détermine la version applicable de la Loi est la date à laquelle la demande faisant l’objet de l’opposition a été annoncée. Étant donné que la présente demande a été annoncée avant l’entrée en vigueur, aux termes des dispositions de transitoires prévues à l’article 70 de la Loi, les motifs de l’opposition seront évalués en vertu de la Loi dans sa version précédant immédiatement la modification.

[4] Les motifs d’opposition initialement invoqués par l’Opposante alléguaient que la demande n’est pas conforme à l’article 30b) de la Loi, que la Requérante n’est pas la personne ayant droit à l’enregistrement de la Marque en vertu des articles 16(1)a) et b) de la Loi et que la Marque n’est pas distinctive en vertu de l’article 2 de la Loi. Avec l’autorisation du registraire accordée le 13 juin 2019, la déclaration d’opposition a été subséquemment modifiée pour alléguer également que la Marque n’est pas enregistrable en vertu des articles 12(1)b) et d) de la Loi.

[5] Le Requérant a produit et signifié une contre-déclaration dans laquelle il nie toutes les allégations invoquées dans la déclaration d’opposition.

[6] À l’appui de son opposition, l’Opposante a produit deux affidavits d’Andrew P. Guizzetti. Afin d’appuyer sa demande, le Requérant a produit son propre affidavit. Aucun des déposants n’a été contre-interrogé.

[7] Les deux parties ont produit des observations écrites. Je note d’emblée que l’Opposante a soulevé des objections à l’égard du contenu des observations écrites du Requérant. En particulier, l’Opposante soutient que ce document comprend plusieurs allégations qui n’ont pas été dûment présentées comme preuve. Je confirme que j’ai ignoré toute observation contenue dans les observations écrites du Requérant concernant des questions qui n’étaient pas énoncées dans la preuve.

[8] Une audience a eu lieu à laquelle les deux parties ont été représentées.

motif d’opposition fondé sur l’article 30b) – Fausse date de premier emploi

[9] Je commencerai par examiner le motif d’opposition de l’Opposante fondé sur l’article 30b), car, à mon avis, il est suffisant pour trancher l’opposition.

[10] L’article 30b) de la Loi exige l’emploi ininterrompu d’une Marque, dans la pratique normale du commerce, depuis la date revendiquée (le 1er octobre 1993) à la date de production de la demande (le 23 novembre 2016) [Brasserie Labatt Ltée c Benson & Hedges (Canada) Ltée (1996), 67 CPR (3d) 258 (CF 1re inst), à la p. 262].

[11] En ce qui concerne ce motif d’opposition, l’Opposante a soutenu que la demande d’enregistrement de la Marque n’est pas conforme aux exigences de l’article 30b) parce que [traduction] « la déclaration d’emploi est fausse ».

[12] Le fardeau initial de l’Opposante est léger quant à la question de la non-conformité avec l’article 30b) de la Loi, étant donné que les faits concernant le premier emploi par la Requérante relèvent particulièrement des connaissances de la Requérante [Tune Masters c Mr P’s Mastertune Ignition Services Ltd (1986), 10 CPR (3d) 84 (COMC)]. Il est possible de s’acquitter de ce fardeau en renvoyant non seulement à la preuve de l’Opposante, mais également à celle de la Requérante [Brasserie Labatt Ltée c Brasseries Molson (1996), 68 CPR (3d) 216 (CF 1re inst)]. L’Opposante peut donc se fonder avec sur un élément de preuve présenté par la Requérante pour s’acquitter de son fardeau initial, s’il démontre que la preuve de la Requérante remet en question les revendications formulées dans la demande de la Requérante [Corporativo de Marcas GJB, SA de CV c Bacardi & Company Ltd, 2014 CF 323, aux para 30 à 38].

[13] À cet égard, l’Opposante s’appuie sur une combinaison de sa propre preuve et de la preuve de la Requérante. Plus précisément, l’Opposante soutient que son fardeau est déchargé par l’admission du Requérant dans son affidavit qu’il a mal indiqué la date du premier emploi dans la demande, admission qui est conforme à la preuve circonstancielle présentée dans la preuve principale de l’Opposante (énoncée au paragraphe 30 du premier affidavit d’Andrew P. Guizzetti). Le passage invoqué de l’affidavit du Requérant est reproduit ci-dessous :

[traduction]

11. J’ai personnellement déposé la demande d’enregistrement de la marque de commerce EMPIRE SUITES & Design le 23 novembre 2016. Au cours du processus de demande, j’ai indiqué le 1er octobre 1993 comme étant la date à partir de laquelle j’avais ainsi employé la marque de commerce EMPIRE SUITES & Design. N’étant pas un professionnel, j’ai été déconcerté par le système par lequel la demande a été enregistrée sur le site Web de l’Office de la propriété intellectuelle du Canada, et j’ai inclus par erreur la date du 1er octobre 1993, plutôt que celle du 18 octobre 2016, qui est la véritable date à partir de laquelle j’ai employé la marque de commerce EMPIRE SUITES & Design. Il s’agissait simplement d’une erreur d’écriture, dont je dois demander la modification, la correction ou la suppression immédiate.

[14] Tant dans ses observations écrites qu’à l’audience, le Requérant a admis qu’il y a en fait une admission de sa part qu’il a fait une erreur en revendiquant l’emploi depuis le 1er octobre 1993 plutôt que le 18 octobre 2016. Notamment, dans ses observations écrites, le Requérant soutient ce qui suit :

[traduction]

25. L’Opposante prétend que la déclaration d’emploi dans la demande du Requérant à l’égard de la marque de commerce EMPIRE SUITES s’est révélée fausse, car le Requérant admet qu’il a lui-même commis une erreur en mentionnant le 1er octobre 1993 comme date de premier emploi de la marque de commerce au lieu du 18 octobre 2016.

26. Au paragraphe 11 de son affidavit fourni à titre de preuve, le Requérant explique sous serment comment il a commis cette erreur d’écriture de bonne foi. Cette preuve n’a jamais été contestée ni réfutée par l’Opposante par le biais d’un contre-interrogatoire ou d’autres moyens; par conséquent, elle est valable et prévaut.

27. Cette erreur d’écriture n’a pas d’incidence sur la cause de l’Opposante puisque l’erreur d’écriture porte sur la date de premier emploi, qui n’est pas un critère depuis les modifications apportées à la Loi, en date du 16 juin 2019. La preuve par affidavit du Requérant a été produite après l’entrée en vigueur des modifications apportées à la Loi et à son Règlement.

28. En vertu de la règle 35 du Règlement, cette erreur d’écriture peut être corrigée, mais cette information n’est plus requise en vertu de la règle 31 du Règlement.

29. À titre subsidiaire, le Requérant soutient que l’Opposante n’a pas démontré dans ses actes de procédure qu’une erreur d’écriture constituait un motif d’opposition fondé sur l’article 38 de la Loi, avant le 16 juin 2019.

[15] L’Opposante souligne à juste titre qu’en dépit des affirmations du Requérant dans ses observations écrites selon lesquelles [traduction] « une telle erreur d’écriture peut être corrigée » et de sa déclaration dans la dernière phrase du paragraphe 11 susmentionné de son affidavit, selon laquelle il [traduction] « demandera la modification, la correction ou la suppression immédiate » de l’erreur, le Requérant ne l’a pas fait, que ce soit immédiatement ou pas du tout.

[16] Nonobstant les observations du Requérant, je suis d’avis que son admission mentionnée ci-dessus permet de rejeter le motif d’opposition fondé sur l’article 30b) [pour une conclusion similaire, voir 1721502 Ontario Inc c Hing Yip Hong Ltd, 2015 COMC 113, au para 14]. Il n’est donc pas nécessaire de discuter de la preuve de l’Opposante fournie à cet égard par M. Guizzetti.

[17] Comme il a été mentionné ci-dessus, la demande d’enregistrement de la Marque avait été annoncée avant l’entrée en vigueur de la « nouvelle » Loi et l’Opposante – comme il était alors requis – a fondé son opposition sur l’article 38(2)a) de l’« ancienne » Loi en combinaison avec les dispositions applicables de l’ancien article 30 de la Loi. Comme il a également été mentionné ci‑dessus, les arguments sous le premier motif d’opposition de l’Opposante doivent donc être évalués conformément à la Loi dans sa version antérieure à sa modification du 17 juin 2019. À cet égard, il a été jugé que la non-conformité à l’article 30b) constituait un motif d’opposition valable : voir par exemple, Canadian Occidental Petroleum Ltd c Oxychem Canada Inc (1990), 33 CPR (3d) 345 (COMC), à la p. 349 :

[traduction]

En vertu de l’article 30b), le requérant, dont le droit à l’enregistrement est fondé sur l’emploi au Canada, doit indiquer dans sa demande la date à partir de laquelle la marque de commerce a été employée au Canada. En outre, cette déclaration doit être précise, c’est‑à‑dire qu’il est nécessaire que le requérant ait employé la marque de commerce au moins à la date d’emploi revendiquée dans la demande. Cependant, la date d’emploi revendiquée par le requérant ne doit pas nécessairement être la « date de premier emploi » de la marque de commerce (voir Marineland précité), ce qui signifie qu’un requérant qui a employé sa marque de commerce avant la production peut revendiquer n’importe quelle date postérieure à la date réelle de premier emploi (voir Sanna Inc. c Chocosuisse union des fabricants suisses de chocolat (1986), 14 C.P.R. (3d) 139 (C.O.M.C.), à la page 142).

Par conséquent, pour qu’une demande soit conforme à l’article 30b) de la Loi, il faut que le requérant ait employé la marque au Canada à compter de la date revendiquée. Par conséquent, la demande ne serait pas conforme aux exigences de l’article 30b) de la Loi si elle revendiquait l’emploi à partir d’une certaine date alors qu’en fait, la marque de commerce n’avait pas été employée à compter de cette date.

[18] Je fais également miens les commentaires suivants du registraire dans Comptables professionnels agréés du Canada c Michael Schemmann, 2022 COMC, au para 52, qui traite d’une situation analogue :

Premièrement, compte tenu des observations du Requérant concernant le fait que l’emploi antérieur n’est plus une exigence pour l’enregistrement d’une marque de certification en vertu de la version modifiée de la Loi, il convient de rappeler que le présent motif d’opposition doit être évalué en fonction de la Loi dans sa version du 16 juin 2019. À cet égard, même si je reconnais la nature quelque peu « technique » des motifs d’opposition fondés sur l’article 30 de la Loi, la non-conformité d’une demande à l’article 30 de la Loi n’est pas une « pure question de forme » [voir par analogie Comptables professionnels agréés de l’Ontario c Association of International Certified Professional Accountants, une société sans but lucratif du District de Columbia, 2019 COMC 120].

[19] Le Requérant en l’espèce a revendiqué le 1er octobre 1993 comme date de premier emploi de la Marque. Il a par la suite admis dans son affidavit que le 18 octobre 2016 [traduction] « est la date réelle à partir de laquelle [il] a employé la [M]arque ». Le Requérant n’a donc pas employé la Marque à compter de la date d’emploi revendiquée. Cela appuie clairement une conclusion en faveur de l’Opposante au titre de son motif d’opposition fondé sur la non-conformité. Il n’est donc pas non plus nécessaire de discuter davantage de la preuve du Requérant.

[20] Compte tenu de ce qui précède, le motif d’opposition fondé sur l’article 30b) est accueilli. Étant donné que la résolution de ce motif est suffisante pour trancher l’opposition à l’égard de tous les produits et services, je n’aborderai pas les autres motifs d’opposition.

Décision

[21] Dans l’exercice des pouvoirs qui m’ont été délégués en vertu des dispositions de l’article 63(3) de la Loi, je rejette la demande selon les dispositions de l’article 38(12) de la Loi.

 

Iana Alexova

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

Traduction certifiée conforme

Hortense Ngo

Le français est conforme aux WCAG.


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