Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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Référence : 2022 COMC 101

Date de la décision : 2022-05-19

[TRADUCTION CERTIFIÉE,

NON RÉVISÉE]

DANS L’AFFAIRE DE L’OPPOSITION

 

Kenover Marketing Corp.

Opposante

et

 

Konya Seker Sanayi Ve Ticaret Anonim Sirketi

 

Requérante

 

1,762,696 pour Torku Tam & Design

Demande

Introduction

[1] Konya Seker Sanayi Ve Ticaret Anonim Sirketi a déposé la demande d’enregistrement no 1,762,696 (la Demande) pour la marque de commerce Torku Tam & Design (la Marque), illustrée ci-dessous.

Torku Tam & Design

[2] La Demande a été déposée le 11 janvier 2016 et est fondée sur l’emploi projeté de la Marque au Canada en liaison avec les produits énumérés à l’annexe « A » de la présente décision.

[3] La Demande a été annoncée dans le Journal des marques de commerce aux fins d’opposition le 5 avril 2017. Le 1er septembre 2017, R.A.B. Food Group, LLC a produit une déclaration d’opposition à l’encontre de la Demande en vertu de l’article 38 de la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, c T-13 (la Loi). L’autorisation de modifier la déclaration d’opposition a été subséquemment accordée pour désigner Kenover Marketing Corp. comme l’Opposante dans cette procédure; Kenover Marketing Corp. étant la successeure en titre et la propriétaire actuelle des deux enregistrements de marque invoqués dans la présente opposition. Pour faciliter la référence dans cette décision, j’appellerai R.A.B. Food Group, LLC et Kenover Marketing Corp. collectivement « l’Opposante ».

[4] Je remarque que la Loi a été modifiée le 17 juin 2019 et, conformément à l’article 70 de la Loi, les motifs d’opposition en l’espèce seront évalués en fonction de la Loi dans sa version antérieure au 17 juin 2019.

[5] L’Opposante invoque des motifs d’opposition fondés sur l’enregistrabilité en vertu de l’article 12(1)d), le droit à l’enregistrement en vertu des articles 16(3)a) et b), le caractère distinctif en vertu de l’article 2 et la non-conformité aux articles 30e) et i) de la Loi. Pour les motifs d’opposition qui sont fondés sur une probabilité de confusion présumée, l’Opposante invoque ses marques de commerce « TAM TAM » (enregistrement no UCA20652 en liaison avec des craquelins et des biscuits) et TAM TAMS (enregistrement no LMC814,203 en liaison avec des craquelins).

[6] Les deux parties ont produit des éléments de preuve, qui sont examinés ci-dessous. Seule l’Opposante a produit des observations écrites. Aucune audience n’a été tenue.

[7] Pour les motifs qui suivent, la Demande est rejetée.

La preuve

Preuve de l’Opposante

[8] L’Opposante a produit l’affidavit de Tom Keogh souscrit le 8 mars 2018 (l’Affidavit Keoght). M. Keogh n’a pas été contre-interrogé.

[9] M. Keogh est le directeur financier de R.A.B. Food Group, LLC, faisant affaire sous le nom de Manischewitz Company. Il joint à l’annexe A de son affidavit une copie des détails de l’enregistrement no UCA20652 pour la marque « TAM TAM », qui a été enregistrée en 1945. L’annexe B de son affidavit est décrite comme [traduction] « […] une compilation d’emballages de produits qui affichent la marque de commerce bien en vue sur le panneau avant ». L’annexe B semble être une copie d’écran des images provenant d’une recherche d’images en ligne, qui comprend des boîtes de craquelins arborant la marque de commerce TAM TAM ou TAM TAMS. M. Keogh déclare que [traduction] « [c]ela est représentatif de la façon dont mon entreprise utilise la marque de commerce sur les produits vendus au Canada depuis des décennies ».

[10] M. Keogh décrit les produits de l’Opposante aux paragraphes 5 et 6 de son affidavit, qui sont reproduits intégralement ci-dessous :

[traduction]

5. Vous trouverez ci-joint à titre d’annexe C un extrait de Wikipédia que j’ai lu et dont je peux vérifier qu’il fournit une description précise de mon entreprise : « C’est le plus grand fabricant de matzot au monde et l’une des plus grandes marques casher d’Amérique. » Comme il est indiqué dans l’extrait, « Dans les années 1930, afin de pouvoir fabriquer ses produits tout au long de l’année, la société a créé les craquelins Tam-Tam, qui sont de petits matzos hexagonaux, selon un livre récent Manischewitz : The Matzo Family, écrit par l’arrière-petite-fille du fondateur, Laura Manischewitz Alpern (bien que le Tam Tam moderne soit très différent du matzo). »

6. Le craquelin est un symbole culinaire et culturel de base, apprécié à l’occasion de la Pâque et tout au long de l’année, dans les foyers, les écoles, les hôpitaux et les maisons de retraite. Il s’agit d’un produit autonome et d’un ingrédient de recettes culturelles telles que le « mock kishka », comme indiqué sur cooks.com. Il figure dans des recettes présentées en ligne, par exemple sur Pinterest, et est vendu en ligne sur Amazon.

[11] Au paragraphe 7 de son affidavit, M. Keogh déclare qu’[traduction] « [a]u Canada, le produit TAM TAM a été vendu pendant toute la période visée, avant la date de l’opposition et depuis, dans les principaux points de vente au détail nationaux, y compris Walmart, Loblaws, Metro et Shoppers, en plus des magasins spécialisés dans les aliments casher. » L’annexe D de l’affidavit comprend les chiffres des ventes annuelles du produit au Canada pour les années 2011 à 2017, les ventes annuelles durant cette période allant de 85 874 $ à 188 274 $. M. Keogh précise que ces chiffres ne sont qu’une liste partielle des produits vendus dans les magasins de détail canadiens et ne comprennent pas les chiffres des ventes en ligne.

Preuve de la Requérante

[12] La Requérante a produit l’affidavit d’Ali Tunçel, souscrit le 1er avril 2019 (l’Affidavit Tunçel). M. Tunçel n’a pas été contre-interrogé.

[13] M. Tunçel est le directeur général de la Requérante. Il décrit la Requérante comme une société industrielle agricole qui est la 31e plus grande entreprise de Turquie. Il indique que la Requérante a lancé la marque TORKU en Turquie en 2007 et que la marque [traduction] « comprend une très large gamme et une grande variété de produits alimentaires naturels, des produits de boulangerie aux produits enrobés de chocolat, des bonbons, des pommes de terre surgelées aux produits laitiers et carnés, du boulgour aux jus de fruits et vinaigre au jus de navet ».

[14] M. Tunçel précise qu’il existe une variété de marques formées par TORKU, notamment TORKU KREMALI, TORKU FAVORIMO, TORKU DELIDOLU, couvrant différents types de biscuits. Des exemples d’emballages de ces produits sont joints à titre de Pièce A-3 à son affidavit.

[15] M. Tunçel indique qu’au sein de la famille des marques TORKU, la marque TORKU TAM fait référence à des gammes de produits spécifiques. La Pièce A-4 est décrite comme une compilation d’images montrant l’emballage d’une large gamme de biscuits arborant la marque de commerce TORKU TAM. La Pièce A-6 est décrite comme une photographie montrant des emballages de biscuits arborant la marque de commerce TORKU TAM, tels que disponibles sur les étagères des magasins au Canada. Les biscuits TORKU TAM montrés dans ces images semblent être de la nature des biscuits préemballés. Sur toutes les images des Pièces A-4 et A-6, le mot « TAM » est écrit dans une police différente de celle du mot « TORKU » sur l’emballage du produit et, dans presque tous les cas, la police utilisée pour « TAM » est plus grande que celle de « TORKU ». Un exemple tiré de la Pièce A-6 de l’Affidavit Tunçel est présenté ci-dessous :

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[16] M. Tunçel affirme que les ventes des produits TORKU TAM au Canada étaient de 100 000 $ américains en 2018, et il affirme que [traduction] « les produits sont principalement vendus sur les marchés turcs au Canada ». La Pièce A-7 est décrite comme un rapport de vente indiquant les produits TORKU TAM vendus au Canada depuis le 13 janvier 2016 à la société canadienne « The Golden Bridge Food Inc. » M. Tunçel note que ce rapport de vente n’est pas représentatif de l’ensemble des ventes réalisées au Canada.

[17] M. Tunçel affirme qu’à la date de son affidavit, aucun cas de confusion sur le marché canadien avec la marque de commerce TAM TAM de l’Opposante n’a été signalé.

Fardeau de preuve et dates pertinentes

[18] C’est à la Requérante qu’incombe le fardeau ultime de démontrer, selon la prépondérance des probabilités, que la Demande est conforme aux exigences de la Loi. Il incombe toutefois à l’Opposante de s’acquitter du fardeau initial de présenter une preuve admissible suffisante pour permettre de conclure raisonnablement à l’existence des faits allégués au soutien de chacun de ses motifs d’opposition [John Labatt Limited c The Molson Companies Limited (1990), 30 CPR (3d) 293 (CF 1re inst), à la p. 298].

[19] Les dates pertinentes relativement aux motifs d’opposition sont les suivantes :

· articles 38(2)a) et 30 – la date de production de la Demande [Georgia-Pacific Corp c Scott Paper Ltd (1984), 3 CPR (3d) 469 (COMC), à la p. 475];

· articles 38(2)b) et 12(1)d) – la date de ma décision [Park Avenue Furniture Corporation c Wickes/Simmons Bedding Ltd et Le registraire des marques de commerce (1991), 37 CPR (3d) 413 (CAF)];

· articles 38(2)c) et 16(3)a) et b) – la date de production de la Demande;

· articles 38(2)d) et 2 – la date de production de l’opposition [Metro-Goldwyn-Mayer Inc c Metro-Goldwyn-Mayer Inc v Stargate Connections Inc, 2004 CF 1185, 34 CPR (4th) 317 (CF)].

Motifs d’opposition rejetés sommairement

Motif d’opposition fondé sur l’article 30e)

[20] Avec ce motif d’opposition, l’Opposante allègue que la Requérante n’avait pas une intention de bonne foi d’employer la Marque au Canada en liaison avec tous les produits, ou subsidiairement qu’avant la date de production, la Requérante avait déjà employé la Marque au Canada.

[21] Il n’y a pas de preuve au dossier pour soutenir l’un ou l’autre aspect de ce motif d’opposition. Premièrement, rien dans le dossier ne permet de laisse voir que la Requérante n’avait pas l’intention requise d’employer la Marque. Deuxièmement, il n’y a aucune preuve suggérant que la Requérante employait déjà la Marque lorsqu’elle a déposé la Demande le 11 janvier 2016. Sur ce dernier point, les premières preuves de ventes au Canada par la Requérante établies dans l’Affidavit Tunçel sont datées du 13 janvier 2016.

[22] Compte tenu de ce qui précède, je conclus que l’Opposante ne s’est pas acquittée de son fardeau de preuve initial et le motif d’opposition fondé sur l’article 30e) est rejeté.

Motif d’opposition fondé sur l’article 30i)

[23] Avec ce motif d’opposition, l’Opposante allègue que la Requérante n’aurait pas pu être convaincue de son droit d’employer la Marque puisqu’elle connaissait les marques de commerce déposées de l’Opposante.

[24] L’article 30i) de la Loi exige que le requérant inclue dans sa demande une déclaration portant qu’il est convaincu d’avoir droit d’employer la marque de commerce au Canada. Lorsqu’un requérant a fourni la déclaration requise, la jurisprudence suggère que la non-conformité à l’article 30i) de la Loi ne peut être soulevée que dans des circonstances exceptionnelles qui rendent la déclaration du requérant fausse, par exemple, en présence de preuve de mauvaise foi [voir Sapodilla Co Ltd c Bristol-Myers Co (1974), 15 CPR (2d) 152 (COMC), à la p. 155]. La simple connaissance de l’existence d’une marque de commerce d’un opposant n’est pas suffisante pour étayer un motif d’opposition fondé sur l’article 30i) [voir Woot Inc c WootRestaurants Inc, 2012 COMC 197].

[25] En l’espèce, la Demande contient la déclaration requise et il n’y a aucune preuve qu’il s’agit d’une situation exceptionnelle. Par conséquent, le motif d’opposition fondé sur l’article 30i) est rejeté.

Motif d’opposition fondé sur l’article 16(3)b)

[26] L’Opposante n’a pas identifié de demandes sur lesquelles elle pourrait s’appuyer aux fins du motif d’opposition fondé sur l’article 16(3)b). Les deux enregistrements sur lesquels l’Opposante se fonde dans la présente procédure ont tous deux été enregistrés bien avant l’annonce de la Demande de la Requérante, et les demandes correspondantes ne peuvent donc pas donc pas constituer le fondement d’un motif d’opposition en vertu de l’article 16(3)b) [voir l’article 16(4) de la Loi dans sa version antérieure au 17 juin 2019]. Par conséquent, le motif d’opposition fondé sur l’article 16(3)b) est rejeté.

Autres motifs d’opposition

Motif d’opposition fondé sur l’article 12(1)d)

[27] L’Opposante soutient que la Marque n’est pas enregistrable car elle crée de la confusion avec les marques de commerce déposées de l’Opposante « TAM TAM » (UCA20652) et TAM TAMS (LMC814,203). J’ai exercé mon pouvoir discrétionnaire pour consulter le registre et confirmer que ces deux enregistrements existent toujours [voir Quaker Oats Co Ltd of Canada c Menu Foods Ltd (1986), 11 CPR (3d) 410 (COMC)]. L’Opposante s’est donc acquittée de son fardeau de preuve initial en ce qui a trait à ce motif d’opposition. Par conséquent, la Requérante a le fardeau ultime de démontrer, selon la prépondérance des probabilités, qu’il n’y a aucune probabilité de confusion entre la Marque et l’une des marques de commerce déposées de l’Opposante.

[28] Dans le cadre de l’examen de la question de la confusion, pour des raisons de commodité, je concentrerai mon analyse sur la marque de commerce « TAM TAM » (UCA20652) de l’Opposante). Cependant, à mon avis, l’analyse relative à la confusion est essentiellement identique lorsqu’on considère l'autre marque de commerce déposée de l’Opposante, TAM TAMS (LMC814,203). En outre, je considère que les preuves de l’Opposante ont démontré l’emploi de ses deux marques de commerce déposées.

[29] Je note également que la marque de commerce déposée « TAM TAM » a été examinée par la Cour suprême du Canada dans l’affaire Gula c B Manischewitz Co (1947), 8 CPR 103 (CSC) et rien dans la présente décision ne vise à s’écarter de quelque façon que ce soit des conclusions de cette affaire.

Test en matière de confusion

[30] Le test permettant de trancher la question de la confusion est énoncé à l’article 6(2) de la Loi, qui prévoit que l’emploi d’une marque de commerce crée de la confusion avec une autre marque de commerce lorsque l’emploi des deux marques de commerce dans la même région serait susceptible de faire conclure que les produits liés à ces marques de commerce sont fabriqués, vendus, donnés à bail ou loués, ou que les services liés à ces marques sont loués ou exécutés, par la même personne, que ces produits ou ces services soient ou non de la même catégorie générale ou figurent ou non dans la même classe de la classification de Nice. En procédant à une telle évaluation, je dois prendre en considération toutes les circonstances pertinentes, y compris celles énumérées à l’article 6(5) de la Loi : le caractère distinctif inhérent des marques de commerce et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues; la période pendant laquelle les marques de commerce ont été en usage; le genre de produits, services ou entreprises; la nature du commerce; et le degré de ressemblance entre les marques de commerce, notamment dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’elles suggèrent.

[31] Ces critères ne sont pas exhaustifs et un poids différent sera accordé à différents facteurs selon le contexte [voir Veuve Clicquot Ponsardin c Boutiques Cliquot Ltée, 2006 CSC 23, 49 CPR (4th) 401; Mattel, Inc c 3894207 Canada Inc, 2006 CSC 22, [2006] 1 RCS 772, au para 54]. Je cite également l’affaire Masterpiece Inc v Alavida Lifestyles Inc, 2011 CSC 27, 92 CPR (4th) 361, au para 49, où la Cour suprême du Canada déclare que l’article 6(5)e) de la Loi, sur la ressemblance entre les marques, aura souvent le plus grand effet dans l’analyse relative à la confusion.

[32] Le test en matière de confusion est évalué comme une question de la première impression dans l’esprit du consommateur ordinaire plutôt pressé à la vue de la marque de commerce du requérant, alors qu’il n’a qu’un vague souvenir des marques de commerce de l’opposant et qu’il ne s’arrête pas pour réfléchir à la question en profondeur, pas plus que pour examiner de près les ressemblances et les différences entre les marques [Veuve Clicquot, précité, au para 20].


 

Le caractère distinctif inhérent des marques et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues

[33] La marque de commerce de l’Opposante « TAM TAM » possède un caractère distinctif inhérent raisonnable, car elle n’a aucune connotation descriptive en anglais ou en français par rapport aux produits de l’Opposante. Dans le Canadian Oxford Dictionary, 2e édition, le mot « tam » est défini comme « nom (en entier tam-o'-shanter) un bonnet rond en tricot ou en tissu d’origine écossaise s’ajustant étroitement autour des sourcils, mais large et plein au-dessus ». Dans ce même dictionnaire, le mot « tam-tam » est défini comme « nom d’un grand gong en métal ») [voir Tradall SA c Devil’s Martini Inc, 2011 COMC 65 (COMC), au para 29 pour le principe selon lequel le registraire peut prendre connaissance d’office des définitions du dictionnaire]. Aucune de ces définitions n’est descriptive des produits en cause.

[34] De même, la Marque de la Requérante a un caractère distinctif inhérent, car aucune de ses composantes n’est descriptive en anglais ou en français en association avec les produits de la Requérante. Je note que la demande comprend la traduction suivante : « la traduction anglaise de TORKU est “Torque”, et la traduction anglaise de TAM est “Complete” ». Cependant, je n’ai aucune preuve au dossier qui suggère que les Canadiens comprendraient que la marque a cette signification et, de toute façon, elle n’est pas descriptive des produits de la Requérante.

[35] En ce qui a trait à la mesure à laquelle les marques de commerce des parties sont devenues connues, j’estime que cet élément favorise l’Opposante. Bien que les deux parties aient fourni la preuve de l’emploi de leurs marques de commerce respectives au Canada, l’Opposante a fourni la preuve de ventes plus importantes en liaison avec sa marque de commerce sur une plus longue période et dans une plus grande variété de magasins que la Requérante.

[36] Compte tenu de ce qui précède, si l’on considère à la fois le caractère distinctif inhérent des marques de commerce et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues, selon la prépondérance des probabilités, ce facteur favorise l’Opposante.

Période pendant laquelle les marques de commerce ont été en usage

[37] La preuve de l’Opposante comprend des chiffres de vente au Canada en liaison avec la marque de commerce de l’Opposante remontant à 2011. La preuve de la Requérante comprend des preuves de ventes au Canada en liaison avec la Marque depuis 2016. Par conséquent, ce facteur favorise l’Opposante.

Le genre de produits, services ou entreprises; et la nature du commerce

[38] L’enregistrement de l’Opposante couvre les produits « craquelins » et la preuve de l’emploi de sa marque par l’Opposante est conforme à cette description.

[39] La Demande comprend plusieurs produits se chevauchent directement avec les produits de l’Opposante ou qui sont de nature proche, notamment « Pain et pâtisseries; […] biscuit; gaufres au chocolat; craquelins ». Je note que la preuve de l’emploi de la Marque au Canada par la Requérante est en liaison avec des « biscuits ». La Demande comprend également une variété d’autres produits alimentaires et de boissons qui sont moins étroitement liés aux craquelins.

[40] En ce qui concerne la nature du commerce, la preuve suggère que, jusqu’à présent, les produits des parties ont été vendus dans différents types de magasins au Canada, l’Opposante vendant dans des points de vente au détail nationaux (comme Walmart et Loblaws) et dans des magasins spécialisés dans les aliments casher, et la Requérante vendant principalement dans les marchés turcs au Canada. Toutefois, rien dans la description des produits figurant dans la Demande ne limite nécessairement les voies de commercialisation de la Requérante et, en fait, les produits décrits dans la Demande sont de nature à pouvoir être vendus dans les mêmes types de magasins, et potentiellement dans les mêmes sections de magasins, que les produits de l’Opposante.

En général, j’estime que les facteurs du genre des produits et de la nature du commerce favorisent l’Opposante.

Degré de ressemblance

[41] Lorsque l’on tient compte du degré de ressemblance, il est préférable de commencer par déterminer s’il y a un aspect de chaque marque de commerce qui est « particulièrement frappant ou unique » [Masterpiece, précité, au para 64]. J’estime que l’aspect frappant ou unique de la marque de commerce de l’Opposante est le mot « TAM », étant donné qu’il n’a pas de connotation descriptive en liaison avec les produits de l’Opposante et que sa duplication dans la marque de commerce en renforce l’impact.

[42] La marque de la Requérante comprend le mot « TAM » dans son intégralité et, par conséquent, je pense qu’il existe un degré de ressemblance significatif entre les marques des parties. Même si, bien entendu, le premier mot « TORKU » de la Marque a une apparence et un son différents, la Marque de la Requérante a néanmoins adopté l’aspect essentiel de la marque de commerce de l’Opposante.

[43] Je considère, dans l’ensemble, que le facteur du degré de ressemblance favorise légèrement l’Opposante.

[44] Par ailleurs, je note que même si la Marque est qualifiée de marque nominale dans la Demande, la Marque ne contient aucun élément nominal au-delà de la police de base dans laquelle elle est écrite. Dans la preuve de l’emploi de la Marque par la Requérante, le mot « TAM » occupe une place importante sur l’emballage du produit, étant représenté dans une police différente et dans la plupart des cas plus grande que le mot « TORKU ». Cela renforce mon point de vue sur le degré de ressemblance, mais je précise que je ne le considère pas comme déterminant et que ma conclusion concernant le degré de ressemblance aurait été la même en l’absence de la preuve de l’emploi de la Marque par le requérant.

Circonstance de l’espèce – emploi simultané

[45] La preuve de la Requérante indique qu’il n’y a pas eu de cas de confusion sur le marché canadien avec la marque de commerce de l’Opposante.

[46] La preuve de cas réels de confusion n’est pas requise pour démontrer une probabilité de confusion. Toutefois, l’emploi simultané de deux marques de commerce sans de tels cas de confusion réelle est une circonstance de l’espèce qui peut laisser entendre une absence de probabilité de confusion, selon la nature et la durée particulières de cet emploi simultané [voir Christian Dior SA c Dion Neckwear Ltd, 2002 CAF 29, 20 CPR (4th) 155 (CAF), au para 19; voir également Maple Leaf Consumer Foods Inc c Kelbro Enterprises Inc, 2012 COMC 28, 99 CPR (4th) 424].

[47] En l’espèce, l’absence de preuve de confusion réelle joue en faveur de la Requérante; cependant, je n’accorde pas beaucoup de poids à ce facteur, parce que la preuve suggère que, jusqu’à présent, les voies de commercialisation des parties ne se sont pas chevauchées à un degré important [pour une analyse semblable, voir Alpha Sportswear Ltd c Alpha Industries Inc 2004, 39 CPR (4th) 87 (COMC), au paragraphe 31]. En particulier, l’Affidavit Tunçel indique que les produits de la Requérante [traduction] « sont principalement vendus sur les marchés turcs au Canada », tandis que l’Affidavit Keogh indique que les produits de l’Opposante sont vendus dans des magasins de détail nationaux, notamment Walmart, Loblaws, Metro et Shoppers, en plus de magasins spécialisés dans les aliments casher.

Conclusion concernant le motif fondé sur l’article 12(1)d)

[48] Après avoir considéré l’ensemble des circonstances de l’espèce, et en particulier le degré de ressemblance entre les marques de commerce et la mesure à laquelle la marque de commerce de l’Opposante est devenue connue, je conclus que, dans le meilleur des cas pour la Requérante, la probabilité de confusion entre la Marque et la marque de commerce « TAM TAM » de l’Opposante est également partagée entre une conclusion de confusion et une conclusion d’absence de confusion. Puisque le fardeau de démontrer, selon la prépondérance des probabilités, qu’il n’existe pas de probabilité raisonnable de confusion entre les marques incombe à la Requérante, je dois donc trancher à l’encontre de la Requérante.

[49] Par conséquent, le motif d’opposition fondé sur l’article 12(1)d) est accueilli à l’égard de l’enregistrement no UCA20652 de l’Opposante. Pour des raisons essentiellement identiques, je conclus que ce motif est également accueilli à l’égard de l’enregistrement no LMC814,203 de l’Opposante.

Motif d’opposition fondé sur l’article 16(3)a)

[50] L’Opposante soutient que la Requérante n’est pas la personne ayant droit à l’enregistrement de la Marque, puisqu’elle crée de la confusion avec les marques de commerce « TAM TAM » et TAM TAMS de l’Opposante qui ont été employées antérieurement au Canada.

[51] L’Opposante s’est acquittée de son fardeau de preuve initial, à l’égard de ce motif d’opposition, au moyen de sa preuve démontrant l’emploi de ces marques de commerce bien avant la date pertinente (à savoir le 11 janvier 2016).

[52] À mon avis, la date pertinente antérieure pour le motif d’opposition fondé sur l’article 16(3)a) ne modifie pas de façon importante l’analyse relative à la confusion significative présentée ci-dessus pour le motif d’opposition fondé sur l’article 12(1)d). Ainsi, la Requérante ne s’est pas acquittée de son fardeau ultime de démontrer qu’il n’y avait pas de probabilité de confusion à la date pertinente pour ce motif d’absence de droit à l’enregistrement et le motif d’opposition fondé sur l’article 16(3)a) est également accueilli.

Motif d’opposition fondé sur l’article 2

[53] Puisque je suis déjà arrivé à une conclusion en faveur de l’Opposante à l’égard des motifs d’opposition fondés sur les articles 12(1)d) et 16(3)a), je n’aborderai pas le motif d’opposition en vertu de l’article 2.

Décision

[54] En vertu des pouvoirs qui me sont délégués par l’article 63(3) de la Loi, je rejette la Demande conformément aux dispositions de l’article 38(12) de la Loi.

 

Timothy Stevenson

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

Traduction certifiée conforme

Hortense Ngo

Le français est conforme aux WCAG


ANNEXE A

Demande no 1,762,696 pour Torku Tam & Design

Produits :

(1) Viande; poisson; volaille; gibier; extraits de viande; bouillon; viande préparée; viande congelée; viande séchée; viande frite; aspic; jus de viande; lait et produits laitiers, nommément lait, lait UHT, fromage, fromage blanc, fromage fait de lait de chèvre, fromage à la crème, yogourt, ayran (boisson à base de yogourt), crème laitière, poudre de lait, boissons lactées contenant des fruits; soupe instantanée; préparations pour faire de la soupe; soupe; huiles et graisses alimentaires; beurre; margarine; beurre d’arachide; beurre de noix chocolaté; pâte de noisettes; tahini (beurre de sésame); confitures; marmelades; gelées de fruits alimentaires; œufs; œufs en poudre; croustilles; flocons de pomme de terre.

(2) Pain et pâtisseries; produits de boulangerie-pâtisserie, nommément desserts de boulangerie-pâtisserie sucrés, confiseries au chocolat; miel; gelée royale pour la consommation humaine; propolis pour la consommation humaine; aromatisants alimentaires; aromatisants à la vanille; sauces pour salades; sauces aux fruits; sauce tomate; sauce barbecue; sauce au fromage; sauce au chocolat; sauces pour la salade; sauce épicée; sauce pour pâtes alimentaires; sauce soya; levure chimique; extraits de levure pour aliments; épices; farine alimentaire; semoule; fécule de maïs à usage alimentaire; riz; sucre granulé; sucre en morceaux; sucre en poudre; cassonade; sucre blanc; thé; thé glacé; confiseries à base de fruits; confiseries au sucre; chocolats; bonbons; biscuits secs; gaufres au chocolat; craquelins; sirop de mélasse alimentaire; cacao; boissons non alcoolisées à base de cacao; café; boissons non alcoolisées à base de café; boissons non alcoolisées à base de chocolat; pâtes alimentaires; raviolis; nouilles; pâte; gaufres; gomme à mâcher; glaces alimentaires; sel de cuisine; céréales transformées; céréales transformées pour la consommation; orge broyée; avoine broyée.

(3) Bière; moût de bière; eau minérale; eau de source; eau de table; soda; soda tonique; boissons aux fruits et jus de fruits, nommément jus de pomme, jus de raisin; jus de légumes, nommément jus de navet, jus de tomate; sirops pour la préparation de jus de fruits; poudre pour la préparation de jus de fruits; boissons gazeuses; boissons gazéifiées; sodas; limonades.


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