Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

THE REGISTRAR OF TRADEMARKS

Référence : 2022 COMC 113

Date de la décision : 2022-06-06

[TRADUCTION CERTIFIÉE,

NON RÉVISÉE]

DANS L’AFFAIRE DE L’OPPOSITION

 

BrewDog PLC

Opposante

et

 

PDM Parthian Distributer & Marketing Adviser GMbH

Requérante

 

1,710,164 pour BLACK PUNK

Demande

Introduction

[1] BrewDog PLC (l’Opposante) s’oppose à l’enregistrement de la marque de commerce BLACK PUNK (la Marque), qui fait l’objet de la demande no 1,710,164 présentée par PDM Parthian Distributer & Marketing Adviser GMbH (la Requérante).

[2] L’enregistrement de la Marque est demandé en liaison avec des « […] boissons non alcoolisées, notamment des boissons énergisantes non alcoolisées […] ».

[3] L’opposition est principalement fondée sur l’allégation que la Marque crée de la confusion avec la marque de commerce PUNK de l’Opposante, employée antérieurement au Canada en liaison avec des produits de bière.

Le dossier

[4] La demande d’enregistrement de la Marque a été produite le 9 janvier 2015, demandée à l’origine en liaison avec diverses boissons alcoolisées et non alcoolisées, au motif de l’emploi projeté au Canada.

[5] La demande a été annoncée aux fins d’opposition le 21 décembre 2016. De nombreuses modifications à la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, c T-13 (la Loi) sont entrées en vigueur le 17 juin 2019. Conformément à l’article 70 de la Loi, les motifs d’opposition seront évalués en fonction de la Loi dans sa version précédant immédiatement le 17 juin 2019, à l’exception de la question portant sur la confusion, laquelle sera examinée aux termes de la version actuelle des articles 6(2) à (4) de la Loi.

[6] Le 21 février 2018, l’Opposante s’est opposée à la demande en produisant une déclaration d’opposition en vertu de l’article 38 de la Loi. Les motifs d’opposition sont fondés sur la non-conformité aux articles 30a), 30e) et 30i) de la Loi; l’absence d’un droit à l’enregistrement en vertu de l’article 16 de la Loi; et l’absence de caractère distinctif en vertu de l’article 2 de la Loi.

[7] La Requérante a produit une contre-déclaration réfutant les motifs d’opposition.

[8] Afin d’appuyer son opposition, l’Opposante a produit l’affidavit de Hershel Perera, souscrit le 4 décembre 2018 à Toronto (l’affidavit Perera). M. Perera n’a pas été contre-interrogé.

[9] La Requérante a choisi de ne pas produire de preuve. Seule l’Opposante a produit des observations écrites; seule la Requérante a été représentée à l’audience.

[10] Je note que, au cours de la procédure, la Requérante a produit deux demandes modifiées. La première demande modifiée a, entre autres, supprimé toute boisson alcoolisée de l’énoncé de produits et a été versée au dossier en décembre 2019. La deuxième modification limitait la demande à l’énoncé de produits actuel et a été versée au dossier en octobre 2020. Je note que la deuxième modification a été apportée après que l’Opposante a soumis et signifié ses observations écrites.

Aperçu de la preuve de l’Opposante

Affidavit Perera

[11] M. Perera est le gestionnaire du marché international de l’Opposante [para 1]. Il affirme que l’Opposante est une société britannique dont le siège social se trouve en Écosse qui a commencé à brasser et à commercialiser de la bière sous le nom BREWDOG au Royaume‑Uni (R.-U.) en 2007 [para 4]. Il déclare que l’Opposante a commencé à brasser une India pale ale (IPA) sous la marque de commerce PUNK en 2009, qui a été la [traduction] « bière la plus populaire à ce jour » de l’Opposante [para 5]. M. Perera affirme que, au Canada, l’Opposante emploie la marque de commerce PUNK en liaison avec des boissons, comme la bière, depuis au moins aussi tôt que le 8 septembre 2010 [para 11]. À cet égard, l’affidavit Perera démontre ce qui suit :

· L’histoire et les affaires de l’Opposante [para 4 à 7, pièces A et B].

· L’enregistrement de la marque de commerce PUNK de l’Opposante dans d’autres administrations [para 8, pièce C] et la demande d’enregistrement de l’Opposante de la marque de commerce PUNK au Canada en liaison avec un large éventail de produits et services (conformément à la demande no 1,759,095) [para 9 et 10, pièce D]. Je note que cette demande a été produite en décembre 2015 – après la demande d’enregistrement de la Marque – mais a ensuite procédé à l’enregistrement en décembre 2018 en liaison avec de la « bière » et du « lager ». Quoi qu’il en soit, l’Opposante n’invoque toutefois pas un tel enregistrement dans la présente opposition.

· L’emploi de la marque de commerce PUNK au Canada depuis septembre 2010, y compris les ventes de bières de marque PUNK par l’entremise de magasins d’alcool provinciaux [para 12, pièce E] et directement aux bars et aux restaurants [para 13, pièce F], avec des chiffres de vente annuels de 2015 à 2018 (par exemple, supérieurs à 130 000 $ en 2015) [para 14].

· La promotion de la marque de commerce PUNK au Canada à l’aide : de campagnes de commercialisation directes en magasin [para 15, pièce G]; de ventes de produits de marque PUNK, comme des vêtements et des enseignes [para 16, pièce H]; et de publicité imprimée et en ligne [para 17, pièce I].

· La couverture médiatique de l’Opposante et de ses produits de marque PUNK au Canada, y compris sept articles en ligne dans des publications telles que Canadian Beer News et The Toronto Star [para 18, pièce J].

· La promotion de la bière PUNK sur les médias sociaux, par l’intermédiaire des comptes Facebook et Instagram de BrewDog Canada de l’Opposante [para 19, pièce K].

· La promotion et la réputation de l’Opposante et de ses produits au R.-U. et à l’échelle internationale, y compris l’ouverture et l’exploitation de bars de bière artisanale dans divers pays, et la couverture médiatique des activités de commercialisation de l’Opposante à l’extérieur du Canada [para 20 à 24, pièces L et P].

· Le programme de financement collectif de l’Opposante intitulé Equity for Punks, qui permet aux particuliers d’acheter des actions dans la société de l’Opposante pour obtenir, entre autres, des rabais de la boutique en ligne de BrewDog et aux bars de bière artisanale BrewDog. M. Perrera note que les [traduction] « actions peuvent être achetées par des Canadiens », et il affirme que ce programme de financement collectif a renforcé la liaison entre l’Opposante et le terme « punk » dans l’esprit des consommateurs [para 25, pièce Q].

[12] Je note que, dans toutes les pièces, la marque de commerce de l’Opposante figure principalement en tant que partie intégrante du logo PUNK IPA illustré ci-dessous, ou dans des variantes mineures de celui-ci :

Image of a PUNK IPA can Image of a PUNK IPA can

Fardeau de preuve et fardeau ultime

[13] Conformément aux règles de preuve habituelles, l’Opposante a le fardeau de preuve d’établir les faits sur lesquels elle appuie les allégations formulées dans sa déclaration d’opposition [John Labatt Ltd c Molson Companies Ltd, 1990 CarswellNat 1053 (CF 1re inst)]. La présence d’un fardeau de preuve imposé à l’Opposante à l’égard d’une question donnée signifie que, pour que cette question soit prise en considération, il doit exister une preuve suffisante pour permettre de conclure raisonnablement à l’existence des faits allégués à l’appui de cette question.

[14] En ce qui concerne les allégations à l’égard desquelles l’Opposante s’est acquittée de son fardeau de preuve, la Requérante a le fardeau ultime de démontrer que la demande ne contrevient pas aux dispositions de la Loi, tel qu’il est allégué dans la déclaration d’opposition. La présence d’un fardeau ultime qui incombe à un requérant signifie que, s’il est impossible d’arriver à une conclusion déterminante une fois que toute la preuve a été examinée, la question doit être tranchée à l’encontre de celui-ci.

Motifs rejetés sommairement

[15] L’Opposante soulève des motifs fondés sur les articles 30a) et 30e) de la Loi.

[16] En ce qui a trait au motif fondé sur l’article 30a) de la Loi, étant donné que l’Opposante n’a présenté aucune preuve ou aucun argument de fond pour étayer son argument, elle ne s’est pas acquittée de son fardeau de preuve initial. Quoi qu’il en soit, je note que les « boissons énergisantes » constituent un entrée active acceptable dans le Manuel des produits et des services, en vigueur depuis le 6 octobre 2009.

[17] En ce qui a trait au motif fondé sur l’article 30e) de la Loi, étant donné que la preuve présentée par l’Opposante ne porte pas sur son argument, elle ne s’est pas acquittée de son fardeau de preuve initial.

[18] Compte tenu de ce qui précède, ces motifs sont rejetés.

Motif fondé sur l’article 16(3)a) – confusion avec une marque de commerce antérieurement employée

[19] L’Opposante fait valoir qu’en vertu de l’article 16(3) de la Loi, la Requérante n’est pas la personne qui a droit à l’enregistrement de la Marque en liaison avec les produits. Plus particulièrement, elle soutient que, à la date de production de la demande et à tout moment pertinent par la suite, la Marque créait de la confusion avec la marque de commerce PUNK de l’Opposante qui a déjà été employée au Canada.

[20] Afin de s’acquitter de son fardeau initial sous ce motif, l’Opposante devait démontrer qu’elle avait utilisé sa marque de commerce au Canada avant la date dépôt de la demande d’enregistrement de la Marque, notamment le 9 janvier 2015. De plus, l’Opposante devait établir qu’elle n’avait pas abandonné sa marque de commerce à la date de l’annonce de la demande d’enregistrement de la Marque, à savoir le 21 décembre 2016.

[21] Dans ses observations, l’Opposante soutient qu’elle s’est acquittée de son fardeau initial grâce à l’emploi de sa marque de commerce PUNK en liaison avec la bière au Canada depuis septembre 2020, y compris à l’aide de ventes dans les magasins d’alcool provinciaux et de ventes aux restaurants et aux bars [para 34 des observations écrites de l’Opposante, citant l’affidavit Perera aux para 11 à 13 et pièces E et F].

[22] À l’audience, la Requérante a fait valoir que, au mieux, la marque de commerce employée par l’Opposante était PUNK IPA (tel qu’il est illustré par les logos PUNK IPA affichés sur les canettes de bière figurant ci-dessus). Quoi qu’il en soit, elle a également affirmé que toute vente de la bière PUNK ou PUNK IPA de l’Opposante avant 2014 était, au plus, [traduction] « saisonnière ». À cet égard, la Requérante a attiré l’attention sur l’article du Toronto Star fourni à titre de preuve intitulé « Brewdog Punk IPA hops to it » en date du 13 janvier 2010, qui mentionne que la PUNK IPA de l’Opposante est [traduction] « disponible en Ontario dans le cadre de l’offre saisonnière d’hiver de LCBO » [affidavit Perera, à la pièce J]. La Requérante a également attiré l’attention sur l’article de Ben’s Beer Blog fourni à titre de preuve et intitulé « Scotland’s Brew Dog is coming to Ontario » en date du 21 novembre 2014, qui mentionne que les produits de bière en fût de l’Opposante [traduction] « arrivent en l’Ontario […] dès la semaine prochaine » avec [traduction] « des grandes canettes de PUNK IPA […], desquelles la vente au détail est prévue pour 2015 à la mi-année. » Par conséquent, la Requérante a soutenu qu’il peut être déduit à partir de la preuve dans son ensemble que l’Opposante a réellement abandonné sa marque de commerce PUNK au Canada à un moment donné entre son [traduction] « offre saisonnière » dans les magasins d’alcool provinciaux en 2010 et le début de son offre de bière à fût dans les bars et les restaurants canadiens à un moment donné à la fin de 2014 ou 2015.

[23] Tel qu’il est indiqué dans l’affidavit Perera, la marque de commerce de l’Opposante était généralement affichée sous la forme du logo PUNK IPA, l’élément IPA comportant la même police que l’élément PUNK, que ce soit sur les canettes de bière (pièce E) ou les poignées de robinet à fût (pièce F). Toutefois, j’estime que l’élément IPA est descriptif des produits vendus par l’Opposante, à savoir l’India pale ale. Par conséquent, j’accepte que tout emploi établi des logos PUNK IPA de l’Opposante constituent l’emploi de la marque de commerce PUNK aux fins de ce motif.

[24] De plus, même si l’Opposante n’a fourni aucun chiffre d’affaires avant 2015, M. Perera affirme clairement l’emploi de la marque de commerce PUNK de l’Opposante depuis septembre 2010 aux paragraphes 11 à 13 de son affidavit, et il donne des exemples représentatifs de cet emploi. À mon avis, les articles de tiers susmentionnés ne contredisent pas clairement ces déclarations et je note que l’Opposante a choisi de ne pas contre-interroger M. Perera sur ses déclarations. Quoi qu’il en soit, la Requérante a reconnu au moins que la preuve démontre l’emploi de la marque de commerce PUNK IPA de l’Opposante en liaison avec la bière en fût depuis la fin de 2014. Étant donné que la date pertinente pour ce motif est le 9 janvier 2015 et qu’il n’y a aucune preuve que l’Opposante a abandonné sa marque de commerce à la date de l’annonce de la demande contestée (le 21 décembre 2016), l’Opposante s’est acquittée de son fardeau initial sous ce motif.

[25] Comme l’Opposante s’est acquittée de son fardeau initial, la Requérante doit établir, selon la prépondérance des probabilités, qu’il n’existe aucune probabilité raisonnable de confusion entre la Marque et la marque de commerce de l’Opposante en date du 9 janvier 2015.

Test en matière de confusion

[26] Le test à appliquer pour trancher la question de la confusion est énoncé à l’article 6(2) de la Loi, qui prévoit que l’emploi d’une marque de commerce crée de la confusion avec une autre marque de commerce lorsque l’emploi des deux marques de commerce dans la même région serait susceptible de faire conclure que les produits liés à ces marques de commerce sont fabriqués, vendus, donnés à bail ou loués, ou que les services liés à ces marques sont loués ou exécutés, par la même personne, que ces produits ou services soient ou non de la même catégorie générale ou figurent ou non dans la même classe de la classification de Nice.

[27] Le critère applicable est celui de la première impression que laisse dans l’esprit du consommateur ordinaire « plutôt pressé » la vue de la Marque en liaison avec les produits visés par la demande, alors qu’il n’a qu’un vague souvenir de la marque de commerce de l’Opposante et qu’il ne s’arrête pas pour réfléchir à la question en profondeur [voir Veuve Clicquot Ponsardin c Boutiques Cliquot Ltée, 2006 CSC 23, au para 20].

[28] En faisant une telle évaluation, il faut tenir compte de toutes les circonstances de l’espèce, y compris celles énumérées à l’article 6(5) de la Loi : le caractère distinctif inhérent des marques de commerce et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues; la période pendant laquelle les marques de commerce ont été en usage; le genre de produits, services ou entreprises; la nature du commerce; et le degré de ressemblance entre les marques de commerce dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’elles suggèrent.

[29] Les critères ou les facteurs énoncés à l’article 6(5) de la Loi ne forment pas une liste exhaustive et le poids qu’il convient d’accorder à chacun d’eux varie en fonction du contexte propre à chaque affaire [Mattel, Inc c 3894207 Canada Inc, 2006 CSC 22, au para 54]. Dans Masterpiece Inc c Alavida Lifestyles Inc, 2011 CSC 27, la Cour suprême du Canada a déclaré que l’article 6(5)e), la ressemblance entre les marques de commerce, est souvent celui qui revêt le plus d’importance dans l’analyse relative à la confusion [au para 49] et que, bien que le premier mot dans la marque de commerce puisse être le plus important dans certains cas, il est préférable de se demander si la marque de commerce présente un aspect qui est particulièrement « frappant ou unique » [au para 64].

Caractère distinctif inhérent et mesure dans laquelle les marques sont devenues connues

[30] Dans ses observations, la Requérante a fait valoir que le terme PUNK n’est pas particulièrement distinctif, en soutenant que, étant donné que la commercialisation de l’Opposante vise une sous-culture « punk », les marques de commerce PUNK et/ou PUNK IPA sont à tout le moins suggestifs du consommateur probable des produits de bière de l’Opposante. Par exemple, l’une des publicités du programme de financement collectif d’Equity for Punks de l’Opposante comprenait le slogan [traduction] « ÊTES-VOUS UN PUNK D’EQUITY PUNKS? » [affidavit Perera, à la pièce Q].

[31] Toutefois, je ne dispose d’aucune preuve selon laquelle le terme PUNK est un terme couramment associé aux produits de bière ou de boissons énergisantes visées par la demande. Même si PUNK est un mot du dictionnaire, il n’est pas descriptif des produits pertinents et, par conséquent, possède un certain caractère distinctif inhérent par rapport aux produits de bière de l’Opposante.

[32] Par conséquent, la Marque visée par la demande possède également un certain caractère distinctif inhérent, même s’il s’agit d’une combinaison des mots du dictionnaire BLACK et PUNK. Toutefois, à mon avis, son caractère distinctif inhérent est dérivé du même mot (PUNK) que celui de la marque de commerce de l’Opposante, l’élément BLACK étant un adjectif et/ou un modificateur de PUNK.

[33] En outre, je ne dispose d’aucune preuve concernant la mesure dans laquelle la Marque est devenue connue, à la date pertinente ou autrement. Par contre, même si la preuve d’emploi et la mesure dans laquelle elle est devenue connue sont en grande partie ultérieures à la date pertinente sous ce motif, j’accepte qu’il existe au moins quelques éléments de preuve démontrant que la marque de commerce de l’Opposante est devenue connue au Canada depuis 2010.

[34] Par conséquent, ce facteur favorise l’Opposante.

Période d’emploi

[35] Nonobstant les observations susmentionnées de la Requérante, j’accepte que l’Opposante a démontré l’emploi de sa marque de commerce depuis septembre 2010, alors que la demande d’enregistrement de la Marque est fondée l’emploi projeté.

[36] Par conséquent, ce facteur favorise l’Opposante.

Genre de produits, services ou entreprises et nature du commerce

[37] Dans ses observations, la Requérante a souligné que la nature des produits des parties diffèrent, car les produits pertinents de l’Opposante se limitent à la bière et, en particulier, à l’India pale ale, alors que les produits visés par la demande sont des boissons énergisantes non alcoolisées. Elle a fait valoir que, même en appliquant une interprétation large de l’affidavit Perera, les ventes des produits de bière de l’Opposante à la date pertinente étaient limitées aux ventes de bière en fût dans les bars et les restaurants et à quelques ventes saisonnières dans les magasins d’alcool provinciaux. Par contre, la Requérante a fait valoir que les boissons énergisantes ne sont pas vendues par ces voies et qu’elles seraient probablement vendues par l’intermédiaire de dépanneurs et d’autres points de vente au détail. La Requérante a noté qu’il n’y avait aucune preuve que de tels autres points de vente au détail avaient également vendu des produits de bière à la date pertinente et, quoi qu’il en soit, il n’y a aucune preuve que l’Opposante en particulier a vendu ses produits PUNK IPA par des voies commerciales autres que les magasins d’alcool provinciaux ou la bière en fût dans les bars et les restaurants.

[38] Même si les observations écrites de l’Opposante ont été soumises avant la demande en cause ne se limite aux boissons énergisantes, pour sa part, l’Opposante fait valoir que, étant donné que les produits de la Requérante [traduction] « chevauchent directement et indirectement les produits de l’Opposante, il existe une probabilité raisonnable de confusion pour le consommateur moyen, qui serait le même consommateur moyen des produits des deux parties » [para 50]. En particulier, l’Opposante note que la Requérante [traduction] « n’a soumis aucune preuve de ses voies de commercialisation » et elle soutient que les boissons non alcoolisées [traduction] « ont des voies de commercialisation plus larges que les boissons alcoolisées » et [traduction] « [qu’]étant donné le chevauchement direct et indirect entre les produits des parties, il est raisonnable de conclure que les produits respectifs des parties sont susceptibles d’avoir les mêmes voies de commercialisations ou des voies semblables et seraient destinés à des consommateurs semblables ou identiques » [para 54].

[39] En l’espèce, même si les produits de l’Opposante sont alcoolisés et que les produits de la Requérante visés par la demande ne sont pas alcoolisés, ils sont tous les deux, fondamentalement, des boissons. De plus, dans la mesure où les voies de commercialisation diffèrent et/ou auraient différé à la date pertinente, il incombait à la Requérante de fournir la preuve de ces différences.

[40] Par conséquent, ces facteurs favorisent l’Opposante.

Degré de ressemblance

[41] Dans ses observations, tel qu’il a été indiqué ci-dessus, la Requérante a soutenu que la marque de commerce dont l’emploi réel par l’Opposante a été démontré était la marque de commerce composée PUNK IPA. Par conséquent, elle a soutenu que la partie IPA de la marque de commerce de l’Opposante diminue de façon importante le degré de ressemblance entre cette dernière et la Marque visée par la demande, soit BLACK PUNK.

[42] Toutefois, à tout le moins, les marques de commerce des deux parties ont une certaine ressemblance sur le plan du son et de l’apparence, étant donné l’élément commun PUNK, que j’estime être l’élément frappant des marques de commerce des deux parties. À cet égard, je suis d’accord avec l’Opposante pour dire que les marques de commerce des deux parties sont [traduction] « dominées par (ou consistent entièrement) du mot PUNK » [para 60]. Même si l’idée proposée par la Marque dans son ensemble n’est pas claire, je suis d’accord avec l’Opposante pour dire que le terme BLACK PUNK peut être compris comme étant la variété [traduction] « noire » des boissons PUNK ou PUNK IPA de l’Opposante.

[43] Par conséquent, ce facteur favorise l’Opposante.

Conclusion – confusion avec la marque de commerce de l’Opposante

[44] Après avoir examiné toutes les circonstances de l’espèce, je conclus que la Requérante ne s’est pas acquittée de son fardeau ultime à l’égard de la probabilité de confusion entre les marques de commerce des parties. Même si la Requérante a présenté à l’audience des arguments quelque peu convaincants au sujet de chacun des facteurs prévus par la loi, dans le meilleur des cas pour la Requérante, je conclus que, selon la prépondérance des probabilités, la probabilité de créer de la confusion est égale entre les deux parties. J’arrive à cette conclusion en raison du degré de ressemblance entre les marques de commerce, que la marque de commerce de l’Opposante est considérée comme PUNK ou PUNK IPA, et en l’absence de toute preuve de la part de la Requérante permettant de faire pencher les autres facteurs législatifs afin qu’ils ne favorisent pas l’Opposante. Étant donné que le fardeau de démontrer, selon la prépondérance des probabilités, qu’il n’existait pas de probabilité de confusion incombe à la Requérante, je dois trancher à l’encontre de la Requérante.

[45] Compte tenu de ce qui précède, le motif d’opposition fondé sur l’article 16 de la Loi est accueilli.

Motif fondé sur l’article 2 – Absence de caractère distinctif

[46] L’Opposante plaide que la Marque n’est pas distinctive des Produits de la Requérante, et qu’elle n’est pas non plus adaptée pour distinguer les Produits de la Requérante des produits et services d’autrui, y compris les produits et services de l’Opposante.

[47] La date pertinente pour ce motif est la date de production de l’opposition, soit le 21 février 2018 [Metro-Goldwyn-Mayer Inc c Stargate Connections Inc, 2004 CF 1185].

[48] L’article 2 de la Loi, dans sa version antérieure, définit le terme « distinctif » comme suit :

distinctive Se dit de la marque de commerce qui distingue véritablement les produits ou services en liaison avec lesquels elle est employée par son propriétaire de ceux d’autres personnes, ou qui est adaptée à les distinguer ainsi. 

[49] Une marque de commerce « distingue véritablement » les produits en acquérant le caractère distinctif par l’emploi, ce qui donne lieu à un caractère distinctif en fait. En revanche, une marque de commerce qui est « adaptée à les distinguer ainsi » est une marque qui ne dépend pas de l’emploi pour son caractère distinctif, parce qu’elle possède un caractère distinctif inhérent [voir Astrazeneca AB c Novopharm Ltd, 2003 CAF 57, au para 16].

[50] En l’espèce, il n’y a aucune preuve concernant les marques de commerce, les produits ou les services « d’autres personnes », comme il est indiqué dans les arguments. Par conséquent, l’Opposante a le fardeau initial d’établir qu’à la date pertinente, sa marque de commerce était connue dans une certaine mesure au Canada en liaison avec les produits pertinents et avait au Canada une réputation « importante, significative ou suffisante » de façon à annuler le caractère distinctif de la Marque [voir Bojangles’ International, LLC c Bojangles Café Ltd, 2006 CF 657, aux para 33 et 34; et Ontario Dental Assistants Association c Association dentaire canadienne, 2013 CF 266, au para 42, conf par 2013 CAF 279]. Dans Suzanne’s Inc c Auld Phillips Ltd, 2005 CAF 429, bien que dans le cadre d’une procédure de radiation prévue à l’article 57 de la Loi, la Cour d’appel fédérale a déclaré qu’« [é]videmment, il ne peut arriver que rarement qu’un commerçant unique soit en mesure de faire perdre à une marque son caractère distinctif, mais rien ne l’empêche en principe » [au para 7].

[51] En l’espèce, même s’il y a une certaine preuve que la marque de commerce PUNK de l’Opposante était connue au Canada à la date pertinente, je note que, à tout le moins, tout emploi semble être limité aux produits de bière India pale ale et aux produits connexes. Quoi qu’il en soit, même s’il n’y a aucune preuve de l’emploi de la Marque à la date pertinente, je ne suis pas convaincu que la preuve permet d’établir une réputation importante, significative ou suffisante de la marque de commerce PUNK de l’Opposante de façon à annuler le caractère distinctif inhérent de la Marque.

[52] Par conséquent, puisque l’Opposante ne s’est pas acquittée de son fardeau initial, le motif d’opposition fondé sur l’article 2 est rejeté.

Motif fondé sur l’article 30i) – non-conformité

[53] L’Opposante plaide que la demande n’est pas conforme aux exigences de l’article 30i) de la Loi. Plus précisément, l’Opposante fait valoir que la Requérante n’aurait pas pu être convaincue qu’elle avait le droit d’employer la Marque au Canada en liaison avec les produits visés par la demande, car la Marque créait et crée de la confusion avec la marque de commerce PUNK de l’Opposante, qui avait été employée antérieurement au Canada.

[54] L’article 30i) de la Loi, dans sa version antérieure, exigeait simplement que le requérant comprenne dans sa demande une déclaration selon laquelle il est convaincu d’avoir le droit d’employer sa marque de commerce au Canada en liaison avec les produits ou services décrits dans la demande.

[55] Lorsque cette déclaration est fournie, un motif d’opposition fondé sur l’article 30i) ne devrait être accueilli que dans des circonstances exceptionnelles, comme lorsqu’il y a une preuve de mauvaise foi du requérant [Sapodilla Co Ltd c Bristol-Myers Co, (1974) CarswellNat 476 (COMC)]. La connaissance de l’existence de la marque de commerce d’un opposant ne peut pas en soi servir de fondement à une allégation selon laquelle le requérant ne pouvait pas être convaincu d’avoir le droit d’employer sa marque de commerce [Woot, Inc c WootRestaurants Inc, 2012 COMC 197].

[56] En l’espèce, la déclaration requise a été fournie, et rien n’indique qu’il s’agit d’un cas exceptionnel.

[57] Par conséquent, le motif d’opposition fondé sur l’article 30i) de la Loi est rejeté.


Décision

[58] Compte tenu de tout ce qui précède, et conformément à l’article 38(12) de la Loi et aux pouvoirs qui m’ont été délégués en vertu des dispositions de l’article 63(3) de la Loi, je rejette la demande.

 

Andrew Bene

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

 

Traduction certifiée conforme
Crystal Simard

 

Le français est conforme aux WCAG.

 

 

 

COMMISSION DES OPPOSITIONS DES MARQUES DE COMMERCE

OFFICE DE LA PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE DU CANADA

COMPARUTIONS ET AGENTS INSCRITS AU DOSSIER

___________________________________________________

DATE DE L’AUDIENCE : 2022-04-11

COMPARUTIONS

Aucune comparution

Pour l’Opposante

Stephen Leach

Pour la Requérante

AGENTS AU DOSSIER

Marks & Clerk

Pour l’Opposante

Ridout & Maybee LLP

Pour la Requérante

 

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