Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

THE REGISTRAR OF TRADEMARKS

Référence : 2022 COMC 115

Date de la décision : 2022-06-08

DANS L’AFFAIRE DE LA PROCÉDURE DE RADIATION EN VERTU DE L’ARTICLE 45

 

Smart & Biggar LLP

Partie requérante

et

 

Marina Del Rey Foods Inc.

Propriétaire actuelle

 

LMC408,815 pour ALIBI

Enregistrement

Introduction

[1] La présente décision concerne une procédure de radiation sommaire engagée en application de l’article 45 de la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, c T-13 (la Loi) à l’égard de l’enregistrement no LMC408,815 pour la marque de commerce ALIBI (la Marque), appartenant actuellement à Marina Del Rey Foods Inc. (la Propriétaire).

[2] La Marque est enregistrée pour emploi en liaison avec les produits suivants :

Produits de soin pour le corps et le visage, nommément: lait nettoyant, lotion tonique, exfoliant, crème de base, lait autobronzant, crème de protection, lait corporel, huile à massage, crème à mains, talc, huile de bain; savons; produits capillaires, nommément: shampooings; cosmétiques et maquillage, nommément: rouge à lèvres, crayons à lèvres, fard à joue, ombres à paupières, mascara, fond de teint.

[3] Pour les raisons qui suivent, je conclus que l’enregistrement doit être modifié.

La procédure

[4] À la demande de Smart & Biggar LLP (la Partie requérante), le registraire des marques de commerce a donné l’avis prévu à l’article 45 de la Loi le 19 mai 2020 à 7096933 Canada Inc., qui était alors la propriétaire inscrite de la Marque.

[5] L’avis enjoignait la propriétaire inscrite à démontrer l’emploi de la Marque au Canada, à l’égard de chacun des produits spécifiés dans l’enregistrement, à un moment quelconque au cours des trois années précédant la date de l’avis. À défaut d’emploi, l’avis du registraire enjoignait la propriétaire inscrite à démontrer la date à laquelle la Marque a été employée en dernier lieu et la raison de son défaut d’emploi depuis cette date. En l’espèce, la période pertinente pour démontrer l’emploi est du 19 mai 2017 au 19 mai 2020.

[6] La définition pertinente d’emploi en l’espèce est énoncée à l’article 4(1) de la Loi comme suit :

4(1) Une marque de commerce est réputée employée en liaison avec des produits si, lors du transfert de la propriété ou de la possession de ces produits, dans la pratique normale du commerce, elle est apposée sur les produits mêmes ou sur les emballages dans lesquels ces produits sont distribués, ou si elle est, de toute autre manière, liée aux produits à tel point qu’avis de liaison est alors donné à la personne à qui la propriété ou possession est transférée.

[7] Il est bien établi que le but et l’objet de l’article 45 de la Loi est de prévoir une procédure simple, sommaire et expéditive visant à débarrasser le registre du « bois mort ». Le critère pour établir l’emploi n’est pas exigeant et une surabondance de preuve n’est pas nécessaire [Union Electric Supply Co Ltd c le Registraire des marques de commerce (1982), 63 CPR (2d) 56 (CF 1re inst)]. Cependant, des faits suffisants doivent être présentés pour permettre au registraire de conclure que la Marque a été employée en liaison avec chacun des produits que spécifie l’enregistrement durant la période pertinente [Uvex Toko Canada Ltd c Performance Apparel Corp, 2004 FC 448 ]. De simples allégations d’emploi ne suffisent pas pour démontrer l’emploi de la Marque [Plough (Canada) Ltd c Aerosol Fillers Inc (1980), 53 CPR (2d) 62 (CAF)].

[8] Bien que sans conséquence en l’espèce, je remarque que les notes de bas de page de l’enregistrement démontrent que les changements suivants ont été inscrits par l’Office de la propriété intellectuelle du Canada les 11 août et 18 août 2020 respectivement :

  • changement de titre de 7096933 Canada Inc. à 8875154 Canada Inc. à la suite d’une fusion du 20 mai 2014;

  • changement de titre de 8875154 Canada Inc. à la Propriétaire à la suite d’une fusion du 26 août 2014.

[9] En réponse à l’avis du registraire, la Propriétaire a produit l’affidavit de Franco Cristiano, signé le 9 décembre 2020, auquel sont jointes les pièces A à D.

[10] Seule la Partie requérante a produit des observations écrites, alors que seule la Propriétaire était représentée à l’audience.

La preuve

[11] M. Cristiano est président, secrétaire et directeur général de la Propriétaire depuis sa création en mai 2014 [para 1]. Il explique que la Propriétaire est une entreprise canadienne privée qui fabrique, importe et distribue partout en Amérique du Nord plusieurs types de produits, dont la gamme de produits de soins de la peau, du bain et du corps vendus sous la Marque [para 6].

[12] M. Cristiano affirme que durant la période pertinente, la Propriétaire a employé la Marque au Canada, dans le cours normal du commerce, en liaison avec « body and face care products, namely exfoliants, body lotion, talc, body oil and soap ». Il précise que ces produits correspondent à ceux identifiés en français dans l’enregistrement sous : exfoliant, lait corporel, talc, huile de bain, savons (collectivement « les Produits ») [para 7].

[13] M. Cristiano joint comme pièce B à son affidavit des photos des Produits portant la Marque. Il affirme que ces photos sont représentatives des Produits vendus au Canada par la Propriétaire durant la période pertinente [para 8].

[14] M. Cristiano explique que les Produits arborant la Marque sont habituellement vendus dans des magasins à prix réduits (magasin à un dollar) et des pharmacies. Il fournit les noms de détaillants, au Canada, auxquels la Propriétaire a vendu les Produits durant la période pertinente [para 9].

[15] M. Cristiano joint comme pièce C à son affidavit un échantillonnage de factures attestant de la vente des Produits arborant la Marque, par la Propriétaire, durant la période pertinente. Il inclut à même son affidavit un tableau de corrélation entre les Produits et les produits identifiés par la Marque sur les toutes les factures contenues dans la pièce C [para 10].

[16] Finalement, une page du site Web de la Propriétaire montrant certains des Produits portant la Marque est jointe comme pièce D à l’affidavit, cette page étant représentative de la promotion des Produits sur le site Web de la Propriétaire durant la période pertinente [para 13].

Analyse et motifs de la décision

Absence de preuve d’emploi

[17] Lors de l’audience, la Propriétaire a reconnu qu’elle n’a pas présenté de preuve d’emploi de la Marque en liaison avec les produits suivants spécifiés dans l’enregistrement:

[…] lait nettoyant, lotion tonique, […] crème de base, lait autobronzant, crème de protection, […] huile à massage, crème à mains, […]; produits capillaires, nommément: shampooings; cosmétiques et maquillage, nommément: rouge à lèvres, crayons à lèvres, fard à joue, ombres à paupières, mascara, fond de teint.

[18] Puisque la Propriétaire a également reconnu que sa preuve ne fait pas état de circonstances spéciales justifiant ce défaut d’emploi, je conclus que les produits identifiés ci‑dessus doivent être radiés de l’enregistrement.

Preuve d’emploi à l’égard des produits restants

[19] Selon ses observations écrites, la Partie requérante reconnait que la preuve démontre clairement que les produits « exfoliant », « lait corporel », « talc » et « savons » spécifiés dans l’enregistrement ont été vendus au Canada durant la période pertinente et que ces produits arboraient la Marque au moment du transfert.

[20] Compte tenu des observations des parties, discutées ci-dessous, la seule question qui reste à trancher en l’espèce est de savoir si la preuve de la Propriétaire permet de conclure que la Marque a été employée au Canada, durant la période pertinente, en liaison avec le produit « huile de bain » spécifié dans l’enregistrement.

[21] Dans ses observations écrites, la Partie requérante fait essentiellement valoir que l’affirmation de M. Cristiano concernant l’emploi de la Marque en liaison avec « body oil », (« huile de bain » dans l’enregistrement) constitue une simple allégation d’emploi.

[22] À l’appui de sa position, la Partie requérante soumet que les produits apparaissant sur les photos de la pièce B sont clairement identifiés sur leurs étiquettes comme étant « lotion pour les mains et le corps » (1re photo), « huile pour bébé »» (2e photo), « gel de jour exfoliant pour le corps » (3e photo), « talc ultra-fin » (4e photo) et « savons à mains » (5e à 9e photos). Aucun des produits illustrés par les photos n’est identifié comme « huile de bain », et le produit « huile pour bébé » est un produit entièrement différent du produit « huile de bain ».

[23] De plus, la Partie requérante note que bien que le tableau figurant au paragraphe 10 de l’affidavit de M. Cristiano indique que les factures nos 100886, 102596 (sic), 105618, 107341, 107574, 108469, 110678 et 119174 incluses dans la pièce C démontrent la vente d’huile de bain, le produit correspondant répertorié sur chacune de ces factures est « #ALIBI HUILE POUR BEBE » ou « #ALIBI BABY OIL ». Aucune des factures incluses dans la pièce C ne fait référence à « huile de bain ».

[24] Lors de l’audience, la Propriétaire a fait valoir que de l’huile pour bébé se qualifie comme de l’huile de bain puisqu’il s’agit d’une huile qui peut être versée/diluée dans l’eau du bain pour agir sur la peau. Tout en reconnaissant que sa prétention n’est pas établie par la preuve, la Propriétaire a souligné que l’étiquette de la bouteille d’huile pour bébé porte la mention « POUR BÉBÉS ET ADULTES » (mon emphase) [2e photo de la pièce C]. Selon ma compréhension des représentations de la Propriétaire, le fait que le produit est aussi destiné aux adultes supporte sa position.

[25] Il n’appartient pas au registraire de conjecturer sur le genre de produits visés par l’enregistrement. C’est la propriétaire inscrite qui a la responsabilité de démontrer le lien entre les produits décrits dans l’enregistrement et ceux dont il est question dans sa preuve [Fraser Milner Casgrain LLP c Fabric Life Ltd, 2014 COMC 135, au para 13; Wrangler Apparel Corp c Pacific Rim Sportswear Co (2000), 10 CPR (4th) 568, au para 12 (COMC)]. Toutefois, le registraire peut tirer des inférences raisonnables en raison de la preuve fournie [Eclipse International Fashions Canada Inc c Shapiro Cohen, 2005 CAF 64].

[26] Je conviens avec la Propriétaire que la preuve permet de conclure que les adultes peuvent utilisés l’huile pour bébé associée à la Marque. Toutefois, je ne suis pas convaincue que ce fait permet de conclure que de l’huile pour bébé correspond à de l’huile de bain. En effet, les produits en cause sont certainement un type d’huile, mais j’estime que de l’huile pour bébé n’est pas un produit généralement considéré comme de l’huile de bain. Selon moi, il est plutôt raisonnable de conclure que de l’huile pour bébé est une huile destinée à être appliquée directement sur la peau, plutôt qu’une huile destinée à être versée ou diluée dans l’eau du bain. Autrement dit, en l’absence d’une preuve claire de la Propriétaire, je m’en remets au sens commun pour conclure que de l’huile pour bébé n’est pas de l’huile de bain.

[27] Par conséquent, je conclus que la Propriétaire n’a pas démontré l’emploi de la Marque en liaison avec « huile de bain » durant la période pertinente. En raison de l’absence de preuve de circonstances spéciales justifiant ce défaut d’emploi, je conclus que ce produit doit être radié de l’enregistrement.

[28] Compte tenu de ce qui précède, je conclus que la preuve établit l’emploi de la Marque au Canada, au sens de l’article 4(1) et de l’article 45 de la Loi, seulement en liaison avec les produits « exfoliant », « lait corporel », « talc »et « savons ».

Décision

[29] Pour les motifs exposés ci-dessus, dans l’exercice des pouvoirs qui m’ont été délégués en vertu des dispositions de l’article 63(3) de la Loi, l’enregistrement sera modifié, selon les dispositions de l’article 45 de la Loi, afin de radier les produits suivants :

[…] lait nettoyant, lotion tonique, […] crème de base, lait autobronzant, crème de protection, […] huile à massage, crème à mains, […] huile de bain; produits capillaires, nommément: shampooings; cosmétiques et maquillage, nommément: rouge à lèvres, crayons à lèvres, fard à joue, ombres à paupières, mascara, fond de teint.

[30] L’état déclaratif des produits se lira comme suit :

Produits de soin pour le corps et le visage, nommément: exfoliant, lait corporel, talc; savons.

 

Céline Tremblay

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

 


COMMISSION DES OPPOSITIONS DES MARQUES DE COMMERCE

OFFICE DE LA PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE DU CANADA

COMPARUTIONS ET AGENTS INSCRITS AU DOSSIER

___________________________________________________

DATE DE L’AUDIENCE 2022-06-02

COMPARUTIONS

Me Catherine Bergeron

Pour la Propriétaire

Aucune comparution

Pour la Partie requérante

AGENTS AU DOSSIER

Robic

Pour la Propriétaire

Smart & Biggar LLP

Pour la Partie requérante

 

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