Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

THE REGISTRAR OF TRADEMARKS

Référence : 2022 COMC 117

Date de la décision : 2022‑06‑09

[TRADUCTION CERTIFIÉE,

NON RÉVISÉE]

 

DANS L’AFFAIRE DE L’OPPOSITION

 

Temperance Capital Corp.

Opposante

et

 

Temperance Partners GP I Limited

Requérante

 

1,745,142 pour TEMPERANCE

Demande

Introduction

[1] Temperance Capital Corp. (l’Opposante) s’oppose à l’enregistrement de la marque de commerce TEMPERANCE (la Marque), qui fait l’objet de la demande no 1,745,142 présentée par Temperance Partners GP I Limited (la Requérante).

[2] De façon générale, la demande vise l’enregistrement de la Marque en liaison avec des services financiers et d’assurance.

[3] L’opposition est principalement fondée sur des allégations de confusion entre la Marque et la marque de commerce TEMPERANCE CAPITAL de l’Opposante et le nom commercial Temperance Capital Corp. en liaison avec des services d’investissement.

[4] La Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, c T‑13 (la Loi) a été modifiée le 17 juin 2019. Toutes les dispositions de la Loi mentionnées dans la présente décision renvoient à la Loi dans sa version modifiée, à l’exception de celles concernant les motifs d’opposition qui renvoient à la Loi dans sa version antérieure aux modifications (voir l’article 70 de la Loi).

[5] Pour les motifs qui suivent, la demande est rejetée en partie.

Le dossier

[6] La demande a été produite le 2 septembre 2015. L’état déclaratif des services dans la demande, modifié le 27 septembre 2016, est ainsi rédigé :

(1) Services de placement dans des fonds de capital d’investissement.

(2) Services de consultation et de conseil financiers, nommément services de consultation en analyse financière; conseils en placement; consultation en placement; services financiers, nommément services de gestion de patrimoine; services de courtage d’assurance; services de fiducie, nommément services de société de placement et de société de fiducie; services d’information et de conseil financiers, nommément prévisions financières; services de courtage en investissement financier; gestion financière; services d’analyse de portefeuilles; services de recherche et d’information financières, nommément services d’analyse et de recherche financières; planification financière; services de financement d’entreprises, nommément consultation dans le domaine de la structure du capital; services de financement d’entreprises, nommément consultation dans le domaine de la vente d’actifs.

[7] La demande revendique l’emploi de la Marque au Canada depuis au moins aussi tôt que le 24 janvier 2011 en liaison avec les services (1) et l’emploi projeté de la Marque pour les services (2).

[8] La demande a été annoncée dans le Journal des marques de commerce le 4 janvier 2017.

[9] L’Opposante s’oppose à la demande en produisant une déclaration d’opposition en vertu de l’article 38 de la Loi le 5 juin 2017. La déclaration d’opposition a été modifiée le 14 septembre 2017, à la suite de la demande de décision interlocutoire de la Requérante. Le registraire a accordé l’autorisation de modifier la déclaration d’opposition et a rendu la décision interlocutoire le 11 octobre 2017.

[10] Les motifs d’opposition qui restent à trancher peuvent être résumés comme suit :

1. la demande n’est pas conforme aux exigences de l’article 30b) de la Loi;

2. la Requérante n’est pas la personne ayant droit à l’enregistrement de la Marque en raison la confusion avec la marque de commerce TEMPERANCE CAPITAL de l’Opposante et le nom commercial Temperance Capital Corp., antérieurement employé ou révélé au Canada en liaison avec des [traduction] « services d’investissement, entre autres services »;

  1. la Marque n’est pas distinctive.

[11] La Requérante a produit et signifié une contre‑déclaration réfutant les motifs d’opposition.

[12] À l’appui de son opposition, l’Opposante a produit l’affidavit d’Alex Baluta, souscrit le 13 mars 2018. M. Baluta n’a pas été contre‑interrogé à l’égard de sa preuve.

[13] À l’appui de sa demande, la Requérante a produit l’affidavit de Michelle Noonan, souscrit le 29 mars 2019. Mme Noonan n’a pas été contre‑interrogée à l’égard de sa preuve.

[14] Seule l’Opposante a produit des observations écrites. Aucune audience n’a été tenue.

Fardeau de preuve

[15] Il incombe à la Requérante de démontrer que la demande est conforme aux dispositions de la Loi. Il incombe toutefois à l’Opposante de s’acquitter du fardeau initial de présenter une preuve admissible suffisante pour permettre de conclure raisonnablement à l’existence des faits allégués au soutien de chacun de ses motifs d’opposition. Une fois que l’Opposante s’est acquittée de ce fardeau de preuve initial, la Requérante doit convaincre le registraire, selon la prépondérance des probabilités, que les motifs d’opposition plaidés ne devraient pas faire obstacle à l’enregistrement de la Marque [John Labatt Ltd c Molson Companies Ltd (1990), 30 CPR (3d) 293 (CF 1re inst) à la p. 298; Dion Neckwear Ltd c Christian Dior, SA (2002) 20 CPR (4th) 155 (CAF)].

La preuve des parties

[16] La preuve des parties est résumée ci‑dessous et je l’examinerai plus en détail dans l’analyse des motifs d’opposition.

Preuve de l’Opposante

[17] Comme première question, je note qu’en examinant la preuve de l’Opposante, je ne tiendrai compte d’aucune des déclarations de M. Baluta qui constituent une opinion sur une question de fait et de droit qui doit être tranchée par le registraire dans cette procédure.

[18] M. Baluta est le président-directeur général (PDG) de l’Opposante depuis que l’entreprise a été fondée en 2014. Il est également cofondateur de l’Opposante. M. Baluta explique qu’en tant que PDG de l’Opposante, il est chargé de superviser toutes les activités de l’Opposante, y compris, sans toutefois s’y limiter, la prise de décisions en matière de gestion quotidienne et la mise en œuvre des plans à court et à long terme de l’Opposante [para 1].

[19] Au paragraphe 2 de son affidavit, M. Baluta affirme que l’Opposante est la propriétaire des marques de commerce TEMPERANCE CAPITAL, TEMPERANCE INVESTMENT et du logo TC. Il affirme également que l’Opposante fait partie d’un groupe d’entreprises, et que les entreprises de ce groupe comprennent :

  1. Temperance Capital Corp., constituée en Alberta le 10 octobre 2014;

  2. Temperance Capital Management Corp., constituée en Ontario le 28 octobre 2014;

  3. Temperance Investment Corp., constituée le 16 juillet 2016;

  4. Temperance Capital Administration Corp, constituée le 15 juillet 2016;

e. Temperance Capital Income Trust, « instanciée » le 2 août 2016.

[20] M. Baluta ajoute, au paragraphe 3 de son affidavit : [traduction] « Je suis également le PDG ou le cadre supérieur des autres entreprises énumérées ci‑dessus, un administrateur de toutes les entreprises et un fiduciaire de la fiducie (collectivement appelés “Temperance Capital”). »

[21] Sauf indication contraire, mon emploi subséquent de l’expression « Temperance Capital » reflète l’emploi de cette expression par M. Baluta dans son affidavit.

[22] M. Baluta explique que la demande d’enregistrement de la Marque a été citée par rapport à la demande no 1,808,017 de l’Opposante visant la marque de commerce TEMPERANCE CAPITAL produite le 4 novembre 2016. Il fournit les renseignements sur la demande de l’Opposante, y compris la demande révisée en date du 13 mars 2018 et une copie du rapport de l’examinateur [para 5 à 7, pièce A].

[23] M. Baluta décrit généralement les activités commerciales de Temperance Capital comme l’offre de [traduction] « services d’investissement en capital, services de fonds de placement, ainsi que des services de consultation en gestion et des services financiers au Canada par l’intermédiaire de [l’Opposante] ou d’une affiliée » [para 10].

[24] Des renseignements sur les services d’investissement en capital et les services de fonds de placement offerts par Temperance Capital sont fournis par M. Baluta, avec des pièces à l’appui [para 11 à 18, pièces B à I]. Les services de consultation en gestion et les services financiers sont également décrits dans l’affidavit, mais sans pièces à l’appui [para 19 et 20].

[25] Au paragraphe 21 de son affidavit, M. Baluta déclare que [traduction] « Temperance Capital a établi son entreprise à l’automne 2014 et a adopté le nom “Temperance Capital” peu après ». Il affirme en outre [traduction] « À la suite d’une recherche de dénominations sociales, Temperance Capital Corp a été choisi et le nom de domaine tempreancecapital.com a été acquis en décembre 2014. » M. Baluta produit [traduction] « une copie du rapport de réserve NUANS daté de janvier 2015 » [para 22, pièce J].

[26] M. Baluta produit les pages actuelles du site Web de Temperance Capital à temperancecapital.com, qui est actif depuis au moins janvier 2015 [para 23, pièce K].

[27] M. Baluta fait renvoi à la couverture médiatique de Temperance Capital au Canada [para 24, pièce L].

[28] M. Baluta fournit le capital amassé et les recettes annuelles de Temperance Capital en liaison avec les services en liaison avec la marque de commerce TEMPERANCE CAPITAL pour les exercices 2015 à 2018 [para 25]. Il fournit également les dépenses relatives aux dépliants, aux publicités et aux articles promotionnels produits et distribués par Temperance Capital pour les années 2016 à 2018 [para 26 et 27].

[29] Enfin, M. Baluta fait quelques affirmations au sujet du site Web de la Requérante [para 32 à 34, pièce M]. Je discuterai de la pertinence de ces affirmations ci‑dessous.

Preuve de la Requérante

[30] Mme Noonan est une étudiante en droit employée par les agents de marques de commerce de la Requérante. Toutefois, elle ne donne aucune opinion devant être exclue de l’examen conformément à Cross‑Canada Auto Body Supply (Windsor) Ltd. c Hyundai Auto Canada, 2005 CF 1254; conf. par 2006 CAF 133.

[31] En fait, la preuve de Mme Noonan se limite aux documents suivants :

a) Des captures d’écran du site Web de la Requérante à l’adresse www.temperancepartners.com, à savoir : une capture d’écran en date du 29 mars 2019 [pièce 1]; une capture d’écran de Wayback Machine de la saisie la plus ancienne disponible, en date du 22 février 2015 [pièce 2]; et une capture d’écran de Wayback Machine illustrant la page Web archivée en date du 11 juillet 2015 [pièce 3].

b) Des imprimés de deux articles en ligne, un publié par Financial Post le 19 octobre 2016 et l’autre par Marketwire le 17 janvier 2013 [pièces 4 et 5].

Analyse des motifs d’opposition

Remarques préliminaires

Observations écrites de l’Opposante

[32] Les observations écrites de l’Opposante se composent uniquement des trois paragraphes suivants :

[traduction]

À l’aide d’une preuve exhaustive, l’Opposante s’est acquittée de son fardeau de preuve initial relativement à chacun des motifs d’opposition. Le fardeau de preuve incombe maintenant à la Requérante, qui n’a pas démontré que sa demande est conforme à la Loi sur les marques de commerce, que la marque visée par la demande est distinctive et que la Requérante est la personne ayant droit à l’enregistrement.

En ce qui concerne la preuve, la page Web présentée par la Requérante est dépourvue de tout contenu de fond. Le premier article de presse présenté par la Requérante porte sur les activités de l’Opposante et non sur celles de la Requérante. Le deuxième article présenté par la Requérante fait renvoi à un « partenariat stratégique » avec un tiers américain, et non à un emploi au Canada.

La Commission est appelée à prendre connaissance d’office du fait que la Requérante a produit une nouvelle demande pour TEMPERANCE PARTNERS (1976392) après le dépôt de la présente procédure d’opposition.

[33] En plus de l’absence de fond des observations écrites de l’Opposante, pour les motifs desquels je discuterai ci‑dessous, je ne souscris pas à l’affirmation de l’Opposante selon laquelle elle s’est acquittée de son fardeau de preuve initial relativement à chaque motif d’opposition.

[34] De plus, je ne prendrai pas connaissance d’office de la demande no 1,976,392 présumément produite par la Requérante. En effet, le registraire n’exerce pas son pouvoir discrétionnaire de prendre connaissance des demandes et des enregistrements autres que ceux invoqués à l’appui d’un motif d’opposition fondé sur l’article 12(1)d) ou l’article 16 [Quaker Oats Co of Canada c Menu Foods Ltd (1986), 11 CPR (3d) 410 (COMC)].

Emploi de TEMPERANCE CAPITAL qui profite à l’Opposante

[35] À mon avis, la preuve de M. Baluta soulève la question de savoir si l’emploi de TEMPERANCE CAPITAL par les entreprises affiliées de l’Opposante ou dans une marque de commerce ou un nom commercial profitait à l’Opposante en vertu de l’article 50 de la Loi.

[36] Il est bien établi que la structure administrative à elle seule ne suffit pas à démontrer l’existence d’un contrat de licence et ne permet pas de déduire qu’un propriétaire de marque de commerce a un contrôle sur les caractéristiques ou la qualité des produits et services employés en liaison avec une marque sous licence [MCI Communications Corp c MCI Multinet Communications Inc (1995), 61 CPR (3d) 245 (COMC); 3082833 Nova Scotia Co c Lang Michener LLP, 2009 CF 928, au para 32]. Toutefois, il est également bien établi que l’on peut déduire qu’il y a contrôle lorsqu’un particulier est un administrateur ou un dirigeant du propriétaire de la marque de commerce et d’un licencié [voir Petro‑Canada c 2946661 Canada Inc (1998), 83 CPR (3d) 129 (CF 1re inst); Lindy c Canada (Registraire des marques de commerce), [1999] ACF no 682 (CAF)].

[37] Sans aucune observation de la Requérante pour me convaincre du contraire, je conclus que la déclaration de M. Baluta en ce qui a trait à ses rôles et fonctions pour l’Opposante et ses affiliées suffit pour déduire l’existence d’un contrôle en vertu de l’article 50 de la Loi [para 3 de l’affidavit]. J’ajouterais qu’il était loisible à la Requérante de contre‑interroger M. Baluta à l’égard de sa preuve, mais qu’elle a choisi de ne pas le faire.

Non‑conformité avec l’article 30b)

[38] Le motif d’opposition invoqué par l’Opposition en vertu de l’article 30b) comporte deux volets, notamment que [traduction] « la Requérante n’a pas employé TEMPERANCE (p. ex., à titre de marque de commerce indépendante) »; et que la Requérante n’a pas employé la Marque depuis le 24 janvier 2011, tel qu’il est déclaré dans la demande.

[39] Ce motif d’opposition se limite nécessairement aux « [s]ervices de placement dans des fonds de capital d’investissement ». De plus, la date pertinente pour évaluer ce motif d’opposition est la date de production de la demande [Georgia‑Pacific Corporation c Scott Paper Ltd (1984), 3 CPR (3d) 469 (COMC)].

[40] Le fardeau de preuve incombant à un opposant en ce qui concerne le non‑respect de l’article 30b) de la Loi est léger et peut être satisfait non seulement par la preuve de l’opposant, mais aussi par la preuve du requérant [Labatt Brewing Co Ltd c Molson Breweries, A Partnership (1996), 68 CPR (3d) 216 (CF 1re inst) à la p. 230; Corporativo de Marcas GJB, SA de CV c Bacardi & Company Ltd, 2014 CF 323, aux para 33 à 38]. Pour s’acquitter de son fardeau, un opposant doit démontrer que la preuve d’un requérant est clairement incompatible avec la date de premier emploi revendiquée ou remettre en question la véracité de la date de premier emploi revendiquée [Ivy Lea Shirt Co c Muskoka Fine Watercraft & Supply Co (1999), 2 CPR (4th) 562 (COMC), aux p. 565 et 566, conf. par (2001), 11 CPR (4th) 489 (CF 1re inst); Corporativo de Marcas, précité]. Si un opposant s’acquitte de son fardeau de preuve, un requérant doit démontrer qu’il a employé la marque de commerce à la date revendiquée.

[41] Par souci de commodité, je reproduis les parties de l’affidavit de M. Baluta qui semblent être destinées à être considérées comme une preuve à l’appui du motif d’opposition en vertu de l’article 30b) :

[traduction]

31. [La demande d’enregistrement de la Marque] comprenait une revendication d’« emploi au Canada depuis au moins aussi tôt que le 24 janvier 2011 » en liaison avec des services désignés comme des « services de placement dans des fonds de capital d’investissement ».

32. Toutefois, le site Web de la Requérante à l’adresse temperancepartners.com comprend un avis de droit d’auteur de 2014. Le site Web semble être une « page d’accueil » et fournit des liens désignés « NEW YORK » et « TORONTO » qui mènent tous les deux vers un lien mailto à info@temperancepartners.com. Une copie complète du site Web temperancepartners.com est jointe aux présentes à titre de pièce M.

33. « WayBack Machine » exploité par Archive.org indique que le site Web temperancepartners.com a été consulté pour la première fois le 22 février 2015.

34. De plus, il n’y a aucun affichage autonome du mot « TEMPERANCE », sauf dans l’expression « TEMPERANCE PARTNERS », sur le site Web de la Requérante.

[42] Selon la date « 2018‑03‑12 » affichée dans le coin supérieur des deux pages fournies du site Web de la Requérante, je conclus qu’elles sont postérieures à la date pertinente. Par conséquent, les pages fournies du site Web n’ont aucune valeur probante dans l’examen du premier volet du motif d’opposition alléguant que la Requérante n’a pas employé TEMPERANCE en tant que marque de commerce autonome en date du 2 septembre 2015.

[43] Sans aucune observation de fond de la part de l’Opposante, je suppose que les déclarations aux paragraphes 32 et 33 de l’affidavit et la pièce M à l’appui sont présentés à titre preuve démontrant que la Marque n’aurait pas pu être employée pour la première fois le 24 janvier 2011, tel qu’il est indiqué dans la demande.

[44] Toutefois, rien dans la demande d’enregistrement de la Marque ne limite les services de placement dans des fonds de capital d’investissement de la Requérante aux services offerts par l’intermédiaire d’un site Web. En d’autres termes, le fait que la Requérante n’ait peut‑être pas eu une présence sur Internet le 24 janvier 2011 ne suffit pas pour permettre à l’Opposante de s’acquitter de son fardeau en ce qui a trait au deuxième volet du motif d’opposition.

[45] Je tiens à ajouter qu’il n’est pas clair si l’argument de l’Opposante selon lequel [traduction] « la page Web présentée par la Requérante est dépourvue de tout contenu de fond » vise à permettre à l’Opposante d’invoquer la preuve de la Requérante pour s’acquitter de son fardeau de preuve en ce qui a trait au motif d’opposition en vertu de l’article 30b). Toutefois, je conclus que la preuve de la Requérante n’est pas favorable à l’argument de l’Opposante. En fait, mon raisonnement quant à l’absence de valeur probante des pages du site Web fournies par M. Baluta s’applique aux captures d’écran du site Web de la Requérante fournies par Mme Noonan [pièces 1 à 3]. En outre, étant donné que l’Opposante ne s’est pas acquittée de son fardeau de preuve, la Requérante n’était pas tenue de présenter des éléments de preuve pour justifier sa date de premier emploi revendiquée.

[46] Par conséquent, le motif d’opposition fondé sur l’article 30b) est rejeté parce que l’Opposante ne s’est pas acquittée de son fardeau de preuve.

Absence de droit à l’enregistrement

[47] Les motifs d’opposition alléguant que la Requérante n’est pas la personne ayant droit à l’enregistrement de la Marque sont fondés sur des allégations de confusion avec la marque de commerce TEMPERANCE CAPITAL (la Marque de l’Opposante) antérieurement employée ou révélée ainsi que le nom commercial Temperance Capital Corp. (le Nom commercial) de l’Opposante.

[48] Dans la mesure où l’Opposante s’appuie sur révélation antérieure du Nom commercial, je note que les articles 16(1)c) et 16(3)c) de la Loi font tous les deux clairement et particulièrement renvoi à un nom commercial qui a été employé antérieurement au Canada, et non un nom commercial qui a été révélé antérieurement. En d’autres termes, un motif d’opposition fondé sur l’absence de droit alléguant qu’un nom commercial a été révélé est invalide.

[49] De plus, je conclus dès le départ que la preuve de M. Baluta ne permet pas d’établir que la Marque de l’Opposante a été révélée au Canada, conformément à la définition de « révélée » énoncée à l’article 5 de la Loi.

[50] Par conséquent, afin de s’acquitter de son fardeau de preuve en vertu des motifs d’opposition fondés sur l’absence de droit en l’espèce, l’Opposante doit démontrer son emploi de la Marque de l’Opposante et du Nom commercial avant les dates pertinentes, qui sont abordées ci‑dessous. De plus, l’Opposante doit démontrer que la Marque de l’Opposante et le Nom commercial n’avaient pas été abandonnés à la date de l’annonce de la demande, à savoir le 4 janvier 2017.

Articles 16(1)a) et 16(1)c) de la Loi

[51] La date pertinente pour évaluer les motifs d’opposition soulevés en vertu des articles 16(1)a) et 16(1)c) de la Loi est la date du premier emploi qui est alléguée dans la demande, notamment le 24 janvier 2011.

[52] En l’espèce, les motifs d’opposition soulevés en vertu des articles 16(1)a) et c) de la Loi se limitent nécessairement aux « [s]ervices de placement dans des fonds de capital d’investissement ».

[53] Les deux motifs d’opposition peuvent être sommairement rejetés parce que l’Opposante n’a pas démontré l’emploi de sa marque de commerce et de son nom commercial allégués avant la date pertinente. En fait, il est évident que les éléments de preuve présentés par M. Baluta visent à démontrer l’emploi de la Marque de l’Opposante et du Nom commercial au Canada depuis 2015 en liaison avec des services d’investissement en capital et des services de fonds de placement, ainsi qu’avec des services de consultation en gestion.

[54] Par conséquent, les motifs d’opposition invoqués en vertu des articles 16(1)a) et 16(1)c) sont rejetés.

Articles 16(3)a) et 16(3)c) de la Loi

[55] La date pertinente pour évaluer les motifs d’opposition soulevés en vertu des articles 16(3)a) et 16(3)(c) de la Loi est la date de dépôt de la demande, notamment le 2 septembre 2015.

[56] En l’espèce, ces motifs d’opposition sont nécessairement limités aux services visés par la demande en fonction de l’emploi projeté au Canada, énumérés au paragraphe (2) de la demande.

[57] Le paragraphe 4(2) de la Loi prévoit qu’une marque de commerce est réputée employée en liaison avec des services si elle est employée ou affichée dans l’exécution ou l’annonce de ces services. Un nom commercial est défini à l’article 2 de la Loi comme étant le nom sous lequel une entreprise est exploitée. Par conséquent, un opposant qui se fonde sur l’emploi antérieur d’un nom commercial doit démontrer son emploi dans la pratique normale d’une entreprise en exploitation et par rapport à la catégorie ou aux catégories de personnes avec qui une telle entreprise doit être menée [Mr Goodwrench Inc c General Motors Corp (1994), 55 CPR (3d) 508 (CF 1re inst)]. Conformément aux principes de l’article 4 de la Loi, l’affichage d’un nom commercial dans la prestation ou l’annonce des services disponibles au Canada suffira à cet égard [Carbon Trust c Pacific Carbon Trust, 2013 CF 946, au para 68].

[58] En outre, il est bien établi que de multiples marques de commerce ou noms commerciaux peuvent être employés en même temps s’ils sont distincts des marques de commerce ou des noms commerciaux [voir AW Allen Ltd c Warner‑Lambert Canada Inc (1985), 6 CPR (3d) 270 (CF 1re inst); Loro Piana SPA c Conseil canadien des ingénieurs (CCI), 2009 CF 1096]. Dans la mesure où elles ne sont pas combinées de façon qu’il soit impossible de les distinguer, leur validité n’est pas touchée [Philip Morris Products SA c Malboro Canada limitée, 2010 CF 1099 au para 217].

[59] C’est en gardant ce qui précède à l’esprit que j’examinerai chacun des motifs d’opposition soulevés en vertu de l’article 16(3) ci‑dessous.

[60] À cette fin, je dois faire remarquer que la preuve de l’Opposante, telle qu’elle a été présentée par M. Baluta, manque de précision. Par exemple, il n’y a aucune déclaration claire quant à la date exacte du premier emploi de la Marque de l’Opposante ou du Nom commercial au Canada en liaison avec chacun des services décrits séparément dans l’affidavit sous les rubriques : [traduction] « Services d’investissement en capital », [traduction] « Services de fonds de placement » et [traduction] « Services de consultation en gestion et services de consultation en matière financière ». De plus, et fait tout aussi important, M. Baluta présente essentiellement les éléments de preuve en faisant renvoi aux services de Temperance Capital sans distinction entre la Marque de l’Opposante et le Nom commercial. Les conséquences du manque de précision et des autres lacunes dans l’affidavit de M. Baluta seront examinées de manière plus approfondie dans le cadre de l’examen de chacun des motifs d’opposition en vertu de l’article 16(3).

Article 16(3)a) de la Loi – Confusion avec la Marque de l’Opposante

[61] Tel qu’il a été mentionné ci‑dessus, les éléments de preuve présentés par M. Baluta visent à démontrer l’emploi de la Marque de l’Opposante au Canada depuis 2015 en liaison avec des services d’investissement en capital et des services de fonds de placement (collectivement les Services d’investissement, sauf indication contraire), ainsi qu’avec des services de consultation en gestion (les Services de consultation).

[62] Pour les raisons qui suivent, je conclus dès le début que les éléments de preuve présentés par M. Baluta ne suffisent pas à établir l’emploi de la Marque de l’Opposante au Canada en liaison avec les Services de consultation à compter du 2 septembre 2015.

[63] D’une part, il n’y a aucune déclaration claire quant à la date du premier emploi de la Marque de l’Opposante en liaison avec les Services de consultation. Toutefois, M. Baluta déclare clairement que ces services sont fournis en plus (mon soulignement) des Services d’investissement [para 19 de l’affidavit]. Étant donné que, selon la preuve de l’Opposante, les Services de consultation sont distincts des Services d’investissement, je ne suis pas disposée à conclure que tous les services de Temperance Capital ont été exécutés ou offerts pour la première fois en même temps au Canada.

[64] De plus, même si M. Baluta fait particulièrement renvoi à la preuve documentaire déposée relativement aux Services d’investissement, il ne le fait pas à l’égard des Services de consultation. Il n’y a qu’un renvoi à [traduction] « un contrat de consultation financière en matière de gestion » signé le 5 mai 2017, sans aucune pièce à l’appui [para 20 de l’affidavit]. De plus, d’après mon examen de l’ensemble de la preuve documentaire fournie par M. Baluta, je conclus que toute la preuve documentaire a trait aux Services d’investissement.

[65] En fin de compte, je ne suis pas prête à conclure que les éléments de preuve présentés par M. Baluta permettent d’établir l’emploi de la Marque de l’Opposante en liaison avec les Services de consultation au Canada à un moment quelconque.

[66] J’examine maintenant les éléments de preuve présentés par M. Baluta ayant trait aux Services d’investissement.

[67] Malgré le manque de précision, selon une interprétation raisonnable de l’affidavit de M. Baluta dans son ensemble, je conclus que la preuve de l’Opposante suffit pour lui permettre de s’acquitter de son fardeau de démontrer l’emploi de la Marque de l’Opposante avant le 2 septembre 2015 et le non‑abandon à compter du 4 janvier 2017 en liaison avec les Services d’investissement.

[68] À cet égard, il suffit de remarquer que la preuve documentaire suivante démontre l’emploi de la Marque de l’Opposante en liaison avec les Services d’investissement :

· la première page du site Web de l’Opposante, qui serait représentative de la façon dont le site Web est apparu depuis janvier 2015 [para 23, pièce K];

  • la « feuille verte » de mai 2015 expliquant les principaux aspects d’une offre [traduction] « d’augmenter une obligation d’entre 4 M$ et 6 M$ pour financer les investissements » [para 16, pièce E];

  • la « feuille verte » et la présentation portant sur une offre d’unité privilégiée pour laquelle Temperance Capital distribue de manière continue depuis 2016 [para 17, pièce G].

[69] Ainsi, la question devient celle de savoir si la Requérante s’est acquittée de son fardeau ultime d’établir, selon la prépondérance des probabilités, qu’il n’y a aucune probabilité raisonnable de confusion entre la Marque et la Marque de l’Opposante en date du 2 septembre 2015.

[70] Le test en matière de confusion est celui de la première impression et du souvenir imparfait. L’article 6(2) de la Loi prévoit que l’emploi d’une marque de commerce crée de la confusion avec une autre marque de commerce lorsque l’emploi des deux marques de commerce dans la même région serait susceptible de faire conclure que les produits liés à ces marques de commerce sont fabriqués, vendus, donnés à bail ou loués, ou que les services liés à ces marques sont loués ou exécutés, par la même personne, que ces produits ou services soient ou non de la même catégorie générale ou figurent ou non dans la même classe de la classification de Nice. Ce test ne concerne pas la confusion entre les marques de commerce elles‑mêmes, mais plutôt la confusion portant à croire que les produits et les services liés à chacune des marques de commerce proviennent de la même source.

[71] Dans l’application du test en matière de confusion, le registraire doit tenir compte de toutes les circonstances de l’espèce, y compris celles expressément énoncées à l’article 6(5) de la Loi, à savoir a) le caractère distinctif inhérent des marques et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues; b) la période pendant laquelle les marques de commerce ont été en usage; c) le genre de produits, services ou entreprises; d) la nature du commerce; et e) le degré de ressemblance entre les marques de commerce, notamment dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’elles suggèrent.

[72] Ces critères ne sont pas exhaustifs et un poids différent sera accordé à différents facteurs selon le contexte [Veuve Clicquot Ponsardin c Boutiques Cliquot Ltée, 2006 CSC 23; Mattel, Inc c 3894207 Canada Inc, 2006 CSC 22, au para 54]. Je cite également l’affaire Masterpiece Inc c Alavida Lifestyles Inc, 2011 CSC 27, au para 49, où la Cour suprême du Canada déclare que l’article 6(5)e) de la Loi sur la ressemblance entre les marques aura souvent le plus grand effet dans l’analyse relative à la confusion.

Caractère distinctif inhérent et mesure dans laquelle les marques sont devenues connues

[73] L’examen global de ce facteur comporte une combinaison du caractère distinctif inhérent et acquis des marques de commerce. Le caractère distinctif acquis d’une marque correspond à la mesure dans laquelle une marque est devenue connue.

[74] Même si le mot CAPITAL dans la Marque de l’Opposante est descriptif dans le contexte des Services d’investissement, la Marque de l’Opposante possède une certain niveau de caractère distinctif, tout comme la Marque. En fin de compte, j’estime que les marques de commerce présentent un caractère distinctif semblable.

[75] Il n’y a aucune preuve de la mesure dans laquelle la Marque est devenue connue au Canada à la date pertinente.

[76] En ce qui concerne la Marque de l’Opposante, il est raisonnable de conclure, à partir de la preuve, qu’elle a été employée au Canada depuis janvier 2015. Toutefois, pour les raisons qui suivent, les éléments de preuve présentés par M. Baluta ne me permettent pas de tirer de conclusion significative en ce qui concerne la mesure dans laquelle la Marque de l’Opposante était devenue connue au Canada à la date pertinente.

[77] Un tableau résumant le capital amassé et les recettes canadiennes annuelles des services de Temperance Capital en liaison avec la Marque de l’Opposante figure au paragraphe 25 de l’affidavit. Le signe supérieur à (« > ») figure devant les montants fournis pour les exercices de 2015 à 2018. Toutefois, cet élément de preuve n’aide pas l’Opposante :

· parce qu’il n’y a aucune indication de la période de 12 mois visée par l’exercice de Temperance Capital;

· parce que le montant des recettes canadiennes annuelles n’est pas fourni pour l’exercice 2015;

· parce qu’il n’est pas clair si le montant de capital amassé pour l’exercice 2015, qui était supérieur à 1 100 000 $, s’appliquait à la période de janvier à septembre 2015.

[78] Les éléments de preuve en ce qui a trait à la promotion des Services d’investissement ne sont pas non plus utiles à l’Opposante.

[79] En fait, même si M. Baluta fait renvoi au site Web de l’Opposante en tant que moyen de promotion, il n’y a aucune donnée sur le nombre de visiteurs canadiens au site Web [para 23 de l’affidavit].

[80] De même, M. Baluta ne fournit aucun renseignement sur la mesure dans laquelle les [traduction] « dépliants, les publicités et les articles promotionnels » produits par Temperance Capital, y compris dans le cadre du financement des conférences, ont été distribués au Canada [para 26 de l’affidavit]. J’ajouterais qu’il n’y a qu’un seul document non daté fourni à titre de [traduction] « documents de commercialisation » représentatifs [para 13 de l’affidavit, pièce B]. Enfin, les premières dépenses promotionnelles fournies visent l’exercice 2016 [para 27 de l’affidavit].

[81] Par conséquent, le facteur de l’article 6(5)a) ne favorise aucune des parties.

Durée de l’emploi

[82] Étant donné que les éléments de preuve permettent d’établir l’emploi de la Marque de l’Opposante pendant une période d’environ huit mois avant la date pertinente, le facteur de l’article 6(5)b) favorise légèrement l’Opposante.

Genre de services ou d’entreprises et nature du commerce

[83] À l’exception des « services de courtage d’assurance », les services (2) de la demande d’enregistrement de la Marque sont identiques ou chevauchent les Services d’investissement de l’Opposante.

[84] En ce qui concerne les « services de courtage d’assurance », à mon avis, leur énumération parmi les autres services dans la demande d’enregistrement de Marque démontre sans doute une relation entre les « services de courtage d’assurance » et les services financiers. En d’autres termes, la demande de la Requérante laisse entendre que les services de courtage d’assurance et les services financiers pourraient être exécutés ou offerts par la même entité ou en son nom. En l’absence de preuve du contraire, j’estime qu’il est raisonnable de conclure qu’il existe une relation entre les « services de courtage d’assurance » de la Requérante et les Services d’investissement de l’Opposante.

[85] En ce qui concerne la nature du commerce des services d’investissement en capital de l’Opposante, M. Baluta affirme, au paragraphe 11 de son affidavit, que [traduction] « Temperance Capital est un investisseur en matière de redevances et de créances dans les petites et moyennes entreprises. Temperance Capital fournit des investissements en échange d’un faible pourcentage des recettes de l’entreprise ». En ce qui concerne la nature du commerce des services de fonds de placement de l’Opposante, M. Baluta déclare, au paragraphe 11 de son affidavit, que [traduction] « Temperance Capital amasse du capital pour faire des investissements, et ce, depuis 2015. Ces efforts sont dans la voie du marché non réglementé et la voie de l’OCRCVM (Organisme canadien de réglementation du commerce des valeurs mobilières), c’est‑à‑dire qu’ils sont destinés aux courtiers et aux courtiers indépendants ».

[86] Étant donné que la Requérante n’a produit aucun élément de preuve de ses voies de commercialisation, étant donné l’identité, le chevauchement ou la relation entre les services des parties, j’estime qu’il est raisonnable de conclure qu’il existe un risque de chevauchement dans leurs voies de commercialisation.

[87] Par conséquent, les facteurs des articles 6(5)c) et 6(5)d) favorisent l’Opposante.

Degré de ressemblance

[88] Comme il a été mentionné ci‑dessus, le degré de ressemblance entre les marques de commerce est souvent le facteur le plus important dans l’analyse de la confusion. Lorsque l’on tient compte du degré de ressemblance, il est préférable de déterminer en premier lieu s’il y a un aspect de la marque de commerce qui est « particulièrement frappant ou unique » [Masterpiece, précité, au para 64].

[89] La Marque est composée d’un seul élément frappant, soit TEMPERANCE. L’aspect le plus frappant de la Marque de l’Opposante est le mot TEMPERANCE, puisque le mot CAPITAL est descriptif dans le contexte des Services d’investissement.

[90] En raison de leur élément TEMPERANCE commun, les marques de commerce possèdent un degré important de ressemblance en ce qui a trait au son et à l’apparence.

[91] Enfin, la seule idée proposée par la Marque est [traduction] « la modération dans l’action, la réflexion ou le sentiment : restriction » [voir le dictionnaire Merriam‑Webster Dictionary]. À mon avis, le mot CAPITAL n’a pas d’incidence importante sur l’idée de restriction que laisse entendre le mot TEMPERANCE dans la Marque de l’Opposante. Quoi qu’il en soit, compte tenu des marques de commerce dans leur ensemble, il existe certainement un chevauchement entre les idées proposées en raison de leur élément commun.

[92] Par conséquent, le facteur de l’article 6(5)e) favorise l’Opposante.

Conclusion – probabilité de confusion

[93] Après avoir évalué l’ensemble des présentes circonstances de l’espèce, je conclus que la Requérante ne s’est pas acquittée de son fardeau ultime de démontrer, selon la prépondérance des probabilités, qu’il n’y a aucune probabilité raisonnable de confusion entre la Marque et la Marque de l’Opposante en date du 2 septembre 2015.

[94] Par conséquent, le motif d’opposition fondé sur l’article 16(3)a) est accueilli à l’égard des services (2) de la demande d’enregistrement de la Marque.

Article 16(3)c) de la Loi – Confusion avec la dénomination sociale Temperance Capital Corp.

[95] Le motif d’opposition à trancher est fondé sur une allégation de confusion entre la Marque et le Nom commercial, c’est‑à‑dire, Temperance Capital Corp. (mon soulignement), dont l’emploi antérieur est allégué par l’Opposante.

[96] Même s’il existe une preuve documentaire très limitée démontrant l’emploi du Nom commercial, elle comprend des cas d’emploi de TEMPERANCE CAPITAL qui seraient qualifiés d’emplois simultanés d’une marque de commerce et d’un nom commercial. L’omission du mot « Corp. » importe peu puisque cela constitue un écart mineur, de sorte que la preuve démontrant l’emploi du nom commercial Temperance Capital est suffisante pour établir qu’il n’est pas nécessaire de trancher l’emploi du Nom commercial.

[97] En effet, malgré le manque de précision et la preuve documentaire limitée démontrant l’emploi du Nom commercial, je conclus que la preuve de l’Opposante suffit pour lui permettre de s’acquitter de son fardeau de démonter l’emploi du Nom commercial dans le cadre de l’exercice de ses activités avant le 2 septembre 2015 et le non‑abandon en date du 4 janvier 2017.

[98] À cet égard, j’accepte que la note de service datée du 29 juillet 2015 diffusée [traduction] « dans le but d’augmenter une obligation d’entre 4 M$ et 6 M$ pour financer les investissements dans la voie de l’OCRCVM » démontre l’emploi du Nom commercial [para 16, pièce D]. J’accepte également qu’en plus de démontrer l’emploi de la Marque de l’Opposante, le document [traduction] « FAQ sur les investisseurs » de mai 2017 démontre l’emploi du Nom commercial [para 15, pièce C]. Même si le document [traduction] « FAQ sur les investisseurs » présenté en preuve porte sur une offre du 19 mai 2017, selon une interprétation raisonnable de la déclaration de M. Baluta à cet égard, j’accepte le document présenté en preuve en tant que spécimen représentatif de l’emploi du Nom commercial depuis janvier 2015 en liaison avec les services de fonds de placement.

[99] Ainsi, la question devient de celle savoir si la Requérante s’est acquittée de son fardeau ultime d’établir, selon la prépondérance des probabilités, qu’il n’y a aucune probabilité raisonnable de confusion entre la Marque et le Nom commercial en date du 2 septembre 2015.

[100] La différence entre la Marque de l’Opposante et le Nom commercial n’a pas d’incidence importante sur mes conclusions quant à la probabilité de confusion entre la Marque et la Marque de l’Opposante en vertu du motif d’opposition fondé sur l’article 16(3)a). En d’autres termes, l’argument de la Requérante en vertu du motif d’opposition fondé sur l’article 16(3)c) n’est pas sensiblement plus fort que celui fondé sur l’article 16(3)a).

[101] Par conséquent, pour des raisons semblables à celles énoncées dans mon examen de la probabilité de confusion entre la Marque et la Marque de l’Opposante, je conclus que la Requérante ne s’est pas acquittée de son fardeau ultime de démontrer, selon la prépondérance des probabilités, qu’il n’y a aucune probabilité raisonnable de confusion entre la Marque et le Nom commercial de l’Opposante en date du 2 septembre 2015.

[102] Par conséquent, le motif d’opposition fondé sur l’article 16(3)c) est accueilli à l’égard des services (2) de la demande d’enregistrement de la Marque.

Absence de caractère distinctif en vertu de l’article 2 de la Loi

[103] L’Opposante fait valoir que la Marque n’est pas distinctive et qu’elle n’est pas non plus adaptée pour distinguer les services de la Requérante des services de l’Opposante en ce sens que la Marque est susceptible d’être confondue avec la Marque de l’Opposante et le Nom commercial.

[104] La date pertinente pour l’évaluation du caractère distinctif de la Marque est la date de dépôt de la déclaration d’opposition [Metro‑Goldwyn‑Mayer Inc c Stargate Connections Inc, 2004 CF 1185 (CF 1re inst)].

[105] Afin de s’acquitter de son fardeau de preuve initial, les éléments de preuve de l’Opposante doivent démontrer que soit la Marque de l’Opposante, soit le Nom commercial était suffisamment connu au Canada le 5 juin 2017 pour annuler le caractère distinctif de la Marque [Motel 6, Inc c No 6 Motel Ltd (1981), 56 CPR (2d) 44 (CF 1re inst); Bojangles’ International LLC c Bojangles Café Ltd (2006), 48 CPR (4th) 427 (CF 1re inst)]. À cet égard, il faut démontrer que la Marque de l’Opposante ou le Nom commercial était connu au Canada dans une certaine mesure, ayant acquis une « réputation importante, significative ou suffisante », ou sinon qu’il était bien connu dans une région particulière du Canada; dans l’un ou l’autre cas, il doit y avoir une preuve claire de la mesure à laquelle la Marque de l’Opposante ou le Nom commercial était connu [Bojangles, précité; Sadhu Singh Hamdard Trust c Navsun Holdings Ltd, 2019 CAF 10].

[106] À mon avis, le manque de précision de la part de M. Baluta dans la présentation d’éléments de preuve fait en sorte qu’il est difficile de déterminer si TEMPERANCE CAPITAL aurait été connu en tant que marque de commerce ou nom commercial à compter du 5 juin 2017. Cela dit, selon une lecture raisonnable de l’affidavit de M. Baluta dans son ensemble, je suis disposée à conclure que la grande partie des éléments de preuve porte sur l’emploi et la promotion de la Marque de l’Opposante au Canada en liaison avec les Services d’investissement. De plus, étant donné la preuve documentaire très limitée de l’emploi du Nom commercial, l’examen des éléments de preuve ayant trait à l’emploi et à la promotion de la Marque de l’Opposant permettra effectivement de déterminer si l’Opposante s’est acquittée de son fardeau de preuve initial concernant le motif d’opposition fondé sur l’article 2.

[107] Même s’ils suffisent pour démontrer l’emploi de la Marque de l’Opposante depuis janvier 2015 en liaison avec les Services d’investissement, pour les raisons qui suivent, je conclus que les éléments de preuve sont insuffisants pour démontrer que la Marque de l’Opposante, au 5 juin 2017, était suffisamment connue au Canada en liaison avec les Services d’investissement pour annuler le caractère distinctif de la Marque.

[108] Comme il en a été question ci‑dessus, M. Baluta ne fournit aucun renseignement sur la mesure dans laquelle le site Web de l’Opposant a été consulté à un moment quelconque. De plus, outre le fait que les documents de commercialisation fournis à titre de pièce B ne sont pas datés, il n’y a aucun renseignement sur la mesure dans laquelle ils ont été distribués au Canada. De plus, compte tenu des éléments de preuve concernant les dépliants, les publicités et les articles promotionnels ou l’absence de ceux‑ci, je ne suis pas disposée à conclure que les dépenses promotionnelles, supérieures à 20 000 $ en 2016 et à 5 000 $ en 2017, ont contribué à la révélation de la Marque de l’Opposante au Canada [para 27 de l’affidavit]. J’ajouterais qu’il n’y a aucune certitude que les dépenses promotionnelles pour l’année 2017 ont été engagées avant le 5 juin 2017.

[109] En outre, à mon avis, une conclusion significative ne peut être tirée du simple fait que le montant total du capital amassé par Temperance Capital pour les exercices de 2015 à 2017 était supérieur à 8 600 000 $ [para 25 de l’affidavit]. En fait, il n’y a aucun renseignement sur la mesure dans laquelle le document de FAQ sur les investisseurs de Temperance Capital [pièce C] et les [traduction] « feuilles vertes » [pièces E et H] ont été diffusés au Canada. En outre, aucune des notes de service présentées en preuve ne démontre l’emploi de la Marque de l’Opposante, et il n’y a pas non plus de renseignements sur la mesure dans laquelle une note de service a été diffusée au Canada. Enfin de compte, en l’absence de renseignements sur le nombre d’investisseurs possibles et sur la mesure dans laquelle ils ont été exposés à la Marque, je ne peux que spéculer quant à l’importance du capital amassé dans le cadre de la révélation de la Marque de l’Opposante au Canada. Par exemple, le chiffre de 8 600 000 $ pourrait représenter 800 investisseurs qui fournissent chacun un montant de 10 750 $, ou seulement huit investisseurs qui fournissent chacun un montant supérieur à un million de dollars.

[110] De même, je ne peux tirer une conclusion significative des recettes annuelles canadiennes qui indiquent être supérieures à 50 000 $ pour l’exercice 2016, supérieures à 500 000 $ pour l’exercice 2017 et qui devraient être supérieures à 1 000 000 $ pour l’exercice 2018 [para 25 de l’affidavit]. À cet égard, en l’absence d’une indication de la période de 12 mois visée par l’exercice de Temperance Capital, il est impossible de déterminer quelle proportion des recettes annuelles pour l’exercice 2017 est antérieure au 5 juin 2017. Pour une raison semblable, aucune importance ne peut être accordée aux recettes « prévues » pour l’exercice 2018. De plus, la proportion des recettes annuelles qui se rapporte aux Services d’investissement n’est pas claire. À cet égard, même si j’ai conclu que les éléments de preuve ne démontrent pas l’emploi de la Marque de l’Opposante en liaison avec les Services de consultation, il demeure que les éléments de preuve visaient à traiter de ces services. Par conséquent, étant donné que les recettes canadiennes sont présentées en preuve en ce qui concerne les [traduction] « services offerts et vendus sous » la Marque de l’Opposante, il se pourrait qu’une partie des recettes annuelles se rapporte aux Services de consultation.

[111] Même si la couverture médiatique peut contribuer à la révélation d’une marque de commerce, en l’espèce, les éléments de preuve portant sur la couverture médiatique ne sont d’aucune utilité pour l’Opposante. En fait, les éléments de preuve sont limités à la déclaration de M. Baluta d’une couverture médiatique canadienne appuyée par un exemple d’un article publié dans le Financial Post le 30 janvier 2015 [para 24 de l’affidavit, pièce L].

[112] Enfin, les éléments de preuve selon lesquels Temperance Capital s’est vu attribuer une offre privée par Private Capital Markets Association of Canada en 2017 ne sont également d’aucune utilité pour l’Opposante [para 18 de l’affidavit, pièce I]. Il n’y aucune preuve claire que l’attribution est antérieure au 5 juin 2017. Quoi qu’il en soit, même si je suis prête à accepter que l’attribution ait pu donner lieu à une visibilité de l’entreprise de l’Opposante, la façon dont elle aurait pu avoir donné lieu à une visibilité de la Marque de l’Opposante en liaison avec les services de fonds de placement n’est pas claire.

[113] Par conséquent, le motif d’opposition fondé le caractère distinctif est rejeté, parce que l’Opposante ne s’est pas acquittée de son fardeau de preuve.

Décision

[114] Dans l’exercice des pouvoirs qui m’ont été délégués en vertu des dispositions de l’article 63(3) de la Loi, et conformément aux dispositions de l’article 38(12) de la Loi, je rejette la demande à l’égard des services suivants :

(2) Services de consultation et de conseil financiers, nommément services de consultation en analyse financière; conseils en placement; consultation en placement; services financiers, nommément services de gestion de patrimoine; services de courtage d’assurance; services de fiducie, nommément services de société de placement et de société de fiducie; services d’information et de conseil financiers, nommément prévisions financières; services de courtage en investissement financier; gestion financière; services d’analyse de portefeuilles; services de recherche et d’information financières, nommément services d’analyse et de recherche financières; planification financière; services de financement d’entreprises, nommément consultation dans le domaine de la structure du capital; services de financement d’entreprises, nommément consultation dans le domaine de la vente d’actifs

et je rejette l’opposition fondée sur l’article 38(12) de la Loi à l’égard des services suivants :

(1) Services de placement dans des fonds de capital d’investissement.

 

Céline Tremblay

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

 

Traduction certifiée conforme

Crystal Simard

 

Le français est conforme aux WCAG.


COMMISSION DES OPPOSITIONS DES MARQUES DE COMMERCE

OFFICE DE LA PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE DU CANADA

COMPARUTIONS ET AGENTS INSCRITS AU DOSSIER

___________________________________________________

DATE DE L’AUDIENCE Aucune audience n’a été tenue

AGENTS AU DOSSIER

Yuri Chumak

Pour l’Opposante

Deeth Williams Wall LLP

Pour la Requérante

 

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