Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

THE REGISTRAR OF TRADEMARKS

Référence : 2022 COMC 125

Date de la décision : 2022-06-29

[TRADUCTION CERTIFIÉE,

NON RÉVISÉE]

DANS L’AFFAIRE DE L’OPPOSITION

 

Eggsmith Ltd.

Opposante

et

 

10X Innovation GmbH & Co. KG

Requérante

 

1,886,330 pour WKUP

Demande

Aperçu

[1] 10X Innovation GmbH & Co KG (la Requérante) a fait la demande pour enregistrer la marque de commerce WKUP (la Marque) en liaison avec les produits suivants :

Café; café aromatisé; café décaféiné; café instantané; café moulu; mélanges de café; café de malt; café au chocolat; extraits de café; concentrés de café; succédané de café; capsules de café; essences de café; café glacé; cacao; thé; expresso; boissons non alcoolisées à base de café; boissons non alcoolisées à base d’expresso; boissons non alcoolisées à base de thé. (les Produits)

[2] Eggsmith Ltd. (l’Opposante) s’oppose à la demande sur la base de confusion présumée avec sa marque de commerce déposée WKAE UP qui couvre le café et le thé, entre autres produits et services.

[3] Pour les raisons qui suivent, la demande est rejetée, puisque la Requérante ne s’est pas acquittée de son fardeau ultime de démontrer qu’il n’y a aucune probabilité de confusion entre la Marque et la marque de commerce déposée de l’Opposante.

Le dossier

[4] La demande no 1,866,330 (la Demande) a été produite le 6 mars 2018 et revendique une priorité par rapport à une demande correspondante produite en Allemagne le 12 décembre 2017. La Demande est fondée sur l’emploi projeté de la Marque au Canada en liaison avec les Produits.

[5] La Demande a été annoncée aux fins d’opposition dans le Journal des marques de commerce le 24 juillet 2019. Le 24 septembre 2019, l’Opposante a produit une déclaration d’opposition à l’encontre de la Demande en vertu de l’article 38 de la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, c T-13 (la Loi). Je note que la Loi a été modifiée le 17 juin 2019. Puisque la Demande en l’espèce a été annoncée après le 17 juin 2019, la Loi dans sa version modifiée s’applique (voir l’article 69.1 de la Loi).

[6] L’Opposante soulève des motifs d’opposition fondés sur l’enregistrabilité en vertu de l’article 12(1)d), le droit à l’enregistrement en vertu des articles 16(1)a) et b), le caractère distinctif en vertu de l’article 2 et la non-conformité à l’article 38(2)f) de la Loi. Chacun des motifs d’opposition dépend d’une probabilité de confusion présumée avec la marque de commerce déposée WKAE UP de l’Opposante (LMC1,024,301). L’enregistrement de l’Opposante a été accordé le 10 juin 2019 et couvre les produits et services suivants :

Produits

(1) Grandes tasses; gobelets; tasses; soucoupes.

(2) Café; thé.

Services

(1) Services de restaurant; services de sandwicherie; services de traiteur; services de plats à emporter.

[7] La Requérante a produit une contre-déclaration réfutant les motifs d’opposition.

[8] Seule la Requérante a produit une preuve dans la procédure, à savoir l’affidavit d’Abbas Ali Kassam, exécuté le 21 juillet 2020 (l’Affidavit Kassam). L’Affidavit Kassam est composé des détails d’enregistrements et de demandes obtenus de la base de données des marques de commerce de l’Office de la propriété intellectuelle du Canada. Cette preuve de l’état du registre est abordée dans l’analyse des motifs d’opposition ci-dessous.

[9] Aucune des parties n’a produit d’observations écrites et aucune audience n’a été tenue.

Fardeau de preuve

[10] C’est à la Requérante qu’incombe le fardeau ultime de démontrer que la Demande est conforme aux exigences de la Loi. Il incombe toutefois à l’Opposante de s’acquitter du fardeau initial de présenter une preuve admissible suffisante pour permettre de conclure raisonnablement à l’existence des faits allégués au soutien de chacun de ses motifs d’opposition. Une fois que l’Opposante s’est acquittée de ce fardeau de preuve initial, la Requérante doit convaincre le registraire, selon la prépondérance des probabilités, que les motifs d’opposition plaidés ne devraient pas faire obstacle à l’enregistrement de la Marque [John Labatt Ltd c Molson Companies Ltd (1990), 30 CPR (3d) 293 (CF 1re inst), à la p. 298; Dion Neckwear Ltd c Christian Dior, SA (2002) 20 CPR (4th) 155 (CAF)].

Analyse

Motifs d’opposition sommairement rejetés – articles 2, 16(1)a) et 16(1)b)

[11] L’Opposante n’a produit aucun élément de preuve relatif à l’emploi de sa marque de commerce WKAE UP. Par conséquent, il n’y a aucune preuve versée au dossier qui permet à l’Opposante de s’acquitter de son fardeau de preuve initial pour les motifs d’opposition fondés sur l’article 2 et l’article 16(1)a). En conséquence, les motifs d’opposition fondés sur les articles 2 et 16(1)a) sont rejetés.

[12] En ce qui a trait au motif d’opposition fondé sur l’article 16(1)b), l’Opposante, dans sa déclaration d’opposition, invoque sa demande produite antérieurement pour la marque de commerce WKAE UP, laquelle est éventuellement devenue l’enregistrement no LMC1,024,301. Cependant, la demande a abouti à l’enregistrement le 10 juin 2019 et n’était donc plus pendante le 24 juillet 2019, lorsque la Demande de la Requérante a été annoncée. Par conséquent, en vertu de l’article 16(2) de la Loi, l’Opposante n’est pas autorisée à invoquer sa demande produite antérieurement pour un motif d’opposition fondé sur l’article 16(1)b). Le motif d’opposition fondé sur l’article 16(1)b) est donc rejeté. L’allégation de confusion de l’Opposition sera plutôt analysée dans le cadre de son motif d’opposition fondé sur l’article 12(1)d), abordé ci-dessous.

Motif d’opposition fondé sur l’article 12(1)d)

[13] L’Opposante plaide que la Marque n’est pas enregistrable parce qu’elle crée de la confusion avec la marque de commerce déposée de l’Opposante, WKAE UP (LMC1,024,301). La date pertinente pour ce motif d’opposition est la date de ma décision [voir Park Avenue Furniture Corporation c Wickes/Simmons Bedding Ltd et Le Registraire des marques de commerce (1991), 37 CPR (3d) 413 (CAF)]. J’ai exercé mon pouvoir discrétionnaire pour consulter le registre et confirmer que l’enregistrement de l’Opposante existe toujours [voir Quaker Oats Co of Canada c Menu Foods Ltd (1986), 11 CPR (3d) 410 (COMC)]. L’Opposante s’est donc acquittée de son fardeau initial en ce qui a trait à ce motif d’opposition. Par conséquent, la Requérante a le fardeau ultime de démontrer, selon la prépondérance des probabilités, qu’il n’y a aucune probabilité de confusion entre la Marque et la marque de commerce déposée de l’Opposante.

Test en matière de confusion

[14] Le test permettant de trancher la question de la confusion est énoncé à l’article 6(2) de la Loi, qui prévoit que l’emploi d’une marque de commerce crée de la confusion avec une autre marque de commerce lorsque l’emploi des deux marques de commerce dans la même région serait susceptible de faire conclure que les produits liés à ces marques de commerce sont fabriqués, vendus, donnés à bail ou loués, ou que les services liés à ces marques sont loués ou exécutés, par la même personne, que ces produits ou ces services soient ou non de la même catégorie générale ou figurent ou non dans la même classe de la classification de Nice. Aux fins de cette évaluation, je dois tenir compte de toutes les circonstances pertinentes de l’espèce, y compris celles énoncées à l’article 6(5) : le caractère distinctif inhérent des marques de commerce et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues; la période pendant laquelle les marques de commerce ont été en usage; le genre de produits, services ou entreprises; la nature du commerce; et le degré de ressemblance entre les marques de commerce dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’elles suggèrent.

[15] Ces critères ne sont pas exhaustifs et un poids différent sera accordé à différents facteurs selon le contexte [voir Veuve Clicquot Ponsardin c Boutiques Cliquot Ltée, 2006 CSC 23, 49 CPR (4th) 401; Mattel, Inc c 3894207 Canada Inc, 2006 CSC 22, [2006] 1 RCS 772, au para 54]. Je cite également Masterpiece Inc c Alavida Lifestyles Inc, 2011 CSC 27, 92 CPR (4th) 361, au para 49, où la Cour suprême du Canada déclare que l’article 6(5)e), la ressemblance entre les marques, aura souvent le plus grand effet dans l’analyse relative à la confusion.

[16] Le test en matière de confusion est évalué comme une question de la première impression dans l’esprit du consommateur ordinaire plutôt pressé à la vue de la marque du requérant, alors qu’il n’a qu’un vague souvenir des marques de commerce de l’opposant et qu’il ne s’arrête pas pour réfléchir à la question en profondeur, pas plus que pour examiner de près les ressemblances et les différences entre les marques [Veuve Clicquot, précité, au para 20].

Caractère distinctif inhérent des marques de commerce et mesure dans laquelle elles sont devenues connues

[17] La marque de commerce WKAE UP de l’Opposante possède un degré raisonnable de caractère distinctif inhérent. Bien qu’elle suggère l’expression « wake up », l’orthographe erronée du premier mot exige un certain niveau de gymnastique mentale de la part du lecteur, ce qui accorde à la marque de commerce un certain caractère distinctif inhérent. La Marque de la Requérante possède un degré semblable de caractère distinctif inhérent pour essentiellement la même raison.

[18] Aucune des parties n’a produit de preuve pour suggérer que leurs marques de commerce sont devenues connues dans une quelconque mesure au Canada.

[19] Dans ces circonstances, le facteur du caractère distinctif inhérent et acquis n’a pas une grande influence sur l’analyse de la confusion.

Durée d’emploi des marques de commerce

[20] Aucune des parties n’a produit de preuve d’emploi de leurs marques de commerce. Par conséquent, ce facteur ne favorise également aucune des parties.

Genre de produits, services ou entreprises; et nature du commerce

[21] L’enregistrement de l’Opposante couvre le café et le thé, entre autres produits et services. La Demande est en liaison avec divers produits de café et de thé. Il est évident qu’il y a un chevauchement direct dans le genre des produits et, en l’absence de preuve du contraire, j’estime que les voies de commercialisation seraient semblables. Ces facteurs favorisent l’Opposante.

Degré de ressemblance

[22] J’estime qu’il y a un degré raisonnablement élevé de ressemblance entre les marques de commerce des parties. En ce qui a trait à la présentation, les deux commencent par les mêmes deux lettres (WK) et se terminent par les mêmes deux lettres (UP). Bien qu’il puisse y avoir une légère différence dans le son des marques de commerce, j’estime que les deux auraient un son semblable à celui de l’expression « wake up » et que cette expression serait probablement l’idée communiquée par les deux. Le facteur du degré de ressemblance favorise l’Opposante.

Circonstance de l’espèce – état du registre

[23] Les demandes et les enregistrements de tiers compris dans l’affidavit Kassam sont établis dans les tableaux ci-dessous. Bien que la Requérante n’ait produit aucune observation écrite concernant cette preuve, présumément elle a été comprise dans l’intention de démontrer que les expressions « wake » ou « wake up » ont un emploi répandu au Canada en liaison avec les produits pertinents, de façon à ce que les consommateurs soient en mesure de distinguer les marques de commerce WKAE UP et WKUP des parties. La Requérante n’a produit aucune preuve d’emploi de ces marques de commerce de tiers dans le marché.

Marque de commerce

No de demande

WAKE UP & KICK ASS

1911873

WAKE AND BAKE COFFEE

1913657

WAKE AND BAKE

1913659

WAKE AND BAKE COFFEE CO.

1913662

WAKE-UP Logo

1989928

WAKE UP WITH US

1965726

 

Marque de commerce

No d’enregistrement

WAKE N BAKE

LMC1,075,685

WAKE UP YOUR MOUTH!

LMC746,286

WAKE UP ON A ROLL

LMC783,619

WAKE UP TO BREAKFAST

LMC796,422

WAKE

LMC1,060,514

WAKE UP A WINNER

LMC725,301

[24] La preuve au sujet de l’état du registre est pertinente dans la mesure où elles permettent de faire des déductions valables au sujet de la situation du marché [Ports International Ltd c Dunlop Ltd (1992), 41 CPR (3d) 432 (COMC); Del Monte Corporation c Welch Foods Inc (1992), 44 CPR (3d) 205 (CF)]. Les déductions concernant l’état du marché ne peuvent être tirées de ces éléments de preuve que si un grand nombre d’enregistrements pertinents sont trouvés [Kellogg Salada Canada Inc c Maximum Nutrition Ltd (1992), 43 CPR (3d) 349 (CAF); McDowell c Laverana GmbH & Co KG, 2017 CF 327, aux para 41 à 46]. Parmi les marques de commerce pertinentes, on compte celles qui (i) sont déposées ou autorisées et basées sur l’emploi; (ii) celles qui concernent des produits et services semblables à ceux des marques en cause et (iii) celles qui comprennent l’élément en tant qu’élément important [Sobeys West Inc c Schwan’s IP, LLC, 2015 COMC 197, au para 38, conf par 2017 CF 38; Allergan Inc c Lancôme Parfums & Beauté & Cie, société en nom collectif (2007), 64 CPR (4th) 147 (COMC), à la p. 169].

[25] Pour les raisons qui suivent, je n’estime pas que la preuve de l’état du registre appuie la Requérante dans un quelconque degré significatif en l’espèce.

[26] D’abord, des demandes pendantes énumérées dans l’Affidavit Kassam, une seule, la demande no 1,911,873, a été en bout de compte acceptée et a procédé à l’enregistrement, alors que les autres n’ont pas été approuvées (soit à la date de l’affidavit, soit à la date de cette décision). Peu importe, en ce qui a trait à la demande no 1,911,873, j’estime que la marque de commerce WAKE UP & KICK ASS communique une impression générale différente à celle des marques de commerce des parties en l’espèce.

[27] Deuxièmement, des enregistrements énumérés dans l’Affidavit Kassam, bon nombre ne couvrent pas des produits semblables à ceux en question dans cette procédure (ou, à tout le moins, les produits n’ont pas un degré aussi élevé de chevauchement que celui de la Demande et de l’enregistrement de l’Opposante). Par exemple, LMC746,286 pour WAKE UP YOUR MOUTH! couvre les produits « Grignotines à base de maïs, nommément croustilles au maïs », LMC783,619 pour WAKE UP ON A ROLL couvre les produits « Mets préparés » et LMC1,060,514 pour WAKE couvre divers aliments et boissons à base de fruits, mais pas de thé ou de café.

[28] Compte tenu de ce qui précède, et gardant à l’esprit que la Requérante n’a produit aucune preuve d’emploi véritable des marques de commerce de tiers, je n’estime pas que la preuve de l’état du registre de la Requérante soit suffisante pour conclure que les expressions « wake » ou « wake up » ont un emploi si répandu dans le marché canadien en liaison avec les produits pertinents que les consommateurs seraient facilement en mesure de distinguer les marques de commerce des parties en l’espèce.

Conclusion concernant le motif fondé sur l’article 12(1)d)

[29] Après avoir examiné toutes les autres circonstances de l’espèce, je conclus que la Requérante ne s’est pas acquittée de son fardeau ultime de démontrer qu’il n’y a aucune probabilité raisonnable de confusion entre les marques de commerce des parties. J’arrive à cette conclusion particulièrement compte tenu du degré de ressemblance entre les marques de commerce des parties et du chevauchement dans les produits et les services des parties.

[30] Le motif d’opposition fondé sur l’article 12(1)d) est donc accueilli.

Motif d’opposition fondé sur l’article 38(2)f)

[31] Avec ce motif d’opposition, l’Opposante fait valoir que la Requérante n’a pas le droit d’employer la Marque au Canada, puisqu’elle était consciente, ou aurait dû être consciente, des droits antérieurs de l’Opposante dans la marque de commerce WKAE UP.

[32] Comme il a été mentionné ci-dessus, puisque la Demande a été annoncée après le 17 juin 2019, la Loi telle que modifiée s’applique. Cependant, j’estime que la jurisprudence appliquant la Loi dans sa version antérieure au 17 juin 2019 (l’ancienne Loi) peut, dans certains cas, tout de même éclairer l’analyse de certains motifs d’opposition. Par exemple, avec un motif d’opposition fondé sur l’article 30i) de l’ancienne Loi, il est bien établi qu’une allégation qu’un requérant était conscient de la marque de commerce de l’opposant, ou aurait dû l’être, n’appuie pas en soi un motif d’opposition fondé sur cette disposition [voir Woot Inc c WootRestaurants Inc Les Restaurants Woot Inc, 2012 COMC 197]. J’estime que la jurisprudence relative à l’article 30i) de l’ancienne Loi est informative et devrait s’appliquer à l’article 38(2)f) de la Loi. Par conséquent, le motif d’opposition fondé sur l’article 38(2)f) est rejeté.

Décision

[33] Dans l’exercice des pouvoirs qui m’ont été délégués en vertu des dispositions de l’article 63(3) de la Loi, je rejette la Demande selon les dispositions de l’article 38(12) de la Loi.

 

Timothy Stevenson

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

 

 

Traduction certifiée conforme

William Desroches

 

Le français est conforme aux WCAG.


COMMISSION DES OPPOSITIONS DES MARQUES DE COMMERCE

OFFICE DE LA PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE DU CANADA

COMPARUTIONS ET AGENTS INSCRITS AU DOSSIER

___________________________________________________

DATE DE L’AUDIENCE : Aucune audience n’a été tenue

AGENTS AU DOSSIER

Gowling WLG (Canada) LLP

Pour l’Opposante

Ridout & Maybee LLP

Pour la Requérante

 

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