Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

THE REGISTRAR OF TRADEMARKS

Référence : 2022 COMC 141

Date de la décision : 2022-07-28

[TRADUCTION CERTIFIÉE,

NON RÉVISÉE]

DANS L’AFFAIRE DE L’OPPOSITION

 

Ever Young Dermatology

Opposante

et

 

Csaba Pölös

Requérant

 

1,696,398 pour EVERYOUNG

Demande

Aperçu

[1] Csaba Pölös (le Requérant) a produit une demande d’enregistrement pour la marque de commerce EVERYOUNG (la Marque). La demande, telle que modifiée, est pour l’emploi en liaison avec les produits suivants :

Produits de soins buccodentaires, nommément bain de bouche, dentifrice, gels pour les affections gingivales, nettoyants pour prothèses dentaires; parfumerie et huiles essentielles pour les soins capillaires et buccodentaires. (les Produits)

[2] Ever Young Dermatology (l’Opposante) s’oppose à la demande en raison de la confusion alléguée avec ses marques de commerce et ses noms commerciaux qui comprennent l’expression « EVER YOUNG », y compris la marque de commerce déposée EVER YOUNG DERMESTHETICS & Dessin (LMC765,356), reproduite ci-dessous.

EVER YOUNG DERMESTHETICS & Design

[3] L’Opposante exploite une clinique de dermatologie à Toronto et son enregistrement couvre des services dermatologiques cosmétiques et médicaux. Dans le cadre de son entreprise, l’Opposante vend également des produits de soins pour la peau portant sa marque de commerce.

[4] Pour les raisons qui suivent, la demande est rejetée puisque le Requérant ne s’est pas acquitté de son fardeau de démontrer qu’il n’y a pas une probabilité de confusion entre les marques de commerce des parties.

Le dossier

[5] La demande no 1,696,398 (la Demande) a été produite le 2 octobre 2014. La Demande est fondée sur l’emploi projeté de la Marque au Canada, ainsi que sur l’enregistrement de la Marque dans l’Union européenne conjointement avec l’emploi de la Marque en Hongrie, en Lituanie, en Irlande et en Espagne.

[6] La Demande a été annoncée aux fins d’opposition dans le Journal des marques de commerce le 4 octobre 2017. Le 27 février 2018, l’Opposante a produit une déclaration d’opposition à l’encontre de la Demande en vertu de l’article 38 de la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, c T-13 (la Loi). L’autorisation a subséquemment été accordée à l’Opposante pour produire une déclaration d’opposition modifiée en date du 7 septembre 2018 et une autre déclaration d’opposition modifiée en date du 19 octobre 2020.

[7] Je remarque que la Loi a été modifiée le 17 juin 2019 et, conformément à l’article 70 de la Loi, les motifs d’opposition en l’espèce seront évalués en fonction de la Loi dans sa version antérieure au 17 juin 2019.

[8] L’Opposante soulève les motifs d’opposition fondés sur l’enregistrabilité en vertu de l’article 12(1)d), le droit à l’enregistrement en vertu des articles 16(2)a) et c) et 16(3)a) et c), le caractère distinctif en vertu de l’article 2 et la non-conformité en vertu des articles 30a), d) e) et i) de la Loi.

[9] Le Requérant a produit une contre-déclaration réfutant les motifs d’opposition.

[10] La preuve de l’Opposante comprend l’affidavit de Mme Ingrid Jarvis, exécuté le 7 septembre 2018 (l’Affidavit Jarvis). Subséquemment dans la procédure, l’Opposante a reçu l’autorisation de produire un affidavit supplémentaire, à savoir l’affidavit de Catherine Eleanor Garrity Hart, exécuté le 19 octobre 2020 (l’Affidavit Hart). Ces deux affidavits feront l’objet de discussions ci-dessous. Aucune des déposantes n’a été contre-interrogée. Le Requérant a choisi de ne produire aucune preuve.

[11] Les deux parties ont produit des représentations écrites et ont été représentées à l’audience.

Fardeau de preuve et dates pertinentes

[12] C’est au Requérant qu’incombe le fardeau ultime de démontrer que la Demande est conforme aux exigences de la Loi. Il incombe toutefois à l’Opposante de s’acquitter du fardeau initial de présenter une preuve admissible suffisante pour permettre de conclure raisonnablement à l’existence des faits allégués au soutien de chacun de ses motifs d’opposition. Une fois que l’Opposante s’est acquittée de ce fardeau de preuve initial, le Requérant doit convaincre le registraire, selon la prépondérance des probabilités, que les motifs d’opposition plaidés ne devraient pas faire obstacle à l’enregistrement de la Marque [John Labatt Ltd c Molson Companies Ltd (1990), 30 CPR (3d) 293 (CF 1re inst), à la p 298; Dion Neckwear Ltd c Christian Dior, SA et al, (2002) 20 CPR (4th) 155 (CAF)].

[13] Les dates pertinentes relatives aux motifs d’opposition sont les suivantes :

· articles 38(2)a) et 30 – la date de production de la Demande [Georgia-Pacific Corp c Scott Paper Ltd (1984), 3 CPR (3d) 469 (COMC), à la p 475];

· articles 38(2)b) et 12(1)d) – la date de ma décision [Park Avenue Furniture Corporation c Wickes/Simmons Bedding Ltd et Le registraire des marques de commerce (1991), 37 CPR (3d) 413 (CAF)];

· articles 38(2)c), 16(2)a) et c) et 16(3)a) et c) – la date de production de la Demande;

· articles 38(2)d) et 2 – la date de production de l’opposition [Metro-Goldwyn-Mayer Inc c Stargate Connections Inc, 2004 CF 1185, 34 CPR (4th) 317 (CF)].

Preuve

L’Affidavit Jarvis

[14] Mme Jarvis est une dermatologue autorisée par l’Ordre des médecins et chirurgiens de l’Ontario et le Collège royal des médecins et chirurgiens du Canada. Elle exerce le métier de dermatologue depuis 1983. De 1992 à 2005, elle a exploité sa pratique de dermatologie en association avec sa mère, Mme Anita Jarvis. De 2005 (lorsque sa mère a pris sa retraite) à 2013, Mme Jarvis a exploité la pratique à titre de praticienne unique. De 2013 à aujourd’hui, Mme Jarvis a poursuivi la pratique par l’entremise d’une société ontarienne (Dr Ingrid Jarvis Medicine Professional Corporation) ayant comme nom d’entreprise Ever Young Dermatology. C’est cette société ontarienne ayant le nom d’entreprise Ever Young Dermatology qui est l’Opposante dans cette procédure.

[15] Aux fins de commodité, je ferai référence à la pratique susmentionnée, dans ses diverses formes au fil des années, par la « clinique ».

[16] Mme Jarvis décrit que depuis 1992, la clinique a offert et annoncé des services dermatologiques cosmétiques et médicaux sous les marques de commerce et les noms EVER YOUNG, EVER YOUNG DERMESTHETICS (marque figurative et nominale) et EVER YOUNG DERMATOLOGY (marque figurative et nominale). Aux paragraphes 9 et 10 de l’affidavit, Mme Jarvis décrit la chaîne de titres à l’égard de ces marques de commerce qui appartiennent maintenant à l’Opposante. Le Requérant n’a pas contesté cette chaîne de titres et je ne vois rien dans la preuve qui permet de le faire. En abordant les marques de commerce de l’Opposante, je me concentrerai principalement sur la marque de commerce EVER YOUNG DERMESTHETICS & Dessin, laquelle est l’objet de l’enregistrement LMC765,356 de l’Opposante, puisqu’elle semble être la variante la plus fréquemment employée des marques de commerce de l’Opposante. À titre d’exemple, la Pièce « 20 » de l’Affidavit Jarvis est une photo de la porte de la clinique de l’Opposante arborant la marque de commerce EVER YOUNG DERMESTHETICS & Dessin.

[17] Mme Jarvis affirme que les services disponibles à la clinique sont composés de services dermatologiques cosmétiques et médicaux, y compris de la dermatologie cosmétique, de la dermatologie médicale et des opérations chirurgicales dermatologiques. Elle indique que ces services concernent tous les aspects de la peau et des maladies de celle-ci et abordent également le vieillissement de la peau et les soins de la peau. Les services comprennent des conseils et de l’éducation en matière de soins de beauté pour le visage et le corps, pour les cheveux, pour l’hygiène orale et pour le nettoyage de la peau. Ces services sont offerts par des médecins autorisés. L’Opposante vend également des huiles essentielles et des produits comme sérums, des cires, des gels pour les yeux et des désincrustants. Depuis 1992, la clinique a offert des services éducatifs au sujet des soins de beauté, du bien-être personnel et de l’hygiène.

[18] En 1992, la mère de Mme Jarvis a créé, et la clinique a commencé à vendre, une gamme de produits cosmétiques et esthétiques en liaison avec la marque de commerce EVER YOUNG Dermesthetics. Des exemples d’emballages pour ces produits à divers points entre 1992 et 2018 sont inclus à titre de Pièce « 19 » à l’Affidavit Jarvis. Les exemples d’emballages portent tous la marque de commerce EVER YOUNG Dermesthetics soit en forme nominale, soit en forme figurative. Des exemples de factures pour la vente de ces produits pour chacune des années de 2013 à 2017 sont inclus à titre de Pièce « 18 » à l’Affidavit Jarvis. Dans la partie principale des factures, les produits sont identifiés par [traduction] « GEL HYDRATANT EVER YOUNG » et [traduction] « CRÈME HYDRATANTE EVERYOUNG ».

[19] L’Opposante a annoncé sa clinique en liaison avec ses marques de commerce d’un large éventail de façons. Le principal site Web de l’Opposante à ingridjarvis.com arbore les marques de commerce de l’Opposante, y compris la marque de commerce EVER YOUNG DERMESTHETICS & Dessin (voir la Pièce « 9 ») et l’Affidavit Jarvis comprend des données sur le nombre annuel de visiteurs et de visionnements de pages pour ce site Web de 2015 à 2018. L’Opposante a également annoncé sa clinique en ligne au moyen de Google Ads, en format imprimé au moyen du journal Etobicoke Guardian et du répertoire Kingsway Business Directory, en personne au moyen de kiosques dans un festival local et par la distribution d’articles promotionnels comme des aimants de réfrigérateurs. Des exemples de telles annonces de la période de 2009 à 2013, chacun arborant la marque de commerce EVER YOUNG DERMESTHETICS & Dessin, sont inclus aux Pièces « 13 » et « 15 ».

[20] Au paragraphe 35 de son affidavit, Mme Jarvis affirme qu’elle n’est au courant d’aucun emploi de la marque de commerce EVERYOUNG par le Requérant et la Pièce « 22 » comprend les résultats de recherches en ligne à cet égard qui n’ont trouvé aucune preuve d’emploi.

[21] Je note que, aux paragraphes 41 à 46 de son affidavit, Mme Jarvis fournit des opinions sur les divers facteurs relatifs à la probabilité de confusion entre les marques de commerce des parties en l’espèce. Je n’ai accordé aucun poids à ces opinions, puisque la déposante n’est pas une partie désintéressée et ses opinions ne sont pas nécessaires pour résoudre l’affaire.

L’Affidavit Hart

[22] Mme Hart est une associée au sein de l’agent de l’Opposante. Au paragraphe 41 de son affidavit, elle indique que [traduction] « J’ai employé divers outils de recherche, y compris Google et Yahoo, pour rechercher l’emploi de la Marque de commerce par le Requérant. Je n’ai trouvé aucun emploi de la Marque de commerce à un quelconque endroit dans le monde par le Requérant ». Je note que cette partie particulière de l’Affidavit Hart est semblable en contenu aux déclarations au paragraphe 35 de l’Affidavit Jarvis, bien que les recherches de Mme Hart aient été menées il y a un peu moins de deux ans après celles de Mme Jarvis. Je discuterai de cette preuve de façon plus détaillée dans l’analyse des motifs d’opposition ci-dessous.

[23] Les paragraphes 2 à 40 de l’Affidavit Hart comprennent un large éventail de déclarations de la part de Mme Hart concernant des publications de tiers et des entreprises selon les renseignements qu’elle a trouvés en ligne. En général, ces paragraphes de l’Affidavit Hart semblent être destinés à démontrer la portée des produits de soins personnels offerts au Canada par certaines tierces entreprises en fonction de l’examen par Mme Hart de sites Web de tiers, lesquels sont joints à titre de pièces à son affidavit.

[24] Je reconnais que dans certains cas il peut être nécessaire qu’une partie produise des preuves concernant l’état du marché qui sont obtenues par un membre de la société d’agents représentant la partie. Cependant, habituellement dans ces circonstances, les faits particuliers attestés par le déposant seront limités à la description de la nature de toute recherche menée et de toute page Web retrouvée. J’estime que les commentaires supplémentaires aux paragraphes 2 à 40 de l’Affidavit Hart concernant l’activité alléguée de tierces entreprises constituent des ouï-dire et invitent la considération de certains des facteurs abordés par la Cour fédérale d’appel dans Cross-Canada Auto Body Supply (Windsor) Ltd c Hyundai Auto Canada, 2006 CAF 133, 53 CPR (4th) 286. Dans ces circonstances, et puisque j’estime qu’aucun fait n’est contenu aux paragraphes 2 à 40 de l’Affidavit Hart qui est nécessaire pour résoudre cette opposition, par excès de prudence je n’ai accordé aucun poids à ces paragraphes.


Analyse des motifs d’opposition

Motif d’opposition fondé sur l’article 12(1)d)

[25] L’Opposante fait valoir que la Marque n’est pas enregistrable puisqu’elle crée de la confusion avec la marque de commerce déposée EVER YOUNG DERMESTHETICS & Dessin (LMC765,356) de l’Opposante reproduite ci-dessus. J’ai exercé mon pouvoir discrétionnaire pour consulter le registre et confirmer que cet enregistrement existe toujours [voir Quaker Oats Co of Canada c Menu Foods Ltd (1986), 11 CPR (3d) 410 (COMC)]. L’Opposante s’est donc acquittée de son fardeau de preuve initial à l’égard du motif d’opposition fondé sur l’article 12(1)d). Par conséquent, le Requérant a le fardeau ultime de démontrer, selon la prépondérance des probabilités, qu’il n’y a aucune probabilité de confusion entre la Marque et la marque de commerce déposée de l’Opposante.

Test en matière de confusion

[26] Le test permettant de trancher la question de la confusion est énoncé à l’article 6(2) de la Loi, qui prévoit que l’emploi d’une marque de commerce crée de la confusion avec une autre marque de commerce lorsque l’emploi des deux marques de commerce dans la même région serait susceptible de faire conclure que les produits liés à ces marques de commerce sont fabriqués, vendus, donnés à bail ou loués, ou que les services liés à ces marques sont loués ou exécutés, par la même personne, que ces produits ou ces services soient ou non de la même catégorie générale ou figurent ou non dans la même classe de la classification de Nice. En faisant une telle évaluation, je dois également tenir compte de toutes les circonstances de l’espèce pertinentes, y compris celles énoncées à l’article 6(5) de la Loi : le caractère distinctif inhérent des marques de commerce et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues; la période pendant laquelle les marques de commerce ont été en usage; le genre de produits, services ou entreprises; la nature du commerce; et le degré de ressemblance entre les marques de commerce dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’elles suggèrent.

[27] Ces critères ne sont pas exhaustifs et un poids différent sera accordé à différents facteurs selon le contexte [voir Veuve Clicquot Ponsardin c Boutiques Cliquot Ltée, 2006 CSC 23, 49 CPR (4th) 401; Mattel, Inc c 3894207 Canada Inc, 2006 CSC 22, [2006] 1 RCS 772, au para 54].

[28] Le test en matière de confusion est évalué comme une question de la première impression dans l’esprit du consommateur ordinaire plutôt pressé à la vue de la marque du requérant, alors qu’il n’a qu’un vague souvenir des marques de commerce de l’opposant et qu’il ne s’arrête pas pour réfléchir à la question en profondeur, pas plus que pour examiner de près les ressemblances et les différences entre les marques [Veuve Clicquot, précité, au para 20]. De plus, lorsqu’il est probable que le public présumera que les produits du requérant sont approuvés, autorisés ou appuyés par l’opposant, de sorte qu’il existe un état de doute et d’incertitude dans l’esprit de la clientèle, il s’ensuit que les marques de commerce créent de la confusion [voir Glen-Warren Productions Ltd c Gertex Hosiery Ltd (1990), 29 CPR (3d) 7 (CF 1re inst), au para 21].

Degré de ressemblance

[29] Dans Masterpiece Inc c Alavida Lifestyles Inc, 2011 CSC 27, 92 CPR (4th) 361, au para 49, la Cour suprême du Canada déclare que l’article 6(5)e), sur la ressemblance entre les marques, aura souvent le plus grand effet dans l’analyse relative à la confusion. Je commencerai en évaluant ce facteur.

[30] Dans l’évaluation du degré de ressemblance, il est préférable de déterminer s’il y a un aspect de chaque marque de commerce qui est « particulièrement frappant ou unique » [Masterpiece, précité, au paragraphe 64]. L’élément frappant de la marque de commerce de l’Opposante est l’expression « EVER YOUNG ». J’estime que l’expression « dermesthetics », en raison de son positionnement dans la marque de commerce et étant écrit dans une police plus petite, est un aspect secondaire de la marque de commerce de l’Opposante plutôt que d’être l’élément le plus frappant. Bien que l’expression « dermesthetics » ne soit pas un mot du dictionnaire français ou anglais, l’expression est malgré tout hautement suggestive de produits et de services esthétiques relatifs à la peau. Je n’estime pas que l’aspect figuratif de la marque de commerce de l’Opposante soit un élément frappant ou unique compte tenu de sa simplicité et de son emplacement au sein de la marque de commerce dans son ensemble.

[31] La Marque du Requérant est composée uniquement du mot EVERYOUNG et est donc essentiellement identique à l’aspect frappant de la marque de commerce de l’Opposante.

[32] Le facteur du degré de ressemblance favorise fortement l’Opposante.


 

Caractère distinctif inhérent des marques de commerce et mesure dans laquelle elles sont devenues connues

[33] Bien qu’elle ne soit pas sans aucun caractère distinctif inhérent, la marque de commerce de l’Opposante possède un faible degré de caractère distinctif inhérent, puisqu’elle suggère des services conçus pour conserver l’apparence du destinataire [traduction] « éternellement jeune ». La Marque du Requérant en liaison avec les Produits possède un faible degré semblable de caractère distinctif inhérent pour essentiellement la même raison.

[34] Cependant, lorsqu’il est question d’évaluer la mesure dans laquelle les marques de commerce des parties sont devenues connues, cette considération favorise l’Opposante. La preuve de l’Opposante indique que sa marque de commerce est continuellement employée depuis 1992. Bien que l’Opposante n’ait fourni aucun chiffre de ventes annuelles, elle a malgré tout fourni la preuve que la clinique de l’Opposante est exploitée continuellement depuis 1992 en liaison avec la marque de commerce de l’Opposante et l’Opposante a fourni des exemples d’un large éventail de publicités au cours de cette période en liaison avec la marque de commerce. En revanche, il n’y a aucune preuve au dossier que la Marque du Requérant a été employée ou est devenue connue d’une quelconque façon au Canada.

[35] Je note que dans son plaidoyer écrit, le Requérant affirme que la preuve de l’Opposante n’est pas suffisante pour démontrer que la marque de commerce de l’Opposante possède un [traduction] « caractère distinctif acquis » conformément à MC Imports Inc c AFOD Ltd, 2016 CAF 60, au para 81. Cependant, cette partie de MC Imports concernait la suffisance de la preuve de caractère distinctif acquis pour une marque de commerce qui a été jugée comme étant clairement descriptive en vertu de l’article 12(1)b) de la Loi. Ce n’est pas la circonstance en l’espèce. Comme il a été souligné ci-dessus, j’estime que les marques de commerce des deux parties en l’espèce possèdent à tout le moins une parcelle de caractère distinctif inhérent.

[36] Dans ces circonstances, en tenant compte à la fois du caractère distinctif inhérent des marques de commerce des parties et de la mesure dans laquelle elles sont devenues connues, ce facteur favorise l’Opposante.

Durée d’emploi des marques de commerce

[37] Comme il a été remarqué ci-dessus, la preuve de l’Opposante indique que l’Opposante et ses prédécesseurs emploient la marque de commerce EVER YOUNG DERMESTHETICS & Dessin au Canada depuis 1992. Il n’y a aucune preuve d’un quelconque emploi de la Marque du Requérant. Par conséquent, ce facteur favorise également l’Opposante.

Genre de produits, services ou entreprises; et nature du commerce

[38] Puisque chacun des autres facteurs législatifs favorise l’Opposante, le résultat de l’analyse de la confusion dépend essentiellement de la question de savoir si les Produits énumérés dans la Demande, ainsi que leurs voies de commercialisation probables, sont suffisamment différents des Services dans l’enregistrement de l’Opposante pour éviter une conclusion de confusion. Pour les raisons suivantes, je conclus qu’ils ne le sont pas.

[39] Lors de l’examen des produits et services des parties, c’est l’état déclaratif des produits et services dans la demande et l’enregistrement de marques de commerce des parties qui régissent l’analyse [voir Mr Submarine Ltd c Amandista Investments Ltd (1987), 19 CPR (3d) 3 (CAF); et Miss Universe Inc c Bohna (1994), 58 CPR (3d) 381 (CAF)]. Ces déclarations doivent être lues de manière à déterminer la nature probable de l’entreprise ou du commerce envisagé par les parties plutôt que tous les commerces possibles qui pourraient être compris dans la formulation. À cet égard, une preuve de la nature véritable des commerces des parties peut être utile, en particulier lorsqu’il existe une ambiguïté quant aux produits ou services visés par la demande ou l’enregistrement en cause [McDonald’s Corp c Coffee Hut Stores Ltd (1996), 68 CPR (3d) 168 (CAF); Procter and Gamble Inc c Hunter Packaging Ltd (1999), 2 CPR (4th) 266 (COMC)].

[40] L’enregistrement de l’Opposante couvre les services « Services dermatologiques de nature cosmétique et médicale » et la preuve de l’Opposante de son emploi de sa marque de commerce correspond à cette description. En particulier, l’Opposante exploite une clinique à Toronto qui offre des services de dermatologie cosmétique, de dermatologie médicale et d’opérations chirurgicales dermatologiques et abord divers aspects de la peau, des soins de la peau et des maladies de celle-ci. Dans le cadre de sa clinique, l’Opposante fournit également des conseils et de l’éducation à l’égard des soins de beauté pour le visage et le corps, pour les cheveux, pour l’hygiène orale et pour le nettoyage de la peau et elle vend un large éventail de produits de beauté connexes, y compris des produits de soins de la peau marqués avec la marque de commerce de l’Opposante. Bien que ces services et ces produits auxiliaires ne soient pas inscrits dans l’enregistrement de l’Opposante, je n’estime pas qu’il soit inhabituel qu’une entreprise comme l’Opposante offrant des services dermatologiques cosmétiques et médicaux offre également des conseils en soins personnels et vende des produits de soins de la peau.

[41] Les Produits énumérés dans la Demande ne chevauchent pas directement les services de l’Opposante, toutefois les Produits dans la Demande correspondent tout de même à la catégorie générale des produits de soins personnels. Par exemple, des articles comme « parfumerie et huiles essentielles pour les soins capillaires et buccodentaires » semblent à mes yeux être des produits qui pourraient bien être vendus par des entreprises d’esthétique semblables en genre à celle de l’Opposante.

[42] Notamment, le Requérant n’a produit aucune preuve pour clarifier le genre de son entreprise et les voies de commercialisation probables par lesquelles ses produits seraient vendus.

[43] Dans ces circonstances, dans le meilleur des cas pour le Requérant, j’estime que les facteurs des articles 6(5)c) et d) favorisent le Requérant, mais seulement à un léger degré. Compte tenu de la mesure dans laquelle les autres facteurs législatifs favorisent l’Opposante, je n’estime pas que les facteurs relatifs aux articles 6(5)c) et d) sont suffisants pour permettre au Requérant d’éviter une conclusion de confusion.

Conclusion concernant le motif fondé sur l’article 12(1)d)

[44] Après avoir examiné toutes les circonstances de l’espèce, je conclus que le Requérant ne s’est pas acquitté de son fardeau ultime de démontrer qu’il n’y a aucune probabilité raisonnable de confusion entre les marques de commerce des parties. J’arrive à cette conclusion particulièrement à la lumière du degré élevé de ressemblance entre les marques de commerce des parties, de la période d’emploi de la marque de commerce de l’Opposante et de l’absence d’une quelconque preuve du Requérant concernant le genre de son entreprise et les voies de commercialisation probables. Le motif d’opposition fondé sur l’article 12(1)d) invoquant l’enregistrement no LMC765,356 de l’Opposante est donc accueilli.

[45] Je note que l’Opposante, dans sa déclaration d’opposition, a également soulevé un motif d’opposition fondé sur l’article 12(1)d) fondé sur l’enregistrement d’un tiers, à savoir LMC784,49 pour les marques de commerces FACES EVER YOUNG (& DESSIN) appartenant à Faces Cosmetics Inc. Cet enregistrement a fait l’objet d’une procédure en vertu de l’article 45 de la Loi, entamée par l’Opposante, qui a entraîné la décision de cette Commission de radier l’enregistrement [voir Ever Young Dermatology c Faces Cosmetics Inc, 2022 COMC 103]. Le délai pour interjeter appel pour cette décision a récemment expiré. Cependant, peu importe le statut de cette procédure en vertu de l’article 45, je n’estime pas qu’il soit nécessaire d’aborder le motif d’opposition fondé sur l’article 12(1)d) de l’Opposante invoquant LMC784,449, puisque je suis déjà arrivé à une conclusion en faveur de l’Opposante à l’égard du motif d’opposition fondé sur l’article 12(1)d) invoquant LMC765,356.

Motifs d’opposition fondés sur les articles 16(2) et 16(3)

[46] Avec ses motifs d’opposition fondés sur l’absence de droit à l’enregistrement en vertu des articles 16(2)a) et 16(3)a) de la Loi, l’Opposante invoque non seulement son emploi antérieur de la marque de commerce déposée EVER YOUNG DERMESTHETICS & Dessin, mais également l’emploi antérieur des marques figuratives non enregistrées EVER YOUNG DERMESTHETICS et EVER YOUNG. De plus, l’Opposante invoque son emploi de ces marques de commerce non seulement en liaison avec les services dermatologiques cosmétiques et médicaux inscrits dans LMC765,356, mais également en liaison avec les services [traduction] « services d’éducation concernant les soins de beauté et esthétiques, le bien-être personnel et l’hygiène » et les produits [traduction] « produits cosmétiques, préparations et produits pour emploi dans les soins de beauté et esthétiques pour le visage et le corps et préparations de soins capillaires ».

[47] Avec ses motifs d’opposition fondés sur l’absence de droit à l’enregistrement en vertu des articles 16(2)c) et 16(3)c), l’Opposante invoque l’emploi antérieur des noms commerciaux EVER YOUNG DERMESTHETICS et EVER YOUNG.

[48] Afin de s’acquitter de son fardeau de preuve initial concernant les motifs d’opposition fondés sur l’absence de droit à l’enregistrement, l’Opposante doit démontrer l’emploi de ses marques de commerce et de ses noms commerciaux avant la date de production de la Demande, à savoir le 2 octobre 2014. J’estime que l’Opposante s’est amplement acquittée de ce fardeau de preuve initial. En particulier, la preuve de l’Opposante démontre l’emploi depuis 1992 à tout le moins de la marque de commerce EVER YOUNG DERMESTHETICS & Dessin en liaison avec les services dermatologiques cosmétiques et médicaux, ainsi qu’en liaison avec des produits de soins de la peau. De plus, j’estime que la preuve de l’Opposante (particulièrement les Pièces « 18 » et « 19 » à l’Affidavit Jarvis) démontre également l’emploi de la marque de commerce EVER YOUNG en liaison avec des produits de soins de la peau depuis avant la date pertinente. J’estime également que l’Opposante a démontré l’emploi de son nom commercial EVER YOUNG DERMESTHETICS depuis avant la date pertinente (par exemple, voir les Pièces « 16 » et « 20 » à l’Affidavit Jarvis). J’estime qu’il n’y a aucune preuve pour suggérer que l’Opposante avait abandonné ces marques de commerce ou ces noms commerciaux à la date de l’annonce de la Demande.

[49] Le fardeau ultime revient alors au Requérant de démontrer que, selon la prépondérance des probabilités, il n’y avait aucune probabilité de confusion entre les marques de commerce et le nom commercial de l’Opposante et la Marque en date du 2 octobre 2014. Pour essentiellement les mêmes raisons que celles établies dans mon analyse du motif d’opposition fondé sur l’article 12(1)d), j’estime que le Requérant ne s’est pas acquitté de ce fardeau ultime. En effet, en particulier avec les motifs d’opposition fondés sur les articles 16(2)a) et 16(3)a), lesquels sont fondés sur l’emploi antérieur des marques de commerce de l’Opposante en liaison avec non seulement des services dermatologiques cosmétiques et médicaux, mais également avec des produits de soins de la peau, la position de l’Opposante est encore plus robuste qu’à l’égard de son motif d’opposition fondé sur l’article 12(1)d).

[50] Compte tenu de ce qui précède, les motifs d’opposition fondés sur les articles 16(2)a) et c) et 16(3)a) et c) sont tous accueillis.

Motif d’opposition fondé sur l’article 2

[51] Puisque j’ai déjà conclu en faveur de l’Opposante à l’égard des motifs d’opposition fondés sur les articles 12(1)d), 16(2)a) et c) et 16(3)a) et c), tous dépendant de la question de confusion, je n’estime pas qu’il soit nécessaire d’évaluer le motif d’opposition fondé sur l’article 2.

Motifs d’opposition fondés sur l’article 30

[52] J’aborderai les motifs d’opposition fondés sur l’article 30 puisqu’ils sont distincts sur le plan conceptuel des motifs fondés sur la confusion dont il a été question ci-dessus, toutefois je le ferai seulement brièvement, puisque j’ai déjà conclu en faveur de l’Opposante à l’égard des motifs fondés sur l’enregistrabilité et le droit à l’enregistrement qui, à eux seuls, sont suffisants pour résoudre cette procédure.

Article 30a)

[53] L’Opposante affirme que la Demande n’est pas conforme à l’article 30a) de la Loi, puisque les descriptions des Produits ne sont pas dans les termes ordinaires du commerce. L’Affidavit Jarvis contient diverses déclarations concernant le manque présumé de spécificité des termes employés pour décrire les produits et le plaidoyer écrit de l’Opposante comprend des arguments à cet effet. Je note que la description des produits dans la Demande a été révisée à sa forme actuelle après que l’Affidavit Jarvis ait été produit, mais cela n’a eu aucune incidence sur le résultat ultime de ce motif.

[54] J’estime que la façon dont les Produits sont décrits ne contrevient pas à l’article 30a). Des descriptions comme « pâte dentifrice », « bain de bouche », « préparation pour le nettoyage des prothèses dentaires », « parfumerie », « huiles essentielles à usage personnel » et « gel dentaire » sont toutes incluses parmi la liste de descriptions acceptables dans le Manuel des produits et des services de l’Office de la propriété intellectuelle du Canada. J’estime que la description des Produits dans la Demande est de spécificité semblable ou équivalente à celle des descriptions acceptables susmentionnées. Le motif d’opposition fondé sur l’article 30a) est donc rejeté.

Article 30d)

[55] L’Opposante affirme que la Marque n’était pas employée par le Requérant à la date de production dans les pays indiqués dans la Demande, à savoir la Hongrie, la Lituanie, l’Irlande et l’Espagne. À cet égard, l’Affidavit Jarvis et l’Affidavit Hart comprennent la preuve que les déposants n’ont pas réussi à trouver des exemples en ligne d’emploi de la Marque par le Requérant. Cependant, je n’estime pas que cette preuve soit suffisante pour permettre à l’Opposante de s’acquitter de son fardeau de preuve initial en vertu de l’article 30d) pour au moins la raison que les Produits spécifiés par la demande n’auraient pas nécessairement été annoncés ou vendus en ligne. Je note également que l’Opposante plaide que la Demande n’est pas conforme à l’article 30d), puisque le Requérant n’est pas le propriétaire de l’enregistrement de l’Union européenne correspondant. Cependant, les détails de l’enregistrement de l’Union européenne inclus à titre de Pièce « 23 » à l’Affidavit Jarvis nomment le Requérant comme l’un des propriétaires de cet enregistrement et je n’ai reçu aucune autre preuve et aucun autre argument de l’Opposante à ce sujet.

[56] Compte tenu de ce qui précède, le motif d’opposition fondé sur l’article 30d) est rejeté.

Article 30e)

[57] L’Opposante affirme que, à la date de production de la Demande, le Requérant n’avait pas l’intention d’employer la Marque au Canada et à cet égard invoque la preuve dans l’Affidavit Jarvis et l’Affidavit Hart de recherches en ligne sans résultat pour la Marque. Cependant, je n’estime pas que l’absence de preuve d’emploi de la Marque constitue la preuve que le Requérant n’avait pas l’intention d’employer la Marque au Canada à la date de production. L’Opposante ne s’est pas acquittée de son fardeau de preuve initial et le motif d’opposition fondé sur l’article 30e) est rejeté.

Article 30i)

[58] L’Opposante affirme que le Requérant n’aurait pas pu être convaincu de son droit d’employer la Marque. L’article 30i) de la Loi exige qu’un requérant ajoute une déclaration dans la demande selon laquelle le requérant est convaincu qu’il a le droit d’employer la marque de commerce au Canada. Selon la jurisprudence, lorsque le requérant a fourni la déclaration exigée, on ne peut conclure à la non-conformité à l’article 30i) qu’en présence de circonstances exceptionnelles qui rendent la déclaration du requérant invraisemblable, comme une preuve de mauvaise foi [voir Sapodilla Co Ltd c Bristol-Myers Co (1974), 15 CPR (2d) 152 (COMC), à la p 155]. La simple connaissance de l’existence d’une marque de commerce d’un opposant n’est pas suffisante pour étayer un motif d’opposition en vertu de l’article 30i) [voir Woot Inc c WootRestaurants Inc, 2012 COMC 197].

[59] En l’espèce, la Demande contient la déclaration exigée et il n’y a aucune preuve qu’il s’agit d’un cas exceptionnel. Par conséquent, le motif d’opposition fondé sur l’article 30i) est rejeté.

Décision

[60] Dans l’exercice des pouvoirs qui m’ont été délégués en vertu des dispositions de l’article 63(3) de la Loi, je rejette la demande d’enregistrement selon les dispositions de l’article 38(12) de la Loi.

 

Timothy Stevenson

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

 

 

Traduction certifiée conforme

William Desroches

 

Le français est conforme aux WCAG.


COMMISSION DES OPPOSITIONS DES MARQUES DE COMMERCE

OFFICE DE LA PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE DU CANADA

COMPARUTIONS ET AGENTS INSCRITS AU DOSSIER

___________________________________________________

DATE DE L’AUDIENCE : 2022-06-14

COMPARUTIONS

Colleen Spring Zimmerman

Pour l’Opposante

Meika Ellis

Pour le Requérant

AGENTS AU DOSSIER

Fogler, Rubinoff LLP

Pour l’Opposante

Ridout & Maybee LLP

Pour le Requérant

 

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