Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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CIPO

LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

THE REGISTRAR OF TRADEMARKS

Référence : 2022 COMC 134

Date de la décision : 2022-07-29

[TRADUCTION CERTIFIÉE,

NON RÉVISÉE]

DANS L’AFFAIRE DE L’OPPOSITION

 

Vision Center Direct Inc.

Opposante

et

 

Vision Direct Group Ltd.

Requérante

 

1,762,325 pour VISION DIRECT

Demande

Introduction

[1] Vision Center Direct Inc. (l’Opposante) est une entreprise de la Saskatchewan qui offre des services de soins des yeux, y compris la vente de lunettes, de lentilles de contact et d’accessoires, sous la marque de commerce et le nom commercial VISION CENTER DIRECT.

[2] L’Opposante s’oppose à l’enregistrement de la marque de commerce VISION DIRECT (la Marque), qui fait l’objet de la demande no 1,762,325 (la Demande) de Vision Direct Group Ltd. (la Requérante). La Requérante est une lunetterie en ligne située au Royaume-Uni qui offre des lentilles de contact, des solutions, des lunettes, ainsi que d’autres produits de soins des yeux et produits connexes.

[3] Pour les raisons qui suivent, la Demande est rejetée en partie.

Le dossier

[4] La Demande a été produite le 7 janvier 2016 en liaison avec les produits et services suivants (les Produits et Services) :

Produits

(1) Produits de soins des yeux à usage cosmétique; produits cosmétiques pour les soins des yeux, de la peau et du visage; produits de soins de la peau (non médicamenteux); masques pour les yeux et cache-œil imprégnés de produits cosmétiques non médicamenteux; masques de beauté imprégnés de produits cosmétiques; collagène contenant des produits de soins de la peau; produits de soins de la peau (microdermabrasion) à usage cosmétique; produits pour le nettoyage de lunettes et de lunettes de soleil, chiffons imprégnés de produits pour le nettoyage de lunettes et lunettes de soleil.

(2) Solutions à verres de contact, solutions et comprimés de nettoyage, de rinçage ou de neutralisation de verres de contact, solutions salines; douches oculaires et produits en vaporisateur pour les yeux, préparations pour le traitement de la sécheresse oculaire, gouttes pour les yeux; hydratants et onguents pour les yeux à usage médical; vitamines oculaires; cache-œil; produits de soins des yeux à usage médical; produits pharmaceutiques pour le traitement des troubles oculaires; préparations médicamenteuses pour les soins des yeux, de la peau et du visage; vitamines pour les soins des yeux; vitamines pour les soins de la peau et du visage; produits de soins de la peau (médicamenteux); masques pour les yeux et cache-œil imprégnés de préparations médicamenteuses; masques de beauté imprégnés de préparations médicamenteuses.

(3) Verres de contact; contenants pour verres de contact, étuis à verres de contact, étuis conçus pour les verres de contact; lunettes, lunettes de soleil, lunettes de lecture, lunettes équipées de lampes à DEL; pièces, éléments d’assemblage et accessoires, nommément étuis, chaînes, courroies, chiffons de nettoyage, étuis à lunettes pour lunettes ou lunettes de soleil; étuis à lunettes; lunettes de protection, nommément lunettes de plongée, lunettes de plongée sous-marine, lunettes de sport, lunettes de vélo, lunettes de natation, lunettes de natation d’ordonnance; lunettes de ski, lunettes de ski d’ordonnance; masques de plongée, masques de plongée d’ordonnance; articles de lunetterie de protection, articles de lunetterie de protection d’ordonnance; cordons pour lunettes ou lunettes de soleil; étuis conçus pour les lunettes de protection ou les articles de lunetterie de protection.

Services

Services de vente au détail, nommément vente de produits ayant trait à la vision, nommément vente de ce qui suit : verres de contact, étuis à verres de contact, solutions de nettoyage, de désinfection et de trempage de verres de contact, solutions nettoyantes pour les yeux, larmes artificielles et solutions salines, articles de lunetterie et lunettes de soleil; services de vente au détail dans les domaines suivants : articles de lunetterie, lunettes, lunettes de soleil, verres de contact, lunettes de protection, masques de plongée, produits et solutions pour les soins d’articles de lunetterie et de verres de contact, étuis et sacs à dos de voyage pour le rangement de ce qui suit : articles de lunetterie et verres de contact ainsi que produits nettoyants, accessoires de lunetterie, produits de soins des yeux, cosmétiques pour le contour des yeux, médicaments pour les yeux, médicaments pour les soins de la peau et du visage, produits de soins de la peau; services de vente au détail en ligne dans les domaines suivants : articles de lunetterie, lunettes, lunettes de soleil, verres de contact, lunettes de protection, masques de plongée, produits et solutions pour les soins d’articles de lunetterie et de verres de contact, étuis et sacs à dos de voyage pour le rangement de ce qui suit : articles de lunetterie et verres de contact ainsi que produits nettoyants, accessoires de lunetterie, produits de soins des yeux, cosmétiques pour le contour des yeux, médicaments pour les yeux, médicaments pour les soins de la peau et du visage, produits de soins de la peau; offre d’espace publicitaire sur un site Web; promotion de la vente de produits et de services au moyen d’un programme de fidélisation de la clientèle; promotion de la vente de produits et de services au moyen d’échantillons; administration de programmes de fidélisation de la clientèle; offre d’information, de consultation et de conseils ayant trait à tous les produits de soins des yeux, de lunetterie et de la vue ainsi qu’aux médicaments pour les yeux.

[5] La Demande est fondée sur l’emploi projeté de la Marque au Canada, ainsi que sur son emploi dans l’Union européenne et son enregistrement auprès de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), en liaison avec les Produits et Services.

[6] La Demande a été annoncée aux fins d’opposition dans le Journal des marques de commerce le 10 janvier 2018. Le 9 mars 2018, l’Opposante a produit une déclaration d’opposition en vertu de l’article 38 de la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, c T‑13 (la Loi). La Loi a été modifiée le 17 juin 2019, et, conformément à l’article 70 de la Loi, les motifs d’opposition en l’espèce seront évalués en fonction de la Loi dans sa version antérieure à cette date.

[7] Les motifs d’opposition invoqués par l’Opposante comprennent les articles 12(1)d), 16(2), 16(3), 2, 30b) et 30d) de la Loi. Pour les motifs d’opposition fondés sur la probabilité de confusion alléguée, l’Opposante s’appuie sur son emploi et son enregistrement antérieurs de la marque de commerce, ainsi que sur son emploi antérieur du nom commercial VISION CENTER DIRECT.

[8] La Requérante a produit et signifié une contre-déclaration niant les motifs d’opposition.

[9] L’Opposante a produit une copie certifiée de l’enregistrement no LMC645,257 pour la marque de commerce VISION CENTER DIRECT. L’Opposante a également produit l’affidavit du Dr Bryan Robertson, cofondateur et vice-président de l’Opposante, souscrit le 13 septembre 2018 (l’affidavit Robertson). Le Dr Robertson a été contre-interrogé au sujet de son affidavit et la transcription de ce contre-interrogatoire a été versée du dossier. La Requérante a produit les affidavits de Richard Rust, le dirigeant principal des finances de la Requérante, souscrit le 19 septembre 2019 (l’affidavit Rust), et de Robyn Benmore, une recherchiste en marques de commerce, souscrit le 19 septembre 2019 (l’affidavit Benmore).

[10] Seule la Requérante a produit des observations écrites, et aucune audience n’a été tenue.

Fardeau ultime et fardeau de preuve

[11] C’est à la Requérante qu’incombe le fardeau ultime d’établir, selon la prépondérance des probabilités, que la Demande est conforme aux exigences de la Loi. Cela signifie que s’il est impossible d’arriver à une conclusion définitive en faveur de la Requérante après avoir examiné l’ensemble de la preuve, la question doit être tranchée à l’encontre de la Requérante. Toutefois, l’Opposante doit s’acquitter du fardeau de preuve initial en produisant suffisamment d’éléments de preuve admissibles à partir desquels on pourrait raisonnablement conclure à l’existence des faits allégués à l’appui de chaque motif d’opposition [John Labatt Ltd c Molson Companies Ltd, 1990 CanLII 11059 (CF), 30 CPR (3d) 293 (CF 1re inst), à la p. 298].

Analyse des motifs d’opposition

Motifs d’opposition fondés sur les articles 30b) et 30d) – rejetés sommairement

[12] La date pertinente pour examiner un motif d’opposition fondé sur l’article 30 de la Loi est la date de la production de la demande [Georgia-Pacific Corporation c Scott Paper Ltd (1984), 3 CPR (3d) 469 (COMC), à la p. 475].

[13] L’Opposante ne s’est pas acquittée du fardeau de preuve initial qui lui incombait à l’égard des motifs d’opposition fondés sur les articles 30b) et 30d) et de la Loi.

[14] L’Opposante a fait valoir que, contrairement à l’article 30b) de la Loi, la Requérante n’avait pas l’intention d’employer la Marque au Canada, par elle-même ou par l’entremise d’un licencié, en liaison avec les Produits et Services. Toutefois, aucun argument ou aucune preuve n’a été produit à l’appui de ce motif d’opposition.

[15] L’Opposante a fait valoir que, contrairement à l’alinéa 30d) de la Loi, la Requérante n’avait pas employé la Marque dans l’Union européenne en liaison avec chacune des catégories générales de produits ou services décrites dans la Demande. Toutefois, il n’y a aucune preuve qui remette en question l’exactitude de l’emploi et de l’enregistrement à l’étranger revendiqués dans la Demande.

[16] En conséquence, ces motifs d’opposition sont rejetés.

Motif d’opposition fondé sur l’article 12(1)d)

[17] L’Opposante a fait valoir que la Marque n’est pas enregistrable parce qu’elle crée de la confusion avec son enregistrement no LMC645,257 pour la marque de commerce VISION CENTER DIRECT en liaison avec les services suivants (les services de l’Opposante) :

[traduction]

(1) Exploitation d’une entreprise spécialisée dans la vente au détail et la distribution d’articles de lunetterie en ligne; exploitation d’une entreprise spécialisée dans la vente de lentilles cornéennes, lunettes, lunettes de soleil et produits pour soins oculaires, nommément liquides pour nettoyer et entreposer les lentilles, boîtes pour l’entreposage des lentilles, chamois, gouttes oculaires et stérilisateur.

(2) Services d’opticien; exploitation d’une entreprise spécialisée dans l’adaptation de lentilles cornéennes, lunettes et lunettes de soleil.

[18] L’opposant s’acquitte du fardeau initial qui lui incombe à l’égard d’un motif d’opposition fondé sur l’article 12(1)d) si l’enregistrement invoqué était en règle à la date de la décision concernant l’opposition. J’ai exercé mon pouvoir discrétionnaire et je confirme que l’enregistrement invoqué par l’Opposante a été radié le 18 juillet 2022 en raison de l’omission du paiement de la taxe pour le maintien en état. Par conséquent, l’Opposante ne s’est pas acquittée de son fardeau initial et ce motif d’opposition est rejeté.

Motifs d’opposition fondés sur les articles 16(2)c) et 16(3)c)

[19] Les motifs d’opposition fondés sur les articles 16(2)c) et 16(3)c) allèguent que la Requérante n’est pas la personne ayant droit d’enregistrer la Marque parce qu’à la date pertinente, la Marque créait de la confusion avec le nom commercial VISION CENTER DIRECT employé antérieurement au Canada par l’Opposante.

[20] À l’égard de ces motifs d’opposition, l’Opposante avait le fardeau initial de démontrer l’emploi de son nom commercial avant le 7 janvier 2016 (la date de production de la demande) et qu’elle n’avait pas abandonné son nom commercial en date du 10 janvier 2018, la date de l’annonce de la Demande [article 16(5) de la Loi].

[21] En ce qui concerne l’évaluation de l’emploi d’un nom commercial, la Loi ne contient aucune définition de ce qui constitue un tel emploi. Toutefois, le sujet a été examiné par la Cour fédérale dans Mr. Goodwrench Inc c General Motors Corp (1994), 55 CPR (3d) 508 (CF 1re inst), où le juge Simpson a déclaré ce qui suit :

Aucune disposition de la Loi ne définit ou ne décrit l’emploi d’un nom commercial. Toutefois, dans l’affaire Professional Publishing Associates Ltd. c. Toronto Parent Magazine Inc., (1986), [9] C.P.R. (3d) 207 (C.F. 1re inst.), le juge Strayer a étudié ce problème et conclu que les principes énoncés à l’art. 2 et au par. 4(1) de la Loi s’appliquaient à l’emploi d’un nom commercial. Voici ses propos sur la question :

Bien que la Loi sur les marques de commerce ne définisse pas l’emploi à l’égard des noms commerciaux je suis convaincu, compte tenu des objets de la Loi, que l’emploi devrait avoir lieu dans le cours normal des affaires et à l’égard de la classe de personnes ou des classes de personnes avec qui ces affaires devront être transigées.

Par conséquent, l’emploi dans la pratique normale du commerce sera le critère appliqué en l’espèce.

[22] Je renvoie également à la décision dans Pharmx Rexall Drug Stores Inc c Vitabrin Investments Inc (1995), 62 CPR (3d) 108 (COMC), où l’agent d’audience D.J. Martin a déclaré que la simple formation ou le simple enregistrement d’une société sous un nom particulier ne constitue pas en soi un emploi comme nom commercial. Par conséquent, le simple enregistrement du nom de la société de l’Opposante, VISION CENTER DIRECT INC. (affidavit Robertson, Pièces A et B), ne constitue pas un emploi d’un nom commercial.

[23] En gardant ces principes à l’esprit, je passe maintenant à l’examen de la preuve de l’Opposante à la date pertinente, ainsi qu’à une analyse de la question de savoir si l’Opposante s’est acquittée de son fardeau de preuve initial.

Affidavit du Dr Bryan Robertson

[24] Le Dr Robertson fournit un aperçu des activités de l’Opposante et des services offerts en liaison avec VISION CENTER DIRECT. Tout d’abord, je remarque que, bien que le Dr Robertson présente sa preuve en renvoyant uniquement, dans son affidavit, à l’emploi par l’Opposante de VISION CENTER DIRECT comme marque de commerce, l’emploi de marques de commerce et de noms commerciaux ne sont pas nécessairement mutuellement exclusifs [voir Road Runner Trailer Manufacturing Ltd c Road Runner Trailer Co (1984), 1 CPR (3d) 443 (CF 1re inst)]. Par conséquent, le cas échéant, j’accepte que la présentation de VISION CENTER DIRECT sur les documents présentés en pièce puisse être perçue comme un emploi d’une marque de commerce et d’un nom commercial.

VISION CENTER DIRECT sur des affiches extérieures

[25] Le Dr Robertson affirme que l’Opposante offre des soins des yeux complets à ses clients en réalisant des examens pour les patients à l’aide d’équipement de diagnostic de pointe, en offrant un service de haute qualité pour aider les clients en choisissant, adaptant et livrant des lunettes, et en offrant des lunettes, des lentilles de contact et des accessoires (para 3). L’Opposante possède deux boutiques à Regina, en Saskatchewan. La première a été établie en 1983 (la boutique de la rue Albert), et la deuxième, en 2011 (la boutique de Star Lite) (para 5). Ces boutiques offrent en vente et vendent des lunettes, des lentilles de contact et des accessoires de lunetterie. De plus, ces boutiques offrent des services d’opticien, réalisent des examens de la vue, et aident les clients à choisir et à acheter des lunettes (para 10). De 1994 à 2012, VISION CENTER DIRECT figurait sur les affiches extérieures de la boutique de la rue Albert (para 11, Pièce C). Depuis 2012, les affiches de l’Opposante arborent généralement l’énoncé « THE SPECTRUM by Vision Center Direct ». À cet égard, l’affidavit Robertson comprend :

· une copie d’une photographie prise en août 2018 illustrant « THE SPECTRUM by Vision Center Direct » sur la porte d’entrée de la boutique de la rue Albert (Pièce E) – le Dr Robertson indique que cette photographie est représentative de la façon dont VISION CENTER DIRECT figurait et continue de figurer sur la porte de cette boutique depuis 2012;

· une copie d’une photographie prise en août 2018 illustrant « THE SPECTRUM EYE CENTER » sur les affiches dans le hall d’entrée de l’immeuble où se situe la boutique de Star Lite (Pièce F) – le Dr Robertson indique que cette photographie est une bonne représentation de la façon dont VISION CENTER DIRECT figurait et continue de figurer sur les affiches de cette boutique depuis 2012.

[26] Je considère que l’emploi de VISION CENTER DIRECT sur les affiches extérieures constitue un emploi du nom commercial et de la marque de commerce de l’Opposante.

[27] De plus, j’estime que l’emploi par l’Opposante de Vision Center Direct dans « THE SPECTRUM by/presented by Vision Center Direct » constitue un emploi de THE SPECTRUM et de Vision Center Direct en tant que deux noms commerciaux distincts, et rien n’empêche la présentation de plusieurs noms commerciaux dans la pratique normale du commerce.

VISION CENTER DIRECT sur le site Web de l’Opposante

[28] Le Dr Robertson affirme que, par l’entremise du site Web de l’Opposante situé à l’adresse visioncenterdirect.com (le site Web de l’Opposante), l’Opposante a offert à la vente et vendu des lunettes, des lunettes de soleil, des lentilles de contact et des accessoires aux Canadiens (para 12). Sont joints, à titre de Pièce G, des imprimés du site Web de l’Opposante tel qu’il figurait de 2002 à 2018 (para 13). Ces imprimés proviennent du site Web Internet Archive (archive.org). Je remarque que le système d’archives en ligne WayBack Machine a été accepté comme source fiable pour prouver l’état de sites Web dans le passé [voir Candrug Health Solutions Inc c Thorkelson (2007), 60 CPR (4th) 35 (CF), au para 21, inf. pour d’autres motifs par 2008 CAF 100]. En examinant ces pages, je remarque que VISION CENTER DIRECT figure :

· dans le coin supérieur gauche de la page Web, qui affiche « VISIONCENTERDIRECT.COM » à côté d’un élément figuratif (le 18 juillet 2002; le 18 juin 2003) – même si les espaces entre les termes ont été supprimés et que le nom de domaine de premier niveau « .com » a été ajouté, je conclus qu’il s’agit d’un emploi du nom commercial et de la marque de commerce VISION CENTER DIRECT;

· dans le coin supérieur gauche de la page Web, qui affiche « Vision Center Direct » à côté d’un dessin d’un V (le 1er février 2012; le 20 mai 2016; le 24 avril 2017; le 29 mars 2018) – je conclus qu’il s’agit d’un emploi du nom commercial et de la marque de commerce VISION CENTER DIRECT. À cet égard, je remarque qu’il est bien établi que plusieurs marques de commerce ou noms commerciaux peuvent être employés en même temps s’ils sont perçus comme étant des marques de commerce ou noms commerciaux distincts [AW Allen Ltd c Warner-Lambert Canada Inc (1985), 6 CPR (3d) 270 (CF 1re inst)]. Dans la mesure où ils ne sont pas combinés de façon qu’il soit impossible de les distinguer (comme c’est le cas en l’espèce), leur validité n’est pas touchée [Philip Morris Products SA c Malboro Canada limitée, 2010 CF 1099];

· dans le coin supérieur gauche de la page Web, qui affiche « THE SPECTRUM by Vision Center Direct » à côté d’un dessin d’un V (le 17 mars 2013; le 11 août 2015) – je conclus qu’il s’agit d’un emploi du nom commercial VISION CENTER DIRECT, puisqu’il serait perçu comme un nom commercial distinct.

· dans le texte des pages Web, comme « If you need to return lenses or frames to Vision Center Direct […] » [Si vous devez retourner des lentilles de contact ou des montures à Vision Center Direct] (le 18 juillet 2002); « All contact lenses dispensed by Vision Center Direct are the exact lenses prescribed by your local eye care professional and are delivered to your door […] » [Toutes les lentilles de contact distribuées par Vision Center Direct sont les lentilles exactes prescrites par votre professionnel de la vue local et sont livrées à votre porte] (le 18 juin 2003; le 24 mars 2007), « Vision Center Direct was founded by eye care professionals […] » [Vision Center Direct a été fondée par des professionnels des soins des yeux] (le 24 mars 2007; 1er février 2012), et « A Sample of fine frames you will find at THE SPECTRUM by Vision Center Direct » [Un échantillon de montures fines que vous trouverez à THE SPECTRUM par Vision Center Direct] (le 17 mars 2013; le 11 août 2015; le 24 avril 2017). Je conclus qu’il s’agit d’un emploi du nom commercial VISION CENTER DIRECT.


 

VISION CENTER DIRECT sur les documents promotionnels (étuis à lunettes, vaporisateurs)

[29] Le Dr Robertson affirme que l’Opposante appose régulièrement, depuis 1994, VISION CENTER DIRECT sur des étuis à lunettes, des vaporisateurs et des sacs fournis aux consommateurs canadiens. Ces articles promotionnels servent à rappeler aux clients où ils ont acheté leurs lunettes, lunettes de soleil, lentilles de contact ou autres accessoires de lunetterie (para 18). Pendant la période de 1994 à 2012, des étuis à lunettes arboraient « VisionCenterDirect » (Pièce I). Nonobstant la suppression des espaces entre les termes, je conclus qu’il s’agit d’un emploi du nom commercial VISION CENTER DIRECT. Lors du contre-interrogatoire, le Dr Robertson a indiqué que des milliers de personnes auraient quitté une boutique avec l’un de ces étuis (page 42, Q20; page 48, lignes 10 à 15).

[30] Depuis 2012, les étuis à lunettes et les vaporisateurs arborent « THE SPECTRUM by VisionCenterDirect.com » (Pièces J et K). Même si les espaces entre les termes ont été supprimés et que le nom de domaine de premier niveau « .com » a été ajouté, je conclus qu’il s’agit d’un emploi du nom commercial VISION CENTER DIRECT et que celui-ci serait perçu comme étant distinct du nom commercial THE SPECTRUM.

Annonces dans le magazine Fine Lifestyle Regina de 2010 à 2012

[31] Le Dr Robertson affirme que l’Opposante a utilisé des annonces dans des magazines comme outil de publicité et de promotion de ses magasins de détail, de ses services d’opticien et de son site Web, et que ces annonces arborent également la marque VISION CENTER DIRECT (para 20). Les Pièces L à O sont des copies d’annonces des services et du commerce de l’Opposante parues dans le magazine Fine Lifestyle Regina de 2010 à 2012 (para 21). Je remarque que les Pièces M et N (datées de 2011) arborent le nom commercial et la marque de commerce Vision Center Direct. Je remarque que la Pièce O (datée de 2012) arbore « THE SPECTRUM by VisionCenterDirect.com ». Même si les espaces entre les termes ont été supprimés et que le nom de domaine de premier niveau « .com » a été ajouté, je conclus qu’il s’agit d’un emploi du nom commercial VISION CENTER DIRECT et que celui-ci serait perçu comme étant distinct du nom commercial THE SPECTRUM.


 

VISION CENTER DIRECT sur les factures

[32] La Pièce P contient des copies de quatre échantillons représentatifs de factures émises par les points de vente au détail de l’Opposante (la boutique de la rue Albert et la boutique de Star Lite) pour les services de l’Opposante depuis 2013. Ces factures sont identiques à celles qui seraient émises aux acheteurs au moment de la vente (para 24). Je remarque que les factures, qui concernent la vente de divers articles, y compris des lentilles de contact, des montures et des lentilles, datent de juin 2013 à septembre 2018. VISION CENTER DIRECT figure comme nom commercial au bas de chaque facture comme suit :

[traduction]

Merci!

 

The Spectrum Eye Centre

by Vision Center Direct

 

Dépenses liées aux ventes et à la publicité en liaison avec VISION CENTER DIRECT

[33] Le Dr Robertson affirme que, depuis 1998, l’Opposante a généré des recettes de plus de 30 000 000 $ CA dans le cadre de la vente et de l’exécution des services de l’Opposante au Canada en liaison avec la marque VISION CENTER DIRECT (para 23). Lors de son contre-interrogatoire, le Dr Robertson a indiqué que The Spectrum est une sous-division de Vision Center Direct, et que toutes les recettes générées sont transférées à Vision Center Direct (page 22, Q23; page 54, Q20).

[34] Lors de son contre-interrogatoire, le Dr Robertson a confirmé que l’Opposante a expédié des produits à des clients partout en Amérique du Nord (page 7, Q20 à Q25).

[35] Le Dr Robertson soutient que chaque année depuis 1994, l’Opposante a dépensé plus de 90 000 $ par année en dépenses publicitaires pour les services de l’Opposante offerts en liaison avec la marque VISION CENTER DIRECT (para 16). Lors de son contre-interrogatoire, le Dr Robertson a également indiqué qu’en moyenne, l’Opposante a consacré 3 % de ses ventes brutes à la publicité (page 51, Q3).

Conclusion – l’Opposante s’est acquittée de son fardeau à l’égard du motif d’opposition fondé sur les articles 16(2)c) et 16(3)c)

[36] Lorsque la preuve est considérée dans son ensemble, je suis convaincue que l’Opposante a exercé ses activités sous le nom commercial VISION CENTER DIRECT, en vendant des lentilles de contact, des lunettes, des lunettes de soleil et des produits de soins des yeux, en offrant des services d’opticien et en vendant des articles de lunetterie en ligne sur le site Web de l’Opposante depuis avant le 7 janvier 2016. De plus, il n’y a aucune preuve qui suggère que l’Opposante a abandonné son nom commercial à la date de l’annonce de la Demande.

[37] Étant donné que je suis convaincue que l’Opposante s’est acquittée de son fardeau de preuve à l’égard de ces motifs d’opposition, je dois maintenant déterminer si la Requérante s’est acquittée de son fardeau de prouver qu’il n’y a aucune probabilité raisonnable de confusion selon la prépondérance des probabilités.

Test en matière de confusion

[38] L’article 6(3) de la Loi indique que l’emploi d’une marque de commerce crée de la confusion avec un nom commercial lorsque l’emploi de la marque de commerce et du nom de commerce dans la même région serait susceptible de faire conclure que les produits liés à cette marque et les produits liés à l’entreprise poursuivie sous ce nom sont fabriqués, vendus, donnés à bail ou loués, ou que les services liés à cette marque et les services liés à l’entreprise poursuivie sous ce nom sont loués ou exécutés, par la même personne, que ces produits ou services soient ou non de la même catégorie générale ou figurent ou non dans la même classe de la classification de Nice.

[39] Lorsqu’il applique le test en matière de confusion, le registraire doit tenir compte de toutes les circonstances de l’espèce, y compris celles expressément énoncées à l’article 6(5) de la Loi, à savoir : a) le caractère distinctif inhérent de la marque de commerce ou du nom commercial, et la mesure dans laquelle ils sont devenus connus; b) la période pendant laquelle la marque de commerce ou le nom commercial ont été en usage; c) le genre de produits, services ou entreprises; d) la nature du commerce; et e) le degré de ressemblance entre les marques de commerce ou les noms commerciaux dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’ils suggèrent. Il n’est pas nécessaire d’accorder un poids égal aux facteurs énumérés [Mattel, Inc c 3894207 Canada Inc, 2006 CSC 22, 49 CPR (4th) 321; Masterpiece c Alavida Lifestyles Inc, 2011 CSC 27, 92 CPR (4th) 361 (Masterpiece)]. Toutefois, comme l’a indiqué la Cour suprême du Canada dans Masterpiece, même si le degré de ressemblance est le dernier facteur mentionné à l’article 6(5), il est le facteur susceptible d’avoir le plus d’importance dans l’analyse relative à la confusion (Masterpiece, au para 49).

[40] Le test en matière de confusion est évalué comme une question de première impression dans l’esprit du consommateur ordinaire plutôt pressé à la vue de la marque de commerce du requérant, alors qu’il n’a qu’un vague souvenir de la marque de commerce (ou du nom commercial) de l’opposant et qu’il ne s’arrête pas pour réfléchir à la question en profondeur, pas plus que pour examiner de près les ressemblances et les différences entre les marques ou les noms [Veuve Clicquot Ponsardin c Boutiques Cliquot Ltée, 2006 CSC 23, 49 CPR (4th) 401, au para 20].

Caractère distinctif inhérent de la marque de commerce et du nom commercial

[41] Le nom commercial VISION CENTER DIRECT de l’Opposante possède un faible degré de caractère distinctif inhérent. L’expression qui comprend le nom commercial suggère fortement des services liés à la vision offerts dans un lieu spécialisé dans la prestation de tels services et offrant ces services directement aux consommateurs.

[42] De même, la marque de commerce VISION DIRECT de la Requérante possède un faible degré de caractère distinctif inhérent, en ce sens qu’elle suggère que les produits et services liés à la vision de la Requérante sont offerts directement aux consommateurs. Toutefois, je n’estime pas que la Marque contienne une connotation suggestive à l’égard de ces produits et services qui ne relèvent pas de la catégorie générale des articles de lunetterie, des soins des yeux et des accessoires de sois des yeux, comme des préparations pour les soins de la peau, des vitamines pour les soins de la peau et du visage, et des produits cosmétiques, ou qui n’y sont pas liés.

Mesure dans laquelle la marque de commerce et le nom commercial sont devenus connus, et période d’emploi

[43] Il est possible de renforcer une marque de commerce (ou un nom commercial) en la faisant connaître par son emploi ou sa promotion. L’Opposante a présenté une preuve au moyen de l’affidavit Robertson, qui établit principalement que, de 1994 à 2012, VISION CENTER DIRECT figurait comme seul nom commercial et seule marque de commerce sur les affiches extérieures des boutiques, les articles promotionnels et les annonces de magazines. À compter de 2012, le nom commercial VISION CENTER DIRECT figurait principalement sur les affiches, les articles promotionnels et les factures avec le nom commercial « THE SPECTRUM ».

[44] L’affidavit Robertson établit également que le nom commercial et la marque de commerce VISION CENTER DIRECT a figuré sur le site Web de l’Opposante de 2002 à 2018, comme il a été mentionné ci-dessus. Lors de son contre-interrogatoire, le Dr Robertson a indiqué que le trafic moyen du site Web de l’Opposante était de 79 000 visiteurs uniques (page 37, Q3), bien que la fréquence de cette statistique (mensuelle et annuelle) n’ait pas été indiquée.

[45] Compte tenu de ce qui précède, et compte tenu des renseignements sur les ventes et la publicité fournis par le Dr Robertson qui ont été discutés ci-dessus, je suis convaincue que le nom commercial de l’Opposante est devenu connu au moins dans une certaine mesure au Canada. J’en arrive à cette conclusion malgré le fait que l’Opposante n’a pas fourni de ventilation des ventes ou de la publicité pour chacune de ses catégories de ventes ou de services.

[46] La Demande est fondée sur l’emploi projeté de la Marque en liaison avec les Produits et Services. Bien qu’une preuve de l’emploi de la Marque soit fournie dans l’affidavit Rust, rien n’établit l’emploi de la Marque à la date pertinente; par conséquent, je ne suis pas en mesure d’en tenir compte.

[47] Par conséquent, ces facteurs favorisent l’Opposante.

Genre de produits, services ou entreprises; et nature du commerce

[48] Il y a un degré élevé de chevauchement entre les services de vente de détail et en ligne de la Requérante dans le domaine de la vision, de la lunetterie et des produits et accessoires de soins des yeux (qui comprend la vente de lentilles de contact, de lunettes, de lunettes de soleil, de produits de soins des yeux, y compris des produits pour le nettoyage des yeux, des larmes artificielles et des solutions salines) et le commerce de l’Opposante, qui comprend la vente d’articles de lunetterie, de lentilles de contact, de lunettes, de lunettes de soleil et de produits de soins des yeux, et l’exploitation d’une entreprise qui vend des articles de lunetterie en ligne sur le site Web de l’Opposante. Je n’estime pas qu’il y a un chevauchement avec les services de la Requérante qui ne sont pas liés à la vision, aux articles de lunetterie ou aux soins des yeux, y compris les services suivants : services de vente au détail en ligne dans les domaines des médicaments pour les soins de la peau et du visage, et des produits de soins de la peau; offre d’espace publicitaire sur un site Web; promotion de la vente de produits et de services au moyen d’un programme de fidélisation de la clientèle; promotion de la vente de produits et de services au moyen d’échantillons; administration de programmes de fidélisation de la clientèle.

[49] Il y a également un certain chevauchement ou un certain lien entre les services liés au commerce de l’Opposante et les produits de la Requérante, notamment les articles de lunetterie (y compris les lentilles de contact et les lunettes), les accessoires de lunetterie et les produits pour les soins des yeux, particulièrement dans la mesure où les produits de la Requérante pourraient être vendus par l’Opposante. Toutefois, je n’estime pas qu’il y a un chevauchement avec les produits de la Requérante qui ne sont pas liés à la vision ou aux soins des yeux en général, y compris : produits cosmétiques pour les soins de la peau et du visage; produits de soins de la peau (non médicamenteux); masques de beauté imprégnés de produits cosmétiques; collagène contenant des produits de soins de la peau; produits de soins de la peau (microdermabrasion) à usage cosmétique; préparations médicamenteuses pour les soins de la peau et du visage; produits de soins de la peau (médicamenteux); et masques de beauté imprégnés de préparations médicamenteuses.

[50] En ce qui concerne les voies de commercialisation, je conclus qu’il y a un chevauchement, en ce sens que les deux parties vendent des produits liés à la vision, à la lunetterie et aux soins des yeux, et qu’elles semblent donc cibler les mêmes consommateurs.

Degré de ressemblance

[51] Dans Masterpiece, précité, la Cour a fait observer que, bien que le premier mot (ou la première syllabe) d’une marque de commerce (ou d’un nom commercial) puisse, pour des raisons de caractère distinctif, être souvent celui qui revêt le plus d’importance [Conde Nast Publications Inc c Union des éditions modernes (1979), 46 CPR (2d) 183 (CF 1re inst)], il est préférable de se demander d’abord s’il y a un aspect de la marque de commerce (ou du nom commercial) qui est particulièrement frappant ou unique.

[52] En examinant le nom commercial VISION CENTER DIRECT de l’Opposante dans son ensemble, j’estime qu’aucun élément de ce nom commercial n’est particulièrement frappant ou unique compte tenu de la nature suggestive ou descriptive de ces éléments. Pour la même raison, j’estime qu’aucun élément de la Marque de la Requérante n’est frappant ou unique.

[53] Dans ses observations écrites, la Requérante est d’avis que la marque de l’Opposante (c’est-à-dire son nom commercial) comprend le terme CENTER comme deuxième élément, ce qui rend les marques différentes dans la présentation et le son, et dans les idées qu’elles suggèrent. Bien que l’inclusion du terme CENTER dans le nom commercial de l’Opposante ait une incidence, en ce sens qu’il rend la Marque légèrement différente du nom commercial de l’Opposante, je conclus qu’il subsiste un degré important de ressemblance entre les marques de commerce et noms commerciaux des parties, puisqu’ils partagent le premier élément VISION et le dernier élément DIRECT.

Circonstances de l’espèce – période prolongée de coexistence avec la marque de commerce VISION DIRECT au Canada

[54] Dans ses observations écrites, la Requérante est d’avis que la [traduction] « Requérante et ses prédécesseurs » emploient la marque de commerce VISION DIRECT au Canada depuis 2001, et que cette période prolongée de coexistence devrait être un facteur qui favorise fortement la Requérante (para 42 et 43). Je crois comprendre que le [traduction] « prédécesseur » auquel la Requérante renvoie, Walgreens, ne peut pas être qualifié de prédécesseur en titre de la Requérante, mais plutôt comme une partie non liée qui aurait été active au Canada entre 2001 et mai 2017. La Requérante s’appuie également sur son emploi de la Marque depuis l’été 2016.

[55] À l’appui de sa position selon laquelle Walgreens avait antérieurement employé la marque de commerce VISION DIRECT au Canada, la Requérante s’appuie sur :

· une allégation de M. Rust selon laquelle, avant que la Requérante n’entre dans le marché canadien, Walgreens employait la marque VISION DIRECT en liaison avec la vente en ligne de lentilles de contact et d’autres produits aux Canadiens depuis au moins le 16 mai 2001 – M. Rust allègue que les lentilles de contact et les autres produits de Walgreens étaient disponibles à l’achat à l’adresse www.visiondirect.com en liaison avec la marque de commerce VISION DIRECT, et que ces produits étaient également disponibles à l’expédition au Canada (affidavit Rust, au para 18). À cet égard, M. Rust fournit une copie archivée d’une page du site Web de Walgreens datée du 16 mai 2001, laquelle est tirée de l’outil Wayback Machine d’Internet Archive (Pièce I);

· une déclaration de M. Rust selon laquelle ce dernier croit comprendre qu’en date du 19 mai 2017, Walgreens avait changé de marque et avait cessé d’employer sa marque de commerce VISION DIRECT, redirigeant les consommateurs de l’adresse visiondirect.com vers l’adresse walgreens.com (affidavit Rust, au para 19) – M. Rust cite un article d’un tiers pour expliquer le changement et la cessation de l’emploi de la marque VISION DIRECT par Walgreens (Pièce J);

· des admissions du Dr Robertson, lors de son contre-interrogatoire, selon lesquelles il ne se souvient pas d’exemples de témoignages de clients qui auraient confus la marque VISION DIRECT de Walgreens avec la marque VISION CENTER DIRECT de l’Opposante (page 72, Q25), et qu’il semble que l’Opposante a coexisté avec visiondirect.com dans le marché canadien pendant près de 15 ans (page 73, Q11).

[56] Je conclus que la preuve de la Requérante n’appuie pas sa position concernant l’emploi par Walgreens, puisqu’il s’agit d’un ouï-dire inadmissible. En fait, je remarque que M. Rust n’a aucune connaissance directe de la durée et de l’étendue de la période pendant laquelle Walgreens a employé la marque de commerce VISION DIRECT au Canada. M. Rust s’appuie plutôt sur un article provenant d’Internet qui constitue un ouï-dire et qui ne peut pas être invoqué comme preuve de la véracité de son contenu. De plus, même si je présumais que Walgreens était active sur le site visiondirect.com entre 2001 et 2017, la preuve fournie (à savoir un imprimé d’une page Web archivée) est minime. Sans plus d’éléments de preuve – à tout le moins, le volume des ventes de Walgreens au Canada et une certaine indication voulant que les consommateurs canadiens ont été exposés à la marque –, je ne suis pas disposée à présumer que Walgreens avait une présence significative dans le marché canadien pendant cette période.

[57] Afin d’accorder un poids significatif à la longue coexistence en tant que facteur dans l’analyse relative à la confusion, il devrait y avoir la preuve d’un volume suffisant d’emploi simultané réel des marques de commerce et des noms commerciaux. En l’espèce, la preuve très limitée de l’emploi de la marque de commerce VISION DIRECT par Walgreens pourrait très bien expliquer l’absence de cas réels de confusion.

[58] En ce qui concerne la preuve de l’emploi de la Marque par la Requérante au Canada, je ne peux pas en tenir compte parce qu’elle est postérieure à la date pertinente du 7 janvier 2016.

[59] Par conséquent, ce facteur n’aide pas la Requérante.

Circonstance de l’espèce – état du registre

[60] La preuve de l’état du registre n’est pertinente que dans la mesure où elle permet de tirer des conclusions valables concernant la situation du marché [Ports International Ltd c Dunlop Ltd (1992), 41 CPR (3d) 432 (COMC); Del Monte Corp c Welch Foods Inc (1992), 44 CPR (3d) 205 (CF)]. De plus, les conclusions concernant l’état du marché ne peuvent être tirées de cette preuve que si un grand nombre d’enregistrements pertinents sont trouvés [Kellogg Salada Canada Inc c Maximum Nutrition Ltd (1992), 43 CPR (3d) 349 (CAF); McDowell c Laverana GmbH & Co KG, 2017 CF 327, aux para 41 à 46]. Si une preuve suffisante de l’état du registre est fournie, le registraire peut conclure que la probabilité de confusion est réduite en suivant le principe bien établi selon lequel, lorsque deux marques de commerce contiennent un élément commun qui est également contenu dans un certain nombre d’autres marques dans le même marché, cela a tendance à faire en sorte que les consommateurs accordent plus d’attention aux autres caractéristiques non communes des marques en question pour les distinguer [K-Tel International Ltd c Interwood Marketing Ltd (1997), 77 CPR (3d) 523 (CF 1re inst)].

[61] L’affidavit Benmore contient les résultats de diverses recherches de Mme Benmore dans les dossiers de marques de commerce de l’Office de la propriété intellectuelle du Canada à l’aide de la base de données CorSearch. Les constatations de Mme Benmore étaient les suivantes en date du 18 septembre 2019 :

· il y a plus de 863 marques de commerce déposées qui contiennent le terme « vision » (para 3, Pièce A);

· il y a également plus de 78 marques de commerce déposées qui contiennent le terme « vision » et qui comprennent « contact » [lentilles de contact ou lentilles cornéennes] dans la version anglaise de leur état déclaratif des produits et services (para 4, Pièce B);

· il y a également plus de 137 marques de commerce déposées qui contiennent le terme « vision » et qui comprennent le terme « eye » [yeux] dans la version anglaise de leur état déclaratif des produits et services (para 5, Pièce C);

· il y a 3 002 marques de commerce déposées qui contiennent le terme « center » (para 6, Pièce D);

· il y a 23 marques de commerce déposées qui contiennent le terme « center » et qui comprennent également le terme « contact » dans la version anglaise de leur état déclaratif des services (para 7, Pièce E);

· il y a huit marques de commerce déposées qui contiennent les termes « vision » et « center » (para 8, Pièce F);

· il y a 54 marques de commerce déposées qui contiennent le terme « center » et qui comprennent également le terme « eye » dans la version anglaise de leur état déclaratif des produits et services (para 9, Pièce G).

[62] Je remarque que les détails des enregistrements cités dans les Pièces A à G susmentionnées, y compris les états déclaratifs des produits et services liés, n’ont pas été fournis dans la preuve, et le registraire refuse généralement d’exercer son pouvoir discrétionnaire pour prendre connaissance de ses propres dossiers, sauf pour vérifier si les enregistrements et les demandes d’enregistrement de marque de commerce invoqués dans une déclaration d’opposition existent [voir Quaker Oats of Canada Ltd/La Compagnie Quaker Oats du Canada Ltée c Menu foods Ltd (1986), 11 CPR (3d) 410 (COMC)]. Bien que certaines recherches de marques de commerce aient été restreintes pour couvrir ces enregistrements qui comprennent les termes « contact » ou « eye » dans la version anglaise de leur état déclaratif des produits et services, ces termes recherchés sont larges (en ce sens qu’ils ne correspondent pas à un produit ou service particulier). Par conséquent, sans une liste des produits et services figurant dans les enregistrements, je ne peux pas confirmer s’ils visent des produits ou services liés à des « lentilles de contact », des « lentilles cornéennes » ou des « lunettes » plutôt que des produits ou services non liés, y compris les termes « contact » ou « eye », comme « contact paper » [papier contact], « customer contacts » [coordonnées des clients] ou « eye nuts » [écrou à œil]. De plus, sans renseignement sur les dates d’enregistrement de ces marques, il n’est pas possible de déterminer si ces enregistrements existaient à la date pertinente du 7 janvier 2016. Par conséquent, la preuve de l’état du registre n’aide pas la Requérante.

[63] De plus, même si j’ignorais les lacunes susmentionnées, cette preuve de l’état du registre n’aiderait pas de façon significative la Requérante, puisque les recherches de Mme Benmore n’ont permis de repérer que les marques de commerce qui contiennent les termes VISION et CENTER, mais non les marques de commerce déposées incorporant à la fois les termes VISION et DIRECT, qui sont les éléments communs de la Marque et du nom commercial en cause. De plus, à l’exception des résultats de recherche de base dans Google (affidavit Rust, Pièces K et L), qui sont postérieurs à la date pertinente, il n’y a aucune preuve concernant l’emploi d’une ou l’autre des marques de tiers dans le marché canadien.

Circonstances de l’espèce – enregistrement de VISION DIRECT & Design par le demandeur

[64] L’affidavit Rust contient les détails de la demande d’enregistrement no 1,762,322 de la Requérante pour la marque de commerce VISION DIRECT & Design, qui a été enregistrée en tant qu’enregistrement no LMC1,036,462 le 5 juillet 2019 (affidavit Rust, au para 9, Pièce C). La demande d’enregistrement de cette marque de commerce combinée a été produite à la même date et en liaison avec les mêmes produits et services que la Demande d’enregistrement de la Marque.

[65] Étant donné que l’enregistrement de cette marque de commerce est postérieur à la date pertinente, je ne peux pas en tenir compte en tant que circonstance de l’espèce.

Conclusion

[66] Après avoir tenu compte de toutes les circonstances, et en particulier du degré de ressemblance entre les marques de commerce et noms commerciaux des parties, du chevauchement des produits, services et entreprises des parties, ainsi que de la mesures dans laquelle le nom commercial de l’Opposante est devenu connu et de la période pendant laquelle le nom commercial de l’Opposante a été en usage, je conclus, au mieux pour la Requérante, que la probabilité de confusion entre la Marque et le nom commercial de l’Opposante est équitablement partagée entre une conclusion de confusion et une conclusion d’absence de confusion en ce qui a trait aux produits et services énumérés à l’annexe A de la présente décision. Pour en arriver à cette conclusion, j’ai accordé au nom commercial de l’Opposante une protection étroite. Cela dit, une protection étroite n’équivaut pas à une absence de protection. Étant donné qu’il incombait à la Requérante de démontrer, selon la prépondérance des probabilités, qu’il n’existe aucune probabilité raisonnable de confusion entre les marques, je dois donc trancher à l’encontre de la Requérante.

[67] Toutefois, la Requérante s’est acquittée de son fardeau ultime de démontrer qu’il n’y a aucune probabilité raisonnable de confusion entre les marques de commerce et noms commerciaux des parties en ce qui a trait aux produits et services énumérés à l’annexe B de la présente décision.

[68] Par conséquent, les motifs d’opposition fondés sur les articles 16(2)c) et 16(3)c) sont accueillis en ce qui a trait aux produits et services énumérés à l’annexe A de la présente décision, mais sont rejetés en ce qui a trait aux produits et services énumérés à l’annexe B.

Autres motifs d’opposition

[69] Étant donné que l’Opposante a déjà en partie obtenu gain de cause à l’égard de deux motifs, je n’examinerai pas les motifs d’opposition fondés sur les articles 16(2)a), 16(3)a) et 2; je me contenterai de dire que s’il avait été décidé que l’Opposante s’était acquittée de son fardeau de preuve à l’égard de ces autres motifs, l’Opposante aurait probablement aussi eu gain de cause en partie pour des raisons semblables à celles énoncées à l’égard des motifs d’opposition discutés ci-dessus.

Décision

[70] Dans l’exercice des pouvoirs qui m’ont été délégués en vertu des dispositions de l’article 63(3) de la Loi, je rejette la Demande en ce qui a trait aux produits et services énumérés à l’annexe A de la présente décision, et je rejette l’opposition en ce qui a trait aux produits et services énumérés à l’annexe B de la présente décision, conformément à l’article 38(12) de la Loi.

 

Jennifer Galeano

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

Traduction certifiée conforme

Anne Laberge

Le français est conforme aux WCAG.


Annexe A

Produits :

(1) Produits de soins des yeux à usage cosmétique; produits cosmétiques pour les soins des yeux […]; masques pour les yeux et cache-œil imprégnés de produits cosmétiques non médicamenteux; […] produits pour le nettoyage de lunettes et de lunettes de soleil, chiffons imprégnés de produits pour le nettoyage de lunettes et lunettes de soleil.

(2) Solutions à verres de contact, solutions et comprimés de nettoyage, de rinçage ou de neutralisation de verres de contact, solutions salines; douches oculaires et produits en vaporisateur pour les yeux, préparations pour le traitement de la sécheresse oculaire, gouttes pour les yeux; hydratants et onguents pour les yeux à usage médical; vitamines oculaires; cache-œil; produits de soins des yeux à usage médical; produits pharmaceutiques pour le traitement des troubles oculaires; préparations médicamenteuses pour les soins des yeux […]; vitamines pour les soins des yeux; […] masques pour les yeux et cache-œil imprégnés de préparations médicamenteuses […]

(3) Verres de contact; contenants pour verres de contact, étuis à verres de contact, étuis conçus pour les verres de contact; lunettes, lunettes de soleil, lunettes de lecture, lunettes équipées de lampes à DEL; pièces, éléments d’assemblage et accessoires, nommément étuis, chaînes, courroies, chiffons de nettoyage, étuis à lunettes pour lunettes ou lunettes de soleil; étuis à lunettes; lunettes de protection, nommément lunettes de plongée, lunettes de plongée sous-marine, lunettes de sport, lunettes de vélo, lunettes de natation, lunettes de natation d’ordonnance; lunettes de ski, lunettes de ski d’ordonnance; masques de plongée, masques de plongée d’ordonnance; articles de lunetterie de protection, articles de lunetterie de protection d’ordonnance; cordons pour lunettes ou lunettes de soleil; étuis conçus pour les lunettes de protection ou les articles de lunetterie de protection.

Services :

Services de vente au détail, nommément vente de produits ayant trait à la vision, nommément vente de ce qui suit : verres de contact, étuis à verres de contact, solutions de nettoyage, de désinfection et de trempage de verres de contact, solutions nettoyantes pour les yeux, larmes artificielles et solutions salines, articles de lunetterie et lunettes de soleil; services de vente au détail dans les domaines suivants : articles de lunetterie, lunettes, lunettes de soleil, verres de contact, lunettes de protection, masques de plongée, produits et solutions pour les soins d’articles de lunetterie et de verres de contact, étuis et sacs à dos de voyage pour le rangement de ce qui suit : articles de lunetterie et verres de contact ainsi que produits nettoyants, accessoires de lunetterie, produits de soins des yeux, […] médicaments pour les yeux […]; services de vente au détail en ligne dans les domaines suivants : articles de lunetterie, lunettes, lunettes de soleil, verres de contact, lunettes de protection, masques de plongée, produits et solutions pour les soins d’articles de lunetterie et de verres de contact, étuis et sacs à dos de voyage pour le rangement de ce qui suit : articles de lunetterie et verres de contact ainsi que produits nettoyants, accessoires de lunetterie, produits de soins des yeux, […] médicaments pour les yeux […]; offre d’information, de consultation et de conseils ayant trait à tous les produits de soins des yeux, de lunetterie et de la vue ainsi qu’aux médicaments pour les yeux.

Annexe B

Produits :

(1) […] produits cosmétiques pour les soins […] de la peau et du visage; produits de soins de la peau (non médicamenteux); […] masques de beauté imprégnés de produits cosmétiques; collagène contenant des produits de soins de la peau; produits de soins de la peau (microdermabrasion) à usage cosmétique; […]

 

(2) […] préparations médicamenteuses pour les soins […] de la peau et du visage; […] vitamines pour les soins de la peau et du visage; produits de soins de la peau (médicamenteux); […] masques de beauté imprégnés de préparations médicamenteuses.

 

Services :

[…] services de vente au détail dans les domaines suivants : […] cosmétiques pour le contour des yeux, […] médicaments pour les soins de la peau et du visage, produits de soins de la peau; services de vente au détail en ligne dans les domaines suivants : […] cosmétiques pour le contour des yeux, […] médicaments pour les soins de la peau et du visage, produits de soins de la peau; offre d’espace publicitaire sur un site Web; promotion de la vente de produits et de services au moyen d’un programme de fidélisation de la clientèle; promotion de la vente de produits et de services au moyen d’échantillons; administration de programmes de fidélisation de la clientèle; […]

 

 

 


 

COMMISSION DES OPPOSITIONS DES MARQUES DE COMMERCE

OFFICE DE LA PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE DU CANADA

COMPARUTIONS ET AGENTS INSCRITS AU DOSSIER

___________________________________________________

DATE DE L’AUDIENCE Aucune audience n’a été tenue

AGENTS AU DOSSIER

Aucun agent inscrit au dossier

POUR L’OPPOSANTE

DLA Piper (CANADA) LLP

POUR LA REQUÉRANTE

 

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