Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

Informations sur la décision

Contenu de la décision

OPIC

Logo de l'OPIC / CIPO Logo

CIPO

LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

THE REGISTRAR OF TRADEMARKS

Référence : 2022 COMC 159

Date de la décision : 2022-08-17

[TRADUCTION CERTIFIÉE,

NON RÉVISÉE]

DANS L’AFFAIRE DE L’OPPOSITION

 

Canadian Bio-Systems Inc.

Opposante

et

 

Cargill Limited

Requérante

 

1,620,300 pour NUTRI-MIX

Demande

Le dossier

[1] Le 28 mars 2013, Cargill Limited (la Requérante actuelle) a produit sa demande d’enregistrement pour la marque de commerce NUTRI-MIX (la Marque) fondée sur l’emploi projeté en liaison avec de la nourriture pour animaux. La demande a été subséquemment modifiée le 13 mai 2021 pour couvrir les produits suivants :

Nourriture pour grands animaux uniquement, à savoir pour le bétail, les vaches, les chèvres, les moutons et les porcs, plus précisément sous forme de prémélanges minéraux personnalisés préparés et vendus uniquement sur place, à la ferme du client, et livrés directement à la ferme du client, et non préparés ni vendus par des magasins de détail ni offerts en vente libre, en ligne, par des appareils mobiles ou par des téléphones, les produits susmentionnés excluant en particulier la nourriture pour animaux de compagnie et les gâteries pour animaux de compagnie (les Produits).

[2] La Demande a été annoncée aux fins d’opposition dans le Journal des marques de commerce du 10 mai 2017. Le 10 juillet 2018, Canadian Bio-Systems Inc (l’Opposante) a produit une déclaration d’opposition contre la demande en vertu de l’article 38 de la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, c T-13 (la Loi). Tous les renvois à la Loi concernent la Loi dans sa version modifiée le 17 juin 2019 (la Loi), à l’exception des motifs d’opposition qui renvoient à la Loi dans sa version antérieure (voir l’article 70 de la Loi).

[3] Les motifs d’opposition sont résumés ci-dessous :

· La Demande n’est pas conforme aux exigences de l’article 30e) de la Loi, puisque, à la date de production de la demande, la Requérante n’avait pas l’intention d’employer la Marque au Canada en liaison avec les Produits visés par la demande.

· La Requérante n’est pas la personne qui a droit à l’enregistrement de la Marque en vertu de l’article 16(3)a) de la Loi puisque, à la date de production de la Demande, la Marque créait de la confusion avec la marque de commerce NUTRAMIX de l’Opposante, employée ou révélée antérieurement au Canada en liaison avec des suppléments alimentaires pour bétail commerciaux.

· La Marque n’est pas distinctive en vertu de l’article 2 de la Loi puisqu’elle ne distingue pas et n’est pas adaptée pour distinguer les Produits de la Requérante des produits de l’Opposante.

[4] Le 20 septembre 2018, la Requérante a produit une contre-déclaration réfutant les motifs d’opposition.

[5] Les deux parties ont produit des preuves, lesquelles sont abordées ci-dessous. Aucun des auteurs d’affidavits n’a été contre-interrogé. Seule la Requérante a produit un plaidoyer écrit. Aucune des deux parties n’a demandé la tenue d’une audience.

Preuve

[6] La preuve de l’Opposante est composée de l’affidavit de Krisjan Jones, coordonnateur du marketing et de la TI de l’Opposante.

[7] M. Jones atteste, entre autres, des faits suivants à l’égard de l’Opposante :

· L’Opposante a réalisé sa première vente enregistrée de produits NUTRAMIX au Canada le 11 avril 2013, approximativement. Une copie de la facture pour la vente est jointe à titre de Pièce C.

· Dans la période d’avril 2013 à janvier 2019, l’Opposante a vendu plus de 350 000 kg de son produit de marque NUTRAMIX au Canada et aux États-Unis, représentant des ventes nettes de près de 2 millions de dollars (canadiens).

· De 2010 à 2018, le site Web de l’Opposante a été consulté plus de 160 000 fois. Une copie du rapport de données sur les utilisateurs généré par Google Analytics pour cette période est jointe à titre de Pièce F.

· De novembre 2016 à septembre 2018, l’Opposante a investi plus de 13 000 dollars canadiens en marketing pour les produits NUTRAMIX, y compris la production d’une vidéo d’information (dont une copie est jointe à titre de Pièce H) et la distribution d’une brochure concernant le rehausseur de nourriture NUTRAMIX (dont une copie est jointe à titre de Pièce G). Jointe à titre de Pièce I est une photo représentative des produits NUTRAMIX de l’Opposante et des étiquettes représentatives portant la marque de commerce NUTRAMIX.

[8] La preuve de la Requérante est composée de l’affidavit de Jennifer Leah Stecyk, recherchiste en marques de commerce employée par l’agent de la Requérante. Le 4 décembre 2019, Mme Stecyk a mené une recherche informatique à l’aide de la plateforme et base de données de recherche de marques de commerce en ligne SAEGIS pour les marques de commerce actives contenant l’élément NUTR en liaison avec les produits pour animaux ou bétail. Elle a personnellement examiné les détails de 296 demandes et enregistrements actifs et, en appliquant son expertise, elle a sélectionné les marques les plus pertinentes qui ont été dévoilées par la recherche, excluant les marques qui contenaient NUTR seulement comme une partie d’un mot du dictionnaire comme « nutrition » ou « nutraceutical ».

Fardeau de la preuve et dates pertinentes

[9] C’est à la Requérante qu’incombe le fardeau ultime d’établir, selon la prépondérance des probabilités, que la demande est conforme aux exigences de la Loi. Cela signifie que, si l’on ne peut en venir à une conclusion déterminante en faveur de la Requérante après examen de l’ensemble de la preuve, la question doit être tranchée à l’encontre de la Requérante. Toutefois, l’Opposante doit s’acquitter de son fardeau de preuve initial d’établir suffisamment de preuves admissibles à partir desquelles on pourrait raisonnablement conclure que les faits allégués à l’appui de chaque motif d’opposition existent [voir John Labatt Limited c The Molson Companies Limited, 1990 CanLII 11059 (CF), 30 CPR (3d) 293 (CF 1re inst), à la p. 298].

[10] Les dates pertinentes relatives aux motifs d’opposition sont les suivantes :

· articles 38(2)a) et 30 de la Loi – la date de production de la demande [Georgia-Pacific Corp c Scott Paper Ltd (1984), 3 CPR (3d) 469 (COMC), à la p. 475];

· articles 38(2)c) et 16(3)a) de la Loi – la date de production de la demande;

· article 38(2)d) de la Loi – la date de production de l’opposition [Metro-Goldwyn-Mayer Inc c Stargate Connections Inc, 2004 CF 1185, 34 CPR (4th) 317 (CF)].

Motifs d’oppositio

Motif fondé sur l’article 30e) – Non-conformité

[11] Comme il est indiqué ci-dessus, le motif d’opposition fondé sur l’article 30e) allègue que la Requérante n’avait pas l’intention d’employer la Marque au Canada en liaison avec les Produits à la date de production de la demande. Il n’y a aucune preuve et aucun argument qui appuient ce motif d’opposition. Par conséquent, il est rejeté puisque l’Opposante ne s’est pas acquittée de son fardeau initial.

Motif fondé sur l’article 16(3)a) – Absence du droit à l’enregistrement

[12] Comme il est indiqué ci-dessus, le motif d’opposition fondé sur l’article 16(3)a) allègue que la Requérante n’est pas la personne ayant droit à l’enregistrement de la Marque puisque, à la date de production de la demande, elle créait de la confusion avec la marque de commerce NUTRAMIX de l’Opposante. L’Opposante n’a pas démontré que sa marque de commerce avait été employée ou révélée au Canada avant la date de production de la demande [TLV Co, Ltd c Tyco Flow Control, Inc, 2003 CanLII 71145 (COMC)]. À cet égard, la preuve la plus antérieure de l’Opposante de la date de premier emploi de sa marque est le 11 avril 2013, ce qui est ultérieur à la date pertinente pour ce motif; c’est-à-dire le 8 mars 2013. De plus, la preuve est insuffisante pour démontrer que la marque de l’Opposante avait été révélée à la date pertinente. Par conséquent, ce motif est également rejeté puisque l’Opposante ne s’est pas acquittée de son fardeau initial.

Motif fondé sur l’article 2 – Absence de caractère distinctif

[13] Comme il est indiqué ci-dessus, l’Opposante fait valoir que la Marque ne distingue pas la Requérante puisqu’elle ne distingue pas et n’est pas adaptée pour distinguer les Produits de la Requérante des produits de l’Opposante offerts en liaison avec la marque de commerce NUTRAMIX.

[14] Afin de s’acquitter de son fardeau initial d’appuyer le motif d’opposition fondé sur l’absence de caractère distinctif, l’Opposante doit démontrer que, à la date de production de sa déclaration d’opposition, sa marque de commerce NUTRAMIX était connue au Canada en liaison avec ses produits dans la mesure qu’elle a acquis une réputation « importante, significative ou suffisante » pour annuler le caractère distinctif de la Marque ou sinon être « bien connu[e] dans une région particulière du Canada » [Motel 6, Inc c No 6 Motel Ltd, 1981 CanLII 2834 (CF); Bojangles’ International LLC c Bojangles Café Ltd, 2006 CF 657, au para 33]. À cet égard, la preuve d’un opposant n’est pas limitée à la vente de produits ou de services au Canada. Elle peut également être fondée sur la preuve de la connaissance ou de la réputation de la marque de commerce d’un opposant, y compris une connaissance ou une réputation acquise par le bouche-à-oreille ou par des articles de journaux ou de magazines [Motel 6, Inc c No 6 Motel Ltd, précité, aux para 58 et 59].

[15] La Requérante observe que l’Opposante ne s’est pas acquittée de son fardeau initial pour les raisons suivantes :

· Bien que M. Jones indique que, entre avril 2013 et janvier 2019, l’Opposante avait vendu plus de 350 000 kg de NUTRAMIX au Canada et aux États-Unis représentant des ventes nettes de près de 2 000 000 $, il n’y a aucune ventilation de ces ventes et donc aucune preuve quant à la proportion de ces chiffres qui concerne particulièrement le Canada.

· Des trois factures soumises par l’Opposante, une seule porte une date antérieure à la date pertinente (10 juillet 2018) et celle-ci est pour une vente à une entreprise aux États-Unis, mais expédiée à une entreprise au Canada.

· Les copies des pages sélectionnées du site Web de l’Opposante arborant la marque de commerce NUTRAMIX portent la date du 16 janvier 2019, ce qui est ultérieur à la date pertinente pour le motif fondé sur l’article 38(2)d).

· Bien que M. Jones affirme que le site Web de l’Opposante à www.canadianbio.com ait été consulté plus de 160 000 fois de 2010 à 2018, le rapport de Google Analytics en appui ne fournit aucun renseignement quant aux visites d’utilisateurs canadiens des pages du site Web ou du contenant concernant particulièrement la marque de l’Opposante.

· Bien que M. Jones affirme que l’Opposante a investi [traduction] « plus de 13 000 $ CA » entre novembre 2016 et septembre 2018 dans le marketing des produits NUTRAMIX, y compris la production d’une vidéo d’information internationale et la distribution d’une brochure, il n’y a aucune ventilation des dépenses en marketing alléguées et donc aucune preuve de la proportion de ces chiffres qui concerne particulièrement le Canada.

· Bien que l’Affidavit Jones fournisse deux exemples de matériel de marketing de l’Opposante, à savoir une copie d’une brochure et une copie d’une présentation technique concernant le produit vendu en liaison avec la marque de commerce NUTRAMIX de l’Opposante, il y a une absence complète de renseignements quant à l’étendue à laquelle le matériel de marketing de l’Opposante a été distribué au Canada ou à tout autre endroit. De plus, ces deux exemples de matériel de marketing ne portent aucune date. Enfin, M. Jones n’affirme pas ou ne confirme pas particulièrement qu’un tel matériel a été distribué par l’Opposante au cours de la période pertinente ou qu’il est représentatif du matériel de marketing distribué par l’Opposante au Canada au cours de la période pertinente.

[16] La Requérante affirme également que, tel qu’il est expliqué dans Bojangles, précité, un propriétaire ne peut pas simplement affirmer que sa marque de commerce est devenue connue au Canada; il doit y avoir des preuves claires de la mesure dans laquelle elle est connue.

[17] Je suis d’accord avec la Requérante que la preuve de l’Opposante ne démontre pas que la marque de commerce NUTRAMIX de l’Opposante était soit suffisamment connue au Canada, soit bien connue dans une région particulière du Canada à la date de production de l’opposition de manière à annuler le caractère distinctif de la Marque. La Requérante a souligné un certain nombre d’ambiguïtés dans la preuve de l’Opposante. Bien que la Requérante aurait pu entreprendre la contre-interrogation de M. Jones pour clarifier ces ambiguïtés, elle n’a aucune obligation de le faire puisque le registraire a constamment soutenu que de telles ambiguïtés doivent être clarifiées par la partie présentant la preuve dans une affaire d’opposition [voir, par exemple, Power Budd, LLP c Beaudry, 2006 CanLII 80342 (COMC); Ben Sherman Group Limited c Knautz, 2013 COMC 122 (CanLII); Hunter Douglas Inc c Blinds To Go Inc, 2007 CanLII 80854 (COMC)]. C’est l’Opposante qui a la responsabilité de produire une preuve qui me permet de conclure que sa marque de commerce était soit suffisamment connue au Canada, soit bien connue dans une région particulière du Canada avant la date pertinente pour ce motif. Puisque l’Opposante ne l’a pas fait, elle ne s’est pas acquittée de son fardeau initial d’appuyer ce motif d’opposition. Par conséquent, ce motif d’opposition est également rejeté.

Décision

[18] Compte tenu de ce qui précède, et conformément au pouvoir qui m’a été délégué en vertu de l’article 63(3) de la Loi, je rejette l’opposition conformément à l’article 38(12) de la Loi.

 

Cindy Folz

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

Traduction certifiée conforme

William Desroches

Le français est conforme aux WCAG.


COMMISSION DES OPPOSITIONS DES MARQUES DE COMMERCE

OFFICE DE LA PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE DU CANADA

COMPARUTIONS ET AGENTS INSCRITS AU DOSSIER

___________________________________________________

DATE DE L’AUDIENCE Aucune audience tenue.

AGENTS AU DOSSIER

Smart & Biggar LLP

Pour l’Opposante

Osler, Hoskin & Harcourt LLP

Pour la Requérante

 

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.