Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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Office de la propriété intellectuelle du Canada

LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

Référence : 2022 COMC 227

Date de la décision : 2022-11-22

DANS L’AFFAIRE DE L’OPPOSITION

Opposante : Plasti Dip International, Inc.

Requérante : Distributions Protège D.I.P. (2012) Inc.

Demande : 1846098 pour PROTECT_DIP

Introduction

[1] Plasti Dip International, Inc. (l’Opposante) s’oppose à l’enregistrement de la marque de commerce PROTECT_DIP (la Marque), qui fait l’objet de la demande no 1 846 098 produite par Distributions Protège D.I.P. (2012) Inc. (la Requérante). La demande d’enregistrement comprend une revendication d’emploi au Canada depuis le 1er août 2012 et l’état déclaratif des produits suivant, reproduit ci-dessous, ainsi que la classification de Nice (Cl) connexe :

[traduction]

Cl 2 (1) Peinture amovible à base de résine synthétique destinée au marché automobile.

[2] L’opposition est principalement fondée sur l’allégation selon laquelle la Marque crée de la confusion avec la marque de commerce PLASTI DIP de l’Opposante, précédemment enregistrée et employée au Canada en liaison avec des produits similaires ou connexes.

[3] Pour les raisons qui suivent, la demande est rejetée.

Dossier

[4] La demande d’enregistrement déposée par la Marque a été produite le 6 juillet 2017 et a été annoncée aux fins d’opposition dans le Journal des marques de commerce le 7 novembre 2018. Le 8 avril 2019, l’Opposante a produit une déclaration d’opposition en vertu de l’article 38 de la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, ch. T-13 (la Loi).

[5] De nombreuses modifications à la Loi sont entrées en vigueur le 17 juin 2019. Étant donné que la demande en l’espèce a été annoncée avant cette entrée en vigueur, conformément aux dispositions transitoires de l’article 70 de la Loi, les motifs d’opposition seront évalués conformément à la Loi dans sa version antérieure aux modifications.

[6] L’Opposante soulève des motifs d’opposition fondés sur les articles 30 (non-conformité), 12 (non-enregistrabilité), 16 (absence de droit à l’enregistrement) et 2 (absence de caractère distinctif) de la Loi, lesquels sont résumés ci-dessous :

 

 

 

 

 

  1. Absence de caractère distinctif conformément à l’article 2

La Marque ne distingue pas les produits de la Requérante visés par la demande de la Requérante et ne permet pas de distinguer ces produits visés par la demande de ceux de l’Opposante.

[Remarque : Dans le contexte, je suppose que l’Opposante fait ici référence aux produits offerts en liaison avec sa marque de commerce PLASTI DIP.]

[7] La Requérante a produit une contre-déclaration dans laquelle elle nie essentiellement chacun des motifs d’opposition.

[8] La preuve principale de l’Opposante est constituée des affidavits suivants :

[9] À l’appui de sa demande, la Requérante a produit l’affidavit de Christine Plante, une assistante employée par les agents représentant la Requérante, daté du 3 septembre 2020, accompagné des pièces CP-1 à CP-4 (l’affidavit de Plante). L’affidavit de Plante verse dans la preuve un contenu lié aux États-Unis d’Amérique, à savoir, plus précisément, les résultats des recherches effectuées par Mme Plante dans la base de données des marques de commerce United States Patent and Trademark Office (USPTO) (i) pour les marques de commerce constituées du terme Plasti Dip et (ii) pour la marque de commerce FlexiDip. Sont notamment versés dans la preuve les détails relatifs à deux marques de commerce constituées du terme PLASTI DIP de l’Opposante obtenus lors de la première recherche et des copies de documents enregistrés dans la base de données USPTO et relatifs à la demande américaine abandonnée de l’Opposante concernant le terme PLASTI DIP (la demande des États-Unis d’Amérique portant le numéro 88/151,435). Sont également versés à la preuve des détails et des copies de divers documents enregistrés dans la base de données des marques de commerce USPTO relatifs à la demande des États-Unis d’Amérique abandonnée concernant le terme FlexiDip (demande américaine portant le numéro 86/085,498) au nom de Rust-Oleum Brands Company. Enfin, l’affidavit de Plante verse dans la preuve une copie d’une décision de 2014 rendue par le United States District Court District of Minnesota, dans le cadre d’une requête en injonction préliminaire présentée par l’Opposante contre Rust-Oleum Brands Company.

[10] L’Opposante a ensuite produit les affidavits suivants à titre de contre-preuve :

[11] Aucun des déposants des parties n’a été contre-interrogé.

[12] Seule l’Opposante a produit des observations écrites et s’est présentée à l’audience.

Fardeau de preuve incombant à chacune des parties

[13] L’Opposante doit s’acquitter de son fardeau de preuve initial en produisant suffisamment d’éléments de preuve à partir desquels on pourrait raisonnablement conclure que les faits allégués à l’appui de chaque motif d’opposition existent [John Labatt Ltd c Molson Companies Ltd (1990), 30 CPR (3d) 293 (CF 1re inst)]. Si elle s’est acquittée de ce fardeau, la Requérante doit alors s’acquitter du fardeau ultime de démontrer, selon la prépondérance des probabilités, qu’aucun motif d’opposition ne fait obstacle à l’enregistrement de la Marque.

Analyse des motifs d’opposition

Articles 30a) et b) – Non-conformité (état, dressé dans les termes ordinaires du commerce et date de premier usage) – motifs d’opposition rejetés sommairement

[14] En ce qui concerne le motif d’opposition fondé sur l’article 30a), tant dans ses observations écrites qu’à l’audience, l’Opposante a indiqué que, bien que ce motif ne soit pas retiré, il ne sera pas maintenu devant la Commission.

[15] En ce qui concerne le motif d’opposition fondé sur l’article 30b), l’Opposante n’a pas produit d’éléments de preuve qui remettent effectivement en question l’emploi de la Marque par la Requérante ou l’exactitude de la date de premier usage revendiquée. À cet égard, il convient de rappeler que la Requérante n’est pas tenue de justifier la revendication relative à l’emploi de la Marque contenue dans sa demande, à moins que cette revendication ne soit d’abord remise en question par l’Opposante lorsqu’elle cherche à s’acquitter de son fardeau de preuve initial [Kingsley c Ironclad Games Corp, 2016 COMC 19]. J’ajoute que, dans les circonstances de l’espèce, l’absence d’éléments de preuve concernant l’usage de la Marque par la Requérante ne suffit pas à décharger l’Opposante de son fardeau de preuve.

[16] Par conséquent, ces motifs d’opposition sont rejetés.

Article 12(1)d)– Non-enregistrabilité (confusion avec une marque de commerce enregistrée)

[17] Ayant exercé le pouvoir discrétionnaire du registraire de consulter le registre, je confirme que l’Enregistrement de l’Opposante est en règle à la date de la présente décision.

[18] L’Opposante s’étant acquittée de son fardeau initial à l’égard de ce motif d’opposition, la Requérante doit maintenant démontrer, selon la prépondérance des probabilités, qu’il n’y a aucune probabilité raisonnable de confusion entre la Marque et la Marque de commerce de l’Opposante.

Test en matière de confusion

[19] Le test à appliquer pour trancher la question de la confusion est énoncé à l’article 6(2) de la Loi, qui prévoit que l’emploi d’une marque de commerce crée de la confusion avec une autre marque de commerce lorsque l’emploi des deux marques de commerce dans la même région serait susceptible de faire conclure que les produits liés à ces marques de commerce sont fabriqués, vendus, donnés à bail ou loués, ou que les services liés à ces marques sont loués ou exécutés, par la même personne, que ces produits ou services soient ou non de la même catégorie générale ou figurent ou non dans la même classe de la classification de Nice.

[20] Par conséquent, l’article 6(2) de la Loi ne concerne pas la confusion entre les marques de commerce elles-mêmes, mais celle entre des produits d’une source qui sont considérés comme provenant d’une autre source. La question qui se pose en l’espèce est celle de savoir si un consommateur, qui n’aurait qu’un vague souvenir de la marque de commerce PLASTI DIP de l’Opposante, et qui voit les produits de la Requérante en liaison avec la Marque, penserait qu’ils proviennent de l’Opposante, qu’ils sont parrainés ou approuvés par elle.

[21] Dans l’application du test en matière de confusion, je dois tenir compte de toutes les circonstances de l’espèce, y compris celles énumérées à l’article 6(5) de la Loi, à savoir : le caractère distinctif inhérent des marques de commerce et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues; la période pendant laquelle les marques ont été en usage; le genre de produits, services ou entreprises; la nature du commerce; et le degré de ressemblance entre les marques de commerce, notamment dans la présentation ou l’apparence, ou dans les idées qu’elles suggèrent. Ces facteurs ne sont pas exhaustifs et un poids différent peut être accordé à chacun d’eux dans le cadre d’une évaluation contextuelle [Veuve Clicquot Ponsardin c Boutiques Cliquot Ltée, 2006 CSC 23; Mattel, Inc. c 3894207 Canada Inc., 2006 CSC 22].

[22] Je me réfère également à Masterpiece Inc c Alavida Lifestyles Inc., 2011, CSC 27, où la Cour suprême du Canada déclare, au para 49, que la ressemblance entre les marques est susceptible d’avoir le plus d’importance dans l’analyse relative à la confusion.

Degré de ressemblance

[23] Ce facteur favorise l’Opposante puisqu’il existe un certain degré de ressemblance entre les marques de commerce en cause. En effet, dans la mesure où les marques de commerce des parties sont toutes deux composées de deux mots, où elles comportent trois syllabes, où elles comportent un premier élément qui commence par la lettre P et où elles se terminent par le mot DIP, il existe des similitudes structurelles, visuelles et phonétiques entre elles. Dans la mesure où ces marques de commerce ont en commun le mot DIP, elles suggèrent également des idées similaires, à savoir un type de revêtement ou la surface d’un article sur laquelle on applique un revêtement. En outre, étant donné que les premières parties des marques, à savoir PLASTI et PROTECT, pourraient, à mon avis, être perçues respectivement comme suggestives ou descriptives de la composition, de la fonction ou de la destination des produits des parties, leur importance aux fins de la distinction se trouve réduite.

Caractère distinctif inhérent

[24] Ce facteur ne favorise pas de manière notable l’une ou l’autre partie, étant donné que les marques de commerce en cause possèdent un degré similaire de caractère distinctif inhérent. Comme mentionné ci-dessus, à mon avis, la Marque de commerce de l’Opposante suggère un revêtement plastique ou la surface d’un article sur laquelle est appliqué un revêtement plastique. De même, la Marque suggère un revêtement de protection ou la surface d’un article sur laquelle est appliqué un revêtement pour éviter qu’il ne soit endommagé.

Mesure dans laquelle les marques sont devenues connues et période pendant laquelle elles ont été en usage

[25] Ces facteurs favorisent l’Opposante. La Requérante n’a pas présenté d’éléments de preuve démontrant que sa Marque a été employée ou s’est fait connaître dans une certaine mesure au Canada, alors que les éléments de preuve présentés par l’Opposante, indiqués ci-dessous, démontrent que la Marque de commerce de l’Opposante a été employée depuis l’année 2010 à tout le moins et s’est fait connaître dans une large mesure au Canada. À cet égard, l’affidavit de Malchow décrit en détail l’emploi de la Marque de commerce de l’Opposante au Canada en liaison avec le produit de revêtement en caoutchouc pelable et amovible de l’Opposante, qui est principalement appliqué sous forme d’aérosol et comprend notamment les renseignements suivants :

 

Genre de produits ou entreprises et nature du commerce

[26] Ces facteurs favorisent l’Opposante. Comme indiqué ci-dessus, l’état déclaratif des produits de la Marque vise la peinture amovible fabriquée à base de résine synthétique destinée au marché automobile, tandis que l’Enregistrement de l’Opposante vise le revêtement plastique à séchage à l’air pour les articles portatifs. Étant donné que je peux faire référence à des définitions contenues dans des dictionnaires, j’ai consulté le Oxford Canadian Dictionary of Current English (2005) pour connaître la signification des mots « paint », « resin » et « coating » ([traduction] peinture, résine et revêtement). Je constate que le mot « paint » peut désigner des revêtements de surface, que le terme « resin » (ou « synthetic resin » [traduction] résine synthétique) représente un composé notamment utilisé dans les matières plastiques et que le terme « coating » s’entend d’une couche ou d’un revêtement mince. Sur la base de ces définitions, les produits des parties semblent ici soit très similaires, soit de nature connexe. Il convient également de noter que les éléments de preuve présentés par l’Opposante dans l’affidavit de Malchow et le premier affidavit de Allen indiquent que les parties mettent en avant des produits similaires, voire identiques, à savoir un revêtement en caoutchouc pouvant être pulvérisé et pelé, qui peut être appliqué sur la surface de différents articles, notamment des véhicules et des pièces automobiles. En l’absence d’éléments de preuve ou d’observations contraires, rien ne permet de conclure que les voies de commercialisation des parties ne pourraient pas également se chevaucher.

Historique des poursuites, statut de la marque de commerce, état du registre et décisions étrangères

[27] En l’absence d’observations produites par la Requérante, il est difficile de savoir quelle position elle souhaitait adopter en ce qui concerne la question de la confusion ou de connaître les arguments qu’elle aurait voulu présenter à l’appui. Bien que je ne considère pas qu’il soit opportun de formuler des hypothèses à cet égard, je voudrais faire remarquer que, quelle que soit l’intention sous-jacente à l’affidavit de Plante, l’historique des poursuites judiciaires et le statut de la marque de commerce PLASTI DIP de l’Opposante aux États-Unis, ainsi que les éléments de preuve produits quant à l’état du registre aux États-Unis, ne favorisent pas la Requérante.

[28] D’une part, la décision du registraire doit être fondée sur les normes canadiennes, en tenant compte de la situation qui prévaut au Canada [voir Quantum Instruments, Inc c Elinca SA (1995), 60 CPR (3d) 264 (COMC) et Vivat Holdings Limited c Levi Strauss & Co (2005), 41 CPR (4th) 8 (CF) citant toutes deux Re Haw Par Brothers International Ltd c Canada (Registraire des marques de commerce) (1979), 48 CPR (2d) 65 (CF 1re inst) et Sun-Maid Growers of California vcWilliams & Humbert Ltd (1981), 54 CPR (2d) 41 (CF 1re inst)]. Plus précisément, l’état du registre, une éventuelle coexistence et l’absence de confusion à l’étranger seraient des éléments peu pertinents, voire pas du tout, pour apprécier la probabilité de confusion au Canada, surtout en l’absence d’autres éléments de preuve quant au contexte, par exemple en ce qui concerne l’état du marché à l’étranger ou la mesure dans laquelle il y a coexistence à l’étranger.

[29] Par ailleurs, bien qu’il soit possible dans certains cas de tenir compte de décisions étrangères pour leur valeur convaincante, tel n’est pas le cas de la décision produite par la Requérante, notamment en raison des différences entre les parties concernées (c’est-à-dire différentes des parties à la présente opposition), de la nature de la procédure, du cadre factuel et juridique et du dossier de preuve.

Conclusion quant à la probabilité de confusion

[30] Après avoir examiné toutes les circonstances de l’espèce, je conclus que la Requérante ne s’est pas acquittée de son fardeau de démontrer l’absence de probabilité raisonnable de confusion entre les marques de commerce des parties. Je parviens à cette conclusion compte tenu du degré de ressemblance entre les marques de commerce des parties, de l’emploi de la Marque de commerce de l’Opposante, de l’ampleur de la mesure dans laquelle elle est devenue connue et du chevauchement entre les produits et les voies de commercialisation des parties. Le motif d’opposition fondé sur l’article 12(1)d) est donc accueilli.

Article 16(1)a) – Absence de droit à l’enregistrement (emploi antérieur de la marque)

[31] Bien que les dates pertinentes diffèrent, le motif d’opposition fondé sur l’article 16(1)a) porte également sur la question de la confusion avec la marque PLASTI DIP de l’Opposante, et les preuves d’usage présentées par l’Opposante, évoquées ci-dessus, permettent à l’Opposante de s’acquitter du fardeau correspondant. Dans la mesure où les conclusions que j’ai tirées précédemment en ce qui concerne le motif d’opposition fondé sur l’article 12(1)d) s’appliquent également, pour l’essentiel, au présent motif d’opposition, je parviens à la même décision à son sujet; le motif d’opposition fondé sur l’article 16 est donc également accueilli.

Autres motifs d’opposition

[32] Étant donné que j’ai rejeté la demande pour deux motifs, je n’évaluerai pas les autres motifs d’opposition fondés sur l’article 30i) et l’article 2 de la Loi.

Décision

[33] Dans l’exercice des pouvoirs qui m’ont été délégués en vertu des dispositions de l’article 63(3) de la Loi, je rejette la demande conformément aux dispositions de l’article 38(12) de la Loi.

_______________________________

Iana Alexova

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

 

Traduction certifiée conforme

Ali Alaoui Benhachem

 

Le français est conforme aux WCAG.


Comparutions et agents inscrits au dossier

DATE DE L’AUDIENCE : 2022-09-02

COMPARUTIONS

Pour l’Opposante : Jeffrey K. Gordon

Pour la Requérante : Aucune comparution.

AGENTS AU DOSSIER

Pour l’Opposante : BORDEN LADNER GERVAIS LLP

Pour la Requérante : FASKEN MARTINEAU DUMOULIN S.E.N.C.R.L., SRL

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