Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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Office de la propriété intellectuelle du Canada

LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

Référence : 2022 COMC 261

Date de la décision : 2022-12-20

[TRADUCTION CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

DANS L’AFFAIRE DE L’OPPOSITION

Opposante : ERFA PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE INC.

Requérante : JOHNSON & JOHNSON

Demande : 1,837,802 pour ERFANDEL

Introduction

[1] ERFA PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE INC. (l’Opposante) s’oppose à l’enregistrement de la marque de commerce ERFANDEL (la Marque), laquelle fait l’objet de la demande no 1,837,802 (la Demande) produite par JOHNSON & JOHNSON (la Requérante) en liaison avec une variété de produits pharmaceutiques, préparations pharmaceutiques, médicaments et vaccins.

[2] L’opposition est principalement fondée sur l’allégation que la Marque crée de la confusion avec les marques de commerce et les noms commerciaux formatifs ERFA de l’Opposante.

[3] Pour les raisons qui suivent, l’opposition est rejetée.

Le dossier

[4] La Demande a été produite le 16 mai 2017 et est fondée sur l’emploi projeté au Canada; elle revendique également une date de priorité du 8 mars 2017 fondée sur la demande correspondante de la Requérante produite aux États-Unis. L’état déclaratif des produits pour la Demande est reproduit ci-dessous, ainsi que la classification de Nice (Cl) connexe :
[traduction]

Cl 5 (1) Préparations pharmaceutiques destinées aux humains pour la prévention ou le traitement des maladies auto-immunes, des maladies cardiovasculaires, des maladies gastro-intestinales, des maladies oncologiques, des maladies des yeux et des maladies respiratoires; préparations pharmaceutiques pour la prévention ou le traitement des maladies et des troubles métaboliques, nommément du diabète, de la goutte, de l’arthrite et de l’anémie; préparations pharmaceutiques pour la prévention ou le traitement des maladies neurologiques, nommément de la maladie d’Alzheimer, de la maladie de Huntington et de l’infirmité motrice cérébrale; préparations pharmaceutiques pour la prévention ou le traitement des maladies mentales, nommément des troubles de l’humeur, des troubles anxieux, des troubles cognitifs et de la schizophrénie; préparations pharmaceutiques pour utilisation en dermatologie, nommément pour le traitement des dermatites, des maladies pigmentaires et du psoriasis; médicaments antiviraux; médicaments anti-inflammatoires; médicaments analgésiques; médicaments anti-infectieux; vaccins pour les humains.

[5] La Demande a été annoncée aux fins d’opposition dans le Journal des marques de commerce le 27 juin 2018, et l’Opposante a produit d’une déclaration d’opposition en vertu de l’article 38 de la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, ch T-13 (la Loi) le 22 août 2018. La déclaration d’opposition invoque les articles 30e) et i), 12(1)d), 16(3)a) et c), et 2 de la Loi dans sa version précédant le 17 juin 2019 (voir l’article 70) pour établir le fondement de l’opposition.

[6] La Requérante a produit une contre-déclaration réfutant les motifs d’opposition.

[7] La preuve de l’Opposante comprend :

[8] Mme Deslauriers et M. Soucy ont été contre-interrogés. Les transcriptions correspondantes et les réponses aux engagements qui ont été produites ont été versées au dossier.

[9] La preuve de la Requérante est composée d’un affidavit de Charlotte Dong, daté du 5 juin 2020, accompagné des Pièces A à D. Mme Dong n’a pas été contre-interrogée.

[10] Les deux parties ont produit des observations écrites, mais seule la Requérante était présente à l’audience.

Aperçu des preuves

La preuve de l’Opposante

L’affidavit et le contre-interrogatoire de Soucy

[11] M. Soucy est le président et secrétaire de l’Opposante et travaille pour l’Opposante depuis sa constitution en société le 12 octobre 2017. Il est également le président d’ERFA CANADA 2012 Inc. (ERFA 2012) et travaille pour cette entité depuis sa constitution en société le 25 avril 2012 et, avant l’achat de ses actifs, en tant que dirigeant d’Erfa Canada (9266-7682 Québec Inc.) depuis le début des années 2000 [para 1 et 2].

[12] M. Soucy indique que, le 1er janvier 2018, ERFA 2012 a cédé tous les droits de propriété intellectuelle qu’elle détenait à l’Opposante et que, à la même date, l’Opposante a accordé à ERFA 2012 une licence pour employer les marques qu’elle a acquises. M. Soucy affirme que l’Opposante exerce le contrôle sur la qualité des produits et services employés en liaison avec ces marques [para 4].

[13] En ce qui a trait aux marques de commerce déposées invoquées par l’Opposante dans sa déclaration d’opposition, M. Soucy affirme qu’elles sont employées par l’Opposante et ses prédécesseurs en titre « depuis au moins la date mentionnée dans les enregistrements » [para 6, Pièce 1].

[14] En ce qui a trait à la marque de commerce ERFA, plus précisément, M. Soucy affirme qu’elle a été employée au Canada par l’Opposante et son prédécesseur en titre ERFA 2012 depuis au moins le mois d’avril 2012 en liaison avec la fabrication, la vente et la distribution de produits pharmaceutiques et en liaison avec les produits pharmaceutiques suivants : [traduction] « Préparations antiallergiques et substances pharmaceutiques; Antihistaminiques; épinéphrine liquide à usage pharmaceutique; antibiotique; préparations pharmaceutiques antiépileptiques; préparations pharmaceutiques pour le traitement du cancer; anesthésiques pour la chirurgie; préparation pharmaceutique pour le traitement des troubles de la coagulation; Préparations pharmaceutiques pour le traitement des maladies psychiatriques, nommément les troubles de l’humeur, les troubles d’anxiété, les troubles bipolaires, la schizophrénie et les psychoses; Préparations et substances pharmaceutiques pour le traitement des maladies gastro-intestinales; Préparations pharmaceutiques pour le traitement de l’asthme; Préparations pharmaceutiques pour le traitement des nausées et des vomissements; Préparations pharmaceutiques pour le traitement de la dermatite et de l’urticaire; Expectorants; Préparations pharmaceutiques pour le traitement de l’aménorrhée, de l’endométriose et des hémorragies utérines anormales; Préparation pharmaceutique pour le traitement des symptômes de la maladie de Parkinson; Antibiotique et décongestionnant sous forme de vaporisateur nasal; Préparation pharmaceutique pour le traitement des maladies, troubles et infections du système endocrinien, notamment les troubles de la croissance et de la thyroïde; Préparations pharmaceutiques pour le traitement de l’épilepsie; Préparations probiotiques à usage médical pour maintenir l’équilibre naturel de la flore intestinale; Préparation pharmaceutique pour le traitement des infections vaginales; mélatonine pour la régulation du sommeil; vaporisateur nasal; analgésiques; antidépresseurs; préparations pharmaceutiques pour le traitement des maladies cardiovasculaires; préparations pour l’éclaircissement de la peau » [para 8].

[15] M. Soucy affirme également que tous les produits pharmaceutiques de l’Opposante arborent la marque ERFA et joint des illustrations d’un contenant et d’un emballage qu’il décrit comme « portant ces marques » [para 7, Pièce 2]. Je note qu’« ERFA » est affiché sur les produits présentés en pièce, mais uniquement en tant que partie d’« ERFA Canada 2012 Inc. », comme il est indiqué ci-dessous.

[16] Je dois souligner à ce stade qu’à mon avis, cet emploi d’ERFA Canada 2012 Inc. constitue également un emploi de la marque de commerce ERFA, qui préserve son identité et demeure, dans l’ensemble, reconnaissable à première vue [selon Nightingale Interloc Ltd c Prodesign Ltd (1984), 2 CPR (3d) 535 (COMC)].

[17] M. Soucy affirme que les ventes de produits pharmaceutiques de la marque ERFA s’élèvent à plus de 15 millions de dollars en 2017 et en 2018. [para 11].

[18] M. Soucy affirme que les produits pharmaceutiques de marque ERFA de l’Opposante sont vendus dans plusieurs pharmacies canadiennes par l’entremise de McKesson Canada, une entreprise spécialisée dans la distribution de produits pharmaceutiques, et que les produits de marque ERFA HQ sont également vendus sur amazon.ca [para 12 et 13, Pièces 5 et 6].

[19] M. Soucy déclare que, au cours des trois dernières années, plus de 500 000 dollars ont été dépensés chaque année pour la publicité et la commercialisation [para 15]. Il explique que la promotion de la marque ERFA est effectuée par l’entremise de neuf représentants médicaux qui présentent les produits aux médecins, aux grossistes et aux hôpitaux, ainsi que par l’entremise de plusieurs représentants commerciaux qui en font la promotion auprès des pharmacies canadiennes. Il joint des exemples de documents promotionnels pour le gel de marque ERFA HQ utilisé par lesdits représentants « dans les trois dernières années » [para 16, Pièce 7]. M. Soucy affirme que l’Opposante et son prédécesseur en titre ERFA 2012 ont également fait de la promotion par courriel, par télécopieur, sur Facebook et sur les sites Web aux adresses eci2012.net et hydroquinone.ca [para 17 à 20, Pièces 8 à 11].

[20] M. Soucy affirme que ERFA 2012 publie un catalogue répertoriant les produits de la marque ERFA de l’Opposante. Il joint des copies d’un catalogue de 2014 et 2015 en français et en anglais, ainsi qu’une copie d’un catalogue bilingue de 2018 [para 10, Pièce 4]

[21] Lors du contre-interrogatoire, M. Soucy a notamment déclaré ce qui suit :

[22] En réponse à un engagement pris lors du contre-interrogatoire de M. Soucy, l’Opposante a produit une copie du [traduction] « contrat de licence de propriété intellectuelle » du 1er janvier 2018 entre l’Opposante et ERFA 2012. Ce document prévoit notamment qu’ERFA 2012 peut employer les marques de commerce de l’Opposante conformément aux modalités établies dans [traduction] « l’accord d’achat d’actifs » des parties. Cependant, une copie dudit « accord d’achat d’actifs » n’a pas été fournie par l’Opposante.

La déclaration et le contre-interrogatoire de Deslauriers

[23] Mme Deslauriers est une recherchiste employée par CompuMark [para 1]. Elle présente les résultats de sa recherche dans le Registre canadien des marques de commerce pour les marques actives comprenant le préfixe ERFA dans la classe 5 englobant les produits liés aux produits pharmaceutiques [para 3 et 4, Pièce HD-1].

[24] Lors du contre-interrogatoire, Mme Deslauriers a notamment confirmé que sa recherche n’a pas permis de trouver des demandes ou des enregistrements actifs pour ERFA (seul) dans la classe 5 [p. 6, 11].

La preuve de la Requérante – l’affidavit Dong

[25] Mme Dong est une stagiaire employée par les agents de marques de commerce de la Requérante [para 1]. Elle fournit :

Fardeau de preuve incombant à chacune des parties

[26] L’Opposante doit s’acquitter du fardeau de preuve initial en produisant suffisamment d’éléments de preuve à partir desquels on pourrait raisonnablement conclure à l’existence des faits allégués à l’appui de chaque motif d’opposition [John Labatt Limited c The Molson Companies Limited (1990), 30 CPR (3d) 293 (CF 1re inst)]. Si elle s’est acquittée de ce fardeau, la Requérante doit alors s’acquitter du fardeau ultime de démontrer, selon la prépondérance des probabilités, qu’aucun motif d’opposition ne fait obstacle à l’enregistrement de la Marque.

Analyse

Motifs d’opposition rejetés sommairement

Article 30e) de la Loi

[27] L’Opposante soutient que la Demande n’est pas conforme aux exigences de l’article 30e) de la Loi, car, à la date de la Demande, la Requérante n’avait pas l’intention d’employer la Marque au Canada, soit par elle-même, soit par un licencié, en liaison avec les produits visés par la Demande, puisque la Requérante employait déjà la Marque en liaison avec les mêmes produits.

[28] Toutefois, aucune preuve ni observation n’a été produite à l’appui de cette allégation.

[29] Par conséquent, le motif d’opposition fondé sur l’article 30e) de la Loi est rejeté, parce que l’Opposante ne s’est pas acquittée de son fardeau de preuve initial.

Article 30i) de la Loi

[30] L’Opposante soutient que la Requérante ne pouvait pas être convaincue qu’elle avait le droit d’employer la Marque au Canada en liaison avec les produits visés par la Demande, étant donné qu’elle était au courant ou aurait dû être au courant de l’emploi antérieur par l’Opposante des marques de commerce et des noms commerciaux de l’Opposante.

[31] L’Opposante n’a pas produit d’observations à l’appui de cette allégation.

[32] De toute façon, la simple connaissance de l’existence de la marque de commerce ou du nom commercial d’un opposant ne suffit pas à elle seule à appuyer un motif fondé sur l’article 30i). L’article 30i) de la Loi exigeait que le requérant comprenne dans sa demande une déclaration selon laquelle il est convaincu d’avoir droit d’employer sa marque de commerce au Canada. Lorsque cette déclaration est fournie, une conclusion de non-conformité à l’article 30i) ne peut être tirée que dans des cas exceptionnels, comme lorsqu’il existe une preuve de mauvaise foi.

[33] La Demande en l’espèce contient la déclaration exigée, et il n’y a pas de preuve de circonstances exceptionnelles permettant de conclure qu’il s’agit d’une fausse déclaration. Par conséquent, le motif d’opposition fondé sur l’article 30i) est également rejeté.

Autres motifs d’opposition fondés sur la confusion

[34] Les motifs d’opposition fondés sur la non-enregistrabilité, l’absence du droit à l’enregistrement et l’absence de caractère distinctif reposent tous sur une probabilité alléguée de confusion entre la Marque et les marques et noms commerciaux formatifs ERFA invoqués par l’Opposante.

[35] En ce qui concerne son motif d’opposition en vertu de l’article 12(1)d), l’Opposante allègue que la Marque n’est pas enregistrable, car elle crée de la confusion avec les enregistrements de marques de commerce de l’Opposante pour ERFA, ERFA HQ et ERFA AMIKACIN énumérés à l’annexe A ci-dessous.

[36] En ce qui concerne les motifs d’opposition prévus à l’article 16, l’Opposante allègue que la Requérante n’est pas la personne ayant droit à l’enregistrement, car, à la date de dépôt prioritaire de la Demande, la Marque créait de la confusion avec les marques de commerce ERFA et ERFA CANADA 2000 INC. employées antérieurement par l’Opposante ou ses prédécesseurs en titre en liaison avec les produits énumérés à l’annexe B ci-dessous; et avec les noms commerciaux ERFA, ERFA CANADA 2000 INC. et ERFA PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE INC. employés antérieurement par l’Opposante ou ses prédécesseurs en titre en liaison avec la fabrication, le développement, la distribution et la vente de produits pharmaceutiques.

[37] En ce qui concerne le motif d’opposition prévu à l’article 2, l’Opposante allègue que la Marque n’est pas distinctive, car elle ne distingue pas, et n’est pas adaptée pour distinguer, les produits de la Requérante des produits et services d’autres personnes, notamment ceux de l’Opposante, en raison de la publicité et de l’emploi des marques de commerce de l’Opposante.

[38] Les dates pertinentes pour évaluer la question de la confusion sont (i) la date de la présente décision en ce qui concerne le motif d’opposition fondé sur la non-enregistrabilité; (ii) la date de production réputée de la Demande, soit le 8 mars 2017, à l’égard des motifs d’opposition fondés sur l’absence du droit à l’enregistrement; et (iii) la date de l’opposition, soit le 22 août 2018, à l’égard du motif d’opposition fondé sur l’absence de caractère distinctif.

Test en matière de confusion

[39] Le test à appliquer pour trancher la question de la confusion est celui de la première impression et du souvenir imparfait. Lorsqu’on l’applique, toutes les circonstances de l’espèce doivent être prises en compte, y compris celles expressément énoncées à l’article 6(5) de la Loi, à savoir : a) le caractère distinctif inhérent des marques de commerce ou noms commerciaux, et la mesure dans laquelle ils sont devenus connus; b) la période pendant laquelle les marques de commerce ou noms commerciaux ont été en usage; c) le genre de produits, services ou entreprises; d) la nature du commerce; et e) le degré de ressemblance entre les marques de commerce ou les noms commerciaux dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’ils suggèrent. Ces facteurs ne sont pas exhaustifs et un poids différent peut être accordé à chacun d’eux dans le cadre d’une évaluation contextuelle [Veuve Clicquot Ponsardin c Boutiques Cliquot Ltée, 2006 CSC 23; Mattel, Inc c 3894207 Canada Inc, 2006 CSC 22]. Je me réfère également à Masterpiece Inc c Alavida Lifestyles Inc, 2011 CSC 27, au para 49, où la Cour suprême du Canada déclare que la ressemblance entre les marques est susceptible d’avoir le plus d’importance dans l’analyse relative à la confusion.

Article 12(1)d) de la Loi

[40] Ayant exercé le pouvoir discrétionnaire du registraire de consulter le registre, je confirme que les enregistrements de l’Opposante no LMC532,683, no LMC960,681 et no LMC993,242 sont en règle à la date de cette décision.

[41] L’Opposante s’étant acquittée de son fardeau initial à l’égard de ce motif d’opposition, la Requérante doit maintenant démontrer, selon la prépondérance des probabilités, qu’il n’y a aucune probabilité raisonnable de confusion entre la Marque et les marques de commerce déposées de l’Opposante.

Discussion des facteurs énoncés à l’article 6(5)

Degré de ressemblance

[42] Il est bien établi en droit que, lorsqu’il s’agit de déterminer le degré de ressemblance, il faut examiner les marques de commerce dans leur ensemble, et non scruter séparément chacun de leurs éléments constitutifs. Le critère approprié n’est pas une comparaison côte à côte, mais un vague souvenir dans l’esprit d’un consommateur de la marque de commerce d’un opposant [Veuve Clicquot, au para 20]. Si, dans certains cas, le premier élément d’une marque de commerce peut s’avérer le plus important aux fins de la distinction, il est préférable de commencer l’analyse de la confusion en déterminant si un aspect de chaque marque de commerce est particulièrement frappant ou unique [Masterpiece, au para 64].

[43] L’aspect frappant de chacune des marques de commerce de l’Opposante est le mot ERFA. Il s’ensuit de déduire qu’il y a une ressemblance entre les marques de commerce en question dans la mesure où cet élément forme une partie de la Marque. L’aspect le plus frappant de la Marque, cependant, est le mot ERFANDEL dans son ensemble. Ainsi, lorsqu’elles sont considérées dans leur ensemble, cela distingue les marques de commerce des parties et les rend plus différentes que semblables en particulier dans la présentation et le son. Le fait qu’elles ne sont pas structurées de manière semblable contribue également à cet égard. En ce qui concerne plus particulièrement ERFANDEL et ERFA, je conviens que si les marques peuvent partager les mêmes quatre premières lettres, ces lettres ont une fonction différente dans chacune d’elles, ce qui a pour effet global de communiquer des impressions distinctes. Les autres marques enregistrées revendiquées par l’Opposante présentent des éléments supplémentaires, à savoir HQ et AMIKACIN, respectivement, ce qui les rend encore plus distinctives de la Marque.

[44] Par conséquent, je conclus que le facteur de l’article 6(5)e) favorise la Requérante.

Caractère distinctif inhérent et mesure dans laquelle les marques sont devenues connues

[45] La Marque est un mot inventé sans signification théorique facilement perceptible et est donc intrinsèquement distinctive. La marque de commerce ERFA de l’Opposante est également intrinsèquement distinctive, mais moins que la Marque dans la mesure où il s’agit certes d’un acronyme signifiant « Entreprise de Recherche, Fabrication, et Analyse » [contre-interrogatoire Soucy, p. 98]. De même, dans la mesure où HQ pourrait être perçu comme faisant renvoi à l’hydroquinone (un agent de blanchiment utilisé topiquement pour éliminer la pigmentation) et où AMIKACIN décrit un type d’antibiotique, ces suffixes ne contribuent guère à accroître le caractère distinctif intrinsèque des marques de commerce ERFA HQ et ERFA AMIKACIN de l’Opposante.

[46] En ce qui concerne la mesure dans laquelle les marques de commerce sont devenues connues, la Requérante n’a présenté aucune preuve que sa Marque a été employée ou est devenue connue dans une certaine mesure au Canada. Quant à l’Opposante, bien que les éléments de preuve susmentionnés démontrent l’emploi de certaines de ses marques de commerce revendiquées en liaison avec certains des produits et services visés par l’enregistrement, elle n’a pas fourni de ventilation de ses ventes et de ses dépenses publicitaires, ni de détails concernant la distribution de ses documents promotionnels ou de ses catalogues de produits, ni de statistiques concernant sa publicité par courrier électronique et par les médias sociaux ou ses sites Web. Cela étant dit, les chiffres de vente de l’Opposante (même si ce n’est que pour l’année 2017) ne sont pas négligeables et M. Soucy a affirmé que chaque produit porte la marque ERFA. Compte tenu de mes commentaires ci-dessus au paragraphe 16, la marque de commerce ERFA peut donc avoir été connue dans une certaine mesure au Canada en liaison avec la vente et la distribution de produits pharmaceutiques. En raison des lacunes dans la preuve, il est difficile de déterminer l’étendue connue des marques de commerce de l’Opposante pour tout autre article particulier.

[47] Par conséquent, je conclus que la considération générale du facteur relatif à l’article 6(5)a) favorise l’Opposante, bien que seulement légèrement.

Durée d’emploi

[48] La Demande est fondée sur l’emploi projeté au Canada et la Requérante n’a démontré aucun emploi de la Marque. Ainsi, dans la mesure où les marques ERFA et ERFA HQ ont été employées par le prédécesseur en titre de l’Opposante, ERFA 2012, à partir d’avril 2012 et d’octobre 2016, respectivement, le facteur de l’article 6(5)b) favorise l’Opposante.

Genre de produits, services ou entreprises; et nature du commerce

[49] Le facteur de l’article 6(5)c) favorise l’Opposante dans la mesure où il y a chevauchement direct, au moins entre les produits visés par l’enregistrement de l’Opposante et les préparations pharmaceutiques de la Requérante pour utilisation en dermatologie ainsi que ses médicaments anti-infectieux. Quant au facteur de l’article 6(5)d), les deux parties en l’espèce exercent leurs activités dans le domaine pharmaceutique. Cela dit, compte tenu de ma conclusion générale à l’égard du risque de confusion ci-dessous, je ne crois pas qu’il soit nécessaire de continuer d’examiner les produits et services des parties ou d’établir la mesure dans laquelle leurs clients pertinents et leurs voies de commercialisation pourraient éventuellement se chevaucher.

Autres circonstances de l’espèce – famille de marques

[50] L’Opposante soutient qu’elle possède une famille de marques formatives ERFA déposées et non déposées (à savoir ERFA, ERFA HQ, ERFA AMIKACIN et ERFA CANADA 2012 INC.) et qu’elle mérite donc une portée plus large de la protection.

[51] En l’espèce, je ne considère pas qu’il s’agisse d’une circonstance de l’espèce qui aide l’Opposante. Premièrement, comme il est indiqué ci-dessus, la preuve de l’Opposante ne porte pas sur chacune de ses marques de commerce revendiquées individuellement (par exemple, les renseignements sur les ventes ou la publicité fournis par M. Soucy ne sont pas ventilés par marque, mais consistent plutôt en des chiffres et des déclarations globaux). Deuxièmement, au cours du contre-interrogatoire, M. Soucy a déclaré que la marque de commerce ERFA AMIKACIN n’était pas employée. La Requérante soulève également la question de savoir si la licence de l’Opposante est conforme à la Loi en ce qui concerne le contrôle requis. Bien que je ne pense pas qu’il soit nécessaire de résoudre la question de licence pour statuer sur la présente opposition, je noterai que, même si je considérais l’emploi démontré comme étant celui de l’Opposante (et comme étant suffisamment détaillé pour ERFA, ERFA HQ et ERFA CANADA 2012 INC.), trois marques de commerce ne constituent pas une famille importante [voir Spirits International BV c Nemiroff Intellectual Property Establishment, 2009 CanLII 90301-02 (COMC)].

Autres circonstances de l’espèce – coexistence de tiers

[52] La Requérante soutient qu’au moins une autre entité inscrite pour faire affaires au Québec exerce ses activités sous les noms commerciaux ERFA Biotech et ERFA Science, employait auparavant le nom ERFA Canada Inc. et n’est pas liée à l’Opposante, bien que cette dernière soit et ait été au courant de son existence.

[53] Je n’estime pas qu’il s’agisse d’une circonstance de l’espèce qui aide la Requérante. Même si j’acceptais les résultats de la recherche de Mme Dong comme démontrant un emploi actif de marques et de noms de tiers formatifs ERFA sur le marché (ce qui est discutable), ils n’établissent pas l’étendue d’un tel emploi et ne suffisent pas à établir que les consommateurs auraient été habitués à faire une distinction entre les marques ou les noms comportant l’élément ERFA en liaison avec des produits ou des services pharmaceutiques. De plus, même si j’acceptais la reconnaissance par M. Soucy, lors du contre-interrogatoire, de l’entité trouvée par Mme Dong comme établissant la volonté de l’Opposante de tolérer l’emploi par cette partie de marques ou de noms formatifs ERFA (ce qui est également discutable), il ne s’ensuivrait pas nécessairement que l’Opposante a renoncé à ses droits de contester l’enregistrement d’autres marques de commerce visées par les demandes d’autres parties telles que la Requérante.

[54] Cela étant dit, je ne pense pas qu’il soit nécessaire de s’appuyer sur la preuve de Mme Dong pour trancher en faveur de la Requérante.

Conclusion – aucune probabilité de confusion

[55] Compte tenu de toutes les circonstances de l’espèce, je conclus que la Requérante s’est acquittée de son fardeau ultime de démontrer, selon la prépondérance des probabilités, qu’il n’y a pas de probabilité raisonnable de confusion entre la Marque et chacune des marques de commerce déposées de l’Opposante. J’arrive à cette conclusion principalement parce que je constate que l’absence de ressemblance entre les marques de commerce en cause l’emporte sur tous les autres facteurs pertinents combinés qui favorisent l’Opposante. Comme cela a été confirmé par la Cour suprême dans la décision Masterpiece au para 49, « […] si les marques ou les noms ne se ressemblent pas, il est peu probable que l’analyse amène à conclure à la probabilité de confusion même si les autres facteurs tendent fortement à indiquer le contraire ».

[56] Par conséquent, le motif d’opposition fondé sur l’article 12(1)d) est rejeté à l’égard de tous les enregistrements invoqués par l’Opposante.

Articles 2, 16(3)a) et 16(3)c) de la Loi

[57] Je noterai d’abord que les motifs fondés sur l’absence du droit contenus dans la déclaration d’opposition font renvoi à une marque de commerce et à un nom commercial identifiés comme ERFA CANADA 2000 INC. plutôt que comme ERFA CANADA 2012 INC. L’Opposante n’a pas demandé l’autorisation de produire une déclaration d’opposition modifiée afin d’apporter une correction. Quoi qu’il en soit, même si je devais considérer qu’il s’agit d’une erreur typographique, cela n’aurait pas d’incidence sur le résultat de ma décision.

[58] Comme il est indiqué ci-dessus, bien que les dates pertinentes diffèrent, les motifs d’opposition fondés sur les articles 2 et 16 portent également sur la question de la confusion et sont tous rejetés pour des raisons analogues à celles examinées pour le motif fondé sur l’article 12(1)d), soit parce que l’Opposante ne s’est pas acquittée de son fardeau de preuve, soit parce que j’estime, selon la prépondérance des probabilités, qu’il n’y a aucune probabilité de confusion entre la Marque et les marques de commerce et noms commerciaux invoqués par l’Opposante à toutes les dates pertinentes (principalement en raison du degré insuffisant de ressemblance entre eux).

Décision

[59] Dans l’exercice des pouvoirs qui m’ont été délégués en vertu des dispositions de l’article 63(3) de la Loi, je rejette l’opposition selon les dispositions de l’article 38(12) de la Loi.

_______________________________

Iana Alexova

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

 

Traduction certifiée conforme

Hortense Ngo

 

Le français est conforme aux WCAG.




Comparutions et agents inscrits au dossier

DATE DE L’AUDIENCE : 2022-09-29

COMPARUTIONS

Pour l’Opposante : Aucune comparution

Pour la Requérante : Monique M. Couture

AGENTS AU DOSSIER

Pour l’Opposante : Joël Brassard (DUNTON RAINVILLE SENCRL)

Pour la Requérante : GOWLING WLG (CANADA) LLP

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