Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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Office de la propriété intellectuelle du Canada

LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

Référence : 2023 COMC 003

Date de la décision : 2023-01-12

DANS L’AFFAIRE D’UNE PROCÉDURE EN VERTU DE L’ARTICLE 45

Partie requérante : Jensen IP

Propriétaire inscrit(e) : Bernard Caron

Enregistrement : LMC756,124 pour INFINILAB

Introduction

[1] La présente décision concerne une procédure de radiation sommaire engagée en application de l’article 45 de la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, ch T‑13 (la Loi) à l’égard de l’enregistrement no LMC756,124 pour la marque de commerce INFINILAB (la Marque).

[2] La Marque est enregistrée en liaison avec les produits suivants:

Équipement électronique, nommément, banc d'essaie [sic] électronique servant à tester les réseaux de téléphonie et projets de télécommunication.

[3] Pour les raisons qui suivent, je conclus que l’enregistrement doit être maintenu.

La procédure

[4] À la demande de Jensen IP (la Partie requérante), le registraire des marques de commerce a donné l’avis prévu à l’article 45 de la Loi le 23 janvier 2020, à Bernard Caron (le Propriétaire), le propriétaire inscrit de la Marque.

[5] L’avis enjoignait au Propriétaire d’indiquer, à l’égard du produit spécifié dans l’enregistrement, si la marque de commerce a été employée au Canada à un moment quelconque au cours des trois années précédant la date de l’avis et, dans la négative, qu’elle précise la date à laquelle la Marque a ainsi été employée en dernier lieu et la raison de son défaut d’emploi depuis cette date. En l’espèce, la période pertinente pour démontrer l’emploi est du 23 janvier 2017 au 23 janvier 2020.

[6] La définition pertinente d’« emploi » est énoncée à l’article 4 de la Loi comme suit :

4(1) Une marque de commerce est réputée employée en liaison avec des produits si, lors du transfert de la propriété ou de la possession de ces produits, dans la pratique normale du commerce, elle est apposée sur les produits mêmes ou sur les emballages dans lesquels ces produits sont distribués, ou si elle est, de toute autre manière, liée aux produits à tel point qu’avis de liaison est alors donné à la personne à qui la propriété ou possession est transférée.

[7] En l’absence d’emploi tel que défini ci-dessus, un enregistrement de marque de commerce est susceptible d’être radié, à moins que le défaut d’emploi ne soit attribuable à des circonstances spéciales qui le justifient.

[8] Il est bien établi que le but et l’objet de l’article 45 de la Loi consistent à assurer une procédure simple, sommaire et expéditive pour débarrasser le registre du « bois mort ». La preuve dans une procédure prévue à l’article 45 n’a pas à être parfaite; en effet, un propriétaire inscrit doit uniquement établir une preuve prima facie d’emploi au sens des articles 4 et 45 de la Loi. Le fardeau de preuve à atteindre est bas; il suffit que les éléments de preuve établissent des faits à partir desquels une conclusion d’emploi puisse logiquement être inférée [voir Diamant Elinor Inc c 88766 Canada Inc, 2010 CF 1184 au para 9].

[9] En réponse à l’avis, le Propriétaire a produit la déclaration solennelle de Bernard Caron, exécutée le 18 janvier 2021 à Montréal, Québec.

[10] Seule la Partie requérante a produit des observations écrites et était représentée à l’audience.

La preuve

[11] Dans sa déclaration, M. Caron s’identifie comme le Président de Néo Technologie Inc. (Néo), l'entreprise qui commercialise ses produits. Il soutient avoir développé une grande quantité de produits et de sous‑produits sous la Marque.

[12] À l'appui de sa déclaration et « comme preuves [sic] d’utilisation au cours de 3 dernières années », M. Caron joint trois factures, datées entre février et juillet 2018. Les factures son émises par Néo à deux adresses au Québec. L’adresse courriel bcaron@neotechnologie.com apparait parmi les informations corporatives de Néo. La Marque apparait sur toutes les factures sous la section « Details ». Sous la section « Produit » de la deuxième facture, je lis : « BB PCB TH ».

[13] Également à titre de preuve d’emploi de la Marque, M. Caron joint quatre photos correspondant à deux produits qu'il décrit, respectivement, comme suit :

« Le premier produit est une plaque de circuit versatile comportant plusieurs connections pour faciliter le montage de prototypes en vue d’expérimenter et développer un produit électronique »; et

« Le second produit est un mini laboratoire permettant d'expérimenter les concepts de L’électronique ».

[14] Les deux premières photographies correspondent à deux prises de vue différentes d’un même produit. Sur la première photographie, bien que floue, je distingue la Marque au-dessous du symbole mathématique représentant l’infini; sur la deuxième photographie, je lis les sigles suivantes sur le produit « P/N : BB PCB TH ». Les deux dernières photographies correspondent aussi à deux prises de vue différentes d’un autre produit; la Marque apparaît clairement sur le produit photographié.

Analyse et motifs de la décision

[15] Dans ses représentations écrites et orales, la Partie requérante soutient que le Propriétaire n'a pas rempli son fardeau pour démontrer l’emploi de la Marque en liaison avec les produits spécifiés à l’enregistrement. Bien que la Partie requérante fasse toujours référence aux produits, au pluriel, la représentante de celle-ci a concédé à l’audience que l’enregistrement ne concerne qu’un seul produit, soit, un banc d’essai.

Les ventes au profit du Propriétaire

[16] La Partie requérante allègue que la pratique normale du commerce du Propriétaire n’a pas été détaillé. À cet égard, elle souligne que le nom du Propriétaire ne figure pas sur les factures émises par Néo et allègue qu’il n’a pas démontré que les ventes faites par Néo lui sont attribuables.

[17] Il est bien établi qu’il n’existe aucun type particulier de preuve à fournir pour démontrer la pratique normale du commerce dans une procédure prévue à l’article 45, et la preuve n’a pas à être parfaite [voir Lewis Thomson & Son Ltd c Rogers, Bereskin & Parr (1988), 21 CPR (3d) 483 (CF 1re inst)].

[18] Même si M. Caron aurait pu être plus explicite, compte tenu de ses déclarations et du produit couvert par l’enregistrement, je conclus que l'activité du Propriétaire consiste à développer un banc d’essai et à le vendre à ses clients par l’entremise de Néo. À cet égard, étant donné que M. Caron affirme commercialiser ses produits via Néo, j’accepte que les ventes de Néo s'inscrivent dans la pratique normale du commerce du Propriétaire. De plus, compte tenu de l’objet de l’article 45 de la Loi et du poste occupé par M. Caron au sein de Néo, il est raisonnable de présumer que les ventes faites par Néo étaient sous le contrôle du Propriétaire. De ce fait, les ventes effectuées par Néo pendant la période pertinente sont attribuables au Propriétaire en vertu de l’article 50(1) de la Loi [pour des conclusions similaires, voir Bedessee Imports Ltd c Procter & Gamble Health Limited, 2022 COMC 207; et Gowling Lafleur Henderson LLP c Croxall, 2013 COMC 1].

[19] Ainsi, compte tenu de l'ensemble de la preuve, je suis convaincue que les ventes faites par Néo profitent au Propriétaire et que les transferts de produits ont été faits dans la pratique normale du commerce de ce dernier.

L’emploi de la Marque

[20] La Partie requérante souligne que M. Caron n’atteste ni du caractère représentatif des photos jointes à sa déclaration ni de la vente des produits photographiés. De plus, elle allègue que la description des produits photographiés est peu claire et qu’aucun lien ne peut être établi entre ceux‑ci et les produits énumérés sur les factures. La Partie requérante allègue également que la nature des produits énumérés sur les factures n’a pas été expliquée et, de ce fait, que la corrélation avec le produit spécifié dans l’enregistrement n’a pas été établie. Quoi qu’il en soi, elle fait valoir que M. Caron a omis d’indiquer que les factures ont accompagné les produits vendus au moment de leur transfert.

[21] Je souligne d’abord que la preuve dans une procédure prévue à l’article 45 doit être considérée dans son ensemble, et le fait de se concentrer sur des éléments de preuve individuels n’est pas la bonne approche [voir Fraser Milner Casgrain LLP c Canadian Distribution Channel Inc (2009), 78 CPR (4th) 278 (COMC)]. De plus, le registraire peut tirer des inférences raisonnables à partir de la preuve fournie [voir Eclipse International Fashions Canada Inc c Shapiro Cohen, 2005 CAF 64]. Ainsi, la déclaration solennelle doit être analysée dans son ensemble et les pièces examinées à la lumière des informations fournies dans la déclaration.

[22] Dans le cas présent, la preuve inclut des photographies des produits arborant la Marque. Elle comprend également des factures émises par Néo au cours de la période pertinente à des clients canadiens du Propriétaire. Suivant les principes énoncés à Fraser et Eclipse, supra, et compte tenu des déclarations de M. Caron ainsi que de la preuve documentaire, je trouve raisonnable de conclure que les photographies fournies sont représentatives des produits vendus au cours de la période pertinente. En effet, étant donné que la référence « BB PCB TH » apparait, à la fois, sous la section « Produit » de la deuxième facture et sur la deuxième photographie, je conclus que le produit photographié correspond au produit facturé au Canada au cours de la période pertinente. Bien que la Marque soit floue sur la photographie en question, le fait qu’elle soit clairement présentée sur d’autres photographies me permet de conclure que les produits photographiés correspondent aux produits vendus et identifiés avec la Marque sur les factures. Étant donné que la Marque est présentée sur les produits eux‑mêmes et qu’ils correspondent aux produits vendus au cours de la période pertinente, je conclus que l'avis d'association entre la Marque et les produits vendus a été donné au moment du transfert, c’est-à-dire, lors de la livraison de produits. Dans ce contexte, le Propriétaire n’était pas tenu de démontrer que les produits photographiés ont effectivement été vendus au cours de la période pertinente. Il n’était pas tenu, non plus, de démontrer que les factures ont accompagné les produits au moment du transfert de possession.

[23] De plus, étant donné que M. Caron affirme que ces photographies et factures constituent sa preuve d’emploi de la Marque, j’accepte que ces documents correspondent au produit couvert par l’enregistrement. Par ailleurs, j’estime que la description que M. Caron fait des produits photographiés correspond raisonnablement au produit spécifié à l’état déclaratif. Ainsi, je conclus que les déclarations M. Caron relatives à l’emploi de la Marque au Canada en liaison avec le produit spécifié dans l’enregistrement sont corroborées par la preuve documentaire.

[24] En vue de tout ce qui précède, je suis convaincue que le Propriétaire a fourni suffisamment d’éléments factuels me permettant de conclure que la Marque a été employée au Canada en liaison avec le produit spécifié dans l’enregistrement au cours de la période pertinente.

Décision

[25] Dans l’exercice des pouvoirs qui m’ont été délégués en vertu des dispositions de l’article 63(3) de la Loi, l’enregistrement sera maintenu selon les dispositions de l’article 45 de la Loi.

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Maria Ledezma

Agent d’audience

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada


Comparutions et agents inscrits au dossier

DATE DE L’AUDIENCE : 2022-12-16

COMPARUTIONS

Pour la Partie requérante : Heidi Jensen

Pour le Propriétaire inscrit : Aucune comparution

AGENTS AU DOSSIER

Pour la Partie requérante : Jensen IP

Pour le Propriétaire inscrit : Aucun agent nommé

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