Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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A maple leaf on graph paper

Office de la propriété intellectuelle du Canada

LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

Référence : 2023 COMC 014

Date de la décision : 2023-01-30

[TRADUCTION CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

DANS L’AFFAIRE DE L’OPPOSITION

Opposant : Gang Cao

Requérante : Apple Inc.

Demande : 1853995 pour LivePhotosKit (Stylized)

Introduction

[1] Gang Cao (l’Opposant) s’oppose à l’enregistrement de la marque de commerce LivePhotosKit (Stylized) (la Marque), laquelle fait l’objet de la demande no 1853995 par Apple Inc. (la Requérante). La Marque est reproduite ci-dessous :

LivePhotosKit (Stylized)

[2] La Marque visée par la demande est enregistrée en liaison avec les produits (appartenant à la classe 9 de Nice) et les services (appartenant à la classe 42 de Nice) suivants :

[traduction]

Produits : Logiciels pour le développement d’autres applications logicielles pour l’enregistrement, l’organisation, la transmission et la manipulation d’images numériques, d’extraits audio et vidéo, de films, de vidéos musicales et de photos; logiciels de développement d’applications, nommément logiciels pour aider les développeurs à créer des codes de programme informatique pour utilisation dans des programmes d’applications simples et multiples; logiciels de développement de sites Web, nommément logiciels pour le développement et la création de sites Web; logiciels de développement multimédia, nommément logiciels pour aider les utilisateurs à créer, à éditer et à publier des fichiers multimédias contenant une combinaison d’images numériques, de photos et d’extraits vidéo; logiciels pour visualiser des photos numériques et des vidéos, nommément des extraits vidéo sur des pages Web.

Services : Programmation informatique; conception et développement de logiciels; services de consultation en logiciels; services de soutien, en l’occurrence services de consultation pour le développement d’applications, nommément offre de soutien technique et de formation de technicien pour aider des tiers dans le développement de logiciels; offre d’information sur des logiciels en ligne dans le domaine de la conception et du développement de logiciels; services de fournisseur de services applicatifs (FSA) offrant des logiciels d’interface de programmation d’applications (interface API) pour le développement de sites Web, de logiciels et de contenu multimédia, nommément de fichiers numériques contenant une combinaison de photos et d’extraits vidéo; fournisseur de services applicatifs offrant des logiciels d’interface de programmation d’applications (interface API) pour visualiser des photos numériques et des vidéos, nommément des extraits vidéo sur des sites Web; offre de logiciels en ligne non téléchargeables, nommément de logiciels pour aider les développeurs à créer des codes de programme informatique pour utilisation dans des programmes d’applications simples et multiples.

[3] L’opposition est fondée sur divers motifs, notamment que la Marque est clairement descriptive ou ne distingue pas les produits et services visés par la demande.

Le dossier

[4] La demande d’enregistrement de la Marque a été produite le 23 août 2017, fondée sur l’emploi de la Marque au Canada depuis au moins aussi tôt que le 20 avril 2017, et a une date de priorité du 28 avril 2017, fondée sur une demande produite en Jamaïque en liaison avec le même type de produits et services.

[5] La demande a été annoncée aux fins d’opposition le 24 avril 2019. De nombreuses modifications à la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, ch T-13 (la Loi), sont entrées en vigueur le 17 juin 2019. Conformément à l’article 70 de la Loi, les motifs d’opposition seront évalués sur le fondement de la Loi dans sa version antérieure au 17 juin 2019.

[6] Le 23 octobre 2019, l’Opposante s’est opposée à la demande en produisant une déclaration d’opposition en vertu de l’article 38 de la Loi.

[7] Les motifs d’opposition sont fondés sur la non-conformité aux articles 30a), 30b) et 30i) de la Loi; la non-enregistrabilité en vertu des articles 12(1)b) et 12(1)c) de la Loi; et l’absence de caractère distinctif en vertu de l’article 2 de la Loi.

[8] La Requérante a produit une contre-déclaration réfutant les motifs d’opposition.

[9] À l’appui de son opposition, l’Opposant a produit l’affidavit de L. Jane Sarjeant, daté du 28 août 2020 (l’affidavit Sarjeant). Mme Sarjeant a été contre-interrogée au sujet de son affidavit et la transcription a été versée au dossier.

[10] À l’appui de sa demande, la Requérante a produit des copies certifiées de trois enregistrements et l’affidavit de Delina Lam, daté du 10 juin 2021 (l’affidavit Lam).

[11] Seule la Requérante a déposé des observations écrites, mais les deux parties étaient représentées à l’audience.

Aperçu de la preuve de l’Opposant

Affidavit Sarjeant

[12] Mme Sarjeant est employée par Bereskin & Parr LLP, l’agent au dossier de l’Opposant au moment où l’Opposant a présenté sa preuve [para 1]. En août 2020, Mme Sarjeant a été chargée d’effectuer diverses recherches sur Internet [para 2 à 9]. Par conséquent, des imprimés des résultats suivants sont joints à son affidavit :

  • · Pièce A : décisions de refus et d’appel rendues par l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) à l’égard de la demande d’enregistrement no 01575592 en Union européenne pour LIVEPHOTOS, obtenues sur le site Web euipo.europa.eu;

  • · Pièce B : définitions des termes LIVE, LIFE, PHOTOGRAPH et KIT, obtenues sur le site Web merriam-webster.com;

  • · Pièce C : imprimés de 54 pages Web Mme Sarjeant a visitées le 14 août 2020, par suite d’une demande, qui semblent principalement être des sites Web de tiers, mais comprennent des imprimés du site Web de la Requérante, apple.com. Mme Sarjeant n’explique pas l’importance de ces imprimés, mais elle indique qu’elle a souligné certains passages [traduction] « relatifs au terme LIVE PHOTOS » [para 4];

  • · Pièce D : imprimés de la demande de brevet américaine no 62243848 produite le 20 octobre 2015 par la Requérante, obtenus sur le site appft.uspto.gov;

  • · Pièces E1 et E2 : la première page des résultats de recherche pour les mots « live photos review » obtenus à partir du moteur de recherche Google, et des imprimés des 10 pages Web reflétés dans les résultats de recherche;

  • · Pièces F1 et F2 : la première page des résultats de recherche pour les mots « live photos kits review », obtenus à partir du moteur de recherche Google, et des imprimés des 10 pages Web reflétés dans les résultats de recherche;

  • · Pièce G : capture d’écran d’une vidéo de 2015 intitulée « Apple Announces Live Photos », obtenue sur youtube.com, ainsi qu’une transcription de la vidéo préparée par Mme Sarjeant;

  • · Pièce H : imprimés de 13 autres pages Web de tiers qu’on a chargé Mme Sarjeant de visiter le 27 août 2020;

  • · Pièce I : imprimés de guides d’utilisateur de deux téléphones mobiles de marque ZTE et d’une tablette de marque INSIGNIAFLEX.

[13] Je note que Mme Sarjeant ne fait aucune déclaration quant aux actes de procédure de l’Opposant. Lors de son contre-interrogatoire, elle a confirmé qu’elle n’a ni lu, ni examiné toutes les pages Web produites en preuve [Q48] et qu’elle ne disposait d’aucun renseignement sur le nombre de Canadiens qui auraient visité ces pages Web [Q59]. Outre le soulignement susmentionné, elle laisse les imprimés produits en preuve parler d’eux-mêmes.

Aperçu de la preuve de la Requérante

Affidavit Lam

[14] Mme Lam est une assistante judiciaire employée par l’agent au dossier de la Requérante [para 1]. Entre avril et juin 2021, Mme Lam a été chargée d’effectuer diverses recherches sur Internet [para 2 à 12]. Par conséquent, des imprimés des résultats suivants sont joints à son affidavit :

  • · Pièces A et B : la première page des résultats de recherche pour le terme « LivePhotosKit », obtenus à partir du moteur de recherche Google, et des imprimés de la première de chacun de ces résultats de recherche;

  • · Pièces C et D : la première page des résultats de recherche pour le terme « LivePhotosKit », obtenus à partir du moteur de recherche Google, et des imprimés de la première de chacun de ces résultats de recherche;

  • · Pièces E et F : imprimés de quatre dictionnaires en ligne n’indiquant aucun résultat pour les termes « livephotos » et « livephotoskit »;

  • · Pièce G : résultats de recherche pour « LivePhotosKit », obtenus dans la base de données de l’EUIPO, indiquant deux résultats comprenant le nom de la Requérante;

  • · Pièce H : imprimés de deux enregistrements figurant dans la base de données de l’EUIPO et liés à la marque de commerce LivePhotosKit de la Requérante.

[15] Encore une fois, je note que Mme Lam ne fait aucune déclaration de fond quant aux actes de procédure de l’Opposant, mais qu’elle laisse plutôt les pièces parler d’elles-mêmes.

Copies certifiées

[16] La Requérante a fourni des copies certifiées de ses enregistrements canadiens pour les marques de commerce LIVETYPE (LMC646444), LIVE LISTEN (LMC1003358) et LIVE TITLES (LMC1067498).

Fardeau de preuve et fardeau ultime

[17] Conformément aux règles de preuve habituelles, l’Opposant a le fardeau de prouver les faits sur lesquels il appuie les allégations formulées dans sa déclaration d’opposition [John Labatt Ltd c Molson Companies Ltd, 1990 CarswellNat 1053 (CF 1re inst)]. L’imposition d’un fardeau de preuve à l’Opposant à l’égard d’une question donnée signifie que, pour que cette question soit examinée, il doit exister une preuve suffisante pour permettre de conclure raisonnablement à l’existence des faits allégués à l’appui de cette question.

[18] En ce qui concerne les allégations à l’égard desquelles l’Opposant s’est acquitté de son fardeau de preuve, la Requérante a le fardeau ultime de démontrer que la demande ne contrevient pas aux dispositions de la Loi, tel qu’il est allégué dans la déclaration d’opposition. L’imposition d’un fardeau ultime à la Requérante signifie que, s’il est impossible d’arriver à une conclusion déterminante une fois que l’ensemble de la preuve a été examinée, la question doit être tranchée à l’encontre de la Requérante.

[19] En l’absence d’observations écrites, je note que, à l’audience, l’Opposant s’est concentré sur les motifs fondés sur les articles 12(1)b) et 2 de la Loi. Néanmoins, je vais examiner tour à tour chacun des motifs invoqués.

Motif fondé sur l’article 30a) – produits décrits dans des termes ordinaires du commerce

[20] Conformément à l’article 38(2)a) de la Loi, l’Opposant fait valoir que la demande n’est pas conforme aux exigences de l’article 30a) de la Loi parce que les produits et services visés par la demande i) ne sont pas énoncés dans des termes ordinaires du commerce et ii) ne sont pas énoncés d’une manière qui identifie le produit ou service en liaison avec lequel la Marque a été employée.

[21] La date pertinente pour ce motif est la date de production de la demande.

[22] Le fardeau initial imposé à un opposant en vertu de l’article 30a) est léger et l’opposant peut s’en acquitter essentiellement par argumentation seulement [voir McDonald’s Corp c MA Comacho-Saldana International Trading Ltd, 1984 CarswellNat 1074 (COMC), et Pro Image Sportswear Inc c Pro Image Inc, 1999 CarswellNat 1487 (COMC)].

[23] L’article 30a) de la Loi prévoyait ce qui suit :

30 Quiconque sollicite l’enregistrement d’une marque de commerce produit au bureau du registraire une demande renfermant :

a) un état, dressé dans les termes ordinaires du commerce, des produits ou services spécifiques en liaison avec lesquels la marque a été employée ou sera employée.

[24] Par conséquent, un motif d’opposition fondé sur l’article 30a) de la Loi, tel que celui en l’espèce, comporte deux questions : premièrement, celle de savoir si l’état déclaratif des produits est dressé dans des termes ordinaires du commerce, et, deuxièmement, celle de savoir s’il désigne valablement les produits spécifiques [Whirlpool SA c Eurotherm Holdings Limited, 2010 COMC 171].

[25] Toutefois, en l’absence d’observations de la part de l’Opposant et étant donné qu’aucun élément de preuve ne semble viser ce motif, je conclus que l’Opposant ne s’est pas acquitté de son fardeau initial.

[26] Par conséquent, le motif d’opposition fondé sur l’article 30a) de la Loi est rejeté.

Motif fondé sur l’article 30b) – non-conformité

[27] Conformément à l’alinéa 38(2)a) de la Loi, l’Opposant fait valoir que la demande n’est pas conforme aux exigences de l’article 30b) de la Loi parce que la Requérante n’avait pas employé la Marque au Canada depuis la date de premier emploi revendiquée, soit le 20 avril 2017, pour les raisons suivantes :

  • · la Requérante n’a pas employé la Marque à une date pertinente comme « marque de commerce » au sens de l’article 2 de la Loi;

  • · la Requérante n’a pas « employé » la Marque à une date pertinente en liaison avec l’un ou l’autre des produits ou services visés par la demande au sens de l’article 4 de la Loi.

[28] Encore une fois, aucun élément de preuve ne semble clairement viser ce motif et, en l’absence d’observations de la part de l’Opposant, je conclus que l’Opposant ne s’est pas acquitté de son fardeau initial.

[29] Par conséquent, le motif d’opposition fondé sur la non-conformité en vertu de l’article 30b) de la Loi est rejeté.

Motif fondé sur l’article 30i) – non-conformité

[30] Conformément à l’article 38(2)a) de la Loi sur les marques de commerce, l’Opposant fait valoir que la demande n’est pas conforme aux exigences de l’article 30i) de la Loi parce que la Requérante n’aurait pas pu être convaincue, à la date de la production de la demande ou à une autre date pertinente, qu’elle avait le droit d’employer la Marque au Canada en liaison avec les produits ou services décrits dans la demande pour les raisons suivantes :

  • · la demande a été produite de mauvaise foi;

  • · la demande a été présentée en violation d’une loi fédérale, à savoir l’article 34 de la Loi sur les marques de commerce.

[31] En particulier, l’Opposant fait valoir que la Requérante a déclaré avoir le droit de revendiquer, en vertu de l’article 34 de la Loi, la date de production du 28 avril 2017 de la demande jamaïcaine no 72385 à titre de date de production réputée de la demande canadienne, mais, à toute date pertinente, la Requérante n’était pas une citoyenne ou une ressortissante de la Jamaïque, n’y était pas domiciliée et n’y avait pas d’établissement industriel ou commercial effectif et sérieux; par conséquent, la Requérante n’avait pas le droit de revendiquer une priorité sur le fondement de cette demande jamaïcaine.

[32] Étant donné qu’il n’y aucune preuve à l’appui de ce motif, l’Opposant ne s’est pas acquitté de son fardeau initial. Par conséquent, le motif d’opposition fondé sur la non-conformité en vertu de l’article 30i) de la Loi est rejeté.

Motif fondé sur l’article 12(1)b) – description claire ou description fausse et trompeuse

[33] Conformément à l’article 38(2)b) de la Loi, l’Opposant fait valoir que la Marque n’est pas enregistrable parce que, contrairement à l’article 12(1)b) de la Loi, elle donne une description claire ou donne une description fausse et trompeuse de la nature ou de la qualité d’un, de plusieurs ou de l’ensemble des produits et services visés par la demande pour les raisons suivantes :

  • · « LivePhotosKit » est le nom ou le titre des produits [traduction] « logiciels » et des services visés par la demande, et est le moyen le plus sûr de les identifier;

  • · « LivePhotosKit » donne une description claire (ou donne une description fausse et trompeuse) de la fonction des produits [traduction] « logiciels » visés par la demande et que ces logiciels font partie d’un « kit ». En particulier, le terme « live photos » est couramment employé dans le commerce ou par le public pour renvoyer à des photographies ou aux logiciels liés à ces photographies, qui créent une impression de mouvement ou d’être [traduction] « vivant ». La Marque donne donc une description claire portant que les produits et services sont liés à un ensemble de logiciels destinés à créer ou à donner vie à des photos par le mouvement;

  • · « LivePhotosKit » donne une description claire (ou donne une description fausse et trompeuse) de la nature des produits et des services visés par la demande, en ce sens qu’ils se rapportent à un « kit » de « live photos » pour les raisons susmentionnées.

[34] L’Opposant fait également valoir que la Requérante n’a pas employé la Marque au Canada au point d’être devenue distinctive à la date de production de la demande, soit le 23 août 2017, ou à la date de priorité revendiquée, soit le 28 avril 2017.

[35] Je note que les actes de procédure de l’Opposant relatifs aux articles 12(1)b), 12(1)c) et 2 de la Loi sont liés, dans la mesure où la position de l’Opposant comprend son point de vue selon lequel « live photos » est un terme couramment employé dans le commerce pour identifier un type de photographie, et que « kit » décrit une collection de logiciels liés à de telles photographies.

[36] La date pertinente pour un motif d’opposition fondé sur l’article 12(1)b) de la Loi est la date de production de la demande, soit le 23 août 2017 en l’espèce.

[37] L’article 12(1)b) de la Loi prévoit ce qui suit :

12(1) Sous réserve du paragraphe (2), la marque de commerce est enregistrable sauf dans l’un ou l’autre des cas suivants :

[…]

b) qu’elle soit sous forme graphique, écrite ou sonore, elle donne une description claire ou donne une description fausse et trompeuse, en langue française ou anglaise, de la nature ou de la qualité des produits ou services en liaison avec lesquels elle est employée, ou en liaison avec lesquels on projette de l’employer, ou des conditions de leur production, ou des personnes qui les produisent, ou de leur lieu d’origine.

[38] L’interdiction prévue à l’article 12(1)b) de la Loi vise à empêcher un commerçant unique de monopoliser un terme qui donne une description claire ou qui est couramment employé dans le commerce, et de placer ainsi des commerçants légitimes dans une position désavantageuse [Canadian Parking Equipment c Canada (Registraire des marques de commerce), 1990 CarswellNat 834 (CF 1re inst)].

[39] La question de savoir si une marque de commerce donne une description claire ou une description fausse et trompeuse doit être examinée du point de vue de l’acheteur moyen des produits et services liés. La « nature » s’entend d’une particularité, d’un trait ou d’une caractéristique des produits ou services, et « claire » signifie qu’elle est facile à comprendre, évidente ou simple [Drackett Co of Canada c American Home Products Corp, 1968 CarswellNat 9 (C de l’É)]. Il ne faut pas scruter séparément chacun des éléments constitutifs de la marque de commerce et l’analyser dans ses moindres détails, mais la considérer dans son ensemble sous l’angle de la première impression [voir Wool Bureau of Canada Ltd c Canada (Registraire des marques de commerce) (1978), 40 CPR (2d) 25 (CF 1re inst), à la p. 27; Promotions Atlantiques Inc c Canada (Registraire des marques de commerce) (1984), 2 CPR (3d) 183 (CF 1re inst), à la p. 186; Biofert Manufacturing Inc c Agrisol Manufacturing Inc, 2020 CF 379, au para 183]. En d’autres termes, la marque de commerce ne doit pas être examinée de façon isolée, mais plutôt dans le contexte de sa relation avec les produits et services [Conseil du régime de retraite des enseignantes et des enseignants de l’Ontario c Canada (Procureur général), 2012 CAF 60]. Enfin, il faut user de bon sens lorsqu’il s’agit de juger du caractère descriptif [Neptune SA c Canada (Procureur général), 2003 CFPI 715 (CF 1re inst)].

[40] Pour qu’une marque de commerce soit considérée comme donnant une description fausse et trompeuse, elle doit tromper le public quant à la nature ou à la qualité des produits ou services. La marque de commerce doit être considérée comme donnant une description portant à penser que les produits ou services sont quelque chose qu’ils ne sont pas, ou qu’ils contiennent quelque chose qu’ils ne contiennent en fait pas. L’interdiction relative aux marques de commerce qui donnent une description fausse et trompeuse vise à empêcher que le public ne soit induit en erreur [Promotions Atlantiques Inc c Canada (Registraire des marques de commerce), 1984 CarswellNat 831 (CF 1re inst)]; et Provenzano c Canada (Registraire des marques de commerce), 1977 CarswellNat 676 (CF 1re inst)].

[41] Enfin, un opposant peu s’acquitter de son fardeau de preuve initial en renvoyant au sens ordinaire des mots de la marque de commerce d’un requérant [Unilever Canada Inc c Coty Germany GmbH, 2019 COMC 50, au para 10].

[42] À l’audience, l’Opposant a soutenu que les éléments constitutifs de la Marque sont descriptifs et conservent, ensemble, leur sens descriptif. À cet égard, l’Opposant a soutenu que LIVE PHOTOS est un terme couramment employé dans le commerce pour désigner des photographies qui créent une impression de mouvement, et que KIT est un terme générique désignant une collection (en l’espèce, une collection d’outils logiciels pour la création ou la manipulation de « live photos »).

[43] Dans une certaine mesure, l’Opposant semble s’appuyer sur des définitions de « LIVE », de « PHOTO » et de « KIT » du dictionnaire Merriam-Webster, tel qu’elles figurent sur les divers imprimés de sites Web inclus à la Pièce C de l’affidavit Sarjeant. Ces définitions indiquent notamment que PHOTO est un synonyme de « photograph » et comprennent, entre autres, les définitions suivantes de « live » et de « kit » :

[traduction]

Live (adjectif) :

être en vie; existant dans les faits ou dans la réalité; être exploitée; être plein de vie : vif(ve); d’intérêt continu ou actuel; lié à une présentation ou participer à une présentation (comme une pièce ou un concert); radiodiffusion directe au moment de la production; non imaginaire, existe réellement.

Kit (nom) :

une collection d’articles habituellement destinés à un usage personnel; un ensemble d’outils ou d’instruments; une collection emballée de matériel connexe; un groupe de personnes ou de choses – habituellement utilisé dans la phrase « tout l’ensemble ».

[44] Bien que ce document n’ait pas été produit en preuve, à l’audience, l’Opposant a également renvoyé à la section 2.4.7.2.4 du Manuel d’examen des marques de commerce, « Trousses, paniers-cadeaux et autres articles vendus en bloc », qui désigne un « kit » comme des articles vendus en bloc.

[45] L’Opposant a également renvoyé à des décisions de l’EUIPO concernant une demande d’enregistrement de la marque nominale LIVE PHOTOS par la Requérante [affidavit Sarjeant, Pièce A]. L’EUIPO a rejeté la demande de l’Opposant au motif que « LIVE PHOTOS » donnait une indication descriptive, concluant également qu’il n’y avait aucune preuve claire et concluante du caractère distinctif acquis. Je note que ces décisions ne portaient pas sur la Marque en cause en l’espèce. Quoi qu’il en soit, je note également que le registraire n’est pas lié par les décisions étrangères de l’EUIPO et de l’United States Patent and Trademark Office (USPTO) invoquées par les parties et discutées à l’audience.

[46] La position de l’Opposant selon laquelle la Marque donne une description claire d’une trousse de logiciel pour « live photos » semble reposer sur une conclusion selon laquelle « live photos » est un terme couramment employé dans le commerce, lequel décrit un type de photographie, comme une [traduction] « photographie en couleurs » ou une [traduction] « photographie numérique ». De plus, les observations de l’Opposant semblaient reposer sur une correspondance entre le terme « living photo » et le terme « live photo ».

[47] En particulier, à l’audience, l’Opposant a attiré l’attention sur un article non daté intitulé « The History of Cinemagraphs Includes David Bowie » et provenant du site Web blog.flixel.com d’un tiers (compris dans les imprimés de sites Web à la Pièce C de l’affidavit Sarjeant). À l’audience, en partie, l’Opposant a souligné le passage suivant de l’article, qui, comme il l’a prétendu, indiquerait que « live photos » existe depuis au moins aussi tôt que 2011 :

[traduction]

C’est-à-dire jusqu’en 2011, lorsque deux artistes se sont unis pour produire ce qui est finalement devenu la première photo vivante connue : un tout nouveau média visuel, qui obtiendrait dorénavant le titre familier de cinémagraphe. Aujourd’hui, seulement quelques années plus tard, les cinémagraphes prennent de l’ampleur et attirent des adaptes de toutes les disciplines, alors que le nouvel attrait de ce format novateur gagne de plus en plus d’appui. En ce moment même, nous en sommes à un point critique de la courte histoire du cinémagraphe […] »

[48] Comme il est indiqué dans l’article, l’auteur a l’intention de répondre à la question [traduction] « Qu’est-ce qu’un paragraphe de cinéma? », et l’auteur suggère qu’il y a une réponse facilement accessible à la question, à savoir les suivantes : [traduction] « [l]es cinémagraphes sont comme, je ne sais pas, des GIF haute définition » et [traduction] « [l]es cinémagraphes sont comme, je ne sais pas, des photos en mouvement. Ils sont dynamiques – certains éléments de la composition semblent prendre vie ». L’auteur associe les cinématographes à divers termes, y compris « animated pictures » et « living photos », et les compare à quelque chose semblable à [traduction] « Poudlard » dans le [traduction] « monde d’Harry Potter ». L’Opposant a assimilé ces descriptions à la caractéristique de l’application LIVE PHOTOS de la Requérante et au type de photographies produites par l’application logicielle de la Requérante.

[49] Toutefois, l’article lui-même comporte également une sous-section intitulée « Cinemagraphs vs. Live Photos » et compare les cinémagraphes à la [traduction] « fonction Live Photos d’iOS » de la Requérante. Étant donné la nature familière de l’article, il n’est pas clair dans quelle mesure l’auteur distingue les deux. Quoi qu’il en soit, comme pour la majorité de la preuve de l’Opposant, l’article constitue du ouï-dire et, au mieux, il n’est pas clair quelle est sa pertinence à l’égard des actes de procédure en cause. Je note toutefois que l’article lui-même ne semble pas employer le terme LIVE PHOTOS de façon générale. Il semble plutôt attribuer le terme à la Requérante.

[50] En effet, dans ses observations, la Requérante a critiqué beaucoup, voire la totalité des pages Web produites en preuve dans l’affidavit Sarjeant au motif qu’il s’agit de ouï-dire, soutenant que l’Opposant ne s’est pas acquitté pas de son fardeau initial à l’égard de chaque motif invoqué [observations écrites de la Requérante, au para 7]. De plus, et quoi qu’il en soit, conformément au tableau à l’annexe A de ses observations écrites, la Requérante a examiné chacun des articles produits, notant le [traduction] « manque de valeur à accorder » aux pièces, ventilées selon si l’article ou l’imprimé : i) contient l’expression « Live Photo(s) »; ii) contient l’expression « LivePhotosKit », iii) renvoie à « Live Photo(s) » en tant que produit de la Requérante; iv) est postérieur à la date pertinente.

[51] À l’audience, la Requérante a soutenu que, si l’on considère que les documents produits en preuve renvoient aux produits de la Requérante, l’affidavit [traduction] « n’équivaut à rien ». Bref, même si l’affidavit Sarjeant n’est pas rejeté dans son intégralité pour motif de ouï-dire, la Requérante soutient qu’au mieux, il n’est pas clair quelles conclusions devraient être tirées des diverses pièces [traduction] « choisies soigneusement » dans l’affidavit Sarjeant.

[52] Quoi qu’il en soit, la Requérante a soutenu que, dans la mesure où on pouvait en déduire que le consommateur canadien moyen aurait pu trouver n’importe lequel de ces articles, il semblerait que « living photos » ou [traduction] « cinémagraphes » soient plus susceptibles d’être le terme générique ou approprié applicable.

[53] En revanche, la Requérante soutient que le mot « live » n’a aucun sens descriptif ordinaire en ce qui a trait aux produits et services de logiciels visés par la demande [observations écrites de la Requérante, au para 22]. Elle soutient également qu’en ce qui concerne les photographies, la Marque est tout au plus suggestive parce que [traduction] « [LIVE] est un emploi absurde et ludique du mot » et que la Marque [traduction] « est amusante parce que les photographies ne sont pas réellement vivantes » [para 24].

[54] En tant que caractéristique de logiciels de la Requérante, la Requérante soutient que l’idée suggérée par LIVE PHOTOS, comme première impression, pourrait comprendre [traduction] « beaucoup de choses », notamment : un logiciel pour créer des photographies plus vives que les photos habituelles; des photographies qui peuvent être envoyées simultanément à des tiers, comme de la [traduction] « diffusion en direct »; des photographies présentant une certaine forme de fonctionnalité tridimensionnelle qui les fait sembler [traduction] « vivantes »; ou des photographies ayant une durée de vie déterminée, de sorte qu’elles peuvent [traduction] « vieillir, mourir et disparaître » (ou être supprimées) au fil du temps [para 25]. Cet argument est compatible avec de nombreuses définitions de « live » qui figurent dans les définitions de dictionnaire produites en preuve dans l’affidavit Sarjeant.

[55] En effet, même dans le contexte des produits et services visés par la demande, je suis d’accord avec la Requérante que la première impression créée par « LIVE PHOTOS » est en quelque sorte un non-sens, puisqu’une photographie, par définition, ne peut pas être « live » en soi. À mon avis, ce n’est qu’avec une explication de l’effet photographique final que la ou les définitions de « live » privilégiées par l’Opposant pourraient s’appliquer aux logiciels de la Requérante et aux photographies produites; il ne s’agit donc pas d’une première impression ou d’une impression immédiate.

[56] À l’audience, la Requérante a également fait remarquer qu’il faut considérer la marque de commerce dans son ensemble, et non scruter séparément chacun de ses éléments constitutifs. Elle a fait remarquer qu’aucune des définitions de KIT ou de KITS ne s’applique aux logiciels en soi, ou à l’un ou l’autre des produits et services visés par la demande. En effet, l’Opposant a admis que rien dans la preuve ne démontre que KIT est un terme couramment employé à l’égard de logiciels.

[57] Compte tenu de ce qui précède, même si j’acceptais que l’Opposant se soit acquitté de son fardeau initial de façon constructive, à la lumière des définitions de dictionnaire produites en preuve, je conclus que la Requérante s’est acquittée de son fardeau ultime de démontrer que la Marque ne contrevient pas à l’article 12(1)b) de la Loi.

[58] Par conséquent, le motif d’opposition fondé sur l’article 12(1)b) de la Loi est rejeté.

Motif fondé sur l’article 12(1)c) – nom des produits

[59] Conformément à l’article 38(2)b) de la Loi, l’Opposant fait valoir que la Marque n’est pas enregistrable parce que, contrairement à l’article 12(1)c) de la Loi, la Marque est le nom, en anglais, des produits et services en liaison avec lesquels elle est prétendument employée, c’est-à-dire que « LivePhotosKit » est le nom des [traduction] « logiciels » de la Requérante et des services connexes.

[60] La date pertinente pour ce motif est la date de la présente décision [Park Avenue Furniture Corp c Wickes/Simmons Bedding Ltd (1991), 37 CPR (3d) 413 (CAF), à la p. 424].

[61] Je suis d’accord avec la Requérante que l’Opposant ne s’est pas acquitté de son fardeau initial de remettre en question le fait que la Marque est comprise comme étant le nom des produits ou services visés par la demande. À cet égard, comme l’a noté la Requérante dans ses observations écrites, il n’y a aucune preuve d’emploi général de la Marque ni aucune preuve qu’un tiers emploie la Marque [para 51 et 52]. De plus, je suis d’accord avec l’évaluation de la preuve par la Requérante selon laquelle les renvois à la Marque dans la preuve sont en fait des renvois aux produits et services de la Requérante [para 52, renvoyant à l’affidavit Lam, aux para 3 et 4, Pièce A].

[62] Par conséquent, le motif d’opposition fondé sur l’article 12(1)c) de la Loi est rejeté.

Motif fondé sur l’article 2 – absence de caractère distinctif

[63] Conformément à l’article 38(2)d) de la Loi, l’Opposant fait valoir que la Marque ne distingue pas la Requérante au sens du terme « distinctive », tel qu’il est défini à l’article 2 de la Loi, parce que, à la date pertinente :

  • · la Requérante n’avait pas employé la Marque dans une telle mesure qu’elle avait acquis un caractère distinctif, et la Marque ne possède pas un caractère distinctif inhérent (premier volet);

  • · le terme « LivePhotosKit » est le nom des produits et services visés par la demande (deuxième volet);

  • · la Marque est, ou a toujours été, un terme générique se rapportant aux produits et services visés par la demande (troisième volet).

[64] En ce qui concerne le premier volet, l’Opposant fait également valoir que la Marque ne possède aucun caractère distinctif inhérent parce que : i) le terme « LivePhotosKit » ne distingue pas véritablement les produits et services de la Requérante en liaison avec lesquels il est prétendument employé des produits et services d’autres personnes au Canada, et n’est pas adapté à les distinguer, puisque le terme « live photos » est couramment employé dans le commerce ou par le public pour désigner des photographies ou des logiciels liés à ces photographies qui créent une impression de mouvement, et que le terme « kit » est couramment employé dans le commerce ou par le public pour désigner un ensemble de choses utilisées à des fins particulières ou dans une activité donnée, de sorte que le terme « LivePhotosKit » serait compris par le commerce ou le public comme étant un ensemble de logiciels utilisés pour créer ou donner vie à des photos par le mouvement, ou des services connexes; ii) le terme « LivePhotosKit » décrit la nature des produits et services visés par la demande; et iii) en raison de sa nature descriptive, le terme « LivePhotosKit » est descriptif en lui-même, car il s’agit du seul moyen d’identifier les produits [traduction] « logiciels » et les services visés par la demande, et le terme « LivePhotosKit » ne sera ni employé ni perçu comme une marque de commerce, car il décrit les produits [traduction] « logiciels » et les services visés par la demande.

[65] La date pertinente pour ce motif est la date de production de l’opposition, soit le 23 octobre 2019 [Metro-Goldwyn-Mayer Inc c Stargate Connections Inc, 2004 CF 1185].

[66] L’article 2 de la Loi, dans sa version antérieure, définit le terme « distinctif » comme suit :

distinctive Relativement à une marque de commerce, celle qui distingue véritablement les produits ou services en liaison avec lesquels elle est employée par son propriétaire, des produits ou services d’autres propriétaires, ou qui est adaptée à les distinguer ainsi.

[67] Une marque de commerce « distingue véritablement » en acquérant un caractère distinctif par l’emploi, ce qui donne lieu à un caractère distinctif en fait. D’autre part, une marque de commerce qui est « adaptée à les distinguer ainsi » est une marque qui ne dépend pas de l’emploi pour acquérir son caractère distinctif parce qu’elle possède un caractère distinctif inhérent [voir Astrazeneca AB c Novopharm Ltd, 2003 CAF 57, au para 16].

[68] Comme il a été noté ci-dessus, il y a un chevauchement entre les actes de procédure et les arguments de l’Opposant relatifs à ce motif et ceux relatifs aux motifs fondés sur les articles 12(1)b) et 12(1)c) de la Loi.

[69] Par conséquent, en ce qui concerne les deuxième et troisième volets, je suis d’accord avec la Requérante que l’Opposant ne s’est pas acquitté de son fardeau initial de démontrer que la Marque (ou « live photos kit ») est le nom des produits et services visés par la demande ou qu’il s’agit d’un terme générique désignant ces produits et services, peu importe la date pertinente dont il faut tenir compte.

[70] De même, en ce qui concerne le premier volet de ce motif, je suis d’accord avec la Requérante que la preuve n’établit pas qu’avant la date pertinente, le terme LIVE PHOTOS était couramment employé dans le commerce ou par le public pour désigner des photographies (ou des logiciels liés à ces photographies) qui créent une impression de mouvement ou d’être « live » [vivantes]. Même en accordant un certain poids aux pièces dans l’affidavit Sarjeant, je ne considère pas que la preuve démontre que LIVE PHOTOS est un terme ordinaire ou approprié dans le commerce pour désigner un type de photographie (par exemple, comme une [traduction] « photographie numérique » ou une [traduction] « photographie en couleurs »), ou que la Marque dans son ensemble donne une description claire des produits et services visés par la demande.

[71] Étant donné que l’Opposant ne s’est pas acquitté de son fardeau initial à cet égard, le premier volet de ce motif est également rejeté.

[72] Compte tenu de ce qui précède, le motif d’opposition fondé sur l’absence de caractère distinctif est rejeté.

Décision

[73] Compte tenu de tout ce qui précède, conformément à l’article 38(12) de la Loi et dans l’exercice des pouvoirs qui m’ont été délégués en vertu des dispositions de l’article 63(3) de la Loi, je rejette l’opposition.

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Andrew Bene

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

Traduction certifiée conforme

Anne Laberge, trad. a.

Le français est conforme aux WCAG.


Comparutions et agents inscrits au dossier

DATE DE L’AUDIENCE : 2022-12-05

COMPARUTIONS

Pour l’Opposant : Gang Cao

Pour la Requérante : Antonio Turco

AGENTS AU DOSSIER

Pour l’Opposant : Aucun agent nommé

Pour la Requérante : CPST Intellectual Property Inc.

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