Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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Office de la propriété intellectuelle du Canada

LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

Référence : 2023 COMC 054

Date de la décision : 2023-03-28

DANS L’AFFAIRE D’UNE OPPOSITION

Opposante : A&W Trade Marks Limited Partnership

Requérante : Fromages La Chaudière Inc.

Demande : 1,893,071 pour MENOUM!

Introduction

[1] A&W Trade Marks Limited Partnership (l’Opposante) s’oppose à l’enregistrement de la marque de commerce MENOUM! (la Marque) faisant l’objet de la demande no 1,893,071 au nom de Fromages La Chaudière Inc. (la Requérante), en liaison avec le produit suivant : « Fromage ».

[2] L’Opposante s’oppose à la demande pour divers motifs, y compris que la Marque crée de la confusion avec la marque de commerce enregistrée MENOUM MENOUM, LMC277,465 (la Marque de l’Opposante), employée au Canada par l’Opposante en liaison avec les services suivants : [traduction] « Services de restauration » (« Restaurant services »).

[3] Comme il ressortira de mon analyse, j’estime qu’il y a lieu de rejeter l’opposition.

Le Dossier

[4] La demande relative à la Marque a été produite le 11 avril 2018 fondée sur un emploi au Canada depuis mai 2013 et annoncée dans le Journal des marques de commerce aux fins d’opposition, le 1er janvier 2020.

[5] La déclaration d’opposition a été produite le 29 juin 2020 en vertu de l’article 38 de la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, ch T-13 (la Loi). Je note que la Loi a été modifiée le 17 juin 2019. Comme la demande a été annoncée après cette date, la Loi, telle que modifiée, s’applique (voir l’article 69.1 de la Loi).

[6] L’Opposante soulève les motifs d’opposition fondés sur :

  • la non-enregistrabilité de la Marque en vertu des articles 38(2)b) et 12(1)d) de la Loi;

  • l’absence de droit à l’enregistrement de la Marque en vertu des articles 38(2)c) et 16(1)a) de la Loi;

  • l’absence de caractère distinctif de la Marque en vertu des articles 38(2)d) et 2 de la Loi;

  • l’absence d’emploi et d’intention d’employer la Marque en vertu de l’article 38(2)e);

  • l’absence de droit d’employer la Marque en vertu de l’article 38(2)f) de la Loi.

[7] La Requérante a produit une contre-déclaration niant les motifs d’opposition.

[8] Au soutien de son opposition, l’Opposante a produit un affidavit de Kelly Blankstein, assermentée le 6 janvier 2021, accompagné des pièces A à U.

[9] Au soutien de sa demande, la Requérante a produit une déclaration solennelle de Michel Choquette, déclarée le 4 juin 2021, accompagnée des pièces 1 à 5.

[10] Seule l’Opposante a produit des représentations écrites. Aucune audience n’a été tenue.

Le Fardeau

[11] C’est à l’Opposante qu’appartient au départ d’établir le bien-fondé de son opposition. L’Opposante doit faire en sorte que chacun de ses motifs d’opposition soit dûment plaidé et s’acquitter du fardeau de preuve initial en établissant les faits sur lesquels elle appuie chacun de ceux-ci. Une fois ce fardeau de preuve initial rencontré, il incombe à la Requérante d’établir, selon la prépondérance des probabilités, qu’aucun de ces motifs d’opposition ne fait obstacle à l’enregistrement de la Marque [John Labatt Ltd c Molson Companies Ltd (1990), 1990 CanLII 11059, 30 CPR (3d) 293 (CF 1re inst); et Dion Neckwear Ltd c Christian Dior, SA et al (2002), 2002 CAF 29, 20 CPR (4th) 155].

Analyse

Motif d’opposition sommairement rejeté : article 38(2)e)

[12] Dans sa déclaration d’opposition, l’Opposante soumet qu’à la date de production de la demande, la Requérante n’employait pas et ne projetait pas d’employer la Marque au Canada. Cependant, l’Opposante n’a produit aucune preuve pour appuyer ce motif d’opposition. Au contraire, la preuve de la Requérante, ci-après décrite, démontre qu’elle offrait pour la vente des fromages en liaison avec la Marque.

[13] Par conséquent, le motif fondé sur l’article 38(2)e) est rejeté puisque l’Opposante ne s’est pas acquittée de son fardeau de preuve initial.

Non-enregistrabilité de la Marque en vertu de l’article 12(1)d) de la Loi

[14] L’Opposante fait valoir que la Marque n’est pas enregistrable, puisqu’elle crée de la confusion avec la Marque de l’Opposante.

[15] J’ai exercé le pouvoir discrétionnaire du registraire de consulter le registre et je confirme que l’enregistrement de l’Opposante est en règle à la date d’aujourd’hui, qui est la date pertinente pour l’évaluation d’un motif d’opposition fondé sur l’article 12(1)d) [Park Avenue Furniture Corp c Wickers/Simmons Bedding Ltd (1991), 1991 CanLII 11769, 37 CPR (3d) 413 (CAF)].

[16] L’Opposante s’étant acquittée de son fardeau de preuve, il incombe maintenant à la Requérante de convaincre le registraire, selon la prépondérance des probabilités, qu’il n’existe pas une probabilité de confusion entre les deux marques de commerce.

Le test en matière de confusion

[17] Le test en matière de confusion ne concerne pas la confusion entre les marques de commerce elles-mêmes, mais plutôt la confusion portant à croire que les produits et les services liés à chacune des marques de commerce des parties proviennent de la même source. Lorsqu’il est probable que les produits ou les services du requérant proviennent de l’opposant ou sont approuvés ou autorisés par l’opposant, il s’ensuit que les marques de commerce créent de la confusion [voir Glen-Warren Productions Ltd c Gertex Hosiery Ltd (1990), 29 CPR (3d) 7 (CF 1re inst)].

[18] Le test doit être appliqué comme une question de la première impression dans l’esprit du consommateur ordinaire plutôt pressé à la vue de la marque de commerce du requérant, alors qu’il n’a qu’un vague souvenir de la marque de commerce de l’opposant et qu’il ne s’arrête pas pour réfléchir à la question en profondeur, pas plus que pour examiner de près les ressemblances et les différences entre les marques de commerce [Veuve Clicquot Ponsardin c Boutiques Cliquot Ltée, 2006 CSC 23]. En appliquant le test, il faut tenir compte de toutes les circonstances de l’espèce, y compris celles établies aux articles 6(5)a) à e) de la Loi, mais ces critères ne sont pas exhaustifs et le poids accordé à chacun des facteurs variera dans une analyse adaptée au contexte [Mattel USA Inc c 3894207 Canada Inc, 2006 CSC 22].

Le caractère distinctif inhérent des marques de commerce et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues

[19] Selon la position de l’Opposante, la preuve n’établit pas que menoum est un mot en français ou en anglais. Partant, elle soumet que ce mot n’a pas de signification particulière pour les consommateurs et n’est pas descriptif des services offerts par l’Opposante. Ainsi, l’Opposante soutient que la Marque de l’Opposante a un caractère distinctif inhérent.

[20] Bien que le terme menoum n’apparaît pas ni dans les dictionnaires français Larousse ou Le Robert, ni dans le dictionnaire anglais Canadian Oxford Dictionary, celui-ci a une signification particulière du moins pour les francophones vivant au Québec. En effet, selon le site lalanguefrançaise.com, il existe deux définitions du mot menoum :

(Québec) (Populaire) Parler enfantin pour désigner du bon manger à un bébé ou un très jeune enfant.

(Québec) Expression exprimant la satisfaction gustative, ou dans l'expectative de goûter quelque chose de bon.

[21] Conséquemment, les marques de commerce en cause ont un caractère suggestif lorsque considérées dans le contexte des produits alimentaires de la Requérante ou des services de restauration de l’Opposante, du moins pour un francophone vivant au Québec. Pour le reste de la population canadienne, les marques ont plutôt un caractère unique étant donné l’absence de signification particulière rattachée au terme menoum en dehors du Québec.

[22] Ainsi, la Marque et la Marque de l’Opposante ont toutes deux un degré de caractère distinctif inhérent égal, quoique relativement faible lorsque les marques sont considérées du point de vue d’un consommateur québécois.

[23] Le caractère distinctif d’une marque de commerce peut être renforcé parce qu’elle est devenue connue par la promotion ou l’emploi au Canada.

[24] Cela m’amène à examiner la preuve de chacune des parties ainsi que les représentations de l’Opposante sur ce point.

Preuve de l’Opposante

[25] Mme Blankstein affirme ce qui suit dans son affidavit concernant la Marque de l’Opposante:

  • Elle est la [traduction] « directrice financière » (« Chief Financial Officer ») de A&W Food Services of Canada Inc. (A&W Food Services) et A&W Revenue Royalties Income Fund, deux entreprises faisant partie de l’ensemble des entreprises d’A&W, dont fait également partie l’Opposante [para 1].

  • Elle décrit A&W comme étant une chaîne de restauration rapide comptant plus de 900 restaurants au Canada sous la bannière A&W [para 5] et ajoute que ces restaurants sont opérés soit par des franchisés, soit par A&W Food Services [para 6].

  • Depuis au moins janvier 2009, A&W Food Services est licenciée par l’Opposante pour employer les marques de commerce lui appartenant, incluant la Marque de l’Opposante [para 13]. Les franchisés opérant des restaurants sous la bannière A&W sont aussi licenciés pour employer la Marque de l’Opposante [para 14]. Il est à noter que le déposant emploi le terme «A&W trademarks» mais en aucun temps cette expression est définie dans son affidavit. En fait, les seules marques spécifiques auxquelles fait référence le déposant sont A&W et MENOUM MENOUM.

  • L’Opposante et ses prédécesseurs en titre ont toujours contrôlé les caractéristiques ou la qualité des services et produits offerts en liaison avec la Marque de l’Opposante [para 16].

  • A&W Food Services et les franchisés ont des revenus annuels considérables au Canada, notamment plus d’un milliard de dollars par année depuis 2015 [para 18].

  • La Marque de l’Opposante a été employée au Canada depuis au moins 1981, par la distribution au Québec de coupons à des clients potentiels, ainsi que des publicités télévisées diffusées au Québec [paras 19 et 20].

[26] Mme Blankstein affirme également ce qui suit dans son affidavit concernant les activités de l’Opposante et des entreprises liées en association avec d’autres marques de commerce :

  • A&W Food Services emploie différentes marques de commerce appartenant à l’Opposante en association avec des boissons gazeuses. Tous les restaurants de la chaîne A&W vendent des emballages de quatre bouteilles de racinette, sauf dans les endroits où cela n’est pas permis [para 33]. Je note que Mme Blankstein n’identifie pas ces marques de commerce.

  • L’Opposante octroie une licence à Coca-Cola Refreshments Canada Company (Coca-Cola Canada) pour employer ses marques de commerces en association avec des boissons gazeuses en canettes et en bouteilles [para 34]. Je note que Mme Blankstein n’identifie pas ces marques de commerce. Toutefois la preuve documentaire décrite plus bas (Exhibit R à titre d’exemple) illustre l’emploi de la marque A&W.

  • Les produits vendus par Coca-Cola Canada le sont à de multiples variétés de magasins, dont des épiceries, des pharmacies et des dépanneurs [para 35]. À chaque année depuis 2008, plus de 2 millions d’emballages de boissons gazeuses sont vendues au Canada par Coca-Cola Canada [para 37] en liaison avec la maque A&W.

[27] Au soutien de son affidavit, Mme Blankstein joint les pièces pertinentes suivantes concernant la Marque de l’Opposante ainsi que les autres marques de commerce appartenant également à l’Opposante :

  • Des copies de coupons distribués au Québec par A&W Food Services en 1981 [pièce D], en 2012 [pièces F et G] et en 2013 [pièces I à K]. La Marque de l’Opposante y apparaît.

  • Une histoire dessinée d’une publicité d’A&W Food Services, qui a été jouée à la télévision dans au moins deux villes au Québec au printemps 1981. Cette histoire dessinée démontre que la Marque de l’Opposante faisait partie du visuel et de l’audio de cette publicité [pièce E].

  • Une publicité télévisée d’A&W Food Services jouée dans plusieurs villes au Québec en 2012 [pièce H]. La Marque de l’Opposante y apparaît et est mentionnée dans cette publicité.

  • Une copie d’un courriel distribué par A&W Food Services le 2 juin 2020 aux abonnés mobiles enregistrés, localisés au Québec, pour faire la promotion des services de restauration A&W [pièce L]. La Marque de l’Opposante y apparaît.

  • Des captures d’écran provenant de sites web de détaillants canadiens sur lesquels des produits provenant de Coca-Cola Canada sont à vendre, notamment les produits suivants : « A&W Root Beer® 355 ml Cans, 12 Pack », « A&W Caffeine Free Root Beer – 2L », « A&W Root Beer (Case) » [pièces P à U]. La Marque de l’Opposante n’apparaît pas sur ces captures d’écran.

  • Des captures d’écran de différents sites web où de la racinette est offerte pour la vente en liaison avecla marque A&W [Pièces P à U].

Preuve de la Requérante

[28] M. Choquette affirme ce qui suit dans sa déclaration solennelle :

  • Il est le président de la Requérante [para 1], une entreprise qui fabrique des fromages depuis 1979 [para 2].

  • Les fromages de la Requérante sont tous vendus sous des marques humoristiques [para 3], tel que SKOUIK SKOUIK!, Fou raide! et TIGUIDOU! [para 4]. J’ajouterais que ces marques ont pour origine également le langage populaire québécois.

  • Les fromages de la Requérante sont vendus aux rayons des fromages dans des épiceries, dans des restaurants et dans des dépanneurs [para 14].

[29] Au soutien de sa déclaration solennelle, M. Choquette joint la pièce pertinente suivante :

  • Une photographie de plusieurs fromages sur un présentoir qui semble être réfrigéré [pièce 4]. M. Choquette ne précise pas le lieu ni la date où cette photographie a été prise. La Marque apparaît sur certains produits.

Conclusion sur la preuve d’emploi des marques des parties

[30] Les revenus de l’Opposante et de ses franchisés ne sont pas ventilés par marque de commerce et l’Opposante est propriétaire de plusieurs marques de commerce. Il est donc difficile de déterminer avec précision la mesure dans laquelle l’une ou l’autre de ses marques est devenue connue, incluant sa marque MENOUM MENOUM. Par contre, vu le nombre de restaurants opérés sous la franchise A&W, les revenus annuels considérables de ces restaurants, ainsi que les nombreuses pièces démontrant que la Marque de l’Opposante apparaît sur différentes publicités de la Requérante, qui ont été distribuées ou diffusées au Québec, je suis prêt à conclure que la Marque de l’Opposante est devenue connue dans une certaine mesure au Canada, particulièrement dans la province de Québec.

[31] Pour ce qui est de la preuve de la Requérante, elle est beaucoup trop imprécise pour permettre de conclure que la Marque est devenue connue de manière à accroître son caractère distinctif inhérent au Canada. La pièce 4 démontre au mieux que la Requérante a offert en vente des fromages, dont l’emballage arbore la Marque. Cette preuve est insuffisante pour déterminer à quel point la Marque est devenue connue au Canada.

[32] J’estime que dans son ensemble, ce facteur favorise l’Opposante.

Degré de ressemblance entre les marques de commerce dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’elles suggèrent

[33] Le degré de ressemblance entre les marques de commerce est souvent le facteur qui aura probablement la plus grande influence sur l’analyse de la confusion et est donc un point de départ approprié [Masterpiece Inc c Alavida Lifestyles Inc, 2011 CSC 27]. Dans l’évaluation de la ressemblance entre les marques de commerce, chacune doit être considérée dans son ensemble. L’approche appropriée n’est pas de comparer chacune des caractéristiques de ces marques afin d’identifier les similarités et les différences.

[34] L'analyse de la ressemblance entre les marques ne doit pas se limiter à une seule des langues officielles du Canada. Par exemple, il ne suffit pas de démontrer qu'un anglophone unilingue ne prononcerait pas ou ne comprendrait pas les marques des parties de la même manière. Il ne doit pas y avoir de ressemblance du point de vue des trois types de consommateurs canadiens moyens : l'anglophone unilingue, le francophone unilingue et le consommateur bilingue. S'il y a une probabilité de confusion dans l'une ou l'autre des langues officielles du pays, une marque ne peut pas être enregistrée [Voir Pierre Fabre Médicament c SmithKline Beecham Corp, 2001 CAF 13 aux paras 12 à 15].

[35] L’Opposante soulève que le degré de ressemblance entre les deux marques est très élevé et que l’absence de répétition du mot MENOUM et l’ajout du point d’exclamation à la fin de la Marque ne sont pas suffisants pour distinguer la Marque de la Marque de l’Opposante.

[36] Je suis d’accord. Bien que les deux marques ne soient pas identiques, elles sont tout de même très similaires, et l’absence de répétition du mot menoum et l’ajout du point d’exclamation ne suffit pas pour les différencier aux yeux d’un consommateur.

[37] Par ailleurs, le mot MENOUM, que ce soit pour le consommateur Québécois ou de l’extérieur du Québec, suggère les mêmes idées. En effet, pour le Québécois, les marques suggèrent de la bonne nourriture dans un langage enfantin et pour le reste des canadiens, les marques n’auront aucune signification particulière.

[38] En raison de l’ensemble de ce qui précède, ce facteur favorise l’Opposante.

Période pendant laquelle les marques de commerce ont été en usage

[39] L’Opposante a démontré l’emploi de la Marque de l’Opposante depuis au moins 1981.

[40] De son côté, la Requérante n’a pas déposé de preuve d’emploi de la Marque au sens de l’article 4(1) de la Loi, tel que mentionné plus haut.

[41] Par conséquent, ce facteur favorise l’Opposante.

Genre des produits et des entreprises et nature du commerce des parties

[42] L’Opposante soumet que la Requérante et l’Opposante œuvrent toutes deux dans l’industrie alimentaire et des breuvages. Elle ajoute que les produits de l’Opposante sont vendus dans les mêmes commerces ou types de commerces que ceux de la Requérante. De plus, elle mentionne que les marques de commerce sont toutes deux employées principalement au Québec.

[43] Lorsque nous examinons le genre des produits et des entreprises et la nature du commerce sous le motif d’opposition fondé sur l’enregistrabilité de la Marque, il faut évaluer l’état déclaratif des produits dans la demande du requérant et dans l’enregistrement de l’opposant, compte tenu des voies de commercialisation normalement liées à ces produits [Mr Submarine Ltd c Amandista Investments Ltd (1987), 1987 CanLII 8953 , 19 CPR (3d) 3 (CAF); Henkel Kommanditgesellschaft auf Aktien c Super Dragon Import Export (1986), 12 CPR (3d) 110 (CAF)]. Chaque état déclaratif doit être lu dans l’optique de déterminer le type probable d’entreprise ou de commerce envisagé et non l’ensemble des commerces que le libellé est susceptible d’englober; une preuve de la nature véritable des commerces exercés par les parties est utile à cet égard [McDonald’s Corp c Coffee Hut Stores Ltd (1996), 1996 CanLII 3963, 68 CPR (3d) 168 (CAF)].

[44] En l’espèce, M. Choquette allègue que les produits de la Requérante sont vendus principalement dans des épiceries, restaurants et dépanneurs.

[45] Quant à la Marque de l’Opposante, elle est enregistrée en association avec des services de restauration. Ces services sont offerts directement dans les restaurants de l’Opposante ou ceux de ses franchisés opérés sous la bannière A&W.

[46] La preuve établit que l’Opposante, par l’entremise de licenciés, vend des boissons gazeuses en liaison avec sa marque de commerce A&W, dans plusieurs commerces, incluant ses propres restaurants. Il n’y a aucune preuve que l’Opposante vend ou commercialise des produits en liaison avec sa marque MENOUM.

[47] Compte tenu de la différence non négligeable des produits et des services des parties, ce facteur favorise la Requérante.

Conclusion concernant la probabilité de confusion

[48] Comme il est indiqué dans Dion Neckwear, précité, à la page 163, « il n’est pas nécessaire que le registraire soit convaincu hors de tout doute que la confusion est improbable. Si la norme de preuve “hors de tout doute” devait s’appliquer, les requérants seraient, dans la plupart des cas, confrontés à un fardeau insurmontable parce qu’en matière de risque de confusion, la certitude est une denrée rare ».

[49] Compte tenu de l’analyse qui précède, je conclus que la Requérante s’est acquittée du fardeau qui lui incombait de démontrer, selon la prépondérance des probabilités, qu’un consommateur ayant un souvenir imparfait de la Marque de l’Opposante ne serait pas susceptible de conclure que les produits de la Requérante visés par la demande proviennent de la même source ou sont autrement liés ou associés aux services de l’Opposante, vu principalement l’importante différence entre la nature des produits de la Requérante et la nature des services de l’Opposante.

[50] Par conséquent, le motif d’opposition fondé sur l’article 12(1)d) est rejeté.

Motif d’opposition sommairement rejeté : article 38(2)f)

[51] Dans sa déclaration d’opposition, l’Opposante soumet qu’à la date de production de la demande, la Requérante ne pouvait enregistrer la Marque, car celle-ci portait à confusion avec la Marque de l’Opposante. Elle ajoute que la Marque de l’Opposante est protégée par un droit d’usage exclusif conformément aux articles 19 et 20 de la Loi.

[52] Même en présumant que le motif d’opposition tel que libellé est un motif valide, je considère que l’Opposante ne s’est pas déchargée de son fardeau initial quant au motif sous 38(2)f) de la Loi pour les raisons suivantes :

  • L’article 19 exige l’emploi d’une marque de commerce identique, ce qui n’est pas le cas en l’espèce.

  • Pour que l’article 20 s’applique, il faut conclure à la confusion entre les marques; toutefois, j’ai conclu précédemment qu’il n’y a pas probabilité de confusion entre la Marque et la Marque de l’Opposante.

[53] Par conséquent, le motif d’opposition fondé sur l’article 38(2)f) est rejeté.

Autres motifs d’opposition

[54] Les motifs d’opposition invoqués en vertu des articles 2 et 16(1)a) de la Loi sont fondés, en tout ou en partie, sur une allégation selon laquelle il existe une probabilité de confusion entre la Marque et la Marque de l’Opposante.

[55] Le meilleur argument de l’Opposante sur la question de la confusion était le motif d’opposition prévu à l’article 12(1)d), car ce motif d’opposition avait une date pertinente qui permettait de prendre en considération tous les éléments de preuve de l’Opposante concernant sa réputation. Les motifs d’opposition fondés sur les articles 2 (29 juin 2020) et 16(1)a) (mai 2013 ou 11 avril 2018) ont des dates pertinentes antérieures.

[56] Dans ces circonstances, étant donné que l’Opposante n’a pas eu gain de cause à l’égard de son motif d’opposition fondé sur l’article 12(1)d), pour les mêmes raisons que celles exposées ci-dessus pour ce motif, les motifs d’opposition fondés sur les articles 2 et 16(1)a) de la Loi sont également rejetés.

Décision

[57] Dans l’exercice des pouvoirs qui m’ont été délégués en vertu des dispositions de l’article 63(3) de la Loi, je rejette l’opposition selon les dispositions de l’article 38(12) de la Loi.

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Jean Carrière

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada


Comparutions et agents inscrits au dossier

DATE DE L’AUDIENCE : Aucune audience tenue

AGENTS AU DOSSIER

Pour l’Opposante : GOWLING WLG (CANADA) LLP

Pour la Requérante : Aucun agent nommé

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